infrastructures - rapport de la commission « mobilité 21 »

M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau.

M. Rémy Pointereau. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Jeudi dernier, la commission « Mobilité 21 », présidée par notre collègue député Philippe Duron, que vous aviez missionné pour réviser le schéma national des infrastructures de transport, a rendu son rapport.

Même si nous ne sommes pas satisfaits des préconisations et des délais de réalisation, je veux saluer les membres et le président de cette commission pour le travail qu’ils ont accompli.

Je me doute que vous allez nous redire qu’il n’était pas possible de financer les soixante-dix projets du SNIT, pour un investissement de 245 milliards d’euros sur vingt-cinq à trente ans, et que vos prédécesseurs, comme d’habitude, avaient menti et commis une erreur… (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)

M. Roland Courteau. Ce n’est que la vérité !

M. Rémy Pointereau. Je veux rappeler que l’ambition du SNIT était d’aménager pour le long terme notre pays en dotant d’infrastructures routières, ferroviaires et fluviales des territoires qui en avaient besoin, pour permettre un développement économique harmonieux allant dans le sens de l’égalité des territoires.

Il n’y avait aucune promesse sur les soixante-dix projets, ni erreur, ni mensonge, car un pays comme le nôtre doit se projeter dans l’avenir et donner des perspectives.

Une partie d’ailleurs de ces projets étaient inscrits dans les lois consécutives au Grenelle de l’environnement et avaient été votés à la quasi-unanimité au Sénat.

Ce rapport a le mérite de hiérarchiser et de prioriser les projets, mais il déçoit par son manque d’ambition et d’audace, autant dans la majorité que dans l’opposition.

On est loin de la promesse faite par le candidat Hollande de ré-enchanter le rêve français… (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)

M. Christian Cointat. En effet, on en est loin !

M. Rémy Pointereau. Monsieur le ministre, bien sûr, les finances publiques sont au plus bas ; bien sûr, cela vous oblige à faire des arbitrages ; mais, de grâce, faites-les sur le fonctionnement de l’État, et pas sur les investissements !

Nous sommes dans le renoncement, avec seulement 8 à 10 milliards d’euros de travaux d’ici à 2030 pour financer un nombre réduit de projets, alors même que la relance de la croissance passe forcément par des investissements d’avenir capables de produire de la richesse immédiatement, et surtout durablement, grâce à des financements innovants, et, pourquoi pas, un grand emprunt d’État.

Car il y a la bonne et la mauvaise dette. La mauvaise dette, c’est celle qui consiste à rembourser des dépenses de fonctionnement par l’emprunt. La bonne dette, c’est celle qui est investie dans un outil productif. Comme une entreprise, un pays qui n’investit plus, c’est un pays qui s’appauvrit et qui se meurt.

M. Jacques Legendre. Très bien !

M. Christian Cointat. Oui, très bien !

M. Rémy Pointereau. Monsieur le ministre, quel est l’avenir de ce rapport ?

Pour certains projets LGV comme l’interconnexion sud de Paris ou le Paris – Orléans - Clermont-Ferrand - Lyon, le POCL, le débat public a déjà eu lieu ; les études sont en cours et les populations attendent.

Allez-vous poursuivre les études ? Votre gouvernement est-il prêt à consacrer des moyens supplémentaires à un plan de relance des infrastructures ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - M. Jean Arthuis applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Je vous remercie, monsieur Pointereau, de faire à la fois les questions et les réponses ! (Sourires.)

M. Philippe Dallier. C’est plus simple !

M. Alain Gournac. Il le fait très bien !

M. Christian Cointat. Il est très fort !

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. Vous avez vous-même souligné le caractère irréaliste et irréalisable du schéma national des infrastructures de transport tel qu'il a été présenté.

Cette critique n’émane pas seulement de la majorité ; elle est assez largement partagée, y compris par certains de mes prédécesseurs.

Le schéma national des infrastructures de transport s’apparente en effet à une liste non hiérarchisée et non financée de soixante-dix projets, dont certains n'ont même aucune réalité, puisqu’ils en sont encore au stade des études de faisabilité.

C’est pourquoi nous voyons se tourner vers nous certains territoires qui ont cru qu’ils pourraient obtenir des infrastructures, comme cela avait été annoncé dans le SNIT.

Plus grave, certains projets, dont le coût avoisine souvent plusieurs milliards d'euros, ont été lancés en même temps, notamment quatre LGV !

Vous avez passé la commande et nous payons aujourd’hui l'addition !

