M. Paul Blanc, rapporteur. Très bien !
M. Guy Fischer. Et pourtant…
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Une nouvelle fois, je rappelle l’engagement très ferme que le Président de la République a pris, lors de la conférence nationale du handicap, de ne pas revenir sur l’échéance de 2015.
Avant toute autre chose, il me semble nécessaire de lever un malentendu : aujourd’hui, s’agissant des logements neufs, les textes prévoient une obligation d’accessibilité totale pour les parties communes, mais seulement une obligation d’adaptabilité totale pour les parties privatives, c’est-à-dire pour les logements eux-mêmes.
M. Paul Blanc, rapporteur. Voilà !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Quand un logement est « adaptable », cela signifie qu’il n’est pas directement accessible, mais qu’il pourra être adapté grâce à des travaux simples, c’est-à-dire ne touchant pas au gros œuvre.
Ces dispositions conviennent parfaitement à des logements ordinaires, loués ou achetés pour être habités à l’année. La difficulté, c’est que les mêmes dispositions s’appliquent aux logements à occupation temporaire ou saisonnière, c’est-à-dire à des résidences de tourisme, ou encore aux logements étudiants. Or on ne reste pas suffisamment longtemps dans les logements à occupation temporaire ou saisonnière pour que cela justifie d’y réaliser des travaux !
Une forme de promesse mensongère est donc actuellement faite au touriste en situation de handicap : on lui laisse entendre que les résidences de tourisme neuves seront désormais accessibles à 100 %, alors que seules les parties communes le seront complètement.
L’important n’est-il pas, pour la personne handicapée, qu’il y ait une obligation de résultat, c’est-à-dire qu’elle puisse effectivement bénéficier d’une location saisonnière accessible, et non pas simplement adaptable ?
Il faut donc faire évoluer le cadre réglementaire concernant ce type de logements. À cette fin, le présent article vise à instaurer une base légale pour la mise à disposition immédiate, dans tous ces types d’hébergements à usage temporaire ou saisonnier, de logements directement et effectivement accessibles. Le décret d’application fera bien entendu l’objet d’une concertation avec les associations.
Enfin, cette proposition de loi contient une série de mesures tendant à améliorer la vie des personnes en situation de handicap.
Je pense notamment à l’assouplissement des conditions d’accès aux fichiers sources. L’article 14 quater prévoit en effet une exception aux droits d’auteur en faveur des personnes en situation de handicap, qui rencontrent des difficultés évidentes pour accéder aux œuvres culturelles. Pour éviter d’ajouter un obstacle juridique à leur vie quotidienne, cet article facilitera la reproduction des œuvres sur des supports adaptés aux publics en situation de handicap, dès lors que la consultation en sera strictement personnelle, par des organismes transcripteurs comme les bibliothèques. Ces organismes pourront demander, dans les dix ans suivant le dépôt légal des œuvres imprimées, à avoir accès aux fichiers numériques.
Je pense également à la facilitation de l’accès aux stages pour les étudiants handicapés, grâce à l’attribution automatique de la qualité de travailleur handicapé aux jeunes disposant d’une convention de stage.
Je pense au montant minimal permettant aux entreprises dites « à quota zéro » de s’exonérer de leur sur-contribution à l’AGEFIPH, l’Association pour la gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des handicapés. Aujourd’hui, un achat d’un faible montant, de l’ordre de 300 euros, permet en effet aux entreprises de s’exonérer de cette sur-contribution. Ce n’est pas normal.
Je pense à la possibilité, pour les jeunes accueillis en instituts médico-éducatifs, en instituts médico-professionnels ou en instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques, de manipuler un certain nombre de machines et d’outils qui appartiendront plus tard à leur quotidien dans le monde professionnel qu’ils tentent d’intégrer. C’est un élément indispensable au développement de leur technicité et de leur employabilité.
Je pense enfin à la possibilité de saisine du Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, le FIPHFP, par les agents de la fonction publique.
Ces différents articles constituent des avancées majeures à la fois pour le fonctionnement des MDPH et pour les droits et la vie des personnes en situation de handicap. Ces avancées, nous les attendons depuis plus d’un an. Elles sont, en outre, conformes au rapport remis par l’Inspection générale des affaires sociales fin 2010. Vous comprendrez donc aisément que je souhaite que ces articles puissent être votés dans les mêmes termes au Sénat qu’à l’Assemblée nationale, afin que leurs dispositions entrent en vigueur le plus rapidement possible.
