M. Didier Guillaume. Exactement !
M. Dominique de Legge. C’est d’ailleurs le sens de la position de l’Association des maires ruraux de France, qui constate que, dans nos communes rurales – je suis moi-même élu d’une commune rurale –, la reconnaissance n’est pas toujours à la hauteur des espoirs suscités au moment des élections. Lors du dépouillement du scrutin, on voit dans la salle certains faire grise mine ou sourire en fonction des résultats, et il arrive que l’on se demande pourquoi leur nom a été rayé – voire quelquefois pourquoi leur nom n’a pas été rayé !
Je profiterai de cette intervention pour défendre l’amendement déposé par notre groupe sur cet article, lequel vise à fixer à 1 000 habitants le seuil d’application du scrutin de liste.
Je vois dans cette affaire deux inconvénients.
Le premier, c’est qu’il y aura vraisemblablement beaucoup de communes dans lesquelles il n’y aura qu’une seule liste. Ce faisant, l’élection municipale fera l’objet d’enjeux moindres, et je crains dès lors une participation moins importante. En effet, je ne suis pas certain que les électeurs se déplacent en nombre pour venir confirmer un choix effectué ailleurs. Par conséquent, la légitimité des conseils municipaux élus se trouvera considérablement amoindrie. Par ailleurs, les électeurs qui se seront déplacés auront tendance à exprimer leur mécontentement, et nous comptabiliserons alors un certain nombre de bulletins nuls.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Dominique de Legge. Le second inconvénient est celui d’une éventuelle politisation. Dès lors qu’une liste se présentera, une autre sera peut-être tentée de se constituer. Or, dans nos communes rurales, la politisation n’est pas forcément un élément de progrès de la démocratie.
C’est la raison pour laquelle nous sommes un certain nombre à avoir cosigné un amendement visant à substituer le seuil de 2 000 habitants à celui de 1 000 habitants.
M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson, sur l'article.
M. Jean Louis Masson. Pour ma part, je suis tout à fait favorable à ce que l’on abaisse le seuil d’application du scrutin proportionnel de liste, aujourd’hui fixé à 3 500 habitants.
Il existe simplement un problème d’ajustement : doit-on supprimer le seuil, comme le souhaite le président de l’Association des maires ruraux de France, ou l’établir à 500, à 1 000, à 1 500 ou à 2 000 habitants ?
La proposition du gouvernement Fillon en la matière, qui tendait à fixer le seuil du scrutin de liste à 500 habitants, m’avait paru pertinente. Par ce projet de loi, on nous propose de retenir le nombre de 1 000 habitants. Pour ma part, je ne me battrai pas sur les chiffres, m’étant suffisamment démené hier sur d’autres problèmes ! Toutefois, je pense que ce seuil ne doit pas excéder 1 000 habitants. Sinon, on viderait la réforme de son sens.
Je souhaiterais donc, pour ma part, que le seuil d’application du scrutin de liste soit fixé à 500 ou à 1 000 habitants. L’une et l’autre propositions me paraissent tout à fait raisonnables. Je me rallierai donc à l’un de ces deux choix, en fonction du souhait majoritaire.
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, sur l'article.
M. Didier Guillaume. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’adoption de l’article 16 permettra de réaliser une grande avancée en vue d’une meilleure cohérence quant au seuil d’application du scrutin proportionnel de liste. Ce scrutin s’applique aujourd’hui dans les grandes villes, avec pour conséquence des affrontements entre des listes issues de partis politiques différents.
Pour ma part, j'apprécie les listes bloquées. En effet, dans les communes rurales, qui est victime du « tir aux pigeons » ? En général, le maire sortant ou son adjoint à l’urbanisme, parce qu’une modification de la carte communale n’a pas été acceptée, parce que l’on a refusé à une famille de déclarer constructible un terrain qu’elle possède ! Ces situations conduisent à des guerres picrocholines ou à la résurgence de bagarres familiales datant de plusieurs siècles. Une seule famille peut parvenir à mettre sur la touche un élu, même si celui-ci s’est plutôt bien acquitté de sa tâche.
De nombreux élus de tous bords politiques, les associations d'élus, l’Association des maires de France, l’Assemblée des communautés de France, l’Association des maires ruraux de France, estiment qu’il faut avancer, même s’ils ne s’accordent pas forcément tous sur le choix du seuil.
Je tiens à saluer le travail de la commission, qui a introduit, aux articles 17 A et 17, l’obligation de déclaration de candidature. En effet, il n’est plus acceptable que des citoyens puissent être élus sans avoir été candidats.
