Mme Marylise Lebranchu, ministre. Un retrait chaleureux !
Le Gouvernement demande également le retrait des amendements identiques nos 243 rectifié bis, 393 rectifié et 439, au profit de l’amendement n° 827. Malgré une différence d’appréciation avec M. le rapporteur, je maintiens notre position.
Le Gouvernement demande aussi le retrait de l’amendement n° 14 rectifié ter, eu égard à l’explication que j’ai donnée tout à l’heure.
En revanche, il est favorable aux amendements identiques nos 242 rectifié ter et 249 rectifié.
Quant à l’amendement n° 672, je comprends parfaitement son objet. Il s’agit de répondre au souci exprimé par les uns et les autres à propos du chef de filat des communes en termes de services de proximité.
La solidarité des territoires et la solidarité de proximité sont des compétences que l’on pourrait plutôt confier aux départements. Toutefois, en l’état actuel des choses, notre analyse du problème n’étant pas aboutie, je vous demande, madame Lipietz, de bien vouloir retirer cet amendement. Il s’agirait bien sûr d’un retrait constructif.
Concernant l’amendement n° 234 rectifié bis, sur lequel deux sénateurs ont tenu des propos similaires, je ne pense pas, dans la logique de ce que j’ai dit voilà quelques instants, que l’on puisse attribuer au bloc communal la responsabilité de l’organisation des services publics de proximité. Il s’agit en effet d’une trop petite surface. À un moment donné, les communes elles-mêmes seraient bien en peine d’assurer ces services. Selon moi, cette compétence doit être assurée par des surfaces départementales ou équivalant à un rassemblement de communautés de communes rurales. Je suis donc défavorable à cet amendement. Au demeurant, nous nous pencherons sur ce problème à une autre occasion.
Sur les amendements identiques nos 244 rectifié bis et 394, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Enfin, l’amendement n° 668 rectifié vise à confier au bloc communal le chef de filat en matière de démocratie participative et de débat public. Je serai très franche avec vous, madame Lipietz. Si le débat peut, bien évidemment, être organisé par chacune des collectivités territoriales, est-il judicieux de retenir pour ce faire le niveau communal ? Vous-même avez justement évoqué la nécessité de prévoir des débats publics au niveau de l’intercommunalité, si celle-ci a bénéficié d’un transfert de compétences. Par ailleurs, j’estime qu’il ne s’agit pas d’une compétence en tant que telle. Il serait sans doute quelque peu dangereux non seulement de créer une telle compétence, mais aussi de la confier au niveau communal.
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary.
M. René-Paul Savary. J’interviendrai globalement, afin d’expliquer notre vote sur l’ensemble de ces amendements.
On le voit bien, on passe d’une collectivité à une autre avec une certaine légèreté, qui inquiéterait certainement nos concitoyens s’ils nous écoutaient aujourd’hui. Mais nous savons que la commission et d’autres ont mené de longues réflexions.
Si je m’apprête à voter bien volontiers certains de ces amendements, je suis également décidé à en rejeter un certain nombre.
Il est notamment proposé de confier la compétence liée aux politiques menées en faveur de la jeunesse aux régions. Ainsi, celles-ci s’occuperaient de la jeunesse, tandis que les départements se chargeraient des personnes âgées et des personnes handicapées. Il leur resterait tout de même à gérer la protection maternelle et infantile, ce qui est un vrai métier !
Que gagnerions-nous à ces transferts ? Laissons les compétences à ceux qui savent les exercer !
Les départements, à qui l’on a confié la solidarité des hommes et des territoires – l’un ne va pas sans l’autre –, ont de vraies responsabilités en la matière. Si vous leur enlevez la solidarité des territoires, il ne leur restera que l’exercice des compétences sociales, ce qui aura un effet particulièrement restrictif : les départements géreront la misère, excusez le terme, puisqu’ils ne pourront plus développer de stratégie pour réduire la pauvreté et améliorer la cohésion sociale. Ces deux compétences sont donc complémentaires, et se déclinent en outre avec d’autres.
