M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour présenter l'amendement n° 37 rectifié.
M. Gilbert Barbier. Je ne vais pas en rajouter, puisque notre collègue Bruno Gilles a présenté un amendement identique au mien.
Comme M. le ministre l’a indiqué, la visite médicale collective commence à deux. Dans ce cadre, se pose le problème des médicaments soumis à prescription restreinte. Certes, les ophtalmologistes, entre autres médecins spécialistes, ne seront pas forcément intéressés par le sujet. Reste que les médicaments de réserve hospitalière, de prescription hospitalière et de prescription initiale hospitalière doivent être exclus du champ de l’article 19.
Mes chers collègues, évitons le jusqu’au-boutisme, même si l’on a bien compris que la visite collective ne changera pas grand-chose pour l’instant.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Monsieur Gilles, il y a du vrai dans vos propos, mais nous sommes aujourd’hui à un tournant. Trouvons donc des solutions plutôt que de regarder le passé.
Vous voulez exclure du champ de la visite médicale collective les médicaments soumis à prescription restreinte. Soit on fait l’expérimentation, soit on ne la fait pas. Ces médicaments étant souvent innovants, ils intéresseront certainement beaucoup de monde. Peut-être cela posera-t-il problème dans un petit hôpital qui compte seulement trois médecins, mais même eux seront concernés par ces innovations.
Par cohérence avec ce que j’ai dit précédemment, j’émets donc un avis défavorable sur les amendements identiques nos 20 rectifié et 37 rectifié.
S’agissant des dispositifs médicaux, qui sont l’objet du sous-amendement n° 95, le problème aujourd’hui est que chacun fait ce qu’il veut dans ce domaine. Il y a très peu de contrôle en la matière. Je rappelle ce que m’a dit l’une des quelques personnes que j’ai pu auditionner, compte tenu du peu de temps dont je disposais, – il s’agissait, je crois, du président de la Haute Autorité de santé – : le futur Mediator sera un dispositif médical. Il faut donc faire attention.
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Dans cette optique, il est normal de ne pas les exclure du projet de loi. J’émets donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Ma position sur les amendements identiques nos 20 rectifié et 37 rectifié reste la même au Sénat qu’à l’Assemblée nationale, où un amendement similaire avait été déposé par Guy Lefrand : j’estime que cette disposition restreindrait considérablement le champ de l’expérimentation. Or, comme vient de le dire M. le rapporteur, on doit bien évidemment appliquer les mêmes règles à ces médicaments.
Il faut également inclure les dispositifs médicaux dans le champ de cet article.
J’ai déjà entendu évoquer les risques présentés par les dispositifs médicaux. Il est clair que ceux-ci peuvent un jour poser des problèmes, mais pas plus ou pas moins que les médicaments. Quant à la question de la formation, c’est autre chose.
Je sollicite donc le retrait des deux amendements identiques et du sous-amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote.
Mme Catherine Génisson. Je tiens à remercier M. le ministre de sa proposition d’associer les rapporteurs aux travaux du Gouvernement sur le sujet, ô combien difficile, des visiteurs médicaux. En effet, nous sommes tous persuadés de la nécessité de faire évoluer ce métier.
Beaucoup d’intervenants l’ont indiqué, l’aspect formation-information télescope complètement le sujet de la commercialisation. Comme l’a dit M. Gilles, les visiteurs médicaux font le métier qu’on leur demande de faire.
Je le répète, personne ne nie l’obligation d’évoluer sur le sujet, mais permettez-moi de rester perplexe sur le dispositif que vous proposez monsieur le ministre.
Lorsque des groupements d’achat existent à l’hôpital ou dans le cadre interhospitalier, une seule molécule par spécialité est disponible. Il n’est alors pas question de prescrire telle ou telle molécule, au gré des médecins et des visiteurs médicaux, et c’est très bien ainsi. Ce que vous souhaitez à propos des groupements d’achat me semble donc en partie répondre au problème de la prescription en milieu hospitalier.
