M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.
M. François Autain. Comme l’a prévu M. le rapporteur général, je suis amené à expliquer mon vote. (Sourires.)
Madame la ministre, vous faites preuve de mauvaise foi. Quand nous visons les médicaments prévus à l’article L. 5123-3 du code de la santé publique, il s’agit non pas des génériques, mais des nouveaux médicaments qui ont été soumis à l’appréciation de la Commission de la transparence. Et ces médicaments, lorsqu’ils obtiennent une ASMR V, ne peuvent être inscrits au tableau de remboursement que dans la mesure où ils permettent à la sécurité sociale de réaliser des économies.
Je reconnais que le directeur du CEPS est très fort. C’est la seule personne que je connaisse qui soit capable d’expliquer que le fait de mettre sur le marché de nouveaux médicaments ayant une visée thérapeutique similaire à des produits existants, mais plus chers, permet à la sécurité sociale de réaliser des économies ! (Sourires.).
Je suis probablement le seul à ne pas comprendre sa démonstration. Qu’il me soit donc permis de citer un exemple pour étayer ma position.
Le Multaq est un défibrillateur auriculaire qui n’est pas plus efficace que la Cordarone, le générique actuellement sur le marché.
M. François Autain. Tout à fait ! Le Multaq, pourtant classé en ASMR V, est remboursé à 65 %. Il a été mis sur le marché à un tarif qui entraîne pour le malade une dépense mensuelle de 40 euros supérieure à ce qu’elle serait s’il prenait de la Cordarone.
Soutenir, comme le fait M. Renaudin, qu’un tel mécanisme permet à la sécurité sociale de réaliser des économies, voilà qui me laisse sceptique… Mais je ne doute pas que vous ayez compris sa démonstration, monsieur le rapporteur général !
J’ai cité le Multaq, qui est le dernier exemple en date, mais j’aurais aussi pu évoquer l’Inexium, le Lyrica… Ces médicaments sont très nombreux. Il s’agit d’une véritable arnaque, et je déplore que le Gouvernement en soit complice.
M. le président. L'amendement n° 207 rectifié ter, présenté par Mmes Procaccia, Bout, Hermange, Desmarescaux et Rozier et MM. Laménie, Cambon, Leroy et J. Gautier, est ainsi libellé :
Après l'article 36, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 162-32-1 du code de la sécurité sociale est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« 9° Les conditions dans lesquelles les caisses d'assurance maladie participent à la subvention des cotisations dues par les centres de santé en application de l'article L. 162-32.
« La ou les conventions fixent le niveau de cette participation et les modalités de sa modulation, notamment en fonction de l'importance des dépassements pratiqués ; elles fixent également les modalités de calcul et de répartition entre régimes de cette participation ; elle peut être en outre partiellement ou totalement suspendue, dans les conditions prévues par les conventions, pour les centres de santé ne respectant pas tout ou partie des obligations qu'elles déterminent.
« À défaut, le niveau de cette participation et les modalités de sa modulation sont fixés par décision du directeur de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie. »
La parole est à M. Marc Laménie.
M. Marc Laménie. L’article L. 162-32 du code de la sécurité sociale prévoit le versement par les caisses primaires d’assurance maladie aux centres de santé d’une subvention égale à une partie des cotisations dues par ces centres. Cette subvention représente 11,5 % des salaires bruts.
Cependant, les centres de santé pratiquent des dépassements d’honoraires, notamment pour les soins dentaires prothétiques et orthodontiques.
Cette prise en charge introduit un déséquilibre financier et une discrimination envers les professionnels de santé libéraux, puisque la participation des caisses à leurs cotisations d’assurance maladie est assise sur le montant des cotisations calculées sur les seuls honoraires remboursables par l’assurance maladie obligatoire et hors dépassement, contrairement aux centres de santé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission a estimé que cette proposition était pertinente, et elle a émis un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je souhaite pour ma part le retrait de cet amendement, qui me semble reposer sur une confusion.
En effet, l’assiette des cotisations d’un médecin, c’est le montant de ses honoraires, hors dépassement, s’il exerce en secteur libéral, et c’est son bulletin de salaire s’il est salarié, ce qui est le cas dans des centres de santé. Il faut bien distinguer les deux systèmes, ce qui n’est pas le cas dans cet amendement.
M. Guy Fischer. C’est une attaque contre les centres de santé !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. J’ai pris acte de l’avis favorable de la commission, dont les justifications m’échappent. Pour ma part, je le répète, je souhaite le retrait de l’amendement.
