M. le président. Madame Pasquet, estimez-vous que l’amendement n° 59 est satisfait ?
Mme Isabelle Pasquet. Même si l’amendement du Gouvernement est moins exigeant que le nôtre, il est sous-tendu par les mêmes préoccupations et va dans le bon sens. Je retire donc notre amendement à son profit.
M. le président. L’amendement n° 59 est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 112 ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Au regard des arguments présentés, c’est évidemment un avis favorable.
M. le président. L’amendement n° 63, présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David et MM. Watrin et Fischer, est ainsi libellé :
Alinéa 33
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La conclusion de ce contrat de travail entraîne pour le salarié ainsi recruté le bénéfice des mêmes droits, avantages et accessoires payés, directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l’employeur pour les autres salariés recrutés pour un même travail ou pour un travail de valeur égale.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Le débat montre depuis le début que nous sommes nombreux ici à vouloir que les emplois d’avenir constituent une première marche vers l’emploi pour les jeunes en difficulté, ce qui est l’objet du projet de loi. Nos amendements vont donc tous dans le sens d’un enrichissement du texte en vue d’apporter de meilleures garanties à ses futurs bénéficiaires.
Il s’agit de combattre la précarité en s’adressant à celles et ceux qui ont déjà connu les stages, l’intérim et la déqualification, à celles et ceux qui désespèrent des petits boulots qui fragmentent leur vie et des portes fermées.
Dans cet esprit, nous souhaitons que l’ensemble des droits et avantages accordés aux salariés de l’entreprise, de l’association ou de l’établissement public qui les emploie leur soient ouverts.
De nombreux acteurs sur le terrain nous ont fait savoir que, par le passé, des jeunes recrutés en CUI ou en CAE s’étaient vus privés de certains éléments accessoires de la rémunération, tels que les chèques-vacances.
On connaît bien le profil de ces jeunes filles ou jeunes garçons qui vont entrer dans le dispositif ; on sait que non seulement ils sont éloignés de l’emploi, mais aussi qu’ils méconnaissent les codes des collectifs de travail qu’ils vont fréquenter. Leur permettre d’avoir les mêmes droits à la restauration du midi, aux chèques-vacances et aux loisirs est un important levier pour leur intégration dans le monde du travail.
Nous souhaitons toutes et tous que tombe la « méfiance » réciproque entre l’entreprise et le jeune. Si ce dispositif se révèle positif, le bilan devra contenir, au-delà des chiffres, des monographies des jeunes, qui raconteront leurs expériences, leurs réussites et peut-être leurs échecs. Une politique publique se mesure non pas seulement en termes de statistiques, mais aussi à l’aune des récits de celles et ceux qui l’ont vécue.
Nous savons bien que c’est lors de l’exercice de leurs droits que des liens se nouent entre salariés et que les anciens peuvent partager leur expérience avec leurs nouveaux collègues. C’est pourquoi nous demandons que les titulaires des emplois d’avenir aient les mêmes droits que les autres salariés, en insistant sur le fait que, s’il y avait une disparité, il y aurait une discrimination.
Au vu du public visé par le nouveau dispositif, chacun s’accordera à reconnaître que ce ne sont pas les familles qui pourront contribuer aux dépenses supplémentaires telles que la restauration du midi ou les transports. L’objet de cet amendement est donc de faire en sorte que les titulaires des emplois d’avenir acquièrent tous les droits qui feront d’eux non seulement des salariés à part entière, mais aussi des citoyens et des citoyennes dans l’entreprise.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. On ne peut qu’approuver l’objectif de Mme Cohen, qui est d’assurer l’égalité de traitement entre les jeunes en emploi d’avenir et les autres salariés.
Le législateur ne s’y est d’ailleurs pas trompé puisque, comme nous l’avons vu en commission, les jeunes admis en emploi d’avenir pourront être électeurs et éligibles aux instances représentatives du personnel, ce qui démontre un statut égal à celui des autres salariés.