M. Gérard Longuet. C’est exact !
M. Didier Guillaume. Il faut en finir avec le « tir aux pigeons », introduire de la cohérence dans un système archaïque, qui n'est plus adapté à l’époque actuelle.
Un autre point important de ce texte a été abordé hier, en des termes un peu crus : la parité. On nous a dit que, dans les communes rurales, on ne trouvera jamais suffisamment de femmes pour constituer des listes paritaires. Or, bien souvent, c’est dans les plus petits villages que des femmes sont élues. Je ne crois donc absolument pas que la constitution de listes bloquées posera problème dans les communes rurales, au contraire. L’instauration de la parité dans les conseils municipaux de nos villages représentera une belle avancée ! La parité doit s’imposer partout.
L’abaissement du seuil à 1 000 habitants prévu par le texte constitue un réel progrès, mais je souligne que seulement 9 464 communes, soit 26 % de l’ensemble des communes de notre pays, ont une population supérieure à ce seuil. (Mme Jacqueline Gourault approuve.) Cela signifie que 27 107 communes françaises, soit 74 % du total, continueront de relever du scrutin uninominal. Ce ne sera donc pas la révolution !
Quant à moi, je considère qu'il faut aller plus loin. D’ailleurs, si mes souvenirs sont bons, le seuil avait été fixé à 500 habitants dans la loi de réforme des collectivités territoriales adoptée par la précédente majorité. (« Non ! » sur les travées de l’UDI-UC.)
Vous avez raison, mes chers collègues, autant pour moi, cela figurait dans le projet de loi n° 61 relatif à l’élection des conseillers territoriaux et au renforcement de la démocratie locale, qui n’a jamais été examiné. En tout cas, ce seuil avait bien été envisagé.
Il me semble donc important de débattre de cette question du seuil. La commission propose de le fixer à 1 000 habitants, mais des amendements tendant à l’abaisser encore ont été déposés. Certains prétendent qu’étendre le scrutin de liste aux petites communes risque d’amener les électeurs à se désintéresser du scrutin municipal, mais j’estime pour ma part que, dans une commune de moins de 1 000 habitants aussi, il doit exister un projet de mandat, partagé par l'ensemble de l’équipe municipale : il faut donc introduire de la cohérence, là comme ailleurs, ce que permet la constitution de listes bloquées. Souvent, dans les petites communes, il n’y a d’ailleurs pas d’opposition.
M. Pierre-Yves Collombat. Il n’y a que des opposants ! (Sourires.)
M. Didier Guillaume. C’est vrai, monsieur Collombat !
En conclusion, pour assurer la parité dans les conseils municipaux des petites communes et permettre à ceux-ci de s’organiser autour de projets cohérents, abaisser le seuil me semble une bonne solution.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, sur l’article.
M. Pierre-Yves Collombat. Mes chers collègues, tenons-nous-en à l'essentiel : il y a des raisons de principe et des raisons de fait qui fondent la proposition à nous soumise.
En ce qui concerne les raisons de principe, pourquoi sommes-nous conduits à envisager l'extension du mode de scrutin aujourd'hui en vigueur pour les communes de plus de 3 500 habitants ? Parce que l’on souhaite que les délégués communautaires soient désignés directement par les électeurs, de manière à renforcer le fondement démocratique des intercommunalités. Voilà la raison de fond. Mais, dans ce cas, pourquoi exclure les communes de moins de 1 000 habitants ? Quelle que soit la taille de la commune, le projet intercommunal a autant d’importance.
Chers collègues du groupe socialiste, de grands sanglots médiatiques ont été versés hier sur la parité. Pourquoi n’étendrait-on pas à l'ensemble des communes le mode de scrutin qui permet de l’assurer ? Votre élan serait-il quelque peu retombé depuis hier ?
M. Bruno Sido. C’est cruel !
M. Pierre-Yves Collombat. Un peu de cohérence !
J’en viens maintenant aux raisons de fait. Chacun d’entre nous connaît les joies du panachage, qui donne lieu à de petits assassinats entre amis ! (M. Bruno Sido s’exclame.) Mais si, mon cher collègue : il suffit de s’inscrire avec ses amis sur la liste qui va remporter l’élection, puis de rayer le nom de celui qui devait être élu maire ! Je vous expliquerai comment on fait !
C'est évidemment celui qui travaille, celui qui assume les responsabilités, qui se retrouve percé de traits au moment du scrutin. J’en parle savamment, pour avoir toujours été l’avant-dernier élu de ma liste ! (Sourires.)
