PRÉSIDENCE DE M. Jean-Pierre Bel
M. le président. La séance est reprise.
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Questions d'actualité au Gouvernement
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
Je rappelle que l’auteur de la question dispose de deux minutes trente, de même que la ou le ministre pour sa réponse.
fonderie du poitou
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Raffarin. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UCR.)
M. Jean-Pierre Raffarin. Ma question s'adresse à M. le ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique.
Elle porte sur la situation de l’entreprise Fonderie du Poitou Aluminium. (Ah ! sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
Il s’agit d’un dossier très important parce qu’emblématique des difficultés de certaines entreprises, soumises à un dialogue social parois bâclé et inacceptable.
Voilà maintenant vingt-quatre heures que le tribunal de commerce de Nanterre a accordé à la Fonderie du Poitou Aluminium une prolongation de la période de redressement judiciaire. Monsieur le ministre, je vous remercie d’avoir obtenu, pour cette entreprise, des engagements de la part de Renault : ces derniers ont constitué, me semble-t-il, un élément essentiel en faveur de la décision de prolongation.
Je voudrais vous remercier et, avec vous, l’ensemble du Gouvernement, notamment votre collègue ministre du travail, de l’emploi et de la santé, Xavier Bertrand, ainsi que le Premier ministre lui-même, qui ont suivi avec vous ce dossier. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
Maintenant, nous n’avons que quinze jours pour réussir. Renault, qui assure 85 % des commandes de l’entreprise, doit donc tenir ses engagements. (Eh oui ! sur les travées de l’UMP.)
L’équipement technique de la Fonderie du Poitou Aluminium est performant. Quant aux 485 salariés, ils ont fait la preuve, dans une crise difficile, de qualités humaines et d’un sens des responsabilités exceptionnels. Ils méritent que nous soyons à leurs côtés !
M. Luc Carvounas. Et Gandrange ?...
M. Jean-Jacques Mirassou. Et Molex ?...
M. Jean-Pierre Raffarin. L’outil est performant, les salariés sont professionnels, ils sont responsables.
Aujourd'hui, le grand groupe qu’est Renault peut passer les commandes nécessaires à la poursuite de l’activité de l’entreprise. Surtout, il peut conforter le repreneur, dont nous avons quinze jours pour finaliser le dossier. À cet égard, Renault est indispensable pour ménager une perspective à cet entrepreneur.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre engagement. Je compte sur vous et sur votre pression pour que Renault ne se sente pas innocent quant à l’avenir de la Fonderie du Poitou Aluminium et pour que nous puissions aller au bout de ce dossier. Les salariés le méritent ; le territoire rassemblé derrière cette entreprise performante le mérite également ! (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UCR.-. Applaudissements sur de nombreuses travées du groupe socialiste-EELV.)
M. Didier Boulaud. Ségolène va s’en occuper !
M. Jean-Jacques Mirassou. Et Molex ?...
M. le président. La parole est à M. le ministre chargé de l'industrie.
M. Jean-Claude Gaudin. Il aura sans doute compris le message !
M. Éric Besson, ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique. Monsieur le Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, vous connaissez la mobilisation du Gouvernement sur ce dossier : elle est totale. Depuis la table ronde qu’à votre demande nous avons organisée avec les élus et les syndicats, le 27 octobre dernier, nous avons bien avancé.
Tout d'abord, nous avons fait réaliser un audit indépendant, dont les résultats ont été présentés hier aux salariés. Vous le savez, ces résultats sont bons ! Ils montrent que la Fonderie du Poitou Aluminium a des atouts, mais qu’elle doit diversifier ses débouchés.
Nous avons également mobilisé le Fonds de modernisation des équipementiers automobiles pour qu’il contacte des candidats à la reprise et examine les possibilités de constituer un nouveau tour de table.
Enfin, vous l’avez dit, Carlos Ghosn, président de Renault, a pris, fin octobre, deux engagements très importants : d’une part, le constructeur automobile continuera à s’approvisionner à la Fonderie du Poitou Aluminium ; d’autre part, il assurera le plan de charges du repreneur potentiel.
Ces engagements ont été tenus. (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV.) Ils ont permis la poursuite de l’activité du site et nourrissent les discussions avec les candidats à la reprise.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela s’est fait grâce à la mobilisation des salariés !
