M. Guy Fischer. Il faut la payer plus !
M. François Autain. En attendant, c'est le chômage qui augmente !
M. Xavier Darcos, ministre. Le PLFSS instaure, monsieur Fischer, un système de bonus-malus plus efficace dans le champ des accidents du travail.
D’une part, il simplifie les mécanismes de majoration de cotisation qui existent en cas de risque avéré ou récurrent : c’est le malus. D’autre part, il crée une incitation financière pour les entreprises qui réalisent des investissements de prévention : c’est le bonus.
Nous transposons ainsi dans le PLFSS les orientations définies avec les partenaires sociaux dans le cadre de l’accord du 12 mars 2007.
Par ailleurs, la branche AT-MP sera associée à la préparation du deuxième plan Santé au travail, qui porte sur la période 2010-2014 et vise notamment à développer une politique de prévention active des risques professionnels. Je présenterai ce deuxième plan Santé au travail le mois prochain.
J’aborde maintenant la branche famille, troisième grand volet du PLFSS. Celui-ci fait du développement de la garde d’enfant une priorité de la politique familiale.
La politique de la famille, en France, représente un effort de 88,3 milliards d’euros, soit 4,7 % de notre produit intérieur brut, alors que nos voisins européens n’y consacrent en moyenne que 2,5 % de leur produit intérieur brut. Cet effort porte ses fruits : grâce à un taux de natalité de 2,08 enfants par femme, nous sommes, si je puis dire, les champions d’Europe de la natalité.
Mme Annie David. Ceci explique cela !
M. Xavier Darcos, ministre. Pour accompagner et encourager le dynamisme de la natalité française, le Président de la République s’est engagé à développer, d’ici à 2012, 200 000 nouveaux modes de garde diversifiés, adaptés aux contraintes professionnelles des parents et aux réalités des territoires.
Pour atteindre cet objectif, nous proposons, avec Nadine Morano, la secrétaire d’État en charge de ces dossiers, d’ouvrir le dispositif du prêt à taux zéro aux assistants maternels, afin de lever les obstacles qui peuvent peser sur leur installation. Cette mesure nous permet de répondre à une très forte demande de ces professionnels et, ainsi, de continuer à œuvrer avec la même détermination en faveur du développement de la garde d’enfant.
L’Assemblée nationale a également voté deux dispositifs qui consacrent notre engagement pour le développement des modes d’accueil.
Le texte qui vous est proposé, mesdames, messieurs les sénateurs, permet ainsi de transformer les relais assistants maternels en relais d’accueil de la petite enfance, afin de permettre aux personnels effectuant des gardes à domicile de bénéficier également de ce dispositif de qualité.
Il prévoit aussi que ces assistants maternels puissent recevoir un agrément pour deux enfants au minimum, si les conditions d’accueil le leur permettent. C’est bien pour l’assistant maternel, qui pourra commencer à travailler avec un revenu décent ; c’est bien pour les parents, qui pourront trouver plus facilement des places d’accueil ; c’est bien pour les enfants, qui pourront être accueillis à plusieurs.
J’en termine par le champ médico-social. Le PLFSS poursuit notre effort soutenu en faveur des personnes dépendantes et handicapées.
En dépit d’un contexte économique dégradé, le Gouvernement a tenu à maintenir l’effort important de solidarité qu’il a engagé envers les plus fragiles, comme en témoigne le taux de progression de l’ONDAM médico-social, qui atteint 5,8 %.
Pour les personnes âgées dépendantes, nous poursuivrons la mise en œuvre du plan Alzheimer – Nora Berra aurait pu le détailler, je le fais à sa place –, la lutte contre la maladie d’Alzheimer étant une priorité du Gouvernement. En outre, 7 500 places nouvelles en maisons de retraite seront financées.
