M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Delphine Batho, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. Monsieur le sénateur, la pollution de l’air est en effet un enjeu de santé publique majeur. C’est la raison pour laquelle j’ai décidé d’augmenter le budget destiné à financer les actions d’amélioration de la qualité de l’air de 18 % en 2013, notamment le budget des associations, ce qui, dans un contexte budgétaire contraint, est un effort significatif.
En outre, j’ai présenté, le 6 février dernier, un plan d’urgence pour la qualité de l’air prévoyant un certain nombre de mesures d’ordre public environnemental.
La mesure en continu de la qualité de l’air est bien sûr un outil indispensable à la politique de l’État et des collectivités. Le réseau de stations de surveillance fixes ou mobiles doit respecter des critères stricts, qui sont fixés par les directives européennes.
En France, ce sont les associations agréées de surveillance de la qualité de l’air, auxquelles je rends hommage, comme Airparif en Île-de-France, qui sont chargées, pour le compte de l’État et des pouvoirs publics, de la mise en œuvre des moyens de surveillance et de l’information du public en cas de dépassement des seuils de pollution, ce qui est arrivé assez fréquemment depuis le début de l’année.
Depuis plusieurs années, le Laboratoire central de surveillance de la qualité de l’air vérifie que le réseau national est bien maillé et conforme à la directive européenne.
Les dernières expertises menées en 2011 et 2012 ont établi qu’il existait suffisamment de stations de mesure fixes en France, mais qu’il pourrait être utile de développer des stations de mesure mobiles.
Comme vous le savez, monsieur le sénateur, les stations fixes sont généralement situées sur le domaine public et sont donc soumises à autorisation de la collectivité territoriale concernée.
Vous évoquez la station d’Issy-les-Moulineaux, exploitée par Airparif depuis 1991. La ville d’Issy-les-Moulineaux a souhaité disposer des lieux en 2009, et la convention de mise à disposition du local n’a pas été reconduite par la communauté d’agglomération Arc de Seine, devenue Grand Paris Seine Ouest.
La communauté a lancé une procédure de contentieux à l’égard d’Airparif, qui s’est vu assigner pour occupation illégale par le tribunal administratif de Cergy et mis en demeure avec astreinte journalière. Airparif a donc décidé d’opter pour un autre emplacement.
D’autres communes des Hauts-de-Seine ont émis le souhait d’accueillir la station, comme Clamart, mais le choix final pourrait se situer dans le 15e arrondissement, à proximité d’Issy-les-Moulineaux, dans une configuration similaire.
La station d’Issy-les-Moulineaux sera fermée en 2013, et, dans l’attente d’une solution nouvelle, la surveillance de la qualité de l’air sera assurée dans cette zone grâce à la complémentarité entre les stations de mesure et la modélisation permettant d’évaluer la pollution en tout point du territoire.
Quant au financement des associations agréées de surveillance de la qualité de l’air, il est régi par le code de l’environnement, qui prévoit un financement tripartite : subventions de l’État et des collectivités, contributions des industriels.
Le soutien de l’État a été constant. L’augmentation, depuis 2010, de la quotité de certains polluants de la TGAP – taxe générale sur les activités polluantes – que les associations agréées de surveillance de la qualité de l’air peuvent récupérer en partie sous forme de dons des industriels, leur permet de voir leur budget s’accroître sensiblement.
Mais l’État ne peut en aucun cas imposer aux acteurs locaux ni leur adhésion aux associations agréées de surveillance de la qualité de l’air ni leur financement.
Je regrette profondément le retrait du conseil général des Hauts-de-Seine, département dense de la zone sensible de qualité de l’air en Île-de-France, alors que l’ensemble des autres départements franciliens contribuent au financement d’Airparif, qui remplit des missions de service public.
Je rappelle que, pour les Franciliens, la pollution atmosphérique dans leur région est un sujet de préoccupation majeur.
Je note que le département des Hauts-de-Seine a également supprimé sa subvention à Bruitparif, qui est un outil régional d’aide dans la mise en place des cartes de bruit et des plans de prévention du bruit.
Soyez assuré, monsieur le sénateur, que je resterai très attentive à ce que la pérennité des moyens d’Airparif soit garantie, malgré la décision du conseil général des Hauts-de-Seine.
