M. le président. L'amendement n° 20, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par les mots de l'alinéa suivants :
à l'exception du département du Loiret.
En conséquence les éléments du « tableau des circonscriptions électorales des départements » faisant mention de ce département et des circonscriptions attenantes sont abrogés et ce département fera l'objet d'un redécoupage ultérieur conformément aux exigences constitutionnelles.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le secrétaire d'État, vous avez certainement regardé de près mon amendement, qui concerne le département du Loiret.
Cher collègue Portelli, je suis élu de ce département depuis vingt-neuf ans, et je crois connaître tous les cantons et la plupart des 334 communes. Je sais donc bien de quoi je parle.
Dans mon amendement figure une proposition de découpage. Monsieur le secrétaire d'État, ma question est très simple : avez-vous un argument pour défendre la vôtre ? Si tel n’est pas le cas, vous devriez fort logiquement accepter mon amendement.
Je précise que, dans votre proposition, l’écart démographique entre les circonscriptions est de 25 %, alors que, dans la mienne, il n’est que de 10 %.
M. Jacques Mahéas. C’est mieux !
M. Jean-Pierre Sueur. Vous le voyez bien, le découpage que je propose est meilleur que le vôtre, le Conseil constitutionnel ayant déclaré qu’il fallait respecter au mieux la démographie.
Mais il y a bien entendu la configuration des circonscriptions. Or votre découpage présente quelques bizarreries aussi à ce titre.
La première concerne le canton de Fleury-les-Aubrais, dans lequel est située l’une des deux gares d’Orléans, celle d’Orléans-les-Aubrais, que fréquentent la plupart des Orléanais. Il faut dire que les deux villes se touchent et forment un même ensemble.
Monsieur le secrétaire d'État, vous mettez ce canton dans une circonscription qui comprend notamment les cantons, tout à fait estimables, d’ailleurs, et que j’adore, de Puiseaux et de Malesherbes, qui jouxtent l’Île-de-France, au-delà de la Beauce. M. Pasqua s’était déjà engagé dans cette voie il y a quelque temps. Je serais heureux d’entendre vos explications sur les liens géographiques existant entre Fleury-les-Aubrais et Malesherbes, Puiseaux, Beaune-la-Rolande, Bellegarde : il n’y a aucun rapport !
Il n’y a aucune raison de procéder à un tel rapprochement, sinon une raison d’opportunité politique. C’est la seule que je puisse concevoir. Je suis bien entendu tout à fait disposé, monsieur le secrétaire d’État, à vous emmener sur le terrain, afin que vous puissiez constater par vous-même le caractère incongru de ce regroupement.
Je ne comprends pas non plus le rattachement de La Ferté-Saint-Aubin à Châtillon-sur-Loire et à Briare. De même, on conviendra qu’il est quelque peu curieux, pour le moins, de regrouper le centre-ville d’Orléans avec la magnifique cité de Lorris !
Le découpage que je propose respecte six entités géographiques, naturelles aux yeux de tous, autour d’Orléans, de Pithiviers, de Montargis et de Gien, et présente un meilleur rapport démographique. Si M. le secrétaire d’État dispose d’un argument propre à justifier son découpage, je serai heureux de l’entendre. Sinon, il se ralliera sans doute au mien ; j’y verrai un signe d’entente républicaine, auquel chacun sera sensible.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. M. Sueur nous a fait voyager dans ce beau département du Loiret, qui compte des sites tout à fait remarquables, mais son amendement se borne à prévoir que le redécoupage soit remis à plus tard. En effet, s’il nous a exposé oralement sa proposition de découpage, elle ne figure pas dans son texte.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Non : votre amendement précise que le Loiret « fera l’objet d’un redécoupage ultérieur conformément aux exigences constitutionnelles ».
M. Jean-Pierre Sueur. Ma proposition de redécoupage figure dans l’objet de l’amendement !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Sans doute, mais elle n’est pas dans le texte de l’amendement. C’est ainsi !
M. Jacques Mahéas. Mais il l’a exposée oralement !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Certes, mais les choses doivent être écrites !