Aujourd’hui, l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, devra acquitter un loyer de 200 millions sur vingt ans, simplement pour les quatre lignes dont je viens de parler.

Puisque vous avez été, monsieur Pointereau, coauteur avec M. Mézard d'un excellent rapport sur le lien entre les politiques territoriales et les infrastructures de transport, qui a été présenté ici même, vous êtes bien placé pour établir un lien avec les différentes attentes.

Pour tous les grands projets d'infrastructures, entre le temps du débat public et la réalisation, vous savez qu’il faut généralement compter un délai de vingt ans.

Or l'engagement du Président de la République, qui correspond aux attentes de la population et des élus, est aussi et surtout de pouvoir répondre aux enjeux des territoires au quotidien, en apportant des solutions à la dégradation continue des systèmes ferroviaire, routier et autoroutier, en mettant en avant la cohésion dans l'investissement et la contractualisation publics et en priorisant les enjeux.

Vous m'interrogez sur ce que nous entendons faire du SNIT. Dès le 9 juillet, c'est-à-dire dans quelques jours, le Premier ministre annoncera un grand plan d'investissements publics, dont l'un des volets concernera précisément les transports. À partir de cette date, un dialogue sera engagé avec les régions pour que nous puissions, dans le cadre d’une co-construction, fixer les orientations, les priorités et la réalisation.

Mais, de toute façon, vous ne manquerez pas de venir me voir au ministère, mesdames, messieurs, j'en suis persuadé.

M. Rémy Pointereau. C’est prévu !

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. J'ai bien entendu que le SNIT ne contenait aucune promesse, mais vous auriez peut-être dû être plus raisonnables sur la soutenabilité des investissements publics, là où les déficits étaient plutôt le propre de votre politique ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

transports

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Bockel.

M. Jean-Marie Bockel. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Après mon collègue Rémy Pointereau, je souhaiterais vous interroger, monsieur le ministre, sur le rapport Duron et le report de la plupart des projets.

Il est vrai que nous vivons une période critique pour les finances publiques, et nous comprenons la volonté du Gouvernement de hiérarchiser les projets, d'autant que, disons-le clairement, le précédent gouvernement n'avait pas encore défini leur mode de financement.

En même temps, je fais partie de ceux – ils sont nombreux ici, sur toutes les travées – qui se battent depuis vingt-cinq ans pour promouvoir des projets de lignes à grande vitesse, en l’occurrence les lignes TGV-Est et TGV Rhin-Rhône pour ce qui me concerne.

Les gouvernements, de droite comme de gauche, se sont succédé. Nous avons connu des avancées, mais aussi des moments difficiles. En tout état de cause, il s'agit de projets au long cours qui ne peuvent voir le jour sans vision.

M. Alain Gournac. Et en ce moment, on recule !

M. Jean-Marie Bockel. Dès lors – je le dis sans esprit polémique –, il serait fort dommage de reporter aux calendes grecques un certain nombre de projets stratégiques pour l'activité de nos territoires.

Bien sûr, je comprends que vous vouliez prendre le temps de mieux définir et hiérarchiser ces projets en fonction de vos priorités, mais aussi en fonction de l'état d'avancement et des engagements déjà pris.

En tant qu'élu du Grand Est, j'ai bien entendu à l'esprit la deuxième tranche de la branche Est de la ligne à grande vitesse Rhin-Rhône. Ce projet a été globalement entériné ; il a fait l'objet d'engagements à travers la signature, en janvier 2012, d’un protocole d'intention de financement entre l'État et les collectivités territoriales – je rappelle que celles-ci cofinancent ce projet, comme elles le font d'ailleurs pour la suite du TGV-Est, y compris celles qui ne sont plus desservies.

Plus de 80 millions d'euros ont déjà été dépensés, non seulement pour des études et des acquisitions foncières, mais aussi pour engager les premiers travaux. Des financements européens sont en outre disponibles. Ne pas aller au bout constituerait assurément un gaspillage.

Il est vrai que la politique du « tout TGV » n'est pas réaliste ; d'autres investissements sont nécessaires, notamment pour la rénovation de voies ou la réalisation de nœuds ferroviaires. Toutefois, l'abandon de certains projets fragiliserait notre ancrage européen et pourrait même déplacer le centre de gravité de l'Europe ferroviaire hors de nos frontières.

Je ne reviens pas sur l'aspect économique. Les enjeux pour le BTP, notamment en termes d’emplois non délocalisables, sont importants. Cela ne justifie pas tout, mais, pour des projets reconnus par tous comme étant d'avenir, cet argument ne me semble pas indifférent dans la période actuelle.