M. le président. La parole est à M. André Gattolin.
M. André Gattolin. Je vous remercie de votre réponse très précise et très détaillée, madame la ministre. J’en profite pour saluer mon collègue Philippe Kaltenbach, maire de Clamart, qui a accepté l’installation d’une station de mesure Airparif dans sa commune.
En tant que statisticien de formation, je sais que, pour que des mesures soient véritablement pertinentes dans la durée, on ne peut pas se permettre de modifier un échantillonnage, même si le rôle des modélisations est extrêmement important.
Plus il y aura de stations de mesure, plus les mesures seront fines et précises et permettront une meilleure prévention et une alerte plus rapide de nos concitoyens.
Cela étant dit, il est inquiétant que des collectivités territoriales se désengagent de ce réseau de surveillance au motif que les informations qu’ils fournissent sont alarmantes pour des municipalités vantant la qualité de vie sur leur territoire.
Trois sources de financement, vous l’avez rappelé, contribuent donc au budget du réseau français : l’État, principalement, les collectivités locales et les industriels. En la matière, il me semblerait intéressant d’innover. Le réseau de surveillance de l’air en France, qui est de bonne qualité, est très loin d’atteindre la capacité, la précision et le niveau de développement du système analogue existant en Allemagne, lequel est beaucoup plus réactif.
En décembre dernier, lors de l’installation du comité pour la fiscalité écologique, vous constatiez que la France était avant-dernière en Europe en matière de fiscalité environnementale et qu’il était nécessaire, autant que faire se peut, d’établir un lien concret et direct entre l’affectation du produit de cette fiscalité et l’action environnementale.
Je pense qu’il serait intéressant, pour financer la surveillance de l’air, d’étudier deux sources nouvelles de financement répondant toutes les deux au principe du pollueur-payeur et ne créant pas de nouvel impôt. Il devrait être possible, en premier lieu, qu’une part de la TGAP soit reversée de manière fixe aux organismes français de contrôle de l’air, en second lieu, qu’une fraction de quelques centimes d’euros de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, l’ancienne TIPP, soit affectée au réseau de mesure de la qualité de l’air.
En tout cas, il faudra trouver une façon, un jour ou l’autre, de rendre obligatoire l’installation de capteurs de mesure de la qualité de l’air dans les communes sensibles ou très sensibles afin d’éviter que, dans les mois ou les semaines à venir, de nouvelles communes se désengagent du réseau de surveillance.
inscription de l'usine solvay sur la liste des établissements ouvrant droit au dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante
M. le président. La parole est à M. Daniel Reiner, auteur de la question n° 335, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.
M. Daniel Reiner. Madame la ministre, ma question initiale, qui date de janvier 2013, visait à attirer votre attention sur les délais d’inscription de l’usine Solvay de Dombasle-sur-Meurthe sur la liste des établissements ouvrant droit au dispositif de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, ou CAATA. Cette entreprise, située dans la vallée de la chimie de la Meurthe, est l’une des deux dernières soudières existant en France, la seconde se trouvant à quelques kilomètres de là.
Après un refus du tribunal administratif en 2007, cette inscription a été demandée le 1er octobre 2012 par la cour administrative d’appel de Nancy, au vu du nombre de salariés exposés à l’amiante et de la durée de leur exposition.
Je rappelle tout de même que, à ce jour, on dénombre dans cette entreprise quatre décès imputables à l’amiante et trente-huit salariés atteints de pathologies liées à leur exposition à ce minéral. L’utilisation de ce matériau n’a définitivement cessé qu’en 1997, après trente années de manipulation par des centaines de salariés.
À la suite de la décision de la cour administrative d’appel de Nancy, le ministère du travail et de l’emploi – pas le vôtre, donc, madame la ministre – a décidé de se pourvoir devant le Conseil d’État. Je ne vous cacherai pas, madame la ministre, que cette décision est apparue assez peu compréhensible aux yeux de la centaine de salariés concernés, alors même que l’entreprise elle-même – son dirigeant me l’avait fait savoir – n’avait pas souhaité faire appel de cette décision.
Depuis que je l’ai déposée, ma question a trouvé une réponse partielle puisqu’un arrêté de votre ministère, en date du 6 février 2013, a inscrit cette entreprise sur la liste des établissements ouvrant droit au dispositif CAATA. Pourtant, cet arrêté ne satisfait personne puisqu’il prend comme période de référence les années allant de 1966 à 1990, et non pas jusqu’à 1997, ce qui était demandé par les salariés, la cour d’appel de Nancy et la commission des accidents du travail et maladies professionnelles, sollicitée pour avis par le ministère.