M. Éric Besson, ministre. Vous le savez, le marché automobile européen et français a subi un ralentissement ces dernières semaines. Les chiffres publiés ce matin montrent, pour le mois de novembre, une baisse du nombre des immatriculations de 7,5 % en France et, malheureusement, de 14 % pour ce qui concerne Renault.
Ce contexte pèse évidemment sur les besoins du constructeur automobile et sur les volumes de ses commandes à la Fonderie du Poitou Aluminium. Toutefois, en fin de semaine dernière, Carlos Ghosn m’a de nouveau confirmé les engagements qu’il avait pris personnellement.
Ainsi, Renault maintient et maintiendra pleinement la part de la Fonderie du Poitou Aluminium dans ses approvisionnements et, malgré la conjoncture, veillera à assurer un niveau de commandes et à trouver des solutions de trésorerie garantissant le fonctionnement courant du site, comme cela nous était demandé. En outre, Renault reste pleinement engagé dans la recherche d’un repreneur.
Tous ses engagements ont été rappelés par le constructeur devant le tribunal de commerce de Nanterre. Ils ont permis de prolonger la période de redressement judiciaire et garantissent la poursuite de l’activité.
Comme vous l’avez très bien dit, il nous reste maintenant à convaincre un repreneur, dans une conjoncture malheureusement maussade. Je vous le confirme : nous activons et activerons pour cela tous les soutiens publics existants, afin de donner à la Fonderie du Poitou Aluminium un avenir industriel solide. Comme vous, j’estime qu’elle le mérite ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UCR.)
M. le président. La parole est à Mme Muguette Dini.
Mme Muguette Dini. Ma question s'adresse à M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Elle porte sur les violences faites aux femmes, sujet d’une actualité quotidienne.
En effet, pas une semaine ne se passe sans que l’on apprenne, dans la presse régionale de Rhône-Alpes, la mort d’une femme à la suite des violences de son conjoint.
La loi du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants a été votée par notre Haute Assemblée à l’unanimité, dans le but essentiel de protéger les victimes.
Une des innovations majeures de cette loi est la création d’un délit de violences psychologiques au sein du couple. Ces violences se définissent comme la mise en place progressive, par un conjoint manipulateur destructeur, de mécanismes de dévalorisation systématique, de totale emprise. La victime se trouve peu à peu dans une situation de dépendance affective, sociale et financière qui lui fait perdre repères et autonomie, et qui la tue à petit feu.
Je tiens à souligner que, en matière de violences psychologiques, si les victimes sont essentiellement des femmes, des hommes sont aussi concernés.
Monsieur le garde des sceaux, il semble qu’il soit très difficile aux policiers, aux gendarmes, aux médiateurs ainsi qu’aux magistrats eux-mêmes, d’appréhender ce qu’est un conjoint manipulateur destructeur et les préjudices qu’il cause à toute sa famille.
La brigade de protection de la famille de la gendarmerie de Lyon a établi un questionnaire de grande qualité, permettant, dans le cadre d’une enquête de flagrance et du procès-verbal d’audition de la victime, d’identifier cette caractéristique particulière de la violence conjugale.
Pourquoi n’y a-t-il pas eu, depuis la promulgation de la loi, une généralisation de cet outil ?
Pourquoi n’y a-t-il pas eu une sensibilisation accrue et une formation spécifique des professionnels de police et de justice ?
Pourquoi le délai moyen entre la demande de protection et le prononcé de la décision demeure-t-il encore de vingt-six jours, délai largement suffisant pour que la victime soit agressée et même tuée ?
Enfin, pourquoi le bracelet électronique, qui doit assurer une meilleure protection de la victime, n’a-t-il été mis en place que quatre fois en quinze mois ? (Bravo ! et applaudissements sur un grand nombre de travées.)
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. Madame Dini, la lutte contre les violences conjugales est une priorité portée par l’ensemble des membres du Gouvernement, notamment par ma collègue Roselyne Bachelot-Narquin, mais elle est aussi une ardente obligation pour le garde des sceaux.
Notre arsenal législatif est l’un des plus complets d’Europe. À cet égard, la loi du 9 juillet 2010 constitue une avancée très significative : elle a notamment étendu la répression pénale aux violences psychologiques, au harcèlement et aux violences au sein du couple.