M. le président. Monsieur Laménie, l’amendement no 207 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Marc Laménie. Les explications de Mme la ministre nous ayant permis d’avoir une meilleure lisibilité du dispositif,…
M. Guy Fischer. Pour une fois !
M. Marc Laménie. … je le retire.
M. le président. L’amendement n° 207 rectifié ter est retiré.
L'amendement n° 570, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’article 36, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 165-7 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En aucun cas la différence entre le tarif de responsabilité et le prix de vente aux établissements ne peut être facturée aux patients. »
La parole est à M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je ne reviendrai pas sur le précédent amendement, puisqu’il a été retiré.
Dans le cas des médicaments de la « liste en sus », l’article L. 162-16-6 du code de la sécurité sociale précise que la différence pouvant exister entre le tarif de remboursement et le prix de vente du médicament à l'établissement ne peut en aucun cas être supportée par le patient.
Cet amendement a pour objet d'étendre cette disposition, protectrice pour le patient, au cas des dispositifs médicaux.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.
M. François Autain. Il s’agit moins d’une explication de vote que d’une demande d’explication… (Sourires.)
Pour les médicaments onéreux inscrits sur la « liste en sus », lorsqu’il existe une différence entre le tarif de responsabilité, c’est-à-dire le tarif de remboursement, et le prix d’achat du médicament, « en aucun cas la différence entre le tarif de responsabilité et le prix de vente aux établissements ne peut être facturée aux patients », selon les termes de l’article L. 162-16-6 du code de la sécurité sociale.
L’extension de la mesure de protection aux dispositifs inscrits sur la « liste en sus » est une bonne idée, et j’y souscris, monsieur le rapporteur général.
Je me pose toutefois quelques questions auxquelles je ne peux répondre, et j’espère que M. Vasselle ou Mme la ministre pourront m’éclairer.
Tout d’abord, pourquoi certains établissements de santé ne parviennent-ils pas à acheter les médicaments aux prix déclarés par les laboratoires au Comité économique des produits de santé, et publiés par ce dernier ? Autant l’on pourrait comprendre que ces établissements obtiennent une réduction au regard du nombre de médicaments commandés, autant il est difficile d’admettre qu’ils puissent les acheter plus cher que le prix déclaré et publié.
Ensuite, lorsque l’établissement de santé a acheté le produit plus cher que le tarif de responsabilité, est-ce à lui d’assumer le coût de la négociation tarifaire qu’il a mal conduite ?
Enfin, un établissement de santé peut-il refuser la prise en charge d’un malade sous le prétexte qu’il n’est pas en mesure d’acheter les traitements onéreux à un prix acceptable, c’est-à-dire au tarif de responsabilité ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. La meilleure façon de répondre à la question posée par M. Autain est sans doute de donner un exemple.
La disposition proposée par Alain Vasselle est de nature à engendrer des économies pour l’assurance maladie, en permettant, sans risquer d’accroître la charge financière que supportent les patients ou les établissements de santé, de fixer un tarif de remboursement inférieur au prix de vente de certains dispositifs médicaux de la « liste en sus ».
Ainsi, un dispositif médical innovant, proposé sur le marché à un prix de 500 euros, et susceptible de se substituer dans certaines indications à un produit plus ancien, commercialisé à 200 euros et remboursé au travers de la tarification à l’activité, pourrait être pris en charge sur la « liste en sus » au tarif de 300 euros. Cela éviterait à l’assurance maladie de payer deux fois, les 200 euros étant déjà inclus dans le tarif du groupe homogène de séjour, le GHS.
Ai-je été suffisamment claire, monsieur Autain ?
M. François Autain. Sur cet exemple, oui !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, après l’article 36.
L'amendement n° 241, présenté par MM. Autain et Fischer, Mmes David, Pasquet, Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 36, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 1434-7 du code de la santé publique, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - I. - Le schéma régional de l'organisation des soins détermine également les zones dans lesquelles, en raison d'une densité particulièrement élevée de l'offre de soins, l'installation des professionnels de santé libéraux, des maisons de santé et des centres de santé, est subordonnée à l'autorisation de l'agence régionale de santé.
« II. - Ce zonage est établi en fonction de critères qui prennent en compte :
« 1° La densité, le niveau d'activité et l'âge des professionnels de santé ;
« 2° La part de la population qui est âgée de plus de 75 ans ;
« 3° La part des professionnels de santé qui exerce dans une maison de santé ou un centre de santé ;
« 4° L'éloignement des centres hospitaliers ;
« 5° La part des professionnels de santé qui sont autorisés à facturer des dépassements d'honoraires.
« Ce zonage est soumis pour avis à la conférence régionale de santé. »
La parole est à M. François Autain.