Ce texte est nécessaire si nous voulons que le quotidien des personnes en situation de handicap ne soit plus un combat. Il appelle un vote conforme. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Paul Blanc, rapporteur, dont l’intervention dans ce débat mérite d’autant plus d’être saluée qu’il ne sollicitera pas le renouvellement de son mandat en septembre prochain !
M. Paul Blanc, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, c’est en effet avec beaucoup d’émotion que je m’exprime pour la dernière fois à cette tribune afin de défendre la cause des personnes handicapées.
L’accueil réservé par la presse et certaines associations à cette proposition de loi m’a quelque peu meurtri, je l’avoue. J’espère que ce débat permettra de démontrer qu’elle constitue une réelle avancée pour les personnes handicapées.
Cette proposition de loi est l’aboutissement d’une réflexion engagée voilà plus de deux ans, avec notre collègue Annie Jarraud-Vergnolle, sur les dysfonctionnements des maisons départementales des personnes handicapées et, plus largement, sur les améliorations à apporter à la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
La première lecture de ce texte par le Sénat a débuté le 24 juin 2010, puis a été interrompue pendant plusieurs mois, avant de reprendre pour s’achever le 25 octobre. L’Assemblée nationale a ensuite pris le relais et a adopté, le 16 février dernier, le texte qui nous est aujourd’hui soumis en deuxième lecture.
M. Jean Desessard. Il était temps !
M. Paul Blanc, rapporteur. Certes, mais nous avons l’habitude, mon cher collègue ! En effet, la loi du 11 février 2005 a été examinée en première lecture par le Sénat en 2003, si mes souvenirs sont exacts, Mme Boisseau étant alors secrétaire d’État chargée des personnes handicapées. Mme Montchamp était présente au banc du Gouvernement lors de la deuxième lecture, en 2004, avant que M. Bas ne représente ce dernier en commission mixte paritaire, en 2005… J’ai coutume de dire que j’ai usé trois ministres ! (Sourires.)
Le Sénat prend toujours une part prépondérante dans l’élaboration de tels textes fondateurs pour notre société.
Je ne reviendrai pas sur le détail des mesures de la présente proposition de loi telle qu’adoptée par le Sénat ; je me bornerai à retracer ses grandes lignes, avant de présenter les apports de l’Assemblée nationale.
La première ligne directrice est l’amélioration du fonctionnement et du financement des MDPH.
Vous le savez, les MDPH sont confrontées à trois types de difficultés : l’instabilité de leurs personnels et la diversité de leurs statuts, l’insuffisance de garanties à court terme pour leurs ressources et la persistance de certaines lourdeurs administratives dans l’instruction des demandes.
En ce qui concerne le traitement des demandes, le texte comporte deux dispositions qui devraient permettre de réduire les délais : l’une tend à autoriser les commissions des droits et de l’autonomie des personnes handicapées, les CDAPH, à statuer en section locale ou spécialisée, l’autre à clarifier les conditions dans lesquelles ces commissions peuvent adopter une procédure simplifiée de prise de décision.
S’agissant des personnels, le texte comporte trois mesures visant à les stabiliser, à améliorer leur formation et à enrichir leurs perspectives de carrière.
La première d’entre elles vise à réformer le régime de mise à disposition des personnels issus de la fonction publique d’État, en portant la durée de mise à disposition de trois à cinq ans et en allongeant le préavis de trois à six mois, de façon à mieux anticiper le retour des agents dans leur administration d’origine.
La deuxième mesure instaure un système de mise à disposition contre remboursement, qui permettra à l’État de verser en début d’année, et non a posteriori, une subvention de fonctionnement globale intégrant la somme correspondant aux rémunérations des personnels mis à disposition. Cette mesure est de nature, je crois, à satisfaire les présidents de conseil général !
La troisième mesure a pour objet de permettre au Centre national de la fonction publique territoriale, le CNFPT, d’ouvrir les formations qu’il dispense aux fonctionnaires territoriaux à tous les personnels, quel que soit leur statut, et de prélever les cotisations correspondantes.
J’en viens à la question sensible des financements. Chacun le sait, les MDPH rencontrent des problèmes financiers importants, du fait de la compensation partielle des postes mis à disposition par l’État lorsqu’ils ne sont pas pourvus, mais aussi faute de trésorerie et de plan pluriannuel de financement.