Les instructions de politique pénale que j’ai adressées aux procureurs sont claires : les parquets assurent un traitement en temps réel et prioritaire de toutes les violences intrafamiliales, y compris de nature psychologique, et leur apportent une réponse pénale systématique. (Mme Maryvonne Blondin proteste.)
Je veux souligner devant vous la sévérité de la réponse pénale. Le nombre des condamnations a augmenté de plus de 93 % entre 2004 et 2009. Dans huit cas sur dix, ces violences sont sanctionnées d’un emprisonnement, ferme ou avec sursis. Enfin, le taux d’application des peines planchers pour les récidivistes est, en cas de violences conjugales, largement supérieur à ce qu’il est pour les autres infractions.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. L’ordonnance de protection n’est pas mise en œuvre !
M. Michel Mercier, garde des sceaux. Par ailleurs, s’agissant de la formation des magistrats, je peux vous assurer que les magistrats suivent des cours spécifiques portant sur ces infractions, soit en formation initiale, à l’École nationale de la magistrature, soit en formation continue. Ils étudient les textes applicables à ce contentieux, travaillent sur des cas pratiques, procèdent à des simulations d’audiences.
Chaque année, une session sur les violences conjugales est proposée, au titre de la formation continue, à soixante-dix magistrats et à cinquante autres professionnels – notamment des policiers et des gendarmes –, qui étudient le phénomène d’emprise et la prise en charge des victimes. J’ai également demandé que des formations sur les violences conjugales soient proposées dès 2012 dans toutes les cours d’appel.
Enfin, vous l’avez souligné, l’auteur de violences conjugales graves peut être placé sous surveillance électronique mobile. Aujourd'hui, sept mesures seulement ont été prononcées en ce sens, l’encadrement juridique étant extrêmement strict. Dès janvier 2012, nous expérimenterons à Aix-en-Provence, à Amiens et à Strasbourg un nouveau système qui permettra le déclenchement immédiat d’une alarme lorsque le porteur d’un bracelet s’approchera de sa victime. (Applaudissements sur les travées de l’UCR et de l’UMP. – Marques de scepticisme sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
économie et europe
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte. (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
M. Jean-Yves Leconte. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Le 9 juillet 2007, Nicolas Sarkozy s’invite au conseil des ministres des finances de l’Union européenne. Son objectif ? Obtenir une « application intelligente et dynamique du pacte de stabilité », en d’autres termes, creuser le déficit au-delà de ce que permettent les traités européens.
Cette recherche de complaisance arrange beaucoup de gouvernements, dont celui de M. Caramanlis, le Premier ministre grec de l’époque, lequel allait bientôt laisser son pays dans l’état que l’on sait. Petits arrangements entre complices…
Le nouveau Président de la République revient à Paris et met en place sa politique. Son axe majeur ? Libérer les plus fortunés d’une grande partie de leurs obligations fiscales, affaiblissant significativement les recettes de l’État et aggravant les déficits.
M. Sarkozy nous parle maintenant d’une pseudo-règle d’or. Mais M. Sarkozy a toujours pratiqué la « gestion de plomb » ! Pas moins de 10 points de dette rapportés au PIB, lorsqu’il était ministre du budget de M. Balladur ; 1,5 point quand il était ministre des finances ; plus de 20 points, en cinq ans à l’Élysée !
À lui seul, M. Sarkozy porte la responsabilité de 40 % de l’endettement du pays ! (Vives protestations sur les travées de l’UMP.)
M. Jean-Claude Lenoir. Et vous ?...
M. Jean-Yves Leconte. Rappelons que, depuis quinze ans, seul le gouvernement de Lionel Jospin a désendetté la France. (Protestations redoublées sur les mêmes travées.)
En avril 2010, le nouveau gouvernement grec découvre l’ampleur du gouffre : les déficits sont réévalués, et une première demande d’aide internationale est formulée.
La réaction de M. Sarkozy est-elle alors d’aider la Grèce ? Pas vraiment ! Sa préoccupation est de faire en sorte que la Grèce honore tous ses engagements auprès des banques, même lorsque les prêts sont consentis à des taux inacceptables et prennent en compte le risque de défaut du pays. (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
Pendant dix-huit mois, et alors que la pression se fait de plus en plus forte, le gouvernement français ne prend pas la mesure des choses. Sa position ? Ne pas hésiter à endetter les contribuables européens pour s’assurer que la Grèce ne fasse pas défaut auprès des banques. (Protestations continues et croissantes sur les travées de l’UMP.)