L’avis de la commission est donc favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. Ma réponse sera la même que pour d’autres amendements : le code du travail est applicable dans sa totalité aux emplois d’avenir. Pour qu’il y ait des exceptions, il faudrait que le présent projet de loi les prévoie, mais ce n’est pas le cas et toutes ses dispositions sont donc applicables.
Évidemment, on peut considérer, et c’est d’ailleurs un peu le raisonnement qu’a suivi le rapporteur, que, puisque le code du travail est applicable, il n’y a pas d’inconvénient à préciser dans le projet de loi qu’une de ses dispositions en particulier est applicable. Mais alors, il faudrait faire de même pour toutes ses dispositions puisqu’elles sont toutes applicables !
D’ailleurs, madame Cohen, puisque vous signalez avoir eu connaissance de cas de titulaires de CUI ou de CAE – à qui sont également applicables les dispositions du code du travail – auxquels certains de leurs droits auraient été refusés,…
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Eh oui !
M. Michel Sapin, ministre. … je vous demanderai de me faire connaître de tels refus, car ils sont illégaux. Certes, il peut y avoir des conditions d’ancienneté, mais le code du travail doit s’appliquer de la même façon à tous les salariés, et il en ira ainsi pour les salariés en emploi d’avenir.
En conclusion, comme je l’ai dit à propos d’autres amendements, du point de vue de la bonne écriture de la loi, je préférerais que l’on ne surcharge pas cette partie du texte de dispositions qui existent déjà par ailleurs, mais, je le répète pour que les choses soient claires, toutes les dispositions du code du travail sont applicables et, comme tous les autres salariés, les emplois d’avenir bénéficieront des avantages accessoires aux rémunérations.
M. le président. Madame Cohen, l’amendement n° 63 est-il maintenu ?
Mme Laurence Cohen. J’apprécie tant la réponse de M. le rapporteur que celle de M. le ministre. Il y a cependant une question que je souhaite poser dans l’hémicycle, car j’ai un doute.
Je ne suis pas persuadée en effet que certains des « avantages » que j’ai évoqués, chèques déjeuner ou aides dans le domaine des loisirs par exemple, relèvent du code du travail. C’est parce que certains des avantages de cet ordre – disons de ces avantages « en nature », même si le terme n’est pas approprié – ne nous semblaient pas être prévus dans le code que mon groupe a déposé cet amendement.
Si vous me certifiez qu’ils font partie de celui-ci, monsieur le ministre, mon intention n’étant pas du tout de surcharger le texte, je n’aurai aucune difficulté à retirer mon amendement.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Michel Sapin, ministre. Je veux redire clairement les choses : la loi est la même pour tous, en l’occurrence pour tous les salariés. S’il peut y avoir des dispositions internes aux entreprises, en vertu du code du travail, elles ne peuvent introduire de différenciation entre salariés.
Le cas dont, sans doute, s’inspire cet amendement est celui des stagiaires, dont les règlements des entreprises prévoient souvent qu’ils ne bénéficient pas d’avantages et qui se trouvent parfois, vous le savez, dans des situations anormales en termes d’exploitation. Mais, dès lors qu’il s’agit de salariés, et les emplois d’avenir sont des emplois salariés, ils bénéficient des mêmes droits dans l’entreprise, dans l’association ou dans la collectivité concernée.
M. le président. Madame Cohen, acceptez-vous maintenant de retirer votre amendement ?
Mme Laurence Cohen. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 63 est retiré.
L’amendement n° 64, présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David et MM. Watrin et Fischer, est ainsi libellé :
Alinéa 34
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le bénéficiaire d’un emploi d’avenir bénéficie alors de l’indemnité destinée à compenser la précarité de l’emploi, conformément aux articles L. 1243-8 et L. 1243-9.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Une nouvelle fois, monsieur le ministre, nous convoquons la justice et l’égalité, qui doivent nous inspirer dans ce débat.
Il s’agit ici de préciser que les jeunes embauchés en emploi d’avenir peuvent bénéficier d’une priorité d’embauche en cas de création d’emplois dans la structure d’accueil.
