M. Jean-Pierre Caffet. Il ne s’agit pas à proprement parler d’une explication de vote sur l’amendement n° 3, amendement déposé par des collègues de la majorité et sur lequel je n’avais pas a priori l’intention d’intervenir. Mais je me vois obligé de répondre à M. Pozzo di Borgo qui m’a interpellé nommément et directement.
Contrairement à vous, monsieur Pozzo di Borgo, M. Dallier a eu l’élégance de poser un problème, celui de la gouvernance de l’Île-de-France, qui est récurrent depuis de nombreuses années déjà et risque de l’être encore longtemps. Il connaît sans doute mieux que d’autres ce problème puisqu’il est l’auteur d’un rapport sur le sujet. Or, vous, vous m’avez mis en cause et, bien évidemment, à travers moi, c’est le maire de Paris que vous avez visé.
Je vous ferai plusieurs remarques.
Premièrement, vous usez d’un vocabulaire particulier. Vous avez dit que la droite avait, auparavant, Paris et six départements sur huit et que la gauche les a maintenant. Monsieur Pozzo di Borgo, ce langage m’est étranger. Nous n’avons pas la propriété patrimoniale des mandats que nous exerçons. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.) Nous ne sommes pas propriétaires de Paris, pas plus que des départements ou de la région ; nous ne sommes que des élus mandatés par des électeurs qui nous ont fait confiance, une confiance qu’ils nous ont renouvelée voilà quelques semaines.
Deuxièmement, vous ne manquez pas de toupet ! En effet, c’est depuis 2001 que la ville de Paris est sortie de son splendide isolement, alors qu’elle a exporté, pendant des décennies, toutes ses nuisances en banlieue. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – Protestations sur les travées de l’UMP.)
Un certain nombre de maires de banlieue appartenant à la majorité pourraient largement en témoigner, …
Mme Marie-Thérèse Hermange. On exportait les ordures !
M. Jean-Pierre Caffet. Pas seulement ! On exportait en même temps les cimetières, et bien d’autres choses encore !
Une rupture s’est donc produite en 2001, et vous êtes d’ailleurs parfois le premier à le reconnaître au Conseil de Paris, monsieur Pozzo di Borgo ! Paris a opté pour une politique de la main tendue à un certain nombre de communes et de départements de banlieue, politique qui se présente sous des formes évidemment particulières et avec des contraintes qui ont été acceptées.
Troisièmement, la question de la gouvernance est essentielle, et vous savez pertinemment qu’elle ne se résoudra pas d’un coup de baguette magique !
Les débats des élus de la Ville de Paris et de la région d’Île-de-France sur la future structure institutionnelle – si structure il y a ! – ont peut-être montré certaines nuances d’appréciation. Mais je n’ai pas eu jusqu’à présent le sentiment qu’un point de vue unanime se dégageait au sein de la majorité. J’en veux pour preuve le discours du Président de la République du 29 avril 2009, au cours duquel il a indiqué au maire de Paris que cette question de la gouvernance ne pourrait être réglée que par nos successeurs.
Avant d’incriminer vos collègues en séance publique et de prendre à partie les uns et les autres, y compris le maire de Paris, balayez devant votre porte ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Dominique Voynet. C’est l’arroseur arrosé !
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. M. Yves Pozzo di Borgo se sert du Sénat pour mettre en cause l’équipe dirigeante de la Ville de Paris et émettre de prétendues vérités.
À l’inverse du Gouvernement, qui, au moindre problème, blâme la gauche qui gère les affaires de la Ville de Paris depuis plus de huit ans, je n’incriminerai pas la droite qui a géré cette ville auparavant.
Cette question de la gouvernance est très complexe et ne doit pas être instrumentalisée. Les positions nuancées des uns et des autres ne signifient pas que des divisions se font jour au sein de notre parti à propos de telle orientation ou ligne de conduite ; c’est d’ailleurs la même chose à l’UMP. Les élus exercent un mandat local ; ils défendent les collectivités qui les ont élus et veulent, dans ce débat sur la gouvernance, faire peser les prérogatives, les nécessités et les contraintes de ces dernières.