Plusieurs dispositions du texte permettront de remédier à cette situation et d’offrir aux MDPH une meilleure visibilité financière. Il s’agit tout d’abord de stabiliser le statut des MDPH, avec le maintien du groupement d’intérêt public, le GIP, ensuite de mettre en place une convention triennale d’objectifs et de moyens entre chaque MDPH et les membres du groupement, qui devra préciser en particulier les modalités de compensation des postes que l’État s’est engagé à transférer au GIP dans la convention constitutive, ainsi que les moyens supplémentaires qu’il apporte en cas d’élargissement des missions assignées aux MDPH.
La deuxième ligne directrice consiste en la clarification du pilotage des politiques en faveur de l’emploi des personnes handicapées.
Au cours des dernières années, la gouvernance des politiques en faveur de l’insertion professionnelle des personnes handicapées a connu des évolutions importantes, si bien que des inquiétudes ont surgi quant au rôle dévolu à l’État et au service public de l’emploi.
Afin de ne laisser subsister aucune ambiguïté sur ce point, la proposition de loi réaffirme la place de l’État et du service public de l’emploi dans le pilotage des politiques d’insertion professionnelle des personnes handicapées. Elle prévoit également la signature d’une convention pluriannuelle d’objectifs et de moyens entre l’État, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, Pôle emploi, l’AGEFIPH et le FIPHFP, assortie de déclinaisons régionales et locales associant les organismes de placement spécialisés. Cette convention devra déterminer les modalités de mise en œuvre des objectifs et des priorités de l’insertion professionnelle des personnes handicapées.
Une existence légale est par ailleurs redonnée aux Cap emploi, qui ont démontré leur compétence spécifique en matière d’orientation, de placement et de suivi professionnel des personnes handicapées.
Enfin, la Haute Assemblée a enrichi ce volet du texte de deux nouvelles dispositions.
La première autorise le FIPHFP à financer des actions réalisées sur son initiative dans les trois fonctions publiques et à subventionner des organismes ou associations avec lesquels il a conclu une convention. Elle permet également aux fonctionnaires handicapés souhaitant obtenir des aides de saisir directement le FIPHFP, sans avoir à passer par leur employeur. Bien sûr, je suis conscient que l’attribution de ces nouvelles missions au FIPHFP va exiger de son personnel d’importants efforts en termes de réactivité, d’adaptabilité et d’efficacité, mais je suis convaincu que celui-ci saura relever le défi !
La seconde disposition modifie les critères de versement de la subvention spécifique et des aides au poste aux entreprises adaptées et aux centres de distribution de travail à domicile, en supprimant notamment la référence à la notion d’« efficience réduite ».
La troisième ligne directrice est l’amélioration de la prise en charge du handicap.
La loi du 11 février 2005 a fixé des objectifs ambitieux en matière d’accessibilité, la prise en charge du handicap passant aussi par l’adaptation de l’environnement des personnes handicapées.
Dans ce domaine, deux dispositions ont été adoptées par le Sénat.
La première, tendant à favoriser la mise en accessibilité des constructions neuves, prévoit des mesures de substitution en cas d’impossibilité avérée de remplir les exigences réglementaires et légales. Cette disposition, dont les déclinaisons réglementaires seront placées sous l’œil vigilant du Conseil national consultatif des personnes handicapées et dont l’application sera contrôlée sur le terrain par les commissions départementales consultatives de sécurité et d’accessibilité, se traduira non par l’octroi de dérogations de portée générale –comme je l’entends dire ici ou là –, mais par la mise en place de dispositifs de substitution pour permettre de rendre les bâtiments accessibles dans des conditions plus souples.
La seconde disposition vise à étendre l’obligation faite aux distributeurs de services – ADSL, câble, satellite – d’offrir gratuitement les prestations nécessaires à la diffusion des programmes audiovisuels audiodécrits destinés aux personnes aveugles ou malvoyantes.
Intéressons-nous maintenant aux principales modifications apportées par nos collègues députés en première lecture. D’une manière générale, je crois pouvoir dire qu’elles approfondissent utilement notre texte et en confortent la philosophie générale.
Nous avions cherché à clarifier les compétences territoriales des MDPH. L’Assemblée nationale a prolongé notre démarche en améliorant la règle du lieu de résidence.
Les députés ont ensuite sécurisé l’échange d’informations entre intervenants soumis au secret professionnel dans le cadre des missions des MDPH, en le limitant aux seules informations nécessaires à la prise de décision, comme cela est déjà le cas pour l’aide sociale à l’enfance.