Nous avons dit au cours de nos précédentes interventions que, comme vous, nous voulions que les jeunes éloignés de l’emploi puissent bénéficier des emplois d’avenir. Nous pensons aussi que la méfiance s’est installée entre une partie de la jeunesse et de l’entreprise, mais aussi à l’égard de celles et ceux qui décident, dont nous, législateurs, faisons partie.
Trop de dispositifs tuent les dispositifs. Une partie de ces jeunes pensent qu’à nouveau ils ne seront pas dans la bonne case et qu’il ne s’agit que d’annonces qui n’auront pas d’effet sur leur vie future. Ils aspirent à la stabilité et à des CDI.
Ils voudront bien, une nouvelle fois, nous faire confiance si nous leur disons clairement qu’il peut y avoir un « après-emploi d’avenir ».
Nous nous devons d’inscrire dans la loi cet amendement. Sinon il pourra y avoir, de la part de l’employeur, abus de l’effet d’aubaine et, quant au jeune, il pourra avoir l’impression que nous avons créé une nouvelle voie de garage ou un parking supplémentaire.
Telle n’est pas, semble-t-il, la volonté du Gouvernement et ce n’est certainement pas la nôtre !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Cet amendement vise à faire bénéficier les jeunes en emploi d’avenir d’une indemnité de précarité à l’issue de leur contrat si celui-ci est un CDD.
Là encore, on ne peut que partager l’objectif et souhaiter une meilleure indemnisation des jeunes en emploi d’avenir. Néanmoins, d’après les simulations que nous avons réalisées, cela augmenterait dans des proportions considérables le coût des emplois d’avenir pour les employeurs, ce qui les dissuaderait d’embaucher des jeunes.
De plus, cet amendement créerait une différence de traitement entre les emplois d’avenir et les autres contrats aidés, qui ne prévoient aucune indemnité de précarité. Rien ne justifie une telle inégalité de traitement. La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. Si je suis favorable à l’amendement n° 65, également déposé par des membres du groupe CRC, je ne le suis pas à l’amendement n° 64, pour les mêmes raisons que M. le rapporteur.
Les CAE et les CUI sont d’une durée bien plus courte que celle que nous prévoyons pour les emplois d’avenir : trois ans en principe et au minimum un an pour ces derniers, contre moins d’un an pour les autres, avec une moyenne de quatre à six mois pour les contrats accordés si généreusement pendant la première moitié de cette année, pour des raisons qui nous ont totalement échappé… Or ces contrats plus courts ne sont assortis d’aucune prime de précarité. En créer une pour les emplois d’avenir introduirait donc une distorsion.
Par ailleurs – nous en avons déjà parlé –, votre dispositif pénaliserait les plus petits. Vous disiez qu’il existait une défiance entre les jeunes et les employeurs. Je le répète, ce sont des associations, des collectivités locales et des entreprises du secteur de l’économie sociale et solidaire qui sont concernées par les emplois d’avenir. Je n’affirme pas que tous ces employeurs sont irréprochables, même dans les collectivités locales, mais ils n’ont globalement pas le même esprit que celui que l’on pourrait éventuellement craindre d’employeurs du secteur strictement marchand.
Attention à ne pas donner plus à ceux qui ont déjà beaucoup – les très grands – tout en pénalisant encore plus ceux qui ont déjà très peu. Quel serait le résultat de votre mesure ? Les petits employeurs ne présenteraient pas leur candidature au dispositif des emplois d’avenir, alors même que nous souhaitons diversifier les possibilités, en particulier dans les zones rurales. Or, dans ces zones, les grands réseaux et les grandes associations sont peu présents. De petites associations seraient prêtes à accueillir des jeunes, et vous voudriez diminuer considérablement – de 40 % – le montant de l’aide dont elles bénéficieraient ?
Pensez à ces jeunes, pensez aux jeunes de tous les territoires. Ce ne sera pas si simple de mettre en œuvre les emplois d’avenir, il faudra beaucoup de persuasion pour que des associations, des collectivités locales ou d’autres structures soient candidates pour accueillir ces jeunes.
