M. le président. La parole est à Mme Colette Giudicelli, auteur de la question n° 561, transmise à M. le secrétaire d'État chargé de la fonction publique.
Mme Colette Giudicelli. Monsieur le secrétaire d'État, l’allocation d’aide au retour à l’emploi est un dispositif dont la philosophie est vertueuse et louable puisqu’elle assure aux salariés brusquement privés d’emploi un revenu de remplacement leur permettant d’attendre dignement d’en retrouver un.
Le montant journalier brut de l’allocation d’aide au retour à l’emploi se situe autour de 57,4 % du salaire journalier de référence de celui qui se retrouve sans emploi, selon le mode de calcul le plus bénéfique.
Or il se trouve que cette allocation est versée alors même que la perte d’emploi peut résulter d’un licenciement pour motif personnel, y compris pour faute grave ou pour faute lourde, ou encore d’une mise à la retraite d’office, ce qui est une sanction très lourde.
Ainsi, ce dispositif, qui s’applique tant aux salariés du secteur privé qu’aux agents des fonctions publiques peut fort bien entraîner le versement d’indemnités à des agents licenciés par une collectivité locale qu’ils ont lésée financièrement. Ces faits entrainent des sanctions disciplinaires retenues par les conseils de discipline, où siègent les représentants du personnel, et sont même dans certains cas confirmés par les tribunaux administratifs.
Il n’est donc pas question ici de rumeurs ou de visions partiales : il s’agit bien d’actes graves et répétés, reconnus comme tels par les organes disciplinaires et juridictionnels.
Cette mauvaise gestion de l’argent public, souvent très pénalisante lorsque la collectivité est de petite taille, est ainsi aggravée par le versement d’indemnités à ses auteurs. Elle apparaît ainsi particulièrement choquante pour de nombreuses collectivités garantes de la bonne gestion des deniers publics.
Je souhaite, monsieur le secrétaire d'État, connaître votre sentiment sur cette question et savoir s’il vous semble opportun de revoir le système de l’allocation d’aide au retour à l’emploi, afin qu’il ne puisse pas bénéficier à des personnes ayant été reconnues coupables d’avoir lésé des collectivités publiques.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. André Santini, secrétaire d'État chargé de la fonction publique. Madame Giudicelli, la réglementation relative au chômage prévoit que toutes les personnes involontairement privées d’emploi peuvent prétendre aux allocations chômage. En effet, aux termes de l’article L. 5422-1 du code du travail, « ont droit à l’allocation d’assurance chômage les travailleurs involontairement privés d’emploi […], aptes au travail et recherchant un emploi qui satisfont à des conditions d’âge et d’activité antérieure ».
Les cas de perte involontaire d’emploi concernent toutes les formes de perte d’emploi qui ne résultent pas de la volonté manifeste de l’agent.
Le caractère volontaire ou involontaire du chômage est donc, en premier lieu, déterminé en fonction de l’auteur de la rupture du contrat de travail. Si elle incombe à l’employeur, le chômage est toujours considéré comme involontaire, même en cas de licenciement pour faute du salarié. En effet, les allocations pour perte d’emploi constituent un revenu de remplacement et non des indemnités de licenciement ; c’est pourquoi le versement de l’allocation chômage demeure possible. Ce dernier est dû en raison de l’activité antérieure effectuée.
Le versement ou non de l’allocation chômage n’a pas en effet pour objet de sanctionner à nouveau la personne. L’attribution de cette allocation est destinée à lui permettre de percevoir un moyen de subsistance, dans l’hypothèse où elle perd son travail et se trouve dans l’attente d’un nouvel emploi.
S’agissant de la sanction de l’agent, des dispositifs sont prévus à cette fin, notamment le licenciement pour insuffisance professionnelle ou pour motif disciplinaire ou, dans certains cas, la suppression de l’indemnité de licenciement.
En conséquence, tous les cas de licenciement, que ce soit pour insuffisance professionnelle ou pour faute disciplinaire, ouvrent droit au chômage.
S’agissant de la fonction publique, il convient de rappeler que, conformément aux dispositions du code du travail, notamment de son article L.5424-1, les agents publics ont droit à un revenu de remplacement, qui leur est attribué dans les mêmes conditions et selon les mêmes modalités qu’aux salariés du secteur privé.