J’ajoute que l'Association des maires ruraux de France estime qu'il n'y a aucune raison de ne pas étendre le mode de scrutin en vigueur pour les communes de plus de 3 500 habitants à l’ensemble des communes de France.
On nous oppose un certain nombre d’objections ; j’ai déposé des amendements visant à y répondre. Ils maintiennent le principe du scrutin de liste et l’obligation de déclaration de candidature, quitte à prévoir un certain nombre d'accommodements avec la mise en œuvre du principe de parité, qui, paraît-il, serait plus difficile à respecter dans les petites communes que dans les grandes, ce que je ne crois pas.
La cohérence voudrait que l'on applique à toutes les communes un mode de scrutin qui a en définitive fait ses preuves pour les communes de plus de 3 500 habitants, quitte à revoir l’effectif des conseils municipaux des très petites communes. De fait, il peut être problématique de constituer une liste de neuf noms dans une commune comptant une vingtaine d’habitants…
Autant je suis très critique sur les dispositions du projet de loi relatives à l’élection des élus départementaux, autant je considère que, sur ce sujet, nous devrions pouvoir trouver un consensus.
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, sur l’article.
M. Hervé Maurey. Il s’agit d’un article important.
La loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales a posé comme principe que les électeurs devaient pouvoir connaître les élus destinés à siéger au conseil communautaire. C’est un bon principe, dans la mesure où les intercommunalités assument des compétences de plus en plus étendues et gèrent des budgets très importants. Il paraît donc logique et cohérent que les électeurs puissent savoir, au moment du scrutin municipal, quels candidats ont vocation à siéger aussi à l’échelon intercommunal s’ils sont élus, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
Dans le prolongement de cette loi, le projet de loi n° 61 relatif à l’élection des conseillers territoriaux et au renforcement de la démocratie locale devait fixer le seuil de population à partir duquel s’appliquerait le scrutin avec listes bloquées. De fait, le fléchage des candidats destinés à siéger au conseil communautaire n’est possible que sur une liste bloquée. En effet, avec le panachage, un problème se pose à l’évidence si ces candidats ne sont pas élus. C’est pourquoi il est nécessaire d'abaisser le seuil actuellement en vigueur.
Le projet de loi n° 61 prévoyait de fixer le seuil à 500 habitants, mais nous avions été nombreux, ici, à considérer que ce chiffre était beaucoup trop bas. C’était notamment la position de notre groupe, qui appartenait pourtant à la majorité d’alors. Il me semble d’ailleurs que les esprits avaient finalement évolué, au sein tant du gouvernement de l’époque que de l'Association des maires de France. Celle-ci, qui était initialement favorable à la fixation du seuil à 500 habitants, préconise plutôt aujourd'hui de l’établir à 1 500 habitants.
Le projet de loi qui nous est soumis fixe ce seuil à 1 000 habitants. Certes, c'est mieux que 500 habitants, mais nous sommes un certain nombre à considérer que c’est encore trop bas. En effet, dans les petites communes rurales, la vie municipale n’est pas la même, fort heureusement, que dans les grandes communes. On sait très bien que l'introduction du scrutin proportionnel avec des listes bloquées risque d’y conduire à une politisation des élections municipales, alors que, aujourd'hui, la plupart des maires des petites communes sont élus à la tête de listes pluralistes et apolitiques. Avec ce mode de scrutin, il suffira que se constitue une liste se réclamant de telle ou telle sensibilité politique pour que l'on en déduise aussitôt que la liste concurrente est de l'autre bord.
À cet égard, je ne suis pas d’accord avec M. Guillaume, qui semble croire que les tensions politiques seraient moindres dans les petites communes. Les oppositions politiques y seront à mon avis aussi marquées qu’ailleurs avec ce mode de scrutin qui figera les choses et politisera les élections.
C'est pourquoi nous avons déposé des amendements tendant à relever le seuil d'application du scrutin proportionnel avec listes bloquées, respectivement à 1 500 – c’est pour nous le minimum acceptable –, à 2 000 et à 2 500 habitants.
M. Guillaume nous expliquait tout à l'heure, assez justement, que le mode de scrutin actuellement en vigueur dans les petites communes n'est pas non plus satisfaisant, parce qu'on peut être élu sans avoir été candidat, parce qu'on peut être candidat au second tour sans l’avoir été au premier, parce qu'on peut présenter une candidature le jour du scrutin, et même après que le scrutin a commencé : cela est vrai, mais, afin de mettre fin à de telles anomalies, des amendements visant à rendre obligatoire le dépôt des listes dans les petites communes ont été élaborés, ce qui conforte notre proposition de relever le seuil au-delà de 1 000 habitants.
