M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. La majoration s’applique sur le prix de la prestation de transport qui a été contractuellement définie entre le transporteur et son donneur d’ordre.
Ce dernier n’a pas à connaître le mode d’organisation de son transporteur. Or l’application de ces amendements supposerait un droit de regard du donneur d’ordre sur les modalités d’exécution de la prestation, ce qui ne peut être accepté.
La relation contractuelle entre un donneur d’ordre et son transporteur ou commissionnaire est totalement indépendante des éventuelles relations d’affrètement entre ce dernier et d’autres transporteurs. L’amendement viendrait ainsi compliquer le dispositif et le viderait de son principal objectif, à savoir la sécurisation juridique, pour le transporteur, du principe de majoration.
Il faut savoir que les modes d’organisation peuvent être très complexes, qu’il s’agisse de chargeurs se tournant vers un commissionnaire ou d’un commissionnaire se tournant lui-même vers un transporteur, qui fera à son tour appel à un affréteur. Les répercussions nécessaires doivent pouvoir s’opérer de sorte qu’il n’y ait pas, comme le disait le rapporteur, d’enrichissement sans cause.
En conséquence, l'avis du Gouvernement est défavorable.
M. le président. Monsieur Requier, l'amendement n° 87 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Claude Requier. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 87 rectifié est retiré.
L'amendement n° 49, présenté par M. de Montgolfier et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Cependant, pour la détermination du taux, un département peut être rattaché à une région limitrophe pour tenir compte de la consistance du réseau soumis aux taxes mentionnées au premier alinéa sur les réseaux de transport.
La parole est à M. Albéric de Montgolfier.
M. Albéric de Montgolfier. Cet amendement ne vise nullement à remettre en cause le système de majoration, dont je considère en effet, à titre personnel, qu’il est bien meilleur que le précédent, parce qu’il offre l’avantage d’être simple et opérationnel.
En revanche, il est possible d’émettre une critique à l’égard de ce système de la majoration : le fait que le taux forfaitaire soit établi au niveau régional, alors que la liste des itinéraires a été établie département par département. Vous pouvez donc être confrontés, à l’intérieur d’une même région, à de très grandes disparités. Ainsi, dans la région Centre, l’Indre-et-Loire dispose de 15 kilomètres de routes taxables, quand un autre département de la même région en possède 476 kilomètres. Le taux régional ne reflète, pour sa part, qu’une moyenne.
Marie-Hélène des Esgaulx a très bien souligné dans son rapport quelles seront les conséquences de ce dispositif : dans certains cas, les transporteurs bénéficieront d’effets d’aubaine en raison d’un taux de retour supérieur au coût de l’éco-redevance ; dans d’autres cas, par exemple s’ils doivent emprunter un réseau fortement taxé, ils ne pourront pas répercuter le coût du transport. Là réside tout l’inconvénient du système : il repose sur un taux régional alors même que la liste des itinéraires est établie département par département.
Nous ne cherchons pas, au travers de cet amendement, à remettre en cause le système du taux régional. Nous voulons que les situations quelque peu exceptionnelles soient prises en compte et qu’il soit possible, en présence d’un réseau taxé d’importance, de rattacher le cas échéant tel ou tel département à la région limitrophe.
Vous nous avez dit précédemment, monsieur le ministre, que le réseau local comptait au total 5 000 kilomètres de route. Or nous sommes en présence d’un département qui possède à lui seul 400 kilomètres de routes locales taxées. Il s’agit donc d’un cas exceptionnel pour lequel le dispositif du taux régional ne permet pas de répercuter correctement le coût du transport, ce qui va pénaliser fortement les entreprises concernées. Je demande que l’on examine de plus près cette situation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Roland Ries, rapporteur. Cet amendement vise à permettre le rattachement d’un département à une région limitrophe pour ce qui concerne le taux de majoration retenu, afin de tenir compte de la consistance du réseau observé et des différences existant à l’intérieur d’une région.
