M. Bernard Vera. En 1995, à la suite de l’élection de Jacques Chirac à la Présidence de la République et en raison de l’état désastreux des finances publiques, le Gouvernement avait été contraint de procéder à une mise à jour fiscale d’importance, en accroissant le taux normal de la TVA, mais aussi de l’impôt sur les sociétés et de l’impôt de solidarité sur la fortune.
Ainsi, la majorité parlementaire de l’époque avait consenti une hausse temporaire de 10 % de l’ISF, hors application de toute mesure correctrice.
Bien entendu, les 800 millions de francs attendus de cette disposition n’avaient rien à voir avec les 50 milliards de TVA brute encaissés grâce à la majoration de deux points du taux normal de cette taxe ! Mais le fait est là.
Rappelons que le déficit public atteignait alors 65,5 milliards d’euros et représentait 5,5 points du PIB de l’époque. Il était alors considéré comme particulièrement alarmant et consécutif à un mauvais usage des deniers publics entre 1993 et 1995, malgré l’affectation au budget général des recettes liées aux privatisations.
Ainsi donc, avec un peu plus de 65 milliards d’euros de déficit public, soit moins de la moitié du montant actuel, la décision avait été prise de majorer de 10 % l’ISF.
La situation actuelle des comptes publics et des comptes sociaux, qui est pire qu’en 1995, exige que vous soyez logiques avec vous-mêmes, chers collègues de la majorité. Imposer aux détenteurs des 600 000 patrimoines les plus importants de ce pays un petit effort de solidarité serait la moindre des choses. Cela permettrait à l’État d’engranger 400 millions d’euros de recettes supplémentaires.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission ne peut pas être favorable à cet amendement, qui soulève les mêmes difficultés que les précédents. Au demeurant, je ne doute pas que ce sujet reviendra à l’ordre du jour dans le cadre de la discussion plus globale que nous aurons d’ici à quelques mois.
Dans l’immédiat, je vous demande, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-333 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-105 rectifié, présenté par MM. P. Dominati, Cambon, du Luart, Milon, Chatillon et Revet et Mlle Joissains, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I - Les articles 885 A à 885 Z du code général des impôts sont abrogés.
II - Les pertes de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits visés aux articles 402 bis, 438, 520 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Depuis que je suis parlementaire, chaque année lors de la discussion budgétaire, je dépose, avec un certain nombre de collègues, un amendement visant ni plus ni moins à supprimer l’ISF, dont j’ai maintes fois, avec d’autres, démontré la stupidité d’un point de vue économique.
Le fait de voter le bouclier fiscal et la loi TEPA avec l’ensemble de la majorité présidentielle, au nom d’un principe auquel je crois, même s’il a été mal compris par l’opinion publique, ne m’avait d’ailleurs pas empêché de déposer, comme les autres années, un tel amendement. De fait, je voudrais dire à François Marc que, pour moi, la suppression de l’ISF est indépendante de la nécessité de corriger les effets pervers du bouclier fiscal.
Madame la présidente, je souhaite présenter en même temps que cet amendement, deux autres amendements concernant la résidence principale : le premier vise à exonérer totalement celle-ci de l’assiette de l’ISF ; le second vise à porter l’exonération de 30 % à 40 % de la valeur de la résidence principale de l’assiette de l’ISF.
Cela étant, M. le secrétaire d’État et M. le rapporteur général ont, par anticipation, exprimé leur avis sur ces trois amendements. En particulier, M. le rapporteur général a expliqué qu’il souhaitait que ce débat sur l’ISF soit reporté et que tous les aspects de celui-ci soient examinés globalement. À cet égard, la décision qu’a prise le Président de la République me réjouit. L’an dernier, après des années et des années de discussion, nous avons enfin voté la réforme de la taxe professionnelle ; eh bien je suis heureux d’apprendre que, normalement, je présente cette année ces trois amendements pour la dernière fois.
Je retire l’amendement n° I-105 rectifié, madame la présidente, de même que je retirerai les amendements nos I-103 rectifié et I-104 rectifié lorsqu’ils seront appelés en discussion.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !
Mme la présidente. L’amendement n° I-105 rectifié est retiré.
L'amendement n° I-334 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les articles 885 I bis à 885 I quater du code général des impôts sont abrogés.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. L’impôt de solidarité sur la fortune a, au fil du temps, été « mité » par un certain nombre de dispositions réduisant tant son assiette que son rendement.
Un sondage publié par un grand quotidien populaire deux jours après l’intervention du Président de la République à la télévision indique que, si une large majorité de Français – 53 % contre 27 % d’opinion contraire – sont favorables à la suppression du bouclier fiscal, une majorité aussi large – 56 % – est opposée à celle de l’impôt de solidarité sur la fortune.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Oui, mais une majorité de Français est favorable à notre triptyque !
M. Bernard Vera. Ainsi, les Français sont contre le bouclier fiscal et pour l’ISF, et ils sont même favorables à un nouvel impôt sur les plus-values et le patrimoine.
Le présent amendement vise à revenir sur trois niches spécifiques à l’ISF, qui coûtent au total 258 millions d’euros et concernent, selon les mesures, de 10 000 à 15 000 assujettis, soit environ 2 % des redevables de cet impôt.
Il nous semble donc nécessaire, en cette période de déficits publics, que les plus fortunés contribuent à la charge commune de manière plus significative.
Mme la présidente. L'amendement n° I-255 rectifié, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 885 I quater du code général des impôts est abrogé.
Cet amendement a déjà été défendu.
L'amendement n° I-103 rectifié, présenté par MM. P. Dominati, Cambon, Milon et A. Dupont, Mme Bout, M. Revet, Mme Sittler, M. Chatillon et Mlle Joissains, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - À la première phrase du second alinéa de l'article 885 S du code général des impôts, le taux : « 30 % » est remplacé par le taux : « 100 % ».
II. - La perte de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° I-104 rectifié, présenté par MM. P. Dominati, Cambon, Milon et A. Dupont, Mme Bout, M. Revet, Mme Sittler, M. Chatillon et Mlle Joissains, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - À la première phrase du second alinéa de l'article 885 S du code général des impôts, le taux : « 30 % » est remplacé par le taux : « 40 % ».
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Comme je l’ai annoncé voilà quelques instants, je retire ces deux amendements, madame la présidente.
Mme la présidente. Les amendements nos I-103 rectifié et I-104 rectifié sont retirés.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos I-334 rectifié et I-255 rectifié ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Après avoir écouté les partisans de l’abolition du bouclier fiscal, nous avons pris connaissance des arguments de Philippe Dominati en faveur de l’abolition, cette fois-ci, de l’ISF. Nous aurons ainsi fait le tour complet du sujet, dans un mouvement de parfaite symétrie.
Monsieur Vera, je voudrais, rétrospectivement, revenir quelques instants sur la raison pour laquelle les œuvres d’art n’ont pas été incluses dans l’assiette de l’ISF et ne le sont toujours pas à ce jour, et cette décision a été prise sans état d’âme.
Il s’agit d’un motif d’intérêt public qui conduit à défendre le patrimoine et à éviter toute mesure qui pourrait inciter les détenteurs d’œuvres d’art à quitter notre territoire.
Ces rappels étant faits, j’invite naturellement les auteurs de ces amendements à les retirer et à nourrir de leurs idées le débat que nous aurons en 2011 pour faire de celui-ci un bain de jouvence. (Sourires.)
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Pour les mêmes raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur l’amendement n° I-334 rectifié.
Mme Nicole Bricq. Je ne voudrais pas laisser passer ces échanges sans réagir, d’autant que les études dont nous disposons, y compris celle de la commission des finances, nous permettent de prendre un peu de recul sur cette question de l’ISF. Il me semble nécessaire d’en revenir aux fondamentaux.
Vous voulez « tuer » l’ISF au motif qu’il est anti-compétitif, au motif que la France est le seul pays en Europe à l’avoir instauré. Ainsi, toutes les raisons ont été avancées pour le supprimer, y compris par le Président de la République.