M. François Autain. En matière d’accès aux soins, nos concitoyens sont confrontés à deux grandes difficultés : l’explosion des dépassements d’honoraires, dont nous avons déjà parlé, et les zones blanches, c’est-à-dire les territoires ruraux et urbains dans lesquels il existe une pénurie d’offre de soins.
Cet amendement vise à insérer, après l’article L. 1434-7 du code de la santé publique, un article destiné, dans les zones médicalement surdenses et dans certaines spécialités, à soumettre l’installation des médecins à l’autorisation des agences régionales de santé afin d’éviter que certaines zones soient sursaturées, alors que d’autres manquent cruellement de médecins.
Nous proposons par ailleurs de déterminer le zonage en fonction d’éléments qui nous paraissent importants comme la densité, le niveau d’activité et l’âge des professionnels de santé, mais aussi l’éloignement des centres hospitaliers, la part de la population âgée de plus de 75 ans ou encore la proportion de professionnels de santé qui est autorisée à facturer des dépassements d’honoraires.
Mes chers collègues, la question des déserts médicaux appelle des réponses urgentes. Il y va du droit fondamental de nos concitoyens à accéder aux soins et, contrairement à ce que l’on pourrait croire, ce problème ne concerne pas seulement les territoires ruraux.
Ainsi, Richard Bouton, médecin généraliste et fondateur de MG France, estime, dans un rapport récent, que trois arrondissements de l’est parisien, parmi les plus pauvres de la capitale, connaissent une densité médicale inférieure à la moyenne nationale. Il en va de même de la Seine-Saint-Denis, où la densité médicale est équivalente à celle de la Picardie, symbole de la sous-densification médicale en France.
Dans ces régions, les inégalités en matière d’accès aux soins se cumulent avec les inégalités sociales en santé. Il n’y a rien d’étonnant à cela, le point commun entre ces deux types d’inégalités demeurant la paupérisation des personnes concernés. Et les conséquences sont lourdes : on voit ainsi réapparaître dans ces territoires, qu’il s’agisse du nord-est parisien ou de la Seine-Saint-Denis, des pathologies liées à la pauvreté, qui avaient disparu ou étaient devenues marginales.
De ces difficultés d’accès aux soins découlent des pratiques qui ne sont pas sans conséquences, non seulement sur la santé des personnes concernées, mais aussi sur les comptes publics. Il y a tout d’abord les décisions qui consistent à retarder les soins, au risque de voir la situation s’aggraver. Mais il y a aussi le transfert vers l’hôpital, notamment vers les services d’urgences, de soins qui auraient pu être dispensés par la médecine de ville si l’offre avait été satisfaisante. Or ces consultations coûtent en moyenne 400 euros alors qu’une consultation chez un médecin généraliste inscrit en secteur 1 ne coûte que 22 euros – 23 euros à partir du 1er janvier 2011. De ce point de vue, la politique menée par le Gouvernement conduit à des aberrations économiques.
Cet amendement vise donc à vous venir en aide, madame la ministre ! (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. M. Autain pose la question récurrente, lancinante, de la surdensité médicale dans certaines zones du territoire français. Pour y remédier, il propose de mettre en place un dispositif réglementaire relativement complexe.
Je crois me souvenir – je parle sous le contrôle de Mme la ministre – que, lors de la discussion du projet de loi « hôpital, patients, santé et territoires », dont le rapporteur était Alain Milon, nous avions largement débattu de cette difficulté. Nous avions alors pris plusieurs mesures, certaines de nature législative, d’autres faisant appel à un décret.
Mes chers collègues, laissons donc les agences régionales de santé et les différents acteurs discuter des nouveaux outils introduits par la loi HPST et attendons qu’un premier bilan ait été dressé avant de décider de nouvelles mesures, législatives ou réglementaires. Bien évidemment, nous sommes toujours pressés de connaître les conséquences de nos décisions, mais, en l’occurrence, sans doute est-il urgent d’attendre la mise en œuvre des dispositions que nous avons adoptées.
Je ne doute pas que les directeurs des ARS, après avoir assimilé les quelque trois cents circulaires qu’ils ont reçus (Sourires.), pourront commencer à agir de manière concrète.
M. Guy Fischer. M. Autain sera à la retraite ! (Nouveaux sourires.)
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. En conséquence, la commission sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, elle y sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Timeo danaos et dona ferentes… Voilà ce qui me vient à l’esprit lorsque M. Autain me propose son aide ! (Sourires.)