Par ailleurs, je me permets d’insister sur la morosité actuelle des médecins hospitaliers. Vouloir leur imposer une nouvelle contrainte très chronophage me paraît difficile, alors que leur travail administratif est lui-même déjà très prenant. Il sera donc difficile d’exiger des médecins qu’ils participent à ces visites collectives.
Puisque nous en sommes à faire des suggestions, il me semble que, pour ce qui est de ces rencontres collectives – que ce soit un médecin avec l’ensemble des visiteurs médicaux ou plusieurs médecins avec un seul visiteur médical –, une personnalité a été oubliée dans le panel : le pharmacien de l’hôpital.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote.
Mme Isabelle Pasquet. Nous ne pouvons que nous réjouir de la création d’un groupe de travail. Le sujet mérite en effet d’être approfondi, afin de trouver d’autres solutions.
Vous vous en doutez certainement, nous ne voterons pas ces deux amendements identiques, qui tendent à rétablir les dispositions relatives à la visite médicale introduites par l’Assemblée nationale à l’article 19, dispositions que notre commission a supprimées.
M. Bruno Gilles. J’aurais aimé une manifestation de solidarité marseillaise !
Mme Isabelle Pasquet. La solidarité marseillaise a ses limites !
Les travaux de la mission commune d’information sur le Mediator, dont les conclusions, je le rappelle, ont été adoptées à l’unanimité, même si certains désaccords persistent, ont débouché sur une proposition ambitieuse que nous soutenons, à savoir la suppression de la visite médicale au profit d’une information objective qui serait délivrée par des personnes placées sous la responsabilité de la Haute Autorité de santé.
M. Bruno Gilles. Des fonctionnaires !
Mme Isabelle Pasquet. Pourquoi pas !
Les visiteurs médicaux pourront, dans un double souci de préservation de l’emploi et de reconversion, prétendre prioritairement à ces postes, sans doute après avoir bénéficié d’une formation adéquate. Ce sont en effet deux choses radicalement différentes que d’être un vecteur de publicité au profit d’une entreprise commerciale et un acteur de la santé publique.
Dans les faits, aussi louables que soient les personnes qui exercent la profession de visiteur médical, il n’en demeure pas moins que les firmes pharmaceutiques les intègrent dans un schéma publicitaire. D’ailleurs, le rapport de notre collègue Bernard Cazeau le souligne : « L’observatoire mis en place par la revue Prescrire permet de dresser un bilan contrasté de la qualité des informations transmises à l’occasion des visites médicales. Les données collectées pour la période 1999-2007 montrent en effet que 70 % des visites médicales n’ont pas donné lieu à une présentation spontanée des contre-indications, interactions médicamenteuses, précautions d’emploi et effets indésirables. En outre, dans 20 % des cas, le résumé des caractéristiques du produit n’a pas été spontanément remis au médecin, ce qui constitue pourtant une obligation prévue à l’article R. 5122-11 du code de la santé publique. »
L’étude d’impact, que le Gouvernement a remise avec ce projet de loi, précise que les coûts liés à la visite médicale relèvent de la promotion du médicament. Ils représentent même 75 % de ces dépenses, soit 12 % du chiffre d’affaires des entreprises pharmaceutiques.
Je doute que cet engagement financier d’importance corresponde à une recherche effrénée des firmes pharmaceutiques pour le développement du bon usage des médicaments. Les industries pharmaceutiques, qui ne peuvent pas réaliser de publicité à destination du grand public sur les médicaments soumis à prescription, trouvent donc une autre manière d’atteindre le patient en touchant le médecin.
Si nous sommes sensibles à l’argument avancé par nos collègues sur la complexité des médicaments, tels que ceux à prescription hospitalière ou ceux à prescription initiale hospitalière, nous ne sommes pas convaincus que les exploitants constituent la meilleure source d’information pour les professionnels de santé. Il faut donc trouver, pour ces médicaments, qui sont d’ailleurs les plus onéreux et qui rapportent le plus à l’industrie pharmaceutique, une source fiable d’information loyale et indépendante. Dans la mesure où la Haute Autorité de santé émet des recommandations sur leur usage, il nous semble légitime que ce soit elle qui ait en charge la mission d’informer les professionnels de santé.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour explication de vote.