Mais, face à ces arguments, voyons les chiffres.
Par définition, les redevables de l’ISF font partie de ce que l’on appelle la « base mobile » : ce sont des contribuables qui se déplacent d’un pays à l’autre. Seulement, à y regarder de plus près, on s’aperçoit que le nombre de redevables tout comme la perte de base et le rapport entre perte budgétaire et rendement global restent stables.
Par ailleurs, tant la commission des finances que le Conseil des prélèvements obligatoires ont montré, dans leur étude respective, que la résidence principale ne représente que 15 % de la base taxable, contre 28 % pour les valeurs mobilières. De fait, le syndrome de l’île de Ré n’a aucune réalité et le discours auquel nous avons eu droit à ce sujet n’a pas lieu d’être.
Clairement, le défaut majeur de cet impôt, c’est l’étroitesse de sa base. Dès sa création, nombre de biens patrimoniaux ont été exclus de son assiette, mouvement qui s’est poursuivi par la suite, puisque vous n’avez cessé de créer de nouveaux mécanismes de « dérivation ». Dès lors, ceux qui l’acquittent peuvent évidemment, sans doute à juste titre, en être pénalisés.
En outre, je rappelle que, lorsqu’il a été créé, l’ISF était plafonné, et c’est vous-même qui avez supprimé ce plafonnement ! Si l’on considère que les biens immobiliers sont pénalisés par l’ISF dans sa forme actuelle, faisons comme l’Allemagne, les Pays-Bas, les États-Unis ou le Canada et créons un grand impôt foncier. Je crains que la trilogie, voire la tétralogie, ne soit complexe à mettre en œuvre, d’une part, et n’ait pas le même rendement fiscal que l’actuel ISF, d’autre part.
Vous avez beau renvoyer le débat sur cette question au printemps prochain, nous sommes, pour notre part, parfaitement éclairés au vu des chiffres dont nous disposons sur l’ISF. Autant nous convenons que cet impôt soit éventuellement réformé, autant nous nous opposons à son abolition.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-334 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-255 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-336 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les articles 885-0 V bis et 885-0 V bis A du code général des impôts sont abrogés.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. L’article 16 de la loi TEPA a mis en place un dispositif destiné, en principe, à rendre « utile » l’ISF.
Il s’agit, en effet, de procéder à la réduction du montant de l’impôt à raison des investissements effectués par ses redevables dans le capital des PME.
Dans l’absolu, cette mesure pouvait conduire à faire disparaître 97 % des contribuables de l’ISF, puisque ceux-ci acquittaient moins de 50 000 euros de cotisation.
Dans la pratique, comme chacun sait, il n’en a rien été et les éléments d’analyse disponibles relatifs à l’application de l’article 16 susvisé mettent singulièrement en cause son efficacité. En effet, le nombre de contribuables de l’ISF faisant jouer le dispositif est resté relativement faible et est fort loin de représenter un courant majoritaire.
Si l’on en croit l’évaluation contenue dans l’annexe « Voies et moyens » du projet de loi de finances pour 2011, ce sont environ 81 000 ménages, soit 15 % des assujettis à l’ISF, qui ont tiré parti du dispositif, pour un montant de remise de droits de 803 millions d’euros, soit environ 20 % du produit de l’impôt.
Cela représente tout de même un pactole moyen de près de 10 000 euros par donataire, ce qui peut laisser rêveurs ceux de nos compatriotes qui vivent avec un SMIC de 1 000 euros par mois.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il faudrait sans que tout le monde soit dans cette situation…
M. Bernard Vera. Le volume de fonds apportés est resté anecdotique, avec un montant situé entre 1 milliard d’euros et 1,5 milliard d’euros, somme que l’on pourra, par exemple, utilement comparer aux 255 milliards d’euros de collecte du livret A et du livret de développement durable.