Cette proposition part d’un bon sentiment et souligne les effets de frontière liés au dispositif retenu. Ces derniers ne m’avaient pas échappé. Je tiens toutefois à préciser un point : d’après les informations que j’ai obtenues auprès de vos services, monsieur le ministre, le choix du niveau départemental ou du bassin de vie n’aurait pas sensiblement réduit les écarts liés au caractère forfaitaire de la majoration. En revanche, il aurait été source de complexité dans l’application du dispositif, notamment pour les transporteurs et les chargeurs, confrontés à une multiplicité de taux et de cas de figure.
Ne souhaitant pas recréer d’usine à gaz, la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. Tout d’abord, je remercie M. Montgolfier d’avoir souligné les vertus simplificatrices du dispositif, qui a maintenant un caractère opposable et sécurisant. Ceux qui ont encore besoin d’être convaincus sont, heureusement, de plus en plus rares ! Votre intervention vient conforter et saluer l’action que nous menons afin de mettre en œuvre le schéma le plus lisible possible.
Vous évoquez, monsieur le sénateur, la possible pertinence de l’échelon départemental. Or cette question a déjà été réglée par les lois Grenelle qui ont retenu le cadre régional pour ce dispositif : les taux sont calculés en fonction des périmètres de routes taxées, de la densité des trafics et de l’échelle régionale.
Par ailleurs, cet amendement, pour intéressant qu’il soit, permettrait de choisir le taux applicable : taux de la région d’origine, de la région limitrophe, voire de plusieurs régions, à l’instar, par exemple, de l’Eure-et-Loir, limitrophe de l’Île-de-France et de la Haute-Normandie. Or le dispositif n’a pas prévu une telle possibilité. Cela risque de compliquer la mise en œuvre de l’écotaxe poids lourds.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
M. le président. La parole est à M. Gérard Cornu, pour explication de vote.
M. Gérard Cornu. J’entends bien, monsieur le ministre, qu’il nous faut faire en sorte de simplifier. Or la simplification ne doit pas aller à l’encontre du pragmatisme !
L’amendement n° 49, déposé par Albéric de Montgolfier, est très pragmatique, car il vise la situation concrète que nous vivons en Eure-et-Loir. De plus, la rédaction retenue n’ouvre la voie qu’à une possibilité de rattachement à une région limitrophe, situation exceptionnelle s’il en est, et qui ne concerne que bien peu de départements…
Nous sommes tous, ici, des personnes pragmatiques, proches de la réalité du terrain. Cette possibilité de rattachement, qui ne concernera que quelques départements, dont l’un est proche de l’Île-de-France, peut s’avérer très intéressante. Le Sénat s’honorerait à voter cet amendement de bon sens.
M. le président. La parole est à M. Albéric de Montgolfier, pour explication de vote.
M. Albéric de Montgolfier. Encore une fois, monsieur le ministre, je ne souhaite pas revenir à des taux départementaux, ce qui serait sans doute trop complexe. Cependant, il nous faut tenir compte de certaines spécificités locales. Hier soir, assez tardivement, nous avons ainsi évoqué les cas de l’Alsace et de la Bretagne, entre autres.
L’Eure-et-Loir, département qui compte 476 kilomètres de routes, dont 400 kilomètres de départementales, représente à lui seul, si l’on en croit les chiffres rappelés précédemment, près de 10 % des 5 000 kilomètres du réseau routier taxable national. Les conséquences de l’application de ce dispositif seront très simples : les entreprises d’Eure-et-Loir seront pénalisées, car elles ne pourront pas répercuter le coût du transport. Elles envisageront de déménager, tout comme les centres de logistique. Il s’agit donc d’un cas très particulier, lié au trafic francilien, qui mérite une attention particulière.
Encore une fois, nous ne souhaitons pas remettre en cause le système du taux régional, qui semble être en effet facteur de simplification, mais plutôt tenir compte d’un certain nombre de spécificités, dont celle de l’importance du réseau local.
M. le président. L'amendement n° 76, présenté par M. Favier et Mmes Assassi et Cohen, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« En région Île-de-France, le taux fixé est majoré de 1,5 centimes d’euros par kilomètre. La somme ainsi collectée est affectée à l’établissement public Société du Grand Paris créé par l’article 7 de la loi n° 2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand Paris.