La rupture dans la manière de gérer la ville de Paris a consisté à dire à un moment donné aux communes limitrophes qu’on allait agir, non pas par oukases, de façon « impérialiste » parce que la ville avait la puissance financière et politique, mais en respectant les prérogatives et les intérêts de tous. Voilà qui est un peu plus compliqué que la méthode du Gouvernement consistant à imposer des décisions venues d’en haut !
M. Nicolas About. Monsieur Assouline, il ne faut pas l’affirmer, il faut le démontrer à M. Huchon !
M. David Assouline. Au lieu de discourir de la gouvernance pendant vingt ans, nous avons commencé, avec Paris-Métropole, à avancer de façon pragmatique, dans un cadre ouvert à tous. Chaque fois que l’on peut mettre des choses en commun, nous le faisons dans cette structure. Même si cela avance lentement, cela ira dix fois plus vite qu’avec de grandes phrases creuses ou même un Grand Paris se bornant aux transports, notamment à un métro souterrain ! Franchement, la problématique, dans toute sa complexité, de la vie sociale et du logement de cette agglomération n’est pas traitée ici.
Monsieur Pozzo di Borgo, je ne sais pas pourquoi vous exprimez depuis hier une telle violence sur la question de la Ville de Paris et de la région d’Île-de-France, y compris par le biais de cet amendement. Peut-être vous préparez-vous à votre réélection ?...
Mme Nicole Bricq. Oh, mais non ! (Sourires.)
M. David Assouline. Mais ce que je sais, c’est que l’on ne peut pas être pris en otage ici et réduire le débat à une telle caricature ! Il y a une grande différence entre ce qui est réalisé aujourd’hui pour faire avancer la structure Paris-Métropole dans une relation de respect mutuel, et ce qui a été fait avant – je ne dis pas que tout était mauvais ! –, toutes les communes de banlieue, qu’elles soient de droite ou de gauche, reconnaissant qu’elles subissaient un certain caporalisme.
M. Nicolas About. Les choses n’ont guère changé : le STIF donne tout aux tramways, rien au reste !
M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote.
M. Philippe Dominati. Je me sens également obligé d’intervenir au regard de la réponse insatisfaisante qui m’a été apportée et de la polémique qui semble s’être déclenchée entre M. Caffet et M. Pozzo di Borgo.
M. Jean-Pierre Caffet. Moi, je ne polémique pas !
M. Philippe Dominati. L’argument selon lequel personne n’est propriétaire de son mandat est un peu facile ; personne, à droite ou à gauche, n’utilise ce genre de langage !
M. Jean-Pierre Caffet. C’est plus qu’une question de vocabulaire !
M. Philippe Dominati. De plus, c’est une contre-vérité assez flagrante que d’affirmer que les relations avec les communes limitrophes de Paris ont brusquement changé avec l’alternance.
Mme Nicole Bricq et M. Jean-Pierre Caffet. Ah bon ?
M. Philippe Dominati. Depuis l’institution d’un maire à Paris, il y a toujours eu un adjoint chargé des relations avec les communes limitrophes. Du temps de Jacques Chirac ou de Jean Tiberi, je n’ai pas le souvenir de problèmes particuliers.
M. David Assouline. Il n’y avait rien !
M. Philippe Dominati. Il y a toujours eu des syndicats intercommunaux ; j’ai eu l’honneur de présider le Syndicat intercommunal de traitement des ordures ménagères de l’agglomération parisienne, le SYCTOM, mais il y en a eu bien d’autres.
M. David Assouline. Demandez à M. Santini !
M. Philippe Dominati. Pas besoin de demander à M. Santini, adressez-vous à M. Fourcade ! Pensez-vous qu’il ait le profil d’un homme à se laisser caporaliser ? Il était maire d’une grande collectivité !