Les versements effectués par les redevables de l’ISF, versements qui ont souvent quelque peine à franchir le sas des intermédiaires pour arriver dans les entreprises, ont tendance à suivre les mouvements erratiques de la bourse.
La moindre contraction du CAC 40, et donc de la valeur des patrimoines imposables au titre de l’ISF, entraîne une contraction des versements ! En clair, ceux-ci sont liés non pas aux besoins des entreprises en fonds propres, mais essentiellement aux besoins de réduction d’impôt des contribuables.
Tout cela montre une chose, que nous pressentions dès l’été 2007 : la réduction d’ISF liée à l’investissement dans les PME n’est qu’un outil d’optimisation fiscale et n’a rien à voir avec une volonté durable de financement de l’économie.
Mme la présidente. Les amendements nos I-70 rectifié et I-291 rectifié sont identiques.
L'amendement n° I-70 rectifié est présenté par MM. Adnot et Türk.
L'amendement n° I-291 rectifié est présenté par M. Jégou.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le c) du 1 du VI de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Les mots : « à hauteur de 50 % » sont remplacés par les mots : « à hauteur de 30 % » ;
2° Après l'année : « 2010 », la fin de cet alinéa est ainsi rédigée : «, à hauteur de 60 % au plus tard à la fin du premier exercice et à hauteur de 100 % au plus tard à la fin du deuxième exercice. »
II. - La deuxième phrase du premier alinéa du c) du 1 du III de l'article 885-0 V bis du même code est ainsi modifié :
1° Les mots : « à hauteur de 50 % » sont remplacés par les mots : « à hauteur de 30 % » ;
2° Après l'année : « 2010 », la fin de la phrase est ainsi rédigée : «, à hauteur de 60 % au plus tard à la fin du premier exercice et à hauteur de 100 % au plus tard à la fin du deuxième exercice. »
III. - La perte éventuelle de recettes pour l'État résultant du I et du II ci-dessus est compensée par la création à due concurrence d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Adnot, pour défendre l’amendement n° I-70 rectifié.
M. Philippe Adnot. Au préalable, je tiens à souligner auprès de M. le rapporteur général, dont je sais par avance quelle sera la réponse, que cet amendement ne porte pas seulement sur la disposition de la loi TEPA accordant une réduction de 75 % d’ISF pour les contribuables qui investissent dans des PME non cotées ; il concerne également les fonds d’investissement de proximité, les FIP, et les fonds communs de placement dans l’innovation, les FCPI, qui ne sont pas liés à l’ISF.
Cet amendement, qui n’a aucun coût budgétaire pour l’État, a pour objet de réorganiser le rythme d’investissement dans les entreprises. Lorsque la crise a éclaté, M. le président de la commission avait souhaité, fort justement, que les délais d’investissement dans les entreprises soient accélérés. Mais, contraints dès lors d’investir rapidement dans les entreprises, les fonds d’investissement n’ont plus été en mesure de procéder à un second tour. Or les entreprises innovantes doivent pouvoir bénéficier de plusieurs tours d’investissement, au risque que le pacte d’actionnaires ne soit remis en cause.
C’est pourquoi, à travers cet amendement, je propose de modifier le rythme d’investissement. Ainsi, le quota d’investissement devrait être atteint à hauteur de 30 % de celui-ci dans un délai maximum de huit mois, à hauteur de 60 % à l’issue du premier exercice et dans sa totalité à la fin du second exercice.
Ce rythme, qui reste malgré tout extrêmement raisonnable, permettrait aux entreprises concernées de réaliser plusieurs tours de table dans leur recherche d’investisseurs et éviterait que ne soient remis en cause les pactes d’actionnaires.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Jégou, pour présenter l'amendement n° I-291 rectifié.
M. Jean-Jacques Jégou. À la suite de Philippe Adnot, qui a excellemment exposé ses arguments, je rappellerai simplement que mon amendement, identique au sien, concerne aussi les FCPI et qu’il n’entraîne aucune dépense pour l’État, ce qui est très important en ces temps de disette.
