M. le président. L'amendement n° 371, présenté par MM. Autain et Fischer, Mmes David, Hoarau, Pasquet et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Au travers de cet amendement de suppression, les sénatrices et sénateurs du groupe CRC-SPG entendent s’opposer à ce qui s’apparente à une privatisation, à terme, de notre service public hospitalier.
Madame la ministre, avant le passage du texte en commission et la réécriture complète de l’article 13, vous nous proposiez de privatiser les hôpitaux eux-mêmes, en autorisant des groupements dont feraient partie des établissements publics, privés non lucratifs et commerciaux, à recevoir la qualification d’établissements publics de santé.
Toutefois, ce recul ne nous fait pas oublier le maintien d’autres dispositions tout aussi dangereuses, comme l’encouragement du recours aux cliniciens hospitaliers, l’instauration d’éléments de rémunération variable et de critères quantitatifs, la suppression du conseil d’administration, remplacé par un conseil de surveillance directement inspiré du privé, enfin, bien sûr, cet article 1er, qui confère aux établissements commerciaux les missions actuellement exercées par les services publics hospitaliers.
Cette mesure s’inspire, bien sûr, des réformes menées par les gouvernements libéraux des autres pays, à commencer par les États-Unis et, plus près de chez nous, l’Allemagne, où nous nous sommes d'ailleurs rendus.
Ce dernier pays connaît, depuis les années 1990, un mouvement de privatisation, qui s’est considérablement amplifié depuis les années 2000. Cette tendance a accompagné une réforme d’ampleur relative au financement des hôpitaux, appelée outre-Rhin diagnosis related grouping, qui est en réalité très proche de la tarification à l’activité.
Or ce mode de financement a eu pour conséquence une aggravation des déficits des établissements publics de santé allemands, conduisant les autorités fédérales à privatiser les hôpitaux. Mes chers collègues, les mêmes causes produisant les mêmes effets, convenez qu’il y a de quoi s’inquiéter !
Au surplus, les grands gagnants de cette ouverture du système hospitalier public allemand ont été d’abord et surtout les cliniques privées lucratives qui, en 2006, représentaient 27 % des établissements de santé, contre 14,8 % en 1991. Les hôpitaux publics, quant à eux, ne comptent plus, aujourd’hui, que pour 34 % des établissements de santé.
Cette privatisation, outre qu’elle réalise un transfert des biens collectifs, fruits de l’impôt et des cotisations sociales, en direction des intérêts privés, autrement dit un déplacement de la richesse commune vers les richesses individuelles, s’est traduite en Allemagne, comme ce sera inéluctablement le cas dans notre pays, par une dégradation de la qualité du système hospitalier. En effet, ce que visent les actionnaires des groupes privés de santé, c’est d’abord et avant tout la rentabilité !
À titre d’exemple, toujours en Allemagne, dans les établissements privés commerciaux, la masse salariale a diminué de 9 % en moins de dix ans, alors que la quantité de travail, en raison du transfert de missions de service public, de l’envolée actuelle de la pauvreté en Allemagne et de l’apparition de clients supplémentaires a, quant à elle, explosé. Conséquence de cette évolution, l’index de satisfaction des patients s’est clairement détérioré !
Mes chers collègues, je vous invite, si vous souhaitez en savoir plus, à lire le très instructif article du docteur Nicolas Daly-Schveitzer, médecin cancérologue-radiothérapeute à l’institut Gustave Roussy de Villejuif et professeur des universités.
Au final, la privatisation des missions de service public que vous êtes en train de réaliser, madame la ministre, jouera contre l’intérêt des malades et de la santé publique. Cette logique politique de libéralisation vise d’abord, et surtout, à déstructurer le modèle social de notre pays, à « marchandiser » tous les pans d’une économie qui reposait avant tout sur la solidarité, quitte à satisfaire, contre les intérêts de la majorité, les intérêts financiers de ceux qui jouent la santé en bourse.
C’est pourquoi l’article 1er, véritable socle de ce projet de loi, mérite d’être supprimé : de toute évidence, son adoption conduirait inéluctablement – certes pas du jour au lendemain, car de telles réformes s’appliquent sur une décennie, voire plusieurs – à une privatisation de la santé.
Les grands groupes à capitaux étrangers sont en embuscade. Maintenir cet article reviendrait donc à ouvrir la porte à la Compagnie générale de santé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Je voudrais rendre hommage au groupe CRC-SPG – cela ne m’arrivera pas souvent au cours de ces débats – pour sa logique et sa constance. En effet, comme nous le verrons, il a déposé sur chaque article du projet de loi un amendement de suppression. Avec la même logique et la même constance, la commission des affaires sociales a émis un avis défavorable sur ces amendements de suppression. D’autant que, s’agissant de l’article 1er, il ne privatise en rien l’hôpital public. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. - Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Mais si !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. J’émets le même avis que M. le rapporteur. J’ai déjà longuement argumenté sur ce point dans mes propos liminaires.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Nous ne nous laisserons pas abattre comme cela ! (Exclamations amusées sur les travées de l’UMP.)
M. Adrien Gouteyron. Qu’est-ce qui peut abattre M. Fischer ? (Sourires.)
M. Guy Fischer. Madame la ministre, c’est un constat : depuis plus de trente ans, et particulièrement ces dix dernières années, les hôpitaux publics français s’inspirent du mode de gouvernance et de gestion des établissements privés lucratifs, et nous l’admettons.
Pour ceux qui dirigent les hôpitaux, il ne s’agit pas réellement d’un choix, car ils obéissent aux directives données par un pouvoir politique toujours plus préoccupé par la rentabilité et, d’une manière générale, par la diminution des dépenses publiques, donc des coûts hospitaliers.