Aussi, une question demeure : pourquoi l’arrêté ne prend-il pas en compte la totalité de la période, alors même que la commission des accidents du travail et maladies professionnelles le conseillait ? Cinquante salariés sont concernés pour ces sept années et, dans l’état actuel de l’arrêté, il leur sera impossible de profiter du dispositif de cessation anticipée d’activité.
On le sait, l’amiante provoque en France plus de 3 000 décès par an. Il importe, pour les 130 salariés de l’entreprise Solvay exposés à l’amiante de 1966 à 1997, que l’État leur accorde la retraite anticipée à laquelle ils ont droit, reconnaissant ainsi que l’emploi qu’ils ont occupé durant des dizaines d’années comportait un risque auquel ils ont été exposés sans protection.
Je souhaiterais que vous puissiez m’indiquer, madame la ministre, les mesures que vous entendez prendre pour reconnaître ce préjudice sur la totalité de la période d’exposition.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le sénateur, l’établissement Solvay, situé à Dombasle-sur-Meurthe, a été inscrit sur la liste des entreprises qui ouvre droit à l’allocation de cessation anticipée d’activité pour les travailleurs de l’amiante par un arrêté du 6 février 2013, paru au Journal officiel le 13 février 2013.
Vous me demandez, d’abord, pourquoi la période d’inscription retenue s’étend de 1966 à 1990 et non pas au-delà. La raison est la suivante : c’est en 1990 qu’a pris fin l’activité de confection de diaphragmes à base d’amiante, qui se déroulait dans le cadre d’une unité d’électrolyse destinée à la fabrication de chlore. Cette information n’a été portée à la connaissance du ministère du travail qu’après la tenue de la commission des accidents du travail et maladies professionnelles de la CNAMTS. C’est ce qui explique que le projet d’arrêté soumis à cette commission ne comportait pas, initialement, la limite de l’année 1990.
Par ailleurs, vous mentionnez le recours engagé par le ministère du travail contre l’arrêt de la cour d’appel administrative de Nancy.
Selon la jurisprudence du Conseil d’État, seuls les établissements dans lesquels les opérations de calorifugeage ou de flocage à l’amiante ont, compte tenu notamment de leur fréquence et de la proportion de salariés qui y ont été affectés, représenté une part significative de leur activité peuvent être inscrits sur la liste ouvrant droit à cette allocation. Or il ressort des pièces du dossier que ces conditions n’étaient pas remplies dans l’établissement de Dombasle-sur-Meurthe. C’est pourquoi le ministère du travail s’est pourvu contre la décision de la cour administrative d’appel de Nancy. En effet, celle-ci a retenu une proportion de salariés exposés entre 9 % et 12 % du total des effectifs sur la période d’exposition, ce qui est bien inférieur au seuil de 25 % habituellement retenu par la jurisprudence.
Voilà, monsieur le sénateur, les raisons des décisions qui ont été prises. Je tiens cependant à vous réaffirmer la forte volonté du Gouvernement de faire en sorte que les victimes de l’amiante soient indemnisées, dans le respect des règles de droit définies et en fonction du préjudice subi.
M. le président. La parole est à M. Daniel Reiner.
M. Daniel Reiner. Madame la ministre, je vous remercie de cette réponse précise, que je vais porter, naturellement, à la connaissance des intéressés.
Je comprends bien que la jurisprudence du Conseil d’État impose, en quelque sorte, au ministère de déposer ce recours. Néanmoins, ce dernier a été psychologiquement mal reçu par le personnel parce qu’il reportait dans le temps la prise de mesures difficiles, en particulier la réorganisation de l’entreprise.
Elle fut également mal comprise par l’encadrement de cette entreprise, qui, même s’il n’était pas directement concerné à l’époque, assume aujourd'hui la responsabilité liée à la présence d’amiante. Ces responsables craignaient en effet que le départ rapide des travailleurs touchés ne désorganise complètement leur entreprise. Il était donc nécessaire pour eux de prendre le temps de parer à cette désorganisation. Un accord a même été passé entre les responsables de l’entreprise et les syndicats, pour mener à bien, justement, cette opération. Ce recours a donc compliqué les choses.