Le fait que l’aménagement du territoire constitue une compétence très large ne doit pas empêcher les départements, qui sont véritablement une structure de proximité, de mettre en œuvre la solidarité des territoires.
S’agissant de l’économie sociale et solidaire, je voterai volontiers l’amendement proposé par Bernard Cazeau. Permettez-moi toutefois de formuler une remarque à ce propos.
Représentant l’Assemblée des départements de France au Conseil supérieur de l’économie sociale et solidaire, j’ai interrogé M. Hamon sur le problème des chefs de file, dans la mesure où un projet de loi sur l’économie sociale et solidaire devrait voir le jour d’ici peu. Ce dernier n’est pas favorable à l’introduction de chefs de file dans ce secteur. En effet, l’économie sociale et solidaire est à la fois une affaire sociale et économique. Elle a besoin, sous la responsabilité de l’État, de l’appui des départements pour ce qui est de l’action sociale, des régions pour ce qui concerne la formation et de l’Europe pour ce qui a trait aux crédits de cohésion ou d’inclusion sociale.
On le voit bien, ces besoins transcendent les compétences propres de chacune des collectivités. Une telle situation est préoccupante, dans la mesure où ce secteur possède un vrai intérêt dans la période de difficulté que nous connaissons.
Par ailleurs, je tiens à attirer l’attention de mes collègues sur le problème de l’aménagement numérique. En la matière, des schémas de cohérence territoriale existent : il s’agit des SCORAN, les stratégies de cohérence régionale d’aménagement numérique.
Si les choix sont orientés au niveau régional, ils se déclinent différemment d’un département à l’autre : il peut s’agir de monter en débit, de faire le choix de la fibre – la FTTO pour les équipements importants et la FTTH pour chaque habitation – ou, pour des quartiers ou des zones très particuliers, d’opter pour le passage par les ondes, avec des antennes.
Une fois que ce choix de cohérence territoriale a été défini, il importe de réaliser l’aménagement numérique. C’est la raison pour laquelle les départements sont des interlocuteurs privilégiés : ils élaborent les schémas départementaux d’aménagement numérique, qui permettront de mettre en cohérence les boucles locales, lesquelles seront ensuite réalisées sous l’égide des communes.
Il n’empêche que, pour réaliser ces infrastructures, il faut un maître d’ouvrage qui ne peut pas être la région. La loi prévoit que ce rôle est assumé soit par une société publique locale, soit par le département, soit par un syndicat couvrant l’ensemble des communes, à l’image des syndicats d’électrification.
La cohérence territoriale est indispensable. En effet, dans la mesure où des opérateurs aménageront différents programmes sur les fibres que nous aurons éventuellement installées, l’échelon départemental semble le plus approprié pour trouver ceux qui utiliseront ces équipements, ce qui nous permettra d’éviter les investissements « morts ».
En résumé, la région est compétente, à un certain moment, pour la réalisation du schéma de cohérence, mais ensuite, le département a un rôle déterminant d'interlocuteur et d'aménageur.
Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. Pardonnez-moi de vous le dire, mais je trouve que notre débat a pris un tour surréaliste. Nous disons tous : « Attention, toute compétence, tout pouvoir nouveau, tout pouvoir ancien doit être défini au millimètre près, de manière à mesurer précisément les charges nouvelles que cela représente. » Or, depuis tout à l'heure, c’est un autre discours qu’on entend : « Tiens, je te donne ça, tiens, redonne-moi ça. Et est-ce que tu ne pourrais pas me refiler ça ? » Franchement, je trouve ce travail incohérent.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. C’est un peu caricatural !
M. Roger Karoutchi. Non, monsieur le président de la commission, ce n'est pas caricatural. Sincèrement, je n'ai pas le sentiment que c’est ainsi, en défendant une telle batterie d'amendements, que nous ferons progresser les collectivités locales.