M. Gilbert Barbier. Le Gouvernement a souhaité que nous retirions nos amendements. Pour ma part, je maintiens celui que j’ai déposé, car l’aspect pratique, réaliste n’a pas été pris en compte.
Dans des secteurs où l’on trouve des médicaments innovants, en matière de lutte contre le VIH, par exemple, combien compte-t-on de médecins spécialistes de cette maladie dans un hôpital ? Combien d’oncologues, alors qu’il en manque partout, sont-ils concernés par les médicaments contre le cancer ?
Concrètement, je me demande comment fonctionneront ces visites médicales collectives. Nous avons beau discuter dans cet hémicycle, nous sommes loin de la réalité des établissements hospitaliers…
M. le président. La parole est M. Alain Houpert, pour explication de vote.
M. Alain Houpert. Les échographes, les scanners, les IRM, la médecine nucléaire, les PET scans font partie des dispositifs médicaux. Souhaiter les inclure dans l’article 19 traduit une méconnaissance de la radiologie.
Pensez au bond en avant que représente la télémédecine, qui permet de faire des diagnostics à distance dans les territoires.
Les radiologues sont constamment en relation avec les visiteurs médicaux, qui sont des ingénieurs, des fabricants. Nous n’avons pas à rougir de la radiologie française, en particulier dans le secteur de l’échographie, qui fait des sauts technologiques chaque mois, grâce aux radiologues, qu’ils exercent dans le secteur privé ou à l’hôpital public. Il est important de conserver cette relation.
Cet article est vraiment délétère pour le processus d’évolution des matériels.
M. le président. La parole est à M. Bruno Gilles, pour explication de vote.
M. Bruno Gilles. Monsieur le ministre, nous nous connaissons depuis longtemps et vous savez que je ne peux pas retirer mon amendement. Je suis encore moins enclin à le faire après les propos qui ont été tenus par ma collègue Isabelle Pasquet.
Au moins, les choses sont claires : certains reconnaissent volontiers qu’ils aimeraient fonctionnariser la visite médicale. Après tout c’est une idée, mais elle montre, elle aussi, les différences idéologiques sur ce sujet entre, d’une part, ceux qui siègent sur les travées du groupe socialiste, souvent des professionnels de santé qui savent que cet article sera difficilement applicable, et, d’autre part, ceux qui partent du principe que les visiteurs médicaux, puisqu’ils travaillent dans le secteur de l’industrie pharmaceutique, sont liés au grand capital. Cela me rappelle un député communiste qui m’avait traité de « valet de l’impérialisme pharmaceutique ».
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il n’avait pas tort !
M. Bruno Gilles. Moi, je pense à ces presque 20 000 visiteurs médicaux.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nous aussi !
M. Bruno Gilles. Ils ne sont pas tous des « valets de l’impérialisme pharmaceutique » ! Pourtant, vous aimeriez les faire disparaître ou les fonctionnariser afin que cela nous coûte encore plus cher.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Au prix où sont payés les fonctionnaires, cela coûtera plutôt moins cher !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 20 rectifié et 37 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 54, présenté par M. Lorrain, Mme Jouanno, M. Milon, Mmes Bouchart, Bruguière et Cayeux, M. Cardoux, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, M. Fontaine, Mme Giudicelli, M. Gournac, Mmes Hummel et Kammermann, MM. Laménie et Pinton, Mme Procaccia et MM. Savary et Villiers, est ainsi libellé :
Alinéas 7 à 9
Rédiger ainsi ces alinéas :
« Le Comité économique des produits de santé peut fixer, après que l’entreprise a été mise en mesure de présenter ses observations, une pénalité financière à l’encontre de l’entreprise qui n’a pas respecté les décisions du comité mentionnées au deuxième alinéa prises à son encontre. Le montant de la pénalité ne peut être supérieur à 10 % du chiffre d’affaires hors taxes réalisé en France par l’entreprise au titre du dernier exercice clos pour le ou les produits considérés. La pénalité est déterminée en fonction de la gravité du manquement constaté.