Dans ce cadre, les modalités d’application du régime d’assurance chômage sont désormais définies par la convention chômage du 19 février 2009, applicable à compter du 1er avril 2009, qui se substitue à celle du 18 janvier 2001.
Cette nouvelle convention chômage ne modifie pas la réglementation antérieure. Ainsi, aux termes de l’article 2 du règlement général annexé à la convention chômage du 19 février 2009, « sont involontairement privés d’emploi ou assimilés les salariés dont la cessation du contrat de travail résulte […] d’un licenciement ».
Ces dispositions ont toujours été corroborées par le juge administratif, au plus haut niveau. Le Conseil d’État, dans son arrêt n° 97015, Ville de Marseille, du 25 janvier 1991 a notamment confirmé : « Les motifs disciplinaires ayant entraîné la perte d’emploi ne sont pas de nature à eux seuls à exclure le caractère involontaire de cette perte d’emploi. La révocation présentant un caractère définitif doit être considérée comme incluse dans les hypothèses possibles de perte involontaire d’emploi ouvrant droit au bénéfice de l’allocation chômage. »
Je ne suis pas sûr, madame le sénateur, d’avoir ainsi répondu à votre interrogation. (Sourires.)
M. le président. La parole est à Mme Colette Giudicelli.
Mme Colette Giudicelli. Si, monsieur le secrétaire d’État, vous avez bien répondu à ma question, et je vous en remercie.
Ma question concernait en fait essentiellement la fonction publique, dont le statut paraît parfois un peu trop protecteur, pour ne pas dire irritant. Était en cause le cas d’un fonctionnaire de cadre A, percevant un traitement important : il ne s’agissait pas d’un petit fonctionnaire de catégorie C. Force est de constater que, quelquefois, ce statut fait obstacle à l’équité. C’est pourquoi je m’étais engagée auprès d’un syndicat à soulever cette question. Certes, la plupart des fonctionnaires sont de grande qualité, mais il arrive que la fonction publique soit déshonorée par le comportement de certains.
coût d'entretien des monuments historiques
M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne, auteur de la question n° 557, adressée à Mme la ministre de la culture et de la communication.
M. Yves Détraigne. Monsieur le secrétaire d’État, malgré l’absence de Mme la ministre de la culture, je ne doute pas que vous vous soyez entretenu avec elle de la question que je voulais lui poser.
Je souhaitais attirer son attention et celle du Gouvernement sur les contraintes qui pèsent parfois sur une commune lorsqu'elle doit réaliser des travaux d'entretien ou de sauvegarde de ses bâtiments classés.
Récemment, un maire de mon département m'a fait part des soucis auxquels est confrontée sa municipalité qui doit d'urgence remettre en état, d'une part, la toiture de son église, qui est classée, et, d'autre, part, la couverture de la mairie.
Pour le premier monument, les Bâtiments de France ont indiqué à cet élu, cette année comme l’an dernier, que ce dossier, bien que prioritaire, ne pouvait être traité, les aides de l'État étant épuisées ; ce maire devra donc renouveler sa demande l'an prochain, c'est-à-dire pour la troisième année consécutive...
Quant à la mairie, elle n’est pas classée mais elle se trouve dans le périmètre protégé du fait de la présence de l'église, et l'architecte des Bâtiments de France refuse la solution la moins coûteuse, imposant à la municipalité le devis le plus onéreux au motif d'une « meilleure intégration dans le milieu proche ».
Inutile de dire que cette commune, qui compte exactement 173 habitants – j’ai vérifié ce chiffre ce matin ! –, n’est pas en mesure de faire face à ces dépenses.
Se trouve ainsi illustré une nouvelle fois le fait qu'il est plus aisé pour des élus locaux d'entretenir leur patrimoine municipal lorsque leur commune ne possède pas de monument classé et que la politique suivie par les Bâtiments de France conduit, hélas, bien souvent à repousser des travaux pourtant indispensables, au détriment de la conservation du patrimoine que l’on veut mettre en valeur.
Les municipalités ne peuvent pas comprendre pourquoi l'État impose, sans en assumer les conséquences financières, des décisions qui peuvent paraître arbitraires, se révèlent particulièrement coûteuses pour les collectivités et sont souvent négatives au regard même de la conservation du patrimoine.