Je pense que vous pouvez partager notre préoccupation de donner de la sécurité, de donner de la formation, de donner un avenir à ces jeunes en leur évitant les voies de garage, l’enchaînement des petits boulots et des galères. Notre objectif est bien de les sortir de la galère ! Assurons-nous donc que notre dispositif sera applicable sur l’ensemble du territoire français.
M. le président. Madame Pasquet, l’amendement n° 64 est-il maintenu ?
Mme Isabelle Pasquet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 64 est retiré.
L’amendement n° 65, présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David et MM. Watrin et Fischer, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 34
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le bénéficiaire d’un emploi d’avenir conclu en application du deuxième alinéa bénéficie d’une priorité d’embauche durant un délai d’un an à compter du terme de son contrat. Dans ce cas, l’employeur l’informe de tout emploi devenu disponible et compatible avec sa qualification. Le salarié ainsi recruté est dispensé de la période mentionnée à l’article L. 1221-19.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Pour de nombreux jeunes qui n’ont jamais connu d’expérience professionnelle et dont le niveau de formation initiale ou de qualification est faible, l’accès aux emplois d’avenir peut constituer une chance. Ces emplois peuvent tenir lieu de marchepied, à condition naturellement que les jeunes ainsi recrutés puissent bénéficier d’une véritable formation dont ils pourront se prévaloir à l’avenir, a fortiori si, à l’échéance du contrat, leur emploi n’est pas pérennisé dans la structure d’accueil.
Cette question de la pérennisation de l’emploi est un véritable enjeu pour les jeunes. Il y va également de l’intérêt de la société ; nous le savons tous dans cet hémicycle. Nos concitoyens ne comprendraient pas que les emplois d’avenir n’aient pas d’effets durables et positifs sur le niveau d’emploi des jeunes concernés, ce qui donnerait l’impression qu’il ne s’agissait que d’un simple traitement social du chômage.
C’est ce constat, associé à notre volonté de conditionner les aides publiques, qui nous a conduits à présenter plusieurs amendements. Concrètement, l’amendement n° 65 vise à instaurer, à l’image de ce qui existe pour les licenciements pour motif économique, une priorité d’embauche pour les bénéficiaires des emplois d’avenir. Nous proposons que les salariés recrutés en emploi d’avenir dont le contrat à durée déterminée est échu jouissent, pendant l’année qui suit le terme de leur contrat, d’une priorité d’embauche dans la structure d’accueil si un emploi y est créé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. On ne peut que partager la préoccupation exprimée par les auteurs de cet amendement. Il s’agit, vous l’aurez compris, de garantir une priorité d’embauche aux jeunes à l’issue de leur emploi d’avenir, sur le modèle de ce qui existe en matière de licenciement pour motif économique.
Nous adhérons pleinement à cet objectif. Cependant, la commission s’est interrogée sur l’applicabilité d’une telle mesure, et c’est pourquoi je sollicite l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. Cet amendement de qualité me paraît répondre à une préoccupation réelle. Notre objectif est évidemment qu’il n’y ait pas d’interruption dans la carrière professionnelle du jeune. J’ai d’ailleurs parlé de CDI. Nous souhaitons que celui-ci reste dans la structure qui l’emploie. Un contrat à durée déterminée peut aussi se transformer en emploi durable, et c’est d’ailleurs ainsi que les choses se passeront dans les collectivités locales.
Cependant, il est possible également qu’une association ou une entreprise du secteur de l’économie sociale et solidaire soit dans l’incapacité de garder le jeune à l’issue des trois ans, puis s’aperçoive six mois plus tard qu’un poste similaire est à pourvoir. C’est à ce type de situation que vous souhaitez répondre par votre amendement, et vous avez raison. Dans ces cas-là, comme pour les licenciements économiques, celui qui n’a pas été retenu ou a quitté l’entreprise doit être prioritaire pour occuper un poste correspondant à celui qu’il a déjà occupé.