Je ne veux toutefois pas m'engager dans la polémique qui a commencé à voir le jour. Comme vous le savez, j'ai cosigné, avec tous mes collègues alsaciens, quel que soit leur bord politique, une lettre au Président de la République.

Plutôt que de nous renvoyer la balle, nous souhaiterions qu'un vrai débat s’engage avec les élus, les forces vives et les porteurs de ce projet - s'il faut pour cela quelques jours de plus, prenons-les ! - afin que vous puissiez in fine rendre les bons arbitrages, sans jeter le bébé avec l'eau du bain. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP. M. Stéphane Mazars applaudit également.)

M. Gérard Larcher. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur Bockel, il me paraît important qu'une partie de votre question ne passe pas inaperçue, dans l'hémicycle et au-delà.

Illustrant d’une certaine manière ma réponse à M. Pointereau, vous venez de confirmer à l'instant que bon nombre des projets contenus dans le SNIT n'étaient pas financés.

Le Gouvernement par ma bouche ne fait que reprendre le constat adopté à l’unanimité par la commission « Mobilité 21 », laquelle était elle-même pluripartite, puisque toutes les sensibilités politiques y étaient représentées.

Ce constat était celui d’une liste d'infrastructures non hiérarchisées, et qui n’avaient pas été pensées en termes d'aménagement du territoire, de complémentarité des réseaux ferroviaire, routier et fluvial, en termes de désenclavement portuaire, d'équilibre et d'impulsion économique susceptibles de donner aux territoires une perspective, et qui en outre ne s’appuyaient pas sur une réflexion partagée avec les territoires.

Au demeurant, ce n’est pas parce que des territoires ont déjà bénéficié d'un certain nombre d’infrastructures que d'autres doivent se résigner à voir, pour des dizaines d'années encore, leur temps de relation avec la capitale, par exemple, rester plus long qu'il y a un siècle.

Nous devons lutter en faveur du désenclavement, pour un équilibre raisonné et raisonnable du territoire.

De ce point de vue, je constate simplement que, pour ce qui concerne votre région, monsieur Bockel, la première phase de la LGV est-européenne a permis, en 2007, d'engager un chantier de 4,3 milliards d'euros, que la première phase de la branche Est de la LGV Rhin-Rhône constituait pour sa part un chantier de 2,3 milliards d'euros, et que la deuxième phase - en cours - de la LGV est-européenne représente un chantier de 2 milliards d'euros.

Au regard du total de ces sommes, vous avouerez tout de même que certains territoires pourraient légitimement, et de manière tout à fait républicaine, revendiquer la prise en considération des enjeux qui sont les leurs en termes de mobilité du quotidien, de désenclavement et d’équilibre des territoires.

Comme vous l'avez constaté vous-même, certains enjeux sont liés aux attentes des populations en matière de mobilité urbaine. D'autres projets existent – je recevrai dans quelques jours une délégation de votre région, dont vous ferez vous-même partie –, à travers lesquels nos concitoyens expriment des attentes du quotidien que nous devons nous efforcer de satisfaire. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste – M. Stéphane Mazars applaudit également.)

industrie agroalimentaire

M. le président. La parole est à M. François Marc. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. François Marc. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé de l'agroalimentaire.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, les industries agroalimentaires, ou IAA, constituent en France le premier secteur de l’industrie.

Jusqu’à présent, les IAA se sont caractérisées par une certaine robustesse dans un contexte marqué par une décroissance importante de l’industrie française, dont on sait qu’elle a perdu la moitié de ses emplois depuis 1970.

Les choses ont malheureusement évolué négativement pour ce secteur.

La France recule dans les classements mondiaux des pays exportateurs de produits agroalimentaires, et il est vrai que l’agroalimentaire traverse en France une mauvaise passe, ce qui prend un tour dramatique dans les zones à forte production animale. Je pense à la Bretagne, considérée jusqu’alors comme le fer de lance de l’agroalimentaire français.

C’est vrai de la filière « volaille », avec le dépôt de bilan de la société Doux ; c’est vrai de la filière « saumon », avec le dépôt de bilan annoncé de Marine Harvest ; c’est vrai de la filière « légumes », avec la fermeture annoncée de Boutet-Nicolas.

Toutefois, le problème le plus crucial concerne aujourd’hui la filière porcine : si rien n’est entrepris dans les prochains jours, la société Gad, spécialisée dans l’abattage-découpe, va être mise en liquidation, avec, au cœur de l’été, la suppression probable de mille emplois.