De quelle manière le Gouvernement entend-il mettre fin à ce type de pratique qui, il faut en être conscient, n'est plus en phase avec la situation des finances publiques de l'État et des collectivités locales, qui handicape financièrement ces dernières et nuit à l'entretien de leur patrimoine ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la fonction publique.
M. André Santini, secrétaire d'État chargé de la fonction publique. Monsieur Détraigne, je souhaite, tout d’abord, vous présenter les excuses de Mme Albanel, qui ne pouvait être présente ce matin dans cet hémicycle.
Vous avez bien voulu appeler son attention, d’une part, sur un problème de financement de travaux sur un monument historique classé et, d’autre part, sur les prescriptions de l’architecte des Bâtiments de France concernant les travaux sur un bâtiment situé dans le périmètre d’un monument classé.
Le financement des chantiers de restauration des monuments historiques fait l’objet depuis plusieurs années de fortes fluctuations, oscillant, d’un exercice à l’autre, de 305 millions d’euros à 380 millions d’euros. Le Gouvernement, conscient des difficultés que rencontre actuellement le secteur des monuments historiques, a mis en place, depuis la fin de l’année 2008, plusieurs mesures budgétaires, de grande envergure, en faveur du patrimoine.
Conformément aux annonces faites par le Président de la République le 4 décembre dernier, le patrimoine est au cœur du plan de relance de l’activité économique : une enveloppe supplémentaire de 100 millions d’euros est ajoutée aux crédits alloués au ministère de la culture et de la communication dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2009.
Le Président de la République a également souhaité, dans son discours de Nîmes du 13 janvier 2009, que cette enveloppe exceptionnelle soit pérennisée à partir de 2010, permettant à la dotation budgétaire consacrée à la conservation des monuments historiques d’atteindre chaque année 400 millions d’euros
Pour 2009, dans le cadre du plan de relance, le ministère de la culture et de la communication a choisi d’aider des opérations répondant à des critères très stricts. Il a été décidé, en effet, de ne retenir que des opérations dont les études préalables et le projet de réalisation étaient prêts et qui peuvent, grâce aux crédits complémentaires, voir leur réalisation démarrer, s’accélérer ou s’achever en 2009.
Le dossier de la restauration des couvertures de l’église que vous évoquez ne répondait pas à l’ensemble de ces critères, notamment en ce qui concerne les délais de démarrage des travaux.
Il convient par conséquent que la commune propriétaire de cet édifice renouvelle sa demande à la direction régionale des affaires culturelles de la région Champagne-Ardennes pour sa programmation 2010.
Pour ce qui concerne les travaux aux abords d’un monument historique protégé, l’architecte des Bâtiments de France intervient dans le cadre de l’application des articles L. 621-31 et L. 621-32 du code du patrimoine. Il s’agit pour lui de vérifier qu’un projet de construction ou d’aménagement situé à moins de 500 mètres et dans le champ de visibilité d’un monument n’est pas de nature à porter atteinte à ce dernier en altérant le caractère ou la cohérence de son milieu environnant, que ce soit par son implantation, sa morphologie ou son aspect.
L’avis donné dans ce cadre par l’architecte des Bâtiments de France s’impose à la décision du maire. Une procédure de recours permet alors à l’autorité qui délivre l’autorisation ou au demandeur s’étant vu opposer un refus, de saisir le préfet de région.
La ministre de la culture et de la communication tient à affirmer son soutien au travail patient des architectes des Bâtiments de France sur le terrain pour préserver la qualité des espaces bâtis et paysagers et les abords de monuments. Elle est bien consciente, toutefois, que leurs décisions, qui se fondent sur des motivations architecturales et historiques, peuvent ne pas être toujours bien comprises.
Dans le cadre de la fusion des services départementaux et régionaux du ministère de la culture, elle a demandé aux directeurs régionaux des affaires culturelles de veiller à ce que les avis des architectes des Bâtiments de France soient discutés dans leurs principes de façon plus collégiale qu’actuellement et que le public puisse en être informé.
Enfin, d’une manière générale, investir dans la qualité architecturale et l’insertion harmonieuse des constructions récentes dans le tissu ancien constitue un effort profitable à tous et participe au maintien de l’attractivité de notre territoire.