Je suis défavorable à cet amendement pour deux raisons : d’une part, nous avons déjà amplement débattu de cette question lors de l’examen du texte qui allait devenir la loi du 21 juillet 2009 ; d’autre part, sur le plan juridique, cet amendement constitue un superbe cavalier social.
M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.
M. François Autain. Ce ne serait ni le premier ni le seul cavalier législatif, madame la ministre !
Mme Christiane Demontès. On en a connu d’autres !
M. François Autain. Il est même arrivé que le Gouvernement cède à cette pratique…
M. Guy Fischer. La médecine du travail !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude ! (Sourires.)
M. François Autain. Voilà en tout cas un cavalier qui aura échappé à la vigilance de Mme la présidente de la commission !
Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. Je le regrette !
M. François Autain. M. le rapporteur général a évoqué les outils créés par la loi HPST pour justifier l’avis défavorable de la commission à mon amendement. Certaines dispositions de cette loi avaient en effet pour objet de remédier à la désertification médicale. Aussi, vous comprendrez que j’ai été surpris lorsque j’ai constaté, en juin dernier, que Mme la ministre avait suspendu les rares mesures prises à cet effet.
M. François Autain. Je n’ai en effet pas voté le contrat santé solidarité, parce qu’il me semblait inapplicable. Mais ce n’est sans doute pas la raison qui vous a conduit à suspendre ce contrat…
Mme Christiane Demontès. Quelle lucidité, mon cher collègue ! (Sourires.)
Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. Qui sait… (Nouveaux sourires.)
M. François Autain. Je serais d’ailleurs curieux de connaître les motifs qui vous ont conduit à prendre cette décision.
Le reproche majeur que nous vous adressions lors de la discussion du projet de loi HPST était de faire porter l’essentiel des efforts sur l’hospitalisation, en négligeant la médecine de premier recours, dont vous vous êtes simplement attachée à définir les contours. Cela ne permet certes pas à la sécurité sociale de réaliser des économies importantes, mais, pour reprendre une expression populaire : cela ne mange pas de pain. !
Monsieur le rapporteur général, votre intervention ne m’a pas paru très crédible. La loi HPST ne prévoyait que peu de mesures en faveur de la médecine de premier recours, et tout laisse à penser que leur application n’aurait sans doute pas remédié à la situation. Ainsi le contrat santé solidarité n’aurait-il été applicable que trois ans après l’élaboration du schéma régional d’organisation des soins, le SROS, par le directeur général de l’ARS. Dans la mesure où l’élaboration d’un SROS peut durer jusqu’à deux ans, ce contrat n’aurait sans doute pas trouvé à s’appliquer avant cinq ans !
J’ajoute que Jean-Pierre Fourcade, chargé de surveiller la mise en œuvre de la loi HPST, vient de déposer une proposition de loi qui vise à supprimer, d’une part, la sanction attachée au non-respect du contrat de santé solidarité et, d’autre part, l’obligation faite aux médecins libéraux d’informer l’autorité administrative de leurs absences, une mesure jugée vexatoire par ces derniers.
Une fois ces deux dispositions supprimées, il ne restera donc plus rien.
M. Guy Fischer. Il n’y avait déjà pas grand-chose…
M. François Autain. Le Gouvernement assiste, en spectateur passif, à la dégradation de la situation, et ne propose aucune mesure alternative.
M. Guy Fischer. Et vous le laissez faire, monsieur Vasselle !
M. le président. L'amendement n° 242, présenté par MM. Autain et Fischer, Mmes David, Pasquet, Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 36, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 1434-7 du code de la santé publique, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L.... - Un décret en Conseil d'État détermine les règles d'accessibilité aux soins mentionnés à l'article L. 1411-11. Ces règles prennent en compte :
« 1° La distance et la durée d'accès aux professionnels de santé qui dispensent ces soins ;
« 2° Les délais dans lesquels ces professionnels sont en mesure de recevoir les patients en consultation, hors cas d'urgence médicale ;
« 3° Le nombre de professionnels de santé libéraux autorisés à facturer des dépassements d'honoraires.
« Sauf circonstances exceptionnelles, ces règles doivent permettre que la durée d'accès à un médecin mentionné à l'article L. 4130-1 n'excède pas trente minutes de trajet automobile dans les conditions normales de circulation du territoire concerné. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. L’article L. 1434-7 du code de la santé publique pose le principe du SROS, dont la finalité est « de prévoir et de susciter les évolutions nécessaires de l’offre de soins afin de répondre aux besoins de santé de la population et aux exigences d’efficacité et d’accessibilité géographique ».
C’est précisément sur ce critère d’accessibilité géographique que porte cet amendement. Nous proposons en effet de fixer dans la loi les règles d’accessibilité aux soins de premier recours, afin que la politique régionale de santé contribue effectivement à réduire les inégalités d’accès aux soins.