Pour les personnes handicapées, nous poursuivrons le plan de création de places annoncé par le Président de la République lors de la conférence nationale du handicap du 10 juin 2008 pour les enfants et adultes handicapés. Ainsi, ce sont plus de 50 000 places, 38 000 places pour les adultes et 12 000 places pour les jeunes, qui pourront être ouvertes à horizon de sept ans pour répondre à l’ensemble des besoins des familles.
M. Guy Fischer. Ce n’est pas vrai !
M. Xavier Darcos, ministre. Ce défi sera encore relevé en 2010, et ce malgré le contexte budgétaire difficile que nous connaissons, puisque la mise en œuvre du plan mobilisera près de 360 millions d’euros de mesures nouvelles en faveur des établissements et services pour personnes handicapées. Au total, plus de 5 500 places nouvelles, diversifiées et adaptées aux besoins de chacun pourront être financées dès 2010.
Le PLFSS remédie en outre à une difficulté majeure que rencontrent les personnes handicapées : celle de la prise en charge des frais de transport pour se rendre en accueil de jour dans les maisons d’accueil spécialisées, les MAS, ou dans les foyers d’accueil médicalisés, les FAM. J’ai en effet décidé de permettre à ces établissements de financer sur leurs budgets les frais de transport des adultes handicapés qui se rendent en accueil de jour. L’année 2010 sera mise à profit pour affiner les conditions d’une intégration des frais de transport dans les budgets des établissements pour les autres modes d’accueil. (M. Guy Fischer s’exclame.)
J’ajoute enfin que, dans le cadre de ce débat, nous souhaitons apporter, avec Nadine Morano, une réponse juste au problème lié à l’augmentation du forfait journalier hospitalier pour les personnes qui relèvent de l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH, et qui vivent en maison d’accueil spécialisée. Nous pensons qu’il est nécessaire de leur garantir un reste à vivre minimal, à l’instar des personnes vivant en foyer d’accueil médicalisé. Mme Desmarescaux présentera un amendement en ce sens, le Gouvernement y donnera un avis favorable.
Telles sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales mesures de ce PLFSS pour 2010, sur lequel le Sénat est invité à se prononcer. Je suis certain que, comme l’ont dit Éric Woerth et Roselyne Bachelot-Narquin, la discussion qui s’ouvre à présent va permettre, si nécessaire, d’améliorer ce texte. L’essentiel, c’est que nous garantissions à tous nos concitoyens un système de protection sociale juste, solidaire et efficace. Ce sont les engagements du Président de la République ! Ce sont les engagements du Gouvernement ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et au banc des commissions. – Mme Anne-Marie Payet applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales.
M. Guy Fischer. Nous allons pouvoir réagir !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame et messieurs les ministres, mes chers collègues, mon propos comprendra deux parties. En effet, je rapporte à la fois sur les équilibres généraux et sur la branche maladie. Vous allez donc devoir me supporter un peu plus de temps que les rapporteurs qui suivront, et je vous prie de m’en excuser.
Dans un premier temps, je m’en tiendrai à quelques considérations d’ordre général et à l’évocation des équilibres généraux.
L’éclairage triennal de la loi de financement de la sécurité sociale, selon un triptyque formé par l’exercice clos, l’exercice en cours et l’exercice à venir, nous permet de mesurer pleinement l’ampleur du dérapage des déficits des comptes sociaux depuis deux ans : 10,2 milliards d’euros en 2008, 23,5 milliards d’euros en 2009, 30,6 milliards d’euros en 2010.
Cette dégradation, inédite par son volume, fait de la comparaison entre la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 et le PLFSS pour 2010 un exercice en grande partie inutile. En effet, tous les objectifs votés l’an dernier ont été très largement dépassés et sont donc significativement rectifiés à la hausse.
L’effet « crise économique » qui entraîne un effondrement des recettes – 25 milliards d’euros de pertes en 2009 et 2010 – tandis que les dépenses continuent de croître explique l’essentiel de ce dérapage. Jamais encore, par exemple, on n’avait enregistré deux années consécutives de baisse de la masse salariale. Or, celle-ci, vous le savez, sous-tend les trois quarts des recettes des régimes de sécurité sociale.