La parole est à M. Christian Favier.
M. Christian Favier. À rebours de nombreuses déclarations cherchant à vider l’écotaxe de son contenu via diverses exonérations, notre amendement vise à abonder les ressources de la Société du Grand Paris par une taxe additionnelle à l’écotaxe prévue dans ce projet de loi, afin d’augmenter les recettes de cette société publique chargée de réaliser les 200 kilomètres du métro automatique Grand Paris Express pour les quinze années à venir.
Grâce à cette contribution complémentaire, propre à l’Île-de-France, la Société du Grand Paris sera en mesure de mieux tenir ses engagements en levant un niveau d’emprunt plus important sans pour autant réduire les moyens de l’AFITF. Ce faisant, nous renforcerons les objectifs de cette écotaxe poids lourd, qui vise à inciter les chargeurs à privilégier des modes de déplacements alternatifs plus respectueux de l’environnement.
La région Île-de-France, vous le savez, est particulièrement concernée par cette démarche de réduction des nuisances, tant elle concentre sur son territoire de très fortes circulations de transit et de desserte, parmi les plus élevées d’Europe. Dans ce cadre, la réalisation du métro Grand Paris Express représente un enjeu considérable pour la région, en ce qu’il permettra une mobilité alternative grâce à une reconfiguration du réseau de transports collectifs. Sa réalisation jouera en faveur, d’une part, de la qualité de vie des Franciliens et de leur capacité à mieux se déplacer dans l’ensemble de la région, et, d’autre part, des entreprises de cette région, en désengorgeant les infrastructures routières, en réduisant les temps de parcours de leurs salariés et de transport de leurs marchandises, ce qui renforcera leur compétitivité.
Dans cette perspective, la taxe additionnelle que nous proposons, qui est de 1,5 centime d’euro par kilomètre, est finalement très modeste au regard des avantages économiques et sociaux attendus de la réalisation du Grand Paris Express.
Chacun sait, monsieur le ministre, les difficultés actuelles rencontrées par l’État pour dégager les sommes nécessaires à cet investissement, qui vient d’être évalué à 30 milliards d’euros. C’est pourquoi les élus locaux et les parlementaires de la région Île-de-France recherchent actuellement de nouvelles voies de financement pour mener à bien ce projet d’infrastructure majeur. Si j’en crois la presse, certains parlementaires ont d’ailleurs été reçus, hier, par le Premier ministre pour évoquer ce sujet.
Des propositions sont donc aujourd’hui sur la table, visant en particulier à réduire les taux et à allonger la durée des emprunts. Cependant, d’autres recettes doivent être recherchées. L’écotaxe poids lourd ainsi améliorée pourrait utilement participer au financement de ce grand projet d’intérêt général.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Roland Ries, rapporteur. Cet amendement vise à majorer le taux de l’écotaxe dans la région Île-de-France. Cette majoration de 1,5 centime d’euro par kilomètre serait destinée à financer la Société du Grand Paris, et donc le Grand Paris Express, ainsi que d’autres projets importants dans la région capitale. Je peux bien évidemment comprendre ce souci tout à fait légitime. La nécessité d’entreprendre ces investissements très lourds en région parisienne est bien connue.
L’écotaxe représente néanmoins, selon moi, un effort d’ores et déjà important pour les transporteurs et les chargeurs. Il ne nous semble donc pas opportun, dans le contexte actuel, d’aller au-delà de ce qui a été prévu. Il faudra trouver d’autres sources de financement, d’autres recettes, car, comme je l’ai dit, la nécessité d’entreprendre ces investissements est évidente.
La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. Trouver des solutions de financement pour le Grand Paris est une louable intention. Comme vous le savez, ce dossier relève de la responsabilité de ma collègue et amie Cécile Duflot, et j’y participe pour la partie relative à l’optimisation du financement du Grand Paris Express.