Cette question est primordiale pour les habitants des territoires ruraux et des zones de montagne. L’absence de médecins – notamment de premier recours –, un éloignement trop important des établissements publics de santé, l’absence de permanence de soins, tout cela peut jouer dans la décision d’une famille de s’installer, ou non, dans une zone de montagne. Nous en sommes tous conscients, comme en témoigne le rapport d’information L’avenir de la montagne : un développement équilibré dans un environnement préservé, qui fait de cet enjeu un élément essentiel pour l’avenir, comme l’atteste sa recommandation suivante : « Il convient, en outre, de faciliter l’accueil et l’installation des cadres et de leurs familles sur le territoire montagnard grâce à un environnement favorable en termes d’accès aux soins, au logement et aux services publics (éducation, culture...) ».
Or, nous assistons au mouvement inverse, car votre gouvernement démantèle les uns après les autres les services publics : La Poste, les écoles, les hôpitaux et les maternités de proximité. Je pense à la maternité du plateau matheysin, fermée depuis déjà bien longtemps.
Mme Christiane Demontès. Oui !
Mme Annie David. Pour se rendre à Grenoble, les habitants de ce plateau sont obligés d’emprunter la route Napoléon, réputée dangereuse. Vous vous souvenez sans doute que, voilà quelques années, un dramatique accident d’autocar avait malheureusement coûté la vie à de nombreux pèlerins polonais.
Mme Christiane Demontès. Tout à fait !
Mme Annie David. Notre amendement, s’il ne peut à lui seul nous permettre de revenir sur cette politique désastreuse, présente au moins le mérite de poser des règles claires. La notion d’accessibilité géographique doit intégrer l’ensemble des difficultés d’accès aux soins rencontrées par les Français : l’éloignement des professionnels de santé, les « files d’attente », les dépassements d’honoraires. La nouvelle définition du SROS doit garantir à tous, sauf circonstances exceptionnelles, la possibilité de consulter un médecin de premier recours après un temps maximum de trajet de trente minutes, car, vous le savez, en montagne, les kilomètres ne sont pas parcourus à la même vitesse qu’en plaine.
Mme Christiane Demontès. Très bien !
M. Guy Fischer. Voilà un vrai témoignage !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Madame David, vous étiez sans doute présente lors de la discussion du projet de loi « Hôpital, patients, santé et territoires ».
M. Guy Fischer. Elle est toujours là !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je suis persuadé que M Milon aura rappelé que des dispositions relatives à l’accessibilité aux soins figurent dans le code de la santé publique.
Laissons donc les directeurs des ARS mettre en œuvre la politique qui s’impose pour répondre à ces questions. Ils disposent des outils pour le faire, même si M. Autain a considéré tout à l’heure que ces outils n’avaient aucune efficacité en matière de surdensité médicale, compte tenu de l’initiative prise par le Gouvernement. Mais je ne désespère pas que les agences régionales de santé disposent prochainement des moyens de parvenir aux résultats attendus. L’une des quelque deux cents circulaires qu’elles ont reçues évoque certainement ce sujet, monsieur Autain. Je vous invite à les lire,…
M. Guy Fischer. C’est ce qu’il fait ! (Sourires.)
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. … vous devriez y trouver votre bonheur.
M. François Autain. Vous vous moquez de nous !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Madame David, je vous demande de retirer votre amendement. À défaut, la commission y sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement, car il s’agit de nouveau d’un cavalier social. Les dispositions prévues relèvent en effet d’une loi d’organisation.
La loi « Hôpital, patients, santé et territoires » prévoit un certain nombre d’outils pour aider les directeurs des ARS dans leur mission.
Quant aux dépassements d’honoraires, ils ont certes des conséquences financières, mais ils ne trouvent pas leur place dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale puisqu’ils n’ont pas d’effet sur les dépenses de l’assurance maladie.
Permettez-moi de rappeler que seuls 8 % des médecins de premier recours appliquent des dépassements d’honoraires, d’un niveau d’ailleurs très modeste, souvent de un ou deux euros. Quant au nombre de médecins généralistes qui pratiquent des dépassements, il est en constante diminution.
M. le président. L'amendement n° 244, présenté par MM. Autain et Fischer, Mmes David, Pasquet, Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 36, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l'article L. 1434-8 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les zones où cette évaluation fait apparaître que l'offre de soins de premier recours est particulièrement élevée, tout nouveau conventionnement de médecins est suspendu pendant une durée de trois ans. »
La parole est à M. Guy Fischer.