Il en résulte une accumulation des déficits rapide et sans précédent, qui masque, de surcroît, l’effort réel de maîtrise de la dépense : mis en œuvre avec constance depuis plusieurs années, cet effort n’est plus perceptible face à l’affaissement des recettes.
C’est sur la base de ces constats que je voudrais vous faire part des observations de notre commission des affaires sociales sur les grands équilibres et la situation générale des comptes sociaux. Dans un second temps, comme je l’ai dit voilà un instant, j’aborderai plus en détail le volet assurance maladie du texte.
Ma première observation porte sur le cadrage pluriannuel de l’annexe B, qui est l’une des particularités du projet de loi de financement de la sécurité sociale depuis la réforme organique de 2005. Établi parallèlement au cadrage de la loi de finances, il ouvre cette année des perspectives que je n’hésite pas à qualifier de très préoccupantes. Je vous en livre les grandes lignes.
Les évolutions sont bâties sur des hypothèses indéniablement volontaristes : …
M. Guy Fischer. Irréalistes !
M. Alain Vasselle, rapporteur général. … une croissance de 0,8 % en 2010, soit une reprise encore modérée, mais de 2,5 % pour les trois années suivantes ; une baisse de la masse salariale de 0,4 % en 2010, mais une augmentation, optimiste à mon sens, de 5 % pour les trois années suivantes.
M. Guy Fischer. Complètement irréaliste !
M. Alain Vasselle, rapporteur général. Or le contexte économique actuel, encore très incertain, nous incite à moins d’optimisme. Je note d’ailleurs que tous les instituts de prévision sont en ce moment à la peine pour fixer des chiffres, que ce soit pour le moyen terme ou simplement pour l’année 2010.
En dépit de ce cadre économique relativement favorable, les comptes de toutes les branches de la sécurité sociale restent déficitaires jusqu’en 2013 et le déficit total ne se réduit pas. Nous sommes donc passés d’un déficit conjoncturel constaté à la fin de l’année 2009 à un déficit structurel de l’ordre de 30 milliards d’euros.
M. Yves Daudigny. Ça, c’est la vérité !
M. Alain Vasselle, rapporteur général. De plus, s’agissant de possibles modifications des hypothèses, si l’on considère, par exemple, l’indicateur de la masse salariale, il suffit que le taux retenu pour 2011 soit de 4 %, au lieu de 5 %, pour que le déficit se creuse aussitôt de 2 milliards d’euros supplémentaires.
M. Guy Fischer. Bien sûr !
M. Alain Vasselle, rapporteur général. Si ce taux est de 3 %, il faut ajouter 2 milliards d’euros, soit 4 milliards d’euros supplémentaires de déficit annuel.
Or je vous le rappelle, sur la période 1998-2007, la masse salariale avait progressé en moyenne de 4,1 % par an, ce qui avait été considéré, à l’époque, comme un bon niveau. On peut donc considérer que nous ferons mieux au cours de la prochaine décennie, mais, à mon sens, c’est faire preuve de beaucoup d’optimisme, surtout après les propos qui ont été tenus par M. Éric Woerth, notre ministre en charge des comptes publics. Celui-ci semble effectivement se préoccuper de toute une série d’amendements que nous proposons au moment même où la France vit une des plus grandes crises financières de son histoire.
Ces prévisions peuvent en outre être utilement mises en regard de celles de l’année dernière qui, vous vous en souvenez, mes chers collègues, prévoyaient un retour à l’équilibre des comptes du régime général en 2012. À la fin de l’année 2013, si nous n’avons pas repris la dette, il nous faudra constater un déficit cumulé de 150 milliards d’euros. Et, le cadrage pluriannuel s’arrêtant en 2013, nous n’avons pas examiné ce qui se passera en 2014, 2015 ou 2016 !