M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, sur l’article.
M. Philippe Bas. Notre pays connaît une telle diversité de situations que, au sein de cette assemblée, nous pouvons les uns et les autres tenir des propos très différents sans pour autant que ceux-ci soient inexacts.
Pour ma part, mon expérience du bocage normand me conduit à être très nettement défavorable à tout abaissement du seuil de 3 500 habitants.
Tout d'abord, j’estime que les raisons de principe invoquées sont, pour certaines d'entre elles, très contestables. L'idée que le maire d'une commune rurale exerçant ses responsabilités dans l'intérêt général s’expose à la sanction de ses administrés me paraît très difficile à admettre.
M. Pierre-Yves Collombat. Ce n’est pas une idée, c’est un fait !
M. Philippe Bas. D’abord, un maire sortant peut être réélu même s’il obtient moins de suffrages que d’autres personnes figurant sur sa liste.
Par ailleurs, il peut arriver que des maires sortants ayant montré dans l’exercice de leur mandat une pusillanimité excessive, un manque d’esprit de décision, soient logiquement sanctionnés par les électeurs.
En conséquence, entrer dans ce type de considérations pour justifier un abaissement du seuil n’est pas de bonne méthode.
J’entends invoquer en outre l’exigence de cohérence, de cohésion. Or, précisément, si l’on instille la bipolarisation dans une petite commune rurale, en imposant, par le biais du mode de scrutin, l’entrée au conseil municipal de candidats élus sur des listes différentes, on créera des situations qui ne seront pas favorables à la mobilisation de toutes les énergies au service de la commune, mais induiront au contraire des oppositions souvent artificielles.
On me dit que de telles situations se présentent déjà. Certes, mais on en voit les inconvénients pour le bon fonctionnement du conseil municipal d’une petite commune.
J’ajoute que, dans nombre de nos communes rurales, il est déjà difficile de constituer des listes complètes. Le choix, pour les électeurs, s’y réduit souvent à un choix de personnes. Dès lors, pourquoi leur retirer la seule latitude dont ils disposent réellement ?
Nous serions, me semble-t-il, bien inspirés de faire preuve de prudence. J’entends bien qu’il existe d’autres situations que celle que j’ai décrite ; pour autant, je ne voudrais pas que l’on prive nos concitoyens votant dans des petites communes d’une liberté de choix qui leur est précieuse et qui a été instaurée voilà maintenant plus d’un siècle.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, sur l’article.
M. Jean-Jacques Hyest. Mes chers collègues, permettez-moi une observation préalable : dans ce débat, il s’agit non pas d’un scrutin proportionnel, comme je l’entends dire depuis hier, mais d’un scrutin de liste avec prime majoritaire.
M. Didier Guillaume. Exactement !
M. Jean-Jacques Hyest. D’ailleurs, s’il s’agissait d’un scrutin à la proportionnelle, il n’y aurait pas deux tours. (M. Jacques Mézard acquiesce.)
M. Didier Guillaume. Bien sûr !
M. Jean-Jacques Hyest. Évidemment, le scrutin de liste présente l’avantage incontestable de faire progresser la parité.
M. Didier Guillaume. Voilà !
M. Jean-Jacques Hyest. On nous objecte qu’il ne faut pas trop abaisser le seuil, car la constitution de listes complètes sera difficile dans les petites communes, mais cela ne me semble pas être le meilleur des arguments.
Le texte de la commission des lois prévoit l’obligation de déclaration de candidature, qui ne figurait pas dans le projet de loi initial. Il s’agit d’une proposition très importante, car nous avons trop souvent vu, dans des petits villages, des équipes municipales constituées de bric et de broc : on ne sait qui va être maire ; d’ailleurs, personne ne veut l’être !
M. Didier Guillaume. Exactement !
M. Jean-Jacques Hyest. On n’a même pas réfléchi à l’avance à qui pourrait échoir la responsabilité de gérer la commune.
L’obligation de déclaration de candidature conduira spontanément à constituer une liste. Il me paraît choquant, même dans un tout petit village, que l’on ne sache pas quel est le projet municipal pour les six années de la mandature. D’ailleurs, les préfets le savent, lorsqu’une équipe municipale est constituée de bric et de broc, elle ne dure pas longtemps.