J’en viens à la période de référence retenue. L’unité d’électrolyse, c’est vrai, a bien été fermée vers 1990. Il n’en demeure pas moins que des travailleurs ont continué à être exposés à l’amiante, que l’on trouvait ailleurs dans cette entreprise qui s’étend sur des dizaines d’hectares. Ce n’est qu’en 1997 que l’on a mis fin à l’utilisation d’amiante.
Je pense donc que les salariés ne comprendront pas que ces travailleurs-là ne soient pas traités comme les autres. Cela va créer une discrimination à l’intérieur de l’entreprise. Les syndicats vont, probablement, déposer un nouveau recours, en s’appuyant sur la décision de la commission des accidents du travail et maladies professionnelles, qui leur donnait raison et recommandait que soit prise en compte la période allant jusqu’à 1997.
situation des associations d’aide à domicile
M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, auteur de la question n° 339, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.
M. Philippe Bas. Madame la ministre, ma question touche à un problème récurrent.
Nos associations d’aide à domicile au service des personnes âgées sont dans une situation très difficile. Elles bénéficient d’un tarif 1,50 euro plus élevé que le tarif horaire proposé par la Caisse nationale d’assurance vieillesse – CNAV – et par ses correspondants régionaux pour la prise en charge de l’aide ménagère au bénéfice des personnes âgées les moins dépendantes.
Reste que, aujourd’hui, une grande partie de nos associations d’aide à domicile assument ces prestations sans que leurs coûts de revient soient couverts. Nous les avons incitées à se regrouper, ce qu’elles font, d’ailleurs. Elles économisent ainsi des frais de gestion, mais cela ne suffit pas.
Jusqu’alors, aucun fonds d’urgence n’a permis de régler le problème. Vous vous trouvez donc, madame la ministre, face à une alternative : soit vous arrivez à mobiliser des crédits nouveaux au titre de l’aide sociale de la CNAV et de la Mutualité sociale agricole, et vous pourrez alors augmenter le tarif horaire de nos associations pour qu’elles ne meurent pas ; soit vous ne pouvez pas le faire, dans les circonstances financières actuelles, mais il faudrait, alors, que vous puissiez autoriser les associations d’aide à domicile financées par l’assurance vieillesse au titre de l’aide sociale à percevoir la différence entre le coût de revient de la prestation et ce qui est pris en charge, au titre de l’aide ménagère, différence pouvant être acquittée par l’usager lui-même, qui ne demande pas mieux, dans la plupart des cas, que de le faire.
Vous ne pouvez pas à la fois refuser de financer le nécessaire et exclure que les associations se financent en obtenant l’appoint de la part des personnes âgées qu’elles assistent. Si vous adoptez cette posture de double refus, alors, nos associations d’aide à domicile, pour les plus fragiles d’entre elles, disparaîtront, avec le coût social que cela représente. Je pense non seulement au personnel que ces associations emploient, mais aussi et surtout à la difficulté que vous aurez à réaffirmer la priorité que, comme nous, j’en suis sûr, vous accordez au maintien à domicile de nos personnes âgées.
Voilà, madame la ministre, la question que je veux vous poser et l’inquiétude que je relaie.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le sénateur, c’est incontestable, les associations d’aide à domicile rencontrent des difficultés. Tout élu local est confronté, sur son territoire, aux inquiétudes exprimées par ces associations qui sont notamment au service des personnes âgées, et dont le rôle doit être reconnu et salué. Si nous voulons favoriser le maintien à domicile de ces personnes et préserver ainsi leur autonomie le plus longtemps possible, nous devons agir.
C’est ce qu’a fait le Gouvernement en décidant de créer un fonds de restructuration de l’aide à domicile dans la loi de finances pour 2013. Ce fonds permettra de mobiliser 50 millions d’euros pour 2013 et 2014, qui s’ajouteront aux 50 millions d’euros versés en 2012.
Les arrêtés précisant la répartition des sommes allouées à ce fonds ont été publiés récemment. Les services ont jusqu’au 30 avril, pour adresser leur dossier de demande à l’agence régionale de santé, qui coordonne le travail administratif, en liaison avec l’ensemble des financeurs, en particulier les conseils généraux et les caisses d’assurance retraite et de la santé au travail.
Le travail d’instruction des dossiers sera donc réalisé en concertation avec l’ensemble des acteurs, mais sous la responsabilité des agences régionales de santé.
Cette première action, importante et volontariste, se poursuivra par l’élaboration d’une stratégie de refondation de l’aide à domicile, afin de répondre, notamment, aux exigences de qualité, de professionnalisation et d’accessibilité financière pour les usagers, ainsi qu’aux exigences de bonne gestion des crédits mobilisés.