Les relations entre Paris et les villes de banlieue sont depuis longtemps sur la voie de la normalisation.
M. David Assouline. M. Fourcade ne s’empresse pas d’approuver !
M. Philippe Dominati. Et tant mieux si cette normalisation se poursuit !
C’est une très bonne chose que notre collègue Philippe Dallier alimente la réflexion avec le rapport qu’il a publié sur les perspectives d’évolutions institutionnelles de la plus jeune collectivité de France : il n’y a un maire à Paris que depuis 1977 ! Mais de là à dire que tout a changé d’un seul coup, c’est totalement faux ! Paris a connu une évolution institutionnelle progressive. Sur la question de la gouvernance et des institutions, j’attendais des propositions de votre part, monsieur Caffet !
M. Jean-Pierre Caffet. En avez-vous ?
M. Philippe Dominati. Or votre seule réponse consiste à dire : on verra, on verra après !
M. Jean-Pierre Caffet. Demandez au Président de la République !
Mme Éliane Assassi. C’est lui qui l’a dit !
M. Philippe Dominati. Sur la question de la gouvernance posée par mes collègues Philippe Dallier et Yves Pozzo di Borgo, vous n’avez fait aucune proposition ! (M. Yves Pozzo di Borgo applaudit.)
M. Jean-Pierre Caffet. Et vous, que proposez-vous ?
M. Philippe Dominati. Reporter la question à plus tard n’est pas un programme ambitieux !
M. Jean-Pierre Caffet. Cessez de sauter comme un cabri et interrogez le Président de la République sur la gouvernance ! C’est lui qui a évacué le problème !
M. le président. Monsieur Dominati, l'amendement n° 106 rectifié est-il maintenu ?
M. Philippe Dominati. Un certain nombre de mes collègues ont fait preuve d’intuition ; le temps d’aborder sereinement la question de la gouvernance n’est peut-être pas encore venu. Il nous faut donc nous contenter de traiter ce projet de loi sous un aspect technique, sans tenir compte du commandement, ce qui me semble préoccupant.
M. le secrétaire d’État est convenu que l’année 2014 lui semblait être un objectif réaliste, même s’il est lointain. Même s’il ne peut s’engager aujourd'hui au nom du Gouvernement, je suis satisfait de la réponse qu’il m’a apportée.
Dans ces conditions, je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 106 rectifié est retiré.
La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote sur l’amendement n° 242.
M. Philippe Dallier. Au travers de cet amendement, j’aimerais pointer du doigt le manque de cohérence et, paradoxalement, l’uniformisation que risquent de présenter les contrats de développement territorial.
Notre collègue Dominique Voynet prévoit la production de 30 % de logements sociaux dans chaque contrat de développement territorial. En faut-il autant à Clichy-Montfermeil ?
M. Jean-Pierre Caffet. Mais oui !
M. Philippe Dallier. Je ne le pense pas. La question de la mixité sociale et de la répartition des logements doit être examinée à l’échelle de la métropole.
Mme Éliane Assassi. Appliquons la loi SRU !
M. Philippe Dallier. Un amendement de cette nature me semble donc très dangereux.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Appliquez la loi dans vos communes !
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Caffet, pour explication de vote sur l'article 1er.
M. Jean-Pierre Caffet. Monsieur le président, je serai bref sur cet article 1er, car, au sein de mon groupe, nous sommes déjà nombreux à nous être exprimés hier soir, à l’ouverture de la discussion des articles, pour dire ce que nous en pensions.
Cet article a connu quatre versions successives, toutes aussi contradictoires les unes par rapport aux autres ! Selon la deuxième version, déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale, ce texte concerne un réseau de transport public de voyageurs unissant des zones stratégiques de la région d’Île-de-France et uniquement elle – mais c’était pour la façade ! – et s’articule autour de projets territoriaux élaborés et mis en œuvre conjointement par l’État et les collectivités territoriales. C’était probablement la version la plus proche de la vérité et la meilleure définition de ce projet de texte !
