PRÉSIDENCE DE M. Roger Romani
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi portant réforme de l’hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de l’article 26, à l’amendement n° 1316.
Cet amendement, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Au début du troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1435-1 du code de la santé publique, supprimer les mots :
Sous son autorité,
La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je n’ignore pas que, dans un premier temps, cet amendement a reçu un avis défavorable de la commission.
Je souhaite néanmoins le défendre devant la Haute Assemblée et apporter un complément d’information.
M. François Autain. Diabolicum perseverare !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Mais c’est en cela que consiste un vrai débat parlementaire, monsieur Autain ! Il s’agit non pas de camper sur ses positions, mais d’avancer, en commission, en séance, dans le débat. Bien souvent, M. le rapporteur m’a convaincue, et je ne renonce pas à faire de même à mon tour !
M. Alain Milon, rapporteur. Vous m’avez convaincu bien souvent aussi ! (Sourires.)
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. J’ai d’ailleurs recueilli des éléments supplémentaires qui nourriront notre débat.
Le texte adopté par la commission insiste à juste titre sur la nécessaire coordination des services de l’agence régionale de santé et de ceux de l’État. Cela doit en effet permettre de réduire les risques pour la santé liés au milieu.
Il souligne par ailleurs le rôle majeur des services communaux d’hygiène et de santé dans ce domaine. Il n’était pas inutile de rappeler le besoin de coordination entre ces services. C’est en effet grâce à des approches complémentaires que nous obtiendrons les meilleurs résultats en matière de salubrité et d’hygiène publiques.
Je salue également l’initiative de la commission qui a mis en évidence le rôle majeur des services communaux d’hygiène et de santé en matière de prévention des risques sanitaires.
Ces coordinations et ces collaborations entre ces services sont évidemment indispensables – nous en sommes tous convaincus –, mais tout cela doit pouvoir s’établir dans la clarté et la totale transparence des compétences et des responsabilités de chacun.
À cet égard – et je me tourne vers M. le rapporteur, M. le président de la commission et les membres de cette dernière –, le texte proposé pour le troisième alinéa de l’article L. 1435-1 – « Sous son autorité, les services de l’agence et les services de l’État […] » – introduit une ambiguïté.
Je vous renvoie d’ailleurs aux discussions que nous avons eues tout au long du débat, cet après midi. L’ensemble des intervenants, quelles que soient les travées sur lesquelles ils siègent, ont insisté pour que la santé environnementale fasse bien partie du paquet de responsabilités de l’ARS, et ils ont réaffirmé leur volonté à travers un certain nombre d’amendements. En effet, comment la santé environnementale pourrait-elle ne pas relever de la structure au sein de laquelle se décident les politiques de santé ?
Cela s’inscrit dans la réforme des agences qui vise à nous doter d’une administration de la santé capable de définir et de conduire une approche globale des questions de santé, la santé dépendant d’un ensemble de facteurs et de déterminants sur lesquels il convient d’agir pour être plus efficace.
Chacun le reconnaît maintenant, et nombre d’entre vous, d’ailleurs, n’ont pas attendu le Grenelle de l’environnement pour me le rappeler : les questions de santé environnementale sont tout à fait majeures.
M. Guy Fischer. C’est bien vrai !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Nous avons donc voulu que les missions et les moyens des services déconcentrés du ministère de la santé, la DDASS, la direction départementale des affaires sanitaires et sociales, et la DRASS, la direction régionale des affaires sanitaires et sociales, fassent partie, dans leur intégralité, des ARS, dès lors que ces missions portaient sur des sujets de santé humaine. Cela concerne bien sûr aussi les services santé-environnement.
Simultanément – c’est peut-être de là que vient la confusion que nous avons mentionnée –, le texte proposé pour le deuxième alinéa de l’article L. 1435-1 – c’est le texte du projet de loi, non modifié par la commission – prévoit que le préfet dispose « à tout moment des moyens de l’agence » au niveau régional, et pas seulement départemental, « pour l’exercice de ses compétences ».