La situation est donc des plus inquiétantes, d’autant que plusieurs questions brûlantes minent la bonne compréhension du sujet.

Pourquoi faire plus de mille kilomètres aujourd’hui pour aller abattre des porcs en Allemagne plutôt qu’en France ?

M. Charles Revet. Bonne question !

M. François Marc. Qu’a-t-on fait depuis dix ans pour mieux réguler les salaires des travailleurs en Europe ?

Pourquoi la filière porcine française est-elle incapable de mieux se structurer ?

Face à ces questions cruciales, je le sais, monsieur le ministre, le Gouvernement a élaboré un plan visant à favoriser une vraie politique de filière et une restructuration aujourd’hui indispensable. Mais permettez-moi ici d’attirer votre attention sur la détresse de plusieurs milliers de travailleurs du secteur agroalimentaire, qui risquent d’être sous peu privés de leur emploi.

Quelles dispositions le Gouvernement envisage-t-il de mettre en œuvre pour répondre à l’angoisse de tous ces salariés et de leur famille ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur les travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de l'agroalimentaire.

M. Guillaume Garot, ministre délégué auprès du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, chargé de l'agroalimentaire. Monsieur Marc, comme vous l’avez très bien rappelé, certains pans de l’industrie agroalimentaire traversent une véritable crise.

Vous avez évoqué des entreprises comme Gad, Marine Harvest ou Doux, qui sont aujourd'hui dans une situation de grande difficulté. Pour chacun de ces sites, nous sommes entièrement mobilisés. (Marques d’ironie sur les travées de l'UMP.) Nous avons reçu dans chaque cas les salariés concernés, ainsi que les membres de la direction, afin de trouver les meilleures solutions pour sauvegarder un maximum d’emplois.

Nous sommes parfaitement conscients de l’inquiétude, de l’angoisse, de la détresse des salariés. Notre seule préoccupation est de trouver des solutions à la fois réalistes, concrètes et, surtout, durables.

À cette fin, nous avons pris, avec Stéphane Le Foll, des orientations fortes.

D’abord, il s’agit de relancer la production porcine de notre pays et de redonner de la compétitivité à la filière. Nous voulons en particulier faire de la performance écologique un véritable levier de la performance économique. Nous avons aussi avancé quant à la possibilité, qui sera mise en œuvre très prochainement, d’adapter les démarches administratives pour les installations classées.

En outre, le 19 juin dernier, avec Arnaud Montebourg et Stéphane Le Foll, nous avons signé ce que nous appelons le « contrat de filière alimentaire » avec l’ensemble des acteurs de la filière. Je puis vous certifier que les mesures seront mises en œuvre sans tarder dans votre région, pour apporter des réponses et de véritables perspectives à l’ensemble des départements bretons.

M. Guillaume Garot, ministre délégué. Je pense en particulier au Finistère, qui, vous l’avez rappelé, souffre beaucoup.

Monsieur le sénateur, nous sommes très conscients de la situation que connaît aujourd'hui la Bretagne. Sachez que nous travaillons d’arrache-pied pour consolider et développer son potentiel agroalimentaire, car la filière doit plus que jamais demeurer une force pour cette grande région ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

la fin de vie

M. le président. La parole est à M. Gérard Dériot.

M. Gérard Dériot. Ma question s'adressait à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé, mais je vois que c’est Mme la ministre chargée des personnes âgées et de l'autonomie qui se chargera de me répondre.

Le sujet de la fin de vie, parce qu’il concerne pour chaque individu sa propre mort comme celle des autres, est toujours très difficile à aborder. Ayons pleine conscience que la société contemporaine est plus portée à refuser l’inéluctable qu’à l’accepter !

Le sujet divise la société, essentiellement sur la question de l’euthanasie.

Justement, le Comité consultatif national d’éthique vient de rendre l’avis 121, tout en nuances et respectueux de la loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie, ou loi Leonetti, dont j’ai eu l’honneur d’être le rapporteur au Sénat. Le CCNE a été saisi par le Président de la République, après un premier rapport sur le sujet, celui de Didier Sicard, datant du mois de décembre 2012.

On peut très légitimement se demander si la loi Leonetti ne renferme pas déjà quasiment toutes les solutions, sauf à vouloir passer du « laisser mourir » au « faire mourir ».

Parce qu’elle a été mal expliquée, la loi Leonetti est mal appliquée. C’est clairement démontré dans le rapport Sicard, tout comme dans l’avis du Comité consultatif national d’éthique, dont les auteurs doutent d’ailleurs de l’intérêt d’une nouvelle loi.