Cela étant dit, nous discutons ici de l’écotaxe poids lourd, qui doit elle-même permettre de financer en partie l’AFITF. Si l’intention est louable, l’objet visé est sensiblement différent de ce qui nous occupe aujourd’hui. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Je soutiendrai l’amendement de nos collègues communistes, car l’esprit du dispositif proposé est intéressant.
Les transporteurs routiers perdent énormément d’argent en Île-de-France en raison de l’engorgement des voies. En l’absence de nouveaux flux financiers, et donc d’investissement massif vers de nouvelles offres de transport, il ne sera pas possible de faire évoluer cette situation.
Quant à la création d’une dynamique financière, dont les transporteurs routiers, dans un deuxième temps, seront aussi bénéficiaires, c’est également une bonne idée.
M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.
M. Vincent Capo-Canellas. Je partage la préoccupation exprimée par nos collègues du groupe communiste.
La question du financement du réseau express du Grand Paris est actuellement pendante. Elle est d’autant plus cruciale que le Gouvernement n’a pas inscrit dans la programmation budgétaire le milliard d’euros attendu pour assurer une bonne partie de ce financement. L’inquiétude prévaut donc dans toutes les collectivités qui doivent accueillir ces nouvelles gares.
Ronan Dantec a fait allusion aux difficultés rencontrées en Île-de-France pour assurer le transport de l’ensemble des habitants. Se pose aussi la question de la performance attendue par les touristes et par l’ensemble du secteur économique lié aux transports. Cependant, il ne me semble pas opportun de « charger » encore davantage des entreprises qui sont d’ores et déjà taxées au titre du Grand Paris.
Je partage le souci de clarification affiché dans cet amendement d’appel. Le Gouvernement doit présenter des positions claires, qui ne se limitent pas à la réduction des voies, des trains et au report à une date ultérieure de l’ensemble des travaux.
Vous êtes attendu sur tous ces points, monsieur le ministre. Je me réjouis donc que nos collègues communistes aient posé cette question, même si je n’approuve pas tout à fait la solution proposée. Par conséquent, je m’abstiendrai sur cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 66, présenté par MM. Bizet et Revet, est ainsi libellé :
Alinéa 7
1° Première phrase
Supprimer cette phrase.
2° Deuxième phrase
Remplacer le mot :
Ils
par les mots :
Ces taux
La parole est à M. Jean Bizet.
M. Jean Bizet. Monsieur le président, je retire cet amendement inspiré par le système allemand, qui n’était pertinent qu’adossé à un certain nombre d’exemptions.
M. le président. L’amendement n° 66 est retiré.
L'amendement n° 67, présenté par M. Bizet, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La majoration du prix de transport est considérée comme un transfert de charges, et non comme du chiffre d’affaires.
La parole est à M. Jean Bizet.
M. Jean Bizet. La majoration du prix de la prestation de transport vient en compensation du coût de la taxe, conformément aux dispositions de l’article 11, paragraphe VI, de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement. Comme elle ne constitue pas une prestation de transport produite, il ne s’agit pas de chiffre d’affaires, mais bien d’un transfert de charges.
Même si elle semble évidente, la précision que je propose d’introduire est importante. En effet, si la majoration était considérée comme du chiffre d’affaires, elle entraînerait des prélèvements obligatoires supplémentaires. Cette incidence comptable et financière, estimée entre 0,5 % et 1 % de charges supplémentaires, ne serait pas neutre pour les entreprises.
Vous l’aurez compris, mes chers collègues, je suis préoccupé depuis le début de ce débat par la compétitivité des entreprises françaises. J’espère que le présent amendement sera étudié au travers du prisme de la fiscalité des entreprises.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Roland Ries, rapporteur. Cet amendement a pour objet de préciser que la majoration du prix de transport est considérée comme un transfert de charges, et non comme du chiffre d’affaires de l’entreprise. Il a des conséquences fiscales sur lesquelles nous souhaiterions entendre l’avis du Gouvernement, car nous ne sommes pas certains de maîtriser les conséquences concrètes de la modification proposée. La commission s’en remettra ensuite à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. La majoration en cause sera comptabilisée comme une recette dans le compte de résultat. Elle n’aura pas de conséquence notable en matière de résultat et d’impôt sur les sociétés, dans la mesure où elle sera contrebalancée par une croissance des charges due à l’acquittement de l’écotaxe par l’entreprise. L’opération sera neutre pour les transporteurs.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, pour explication de vote.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Monsieur le ministre, vous venez de nous indiquer que la majoration du prix des transports perçue en compensation du versement de l’écotaxe poids lourds par les entreprises de transports routiers sera inscrite en tant que recette au compte d’exploitation. Pour ma part, je note que le projet de loi n’apporte aucune précision sur ce point.
