M. David Assouline. Vous ne pouvez pas dire cela !

M. Michel Mercier. Sauf M. Assouline, bien sûr ! (Sourires.) Permettez-moi d'ailleurs de dire ce que je veux, cher collègue.

Il est vrai que les Parisiens, comme les Lyonnais et les Marseillais, n’élisent pas tous leur maire. Mes chers collègues, puisque vous en êtes au choix des candidats, je vous conseille de faire comme les Lyonnais il y a quelques années : pour que tout le monde vote pour lui, Louis Pradel, qui est resté maire pendant près de vingt ans, avait investi ses listes d’arrondissement sous une étiquette reprenant les initiales de son nom : « Pour la Réalisation Active des Espérances Lyonnaises ». Avec les noms d’Hidalgo ou de Kosciusko-Morizet, c’est moins facile, je le reconnais ! (Sourires.) Toutefois, on pourrait imaginer sélectionner les candidats sur cette base.

Plus sérieusement, je retiendrai du débat sur le texte qui nous est soumis ce soir, l’affirmation très claire par le Conseil constitutionnel de règles nouvelles auxquelles il faut nous habituer. Ce soir, nous œuvrons pour Paris. Nous aurons l’occasion de faire de même demain, peut-être pour Marseille ou Lyon, en tout cas pour les métropoles. C’est une conception du droit qui doit entrer dans nos mœurs.

Nous devons bien être conscients des nouvelles règles du jeu : l’idée de la souveraineté absolue du Parlement en matière électorale a disparu. C’est le Conseil constitutionnel qui nous impose aujourd'hui d’adopter des dispositions pour garantir le respect de principes établis par lui. Certes, il n’est jamais facile pour des parlementaires d’admettre la perte de leur pouvoir de légiférer à leur guise. Toutefois, cette réalité ne date pas d’aujourd’hui.

M. Jacques Mézard. C’est la Ve République !

M. Michel Mercier. Ce que l’on appelle « l’État de droit » progresse chaque jour ; il n’y a plus de parlementarisme absolu. On peut s’en réjouir ou le déplorer, mais, en tout état de cause, nous avons ce soir une illustration très concrète de la situation nouvelle de notre mode de production du droit.

En adoptant la présente proposition de loi, nous entérinons une position que le Conseil constitutionnel a exprimée avec beaucoup de force. Et ce qui vaut aujourd'hui pour le tableau des conseillers de Paris vaudra, demain, pour tous les découpages électoraux. Ce sera tout de même une sacrée nouveauté dans notre pays !

Mme Cécile Cukierman. Dans ce cas, il faut vous battre à nos côtés pour la VIe République !

M. Michel Mercier. Mais non ! Je suis favorable aux pouvoirs du Conseil constitutionnel.

Mme Cécile Cukierman. Pour ma part, je suis pour le pouvoir du Parlement et du peuple !

M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari.

Mme Bariza Khiari. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, l’excellente proposition de loi que nous nous apprêtons à adopter ce soir répond à une décision du Conseil constitutionnel ayant invalidé non seulement le nouveau tableau de répartition des conseillers de Paris que la majorité proposait d’instituer, mais également la version qui figurait dans le code électoral depuis 1982, annulée pour cause de violation du principe d’égalité devant le suffrage.

Chers collègues de l’opposition, vous vous lamentez ce soir d’une invalidation que vous avez pourtant souhaitée et dont vous vous réjouissiez il n’y a pas si longtemps… Vous auriez tout de même dû vous douter qu’elle rendrait indispensables un nouveau texte et une nouvelle répartition.

Nous ne pouvons visiblement plus échapper longtemps à la réalité démographique. Nous sommes confrontés à la nécessité d’émettre rapidement de nouvelles propositions. Notre objectif n’est pas de réaliser un quelconque tripatouillage ou d’affaiblir électoralement l’opposition ; il s’agit simplement de nous conformer, notre collègue Michel Mercier vient de le rappeler, aux décisions du Conseil constitutionnel.

Je le signale d’ailleurs, le Conseil constitutionnel a censuré le tableau de répartition de 1982 en ciblant notamment les Ier, IIe et IVe arrondissements, qui, sauf erreur de ma part, sont tenus par l’opposition pour l’un d’entre eux et par la majorité pour les deux autres. Dans ces conditions, je ne vois pas bien comment l’opposition pourrait arguer d’une volonté délibérée de lui nuire. Nous sommes a priori concernés également pour deux arrondissements. Votre volonté de créer une circonscription unique me paraît un signe de fébrilité, chers collègues.

Certes, le Ier arrondissement de Paris perdra deux conseillers. Néanmoins, comme il n’est peuplé que de 17 000 habitants, il me semble difficile de légitimer le maintien de ces deux élus. D’ailleurs, le Conseil constitutionnel ne l’accepterait pas ; nous avions souhaité conserver les trois conseillers d’arrondissement dans le précédent tableau et il nous l’a interdit, considérant que nous n’allions pas assez loin dans l’adaptation aux nouvelles réalités démographiques de Paris en conservant une représentation minimale par arrondissement. Dont acte.

Dès lors, le nouveau tableau prend en compte les évolutions démographiques de Paris, les nouvelles structures de la population, et il en tire les conséquences en termes de répartition du nombre de conseillers. Pour preuve, c’est bien la méthode de calcul de 1982 qui a été employée pour aboutir au tableau actuel. La majorité ne change donc pas les règles du jeu ; elle se contente de les faire appliquer réellement.

L’organisation administrative et politique de Paris est maintenue par un texte clair, transparent et conforme au principe d’égalité devant le suffrage : il n'y a pas d’augmentation du nombre global de conseillers de Paris et pas de modification de la composition des conseils d’arrondissement, ni de leur fonctionnement.