« La pénalité est recouvrée par les organismes mentionnés à l’article L. 213-1 désignés par le directeur de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale. Son produit est affecté aux régimes obligatoires de base d’assurance maladie selon les modalités prévues à l’article L. 162-37. Le recours présenté contre la décision prononçant cette pénalité est un recours de pleine juridiction.
« Les règles et délais de procédure ainsi que les modes de calcul de la pénalité financière sont définis par décret en Conseil d’État. »
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Comme à l’article 13, je propose de permettre au Comité économique des produits de santé de fixer des sanctions financières portant sur un pourcentage du chiffre d’affaires de l’entreprise plutôt que d’imposer une baisse du prix des médicaments.
Je suggérerai une modification similaire aux articles 24 et 26, qui donnent au CEPS le même pouvoir de sanction.
Cette nuit, le Sénat a refusé la baisse du prix du médicament. J’attends donc de sa part qu’il reste cohérent.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 19.
(L’article 19 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 19
M. le président. L’amendement n° 86, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard, Mmes Blandin, Aïchi, Benbassa et Bouchoux et MM. Dantec, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :
Après l’article 19
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 5122-11 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« À compter du 1er janvier 2014, le recrutement de personnes pour faire de l’information par démarchage ou de la prospection pour des médicaments est interdit. »
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Je présente cet amendement au nom des sénateurs et sénatrices écologistes, car nous n’avons pas trouvé, pour l’instant, un consensus plus large. Je le retirerai donc à l’issue de mon intervention, au cours de laquelle je tiens à évoquer la situation des visiteurs médicaux, qui est trop importante pour être passée sous silence.
Un rapport sur le sujet est attendu pour le début de l’année 2013. C’est un signal positif. Pour autant, nous avons voulu, en déposant cet amendement, montrer à quel point il nous semblait important d’exiger, dès à présent, davantage qu’une simple promesse de réflexion.
Je sais que les visiteurs médicaux exercent une profession difficile et qu’ils sont inquiets. Nous n’avons aucunement l’intention de les stigmatiser. Ils ne font que le travail pour lequel on les rémunère. Reste que, comme de très nombreux rapports l’ont souligné, comme plusieurs de mes collègues et moi-même l’avons dit hier, il faut bien reconnaître qu’il existe un conflit d’intérêts flagrant entre l’existence de l’information par démarchage et la prospection commerciale pour des médicaments.
Notre objectif n’est nullement de mettre en cause les individus ou leur intégrité. C’est bien le système tel qu’il est conçu qui pose problème, car il enferme les visiteurs médicaux dans un statut professionnel à visée extrêmement commerciale.
Les ajustements opérés dans le cadre de ce débat ne suffiront pas à résoudre l’incompatibilité de fait qui existe entre information objective des médecins et rémunération par des laboratoires pharmaceutiques, cette dernière étant, par définition, liée à la performance commerciale.
Notre amendement visait à proposer, à partir du 1er janvier 2014, l’arrêt de la délivrance de nouvelles autorisations d’exercice de la profession de visiteur médical, ce qui revenait, en effet, à placer cette dernière en « extinction progressive ». Il s’agissait, non pas, évidemment, de mettre 18 000 personnes au chômage, mais d’en finir avec la possibilité de recruter de nouvelles personnes qui viendraient renflouer ce corps.
Sur proposition de M. le rapporteur, il a été acté, outre la remise du rapport attendue pour 2013, la mise en place d’une mission pour étudier la question. Je m’en réjouis, d’autant que j’ai cru comprendre que nous y serions associés. J’espère qu’elle pourra débuter ses travaux rapidement.
Je forme le vœu que cette mission ne se borne pas à mener une réflexion générale. Sur ce point, je vous rejoins, monsieur le ministre, quand vous insistez sur l’importance de trouver, dans la pratique, des solutions concrètes. Pour éviter que de nouvelles affaires comme celle du Mediator ne se développent, soyons cohérents et étudions les différents moyens d’action.
J’ai employé, en commission, le mot « reconversion ». Qu’elle soit mise en œuvre dans un secteur économique ou sur un territoire, la reconversion n’a rien d’un mécanisme brutal dont la finalité serait de mettre les salariés au chômage : c’est une démarche qui s’inscrit dans la durée et qui s’efforce de conjuguer savoir-faire et compétences des professionnels avec les besoins recensés.