M. Jean-Pierre Sueur. Cela revient au même !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Le découpage inscrit dans le projet de loi a été justifié par le Gouvernement. Les circonscriptions définies présentent des écarts à la moyenne de population inférieurs à 20 %, avec un maximum de 14,55 % pour la deuxième circonscription. Elles respectent les critères fixés par la loi d’habilitation. Leur délimitation tient compte de l’évolution probable de la population. Une fois encore, il s’agit de garantir que le découpage sera pérenne et ne deviendra pas obsolète à moyen terme.
Pour toutes ces raisons, la commission des lois a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. J’émets également un avis défavorable, malgré mon envie de faire plaisir à M. Sueur.
M. Charles Pasqua. Pas trop, tout de même !
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. En l’occurrence, ce n’est pas possible.
La nouvelle délimitation des circonscriptions du Loiret proposée respecte parfaitement les termes de la loi d’habilitation. En effet, les écarts à la moyenne de la population maximaux sont de 9,88 % et de 14,50 %. La deuxième circonscription reste inchangée, et si sa population est supérieure de 14,50 % à la moyenne du département, les derniers recensements témoignent d’une stabilité globale.
Cela étant, de façon générale, nous avons veillé, autant que possible, à ne pas modifier les limites des circonscriptions quand la loi le permettait, que les députés concernés appartiennent à l’opposition ou à la majorité. Nous pouvons en apporter la preuve.
D’ailleurs, tant le Conseil constitutionnel que le texte de la loi d’habilitation précisent bien que le Gouvernement doit procéder à un « ajustement » de la carte électorale. Ce mot est employé à dessein : il ne s’agit pas d’une refonte globale de la carte électorale, comme cela a parfois pu être le cas dans le passé. C’est ainsi que le Gouvernement a laissé inchangées près de 240 circonscriptions sur 577, tenues aussi bien par la majorité que par l’opposition.
M. Bernard Frimat. Ce n’est pas une réponse !
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Tout d’abord, avec ma proposition, l’écart démographique entre la circonscription la plus peuplée et la circonscription la moins peuplée n’est que de 10 %, contre 25 % dans le projet du Gouvernement. C’est plus satisfaisant.
Par ailleurs, vous avez affirmé, monsieur le secrétaire d’État, que le Gouvernement s’est efforcé, lorsque cela était possible, de ne pas modifier le périmètre des circonscriptions. En l’occurrence, vous visez sans doute la cinquième circonscription, comprenant à la fois Pithiviers et Fleury-les-Aubrais. Or votre raisonnement choit : vous avez retiré deux cantons à cette circonscription, celui de Ferrières-en-Gâtinais, rattaché à Montargis, et celui de Lorris, intégré à une autre circonscription.
En revanche, vous avez confirmé le rattachement d’une partie de l’agglomération d’Orléans, qui vote peut-être d’une façon qui ne vous convient pas, au nord de la Beauce, ce qui est une aberration complète. Vous n’avez jamais expliqué pour quelles raisons des électeurs résidant à deux cents mètres d’Orléans devraient relever de la même circonscription que les habitants d’un territoire limitrophe de l’Essonne, situé de l’autre côté de la Beauce !
Il serait possible d’opérer un découpage plus équilibré, comme exposé dans l’objet de mon amendement, avec trois circonscriptions pour l’Orléanais, les trois autres correspondant aux bassins de vie de Pithiviers, de Montargis et de Gien. Sur le plan géographique, un tel découpage est tout à fait naturel.
Monsieur le secrétaire d’État, votre argument n’est donc pas valide : à l’évidence, contrairement à ce que vous affirmez, vous modifiez les périmètres des circonscriptions. Il y a toujours plusieurs manières de découper : la vôtre est partisane, sans aucun lien avec la géographie et les habitudes de vie des populations. Là est la question centrale, à laquelle vous n’avez pas de réponse.
M. le président. L'amendement n° 21, présenté par M. Mahéas et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par les mots et l'alinéa suivants :
à l'exception du département de la Seine-Saint-Denis.