En défendant les intérêts de ces banques, en tenant un discours opposant la zone euro au reste de l’Union européenne, en refusant la mise en place d’une gouvernance plus démocratique de l’euro au profit d’un directoire avec Angela Merkel, le Gouvernement a provoqué un tsunami qui peut aujourd’hui emporter l’ensemble de l’Union européenne. (On scande « La question ! » sur les travées de l’UMP.)
Aucune solution ne saurait être viable sans un renforcement du contrôle démocratique sur les politiques économiques, budgétaires et fiscales, politiques qui doivent aujourd’hui être davantage mutualisées, et ce dans l’ensemble de l’Union européenne.
Mme Chantal Jouanno. Et où sont les propositions fiscales du PS ?
M. Jean-Yves Leconte. Responsabilité, solidarité, nouvelle gouvernance : voilà ce qui devrait guider aujourd’hui l’action du Gouvernement ! (Le brouhaha sur les travées de l’UMP couvre par moment la voix de l’orateur.) L’austérité que vous prônez aujourd'hui n’est pas une politique ; ce n’est qu’une posture face aux marchés ! (La voix de l’orateur se fait plus forte à mesure que le brouhaha croît sur les travées de l’UMP.)
Monsieur le ministre, face à la faillite qui s’annonce,…
M. François Grosdidier. C’est terminé ! La question !
M. Jean-Yves Leconte. … allez-vous mettre le peuple français sous tutelle, conduisant Mme Merkel à définir « par effraction » notre politique, en acceptant, sous la contrainte,…
M. François Grosdidier. C’est fini !
M. Jean-Yves Leconte. … lors du prochain Conseil européen, des engagements qui préempteraient le grand débat démocratique attendu par tous en 2012 ? Le Gouvernement serait-il à ce point saisi de panique sur les conséquences de sa propre politique ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – Protestations sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie.
M. François Baroin, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur Leconte, je vous prie de m’en excuser par avance, mais je ne suis pas certain d’avoir compris…
M. Didier Boulaud. C’est peut-être là le problème !
M. François Baroin, ministre. … l’intégralité de vos propos. (Applaudissements et hilarité sur les travées de l’UMP. – Protestations sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’était très clair !
Mme Annie David. C’est insultant !
M. François Baroin, ministre. J’ai enregistré un léger manque de nuance dans l’appréciation que vous portez sur la politique menée par le Gouvernement depuis 2007. (Sourires sur les travées de l’UMP et de l’UCR.)
J’ai également noté la relative modération de votre engouement pour la période 1997-2002.
Je vais m’efforcer de rappeler deux ou trois idées simples.
Premièrement, la France, comme tous les autres pays du monde, traverse la crise économique et financière la plus grave depuis la guerre.
M. Didier Boulaud. Vous ne comprenez pas ce qui nous arrive !
M. François Baroin, ministre. Deuxièmement, nous connaissons actuellement une réplique des deux crises mondiales dont l’épicentre était situé aux États-Unis, à savoir la crise américaine et la crise bancaire.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les dividendes se portent très bien !
M. François Baroin, ministre. Ces crises ont amené les États aux économies avancées, singulièrement à l’intérieur de la zone euro, à accepter une chute de leurs recettes, en faisant jouer les amortisseurs sociaux pour protéger notre modèle social et préserver les plus démunis,…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Amortisseurs sociaux ? Modèle social ? Vous cassez tout !
M. François Baroin, ministre. … en acceptant la mise en place de plans de relance, donc une aggravation des déficits pour soutenir l’économie.
M. Didier Boulaud. Tout va bien, alors !
M. François Baroin, ministre. C’est si vrai que la France connaît une récession deux fois moins importante que l’Allemagne, et elle en est sortie plus vite que son voisin. (Protestations sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le chômage augmente à toute vitesse !
