M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, sur l’article.
M. Didier Guillaume. Dans la droite ligne de l’intervention de notre collègue Claude Bérit-Débat, je voudrais me féliciter de ce que la question des promotions et de la publicité soit abordée dans le projet de loi, car, à travers elle, c’est la question des rapports commerciaux entre producteurs et distributeurs qui est posée, sujet qui nous occupe depuis déjà quelques heures. En effet, la « publicité hors lieu de vente », les « promotions ou autres annonces de réduction de prix », sont des termes qui désignent notamment les relations entre les producteurs et la grande distribution, autant le dire clairement dans cet hémicycle.
Dans tous les secteurs économiques, les opérations promotionnelles sont encadrées pour protéger principalement les consommateurs et veiller à ce qu’ils ne soient pas abusés. Dans le domaine agricole, on en est à devoir protéger le producteur : cela traduit bien un malaise réel ! Pourquoi protéger le producteur ? Tout simplement pour qu’il puisse vendre ses produits à un prix qui ne soit pas inférieur au prix de revient…
La logique commerciale qui consiste à attirer le consommateur en lui proposant un prix toujours plus bas met le secteur productif trop souvent en péril. Je crois qu’il faut avancer sur ce sujet et dire clairement que, si les producteurs doivent pouvoir vendre leurs produits à un prix leur permettant de vivre décemment, on ne peut pas continuer, à l’autre bout de la chaîne, de promettre aux consommateurs que les produits seront toujours les moins chers, ne serait-ce que parce que l’on constate que ce n’est pas toujours le cas – nous évoquions cet après-midi la différence entre le prix payé au producteur et le prix affiché en magasin.
Or que constate-t-on ? Tout au long de l’année, les agriculteurs sont confrontés à la puissance des distributeurs en matière de négociation commerciale. Ceux-ci mobilisent trop souvent l’outil promotionnel pour augmenter structurellement leurs marges. Car c’est bien de cela qu’il s’agit ! Nous souhaitons, effectivement, aborder les relations entre les producteurs et la grande distribution, mais il ne faut pas oublier les difficultés que peut rencontrer l’ensemble du circuit de distribution !
Les agriculteurs nous le disent d’ailleurs très clairement : leurs productions ne doivent pas servir de produits d’appel pour faire venir le client dans les grandes surfaces. Le distributeur a certes besoin d’attirer des consommateurs, mais son intérêt, contrairement à ce qui se passe parfois aujourd’hui, ne doit pas mettre en péril un secteur tout entier. Il importe que le long terme prenne le pas sur le court terme. Le principe d’une opération promotionnelle, c’est d’être conjoncturelle et de le demeurer.
La particularité du secteur agricole – Claude Bérit-Débat évoquait à l’instant la filière fruits et légumes – tient à la nature du produit. Sa principale qualité est sa fraîcheur, mais c’est aussi son principal défaut : les produits ont une durée de vie limitée, ils sont donc périssables. Nous ne sommes pas dans l’industrie de la chaussure ou de l’automobile, où le vendeur, pour faire rentrer de la trésorerie, fait du déstockage et vend les modèles de la saison précédente ! Le producteur de cerises, de pêches, de salades, est mécaniquement dans une position d’infériorité commerciale par rapport au distributeur : le temps joue contre lui. Pour résumer, soit il se résout à brader sa production et à diminuer sa marge, soit sa production est dépréciée, voire perdue.
Si le Gouvernement a choisi de traiter cette question dans le projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, c’est bien la preuve que, actuellement, il y a un problème. La question est donc de savoir si ce texte apporte les réponses nécessaires
À nos yeux, il faut réglementer ces pratiques et fixer des règles contraignantes. Nous partageons le constat et la finalité, monsieur le ministre, mais nous nous interrogeons sur les conséquences réelles du texte qui nous est soumis. Les dispositions proposées sont en effet en grande partie identiques à celles qui sont actuellement en vigueur. Ainsi, il est déjà obligatoire de préciser sur la publicité la nature et l’origine des produits, ainsi que la durée de l’offre.