En conséquence, les éléments du « tableau des circonscriptions électorales des départements » faisant mention de ce département et des circonscriptions attenantes sont abrogés et ce département fera l'objet d'un redécoupage ultérieur conformément aux exigences constitutionnelles.
La parole est à M. Jacques Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Je ne doute pas que vous voudrez me faire plaisir, monsieur le secrétaire d’État, ne serait-ce que pour ne pas transgresser vos propres règles. La Seine-Saint-Denis est un véritable cas d’école, montrant l’arbitraire de vos coups de ciseaux, qui ne claquent que s’il s’agit de favoriser tel ou tel député.
Tout d’abord, le rejet de ce projet de loi en première lecture a eu au moins pour heureuse conséquence de laisser à l’INSEE le temps de publier les chiffres actualisés de la population, valides à compter du 1er janvier 2010. En Seine-Saint-Denis, la population s’élève désormais à 1 502 340 habitants, soit plus de douze tranches de 125 000 habitants : la suppression d’un siège de député n’est donc plus justifiée. De plus, mon collègue Jack Ralite a attiré l’attention sur le développement de la Seine-Saint-Denis, l’augmentation de sa population, le nombre de personnes hébergées non recensées et de personnes sans domicile fixe vivant sur son territoire. On le voit, un député de ce département a beaucoup de travail !
Ensuite, la commission présidée par M. Guéna avait déjà relevé que le projet retenu laisse « subsister un important déficit démographique, moins 13,74 % dans la huitième circonscription, aux contours inchangés ». J’y reviendrai, mais, de manière générale, l’ordonnance n’a tenu compte ni de l’avis de la commission Guéna, ni de celui des fonctionnaires départementaux consultés, ni même de celui du Conseil d’État, qui a souligné le risque d’inconstitutionnalité.
Par ailleurs, un tel découpage repose non pas sur une volonté d’établir un meilleur équilibre démographique, mais sur des considérations politiques, pour ne pas dire politiciennes. De façon manifeste, vous avez décidé de protéger les bastions de l’UMP et du Nouveau centre. Ainsi, la huitième circonscription, celle de Gagny, de Rosny-sous-Bois et de Villemomble, ne compte que 107 786 habitants. Nous sommes donc loin du chiffre de 125 000. Pourtant, cette circonscription demeure inchangée, afin de favoriser son actuel député UMP, alors que la quatrième circonscription et la septième circonscription regroupent respectivement 133 240 habitants et 136 366 habitants. Vous n’avez pas tenu compte, en l’occurrence, de la règle de l’écart démographique maximal de 20 %.
Enfin, vous retaillez à l’inverse la troisième circonscription, qui compte désormais 123 888 habitants, soit un chiffre de population très proche de celui, supposé idéal, de 125 000 habitants.
M. le président. Monsieur Mahéas, il faut conclure.
M. Jacques Mahéas. Le préfet de la région d’Île-de-France, M. Daniel Canepa, avait lui-même préconisé de ne pas modifier les limites des circonscriptions législatives dont la population est proche de la moyenne.
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue !
M. Jacques Mahéas. Mais peu vous importe, monsieur le secrétaire d’État : on comprendra ce qui vous guide quand j’aurai rappelé que la troisième circonscription a un député socialiste, ce qui n’est pas le cas des quatre circonscriptions les moins peuplées…
Je donnerai la suite de mon argumentaire dans quelques instants, en reprenant la parole pour explication de vote.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Je ne suis pas en mesure de répondre à l’argument portant sur le recensement. Cela étant, le découpage de la Seine-Saint-Denis a été validé par la commission prévue à l’article 25 de la Constitution. Celle-ci a émis non pas des réserves, mais de simples suggestions. Ce n’est pas pareil ! L’architecture globale du découpage n’a pas été remise en cause. Les circonscriptions présentent des écarts à la moyenne départementale très limités, d’ailleurs tout à fait admissibles compte tenu de la géographie, le plus élevé, dans la huitième circonscription, n’atteignant pas 14 %.