Or, comme l’a dit mon excellent collègue Jean Bizet, si cette majoration n’est pas un transfert de charges et doit être considérée comme du chiffre d’affaires, elle déclenche des prélèvements obligatoires, notamment la TVA. La distinction est très importante : j’en suis désolée, mais, à ma connaissance, la TVA est affectée non pas au budget transport, mais au budget général.
Par conséquent, j’estime que nous devons étudier attentivement cette question. En tout cas, nous aurions gagné à ce que le projet de loi précise vraiment la nature de cette majoration. Est-ce un transfert de charges ? Ressort-elle du chiffre d’affaires ? La précision que demande d’introduire M. Bizet est très importante.
M. le président. La parole est à M. Gérard Cornu, pour explication de vote.
M. Gérard Cornu. Les déclarations de M. le rapporteur ont fait naître en moi beaucoup d’espoir. Il s’en est remis à la sagesse de la Haute Assemblée tout en demandant à M. le ministre de nous fournir des explications complémentaires. Or j’ai trouvé celles-ci quelque peu alambiquées.
Pouvez-vous être plus précis, monsieur le ministre, afin que nous sachions si cette majoration constituera une nouvelle charge pour les entreprises ? Mais si telle n’est pas votre volonté, alors adoptons l’amendement de M. Bizet. Ce sera plus simple !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Roland Ries, rapporteur. J’ai bien entendu vos explications, monsieur le ministre.
Nous souhaitons, les uns et les autres, que les entreprises ne supportent pas de charge supplémentaire au titre de la compensation. Vous nous dites que tel sera bien le cas. Serait-il possible de le mentionner clairement dans le projet de loi, de façon à rassurer nos collègues ? Peut-être pourrions-nous présenter un sous-amendement à cette fin, car je ne suis pas certain que l’amendement de M. Bizet règle tout à fait le problème…
Nous sommes d’accord sur le principe ; reste à obtenir les garanties suffisantes.
M. le président. La parole est à M. Jean Bizet, pour explication de vote.
M. Jean Bizet. M. le ministre a indiqué tout à l’heure que les entreprises n’auraient pas à supporter de surcharge financière. Par le biais du présent amendement, j’ai non seulement posé la question de la nature de la majoration, mais j’y ai également répondu. Si la Haute Assemblée le rejetait, 0,5 % à 1 % de charges supplémentaires pèserait sur les entreprises.
L’idée du rapporteur est certes louable, mais pourquoi compliquer les choses ? Il suffit tout simplement d’adopter cet amendement ! S’il n’était pas voté, et je ne dis pas cela par provocation, les entreprises subiraient en quelque sorte une double peine.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. Je vous confirme qu’à la majoration, qui figurera au titre d’une recette dans le compte de résultat, lequel englobe les frais de gestion, correspond une charge. Le dispositif est donc neutre fiscalement : il n’aura pas de répercussion en termes d’impôt sur les sociétés.
M. le président. L'amendement n° 74, présenté par M. de Legge, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Dominique de Legge.
M. Dominique de Legge. Lors de la mise en place de l'écotaxe, il avait été décidé de moduler son taux pour tenir compte de la spécificité des territoires périphériques, où le transport est davantage lié à l'économie locale qu'au transit interrégional. Le dispositif mis en place par le présent projet de loi ne remet pas en cause ces abattements pour les transporteurs, contrairement, de fait, à l’instauration du taux unique facturé aux chargeurs, lequel se traduit par une majoration de taux dans les régions considérées. Il est donc à craindre que les transporteurs ne perçoivent une taxe supérieure à celle qu’ils acquitteront réellement.