Nous considérons que l’accord sur le prix de cession de fruits ou de légumes frais, désormais formalisé dans un contrat écrit avant l’annonce de prix hors du lieu de vente, peut représenter une avancée en termes de transparence. En revanche, nous regrettons que les possibilités d’amende soient restreintes : si le projet de loi était voté en l’état, les amendes ne s’appliqueraient qu’en cas d’infraction aux règles de publicité en période promotionnelle.
Monsieur le ministre, vos intentions sont louables, mais nous sommes perplexes quant aux résultats qui seront réellement obtenus. Nous essaierons de montrer pourquoi à l’occasion de la discussion de l’article 4, notamment lors de la présentation de nos amendements. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. L’amendement n° 663, présenté par M. César, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Remplacer les mots :
alinéas premier et deuxième
par les mots :
premier et deuxième alinéas
La parole est à M. Gérard César, rapporteur.
M. Gérard César, rapporteur. Il s’agit d’une amélioration purement rédactionnelle.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 266, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par les mots :
pour une personne physique et de 75 000 euros pour une personne morale
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. L’article 4 du projet de loi a pour ambition de remédier aux dérives auxquelles peuvent conduire certaines pratiques commerciales de la distribution dans les secteurs des fruits et légumes et des produits frais.
Nous ne pouvons que nous en satisfaire, même si nous constatons que les évolutions proposées sont marginales pour ce qui est de la réécriture de l’article L. 441-2 du code de commerce. Pourtant, comme le reconnaît le rapporteur, il s’agit d’un secteur où nous ne pouvons que constater l’absence de formalisation des règles liant les producteurs aux acheteurs. Toute incitation à la contractualisation est donc positive.
Il reste en effet nécessaire d’encadrer ces pratiques, en particulier en matière de publicité hors des lieux de vente mentionnant une réduction de prix ou un prix promotionnel.
Ainsi, le présent article prévoit des règles spécifiques concernant, notamment, la nature et l’origine des produits vendus. Le non-respect de ces règles, selon le texte actuellement récrit par la commission, qui ne modifie pas le droit applicable aujourd’hui, peut être sanctionné par 15 000 euros d’amende.
Nous estimons, pour notre part, que le montant de cette sanction n’est pas suffisamment dissuasif et n’a pas fait la preuve de son efficacité. Pour cette raison, nous vous proposons, mes chers collègues, de distinguer entre personnes physiques et personnes morales et, pour ces dernières, de porter la sanction à 75 000 euros.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard César, rapporteur. Les infractions aux dispositions prévues en matière de publicité hors du lieu de vente sont déjà sanctionnées par une amende administrative de 15 000 euros. La commission estime que prévoir une sanction de 75 000 euros pour les personnes morales serait disproportionné. L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Le Maire, ministre. L’avis est également défavorable. Je considère que la sanction déjà prévue est proportionnée.
M. le président. L’amendement n° 265, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Supprimer le mot :
métropolitaine
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Nous l’avons dit, nous sommes plutôt favorables à un encadrement plus strict de la publicité hors des lieux de vente mentionnant une réduction de prix ou un prix promotionnel pour les fruits et légumes frais.
Cependant, nous nous interrogeons sur la disposition qui limite le champ d’application de ces mesures aux fruits et légumes frais appartenant à des espèces non produites en France métropolitaine.
Si nous pouvons comprendre que ces dispositions soient limitées aux produits français – notamment parce qu’il est fait référence à des accords interprofessionnels –, nous ne pouvons, à l’inverse, admettre la différence de traitement ainsi créée entre la France et l’outre-mer.
Pour cette raison, nous vous proposons de supprimer dans le présent alinéa la mention « métropolitaine », afin de respecter l’impératif constitutionnel d’égalité de traitement sur le territoire national, lequel ne se limite pas à la seule métropole.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard César, rapporteur. Gérard Le Cam, par son amendement, propose d’étendre le dispositif aux fruits et légumes frais appartenant à des espèces produites dans les collectivités d’outre-mer.