M. Jacques Mahéas. Non, c’est 35 % !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Peu de départements sont dans ce cas. Par conséquent, il n’est pas opportun de retenir cet amendement, et la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. L’avis est défavorable. Les chiffres du recensement de 2007 ne remettent pas en cause la distribution des sièges telle que prévue dans l’ordonnance, que ce soit pour la Seine-Saint-Denis, pour le Puy-de-Dôme, visé à l’amendement suivant, ou pour tout autre département. D’ailleurs, le Conseil d’État est très clair sur ce point : « Il importe donc que la détermination des bases démographiques fondant cette révision s’appuie sur des données comparables et afférentes à la même année. »
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Eh oui !
M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote.
M. Jacques Mahéas. Je poursuis mon argumentation, qui pourra également intéresser le Conseil constitutionnel !
Monsieur le secrétaire d’État, vous prônez l’unité des cantons présentant une solution de continuité, mais vous ne respectez pas vos propres critères. Ainsi, en Seine-Saint-Denis, à l’heure actuelle, le canton du Bourget, qui comprend Le Bourget, Dugny et le nord de Drancy, est divisé entre trois circonscriptions. Or l’ordonnance prévoit qu’il demeure partagé, même si ce ne sera plus qu’entre deux circonscriptions, la quatrième et la cinquième. Pourquoi définir des critères si vous vous empressez de les contourner ? Une précision s’impose : vous ajoutez à la circonscription d’un député du Nouveau centre la commune du Bourget, dont le maire, pure coïncidence, appartient à ce même parti.
Vous malmenez également l’unité des communes, dont vous vous réclamez. Pourquoi scinder Bondy entre la neuvième circonscription et la dixième circonscription ? Serait-ce lié au fait que le maire de la commune, Gilbert Roger, et le député de la circonscription dont elle relève actuellement, Élizabeth Guigou, sont tous deux socialistes ? L’objectif était de redécouper les circonscriptions électorales en respectant l’équilibre démographique, en modifiant en priorité les circonscriptions actuellement les moins peuplées, en maintenant l’unité des villes et des cantons. Je veux bien l’admettre, l’exercice peut se révéler complexe par endroits, mais cela ne saurait justifier, pour la Seine-Saint-Denis, que les exceptions aux critères édictés soient si défavorables aux députés socialistes. Le découpage n’est manifestement pas exempt de partialité…
J’ajoute que vous prenez en compte les chiffres qui vous arrangent, monsieur le secrétaire d’État. Pour ma part, je me fonde toujours sur ceux du recensement de 2007, validé en 2010.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cela ne change rien !
M. Jacques Mahéas. Nous avons donc droit à treize circonscriptions. Si nous sommes d’accord sur ce point, il n’y a pas de difficulté.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Nous ne sommes pas d’accord !
M. Jacques Mahéas. Par ailleurs, comment expliquer que la population des circonscriptions varie – excusez du peu – entre 108 000 et 136 000 habitants ? L’écart est de taille !
M. le président. L'amendement n° 22, présenté par Mme M. André et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par les deux alinéas suivants :
Dans le tableau annexe définissant le nombre de circonscriptions dans les départements, pour le Puy-de-Dôme, le nombre : « 5 » est remplacé par les mots : « sans changement ».
Dans le tableau annexe définissant les circonscriptions législatives, pour le département du Puy-de-Dôme, le descriptif est remplacé par les mots : « sans changement ».
La parole est à M. Bernard Frimat.
M. Bernard Frimat. Mon intervention va ravir M. Portelli, puisque je parlerai du Puy-de-Dôme, certainement moins bien, cela étant, qu’aurait pu le faire Michèle André, qui connaît beaucoup mieux que moi la réalité locale.
Faut-il, oui ou non, prendre en compte le dernier recensement validé ? J’ai bien compris qu’à cette question, votre réponse était négative, monsieur le secrétaire d’État. Nous continuons cependant à la poser, car les chiffres font apparaître que le Puy-de-Dôme devrait compter six circonscriptions, en application de la règle des « tranches » de 125 000 habitants.