Soit ! L’avis 121 préconise la nécessité d’une amélioration de la loi existante concernant les directives anticipées, la procédure collégiale et la sédation en phase terminale. Remarquons cependant que cette dernière s’inscrit dans le prolongement des possibilités ouvertes par la loi actuelle, qui sont, il est vrai, rarement mises en œuvre.

Une large majorité s’est dégagée au sein du comité pour refuser l’assistance au suicide, en mettant en exergue les dérives observées dans les pays où elle est légalisée. (M. Jean-Pierre Godefroy s’exclame.)

On souligne également dans l’avis l’accès encore insuffisant aux soins palliatifs, malgré tout ce qui a été fait au cours des dernières années.

Le professeur Jean-Claude Ameisen, président du Comité consultatif national d’éthique, souhaite un débat à l’automne, estimant indispensable que la société entière puisse réfléchir, comme nous l’avions nous-mêmes proposé.

Le Président de la République accepte cette idée, mais il promet un texte visant à compléter la loi Leonetti pour la fin de cette année !

N’est-ce pas là relancer un débat clivant pour la société quand celui du mariage pour tous laissera des traces pour longtemps ? Nous avions cru que le Gouvernement allait enfin se concentrer sur les graves problèmes économiques qui affaiblissent notre pays et sapent sa cohésion…

Pourquoi, dans l’immédiat, ne pas mettre en œuvre une vraie pédagogie de la loi, qui est mal connue des soignants comme du public ? Cela demandera déjà beaucoup de temps et d’énergie. Mais c’est essentiel.

Madame la ministre, que comptez-vous faire pour remédier à la situation ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes âgées et de l'autonomie.

Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur Dériot, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser Mme Marisol Touraine, qui, vous le savez, reçoit en ce moment les partenaires sociaux à Matignon sur la question des retraites. Je vous transmets donc la réponse qu’elle souhaitait vous apporter.

À la suite du rapport sur la fin de vie que lui a remis le professeur Sicard au mois de décembre dernier, le Président de la République a saisi le Comité consultatif national d’éthique de trois questions concernant une éventuelle évolution de la loi Leonetti.

La première question portait sur les directives anticipées de fin de vie et, plus spécifiquement, sur leurs conditions de recueil et d’application dans les cas où elles sont émises par une personne en pleine santé ou à l’annonce d’une maladie grave.

La deuxième avait trait aux moyens de rendre plus dignes les derniers moments d’un patient dont les traitements ont été interrompus à la suite d’une décision prise à la demande de la personne ou de sa famille ou encore par les soignants.

La troisième concernait les modalités et les conditions strictes pour permettre à un malade conscient et autonome atteint d’une maladie grave et incurable d’être accompagné et assisté dans sa volonté de mettre lui-même un terme à sa vie.

Le Comité consultatif national d’éthique, qui a rendu son avis le lundi 1er juillet, a illustré toute la difficulté du sujet. Le Président de la République a pris acte du constat unanime : la loi Leonetti est insuffisamment appropriée et l’accès aux soins palliatifs est mal connu et mal appliqué, malgré le déploiement dont ces soins ont fait l’objet au cours de ces dernières années.

Le Président de la République a également pris acte du constat dressé par le Comité consultatif national d’éthique : les soins palliatifs, bien que fondamentaux, ne permettent pas de répondre à toutes les situations de souffrance et un débat de société sur la question de la fin de vie est souhaitable.

C’est la démarche dans laquelle le Président de la République se situe aujourd'hui. Au terme de ce débat, un projet de loi sera proposé pour compléter la loi Leonetti. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

inondations

M. le président. La parole est à M. Bertrand Auban.

M. Bertrand Auban. Ma question s'adresse à M. le ministre de l’intérieur.

Dans la nuit du 17 au 18 juin, les inondations exceptionnelles qui ont frappé la Haute-Garonne, les Hautes-Pyrénées, les Pyrénées-Atlantiques et les Landes ont été d’une puissance de dévastation rarement vue. Elles ont, hélas ! coûté la vie à trois personnes dans les Hautes-Pyrénées et causé d’énormes dégâts dans le canton de Saint-Béat, dont je suis le conseiller général, mais aussi dans bien d’autres secteurs. Des maisons, des routes, des établissements scolaires, des services publics, des commerces et des exploitations agricoles ont été gravement frappés ou détruits.