L’Assemblée nationale a prévu la reconnaissance automatique de la qualité de travailleur handicapé pour les étudiants handicapés bénéficiant d’une convention de stage. Cette mesure constituera une incitation forte pour les entreprises, qui pourront ainsi remplir leurs obligations d’emploi, mais aussi bénéficier d’aides pour adapter les postes de travail aux personnes handicapées.
Les députés ont donné une base légale aux plans régionaux pour l’insertion des travailleurs handicapés afin de les rendre plus visibles. Certes, je reconnais que ces plans régionaux relèvent davantage du domaine réglementaire, mais en inscrire le principe dans la loi devrait favoriser leur déploiement.
L’Assemblée nationale a, par ailleurs, encadré le dispositif d’exonération du paiement de la « sur-contribution » pour les entreprises qui n’emploient directement aucun travailleur handicapé, mais qui effectuent des achats auprès d’une entreprise adaptée ou d’un établissement d’aide par le travail.
Les dispositions introduites par le Sénat relatives aux normes d’accessibilité applicables aux bâtiments neufs, qui ne visent que les habitations occupées à titre permanent, ont été étendues aux logements destinés à l’occupation temporaire ou saisonnière, telles les résidences de tourisme ou les résidences étudiantes.
Enfin, le texte qui nous est soumis assouplit les conditions dans lesquelles les organismes transcripteurs –bibliothèques, services d’archives, centres de documentation, établissements spécialisés – peuvent accéder aux fichiers sources des œuvres imprimées auprès des éditeurs, afin de les reproduire sur des supports adaptés aux publics handicapés.
Vous le voyez, mes chers collègues, la navette parlementaire a permis d’améliorer et d’enrichir les dispositions de cette proposition de loi, qui est le fruit d’un travail approfondi d’écoute, de concertation et d’analyse. Elle contribuera, j’en suis convaincu, à apporter des réponses aux difficultés que rencontrent les MDPH et surtout à faire progresser la cause des personnes handicapées.
Aussi la commission des affaires sociales du Sénat a-t-elle adopté le texte dans la rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale. J’émets le souhait qu’il soit voté à l’unanimité ce soir. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Pignard.
M. Jean-Jacques Pignard. Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous arrivons probablement au terme de l’examen de la proposition de loi, puisqu’un compromis a été trouvé sur les principaux points qui posaient problème. Je souhaite donc, moi aussi, que nous puissions parvenir à un vote conforme.
À ce stade avancé de nos travaux, je ne puis que réaffirmer l’appréciation globalement positive du groupe de l’Union centriste sur ce texte, qui représente une avancée significative. Le mérite en revient évidemment à la commission des affaires sociales, et notamment à son rapporteur, M. Paul Blanc.
La proposition de loi a un double objet : remédier aux dysfonctionnements qui affectent les MDPH et réviser la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées sur des aspects ponctuels, mais importants.
Inspiré par le rapport d’information de 2009 et fondé sur un diagnostic pertinent des maux dont souffrent les MDPH, ce texte apporte des solutions concrètes. Ces maux, nous les connaissons : il s’agit des lourdeurs administratives, de l’insuffisance de garanties à court terme quant aux moyens financiers dont disposent les MDPH et de l’instabilité des personnels du fait de la diversité de leurs statuts. Or l’allégement, la simplification et la rationalisation des procédures prévus par le texte devraient permettre de réduire les délais d’instruction des nouveaux dossiers et de résorber les stocks accumulés, et ce pour le plus grand profit des usagers.
Le volet financier est également très satisfaisant. C’est même sans doute – je l’ai déjà indiqué en première lecture – le dispositif le plus astucieux du texte. Il organise un système de mise à disposition contre remboursement en vertu duquel l’État versera en début d’année, et non a posteriori, une subvention de fonctionnement globale intégrant la somme correspondant aux rémunérations des personnels mis à disposition. Ainsi les vacances de postes trop souvent constatées seront-elles évitées.
Je mettrai tout de même un bémol : je ne peux m’empêcher de rejoindre le rapporteur pour regretter que l’exonération de la taxe sur les salaires initialement prévue n’ait pas résisté à l’examen, pour d’évidentes raisons budgétaires. La question se reposera, n’en doutons pas, en des temps meilleurs...