Le préfet est comptable de l’ordre public, il a besoin de puiser dans la capacité d’expertise de l’ARS pour exercer ses missions au service de l’ordre public. Et Dieu sait si les questions environnementales peuvent être au cœur des missions d’ordre public ! Je pense notamment aux grandes catastrophes environnementales. Pour avoir été élue député dans une circonscription qui compte des zones considérées comme inondables, je connais cette question. Dans de telles circonstances, le préfet a besoin de la capacité d’expertise des ARS.
Par conséquent, la santé environnementale doit faire partie des missions de l’ARS, mais le préfet de département, responsable de l’ordre public, doit pouvoir puiser dans les capacités d’expertise de l’agence régionale de santé. Cette dernière étant un établissement public, ses services ne sauraient être placés sous l’autorité directe du préfet du département, sauf bien sûr en cas de crise ou de menace à l’ordre public,…
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Bien sûr !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. … où il ne peut y avoir qu’un seul chef de file, le préfet. Voilà la difficulté qu’il nous faut résoudre.
C’est sur la base de ce schéma que mes services et ceux du ministère de l’intérieur travaillent en étroite collaboration depuis plusieurs mois. En effet, cette organisation n’était pas facile à gérer ; elle pouvait être source d’ambiguïtés et, parfois, de querelles de chapelles.
Le maintien du terme « autorité » pour qualifier les relations de l’ARS avec les préfets, même réduites aux actions coordonnées, remettrait en cause l’ensemble de cet équilibre et serait mal compris par l’ensemble des personnels concernés qui travaillent depuis plusieurs mois à la mise en place de cette nouvelle organisation.
Je peux vous le dire en leur nom, les personnels souhaitent que la santé environnementale relève de la responsabilité sanitaire des agences régionales de santé.
L’amendement n° 1316 vise à rétablir clairement l’autorité du directeur de l’ARS sur ces services, en dehors des situations de crise ou de menace à l’ordre public, tout en conservant la mention d’une nécessaire coordination à établir entre les services de l’agence régionale de santé et ceux de l’État, et en rappelant le rôle éminent joué par les services communaux d’hygiène et de santé.
Voilà, monsieur le rapporteur, la clarification que je souhaitais apporter. Lors de l’examen du texte en commission, je n’ai pas dû être suffisamment explicite quant à cette dualité.
M. François Autain. Sûrement !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. D’un côté, certains ne raisonnent qu’en termes de santé et souhaitent donc que cela relève des ARS. D’un autre côté, ceux qui raisonnent en termes de crise veulent que cela ressortisse à l’État.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien ! C’est très clair !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. L’amendement que je vous propose permet de sortir de cette difficulté par le haut.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Il y a eu en effet une confusion au niveau de la commission.
Madame la ministre, je souhaite revenir sur les trois alinéas du texte proposé pour l’article L. 1435-1 afin d’expliquer, en particulier aux membres de la commission, ce que vous venez de rappeler.
Le premier alinéa – « Le directeur général de l’agence régionale de santé et de l’autonomie informe sans délai le représentant de l’État territorialement compétent […] » – ne pose pas de problème.
Le deuxième alinéa fait référence à « l’exercice de ses compétences dans les domaines sanitaire et de la salubrité et de l’hygiène publiques », en cas de trouble à l’ordre public. Dans ce cas, c’est « le représentant de l’État territorialement compétent », c’est-à-dire le préfet du département, qui « dispose à tout moment des moyens de l’agence ».
Quant au texte proposé par la commission pour le troisième alinéa, il débute, d’une manière peut-être un peu malencontreuse, par les mots : « Sous son autorité ». Pour certains, il s’agissait de l’autorité du directeur de l’ARS, pour d’autres, de l’autorité du préfet départemental !
Or, il s’agit en réalité de l’autorité du directeur de l’ARS et non pas de celle du préfet départemental.