Puis, à l’Assemblée nationale et, ici, en commission, on a essayé d’introduire un ensemble de considérants, y compris d’ordre environnemental. Comme nous en ferons la démonstration au cours de l’examen des différents articles, tous ces considérants, notamment l’objectif de construction de 70 000 logements par an en région d’Île-de-France, sont totalement vides de sens et ne s’appuient sur aucun outil véritablement efficace.
Cette rédaction de l’article 1er, qui n’est aucunement normative, vise uniquement à se faire plaisir ; c’est la raison pour laquelle nous ne l’adopterons pas.
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
Je suis saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.
Je rappelle que la commission et le Gouvernement se sont prononcés favorablement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 170 :
Nombre de votants | 337 |
Nombre de suffrages exprimés | 336 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 169 |
Pour l’adoption | 184 |
Contre | 152 |
Le Sénat a adopté.
Articles additionnels après l'article 1er
M. le président. L’amendement n° 6, présenté par Mmes Assassi et Gonthier-Maurin, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et de lutte contre les exclusions est abrogée.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Monsieur le secrétaire d'État, lors des débats devant l’Assemblée nationale, vous avez affirmé que le projet de loi relatif au Grand Paris devait définir des objectifs pour répondre aux insuffisances en matière de cohésion sociale et aux besoins de logements.
Non seulement le texte ne prévoit aucune mesure en direction du logement, mais il ne fixe aucun objectif contraignant. On laisse aux promoteurs privés le soin de définir, au gré de leurs intérêts financiers, la politique du logement.
L’annonce de Nicolas Sarkozy concernant la construction de 70 000 logements est intégrée dans l’article 1er du projet de loi, mais seulement sous forme d’objectif. Une telle disposition est insuffisante pour répondre au déficit de logements en Île-de-France. De plus, elle doit être relativisée du fait de sa formulation, à savoir que les contrats de développement territorial « participent à l’objectif de construire ». Il n’est nullement précisé que cet objectif doit être atteint !
En bref, ce texte ne contient aucune mesure permettant de répondre aux besoins urgents de logements, non seulement en termes de coût et de densification, mais aussi dans l’optique de réduction des trajets entre le lieu de vie et le lieu de travail.
De plus, les différenciations sociales entre les territoires n’ont cessé de se radicaliser sous l’impulsion des lois du marché de la politique conduite par la majorité.
Rien n’est proposé face à la pénurie immobilière, à la cherté du logement et à la dualité de l’agglomération avec un centre réservé aux plus riches.
En Île-de-France, notamment à Paris, la montée des prix a commencé dès 1999. Le taux d’effort des ménages les plus modestes a explosé. Les grands logements publics, quant à eux, sont trop rares et trop rarement à des prix accessibles aux familles des classes moyennes, qui doivent faire le choix de s’éloigner de Paris.
La loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion a porté une nouvelle atteinte à la mixité sociale. Le Gouvernement a choisi de rendre plus contraignantes les obligations des locataires, de durcir les conditions de maintien dans les lieux et d’instaurer une augmentation importante du surloyer en cas de dépassement du plafond de ressources.
Alors qu’il était urgent de mettre en œuvre une politique de prévention des expulsions, Mme Boutin a fait le choix de raccourcir les délais d’expulsion, sans se soucier du relogement des personnes placées dans de telles situations de détresse.
Ainsi, contrairement aux principes que vous affirmez dans l’article 1er du projet de loi, vous orchestrez à l’échelon national la remise en cause de la mixité sociale du parc HLM et vous accentuez la ségrégation territoriale.