Moi aussi, j'aurais pu me lever et défendre un amendement en disant : « Je souhaite que la région dispose de telle ou telle compétence. » D’ailleurs, je ne sais pas pourquoi on veut lui donner la compétence sur les politiques liées à la jeunesse ? Parce que la région gère les lycées ? Mais les collèges dépendent eux des départements et l'enseignement supérieur est de la responsabilité de l'État ! On est en train de contredire nos propres propos, lorsque nous réclamions tout à l’heure qu’on agisse de façon équilibrée et sérieuse. Or chacun présente ses amendements, en réalité, pardon de le dire, des amendements transmis par diverses associations, ce qui, somme toute, est normal.
Madame la ministre, durant tout l'après-midi, il a été répété que, pour éviter tout clash, toute aberration, on ne désignerait pas de chef de file en matière de tourisme. Or toute une batterie d'amendements, dont un amendement présenté par le Gouvernement, ont pour objet de redonner au département le chef de filat en matière de tourisme. Reconnaissez que c'est l'inverse de ce qui a été dit tout l'après-midi !
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Mais non ! Le rapporteur est cohérent !
M. Roger Karoutchi. Monsieur le président de la commission, je n'ai pas parlé du rapporteur, qui est d’une parfaite cohérence, je le reconnais bien volontiers. Mais, sincèrement, je suis un peu étonné de la manière dont nous discutons maintenant, les uns après les autres, toute une vague d’amendements qui se résument à ceci : « Et à toi, je te donne ça, et toi tu reprends ça, et toi tu prends le chef de filat sur ça… »
Pardon, mais je trouve cela aberrant et je ne voterai certainement pas des amendements ayant pour objet de changer les chefs de filat et de revenir sur ce que la commission a décidé. Je ne suis pas toujours d'accord avec ce qu'elle dit, mais puisqu’elle a passé des heures, des nuits à tout arranger au cordeau, ce n’est pas pour que chacun modifie tout en séance avec des amendements suscités, je l’ai dit, par diverses associations. Franchement, ce n'est pas cohérent du tout.
Je comprends très bien que les gîtes ruraux, notamment, relèvent de la responsabilité des départements. Qui prétend le contraire ? Les comités régionaux du tourisme ont été créés en 1942, avant de faire l’objet d’une révision législative en 1987. Ils ne datent pas d'hier ! Évidemment, ce sont bien les comités départementaux, et pas les comités régionaux, qui doivent être chargés des questions locales. Mais là, qu’est-on en train de faire ? On est en train de dire aux régions : « Vous avez bien fait de gérer depuis vingt-cinq ans les CRT, mais, ce n'est pas grave, on va transférer la compétence aux départements. » C’est un signal abominable ! Soit l'on dit qu'il n'y a pas de chef de file en matière de tourisme et que les CRT et les CDT agissent de concert, et c’est très bien ainsi et parfaitement cohérent,…
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois, et M. René Vandierendonck, rapporteur. C’est ce que nous disons !
M. Roger Karoutchi. ... soit l’on dit, comme c’est le cas depuis deux heures : « Vous, vous prenez ça et vous, vous reprenez ça. » Franchement, eu égard au travail de la commission, eu égard à ce que sont les collectivités locales, je trouve cela aberrant.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Appréciant particulièrement le travail qu'a fait la commission pour nous permettre d’aboutir, en dépit de la difficulté du sujet, à un texte sinon quasi consensuel, à tout le moins qui ne soit pas trop dissensuel, je retire mon amendement, même si l’on aurait pu en discuter jusqu'à demain matin. Qu’on s’en tienne à ce qui a été décidé en commission.
S’agissant de la compétence tourisme, actons l’absence de tout chef de file, ce que nous n’avons pas encore fait, à ma connaissance. C’est d’ailleurs sans doute cela qui crée ces perturbations auxquelles moi-même, je dois bien le dire, je n’échappe pas.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. La position du rapporteur n’a pas varié !