L’avis de la commission sur l’amendement n° 1316 rectifié devient donc favorable. On pourrait d’ailleurs préciser les choses avec la rédaction suivante : « Sous l’autorité du directeur de l’ARS, les services de l’agence […] ». Il n’y aurait alors plus aucune confusion. (Mme Roselyne Bachelot-Narquin acquiesce.)
M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.
M. François Autain. Monsieur le rapporteur, nous avons assisté à la même réunion de commission. Mais nous souhaitions tous, me semble-t-il, préciser l’autorité dont il est question dans le texte proposé pour le troisième alinéa de l’article L. 1435-1.
Certains d’entre nous avaient proposé que l’on indique : « Sous l’autorité de ce dernier ».
Pour ma part, je n’avais pas compris qu’il s’agissait de l’autorité du directeur général de l’agence régionale de santé, et je pensais que c’était celle du préfet.
M. François Autain. L’ambiguïté est donc bien réelle, et c’est pourquoi la précision est nécessaire.
M. François Autain. Mais la suppression des mots : « Sous son autorité » ne permet pas pour autant de lever l’ambiguïté.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Monsieur Autain, je souhaite évidemment que les mots : « Sous son autorité » fasse référence au directeur général de l’ARS.
Toutefois, le texte proposé pour le troisième alinéa de l’article L. 1435-1 du code de la santé publique se poursuit ainsi : « […] les services de l’agence et les services de l’État mettent en œuvre les actions coordonnées nécessaires […]. » Or nous ne pouvons placer les services de l’État sous l’autorité du directeur général de l’ARS !
M. Michel Mercier. Oui, d’autres textes législatifs s’y opposeraient !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. J’en reste donc à la rédaction que je vous ai proposée : « Les services de l’agence » – bien sûr sous l’autorité du directeur général de l’ARS – « et les services de l’État » – à l'évidence placés sous l’égide du préfet – « mettent en œuvre les actions coordonnées nécessaires […]. »
Monsieur le rapporteur, aucune confusion n’est possible, à mon avis, ou alors il faut réécrire complètement l’amendement.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Il doit être clair pour tous que les services ne seront pas placés sous l’autorité du directeur général de l’agence, car nous ne pouvons inscrire dans la loi une telle disposition. À l’évidence, seul le préfet pourra coordonner les actions, mais on ne veut pas le dire…
M. le président. La parole est à M. François Autain.
M. François Autain. Si j’ai bien compris, nous supprimons les mots : « Sous son autorité », les actions étant donc mises en œuvre par « les services de l’agence », dont nous sous-entendons qu’ils sont placés sous l’autorité du directeur général de l’ARS, et par « les services de l’État », dont nous sous-entendons qu’ils sont placés sous l’autorité du préfet ?... (Mme la ministre et M. le président de la commission des affaires sociales acquiescent.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1316.
(L'amendement est adopté à l’unanimité des présents.)
M. Guy Fischer. La soirée commence bien ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 1293, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le septième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1435-1 du code de la santé publique :
« L'agence est associée à l'élaboration et à la mise en œuvre des programmes d'action prévus par l'article 1er de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, dans le domaine de la santé.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. L’Assemblée nationale a introduit dans le présent projet de loi une disposition donnant à l’agence régionale de santé compétence pour signer le volet sanitaire des contrats urbains de cohésion sociale, que certains appellent les CUCS mais qu’il faut bien distinguer des contrats d’union civile et sociale…
Ces contrats sont conclus avec les collectivités locales pour le développement social et urbain des quartiers relevant de la politique de la ville. Ils intègrent le plus souvent des dispositions visant à favoriser l’accès aux soins et à développer la prévention en faveur des populations vivant dans ces quartiers socialement défavorisés. Je salue au passage le très bon travail qui est réalisé dans ce cadre.
Cette disposition est tout à fait pertinente, me semble-t-il. Je souhaite donc non pas la remettre en cause, mais seulement l’amender, dans un souci de cohérence juridique.