Cela montre bien la volatilité des projections établies. Quoi qu’il en soit, ce cadrage pluriannuel a tout de même le mérite de tracer une trajectoire et de faire apparaître les contraintes qui s’imposent à nous pour respecter l’objectif et ne pas reporter à plus tard – ce serait souhaitable, selon moi – les mesures de maîtrise et de financement de la dette. J’y reviendrai dans un instant.
J’en viens à mes observations sur les équilibres généraux. J’en ferai trois.
Première observation, la priorité consiste à régler la question des déficits accumulés. C’est un point sur lequel nous commençons à avoir des divergences avec le Gouvernement.
Le PLFSS ne prévoit aucune reprise de la dette, cela vient d’être confirmé, et vous nous avez également indiqué, monsieur le ministre, que le Gouvernement n’envisageait aucune mesure avant 2011, au motif que vous ignorez ce que sera la situation de 2011, tant en termes de dépenses qu’en termes de recettes. Cela signifie que l’ACOSS va devoir porter dans ses comptes les déficits de 2009 et de 2010, dans la limite d’un plafond historique de 65 milliards d’euros. Du jamais vu !
Or, comme nous l’avons déjà démontré, plus on attend, plus le transfert des dettes à la CADES devient coûteux…
M. Gilbert Barbier. Eh oui !
M. Alain Vasselle, rapporteur général. … et plus on reporte le poids de cette charge sur les contribuables de demain. C’est pourquoi nous souhaitons, contrairement au Gouvernement, vous proposer, mes chers collègues, de faire un premier pas dès cette année.
Il consisterait à faire reprendre par la CADES environ 20 milliards d’euros, soit le « point haut » de la trésorerie de l’ACOSS en 2010. Ce transfert serait bien entendu accompagné des recettes nécessaires à son remboursement, puisque la loi organique de 2005 a prévu que nous ne pouvons pas transférer de dettes sans prévoir de recettes, de telle manière que nous ne reportions pas plus avant, sur les générations futures, le poids de cette dette. Le taux de la CRDS serait donc, si vous nous suivez, augmenté de 0,15 point…
M. Gilbert Barbier. Très bien !
M. Alain Vasselle, rapporteur général. … et atteindrait ainsi 0,65 %, ce qui permettrait de ramener le plafond d’emprunt de l’ACOSS à 45 milliards d’euros.
M. Gilbert Barbier. Parfait !
M. Alain Vasselle, rapporteur général. Monsieur le ministre, vous considérez que la crise est telle que l’on ne peut pas prendre le risque, par une mesure de cette nature, de peser sur les prélèvements obligatoires et d’affecter notre économie et la compétitivité des entreprises. Sans vouloir vous offenser, je tiens à vous préciser, si cette information ne vous a pas été communiquée par vos collaborateurs, que le transfert de 20 milliards d’euros à la CADES et l’augmentation de 0,15 point de la CRDS, cela se traduirait pour un salarié au SMIC par un effort mensuel de 1 euro.
Le fait pour chaque salarié rémunéré au SMIC d’acquitter un euro supplémentaire représente-t-il un effort insurmontable, qui aura une incidence sur l’emploi et le pouvoir d’achat de nos concitoyens ?
M. Guy Fischer. Et la prise en compte de la CRDS et de la CSG dans le bouclier fiscal ?
Mme Annie David. Et ceux qui bénéficient du bouclier fiscal, ils ne peuvent pas payer l’impôt ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général. Monsieur Fischer, madame David, nous en reparlerons lors de l’examen des amendements. Ne tombons pas dans des considérations idéologiques. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Jean-Pierre Godefroy. Ce n’est pas idéologique, c’est la justice sociale !
M. Alain Vasselle, rapporteur général. J’ajoute, si vous me le permettez (Mme Annie David proteste)… Vous aurez l’occasion de vous exprimer tout à l’heure, madame David, laissez-moi terminer !