M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse, bien qu’elle ne soit pas très satisfaisante. En effet, la vraie question est de savoir s’il ne serait pas opportun de modifier l’actuelle réglementation.
Certes, vous avez indiqué que la conservation et la mise en valeur du patrimoine constituaient une priorité pour le ministère de la culture et que, dans cette optique, les crédits avaient été augmentés. Or, hier, j’ai reçu de Mme Albanel un courrier m’informant que, compte tenu de cette augmentation, les halles du Boulingrin, situées dans la ville de Reims, allaient bénéficier d’une contribution de l’État, plafonnée à hauteur de 2,8 millions d’euros en autorisations d’engagement.
Ces halles ont été classées en 1990, alors que la municipalité de l’époque envisageait de les démolir. Année après année, les municipalités successives, contraintes de les conserver, ont demandé au ministère de leur attribuer des crédits. Et ce n’est qu’aujourd’hui, après dix-neuf ans, que les premiers crédits sont enfin disponibles !
Le maire de la commune de moins de 200 habitants que j’ai évoquée devra-t-il, lui aussi, attendre dix-neuf ans les crédits lui permettant de refaire la toiture de son église ? Et ce n’est qu’un exemple parmi des milliers d’autres ! Vous le savez bien, monsieur le secrétaire d’État, vous qui êtes maire d’Issy-les-Moulineaux.
Quels que soient les plans de relance envisagés, les limites du système sont atteintes ! J’appelle de mes vœux une remise à plat de la réglementation et son adaptation aux moyens financiers réels dont disposent l’État et les collectivités locales.
M. le président. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures quinze, est reprise à quinze heures cinq, sous la présidence de M. Jean-Claude Gaudin.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
5
Rappel au règlement
M. le président. La parole est à M. Raymond Vall, pour un rappel au règlement.
M. Raymond Vall. Monsieur le président, mes chers collègues, après la réunion du Congrès qui s’est tenue hier à Versailles, la chaîne de télévision Public Sénat a organisé un débat auquel étaient conviés les représentants des divers groupes politiques composant notre assemblée. Un seul groupe n’a pas été invité à participer à ce débat, le groupe RDSE, alors qu’il a été pourtant le seul groupe d’opposition à s’être exprimé au cours de cette réunion du Congrès.
Je vous demanderai donc de bien vouloir m’indiquer, monsieur le président, les raisons qui ont pu motiver cette exclusion.
M. le président. Mon cher collègue, je pense que M. le président du Sénat en référera au président de la chaîne Public Sénat et que cet oubli sera très vite réparé, avant même le prochain Congrès ! (Sourires.)
M. Raymond Vall. Je vous remercie, monsieur le président.
6
Débat sur les pôles d’excellence rurale
M. le président. L’ordre du jour appelle le débat sur les pôles d’excellence rurale.
La parole est à M. Jean Boyer, au nom du groupe Union centriste, auteur de la demande d’inscription à l’ordre du jour.
M. Jean Boyer. Monsieur le président – j’oserai dire : cher président ! –, ma fierté est accrue par la considération que je vous porte !
Monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des affaires économiques, cher Jean-Paul Emorine, mes chers collègues, l’idée des pôles d’excellence rurale, les PER, a été lancée en 2005, à la suite du vote de la loi relative au développement des territoires ruraux. Ce dispositif, mis sur pied par Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’économie et des finances, est le pendant, pour les territoires ruraux, des pôles de compétitivité destinés aux villes.
Ce dispositif avait pour ambition d’apporter élan et soutien aux projets émanant des territoires ruraux, de renforcer le rôle des collectivités locales et de développer des réseaux, au sein d’un territoire comme entre les territoires.
J’ai eu la chance d’être associé à cette aventure dès son début, puisque j’ai eu le privilège d’être nommé membre de la commission nationale de présélection. J’ai donc pu constater par moi-même, monsieur le secrétaire d’État, le formidable engouement que ce dispositif a suscité. Au total, 791 dossiers ont été déposés, dépassant ainsi les prévisions initiales, et 379 dossiers ont été retenus alors qu’il était prévu de n’en sélectionner que 300 – il est important de le reconnaître, car on nous accuse parfois de ne savoir que nous plaindre. Deux vagues de labellisation ont été nécessaires et le montant prévisionnel d’investissements s’élève, au total, à 1,2 milliard d’euros. À la fin de l’année 2008, seuls six projets de pôle d’excellence rurale avaient été abandonnés.