Mme la présidente. L'amendement n° I-408 rectifié, présenté par M. Retailleau, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le f du 3 du I de l’article 885-0 V bis du code général des impôts, il est inséré un 4 ainsi rédigé :
« 4. L'avantage fiscal prévu au 1 s'applique également aux souscriptions en numéraire au capital d'une société satisfaisant aux conditions suivantes :
« a) La société vérifie l'ensemble des conditions prévues au 1, à l'exception de celles prévues aux b, f et h ;
« b) La société d’investissement de proximité a pour objet exclusif de détenir des participations dans des sociétés exerçant une des activités mentionnées au b du 1 situées dans la même région géographique que la société d’investissement de proximité ou dont l’activité dépend de la filière économique que représente l’opérateur au sens du d ci-dessous.
« La société d’investissement de proximité dispose à cet effet de la possibilité de réaliser des investissements au capital des petites et moyennes entreprises accueillant d’autres investisseurs ou d’autres sociétés d’investissement de proximité. Elle peut également réaliser des investissements au capital des petites et moyennes entreprises relevant d’un même pôle d’activité ou d’une même filière économique que celui de celles comprises dans le portefeuille d’investissement de proximité constitué par le même opérateur désigné au sens ci-dessous ;
« c) La société ne compte pas plus de cinquante associés ou actionnaires ;
« d) La société a exclusivement pour mandataires sociaux des personnes morales ayant la qualité de syndicats ou fédérations professionnelles, chambres de commerce et d’industrie agréés à cet effet par le ministère du budget ;
« e) La société n'accorde aucune garantie en capital à ses associés ou actionnaires en contrepartie de leurs souscriptions ni aucun mécanisme automatique de sortie au terme de cinq ans ;
« f) La société communique à chaque investisseur, avant la souscription de ses titres, un document d'information précisant notamment la période de conservation des titres pour bénéficier de l'avantage fiscal visé au 1, les modalités prévues pour assurer la liquidité de l'investissement au terme de la durée de blocage, les risques générés par l'investissement et la politique de diversification des risques, les règles d'organisation et de prévention des conflits d'intérêts, les modalités de calcul et la décomposition de tous les frais et commissions, directs et indirects, et le nom du ou des prestataires de services d'investissement chargés du placement des titres.
« Le montant des versements effectués au titre de la souscription par le redevable est pris en compte pour l'assiette de l'avantage fiscal dans la limite de la fraction déterminée en retenant :
« - au numérateur, le montant des versements effectués, par la société mentionnée au premier alinéa au titre de la souscription au capital dans des sociétés vérifiant l'ensemble des conditions prévues au 1, entre la date limite de dépôt de la déclaration devant être souscrite par le redevable l'année précédant celle de l'imposition et la date limite de dépôt de la déclaration devant être souscrite par le redevable l'année d'imposition. Ces versements sont ceux effectués avec les capitaux reçus au cours de cette période ou de la période d'imposition antérieure lors de la constitution du capital initial ou au titre de l'augmentation de capital auquel le redevable a souscrit ;
« - au dénominateur, le montant des capitaux reçus par la société mentionnée au premier alinéa du présent 4 au titre de la constitution du capital initial ou de l'augmentation de capital auquel le redevable a souscrit au cours de l'une des périodes mentionnée au numérateur.
« Un décret fixe les conditions dans lesquelles les investisseurs sont informés annuellement du montant détaillé des frais et commissions mentionnés au f et encadre ceux relatifs à la commercialisation et au placement des actions de la société mentionnée au premier alinéa. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. L’amendement n° I-336 rectifié appelle les mêmes observations que les amendements précédents du même ordre ; la question de l’ISF sera examinée en son heure et c’est pourquoi j’invite son auteur à le retirer.
Les amendements identiques nos I-70 rectifié et I-291 rectifié visent à revenir sur un dispositif que nous avons adopté voilà tout juste un an. Veillons à ne pas introduire une instabilité excessive et maintenons, par conséquent, les rythmes d’investissement tels que nous les avons décidés.