M. Pierre-Yves Collombat. Aucun amendement n’a été déposé ayant cet objet ! Le faire nous simplifierait la vie.
Mme la présidente. L’amendement n° 384 rectifié est retiré.
La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.
M. Vincent Capo-Canellas. Je souhaite brièvement réagir à l’avis qu’a exprimé M. le rapporteur sur l’amendement n° 234 rectifié bis, que j'ai défendu tout à l'heure.
Monsieur le rapporteur, vous me faisiez gentiment remarquer que mon amie Jacqueline Gourault, présidente de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation, membre de mon groupe, rejoint la position de la commission. Cela ne m’avait pas échappé. Il ne vous échappera pas non plus qu’il peut m'arriver d’être en désaccord avec Mme Gourault.
C’est un peu cruel de votre part de l’avoir signalé, car j’espérais que vous ne l’auriez pas remarqué, en dépit de votre sagacité ! (Sourires.)
Même si je suis en total accord avec Jacqueline Gourault sur beaucoup d’aspects de ce texte, il peut arriver, comme c’est le cas ici, où ma position était autre, que nous ne soyons pas forcément d'accord sur tout.
Je remercie le Gouvernement d'avoir émis un avis favorable sur cet amendement. Je remarque d'ailleurs que le texte de son amendement n° 828 reprenait une partie de mon amendement, ce qui signifie que nous nous rejoignons l’un et l’autre.
Je note que, pour une fois, je suis d'accord non pas avec Mme Gourault, mais avec le Gouvernement. (Sourires.) On me dit que c’est plus souvent l'inverse qui se produit, mais peu importe, là n'est pas l'essentiel.
Dernière chose : j’aurais volontiers déposé un amendement visant à remplacer l'expression « chef de filat », utilisée communément dans le texte, par celle de « rôle de chef de file ». Cette expression « chef de filat » me paraît bizarre.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Cazeau, pour explication de vote.
M. Bernard Cazeau. Ne caricaturons pas : on ne part pas de rien. Certains citent l’exemple de la région d'Île-de-France, mais il faudrait peut-être voir également ce qui se fait en région Aquitaine ou en région Limousin. Évitons de sérier les choses point par point.
Nous avons réintroduit le principe de compétence générale. Qu’on soit pour ou contre, c'est décidé. Nous équilibrons celle-ci avec un chef de file : c’est le principe du chef de filat – moi non plus, je n’aime pas beaucoup ce néologisme. Ce chef de file organise les modalités de l’action commune pour l’exercice de certaines compétences. Mais c’est déjà ainsi que cela se passe ! Qu'est-ce que vous nous racontez ? Mon département a signé une convention économique avec la région Aquitaine et cela se passe très bien : nous gérons les petits problèmes des PME-PMI quand la région s’occupent des grands problèmes. C'est ainsi que les choses se passent en province, monsieur Karoutchi. Nous ne sommes pas en Île-de-France, qui est confrontée à des problèmes différents, je veux bien le croire.
Une conférence territoriale sera organisée, en cas de difficultés. Mais tout cela n'a rien de compliqué, cela fonctionne !
Personnellement, s’agissant du tourisme, la position de la commission me satisfait entièrement. Comme l’a dit Mme la ministre, il y a ce qu'on construit dans le département et puis il y a la promotion internationale. Qu’il n’y ait pas de chef de file et que la voie conventionnelle prévale, je m’en satisfais.
Je conclurai sur la question du numérique. Le déploiement du numérique requiert d'abord la mise en place d’un réseau très haut débit ou de fibre optique. C’est le rôle du département que de faire en la matière des choix bien précis, de privilégier un certain nombre de secteurs, de commencer le déploiement à tel endroit et de finir par tel autre. Les « tuyaux », cela relève de la compétence du département. Nous, en Dordogne, nous avons fait un syndicat général qui concerne notamment les réseaux électriques.
Vient ensuite la commercialisation. Les gens ne se rendent pas compte des difficultés auxquelles seront confrontés les départements pour ces opérations de commercialisation. C'est là qu'il faudra se tourner vers la région.