Alors que l’échéance fixée initialement pour l’engagement des crédits des pôles d’excellence rurale est atteinte, puisqu’il devait être achevé à la fin du mois de juin 2009, il me semble important d’établir un bilan exhaustif des premiers pôles d’excellence rurale. C’est pourquoi j’ai proposé, en accord avec mon groupe, la tenue d’un débat sur ce thème devant notre Haute Assemblée.
Une évaluation approfondie a été menée il y a déjà quelques mois pour le compte de la délégation interministérielle à l’aménagement et à la compétitivité des territoires, la DIACT, notamment par le conseil général de l’agriculture, de l’alimentation et des espaces ruraux. Le Sénat s’est également engagé dans cette réflexion, puisqu’un groupe de travail relatif aux pôles d’excellence rurale a été constitué au sein de la commission des affaires économiques, sous la présidence éminente de Rémy Pointereau. Il rendra ses conclusions d’ici à quelques mois et permettra, à la fois, d’établir un bilan exhaustif des deux premières vagues de labellisation et de proposer des voies d’amélioration pour les futures campagnes de labellisation. Nous avions également déjà débattu de cette question en 2007, à la demande du président Jean-Paul Emorine, et nous sommes aussi revenus sur cette problématique lors des discussions budgétaires : ce sujet est vaste et représente un enjeu d’importance primordiale pour nos territoires.
Avant tout, je souhaite insister sur mon attachement à l’appellation « excellence rurale ». Il est vraiment trop rare que l’adjectif rural soit associé à la notion d’excellence, or j’estime très important de reconnaître et de revendiquer l’excellence du monde rural, afin que ce terme ne soit pas seulement attaché aux réalisations du milieu urbain. Cela est d’autant plus important que les PER traduisent concrètement la priorité politique donnée aux zones de revitalisation rurale, les ZRR.
M. Jacques Blanc. Très bien !
M. Jean Boyer. Vous le savez sans doute tous, les ZRR sont caractérisées par une faible densité de population et connaissent un déclin de leur population totale ou active ou une forte proportion d’emplois agricoles. Monsieur le secrétaire d’État, je suis moi-même élu d’un canton totalement classé en ZRR et je partage la fierté des habitants de ces zones lorsqu’ils se voient décerner le label d’excellence rurale pour la réalisation d’un projet. Il est donc tout à fait essentiel de préserver cette appellation, même si des rapports d’experts ont allégué que certains projets manquaient justement d’excellence. Il suffit parfois d’un détail pour redynamiser une commune, motiver la population autour d’un projet, préserver des emplois : l’impact psychologique d’un tel label peut parfois faire la différence.
L’exemple de mon département – je ne veux pas faire preuve d’égoïsme en le citant, mais partir de mon expérience concrète – est à ce titre tout à fait représentatif, car il regroupe à lui seul sept pôles d’excellence rurale. Je prendrai comme exemple le PER de La Chaise-Dieu, nom connu au-delà des limites de notre département et qui représente bien ce que l’on a coutume d’appeler la « France profonde » : ce dispositif a permis la restauration et la valorisation d’un ensemble unique de bâtiments abbatiaux du XVIIe siècle, en en faisant un outil de développement local, culturel et touristique. Il a permis de développer l’attractivité du site en dehors de la période du festival de musique sacrée et de pérenniser ainsi des emplois.
Plus généralement, les PER constitués autour de la filière bois témoignent d’une remarquable réussite, qu’il s’agisse de l’utilisation du bois dans l’éco-construction ou du développement des énergies renouvelables.
Les apports de cette première vague de pôles d’excellence rurale ne sont donc plus à prouver – on a trop souvent tendance à oublier que les territoires ruraux sont des territoires attractifs, qui gagnent chaque année 50 000 habitants ! Cette première génération de PER a notamment permis de mettre en place une nouvelle dynamique, en accélérant certains projets et en faisant travailler ensemble des filières qui n’y étaient pas habituées. Ces pôles ont donné une ambition nouvelle et un projet structurant aux pays et leur ont apporté une image plus valorisante ; ils ont également favorisé le lancement effectif de projets en gestation, notamment sur les problématiques de patrimoine, car certains de ces projets n’auraient pas pu se réaliser sans les PER.