Nous allons conduire des expérimentations visant à déterminer un nouveau mode de tarification. Elles devraient permettre de mieux définir les prestations attendues et de fixer les modalités d’une contractualisation entre chaque conseil général et les opérateurs intervenant sur son territoire. L’idée est qu’une contractualisation soit mise en place dans chaque département à partir d’objectifs spécifiques, appuyés sur un schéma national, et dans un cadre pluriannuel.
Un groupe de travail sur les groupes iso-ressources 5 et 6 – GIR 5 et GIR 6 –, relevant actuellement des caisses de retraite et de la CNAV, devra également permettre de favoriser le recours à l’aide à domicile pour les personnes qui, encore largement autonomes, commencent néanmoins à la perdre, et de faciliter la transition en cas de passage au GIR 4.
Vous le voyez, monsieur le sénateur, le Gouvernement est pleinement conscient des préoccupations que vous relayez, et il a d’ores et déjà pris des mesures pour répondre à la situation à laquelle sont confrontées les associations d’aide à domicile.
M. le président. La parole est à M. Philippe Bas.
M. Philippe Bas. Je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse et de l'intérêt que vous portez aux associations d'aide à domicile, ainsi, bien sûr et avant tout, qu’aux personnes âgées qui bénéficient de leurs prestations.
Malheureusement, le fonds d'urgence de 50 millions d’euros, même renouvelé chaque année, ne s'est pas révélé jusqu'à présent à la hauteur des besoins. Je reste préoccupé, après votre réponse, des conditions de l'équilibre financier des associations.
Je vous ai demandé si vous pouviez envisager de desserrer cette contrainte – elle n’est d'ailleurs nullement légale – qui empêche de percevoir un complément de la part de la personne âgée elle-même lorsque le tarif, pour des raisons budgétaires et financières nationales, est bloqué à un niveau insuffisant.
Vous ne m'avez pas répondu, mais je ne doute pas que la réflexion du Gouvernement se poursuit. En tout cas, les conseillers généraux comme le Gouvernement et les agences régionales de santé, le conseil d'administration de la CNAV et celui de la Mutualité sociale agricole, ne peuvent pas laisser en l’état une situation qui ne cesse de se dégrader.
Les associations ont déjà pris un certain nombre de mesures de bonne gestion et d'économie. Aujourd'hui, les marges d'amélioration sont donc de plus en plus faibles, même s’il en reste sans doute quelques-unes dans tel ou tel département.
Quoi qu’il en soit, je puis vous assurer que la situation est actuellement extrêmement tendue dans le département de la Manche. Je ne doute pas que vous saurez obtenir du ministre délégué au budget les assouplissements nécessaires pour l’ensemble des départements français, car il doit, lui aussi, avoir conscience de cette difficulté.
pacte territoire-santé et dordogne
M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, auteur de la question n° 315, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.
M. Claude Bérit-Débat. Madame la ministre, il y a quelques semaines, vous dévoiliez les principales mesures du plan de lutte contre les déserts médicaux.
Ce plan est d’autant plus indispensable que la pénurie de soins concerne aujourd’hui 10 % de la population française. Ce chiffre, comme toute moyenne, renvoie cependant à des réalités fort différentes.
Ainsi, dans les territoires ruraux, la situation est extrêmement préoccupante, voire alarmante. C’est le cas, par exemple, dans mon département, la Dordogne, où 30 % de la population a plus de soixante ans. En outre, la Dordogne est le troisième département de France par sa superficie et la densité n’y est que de 46 habitants au kilomètre carré.
Cela vous laisse percevoir immédiatement les difficultés que rencontrent les Périgourdins en termes d’accès aux soins. Pour les soins de pédiatrie, de gynécologie ou encore d’ophtalmologie, un habitant sur trois se trouve dans un désert médical. En outre, dans un canton sur cinq, on ne trouve plus qu’une seule pharmacie, un canton sur cinq manque d’infirmiers et un canton sur dix est en déficit de médecins généralistes.
M. Jean Besson. C’est juste !
M. Claude Bérit-Débat. Nous sommes, de plus, confrontés à un manque de médecins assurant les gardes de nuit, et les services d’urgence, SAMU-SMUR, ne peuvent plus répondre aux besoins, faute de personnel.