Pour ma part, je souhaite éviter tout enrichissement sans cause résultant d’un prélèvement opéré au titre d’une taxe devant être acquittée dont le montant sera, en réalité, inférieur. Je ne sais pas si la suppression de l’alinéa 8 de l’article 7 que je propose est la bonne réponse à la question posée, mais cette proposition vise à instituer une sorte de traçabilité en matière de facturation. Elle permettrait, dans le cadre de négociations entre chargeurs et transporteurs, de bien répercuter sur les chargeurs la mise en place du taux unique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Roland Ries, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer l’obligation de faire apparaître sur la facture la majoration de prix, soit un élément important du dispositif. Son adoption reviendrait à remettre en cause le caractère contraignant du système, voire sa logique générale, ce qui n’est pas souhaitable, ainsi que la répartition entre la perception de l’écotaxe, d’un côté, et la compensation opérée à l’égard du donneur d’ordre, de l’autre.
La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. Je ne suis pas plus favorable à cet amendement que la commission. En effet, comme l’a souligné M. le rapporteur, il tend à supprimer la mention en pied de facture, qui constitue une protection pour les transporteurs. Il y a beaucoup moins d’incertitude dans le dispositif, très proche de la réalité, que le Gouvernement souhaite instituer, que dans celui initialement prévu.
Quoi qu’il en soit, j’y insiste, la mention en pied de facture est une mesure de protection vis-à-vis du transporteur. Tous ceux, tels M. Bizet, qui souhaitent agir en ce sens ne manqueront pas de rejeter le présent amendement.
M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote.
M. Dominique de Legge. J’entends bien les explications données par le rapporteur et le ministre, mais ils n’ont pas répondu à ma question ; peut-être me suis-je mal exprimé…
Avec la mise en place du taux unique, des chargeurs paieront une taxe supérieure, mentionnée sur la facture, à celle que le transporteur devra acquitter. Je voudrais être certain que le mécanisme qui va être instauré aura une répercussion non seulement sur les transporteurs, mais aussi sur les chargeurs. L’institution d’abattements destinés à tenir compte du caractère périphérique d’un certain nombre de régions visait en effet l’ensemble de l’économie, et pas seulement l’activité des transporteurs.
M. le président. La parole est à Mme Odette Herviaux, pour explication de vote.
Mme Odette Herviaux. Je comprends les motivations de M. de Legge, mais je ne suis pas persuadée que son amendement soit le véhicule adapté pour régler la question qu’il a soulevée.
J’avais compris que les abattements n’étaient pas remis en cause et que leur répercussion sur le chargeur n’était pas source d’enrichissement sans cause. Il serait sans doute nécessaire d’obtenir des précisions complémentaires sur ces points.
Je souhaite profiter de mon intervention pour revenir sur la raison qui a justifié l’instauration d’abattements : la périphéricité, évoquée fort justement par M. de Legge.
J’ai eu l’impression, hier soir, que certains collègues étaient quelque peu chagrins de constater que certaines régions avaient obtenu des abattements. Dans ma région, Anne de Bretagne n’y est absolument pour rien ! (Sourires.) Je vous rappelle qu’en 1962, à la suite du discours du général de Gaulle, un contrat de plan avait été proposé à ma région afin de lutter contre sa périphéricité. D’un commun accord, toutes les collectivités locales avaient alors décidé d’affecter ces crédits afin d’instaurer la gratuité sur leur réseau routier, qui ne comporte donc pas d’autoroutes payantes.
Il s’agissait alors de reconnaître la volonté d’un territoire de lutter contre sa périphéricité.
Monsieur de Legge, je partage vos préoccupations. Il serait dommage de perdre d’un côté ce que nous avons gagné de l’autre. Cela étant précisé, je fais tout à fait confiance au texte.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Roland Ries, rapporteur. Je reconnais qu’il y a bien là une difficulté, monsieur de Legge, mais elle est inhérente au système. J’ai souligné hier soir que ce système, sans être parfait, était le moins mauvais possible.