En effet, ces CUCS ne relèvent pas du domaine de la loi ; ils font partie des programmes d’action dans les zones urbaines sensibles – c’est le débat qui nous a animés tout à l'heure sur les structures et les chaînes de responsabilité – prévues à l’article 1er de la loi du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine.
Pour rendre cette disposition plus conforme à l’état du droit existant, je vous propose donc, mesdames, messieurs les sénateurs, un amendement rédactionnel tendant à substituer à la référence aux CUCS un renvoi général aux programmes d’action prévus à l’article 1er de la loi précitée.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Cette proposition ne devrait pas susciter de débats philosophiques, sauf peut-être de la part de M. Mercier ! (Sourires.)
M. Michel Mercier. Ne me cherchez pas, madame la ministre ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Il s'agit véritablement d’un amendement rédactionnel, sur lequel la commission a émis un avis favorable.
M. le président. L'amendement n° 1317, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Avant le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1435-1 du code de la santé publique, insérer un alinéa ainsi rédigé : « Pour les matières relevant de ses attributions au titre du présent code, le représentant de l'État dans le département peut déléguer sa signature au directeur général de l'agence régionale de santé. Le directeur général peut, sauf pour les matières exclues par la décision de délégation, subdéléguer sa signature à des agents placés sous son autorité. Le représentant de l'État peut mettre fin à tout ou partie d'une subdélégation.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Cette fois encore, j’ai conscience que la commission a déjà émis un avis défavorable sur cette disposition. Et comme pour l’amendement n° 1316, je voudrais argumenter et m’expliquer de nouveau ; ainsi serai-je peut-être mieux comprise.
Cet amendement a pour objet de permettre au préfet de déléguer sa signature au directeur général de l'agence régionale de santé pour les mesures de police sanitaire.
Vous me demanderez, mesdames, messieurs les sénateurs, s’il ne s’agit pas là d’une disposition sans importance ou purement rédactionnelle.
En réalité, il faut bien mesurer que le présent projet de loi inclut la santé environnementale dans le champ des missions de l’ARS – nous poursuivons là, finalement, le débat que nous menions voilà un instant – et transfère à cette agence les personnels qui travaillent aujourd'hui sur ces questions, c'est-à-dire, pour le dire clairement, les agents des DDASS et des DRASS.
Par ailleurs, la compétence du préfet de département pour les décisions de police administrative reste inchangée. Il est donc utile de prévoir – une telle disposition ne figure pas dans le texte, dans sa rédaction actuelle – que les préfets pourront déléguer leur signature aux directeurs des ARS, comme ils le font aujourd'hui au bénéfice des directeurs des DDASS et des DRASS.
Cette mesure permettra de simplifier les procédures et d’assurer une meilleure réactivité des pouvoirs publics, en particulier en cas de crise, puisque les DDASS seront désormais incluses dans les ARS, notamment pour toutes les questions relatives à la consommation humaine d’eau, au contrôle des piscines ou des baignades ou à la lutte contre l’habitat insalubre.
À titre d’exemple, je rappellerai que la seule notification commune des résultats du contrôle sanitaire de l’eau potable représente en moyenne, pour un département, quelque 3 000 actes, et donc 3 000 signatures !
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous comprenez pourquoi les préfets donnent délégation aux directeurs des DDASS ! Imaginez l’encombrement des services de l’État, et la lenteur des procédures qui en découlerait, si, alors que les missions des DDASS sont reprises par les ARS, vous ne permettiez pas aux préfets de déléguer leur signature aux directeurs des agences ! Et au final, ce seraient les communes et leurs administrés qui seraient pénalisés !
Pis, dans ces matières, qu’il s’agisse de la consommation d’eau, du contrôle des baignades ou de la salubrité de l’habitat, il est souvent nécessaire de prendre des mesures d’urgence. L’encombrement des services de l’État nuirait considérablement aux populations que nous cherchons à protéger. À l’évidence, aucun délai ne doit s’intercaler entre la signature et l’application des actes de police qui sont nécessaires à la protection de chacun.