Au total, plus de 1 milliard d’euros d’investissements auront été réalisés à la fin de l’année 2009. On constate d’ores et déjà la création de 6 000 emplois directs et on estime à 30 000 le nombre total d’emplois créés ou maintenus à l’issue de l’opération. Enfin, si vingt-deux PER peuvent être considérés comme abandonnés, 357 sont engagés à ce jour.
En termes qualitatifs, les résultats sont également positifs. La création d’emplois a sans doute été assez limitée – restons francs et objectifs ! –, mais les PER ont véritablement contribué à la stabilisation des emplois qui existent en zone rurale. Des projets d’investissement se trouvaient manifestement en attente dans le monde rural sur les thématiques de l’appel à projets. De plus, les territoires ruraux connaissent aujourd’hui un réel regain d’attractivité : en cette période de crise, ils sont le siège d’une contribution essentielle à la croissance durable de notre pays. Le Président de la République a d’ailleurs rappelé hier, devant le parlement réuni en Congrès, la nécessité de poursuivre les actions en faveur du monde rural, qui joue un rôle de plus en plus important dans notre société.
Les PER ont également changé notre façon de travailler sur le terrain. Tout d’abord, les élus ont dû travailler ensemble, ce qui est toujours très positif. De même, la nécessité de réunir acteurs privés et publics autour d’un même projet a été enrichissante, même si les méthodes de travail sont très différentes.
Enfin, les pôles sont organisés autour de quatre grandes thématiques, définies par l’appel à projets : la valorisation des patrimoines naturels et culturels, la valorisation des bio-ressources, le développement des services et de l’accueil, ainsi que la diffusion des technologies au bénéfice des entreprises.
Ces thématiques sont tout à fait pertinentes et elles ont permis le développement d’un grand nombre de projets. Dans le seul département de la Haute-Loire, les PER couvrent l’intégralité des thématiques de l’appel à projets.
Dans son bilan, le conseil général de l’agriculture, de l’alimentation et des espaces ruraux souligne que ces thématiques, qui ne sont pas encore obsolètes, doivent être maintenues. Je partage tout à fait cet avis, même s’il me semble important de les ajuster et de donner plus de place aux services à la personne, comme les maisons médicales.
Lors de l’examen du projet de loi « Hôpital, patients, santé, territoires », nous avons eu l’occasion de débattre de la désertification médicale en zone rurale. Pour maintenir ou restaurer l’attractivité du monde rural, il est indispensable de proposer une offre de soins de qualité sur l’ensemble du territoire.
Pour toutes ces raisons, je souhaite qu’il y ait une nouvelle génération de PER et que ce dispositif soit pérennisé.
Vous avez indiqué, monsieur le secrétaire d’État, qu’un nouvel appel à projets pour les pôles d’excellence rurale pourrait être lancé en 2009 avec l’objectif de soutenir des projets de mutualisation de services publics innovants.
Ce thème ne serait pas le seul. Le Premier ministre avait déjà évoqué le thème de l’agroalimentaire, lors de l’inauguration du 22e SPACE 2008 à Rennes au début du mois de septembre, et, dans le cadre de l’application du Grenelle de l’environnement, les aspects de développement durable et d’énergie renouvelable devraient eux aussi trouver leur place.
Ces objectifs répondent à des priorités de l’action publique en milieu rural, notamment en ce qui concerne l’accès aux services en zone rurale.
Vous avez annoncé à plusieurs reprises que, préalablement au lancement d’un nouvel appel à projets pour les pôles d’excellence, les crédits alloués à la première vague devraient être utilisés en totalité. Pourrez-vous tout à l’heure, monsieur le secrétaire d'État, nous indiquer à quel niveau nous sommes aujourd’hui ?
Monsieur le secrétaire d’État, nous le savons, vous avez apporté – et ce n’est pas un propos de circonstance - beaucoup d’investissements en faveur du monde rural.
M. Jacques Blanc. Effectivement ! C’est un bon ministre !
M. Jean Boyer. À votre nom est attachée l’attention que vous portez à nos territoires, je le dis en toute sincérité.
MM. Jean-Pierre Raffarin et Jacques Blanc. C’est vrai !