M. Bernard Frimat. Si vous le contestez, fournissez-nous tous les chiffres sur lesquels vous vous fondez, et le Conseil constitutionnel tranchera.
En outre, je dois reconnaître que vous avez réalisé un petit exploit : tout en réduisant le nombre des circonscriptions de ce département, ce qui devrait engendrer mécaniquement une augmentation de la population de chacune d’elles, vous êtes parvenu à en redécouper une de manière que sa population diminue. Il n’est pas très difficile de deviner pourquoi… Là encore, les considérations partisanes semblent l’avoir emporté sur le bon sens.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Une nouvelle délimitation des circonscriptions était nécessaire, ce département perdant un siège. Comme l’a expliqué tout à l’heure M. le secrétaire d'État, les résultats du recensement de 2007 ne changent rien en ce qui concerne le nombre des circonscriptions.
En outre, les écarts démographiques par rapport à la moyenne départementale sont très limités, bien plus d’ailleurs qu’avec l’ancien découpage, le maximum passant de près de 20 % à 12,30 %.
Enfin, le Gouvernement expose dans le rapport annexé les motifs pour lesquels il n’a que partiellement suivi, en l’occurrence, l’avis de la commission indépendante prévue à l’article 25 de la Constitution.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. L’avis est également défavorable.
En 1986, le découpage avait été effectué sur la base du recensement de 1982, soit un décalage de quatre ans. De même, nous nous fondons ici sur le recensement de 2006, conformément à la loi d’habilitation.
Il est vrai que si l’on prenait en compte le recensement de 2007, les bases démographiques de la nouvelle délimitation des circonscriptions seraient différentes. Cela étant, la population française ayant augmenté de 0,66 %, la tranche de population servant de référence passerait, du fait du plafonnement à 577 du nombre des députés, de 125 000 à un peu plus de 126 000. Dès lors, le nombre de circonscriptions ne serait pas différent, que ce soit en Seine-Saint-Denis, dans le Puy-de-Dôme – étant Auvergnat, je le regrette ! – ou dans tout autre département. Cela ne changerait rien par rapport à ce que nous proposons.
M. le président. L'amendement n° 23, présenté par M. Frimat et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par les mots et l'alinéa suivants :
à l'exception des collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy.
En conséquence, les éléments du « tableau des circonscriptions électorales de Nouvelle-Calédonie et des collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution » faisant mention de ces collectivités et des circonscriptions attenantes sont abrogés et ces collectivités feront l'objet d'un redécoupage ultérieur conformément aux exigences constitutionnelles.
La parole est à M. Bernard Frimat.
M. Bernard Frimat. Je vais aggraver mon cas aux yeux de M. Portelli, en parlant maintenant de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy…
Votre intention initiale, monsieur le secrétaire d’État, pour des raisons que l’on comprend bien et qui avaient déjà présidé à la création de deux sièges de sénateur, était de permettre à ces deux collectivités, peuplées respectivement de 35 000 et de 8 000 habitants, d’élire chacune un député.
Cependant, le Conseil constitutionnel a considéré que le statut de collectivité d’outre-mer n’emportait pas automatiquement la création d’une circonscription électorale, les députés devant là aussi être élus sur des bases essentiellement démographiques, sauf cas de particulier éloignement. Or ces cas, nous les connaissons bien : il s’agit de ceux de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Wallis-et-Futuna, dont la situation géographique rend impossible tout rattachement à un autre territoire.
En revanche, Saint-Martin et Saint-Barthélemy ne sont éloignées de la Guadeloupe que de 255 et de 230 kilomètres respectivement, et partagent avec elle une histoire commune. Rien ne justifie donc le sort particulier qui leur est fait, et qui désole d’ailleurs la moins peuplée de ces îles, laquelle voit s’éloigner la perspective d’avoir son propre député. Ces collectivités sont déjà représentées par deux sénateurs élus par un collège électoral si peu nombreux que, en comparaison, notre séance de cet après-midi ressemble à un gigantesque meeting populaire…
L’Assemblée nationale, qui avait initialement accepté la création d’une circonscription pour chacune de ces îles, est revenue sur sa décision. Aujourd’hui, il n’est plus question que d’un seul député pour ces deux collectivités. Encore un petit effort, monsieur le secrétaire d’État, et vous respecterez les préconisations du Conseil constitutionnel, qui observe que les représentants des collectivités d’outre-mer doivent eux aussi être élus sur des bases essentiellement démographiques.