Je rappelle que les fruits et légumes d’espèces non produites en France métropolitaine ne sont pas concernés par le dispositif. Il s’agit par exemple des litchis, mangues, ananas, bananes, et cætera. Cependant, plus aucune disposition particulière au titre de cet article ne contraint les annonces de prix de ces produits.
Il faut ajouter que l’arrivée massive sur le marché, à prix cassés, concerne surtout des produits provenant d’Europe continentale – tomates, fraises – pour lesquels il existe une concurrence de proximité.
Par conséquent, l’encadrement de la publicité promotionnelle est surtout justifié pour ces produits, mais est inutile pour les autres. L’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Le Maire, ministre. L’avis est également défavorable, mais je suggère volontiers à Gérard Le Cam de retirer son amendement. En effet, les annonces sur les prix hors des lieux de vente sont régies par l’article L. 441-2 du code de commerce, et l’on ne peut y déroger que par accord interprofessionnel, pour adapter les modalités de ces promotions en fonction de la nature des produits.
Or, les fruits et légumes qui sont produits dans les départements d’outre-mer ne sont pas couverts par une interprofession leur permettant de prendre cet accord interprofessionnel. Par conséquent, il reste aux départements d’outre-mer à se « munir » de cette interprofession afin de pouvoir prendre cet accord interprofessionnel, et bénéficier ainsi de ces règles concernant les annonces de prix hors des lieux de vente.
Si l’on s’en tenait à votre amendement, monsieur Le Cam, les fruits et légumes produits dans les départements d’outre-mer ne pourraient faire l’objet de modalités particulières de promotion. En définitive, ils auraient été pénalisés. En l’absence d’interprofession, je pense donc qu’il est plus raisonnable de retirer l’amendement.
M. le président. Monsieur Le Cam, l’amendement n° 265 est-il maintenu ?
M. Gérard Le Cam. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 265 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 337 rectifié, présenté par MM. Houpert, Beaumont, Frassa, Houel et Milon, Mmes Malovry et Hummel et MM. Jarlier, B. Fournier et Lefèvre, est ainsi libellé :
Alinéa 16, seconde phrase
I. - Supprimer les mots :
les modalités de détermination du prix et
II. - Compléter cette phrase par les mots :
, ainsi que le prix unitaire hors TVA des produits vendus et des services rendus ainsi que toute réduction de prix acquise à la date de la vente ou de la prestation de services et directement liée à cette opération de vente ou de prestation de services, à l'exclusion des escomptes non prévus sur la facture
La parole est à M. Alain Houpert.
M. Alain Houpert. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet amendement est d’ordre rédactionnel. Il s’agit de préciser l’objet du bon de commande de manière que l’on y retrouve les éléments essentiels de la future facture. En d’autres termes, il s’agit de définir plus précisément le prix dans le bon de commande, afin de protéger le producteur vis-à-vis de la distribution, et en particulier de la grande distribution.
M. le président. L'amendement n° 268, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 16, dernière phrase
Après les mots :
détermination du prix
insérer les mots :
qui ne peut être inférieur au prix minimum indicatif
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous souhaitons revenir à l’idée du prix minimum indicatif.
Le présent article vise à encadrer les pratiques commerciales actuelles, contestables, qui consistent à introduire, notamment au sein des marchés d’intérêts nationaux et chez les grossistes, d’importantes quantités de marchandises non commandées, trouvant preneur à bas prix. Cette pratique a bien entendu pour conséquence directe de faire chuter le cours des prix des produits agricoles.
Ainsi, le présent article créé un article nouveau L. 441-3-1 au code de commerce, afin de rendre obligatoire la détention d’un bon de commande dans le cas particulier des transactions en différé de facturation pour les fruits et légumes frais destinés à la vente ou à la revente à un professionnel établi en France et circulant sur le territoire national.