M. Guy Fischer. Devant de tels propos, on ne résiste pas !
Mme Gisèle Printz. C’est honteux !
M. Alain Vasselle, rapporteur général. Monsieur le ministre, vous avez fait valoir tout à l’heure qu’une telle mesure, loin de renforcer notre économie, fragiliserait la sortie de crise. En qualité de rapporteur général, je pourrais, si la commission des affaires sociales en était d’accord, retirer cet amendement…
M. Gilbert Barbier. Non !
M. Alain Vasselle, rapporteur général. … si vous acceptiez de considérer comme moi-même – et je m’en suis entretenu tout à l’heure avec le président du groupe de l’Union centriste, Nicolas About – que la situation de la sécurité sociale n’est pas liée à un déficit structurel ni à un dérapage des dépenses, mais que c’est bien la conséquence d’une crise économique, indépendante de la situation des différentes branches de la sécurité sociale.
Ne vaudrait-il pas mieux que ce déficit, lié à un manque de recettes résultant lui-même de difficultés économiques, soit pris en charge par le budget de l’État ? Il viendrait, certes, gonfler d’autant le déficit public mais nous pourrions considérer que les déficits des quatre branches liés à des problèmes structurels devraient être les seuls à être supportés par la CADES dans les années qui viennent.
En effet, la crise économique a fragilisé la situation. (Mme Annie David s’exclame.) Si le budget de l’État prend en charge ces 20 milliards d’euros, nous n’aurons pas besoin de les transférer à la CADES. J’imagine que Nicolas About vous en parlera tout à l’heure.
La deuxième observation que je voulais faire concerne la maîtrise des dépenses.
Nous sommes complètement en phase avec vous et avec Roselyne Bachelot sur la nécessité de continuer dans cette direction. Le contexte financier actuel exige que nous poursuivions et que nous amplifiions les efforts de ces dernières années.
Cela implique en particulier une volonté forte pour continuer à réformer l’hôpital. Je sais que l’un et l’autre vous partagez cette volonté, encore faudra-t-il la traduire par des actes.
Le Premier président de la Cour des comptes – Eric Woerth y a fait référence tout à l’heure pour justifier certaines positions du Gouvernement, notamment en ce qui concerne le droit à l’image – a fait valoir la semaine dernière devant notre commission qu’il existait de réelles marges de progrès et d’efficience à l’hôpital ; je vous renvoie d’ailleurs à son rapport.
M. Alain Vasselle, rapporteur général. Il est impératif que ces marges soient mobilisées. Ce sera une mission prioritaire pour les ARS.
M. Guy Fischer. Ce sera leur mission prioritaire !
M. Alain Vasselle, rapporteur général. Celles-ci viennent d’être créées, laissons-leur le temps de se mettre en place et d’agir. C’est aussi dans cet esprit que je vous proposerai de ramener l’horizon de la convergence à 2014.
J’en viens aux dépenses des autres branches.
J’insiste sur la nécessité que le rendez-vous de 2010 sur les retraites, auquel nous invitera M. Darcos, permette d’apporter des solutions durables à l’équilibre des comptes de la vieillesse.
Nous souhaitions d’ailleurs y consacrer la discussion thématique,…
M. Guy Fischer. Elle est annulée !
M. Alain Vasselle, rapporteur général. … mais j’ai cru comprendre, madame la présidente Dini, que cette discussion serait peut-être reportée pour nous permettre de terminer dans des délais acceptables l’examen du PLFSS. (M. Jean-Pierre Godefroy s’exclame.)
Troisième observation : il est plus que jamais nécessaire de chercher à assurer un financement durable de la protection sociale. Sur ce point, nous avons également quelques divergences avec le ministre des comptes publics.
Pour faire face à des dépenses croissantes, notamment en matière de santé et de vieillesse, il manque et il manquera à la sécurité sociale des moyens de financement à la fois pérennes et dynamiques.