En Aquitaine, nous avons constitué un ensemble de type syndicat d'économie mixte réunissant les cinq départements de la région. Tous se rejoignent, au côté de la région, pour discuter avec les opérateurs, pour retrouver une partie de notre mise, pour peu qu’on sache vendre.
Prenons garde de bloquer le développement du numérique en en confiant le développement soit à la région, soit au département : cela ne sert à rien. C'est un domaine très complexe, croyez-en ma petite expérience, acquise de longue date.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour un rappel au règlement.
Mme Nathalie Goulet. Madame la présidente, mon rappel au règlement se fonde sur l'article 29 de notre règlement et porte sur l’organisation nos travaux.
Depuis tout à l'heure, nos collègues dissertent, fort brillamment d’ailleurs, de l'ensemble des amendements sans qu'on sache exactement sur lequel d’entre eux porte la discussion. Discutons-nous de l’ensemble de ces amendements ? Discutons-nous de l'article ? Discutons-nous de la philosophie générale de ce texte ? Depuis maintenant trois quarts d’heure, nous avons un débat très général, alors qu’il serait plutôt temps de mettre aux voix chacun de ces amendements, qui sont tout de même relativement importants, quitte à ce qu’ils fassent, pour certains d’entre eux, l’objet d’une explication de vote individuelle. (MM. Jacques Gillot et Claude Dilain, rapporteur pour avis, applaudissent.)
Je vous prie de m'excuser si, par malheur, je vous ai offensée dans votre façon de présider, mais franchement, je ne comprends absolument pas ce qu'on fait en ce moment.
Mme la présidente. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, madame Goulet.
Sachez néanmoins que nos collègues s’expriment sur la philosophie de ce bloc d'amendements. Si vous souhaitez intervenir sur un amendement en particulier, attendez que je le mette aux voix.
La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Nous le savons tous, rien n'est pire, dans les assemblées que nous présidons ou que nous avons présidées, de faire en réunion plénière le travail de commission.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Eh oui !
M. Gérard Longuet. Or c'est exactement ce que nous sommes en train de faire à cet instant.
À cela, il y a une raison apparente : si nous n'avons pas tous le bonheur d'être membres de la commission des lois, en revanche, nous avons tous la passion et, parfois même, une expérience des collectivités locales.
Cela dit, n’exagérons pas cette passion, parce que nous ne sommes tout de même pas très nombreux en ce moment dans cet hémicycle, quoique la qualité supplée naturellement à la quantité. (Sourires.)
Mme Hélène Lipietz. Il y a les meilleurs !
M. Gérard Longuet. Voilà pour la raison apparente. S’agissant de la raison réelle, je serai sans doute plus sévère.
Madame la ministre, l’architecture de votre texte nous conduit à cette dispersion des interventions que soulignait Mme Goulet ? Pourquoi ? Parce que, au fil de trois articles différents, vous faites un choix et son contraire.
À l’article 2, vous nous dites que chaque niveau de collectivités locales bénéficie d'une compétence générale, pour des raisons qui sont les vôtres et que je conteste formellement. Vous avez fait ce choix et notre assemblée vous a suivi.
Vous savez que ce choix n'est pas facile à mettre en œuvre et qu'il impose une clarification, en particulier dans des domaines nouveaux. C’est l’objet de l'article 3.
Je vous rappelle que, sur ce même sujet de la compétence et des priorités des différents niveaux de collectivités, nous avons, au cours des années passées, débattu des journées entières. Si notre collègue Philippe Adnot, départementaliste enthousiaste, était présent en séance, il pourrait nous rappeler les nuits passées sur la compétence du département et de la région en matière d’action économique, par exemple.
Vous avez fait le choix de rétablir la clause de compétence générale, même si la commission s'est efforcée d'y mettre un peu d'ordre. Tout à l’heure, nous examinerons sans doute l'article 4, qui rétablit une forme de coopération conventionnelle – laquelle est tout à fait dans l'esprit des collectivités locales –, qui conduit en réalité à reconstituer le conseil régional dans sa forme ancienne, quand il était un établissement public régional, quand il avait pour fonction de fédérer le travail des collectivités locales qu’il représentait et quand ses membres n'étaient pas élus au suffrage universel.