Je formulerai aussi un regret concernant le volet consacré aux personnels. À mon sens, c’est sans doute la partie la plus faible du texte. Nous le savons, l’hétérogénéité du statut de ces personnels constitue un frein au système. Or le GIP est pérennisé. Pour ma part, j’étais partisan d’expérimenter des solutions de remplacement, comme celle que Pierre Jamet avait proposée au mois d’avril dernier dans un rapport remis au Premier ministre. Mais je prends acte que les esprits ne sont pas encore mûrs.
Je déplore également que la première mouture du texte n’ait pas été conservée ; il s’agissait de prévoir une mise à disposition dans les MDPH des seuls fonctionnaires territoriaux. À mon sens, nous aurions ainsi certainement gagné en cohérence.
Néanmoins, tout n’est pas, loin s’en faut, négatif dans ce volet. Je salue deux points non négligeables : la mise à disposition des personnels de l’État, qui passerait de trois à cinq ans, et l’autorisation par le GIP de recruter des agents en contrat de droit public ou privé à durée indéterminée, disposition qui offre aux personnels des perspectives de carrière au sein des MDPH.
La seconde partie de la proposition de loi est aussi importante. Elle réforme, entre autres choses, le pilotage des politiques en faveur de l’emploi et la prise en charge du handicap. Je me concentrerai sur ce dernier point pour déplorer deux reculs d’importance concernant la prestation de compensation du handicap, la PCH.
D’une part, nous soutenions fermement la première mouture du texte, qui élargissait le champ d’application de ce dispositif afin de mieux prendre en compte les aides ménagères. Alors que la PCH avait vocation à remplacer l’allocation compensatrice pour tierce personne, l’ACTP, je rappelle qu’il subsiste près de 110 000 prestataires de cette allocation, contre seulement 80 000 bénéficiaires de la PCH. Cette situation s’explique principalement par le fait que la PCH prend mal en compte les aides ménagères. Je n’ignore pas le coût d’une telle mesure, qui s’élève à 150 millions d’euros. Mais, en politique, il faut se donner les moyens de ses ambitions !
D’autre part, et toujours à propos de la PCH, mais cette fois dans une perspective financière, la proposition de loi initiale prévoyait la mise en place d’un mécanisme de péréquation des concours versés par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA, aux conseils généraux au titre de la PCH, afin que ceux-ci soient mieux ajustés aux dépenses réellement engagées. Le Gouvernement avait argué du caractère prématuré d’une telle mesure. Espérons qu’elle devienne un jour d’actualité…
M. Paul Blanc, rapporteur. Il faut bien laisser du travail aux suivants ! (Sourires.)
M. Jean-Jacques Pignard. Pour conclure, je dirai que les modifications apportées par l’Assemblée nationale vont, à nos yeux, dans le bon sens. J’en relèverai notamment deux.
La première concerne la répartition de la charge de travail entre les MDPH. Il s’agit d’un véritable problème compte tenu des inégalités observées entre les départements. Pour mieux répartir la charge de travail, nos collègues députés ont adopté ce qui nous semble être une bonne articulation de compromis entre les notions de domicile de secours et de domicile de résidence.
La seconde porte sur la question de l’accessibilité du bâti. On s’en souvient, en première lecture, nous avions eu à cœur de verrouiller la notion de « substitution » à la mise en accessibilité du bâti neuf. L’adoption de l’amendement de notre collègue Sylvie Desmarescaux avait permis de garantir que cette notion ne pourrait en aucun cas donner lieu à un contournement du principe général de mise en accessibilité. Sur la base d’un texte ainsi sécurisé, il nous semble naturel d’étendre la règle non plus seulement aux habitations occupées à titre permanent, mais également aux logements destinés à l’occupation temporaire ou saisonnière. C’est ce qu’a fait l’Assemblée nationale.
Il ne me reste plus, au nom de mes collègues centristes, qu’à féliciter notre commission pour le travail accompli. Je salue en particulier sa présidente et j’adresse une mention spéciale à notre collègue Paul Blanc, qui termine en beauté sa carrière parlementaire ; les personnes en situation de handicap ont toujours été au cœur de ses préoccupations, parce qu’elles étaient d’abord les préoccupations de son cœur ! (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, six ans près le vote de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, nous constatons les difficultés de sa mise en œuvre.