Saint-Martin et Saint-Barthélemy doivent donc logiquement demeurer rattachées à la Guadeloupe. Cela vous obligera certes à revoir votre découpage, mais vous vous livrez à cet exercice avec un tel ravissement et un tel sens du détail que ce surcroît de travail ne pourra que vous combler de joie !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Reprenons un peu l’historique de cette question.
Dans un premier temps, le Parlement avait adopté le principe, validé par le Conseil constitutionnel, selon lequel chaque collectivité d’outre-mer devait élire un député. Puis, subitement, le Conseil constitutionnel a changé d’avis.
Si Saint-Martin et Saint-Barthélemy ont souhaité prendre en main leur destin et devenir des collectivités d’outre-mer, c’est précisément, monsieur Frimat, parce que ces îles éprouvaient un sentiment d’abandon, et donc d’éloignement par rapport à la Guadeloupe, quelle que soit par ailleurs la qualité des députés qui les représentaient.
Il eût peut-être été difficile de comprendre que ces deux collectivités puissent constituer chacune une circonscription, mais prévoir qu’elles éliront un député me paraît tout à fait conforme aux critères du Conseil constitutionnel. On ne peut, à mon sens, leur dénier le droit d’être représentées à l’Assemblée nationale.
C’est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet également un avis défavorable, pour les mêmes raisons que la commission.
M. Frimat soulève une question importante et récurrente. Comme M. le rapporteur l’a rappelé, la loi organique du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l’outre-mer a détaché les îles de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy du département de la Guadeloupe pour les ériger en collectivités d’outre-mer et prévu que chacune d’elles soit représentée à l’Assemblée nationale : deux sièges ont été créés, mais non pourvus.
Or, aux termes de la décision du Conseil constitutionnel du 8 janvier 2009, « aucun impératif d’intérêt général n’impose que toute collectivité d’outre-mer constitue au moins une circonscription électorale ; […] il ne peut en aller autrement, si la population de cette collectivité est très faible, qu’en raison de son particulier éloignement d’un département ou d’une collectivité d’outre-mer ».
Le Gouvernement a respecté à la lettre la jurisprudence constitutionnelle en créant un siège de député pour ces deux collectivités proches l’une de l’autre, mais éloignées de plus de 230 kilomètres du département de la Guadeloupe, soit un trajet de plus de quarante-cinq minutes par avion, en survolant les Antilles néerlandaises, compte tenu de la configuration particulière de Saint-Martin, ou d’une quarantaine d’heures par bateau.
M. Jean Desessard. Par bateau ?
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Eh oui, monsieur Desessard, tout le monde n’a pas les moyens de prendre l’avion.
La création de ce siège de député n’a pas suscité de remarques particulières de la part de la commission indépendante ou du Conseil d’État. Il est toutefois à noter que la population cumulée de ces deux collectivités, soit 40 100 personnes, est supérieure à celle de Saint-Pierre-et-Miquelon ou de Wallis-et-Futuna, collectivités qui comptent respectivement 6 345 et 14 300 habitants mais disposent déjà chacune d’un siège de député. Il n’y a donc là rien de scandaleux.
M. le président. L'amendement n° 24, présenté par MM. Sergent et Percheron, Mme San Vicente-Baudrin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par les mots et l'alinéa suivants :
à l'exception du département du Pas-de-Calais.
En conséquence, les éléments du « tableau des circonscriptions électorales des départements » faisant mention de ce département et des circonscriptions attenantes sont abrogés et ce département fera l'objet d'un redécoupage ultérieur conformément aux exigences constitutionnelles.
La parole est à M. Bernard Frimat.