Par cet amendement, nous souhaitons réintroduire la notion de prix minimum indicatif. En effet, comme vous le savez, nous proposons de longue date l’établissement de ce prix minimum pour chaque production, défini par l’interprofession compétente, et qui pourrait s’appuyer sur une concertation au sein de l’établissement national des produits de l’agriculture et de la mer, à défaut des offices agricoles que vous avez supprimés.
Ce prix minimum indicatif prenant en compte l’évolution des charges de production et des revenus des producteurs pourrait ainsi être revu régulièrement et servir de levier dans la négociation.
Ce serait également, par la définition d’une garantie minimum de revenu pour les producteurs, un élément permettant de lutter contre les marges abusives de la grande distribution.
Comprenons-nous bien : par cet amendement, nous ne rendons pas obligatoire la définition d’un prix minimum indicatif, mais nous encourageons les interprofessions à le faire.
Au regard de la crise actuelle de l’agriculture et de la situation déplorable de nombreux producteurs, nous considérons qu’il s’agit d’une priorité. Tel est le sens de notre amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard César, rapporteur. L’amendement n° 337 rectifié vise à inscrire dans le bon de commande le prix et les remises éventuelles. Je rappelle à M. Houpert que dans le rapport rédigé par nos soins, qu’il a lu, nous avons supprimé les « 3 R » : remise, rabais, ristourne.
Par conséquent, la mention d’une réduction du prix sur les bons de commande n’est pas vraiment utile. Je demande donc à M. Houpert de retirer son amendement, faute de quoi l’avis sera défavorable, puisque sa revendication est satisfaite par le rapport de notre commission.
En ce qui concerne l’amendement n° 268 de M. Le Cam, qui porte sur la mention du prix minimum indicatif sur le bon de commande, nous avons eu cette discussion tout au long de l’après-midi. Comme je le rappelais à l’instant, nous avons supprimé les « 3 R », mais également la pratique du « prix après-vente », en prévoyant la mention des modalités de détermination du prix sur le bon de commande. L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Le Maire, ministre. L’avis est également défavorable. Je voudrais juste rappeler qu’il s’agit d’un article important, qui encadre le « prix après-vente ». L’objectif est d’éviter des situations – que nous rencontrons tous dans nos régions – où, à force de laxisme et à force de développer le « prix après-vente » sans bon de commande, les producteurs de fruits et de légumes se retrouvent vers le début ou la fin du mois d’août avec des stocks importants de fruits et de légumes, qu’ils portent chez le négociant sans savoir s’il existe ou non un débouché.
Les producteurs « abandonnent » leurs marchandises au négociant, et sont soumis ensuite à son bon vouloir : celui-ci fixe le prix qu’il paie au producteur en fonction du prix auquel lui-même – le négociant – a réussi à vendre la marchandise. Le négociant dit en substance au producteur : « Circulez, il n’y a rien à voir ! De toute façon, vous ne pouvez pas vous plaindre puisqu’il n’existe aucun document écrit ».
Nous faisons ici une avancée très importante, puisque nous rendons systématique l’existence d’un bon de commande écrit. Cela revient à rendre systématique l’existence d’un contrat, puisque l’ensemble du texte est parcouru par la même philosophie : il n’est désormais plus possible, pour les producteurs, d’apporter leur marchandise aux négociants sans établir un contrat écrit.
Mais si l’on veut éviter que le remède ne soit pire que le mal, je crois que l’on doit s’efforcer, tout en imposant l’établissement d’un contrat écrit, de ne pas faire peser trop de contraintes quant aux stipulations contenues par ce dernier, comme cela est proposé dans les deux amendements. Nous risquerions de gêner le producteur lui-même en freinant la commercialisation de ses produits.
Nous estimons donc que l’équilibre de l’alinéa 16 est le bon équilibre, qu’il change déjà radicalement un certain nombre de pratiques, en particulier dans le domaine des fruits et légumes, et qu’il faut s’en tenir là.