Telles sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les précisions que je souhaitais apporter s'agissant de cette nécessaire délégation de signature. Mon objectif est de garantir le bon fonctionnement des services de l’État, mais aussi de veiller à la protection des populations. Et sans doute ne m’étais-je pas suffisamment expliquée sur ce point devant la commission.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Cette fois, la commission a du mal à se laisser convaincre par les explications de Mme la ministre. (Exclamations amusées sur les travées du groupe CRC-SPG.).
D'une part, les mécanismes de la délégation de signature du préfet ne relèvent pas de la loi, nous semble-t-il.
D'autre part, le texte que vous présentez, madame la ministre, prévoit que le préfet « peut déléguer » sa signature. Est-il bien utile de préciser dans le projet de loi ce point, qui, à la rigueur, est évident ? C’est une question que nous nous posons, d’autant qu’il existe un véritable problème de compétence entre le ministère de l’intérieur, qui gère les préfets, et le ministre de la santé, qui s’occupe des ARS.
La commission avait émis sur cet amendement un avis défavorable, que je maintiens pour l’instant.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Monsieur le rapporteur, si je vous ai bien compris, et sans vouloir me faire l’exégète de vos propos, vous vous interrogez non pas sur la disposition prévue au fond par cet amendement, mais sur le respect de la hiérarchie des normes : est-il nécessaire de passer par la loi, ou une mesure règlementaire suffirait-elle ?
Précisément, nous avons fait procéder à une analyse juridique. L’ARS étant un établissement public, une mesure législative est bien nécessaire. En outre, le ministère de l’intérieur nous a demandé d’inscrire cette disposition dans la loi, faute de quoi un véritable problème se poserait.
Monsieur le rapporteur, je n’étais pas capable de vous apporter cet élément juridique lors de l’examen du texte en commission, mais je puis le faire à présent ! (Ah !sur les travées du groupe CRC-SPG.)
M. Alain Milon, rapporteur. Dans ce cas, la commission émet un avis favorable.
M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote.
M. Michel Mercier. Je comprends bien l’objectif de Mme la ministre, mais l’amendement qui nous est soumis présente, me semble-t-il, une incongruité juridique.
M. Michel Mercier. Si, madame la ministre, et je vais m’en expliquer !
Le préfet peut sans problème déléguer sa signature au directeur général de l’ARS, mais ce dernier ne peut subdéléguer la signature qu’il a reçue aux agents placés sous son autorité. Il faudrait, pour ce faire, que l’arrêté du préfet prévoie que la signature est déléguée au directeur de l’ARS et, en son absence, aux agents placés sous son autorité, en indiquant lesquels.
En revanche, il est impossible que le bénéficiaire d’une délégation subdélègue la signature qu’il a reçue. Or c’est malheureusement ce que prévoit cet amendement.
Je souhaitais relever cette incongruité juridique, afin que ce texte soit parfait.
M. Guy Fischer. Quel orfèvre, ce M. Mercier ! (Sourires.)
M. Michel Mercier. Il serait donc nécessaire de rectifier l’amendement afin de le rédiger ainsi : « […] le représentant de l’État dans le département peut déléguer sa signature au directeur général de l’agence régionale de santé et, en son absence, à des agents placés sous son autorité ».