Je veux vous rassurer, monsieur le rapporteur, c’est parfaitement possible d’un point de vue juridique. Des dispositions semblables ont déjà été appliquées dans d’autres cas de figure. Par conséquent, le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 65.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. J’aimerais être d’accord avec mes camarades communistes, mais reprenons votre raisonnement, monsieur le ministre. Si un poste se libère au bout de six mois et que l’employeur a envie de reprendre le jeune qui a achevé son contrat d’avenir, rien ne l’en empêche. Il a tout de même conservé son numéro de téléphone ! À quoi cela sert-il de l’inscrire dans la loi ? Si on inscrit cette disposition dans la loi, c’est qu’il s’agit de traiter un autre cas de figure, celui où l’employeur n’a pas forcément envie de reprendre le jeune à l’issue du contrat d’avenir. L’amendement vise à l’obliger à le faire.
Mme Catherine Procaccia. Vous avez raison, pour une fois !
M. Alain Gournac. Cet amendement est nul !
M. Jean Desessard. Je comprends bien le souhait de nos collègues communistes – je voterai d’ailleurs leur amendement –, mais il faut faire attention à ne pas toujours créer des clauses et des obligations supplémentaires pour les employeurs, comme vous l’avez dit, monsieur le ministre. Je suis donc partagé sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Michel Sapin, ministre. Des dispositions similaires existent en matière de licenciement pour motif économique. De quoi s’agit-il, concrètement ? Il s’agit d’une obligation d’information du jeune : l’employeur doit obligatoirement le prévenir si un poste se libère.
J’ai une dernière remarque, monsieur Desessard. Il y a dans mon ministère une boîte en carton – nous n’avons pas les moyens de nous en offrir une d’un autre matériau –, en carton recyclable évidemment (Rires.), avec une petite fente au milieu. À chaque fois que quelqu’un parle de « contrat d’avenir » au lieu d’« emploi d’avenir », il doit y mettre 2 euros. Vous me devez donc 4 euros, monsieur Desessard ! (Nouveaux rires.)
M. le président. L’amendement n° 7 rectifié, présenté par Mmes Procaccia, Bouchart et Bruguière, M. Cardoux, Mme Cayeux, M. de Raincourt, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mmes Giudicelli, Hummel, Jouanno et Kammermann, MM. Laménie, Longuet, Lorrain, Milon, Pinton, Savary, Cambon et Dallier, Mme Primas et M. Mayet, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 36
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le contrat de travail doit préciser le nombre d’heures minimum mensuelles consacrées à la formation professionnelle.
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. J’ai bien vu que la question de la fixation d’un nombre d’heures de formation dans le cadre des contrats d’avenir avait suscité de nombreux débats à l’Assemblée nationale.
Mme Catherine Procaccia. À ce rythme, vous allez faire fortune en quelques jours, monsieur le ministre !
Mme Catherine Procaccia. Je doute cependant que cela suffise à combler le déficit de l’État…
J’ai compris que vous ne souhaitiez pas que la loi fixe un nombre d’heures de formation. Je partage votre opinion : le nombre d’heures varie forcément selon le type d’emploi et de formation.
En revanche, je vous suggère, pour rendre la formation obligatoire, d’intégrer dans le contrat de travail la mention du nombre minimum d’heures de formation que le jeune devra suivre. En effet, chaque contrat de travail est adapté à la personne concernée, et cela permettrait d’avoir la certitude que le jeune sera effectivement formé – nous souhaitons tous qu’il en soit ainsi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Mme Procaccia exprime une exigence partagée, je pense, par l’ensemble des sénateurs.
Mme Catherine Procaccia. Quand ça commence ainsi, ça finit mal !
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Non, car, vous l’aurez observé, la formation est au cœur du dispositif des emplois d’avenir. Vous aurez également noté que la demande d’aide formulée par l’employeur devra obligatoirement indiquer quels types d’action de formation sont prévus. En outre, un tuteur nommément désigné sera chargé de suivre le jeune bénéficiaire du contrat et de lui transmettre son savoir-faire.