M. François Baroin, ministre. C’est si vrai que notre pays a enregistré un rebond de croissance, lequel démontre la pertinence de la stratégie suivie depuis deux ans. (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)
Oui, nous pouvons considérer que le pari d’investissement sur l’avenir du grand emprunt, l’acceptation de l’effondrement des recettes, sans augmentation concomitante des impôts…
M. Yves Rome. Des taxes, toujours plus de taxes !
M. François Baroin, ministre. … mais associé au maintien du financement de la protection sociale, sont les axes d’une stratégie qui a préservé le pouvoir d’achat des Français.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On dénombre 14 millions de pauvres, 10 % de chômeurs ! Le pouvoir d’achat des Français baisse !
M. François Baroin, ministre. Reste que la question du grand rendez-vous que vous posez, monsieur Leconte, est importante.
Nous devons tirer les leçons de ces crises à répétition ; nous devons modifier la gouvernance de l’euro.
M. Didier Boulaud. La seule solution, c’est de changer d’équipe !
M. François Baroin, ministre. C’est chose faite avec notamment la mise en œuvre du six pack, c'est-à-dire des six textes destinés à instaurer un dispositif préventif pour corriger les déséquilibres macroéconomiques à l’intérieur de la zone euro ainsi qu’une convergence budgétaire et fiscale à l’intérieur des budgets de la zone euro. Surtout, grâce à ces textes, les chiffres seront plus sincères, ce qui permettra à chacun d’avoir une vision globale et de se coordonner avec l’ensemble du dispositif.
M. Didier Boulaud. Il faut changer d’entraîneur !
M. François Baroin, ministre. Au cours des deux jours qui viennent de s’écouler, des avancées significatives ont été enregistrées à Bruxelles.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ah oui ?...
M. François Baroin, ministre. La zone euro a accepté le décaissement de la sixième tranche de soutien à la Grèce et a fait de même pour l’Irlande. Cela donne donc de la profondeur de champ.
Le Fonds européen de stabilité financière, même si son action est difficile, est également sur une trajectoire vertueuse.
Hier, au nom du Gouvernement français, j’ai salué la décision importante relative à la coopération des banques centrales européennes, pour garantir l’accès aux liquidités de tous les établissements bancaires.
M. Didier Boulaud. Oui, tout va bien !
M. Alain Néri. Et le troisième plan de rigueur, c’est pour quand ?
M. François Baroin, ministre. Cette mesure va dans la bonne direction. Les propositions franco-allemandes que présenteront ce soir le Président Nicolas Sarkozy et demain la Chancelière Angela Merkel permettront, je le crois, de franchir un pas important la semaine prochaine lors du Conseil européen. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UCR.)
fraudes
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Pour celles et à ceux qui en douteraient encore, la campagne de l’élection présidentielle a bien débuté, comme l’attestent les déclarations récurrentes des différents membres du Gouvernement concernant la fraude sociale.
Comme avant chaque échéance électorale, vous usez de tous les artifices pour opposer nos concitoyens entre eux, pour faire naître la suspicion. Le ressort est bien connu : tenter de faire croire que l’autre est un fraudeur potentiel, afin de justifier des mesures toujours plus injustes, comme les déremboursements, l’instauration d’une journée de carence pour les fonctionnaires, la réduction du montant des indemnités maladie...
Le fait d’instiller un tel doute vous permet également d’affaiblir notre protection sociale, définie par le Gouvernement comme étant la plus généreuse au monde. Non, notre système n’est pas généreux ; il est solidaire ! Les salariés, les retraités, les malades et les précaires, que vous stigmatisez, cotisent pour financer ce système (Exclamations sur les travées de l’UMP.),…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Absolument !
M. Dominique Watrin. … et ce d’autant plus que la part de financement issu des cotisations patronales ne cesse de diminuer ! Et la différence ne s’arrête d’ailleurs pas là.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Tout à fait !
M. Dominique Watrin. La fraude aux prestations est condamnable, et nous la condamnons aussi.
M. François Grosdidier. Frauder, c’est voler !
M. Dominique Watrin. Toutes les études réalisées sur le sujet montrent que cette fraude représente 2 milliards d’euros, soit 0,5 % des prestations délivrées.
Mais, et vous le savez, dans tout ce que vous identifiez comme étant des fraudes, figurent nombre d’indus qui sont par la suite récupérés.