M. le président. Monsieur Houpert, l’amendement n° 337 rectifié est-il maintenu ?
M. Alain Houpert. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 337 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 268.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 267, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Compléter cet alinéa par les mots :
les dates de livraison et leurs modalités
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Par cet amendement très simple, nous souhaitons compléter les mentions du bon de commande par des éléments concernant la date et les modalités de livraison.
En effet, nous sommes particulièrement satisfaits que le problème de la pratique du « prix après-vente » soit reconnu. Nous sommes favorables à la mise en place de l’obligation générale de bon de commande dans le cas particulier des transactions en différé de facturation, et notamment sur les marchés d’intérêts nationaux.
Pour autant, nous pensons qu’une telle mesure ne permettra pas de lutter contre les pratiques d’anti-datage qui existent déjà. C’est la raison pour laquelle nous vous proposons cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard César, rapporteur. La date figure dans le texte, madame Didier. Ce point est bien mentionné dans le texte rédigé en commission.
Cette rédaction permet donc largement d’empêcher une pratique qui risque de déstabiliser le marché. Vous dites aussi qu’il est nécessaire de préciser les modalités de livraison au titre des mentions devant obligatoirement figurer sur le bon de commande. Or, dans la liste qui est proposée dans le rapport de la commission, figure justement tout ce qui concerne les dates, les quantités, les qualités, et cætera.
A priori, votre amendement me paraît donc satisfait.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l’économie. En partie !
M. Gérard César, rapporteur. En partie seulement, car les amendements ne sont jamais complètement satisfaits !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Le Maire, ministre. Je comprends bien l’intention, tout à fait positive, qui anime les auteurs de cet amendement. Je rejoins néanmoins ce que dit le rapporteur.
Cet amendement est en partie satisfait sur la question de la date. J’attitre l’attention de Mme la sénatrice sur le fait que cet amendement pourrait se retourner contre les producteurs. Si l’on précise les modalités de livraison dans le bon de commande, la charge risque de se retourner contre les producteurs. Je propose donc un retrait de cet amendement.
M. le président. Madame Didier, l’amendement n° 267 est-il maintenu ?
Mme Évelyne Didier. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 267 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 214 rectifié est présenté par MM. Pointereau, Doligé, Laurent, Doublet, Pillet, Cornu, Billard et Houel.
L'amendement n° 509 rectifié est présenté par MM. Jarlier, Alduy, Hérisson, Juilhard, Amoudry, Carle et Bailly.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 16
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ce bon de commande contient une référence de prix.
La parole est à M. Rémy Pointereau, pour présenter l’amendement n° 214 rectifié.
M. Rémy Pointereau. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet amendement concerne l’alinéa 16, qui dispose que « le bon de commande doit mentionner le nom des parties, leur adresse, la date de la commande, la quantité, les modalités de détermination du prix » – et non pas le prix – et « la dénomination précise des produits ».
L’objectif de notre amendement est de permettre l’établissement de relations commerciales tout à fait équilibrées entre les différents acteurs de filières, et d’éviter ainsi les pratiques abusives qui contribuent à déprécier le prix de vente et entraînent parfois même le refus d’un lot ou d’une marchandise. Il vise à instituer un prix que l’on pourrait qualifier de prix minimum garanti, de prix minimum indicatif, ou encore de prix d’intervention, afin de mieux protéger les producteurs.
En effet, quand bien même le bon de commande serait bien libellé, si les marchandises sur le marché sont en quantités trop importantes, on trouvera toujours un détail – la présence d’un insecte indésirable, ou quelque chose de ce genre – pour ne pas payer la marchandise livrée par le producteur, ou évacuer le lot.
Quand, au contraire, les marchandises sont en quantités insuffisantes, les bons de commande ne sont plus nécessaires puisque toutes les marchandises trouvent preneur au meilleur prix.
Au travers du présent amendement, il s’agit donc vraiment de protéger le producteur, en indiquant sur le bon de commande un prix de base, référentiel, afin d’éviter tout abus.