En conséquence, le groupe socialiste votera cette proposition de loi.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. J’ai déjà indiqué que nous voterions ce texte. Toutefois, je ne suis pas d'accord avec ce qu’a affirmé Michel Mercier à la fin de son intervention.

En tant que vieux républicain, j’estime qu’il n’appartient pas au Conseil constitutionnel de faire la loi, de même qu’il n’appartient pas à la Cour de comptes de dicter la politique économique et financière de la France. Cette instance vérifie l’exactitude des comptes, et le Conseil contrôle la conformité des lois à la Constitution. Point !

Que constatons-nous ? Traditionnellement, pour établir les découpages électoraux, on tient compte de deux critères de représentation : la spécificité des territoires et la démographie. À Paris, il n’y en a qu’un qui est valable. Encore une fois, le Ier arrondissement, par rapport aux autres arrondissements, ce n’est pas la Lozère par rapport à l’Hérault ! À Paris, il n’y a pas de spécificité du Ier, du IIe, du IIIe ou du VIIIe arrondissement. Par conséquent, appliquer à Paris le critère démographique, et seulement celui-ci, n’a rien d’extraordinaire ! Ce qui est surprenant, c’est qu’on ne l’ait pas fait auparavant.

Toutefois, en conclure, comme le font certains, que, pour le Conseil constitutionnel, il n’y aurait de toute éternité qu’un seul critère valable, c’est aller vite en besogne. À mon sens, si le Conseil a dit cela, il est sorti de son rôle.

Certes, je sais bien que la « démocratie » moderne consiste à remplacer les institutions élues, et singulièrement le Parlement, par des autorités nommées… Vous m’en excuserez, ce n’est pas ma tasse de thé. Encore une fois, en tant que vieux républicain, je ne suis pas de cette tradition. (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe CRC. – MM. Pierre Charon et Marc Laménie applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.

M. Yves Pozzo di Borgo. Tout à l’heure, ma remarque a semblé vexer M. Laurent.

Le problème est qu’il y a vingt arrondissements à Paris depuis 1983 et que la plupart des Parisiens s’adressent en premier lieu à leur maire d’arrondissement. Ce n’est pas comme dans les villes de province.

Prenons l’exemple du VIIe arrondissement, dont la population est comparable à celle de Colmar ou de Cannes. À Colmar, les habitants sont informés tous les jours dans les Dernières nouvelles d’Alsace de l’actualité municipale, de la vie associative locale ou des décès. Et c’est pareil à Cannes, avec Nice-Matin.

Or vous n’avez rien de tel dans les arrondissements parisiens, qui ont pourtant aussi une actualité municipale, des associations, des mariages, des décès… Ailleurs, le journal offre, en quelque sorte, une photographie de la vie locale ; chez nous, ce n’est pas le cas.

Il est vrai que les Parisiens s’adressent d’abord à leur maire d’arrondissement. C’est pour cela que j’ai employé l’adjectif « stupide » ; je ne stigmatisais pas des personnes en particulier, ni même le système en tant que tel. Convenez-en, il est un peu stupide d’être obligé de s’adresser à quelqu’un qui n’a aucun pouvoir. Lorsqu’un maire d’arrondissement est interpellé, il répond presque toujours : « Désolé, cela relève de la compétence de la mairie centrale. » Combien de fois l’avez-vous fait vous-même, monsieur Madec, vous qui avez été maire d’arrondissement ? Dans cette fonction, vous n’avez pas le pouvoir ! C’est un problème majeur à Paris.

Aussi, notre proposition de faire élire le maire de Paris au suffrage universel direct n’est en rien contradictoire avec la volonté qui est la nôtre de renforcer les pouvoirs des maires d’arrondissement. C’est à ces derniers, bien plus qu’au maire central, que les Parisiens s’adressent d’abord. Or le maire d’arrondissement n’a pas aujourd’hui compétence pour régler les problèmes qui lui sont soumis, ou alors seulement à la marge, par exemple pour l’attribution de places en crèche ou l’inscription dans les écoles primaires.

Mes chers collègues, vous qui êtes pour la plupart maires de communes de province ou de banlieue avez des pouvoirs dont les maires d’arrondissement ne disposent pas. Je le répète, c’est cela que je voulais signifier tout à l’heure en employant l’adjectif « stupide ». Il faudra bien que cela change un jour ou l’autre : on ne peut pas se satisfaire d’un système qui ne permet pas de prendre en compte la vie des Parisiens, et encore moins de répondre à leurs besoins.

Mme Cécile Cukierman. Raison de plus pour s’opposer aux métropoles !

M. Yves Pozzo di Borgo. Voilà pourquoi je voterai contre la proposition de loi.

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi dans le texte de la commission.

(La proposition de loi est adoptée.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : proposition de loi fixant le nombre et la répartition des sièges de conseiller de Paris
 

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Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 24 juillet 2013

À quatorze heures trente :

1. Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, relative au fonctionnement des réseaux de soins créés par les mutuelles et aux modalités de mise en œuvre des conventions conclues entre les organismes de protection sociale complémentaire et les professionnels de santé (n° 172, 2012-2013) ;

Rapport de M. Yves Daudigny, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 775, 2012 2013) ;

Texte de la commission (n° 776, 2012 2013).

À vingt et une heures trente :

2. Suite éventuelle de l’ordre du jour de l’après-midi.

3. Nouvelle lecture du projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2012 (n° 799, 2012-2013) ;

Rapport de M. François Marc, fait au nom de la commission des finances (n° 800, 2012 2013).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-trois heures vingt-cinq.)

Le Directeur du Compte rendu intégral

FRANÇOISE WIART