Je tiens à souligner la solidarité dont ont fait preuve nos concitoyens et leurs élus locaux ; je salue la solidarité matérielle et financière des collectivités territoriales, ainsi que l’efficacité des services de secours.

Le drame a mis en lumière l’impérieuse nécessité des services publics de proximité et des collectivités territoriales, qui sont parfois décriés, bien à tort !

La réactivité et la solidarité des pouvoirs publics ont été très appréciées par nos concitoyens dans la souffrance. M. le Président de la République est venu à Saint-Béat en compagnie des ministres de l’intérieur et de l’environnement, puis, un peu plus tard dans la journée, le ministre de l’agriculture a fait le déplacement, lui qui est à l’écoute du monde agricole.

Le Gouvernement a agi extrêmement vite, avec un arrêté de catastrophe naturelle paru au Journal officiel du 29 juin. Il a aussi annoncé sa volonté d’être financièrement aux côtés des collectivités locales, d’offrir des facilités et des délais de paiement aux entreprises et commerces pour les charges fiscales et les cotisations sociales. Pour les agriculteurs, fortement touchés, il a mobilisé le Fonds national de gestion des risques agricoles et prévu un différé immédiat des cotisations sociales.

Cependant, la saison touristique, économiquement vitale pour nos territoires, est déjà là. Le secteur touristique est très touché, les commerces ont perdu leur stock, les maisons sont ravagées et les agriculteurs connaissent des difficultés extrêmement importantes.

Même si la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle induit un délai de trois mois maximum pour l’indemnisation par les assurances, il serait vital que ces indemnisations arrivent au plus tôt.

Aussi, monsieur le ministre, et j’associe les parlementaires des territoires concernés à cette question, je souhaiterais savoir comment le Gouvernement envisage de travailler avec les assurances pour une indemnisation très rapide des sinistres. J’aimerais également savoir si des dispositifs spécifiques pour les agriculteurs figurent parmi les mesures fiscales qui sont envisagées. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur, je souhaite d’abord rendre hommage, au nom du Gouvernement, aux trois personnes qui ont trouvé la mort lors de ces inondations. J’ai une pensée pour leur famille. Je sais que les territoires concernés ont particulièrement souffert.

Je tiens également à saluer la mobilisation des préfets, des élus, des services de secours et, plus généralement, de toutes celles et de tous ceux qui ont spontanément permis l’évacuation préventive de nombreuses personnes, grâce notamment aux indications des services de prévision des crues.

L’ensemble du Gouvernement est mobilisé. Le Président de la République s’est rendu sur place pour mesurer l’ampleur, en l’occurrence exceptionnelle, des inondations. À cette occasion, et pour répondre à l’urgence, le Gouvernement a déclenché des dispositifs d’indemnisation rapide.

Ainsi que l’avait indiqué M. le ministre de l’intérieur, l’arrêté faisant la liste des communes concernées par l’état de catastrophe naturelle a été signé et publié samedi dernier. Les particuliers peuvent donc, et nous les invitons à le faire, engager les démarches auprès de leur assureur pour obtenir réparation. L’évaluation des dommages subis par les collectivités territoriales est également en cours.

Comme l’avait annoncé M. le Premier ministre la semaine dernière, l’État a débloqué une première enveloppe. Elle permettra d’effectuer un premier versement aux collectivités territoriales qui en auront fait la demande, afin de pouvoir engager sans attendre les premiers travaux de confortement.

En ce qui concerne les exploitants agricoles sinistrés, le Fonds national de gestion des risques agricoles a été mobilisé pour indemniser les pertes de récolte et de fonds. Une enveloppe de 100 millions d’euros a été mobilisée. La somme sera ajustée – M. le ministre de l’agriculture l’a souligné – autant que de besoin en fonction du niveau des pertes constatées.

Les intérêts et cotisations sociales de la Mutualité sociale agricole pourront être pris en charge, et les aides pour les agriculteurs en difficulté, activées.

Enfin, M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, a décidé d’octroyer les dérogations demandées pour circonstances exceptionnelles concernant les obligations de la politique agricole commune.

Vous le voyez, tout est mis en œuvre au niveau du Gouvernement, quel que soit le département ministériel, pour apporter des réponses aux territoires concernés et faire en sorte que les dispositifs existants puissent être mobilisés rapidement.

Sachez que, là encore, des réflexions sont en cours. Il y a l’action d’urgence – je vous en ai donné illustration –, mais il y a également l’enjeu de la prévention. Ce chantier majeur sera celui du ministre de l’écologie. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)