Le souhait émis l’an dernier par la commission des finances, qui paraît toujours aussi justifié, était de s’assurer que les organismes initiateurs de ces différents types de fonds lancent les appels de fonds non pas avec une avance excessive, mais une fois qu’ils disposent d’un programme et d’un concept d’investissement. On évite ainsi de faire des appels de fonds pour avoir d’abord à gérer de la trésorerie, en prenant tout son temps pour trouver les supports des investissements.
Le rythme prévu l’année dernière dans l’amendement Arthuis semble réaliste et personne, en tout cas au sein de la majorité et malgré le talent de Philippe Adnot et Jean-Jacques Jégou, ne nous a jusqu’à présent convaincus de revenir sur une décision qui a été prise voilà seulement un an, et qu’il faut laisser perdurer, au moins jusqu’à ce que tout cela disparaisse. En effet, avec la disparition de l’ISF, nous pouvons espérer que toutes ces complications vont aussi passer à la trappe. (M. le président de la commission des finances marque son approbation) Ce ne serait pas le moindre avantage d’une réforme radicale que, pour ma part, j’appelle de mes vœux.
Aboutir à la suppression d’une partie du code général des impôts, que nous avons fait bourgeonner depuis quelques années, ce serait tout de même un beau résultat. En tout cas, c’est un résultat que je souhaite.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Sur l’amendement n° I-336 rectifié, je suis du même avis que le rapporteur général. Cette question doit faire l’objet d’un grand débat, mais il aura lieu le moment venu.
Les deux autres amendements, qui visent en réalité à allonger les délais d’investissement dont disposent les fonds, appellent trois réponses, auxquelles je souscris bien entendu.
Premièrement, un minimum de pérennité est nécessaire au dispositif afin d’en apprécier l’efficacité. Dans le domaine fiscal comme dans beaucoup d’autres, il est bon de ne pas changer les règles trop régulièrement. C’est un principe général auquel j’adhère sans difficulté.
Deuxièmement, et je répète les propos du rapporteur général qui me semblent couler de source, le grand débat que nous aurons l’an prochain permettra de simplifier les choses et des dispositifs de ce type seront sans doute modifiés, voire supprimés.
D’un point de vue plus technique, le Gouvernement n’est pas favorable à cette proposition. Le dispositif que vous souhaitez réorganiser accorde aux fonds une période de souscription de huit mois puis deux périodes d’investissement de huit mois chacune, pour atteindre respectivement 50 % puis 100 % des quotas. Les investissements sont réalisés au plus tard seize mois après le terme de la période de souscription. Il s’agit d’un cycle complet de 24 mois.
C’est un calendrier d’investissement qui a été adopté sur l’initiative du président Arthuis. Celui-ci ayant moins d’un an, il présente, au-delà du fait qu’il faut de la constance, un avantage de lisibilité. (M. Philippe Adnot fait un signe de dénégation.) Je pense sincèrement que fixer deux périodes aux durées identiques, ainsi que deux ratios identiques est une très bonne chose. (M. Philippe Adnot marque son désaccord.) Je ne vous convaincs manifestement pas, monsieur le sénateur, mais je pense sincèrement que la lisibilité du dispositif est un élément important.
Par ailleurs, votre proposition rallongerait les délais d’investissement, puisque le délai pour investir 100 % du quota passerait à 30 mois – 18 plus 12 –, soit 6 mois de plus qu’actuellement. Ce serait en quelque sorte un retour à la situation qui prévalait avant la réforme proposée par le président Arthuis, et je ne puis donc y souscrire.
Dernière observation, je tiens à signaler que, pour les délais intermédiaires, les séquences proposées ne fonctionneraient pas avec des fonds ayant des exercices de douze mois. Ces derniers doivent en effet avoir investi au moins 60 % de leur quota douze mois après la consultation. Dès lors, le délai intermédiaire pour atteindre 30 % ne pourrait s’appliquer.
Sous le bénéfice de ces explications, je pense donc qu’il serait souhaitable de retirer ces amendements. À défaut, le Gouvernement émettrait un avis défavorable.