La présente proposition de loi, consécutive au rapport réalisé en 2009 avec mon collègue Paul Blanc, Les maisons départementales des personnes handicapées sur la bonne voie : premier bilan, quatre ans après la loi du 11 février 2005, a été rédigée au début de l’année 2010. Plus d’un an s’est écoulé entre sa rédaction, son passage au Sénat, à l’Assemblée nationale et son retour en deuxième lecture au sein de la Haute Assemblée.
Je le rappelle, la première lecture s’était déjà déroulée en deux temps : cinq articles avaient été étudiés au mois de juin 2010, la suite de la proposition de loi ayant été examinée au mois d’octobre 2010. En attendant, la situation des MDPH est toujours aussi fragile !
Ce constat, que nous ne pouvons que déplorer, signe le désengagement de l’État vis-à-vis du handicap, malgré les déclarations du Président de la République.
En effet, en dépit d’une importante campagne d’affichage, comme cela a été le cas lors de la deuxième conférence nationale du handicap, qui s’est tenue le 8 juin dernier au Centre Pompidou, avec la présence massive des membres du Gouvernement – pas moins de onze ministres et secrétaires d’État se sont succédé à la tribune –, les associations présentes sont restées sur leur faim. Nous y reviendrons.
Passons à la proposition de loi de Paul Blanc.
Comme nous l’avions signifié en première lecture, le titre Ier relatif à l’amélioration du fonctionnement des MDPH est en conformité avec les préconisations de notre rapport : consolidation du statut juridique du GIP, mesures tendant à stabiliser le personnel et à le former, ouverture plus large des MDPH au public, précisions sur les missions et les engagements des différents opérateurs nationaux et départementaux, notamment en termes de financements futurs nécessaires à la pérennité de leur action, formations restreintes et procédure simplifiée d’organisation de la CDAPH,...
En revanche, le titre II ne nous satisfait toujours pas.
Nous présenterons un amendement à l’article 10 relatif à la contestation des décisions de la CDAPH, afin de réintégrer dans les pièces à fournir au médecin expert auprès du tribunal non seulement le rapport médical établi par le médecin de la MDPH, mais également l’évaluation pratiquée par l’équipe pluridisciplinaire et le projet de vie.
Progressivement, les MDPH ont mis en place des instances de conciliation et de médiation, qui interviennent en cas de désaccord avec les décisions prononcées par la CDAPH. Dans bien des cas, les solutions proposées ont permis d’éviter les recours contentieux.
Toutefois, plusieurs MDPH que nous avons visitées ont exprimé des inquiétudes quant à l’iniquité des décisions prises par les tribunaux du contentieux de l’incapacité, les TCI, et par la Cour nationale de l’incapacité et de la tarification de l’assurance des accidents du travail, la CNITAAT. Les causes principales en sont le manque de formation des médecins experts et des magistrats ainsi que l’absence de reconnaissance de la pluridisciplinarité des évaluations réalisées par les MDPH. Nous préconisions alors une disposition législative précisant que l’approche pluridisciplinaire devait s’appliquer pour les décisions prises par les TCI et la CNITAAT.
Notre amendement a donc pour objet de réintroduire la transmission de l’évaluation pratiquée par l’équipe pluridisciplinaire au médecin du tribunal et au juge.
L’article 10 bis, introduit à l’Assemblée nationale, vise à prévoir l’élaboration tous les cinq ans d’un plan régional pour l’insertion des travailleurs handicapés, un PRITH. Nous ne pouvons que regretter la suppression des programmes départementaux d’insertion des travailleurs handicapés, les PDITH, qui fonctionnaient parfaitement bien. Il s’agissait d’organes de proximité en lien étroit avec l’ensemble des acteurs intervenant dans l’insertion des travailleurs handicapés, ce qui n’est pas le cas des PRITH.
Nous en arrivons aux articles 14 bis et 14 ter.
L’article 14 bis prévoit des mesures de substitution pour l’accessibilité des bâtiments neufs.
Durant l’année 2009, le Gouvernement avait déjà tenté d’étendre les possibilités de dérogation aux règles d’accessibilité prévues par la loi, y compris pour le cadre bâti.
Le 21 juillet 2009, le Conseil d’État a dû annuler un décret du mois de mai 2006 visant à accorder toute une série de dérogations remettant en cause le principe d’accessibilité.
Un peu plus tard, le Gouvernement a tenté une nouvelle fois de modifier directement la loi du 11 février 2005 dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2009, en instaurant des dérogations pour les constructions de bâtiments neufs.