Pour toutes ces raisons, nous vous demandons d’adopter cet amendement visant à abroger la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion, qui met en œuvre une politique incompatible avec les « déclarations actuelles » du Gouvernement !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Tout d’abord, il n’est pas vrai que rien, dans ce texte, ne concerne le logement ! Je vous renvoie à l’article 19 bis, que nous examinerons un peu plus tard, aujourd'hui ou demain.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Il ne contient rien de contraignant, mais c’est une subtilité qui vous échappe !
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. De plus, dans ce texte important, je ne crois pas qu’il soit nécessaire d’abroger la loi du 25 mars 2009. Je me souviens des très grands débats que nous avons eus et d’un certain nombre de difficultés rencontrées.
Enfin, l’objet de cet amendement étant complètement éloigné du sujet de la discussion, la commission spéciale a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 7, présenté par Mmes Assassi et Gonthier-Maurin, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat est abrogée.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Lors de l’examen du projet de loi relatif aux contrats de partenariat en 2008, Mme Lagarde résumait fort bien le rôle de tels outils : pallier le désengagement de l’État ou des collectivités publiques.
Selon la ministre, « ce que l’État ne peut ou ne souhaite pas faire lui-même, faute de moyens, de temps, ou à défaut d’une efficacité comparable à celle du secteur privé, il peut désormais le faire faire par des professionnels qui prennent en charge l’ensemble des opérations, depuis la conception jusqu’à l’exploitation ».
Parallèlement à la mise en place de cet outil, les gouvernements successifs de droite, notamment depuis la loi de décentralisation de 2004, ont organisé le désengagement massif de l’État de ses fonctions régaliennes.
Les collectivités territoriales ont vu leurs compétences augmenter, sans pour autant que leur soient concédés les moyens suffisants pour mettre en œuvre leurs nouvelles missions. Elles sont aujourd’hui asphyxiées et rencontrent beaucoup de difficultés à engager de nouveaux projets. Les contrats de partenariat devaient constituer une solution miracle leur permettant de faire face au désengagement de l’État.
Dans ce contexte, l’ordonnance du 17 juin 2004 a institué des contrats de partenariat censés rester limités, conformément à la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Or, en 2008, la loi a modifié l’ordonnance de 2004, afin d’ouvrir deux nouveaux cas de contrats de partenariat.
Désormais, si le bilan est manifestement avantageux au regard des autres outils de commande publique, le recours aux contrats de partenariat devient possible. À l’époque, nous avions dénoncé cet aménagement de l’ordonnance destiné à contourner les réserves constitutionnelles.
Le projet de loi relatif au Grand Paris prévoit encore le recours à de tels contrats. Nous nous opposons à cette forme de partenariat qui constitue un véritable désengagement de la puissance publique de sa mission d’aménagement du territoire et s’assimile à une privatisation larvée. Voilà pourquoi nous vous demandons d’adopter cet amendement visant à abroger l’ordonnance du 17 juin 2004.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. L’ordonnance n°2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat est d’une importance considérable puisqu’elle permet la réalisation d’un certain nombre d’opérations d’équipement ou d’investissements difficilement envisageables dans des conditions financières classiques.
Le projet de loi relatif au Grand Paris ne doit pas être l’occasion de réviser ou de supprimer les lois et les ordonnances en vigueur.
L’occasion m’a été donnée, en tant que président d’une communauté d’agglomération, de signer un contrat de partenariat pour l’éclairage public, permettant ainsi la rénovation complète de l’éclairage et le passage à la technologie basse tension pour l’ensemble des communes couvertes par le contrat.
Le contrat de partenariat m’apparaît comme une formule satisfaisante et bien encadrée, puisqu’elle nécessite une évaluation préalable obligatoire.
Par conséquent, votre amendement ne peut être accepté. La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 8, présenté par Mmes Assassi et Gonthier-Maurin, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Toute aide publique accordée par l'État, les collectivités territoriales ou les établissements publics aux entreprises est conditionnée par un engagement quantifié et mesurable de l'entreprise bénéficiaire en terme d'investissement productif, de création d'emploi et de formation des personnels.