Vous estimez cependant qu’il faut aller plus loin, en prévoyant un nombre minimal d’heures de formation. Il nous semble que cela conduirait à rigidifier un peu plus le dispositif. Or nous avons besoin, compte tenu du public auquel nous nous adressons, de préserver une véritable souplesse dans la mise en œuvre des emplois d’avenir. Il me paraît notamment nécessaire de garder la possibilité de corriger le tir en cours de contrat, afin d’adapter le volume de formation aux capacités du jeune, qui ne sont pas connues au moment où il signe son contrat. Prévoir un nombre minimal d’heures de formation risquerait de compliquer le dispositif, et c’est pourquoi, la mort dans l’âme, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
Mme Catherine Procaccia. C’est bien ce que je disais !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. Quelles que soient les améliorations proposées par les sénateurs siégeant sur les travées situées de mon côté de l’hémicycle, y compris celle qui vise à sécuriser les futurs emplois d’avenir et à prévoir une formation minimale – aucune durée n’est imposée –, elles sont systématiquement refusées. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. L’amendement n° 48, présenté par M. Desessard, Mmes Archimbaud, Aïchi, Ango Ela, Benbassa, Blandin, Bouchoux et Lipietz et MM. Dantec, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 36
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« À l’issue de cette période, si le contrat de travail n’est pas prolongé ou s’il ne se poursuit pas par un contrat à durée indéterminée, le salarié a droit à une indemnité de fin de contrat destinée à compenser la précarité de sa situation.
« Cette indemnité est égale à 10 % de la rémunération totale brute versée au salarié.
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Madame Procaccia, je me situe en toute logique du bon côté de l’hémicycle… (Exclamations amusées sur les travées de l’UMP.)
M. Jean-Claude Lenoir. Pour l’instant ! (Sourires.)
M. Jean Desessard. Les emplois d’avenir sont adossés au contrat unique d’insertion, soit à un régime dérogatoire au droit commun. Les conditions associées – emploi à temps complet, CDI ou CDD de trente-six mois, sauf exception, obligation de formation – améliorent considérablement les pratiques habituelles liées à ce type de contrat. Mais le CUI n’ouvre pas droit à la prime de précarité d’un montant de 10 % de la rémunération totale brute versée à l’issue d’un CDD. Les salariés dont l’emploi ne pourrait être pérennisé à l’issue des trente-six mois ne bénéficieront donc pas de cette prime.
Si la pérennité de l’emploi ne peut être assurée dans la mesure où la certitude de trouver un nouvel emploi à l’issue des trente-six mois n’est pas acquise, le droit à la prime de précarité paraît s’imposer.
Nous ne voulons pas faire des emplois d’avenir une sous-catégorie d’emplois. Nous n’avons cessé d’affirmer que l’acquisition de compétences et d’une qualification doit être accompagnée d’une reprise de confiance en eux par les jeunes afin qu’ils soient acteurs et coauteurs de leur vie. Je tiens à préciser que cette position est partagée par le ministre, le rapporteur ou d’autres de mes collègues, quelles que soient les travées sur lesquelles ils siègent dans cet hémicycle.
Je voudrais illustrer mon propos en vous citant, mes chers collègues, le témoignage d’une bénéficiaire du dispositif emplois-jeunes : « Je suis sortie de là sans diplôme de plus, avec une expérience de six ans mais qui n’a aucune valeur sur le marché du travail. De plus, lorsque je me présentais au Pôle emploi avec l’étiquette “emploi-jeune”, je sentais très bien l’étiquette “boulet” pour eux. Depuis, je me suis consacrée à ma vie de famille et d’ici quelques jours, il faudra que j’aille rechercher un travail avec mon étiquette “emploi-jeune” malgré mes trente-cinq ans. »
Qu’une personne ayant exercé des activités professionnelles pendant six ans éprouve un tel sentiment de relégation n’est pas acceptable. Ce cas de figure démontre bien l’existence d’un dysfonctionnement.
Les futurs salariés détenteurs d’emplois d’avenir devront être partie intégrante de leur entreprise et bénéficier du même traitement que leurs collègues. Il s’agit de les inscrire dans le droit commun.
À l’issue d’un CDD de trois ans rémunéré à hauteur du SMIC, la prime de précarité due devrait s’élever à un peu plus de 5 000 euros. Elle permettra à celui qui vient de quitter un emploi de préparer son évolution professionnelle. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)