M. Didier Guillaume. Voilà !
M. Jean-Jacques Hyest. Nombreux sont les maires qui finissent par démissionner, faute d’avoir réfléchi en amont à ce qu’ils feraient après l’élection. Quelquefois, ils ont accepté la fonction de maire sans enthousiasme, seulement parce qu’il fallait bien que quelqu’un se dévoue…
M. Éric Bocquet. C’est exactement cela !
M. Jean-Jacques Hyest. Tout cela devrait, me semble-t-il, nous inciter à ne pas opter pour un seuil trop élevé.
Je rappelle d’ailleurs qu’il a existé un dispositif particulier s’appliquant aux communes comptant entre 2 500 et 3 500 habitants. Il y avait obligation de former une liste, mais le panachage était autorisé. Il n’était pas rare que le dépouillement s’achève à six heures du matin. C’était extraordinaire !
La position de l’Association des maires de France a évolué. Certains – ils sont très peu nombreux – considèrent que le scrutin de liste doit être étendu à l’ensemble des communes. Cela me semble tout de même un peu excessif.
Pour notre part, nous avons pensé que le seuil pourrait être établi à 2 000 habitants, ce qui correspond au plafond de population retenu par l’INSEE pour caractériser une commune rurale. D’après une enquête réalisée à l’occasion des états généraux de la démocratie territoriale, les élus souhaiteraient en majorité que le seuil soit fixé à 1 000 habitants. Entre 1 000 et 2 000, il y a 1 500… (Sourires.) Mes chers collègues, nous allons organiser des enchères descendantes. J’adore cela ! (Nouveaux sourires.)
En tout état de cause, j’estime que l’on doit pouvoir trouver un compromis acceptable par tous. Le plus important, c’est de prévoir l’obligation de déclaration de candidature…
M. Jean-Pierre Caffet. Absolument !
M. Jean-Jacques Hyest. … et de faire progresser la parité dans les conseils municipaux.
M. Didier Guillaume. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, sur l’article.
M. Éric Bocquet. Il s’agit d’un débat crucial pour notre assemblée, qui a vocation à représenter les collectivités.
Je fais mienne la position des maires ruraux, qui souhaitent la généralisation de l’application de la proportionnelle, car il n’y a pas de raison de prévoir des modes de scrutin différents pour les élections municipales selon la taille des communes : la République est une. Étendre la proportionnelle est une évidence en termes de justice.
Je ne reviens pas sur la nécessaire promotion de la parité au sein de tous les conseils municipaux de France. Je le rappelle, un homme sur deux est une femme !
La discussion de ce texte vient à point nommé. En effet, une étude qui a été publiée cette semaine montre que, malheureusement, le discrédit des politiques gagne les esprits. Cela vaut aussi pour les élus locaux, même s’ils sont un peu épargnés, sans doute du fait de leur proximité avec la population. Les élus municipaux sont les mieux considérés par nos concitoyens, mais l’image des politiques pourrait continuer à se dégrader.
Il importe donc de redynamiser notre démocratie locale, et la généralisation de la proportionnelle pour les élections municipales pourrait y contribuer, en permettant la représentation de sensibilités diverses dans tous les conseils municipaux.
Comme vient de le souligner M. Hyest, un conseil municipal ne saurait être une assemblée d’individus aléatoirement réunis. Y compris dans les plus petites communes, il doit porter un projet local cohérent, soumis à la population pendant la campagne électorale.
Nous soutiendrons tout progrès en ce sens.
M. le président. La parole est à M. Michel Savin, sur l’article.
M. Michel Savin. À titre personnel, j’ai rencontré de nombreux élus de petites communes, et ma position est proche de celle qu’ont exprimée MM. Guillaume et Collombat.
Aujourd’hui, l’intercommunalité est importante pour les petites communes. Le système du fléchage pour la désignation de leurs délégués communautaires leur permettra, me semble-t-il, d’y prendre toute leur place et de pouvoir y exposer leurs problématiques.
Par ailleurs, il convient de renforcer la parité au sein des conseils municipaux des plus petites communes. Je ne vois pas pourquoi 2 700 communes ne seraient pas concernées par cette exigence.