En matière de santé publique, nous devons trouver des pistes de financement pour couper le lien qui relie le travail des visiteurs médicaux à des intérêts privés.
Je souhaite donc fortement qu’une telle mission ait le courage de sortir du cadre du diagnostic général sur la situation de la profession pour engager le dialogue avec elle et trouver, enfin, une solution. Il n’est plus temps d’attendre. Il faut que la mission soit mise en place rapidement. (Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste-EELV.)
M. Jean Desessard. Bravo !
M. le président. L’amendement n° 86 est retiré.
L’amendement n° 91, présenté par Mme Archimbaud, M. Kerdraon, Mmes Klès et Génisson, M. Le Menn et les membres du groupe Socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, est ainsi libellé :
Après l’article 19
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport au plus tard le 30 juin 2012 portant une réflexion globale sur la formation médicale initiale et continue.
Il procède à l’identification des besoins et à une évaluation de la qualité et de l’indépendance des formations dispensées.
Il présente des mesures d’amélioration répondant aux enjeux de la formation et de l’information des professionnels de santé. Il définit également les modalités de mise en œuvre effective et rapide :
– du dispositif de développement professionnel continu ;
– de l’instauration d’une évaluation périodique des pratiques professionnelles soumises à obligation ;
– du renforcement de l’enseignement de la pharmacologie clinique et de la thérapeutique en formation initiale.
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Par cet amendement, il s’agit de favoriser une réflexion globale sur le système de formation et d’information médicales.
Le drame du Mediator est significatif du caractère inadapté de la formation des médecins, puisqu’une simple étude pharmacologique aurait dû suffire aux professionnels pour écarter ce médicament. En effet, dans les ouvrages de référence de pharmacologie, la norfenfluramine, métabolite principal du benfluorex, est classée parmi les amphétamines, ce point étant contesté par les seuls laboratoires Servier. Le raisonnement pharmacologique aurait ainsi dû contribuer à déceler les risques inhérents au Mediator.
Il faut bien le dire, comparée à celle qui est dispensée dans la plupart des pays développés, la formation initiale en France en pharmacologie et en thérapeutique est très insuffisante au cours des études médicales et presque inexistante dans le cadre de la formation médicale continue. Un rapport du Sénat l’indiquait déjà en 2006 : « L’enseignement de la pharmacologie a subi [...] une diminution continue du nombre d’heures qui y sont consacrées dans la scolarité des étudiants en médecine : plus de cent cinquante dans les années 1940, moins de cent trente heures vingt ans plus tard, environ quatre-vingts heures aujourd’hui, soit le temps d’apprentissage le plus court d’Europe. »
Depuis lors, la situation s’est encore dégradée. La pharmacologie est enseignée, pour une large part, en première et deuxième années des études médicales, où elle a bien davantage un rôle d’initiation à la connaissance du médicament que d’enseignement de la pharmacologie, et on ne la trouve quasiment plus dans le deuxième cycle des études de santé.
Il paraît donc nécessaire, sans remettre en cause fondamentalement l’autonomie des facultés de médecine, de revoir les études médicales. Une rénovation de la formation initiale permettra notamment de développer la prescription en dénomination commune internationale, ou DCI. Par ailleurs, la thérapeutique doit être développée dans la formation initiale afin d’en finir avec le principe, sans cesse invoqué, du « tout médicament ».
La formation continue ne permet aucunement de pallier les carences de la formation initiale sur ces points. Assurée par les autorités sanitaires, la formation continue est constituée en grande partie de ce qu’on appelle le développement professionnel continu, ou DPC, qui se met actuellement en place. Voté en 2009, ce dernier a pour objectifs l’évaluation des pratiques professionnelles, le perfectionnement des connaissances, l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins ainsi que la prise en compte des priorités de santé publique et de la maîtrise médicalisée des soins. Cependant, faute de moyens, cette mise en place reste très limitée.