La situation est donc déjà plus que difficile.
Malheureusement, elle ira en s’aggravant puisque les médecins généralistes qui officient sur notre territoire sont aujourd’hui âgés. Si rien n’est fait, un sur deux ne trouvera pas de remplaçant.
Les élus du territoire se mobilisent pour stopper l’hémorragie. En quelques années, dix maisons de santé ont été ouvertes sur le département. Des contrats locaux de santé ont été passés, notamment dans le nord du département, qui est le plus touché.
Cependant, cet investissement des collectivités ne suffit pas à inverser la tendance, et l’on peut dire que, inexorablement, le désert médical gagne du terrain en Dordogne.
Dans votre plan de lutte, vous évoquez, par exemple, la mise en place d’un revenu garanti pour 200 praticiens territoriaux en médecine générale, l’adaptation des hôpitaux de proximité ou bien encore la création d’un référent installation.
Si je salue ces annonces, je m’interroge toutefois sur leurs effets concrets dans le territoire que je représente. Pourriez-vous m’indiquer, madame la ministre, dans quelle mesure la Dordogne bénéficiera de ce plan afin que notre département ne soit plus le désert médical qu’il est en train de devenir ? (M. Jean Besson applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le sénateur, dans de très nombreux territoires, l'attente de nos concitoyens est forte au regard de l’offre de soins, de la présence de médecins, d'infirmiers, de kinésithérapeutes, de pharmacies. Voilà pourquoi j'ai insisté, lorsque j'ai lancé le pacte territoire-santé, au mois de décembre dernier, sur la nécessité d’organiser une concertation au niveau de chaque territoire. Ainsi, nous pourrons déterminer la meilleure manière d'adapter les engagements du Gouvernement à chacun d’entre eux.
L'Agence régionale de santé d'Aquitaine a ainsi mené une concertation en Dordogne au mois de février dernier, en y associant l’ensemble des parties prenantes, c'est-à-dire les professionnels de santé libéraux et hospitaliers, les ordres, l'université et, bien entendu, les collectivités territoriales, car c'est avec elles et en relation avec elles que le travail doit s'accomplir.
Un plan d’action sur l’ensemble des axes du pacte a été élaboré par l’Agence.
Ainsi, pour faciliter l’installation des jeunes médecins en Dordogne, l’ARS d’Aquitaine a développé un partenariat avec l’université de Bordeaux qui forme les futurs médecins. Il s’agit de communiquer fortement auprès des jeunes médecins généralistes et de définir un projet d’accompagnement de la filière de médecine générale tout au long du parcours de l’étudiant.
De plus, afin de répondre aux craintes d’isolement des jeunes médecins et pour optimiser le temps médical, ce qui correspond à une demande des professionnels, l’Agence a développé un partenariat avec l’ensemble des financeurs publics en Dordogne, en vue de mobiliser tous les moyens autour des pôles de santé. À ce jour, dix maisons de santé pluridisciplinaires fonctionnent dans le département de Dordogne.
Pour garantir l’accès aux soins urgents en moins de trente minutes, l’Agence va promouvoir en Dordogne le dispositif de médecin correspondant du SAMU, médecin généraliste libéral de premier recours prenant en charge des patients en situation d’urgence médicale grave.
Elle va aussi développer des projets d’expérimentation qui visent à renforcer la réponse à l’aide médicale urgente dans les zones situées à plus de quarante-cinq minutes d’un accès SMUR en mettant en place des dispositifs de télémédecine.
Enfin, concernant les hôpitaux de proximité, un travail s’est engagé sur les liens entre les établissements de proximité et le centre hospitalier de Périgueux, établissement de recours pour le territoire de santé que vous évoquez, monsieur le sénateur.
Des rapprochements sont en cours, notamment via la mise en place d’une direction commune entre les centres hospitaliers de Périgueux, de Lanmary et de Sarlat. Les hôpitaux participent aussi au déploiement des consultations avancées de médecins spécialistes, axe important pour l’accès aux soins.
Vous le constatez, monsieur le sénateur, la dynamique du pacte territoire-santé est engagée en Dordogne, comme ailleurs sur le territoire. Vous pouvez être assuré de ma détermination pour veiller à sa bonne mise en œuvre. Il y va de l'égalité d'accès aux soins sur l'ensemble du territoire. Grâce à la mobilisation de tous, nous pourrons arriver à répondre aux attentes de la population.