Si vous vous exprimez souvent sur ce sujet, vous vous montrez beaucoup plus silencieux sur une fraude tout aussi inacceptable et sans commune mesure avec celle dont je viens de parler, la fraude patronale. (Protestations sur les travées de l’UMP.)
M. François Grosdidier. C’est faux !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Mais non, c’est la vérité !
M. Dominique Watrin. Alors que vous qualifiez les salariés de « voleurs potentiels », les employeurs ne seraient, eux, que des tricheurs, des mauvais joueurs en somme. (Vives exclamations sur les mêmes travées.)
Pourtant, la fraude patronale représente, selon les mêmes rapports, jusqu’à 15 milliards d’euros de manque à gagner, c’est-à-dire sept fois plus que la fraude aux prestations, c’est-à-dire aussi un montant équivalent au déficit de la sécurité sociale pour 2012 !
Les Français ont peur pour leur économie, leur emploi, leur pouvoir d’achat. Ne détournez pas ces peurs pour mieux inciter à la stigmatisation des pauvres, et de l’Autre.
Ma question au Gouvernement est simple : quelles mesures concrètes entend-il prendre pour sanctionner réellement et sévèrement les employeurs peu scrupuleux et pour récupérer les sommes qu’ils volent à la sécurité sociale ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre du budget.
Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement. Je profiterai de mon intervention pour répondre à M. Leconte, qui a commis une petite inexactitude.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ah non, répondez à M. Watrin !
Mme Valérie Pécresse, ministre. Monsieur le sénateur, il est faux d’affirmer que Lionel Jospin a désendetté la France : entre 1997 et 2002, la dette de notre pays a augmenté de plus de 100 milliards d'euros ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP – Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Arrêtez !
Mme Valérie Pécresse, ministre. Monsieur Watrin, j’en viens à votre question.
Vous avez raison de dire que nos filets de protection sociale n’ont jamais été aussi solides. Vous le savez, les dépenses sociales de l’État ont augmenté de 37 % depuis le début du quinquennat.
Nous avons augmenté les minima sociaux, l’allocation aux adultes handicapés de 25 %,...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce n’est pas croyable !
Mme Valérie Pécresse, ministre. … le minimum vieillesse de 25 %. (Protestations sur les travées du groupe CRC.)
Nous avons créé le revenu de solidarité active, véritable bouclier social pour les plus fragiles. (Protestations continues sur les mêmes travées.)
Face à ce modèle social généreux (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste-EELV.) que nous assumons, que nous défendons, que le Président de la République n’a cessé de renforcer, nous n’acceptons pas la fraude, parce que, mesdames, messieurs les sénateurs, la fraude, c’est du vol, et parce que la fraude met à mal le pacte républicain. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et sur certaines travées de l’UCR.)
M. Didier Boulaud. Bettencourt !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Répondez à la question !
Mme Valérie Pécresse, ministre. Monsieur Watrin, contrairement à ce que vous affirmez, il n’y a pas, d’un côté, les petits fraudeurs et, de l’autre, les gros.
Nous nous montrons aussi implacables vis-à-vis de la fraude aux prestations sociales, soit 60 % de la fraude détectée, que de la fraude imputable aux employeurs qui recourent à des salariés clandestins, soit 40 % de la fraude détectée.
Nous sommes tout aussi impitoyables à l’égard des fraudeurs fiscaux qui refusent de payer leur dette au fisc.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Personne ne vous croit !
Mme Valérie Pécresse, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, nous parlons de 16 milliards d'euros de redressements. (Protestations sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Parlons-en !
Mme Valérie Pécresse, ministre. Vous n’en avez pas parlé, monsieur le sénateur ! Cela fait 1 milliard d'euros de plus par rapport à 2009.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Un milliard d'euros sur vingt-deux !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Que faites-vous ?
Mme Valérie Pécresse, ministre. Oui, nous avons renforcé les règles permettant de détecter les fraudeurs, qu’il s’agisse des employeurs indélicats, des utilisateurs frauduleux de la carte Vitale, des usurpateurs d’identité, des faux parents isolés.
Nous ne voulons pas de fraudeurs dans la République ! Et, monsieur Watrin, face à la fraude, seule la répression donne des résultats, qu’il s’agisse des employeurs, des fraudeurs sociaux ou des fraudeurs fiscaux. Telle est la politique de notre gouvernement. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UCR.)