Tel est notre sentiment.
Puisque Mme la présidente nous invite à exprimer un point de vue général sur l'ensemble des amendements, ma ligne de conduite consistera simplement à soutenir le travail de la commission, car, à tout prendre, c’est elle qui a le plus approfondi la question. J’aurai l’occasion, sur des sujets très pointus, peut-être d’éclairer le choix.
Mais soyons honnêtes, c’est bien l’esquive que vous avez choisie, à savoir la répartition des responsabilités entre niveaux de collectivités locales, laquelle se traduit par la compétence générale reconnue aux différents niveaux, qui aboutit à cette contradiction.
Ou alors il faut nous dire très clairement : la diversité française aboutira à des politiques contractuelles par département, par région, par groupe de régions, à l’intérieur de chaque région, et on vivra une diversité d’Ancien Régime, ce qui, pour le conservateur que je suis, n’est pas choquant (M. Roger Karoutchi rit.), mais est sans doute contraire à la tradition républicaine que nous essayons de bâtir dans cet hémicycle.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Tout le monde voit bien que nous sommes confrontés à un problème, qui a été évoqué par plusieurs collègues, dans l’organisation du débat.
Madame la présidente, vous veillez scrupuleusement, chacun peut le constater, à l’application du règlement de notre assemblée. Mais permettez-moi d’évoquer l’esprit de notre règlement.
Nous examinons l’article 3 du projet de loi. Quelques constats s’imposent.
Premièrement, chacun a eu la possibilité de s’exprimer sur l’article.
Mme Cécile Cukierman. Largement !
M. Gérard Longuet. Généreusement !
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Ensuite, chacun a pu présenter son amendement. Puisqu’il s’agit d’une discussion commune, nous avons donc entendu la présentation de la trentaine d’amendements.
Puis, nous avons entendu la position du rapporteur et celle des ministres.
Aussi, il me paraîtrait de bonne méthode – je ne sais pas ce que prévoit le règlement sur ce point, ni même s’il prévoit quelque chose – d’appeler les amendements et, s’il y a des explications de vote, que celles-ci ne portent que sur un amendement déterminé.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Sans porter un jugement sur le fond, je constate, après avoir écouté les quatre ou cinq dernières interventions, que l’on assiste à un nouveau débat général sur l’article 3, bien entendu éclairé par les amendements.
Je me permets donc de suggérer, si tout le monde en est d’accord, que les amendements soient appelés…
M. Bernard Cazeau. Oui !
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. … et qu’il soit possible d’expliquer son vote sur un amendement déterminé.
Vous voyez bien que la procédure en vigueur au Sénat – je suis très précis – présente un avantage par rapport à celle de l’Assemblée nationale. À l’Assemblée nationale, lorsqu’un amendement est voté, les autres tombent. Au Sénat, tous les amendements sont présentés.
Mais pensez un instant aux nombreuses personnes qui lisent le compte rendu de nos travaux.
M. Gérard Longuet. C’est joyeux !
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Considérons un amendement déterminé. D’abord, il va être évoqué lors des prises de parole sur l’article. Quatre pages plus loin, il sera présenté. Encore cinq pages après, vous aurez l’avis de la commission, et il faudra trois pages de plus pour connaître l’avis du Gouvernement. Puis il y aura un nouveau débat et il faudra cinq pages supplémentaires avant de connaître le vote.
Afin que la situation que nous connaissons ne se reproduise pas, je me permettrai, à la reprise de nos travaux après le dîner, ou un peu plus tard, de présenter des propositions pour disjoindre certains amendements,…
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. … si vous en étiez d’accord. Il s’agit non pas, je vous l’assure, d’obtenir un quelconque effet politique, mais simplement d’avoir des blocs d’amendements plus restreints, et ce dans l’intérêt et la bonne compréhension du débat. (Mme Nathalie Goulet ainsi que MM. Bernard Cazeau, Vincent Capo-Canellas et Gérard Longuet applaudissent.)