Certes, dans le cadre du PLFSS pour 2012, le Gouvernement prévoit d’augmenter la taxe sur les entreprises pharmaceutiques de 0,6 %. Le produit de la majoration s’élèverait à 150 millions d’euros et serait destiné au financement du DPC. Ce premier pas apparaît néanmoins quelque peu marginal, en comparaison du montant dépensé par les industries pharmaceutiques pour les visiteurs médicaux, à savoir 1,3 milliard d’euros.
Le reste de la formation continue, la majeure partie, est financé par les industries de santé, notamment dans le monde hospitalier. Ce financement prend plusieurs formes : location de stands lors des congrès, séminaires organisés par l’industrie avec présence d’experts médicaux, prise en charge de médecins pour se rendre à des congrès nationaux ou internationaux, à l’instar des réunions nord-américaines. Or, même si cette aide est encadrée, elle représente une très grande partie du budget total de la formation des hospitaliers.
Enfin, cette formation médicale n’étant disponible que pour les médecins de ville désireux de renouveler leurs connaissances, les visiteurs médicaux ont su occuper le vaste espace laissé à l’abandon par l’État. La visite médicale n’a pas pour but d’assurer le rôle de la formation continue : financée par les laboratoires, elle cherche à promouvoir les médicaments concernés.
Mme Muguette Dini. Monsieur le président, le temps de parole est écoulé ! (Marques d’approbation sur plusieurs travées de l’UCR, de l’UMP et du RDSE.)
Mme Aline Archimbaud. L’information délivrée lors d’une visite peut ainsi être biaisée, voire erronée. La charte de la visite médicale, adoptée en 2004, n’a rien changé aux pratiques existantes et n’a pas mis fin aux dérives constatées.
Le constat est clair : La formation continue des médecins n’est pas assez encadrée ni suffisamment indépendante.
Mme Muguette Dini. Monsieur le président, cela suffit !
M. le président. Veuillez conclure, madame Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Monsieur le ministre, mes chers collègues, l’État se doit de prendre la mesure des besoins et d’y répondre concrètement ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole pour la présentation des amendements est limité à trois minutes.
Mme Muguette Dini. Cela dure cinq minutes à chaque fois !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Enfin, nous allons pouvoir apercevoir le monstre du loch Ness ! (Sourires.) Il y aura une vraie formation continue, qui ne se résumera pas à « petits-fours, buffets, et tutti quanti ». J’espère que nous en aurons la concrétisation dans le PLFSS pour 2012.
Par conséquent, la réflexion que fait ici Mme Archimbaud ne peut que recueillir l’avis favorable de la commission.
M. Jean Desessard. Bravo, monsieur le rapporteur !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote.
Mme Isabelle Pasquet. Bien évidemment, nous voterons cet amendement.
Je voudrais profiter de cette intervention pour répondre à M. Gilles. Non seulement il m’était « techniquement » impossible de le faire avant, n’ayant le droit qu’à une explication de vote sur chaque amendement, mais, en outre, j’ai préféré temporiser, car je n’ai pas pour habitude de polémiquer.
En tout état de cause, monsieur Gilles, il ne rime à rien de caricaturer systématiquement les positions des communistes.
M. Bruno Gilles. Je n’en ai pas l’intention, loin de là !
Mme Isabelle Pasquet. Quant à savoir s’il faut « fonctionnariser », pour reprendre votre terme, les visiteurs médicaux, pour ma part, aujourd’hui, je suis incapable de vous dire si c’est la bonne solution ou pas.
M. Bruno Gilles. Les fonctionnariser ? Ce serait une « espèce en voie de disparition » !
Mme Isabelle Pasquet. Laissons la mission se mettre en place et travailler : elle va certainement trouver des pistes intéressantes.
Notre propos se limite simplement à souligner que le rôle des visiteurs médicaux ne doit pas uniquement être de faire de la publicité pour le compte des laboratoires pharmaceutiques. Nous sommes en effet conscients de leur utilité, tant il est vrai que les médecins ressentent comme une nécessité le fait de disposer d’une information.
Oui, monsieur Gilles, la visite médicale a toute son utilité ! Reste que nous sommes attachés à ce qu’elle s’effectue sous le contrôle de la HAS, car cela fait pleinement partie des attributions de cette instance.