Il est donc impératif de préserver les ressources actuelles mais aussi de réfléchir à la mobilisation de nouvelles ressources.
Pour sécuriser les recettes, notre commission a fait de nombreuses propositions ces dernières années, dont un certain nombre ont d’ailleurs été reprises par le Gouvernement ou par les députés. Nous avons souvent tort d’avoir raison trop tôt. C’est ainsi que nous avions proposé la taxation des stock-options. Elle n’a pas été acceptée la première année mais elle a été reprise par les députés. Nous avions également proposé une « flat tax » sur les niches sociales : le Gouvernement a créé le forfait social l’année dernière et a décidé de le doubler cette année.
Nous proposons aujourd'hui d’augmenter la CRDS. Le Gouvernement reprendra fort probablement cette solution l’année prochaine mais considère que les propositions que nous faisons viennent toujours trop tôt et nous demande de retirer les amendements afférents.
Je vous propose d’avancer sur la question des allégements généraux de charges sociales en calculant les exonérations sur une base annuelle et non mensuelle, afin d’éviter certains contournements. J’ai compris que le ministre n’y était pas hostile sur le principe mais voulait prendre un peu de temps avant que la mesure entre en application ; nous en parlerons lors de l’examen de l’amendement.
Je vous propose également de plafonner l’exonération de charges sociales applicable aux retraites « chapeau » dont nous a parlé Xavier Darcos.
Je vous propose aussi de commencer à aligner l’assiette de la CSG sur celle, plus large, de la CRDS en soumettant à la CSG les ventes de métaux précieux, bijoux et objets d’art.
À l’inverse, sur le droit à l’image collective des sportifs professionnels, qui a suscité bien des paroles et a fait couler beaucoup d’encre, je vous proposerai de décaler la date retenue pour l’extinction du dispositif d’exonération, car il nous paraît plus raisonnable d’attendre la fin de la saison sportive pour changer les règles du jeu. J’ai cru comprendre que le Gouvernement était favorable à cette proposition.
Mme Annie David. Bien sûr !
M. Guy Fischer. M. Thiriez a été entendu !
M. Alain Vasselle, rapporteur général. D’autres amendements sur le sujet seront présentés, notamment par la commission des finances, et nous verrons si Mme Bachelot ou M. Woerth souhaitent aller au-delà de nos propositions.
J’en viens à présent au volet assurance maladie.
L’assurance maladie a été, comme les autres branches, durement frappée par la crise des recettes. Elle redevient la branche la plus déficitaire et dépasse dorénavant la branche vieillesse, malheureusement au moment où l’effort mené depuis plusieurs années pour maîtriser l’évolution des dépenses, tout en maintenant le niveau de la protection, commence à porter ses fruits.
Sur les quatre dernières années, l’augmentation moyenne des dépenses imputées sur l’ONDAM a été de 3,5 % et l’ONDAM 2009 devrait être pratiquement respecté. Ce sera certainement l’une des premières fois depuis que l’ONDAM existe. Le premier, celui de 1997, après le vote de la réforme constitutionnelle, a été respecté ; celui-ci l’est pour cette année à 300 millions d’euros près, ce qui démontre que nous avons réussi à maîtriser l’évolution des dépenses.
Il faut bien sûr, indépendamment de la crise, poursuivre dans cette voie.
Il est proposé de limiter la progression de l’ONDAM à 3 % en 2010. Si nous ne relâchons pas nos efforts en matière de gestion du risque, de maîtrise médicalisée des dépenses et de renforcement des contrôles, cet objectif paraît tenable et, avec le renfort de quelques mesures d’économie, nous devrions garder la marge nécessaire pour financer l’accès au progrès thérapeutique et les plans de santé publique.