Mme la présidente. Le fait, pour ceux qui le souhaitaient, d’avoir pu s’exprimer sur la philosophie globale des amendements, après avoir entendu l’avis de la commission et du Gouvernement, a permis, me semble-t-il, de gagner du temps.
Nous pouvons donc passer au vote sur chaque amendement. Il est bien entendu que je donnerai la parole à qui me la demandera pour une explication de vote sur un amendement particulier. J’invite toutefois ceux qui se sont déjà exprimés à ne pas intervenir à nouveau.
Je mets aux voix l'amendement n° 436.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote sur l’amendement n° 685 rectifié.
M. Gérard Longuet. Je suis opposé à cet amendement parce que, hélas ! les régions de France ne sont pas en mesure de gérer un problème que l’on ne parvient pas à régler à l’échelle mondiale, à savoir l’énergie et le climat.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos15 rectifié ter, 241 rectifié ter, 248 rectifié et 438.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, l’amendement n° 367 n’a plus d’objet.
La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote sur l'amendement n° 908, qui est la reprise, par le Gouvernement, de l’amendement n° 736 rectifié.
Mme Nathalie Goulet. Il s’agit de l’amendement n° 736 rectifié qui est devenu l’amendement n° 908 – être parlementaire, c’est un métier ! (Sourires.) Cet amendement porte sur l’internationalisation des entreprises.
Madame la ministre, je voudrais vous dire à quel point je suis favorable à cet amendement, qui s’inscrit dans la droite ligne des positions soutenues par Nicole Bricq et, surtout, par le ministre Laurent Fabius. Ce dernier a dépêché dans les régions des ambassadeurs sans affectation qu’ils les aident à l’internationalisation. Membre de la commission des affaires étrangères qui travaille beaucoup sur la coopération internationale, je peux vous assurer que les régions sont les acteurs majeurs du développement international.
Je voyage très souvent avec des collègues qui sont les mieux placés pour promouvoir leur région et leur département. J’ai croisé Gérard Collomb aux Émirats voilà quelques semaines.
M. Michel Mercier. Il n’y était pas au titre de la région.
Mme Nathalie Goulet. Non, il y était au titre du Grand Lyon. Il a réalisé sur place un travail extraordinaire pour drainer des investissements émiriens vers le territoire dont il est élu. Et je pourrais citer nombre d’exemples similaires.
Il convient donc de promouvoir cet excellent amendement. Notre commerce extérieur est confronté à de grandes difficultés. Il me paraît important que les régions, et non pas les départements, s’occupent de l’internationalisation des entreprises.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote sur l'amendement n° 671.
Mme Nathalie Goulet. Madame la présidente, je ne souhaite pas allonger les débats, mais reconnaissez que j’ai été d’une légèreté de sylphide depuis hier. Je ne suis pas intervenue,…
M. Gérard Longuet. Cela nous manquait ! (Sourires.)
Mme Nathalie Goulet. Pour ne rien vous cacher, cela me manquait aussi ! (Nouveaux sourires.)
Je ne suis pas élue dans un département ni dans une région. Je suis « hors sol », je n’ai donc pas de parti pris sur la clause de compétence générale.
En ce qui concerne l’aménagement numérique, je tiens à le souligner, nous sommes dans une situation paradoxale.
Je comprends très bien la position d’Hervé Maurey, qui a réalisé un travail important sur l’aménagement numérique des territoires. De ce point de vue, l’Orne se montre très actif. Cela s’explique sans doute par le fait que le conseil général est présidé par notre ancien collègue Alain Lambert, qui a la fibre numérique chevillée au corps. Le département a développé un plan numérique avec 115 sites prioritaires,…
M. Gérard Longuet. Très bien !