Enfin, comme l’a souligné M. Guillaume, l’extension du scrutin de liste permettrait aussi d’éviter les règlements de comptes. Lors des élections municipales dans les petites communes, le maire ou l’adjoint à l’urbanisme sont souvent les premières victimes du panachage. Dans certaines communes, il est même arrivé que le candidat destiné à la fonction de maire ne soit pas élu : le soir de l’élection, l’équipe municipale ne savait qui désigner comme maire… Cela peut déboucher sur une situation catastrophique : j’ai connu un cas où le préfet a été obligé de prendre les choses en main deux ans après l’élection, le conseil municipal étant dans l’incapacité de voter un budget, faute de cohérence en son sein.
Par souci de cohérence, il conviendrait que le même mode de scrutin s’applique pour l’ensemble des communes de France, de la plus petite à la plus grande.
M. le président. La parole est à M. Pierre Jarlier, sur l’article.
M. Pierre Jarlier. L’article 16 représente une réelle avancée démocratique. Il répond à la volonté de très nombreux élus et de la plupart des associations d’élus locaux, notamment l’AMF, dont la position est assez ouverte sur ce sujet. En tout état de cause, elle considère que le seuil doit être abaissé.
L’AMF souhaite surtout que la déclaration de candidature soit rendue obligatoire, afin d’éviter les candidatures de dernière minute, qui faussent la donne électorale.
Le mode de scrutin proposé présente plusieurs avantages : la désignation des délégués communautaires directement par les électeurs, la promotion de la parité, la stabilité et la transparence.
Je voudrais insister sur l’intérêt de la stabilité des équipes municipales. Dans les petites communes, avec le système actuel, on constate parfois des choses étonnantes. Ainsi, il arrive que des candidats se présentent au second tour sans avoir participé au premier. Dans ces conditions, il est difficile de définir un véritable projet communal, de conduire une campagne électorale. Il peut même arriver qu’un candidat ne se déclare que le jour même du scrutin, et soit élu, aux dépens du maire sortant ou de l’adjoint à l’urbanisme ! L’exigence de stabilité explique l’existence de la prime majoritaire pour les élections dans les communes de plus de 3 500 habitants. L’abaissement du seuil permettra d’assurer la stabilité des conseils municipaux des petites communes.
Renforcer la transparence est également nécessaire : la campagne électorale doit démarrer en même temps pour tout le monde, sans que des candidats se présentent à la dernière minute. Quelle que soit sa taille, une commune doit pouvoir choisir un projet et une majorité clairs.
Cela dit, il convient de reconnaître que, pour les très petites communes, l’instauration du scrutin à la proportionnelle pose la question du nombre des conseillers municipaux. Dans ces communes, en effet, il pourrait se révéler difficile de former des listes.
Si l’on veut assurer la transparence des campagnes électorales, il faut non seulement rendre obligatoire la déclaration de candidature, comme le propose la commission, mais aussi bien définir les délais et les modalités d’inscription. Des amendements porteront sur ce sujet.
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Gourault, sur l’article.
Mme Jacqueline Gourault. Lors des états généraux de la démocratie territoriale, j’ai été surprise de la réaction de nombre de maires et de l’évolution de leur position sur la question du seuil démographique pour l’application du scrutin de liste à prime majoritaire. À la suite de M. Hyest, je souligne qu’il ne s’agit pas, dans ce débat, d’un scrutin proportionnel.
M. Didier Guillaume. Tout à fait, mais le mode de scrutin proposé est tempéré de proportionnelle.
Mme Jacqueline Gourault. En effet !
Les esprits ont beaucoup évolué sur ce sujet, qu’il aurait été difficile d’aborder voilà dix ans. Dans l’atelier que j’ai animé dans mon département à l’occasion de la préparation des états généraux de la démocratie territoriale, la très grande majorité des quelque quatre-vingt-dix élus présents approuvaient la position de l’Association des maires ruraux de France, que M. Collombat a exposée.
Pour ma part, j’estime que l’on ne peut pas opter pour un seuil supérieur à 1 000 habitants. Dans un esprit de compromis, je suis disposée à me rallier à ce chiffre, mais abaisser le seuil à 500 habitants, comme l’avait envisagé l’ancien gouvernement, ne me choquerait pas. En tout état de cause, 1 000 est à mes yeux un maximum : comme l’a expliqué tout à l’heure M. Guillaume, retenir un tel seuil laissera subsister le panachage dans de très nombreuses communes.
Par ailleurs, il me semble qu’un certain nombre de nos collègues n’ont pas mesuré le changement sociologique intervenu dans les petites communes rurales, qui se reflète dans la composition de leurs conseils municipaux.
M. Didier Guillaume. Bien sûr !
Mme Jacqueline Gourault. Le temps où les communes rurales étaient gérées par des agriculteurs est révolu !