En ce qui concerne les soins de ville, nous disposons désormais d’une large gamme d’instruments de maîtrise médicalisée des dépenses, qui devraient continuer de produire leurs effets ; je pense en particulier à l’action médico-économique positive développée par la Haute Autorité de santé et au contrat d’amélioration des pratiques individuelles, le CAPI, dont le succès semble dépasser les espérances premières de Mme le ministre. Le projet de loi lui ajoute une procédure contractuelle alternative à la mise sous contrôle préalable, en matière d’indemnités journalières ou de transports sanitaires, et il complète utilement les dispositifs de contrôle et de lutte contre la fraude, mesures auxquelles le ministre Éric Woerth, comme nous-mêmes, est très attaché.
Pour ce qui est de la maîtrise médicalisée des dépenses à l’hôpital, on pourrait dire : peut mieux faire.
M. Guy Fischer. Voilà !
M. Alain Vasselle, rapporteur général. L’hôpital reste, en dépit de progrès récents, largement une terre de mission. Nous ne pouvons donc que soutenir les dispositions, enrichies par l’Assemblée nationale, qui prévoient des dispositifs contractuels de régulation des prescriptions hospitalières de transports et de médicaments qui ont une incidence directe sur les dépenses de soins de ville. Nous maintenons cependant que le meilleur moyen d’y parvenir est l’identification des auteurs de prescriptions hospitalières, dont nous avons voté le principe il y a déjà cinq ans.
Je l’avais fait par voie d’amendement et M. Bertrand m’avait demandé de retirer ma proposition en disant qu’il réglerait cette question par décret. Je constate que cinq ans plus tard, même si le décret est paru, la disposition n’est toujours pas appliquée. Des difficultés d’ordre technique, logistique ou informatique sont avancées pour justifier ce retard. J’espère, madame le ministre, que vous nous confirmerez que cette mesure entrera enfin en application en 2010.
On peut en effet s’interroger sur les raisons de cette inertie très importante du ministère : celle-ci ne dissimule-t-elle pas un manque de volonté politique d’avancer sur la maîtrise médicalisée des dépenses à l’hôpital ? Il est quand même surprenant que l’on ne soit pas capable d’identifier les médecins qui délivrent des prescriptions à l’hôpital alors qu’on l’a fait depuis longtemps pour les médecins de ville.
J’en viens à présent aux quelques points sur lesquels nous souhaitons compléter ou préciser ce projet de loi de financement.
Le premier sujet est l’hôpital.
Madame le ministre, vous avez annoncé lors de l’examen du texte qui est devenu la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite « loi HPST », le report à 2018 de la convergence intersectorielle, qui représente l’aboutissement logique du passage à la tarification à l’activité, la T2A.
On l’a un peu oublié depuis le temps, mais la T2A était le seul moyen de sortir du régime de tarification hospitalière que nous avons connu jusqu’en 2004, qui se caractérisait par d’inexplicables disparités de traitement entre les régions, entre les établissements, entre les secteurs, qui freinait l’adaptation de l’offre de soins, qui s’était avéré impossible à réformer et dont le résultat le plus clair était, comme on a pu le dire, d’enrichir les établissements les plus riches et d’appauvrir les plus pauvres.
Compte tenu de la situation dont nous partions, tout était à faire, et il ne faut pas s’étonner que cela ait été difficile. La Cour des comptes, une fois encore, a porté un jugement sévère et mérité sur le pénible cheminement de la réforme. Mais elle convient avec nous que, désormais, les choses avancent.
La convergence des tarifs ne signifie pas nécessairement leur égalisation parfaite : il reste à mesurer certaines différences de charges et les écarts de tarif correspondants ; il reste aussi à mettre en cohérence les charges couvertes par les tarifs. Une série d’études bien identifiées – pas moins de seize, me semble-t-il –, dont nous avons désormais la liste, sera disponible en 2012. Pourquoi attendre six années supplémentaires pour achever le processus ? C’est pourquoi nous proposons de fixer l’échéance à la date, raisonnable, de 2014.