M. le président. La parole est à M. Pierre Jarlier, pour présenter l'amendement n° 509 rectifié.
M. Pierre Jarlier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet amendement vise à compléter l’alinéa 16 de l’article 4 avec la phrase suivante : « Ce bon de commande contient une référence de prix ».
Parce qu’ils ont un coût de production, parce qu’ils ont un prix, parce qu’ils sont issus de longues heures de savoir-faire, les produits ne peuvent être mis en commercialisation sans prix. Or, cette pratique est malheureusement courante et déstabilise le marché. C’est pour remédier à cette situation que cet amendement a été déposé, à l’instar de celui qui a été présenté par M. Pointereau.
M. le président. Monsieur le rapporteur, êtes-vous convaincu ?
M. Gérard César, rapporteur. Ce sont nos collègues sénateurs qui devraient être convaincus, monsieur le président. Leurs amendements sont satisfaits par la rédaction de notre commission. Ces amendements ne sont peut-être pas satisfaits à 100 %, mais ils le sont à 98 % (M. Rémy Pointereau hoche la tête.), et je vais m’en expliquer.
Monsieur Pointereau, votre amendement est satisfait par la rédaction du texte de la commission qui prévoit que « le bon de commande doit mentionner le nom des parties, leur adresse, la date de la commande, la quantité » et surtout, comme vous l’avez relevé dans votre intervention, « les modalités de détermination du prix et la dénomination précise des produits ». Donc, si votre amendement n’est pas satisfait par le texte de la commission, j’attends de voir quelle pourrait être une meilleure formulation…
Je demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi l’avis de la commission serait défavorable.
Il en est de même concernant l’amendement identique de M. Jarlier.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Le Maire, ministre. Je partage le point de vue de M. le rapporteur. Je voudrais simplement préciser à Rémy Pointereau que nous nous sommes beaucoup interrogés sur l’encadrement du « prix après-vente » et l’obligation d’établir un bon de commande. Nous en avons beaucoup discuté avec les producteurs, car le risque est évidemment d’empêcher l’écoulement des marchandises en excès, et notamment des fruits et légumes pendant le mois d’août.
Nous avons voulu maintenir un bon équilibre, en imposant un certain nombre de précisions sur le bon de commande, notamment les modalités de détermination du prix, mais en évitant de franchir une limite qui ferait que la règle se retournerait contre le producteur. C’est ce que j’ai indiqué tout à l’heure au groupe CRC-SPG. Je demande donc le retrait de ces amendements.
M. le président. Monsieur Pointereau, l’amendement n° 214 rectifié est-il maintenu ?
M. Rémy Pointereau. Je ne suis pas convaincu à 100 %, même si ma demande est satisfaite à 98 % ! Expliquez-moi ce que sont les « modalités de détermination du prix ». Les modalités ne fixent pas le prix. Elles précisent qu’une marchandise doit présenter certaines qualités pour que le prix puisse apparaître sur tel journal, tel quotidien. Ce que je souhaite, c’est que l’on indique un prix de référence, un prix indicatif. Mais ce n’est pas en parlant de « modalités de détermination du prix » que vous fixez le prix. Je vous demande donc à m’apporter des précisions supplémentaires, car je ne suis pas convaincu.
M. le président. Monsieur le ministre, convainquez !
M. Bruno Le Maire, ministre. C’est mon métier monsieur le président !
Je vous donnerai un exemple très concret. Dans beaucoup de prix après vente, on trouve des prix liés à la commission : ainsi, lorsqu’un producteur livre une cargaison de melons, il peut proposer, dans la modalité de fixation du prix, qu’il y ait une commission de 10 % ou de 15 % pour le négociant et celui-ci aura intérêt à tirer le prix le plus haut possible afin d’obtenir la commission la plus élevée possible. Ce n’est ni l’intérêt du producteur ni celui du négociant lui-même qu’un prix soit fixé au préalable dans le bon de commande ; il faut donc laisser une marge de manœuvre.