Le non-respect de l'un de ces engagements entraîne le remboursement de l'aide à due concurrence.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Par cet amendement, nous souhaitons formaliser et conditionner l’attribution des aides publiques aux entreprises.
Nous proposons de conditionner les aides aux entreprises à un engagement quantifié et mesurable des bénéficiaires en terme d’investissement productif, de création d’emploi et de formation des personnels.
La notion d’aide est ici entendue largement et consiste en un avantage financier ou matériel octroyé par un financeur public – ou privé ayant reçu des fonds publics – vers un bénéficiaire du secteur marchand et concurrentiel.
L’État, les établissements publics, les organisations internationales et les collectivités territoriales peuvent accorder des aides aux entreprises.
Or, force est de constater que les entreprises ne respectent pas toujours – c’est un euphémisme ! – les contreparties sociales auxquelles sont pourtant conditionnées les aides.
Pour évoquer un exemple récent, le fonds stratégique d’investissement, présenté comme l’arme « anti-crise » du Président de la République, a montré ses limites.
Théoriquement, le fonds stratégique d’investissement est destiné à la préservation des emplois et des activités industrielles. Vérifions cette affirmation à la lumière d’un fait.
Alors que la société Nexans, située à Chauny dans l’Aisne, avait bénéficié au mois de juillet dernier d’un investissement de 60 millions d’euros de la part du fonds stratégique d’investissement, à peine trois mois plus tard, le groupe a programmé la suppression de 14 % de ses effectifs sur le territoire de son berceau historique. Ce cas n’est, hélas ! pas isolé.
Il est intolérable que l’argent public serve à financer des stratégies d’externalisation d’activités et des plans sociaux, dont souffrent au premier chef les salariés, leurs familles et les territoires où ils résident !
Certaines collectivités, notamment les régions, se sont dotées d’une charte de conditionnalité des aides aux entreprises. Plusieurs projets en cours ont d’ailleurs pour objet d’améliorer le principe de conditionnalité et tendent en particulier à la mise en place de commissions locales de contrôle des aides économiques.
Nous souhaitons que cette conditionnalité soit portée au niveau national et qu’elle soit appliquée à tous les projets, sur l’ensemble du territoire, afin de garantir l’emploi et la bonne utilisation des deniers publics.
Ainsi, en cas de non-respect des exigences définies en contrepartie de l’aide, l’entreprise serait tenue de rembourser cette dernière. Tel est le sens de notre amendement.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On ne peut qu’approuver ce principe.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Tout le monde s’accorde sur de tels principes.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Bien sûr !
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Malheureusement, ce n’est pas le texte dont nous discutons qui doit porter ce mécanisme, même si celui-ci est effectivement important.
Madame Gonthier-Maurin, au travers de cet amendement, vous abordez le problème de l’allégement des charges sociales, qui revêt une importance considérable au regard des masses financières en jeu.
Vous posez également la question des avantages fiscaux et des dotations octroyés par un certain nombre de conseils régionaux à des entreprises en difficulté. Je fais ici référence à l’entreprise Heuliez ou à des situations de même nature.
Mais ces sujets sont étrangers au texte dont nous discutons, et votre amendement ne peut dès lors être considéré autrement que comme un cavalier législatif. C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 245, présenté par Mme Voynet, M. Desessard, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery et M. Muller, est ainsi libellé :
Après l’article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le projet du Grand Paris est élaboré en conformité avec les principes fondamentaux proclamés par la Charte de l'environnement.
Il s’inscrit dans le cadre des efforts coordonnés entre l’État et la région d'Île-de-France afin de réduire la consommation des énergies fossiles, de lutter contre l'étalement urbain et de préserver les terres agricoles, la biodiversité et les espaces naturels.
La parole est à Mme Dominique Voynet.