M. le président. Madame la ministre, que pensez-vous de la suggestion de M. Mercier ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. La rédaction proposée par M. Mercier me convient tout à fait. Par conséquent, je rectifie en ce sens l’amendement du Gouvernement, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 1317 rectifié, présenté par le Gouvernement, et ainsi libellé :
Avant le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 1435-1 du code de la santé publique, insérer un alinéa ainsi rédigé : « Pour les matières relevant de ses attributions au titre du présent code, le représentant de l'État dans le département peut déléguer sa signature au directeur général de l'agence régionale de santé et, en son absence, à des agents placés sous son autorité.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 960, présenté par MM. Autain et Fischer, Mmes David, Hoarau, Pasquet et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 1435-1 du code de la santé publique par un alinéa ainsi rédigé :
« En vue de l'accomplissement de ses missions, l'agence peut être saisie dans des conditions prévues par décret en conseil d'État, par le ministre en charge de la santé, par tout autre ministre, par les établissements publics de l'État et par les organismes siégeant au sein de son conseil d'administration. Elle peut également être saisie par les associations agréées dans les domaines de la protection de la santé, de l'environnement, de la défense des consommateurs, ainsi que par les associations d'aides aux victimes du travail ou des maladies professionnelles.
La parole est à M. François Autain.
M. François Autain. Compte tenu de l'importance des prérogatives confiées aux agences régionales de santé, il nous semble utile de fixer les modalités de l’éventuelle saisine de ces dernières.
En outre, il nous paraît légitime d’ouvrir ce droit de saisine aux associations, comme il est d’usage de le faire dans les domaines de la santé publique et de la sécurité sanitaire, que ce soit auprès de l’Agence de la biomédecine, de la Haute autorité de santé et de l’Agence française de sécurité sanitaire, de l’environnement et du travail.
Tel est l’objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Guy Fischer. Sans commentaire…
M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.
M. François Autain. Monsieur le rapporteur, madame la ministre, je n’ai pas vraiment été convaincu par vos arguments, même si je dois reconnaître qu’ils étaient particulièrement riches ! (Rires.) Pourrai-je disposer d’un peu plus d’éléments ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. J’ai toujours clairement indiqué à Mmes et à MM. les sénateurs que, lorsque j’émets un avis défavorable, je le fais sous le bénéfice des explications complémentaires que je suis toujours prête à leur fournir s’ils me les demandent.
M. Guy Fischer. Ah !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je le redis à M. Autain, comme je l’ai dit tout au long des débats.
Vous proposez, monsieur le sénateur, qu’un décret en Conseil d’État précise les modalités de saisine de l’ARS par les ministres intéressés, les établissements publics de l’État, les organismes siégeant au conseil de surveillance et les associations agissant en faveur de la santé, des patients ou des consommateurs.
Dans ce domaine, la vocation de l’agence sera avant tout de rassembler les capacités d’expertise en santé humaine nécessaires à l’organisation de la veille et de la surveillance sanitaires. À ce titre, la loi dispose – nous en avons d’ailleurs parlé avant la suspension de séance, à l’occasion de l’examen d’un amendement défendu par Mme Voynet, je crois – que l’agence saisira les agences de sécurité sanitaire des situations pouvant requérir leur action. L’agence pourra également diffuser ses compétences, notamment auprès des collectivités locales, dans le cadre de la commission de coordination consacrée aux actions de prévention.
S’agissant des associations de patients, celles-ci sont représentées au conseil de surveillance de l’agence et seront donc appelées à en examiner la stratégie. Elles participeront aux travaux de la conférence régionale de santé et de l’autonomie ; nous en avons également parlé. Elles pourront aussi intervenir sur tout sujet de leur choix.
L’ARS devra présenter les résultats de ses actions devant ces instances et indiquer les suites données à leurs avis.
Comme vous le constatez, nous sommes déjà en présence d’un système assez complexe d’avis, de consultation, de concertation, de procédures d’information avec les associations et les partenaires publics, qu’ils relèvent de l’État et de ses établissements publics ou bien des collectivités locales.
Dès lors, l’alinéa qu’introduirait votre amendement ne me paraît pas nécessaire. Oui, monsieur Autain, les ARS pourront bien entendu être saisies par les uns et par les autres ! Oui, les temps d’échange et de dialogue seront nombreux !
Et je l’avoue franchement, je peine à comprendre cette religion du décret en Conseil d’État. Chacun a…