Ce mouvement n’est pas propre à la France : il est européen. Il est logique, dès lors que l’on mesure ces réformes à l’aune des politiques libérales qui sont partout menées. D'ailleurs, M. About, président de la commission des affaires sociales, ainsi que M. Vasselle, qui suit les questions hospitalières, nous ont fait accomplir un véritable tour d’Europe pour nous permettre de connaître la situation de ces établissements.
Partout, émerge un principe nouveau : la corporate gouvernance, c'est-à-dire l’art de gouverner les établissements publics de santé comme des entreprises !
Pour mémoire, certains hôpitaux allemands, anciennement publics, sont aujourd’hui constitués sous forme sociétale. On constate également, partout en Europe, que certains services sont externalisés et que le secteur privé commercial se trouve associé au public dans différentes formules de coopération, quand on ne lui confie pas, tout simplement, la gestion à part entière d’un hôpital.
Pour appliquer votre politique de rigueur dans les hôpitaux, vous procédez à une décentralisation des régimes de santé et des services publics, comme en Allemagne, au Portugal ou en Angleterre, où a été menée une réforme du NHS, le National Health Service.
Toutefois, ce transfert, s’il vous permet de vous dégager de vos responsabilités, vous permet aussi, et c’est là tout votre talent, de renforcer le rôle du Gouvernement dans la gestion des hôpitaux et dans la diminution des dépenses : d'une part, vous comprimez les dépenses hospitalières et, d'autre part, vous jouez sur la gestion des risques qui, avec ce projet de loi, passe de l’UNCAM aux directeurs des agences régionales de santé, autant dire à votre administration, madame la ministre. Nous assistons à une étatisation régionalisée de la santé !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Non ! La réforme est menée dans un cadre national !
M. Guy Fischer. Comme avec les universités, pour parvenir à vos fins, vous jouez la carte de l’autonomie, qui est censée conférer plus de force aux établissements.
Toutefois, pour vous comme pour vos amis européens, les Merkel, Berlusconi et consorts, tous tenants du nouveau management public, la décentralisation politique doit s’accompagner de réformes en matière d’organisation, qui sont consacrées ici par la T2A, la convergence tarifaire et le démantèlement du service public hospitalier.
Ces réformes interviennent en trois étapes.
La première vise à développer l’autonomie : c’est l’application de la T2A, notamment.
La deuxième phase des projets européens de privatisation, c’est la transformation de la notion d’administration : l’hôpital devient une entreprise paraétatique, où toutes les règles de gouvernance et de rentabilité s’appliquent. Nous sommes au cœur de cette étape ! Il s'agit d’une véritable opération de soumission des établissements publics de santé à la règle des marchés. Ce processus, la Banque mondiale, qui s’intéresse particulièrement au sujet, et plus encore dans les pays en voie de développement, l’appelle la « corporatisation » !
Enfin, la troisième étape, que vous tentez de dissimuler aujourd’hui, madame la ministre – mais nos concitoyens ne sont pas dupes, et ils le montreront demain –, c’est le transfert complet de la gestion de l’hôpital au secteur privé commercial, c'est-à-dire la privatisation.
Voila le processus qui est à l’œuvre aujourd’hui ! Voilà comment, pas à pas, astucieusement, vous privatisez l’hôpital public. Voilà comment, contre l’intérêt du public, vous confiez au secteur privé commercial une partie de la santé de nos concitoyens.
C’est pourquoi, mes chers collègues, nous souhaitons que vous votiez cet amendement. Monsieur le président, je demande, au nom du groupe CRC-SPG, que le Sénat se prononce par scrutin public. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau, pour explication de vote.
M. Bernard Cazeau. M. Fischer a détaillé le scénario en trois étapes que j’évoquais hier lors de la discussion générale : acte 1, on organise les carences de l’hôpital public, dont on tient bien sûr les rênes grâce à l’étatisation ; acte 2, on conclut à l’absence de fiabilité de l’hôpital ; acte 3, on réoriente les décisions de soins et les financements vers le secteur privé. Et le tour est joué !
Monsieur Fischer, vous nous avez fait une démonstration éclairante à partir de l’exemple allemand. Nous vous suivrons et voterons l’amendement n° 371 ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 371.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 151 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 171 |
Pour l’adoption | 137 |
Contre | 203 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 185, présenté par M. Beaumont, est ainsi libellé :
Compléter le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 6111-1 du code de la santé publique par une phrase ainsi rédigée :
Le domicile peut être un établissement avec hébergement régi par le code de l'action sociale et des familles.
La parole est à M. René Beaumont.
M. René Beaumont. Par cet amendement, nous souhaitons non pas bouleverser complètement l’organisation du service public de la santé, mais simplement tenter modestement de l’améliorer, notamment dans les zones périurbaines et les zones rurales : il s’agit d’assimiler à un domicile les chambres des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, ce qui permettrait aux personnes âgées hébergées de bénéficier, le cas échéant, des prestations de l’hôpital public le plus proche.
Depuis 2007, les établissements de santé ont la possibilité d’intervenir dans les EHPAD, les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, par le biais de leur service d’hospitalisation à domicile et de leurs équipes spécialisées en gériatrie ou en soins palliatifs.
Notre objectif est d’étendre l’intervention de ces services à l’ensemble des structures médicosociales accueillant des personnes âgées. Il se trouve que le droit positif n’apporte pas de réponse à la question du domicile des patients. Il est donc nécessaire de préciser ce que l’on entend par « domicile », c’est-à-dire le lieu d’intervention.
Le présent amendement contribue à asseoir les activités d’hospitalisation à domicile, conformément à l’esprit ayant présidé à la rédaction de ce projet de loi, et à étendre l’accès aux soins hospitaliers à tous nos concitoyens, sur l’ensemble du territoire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement est intéressant. En effet, les structures d’hospitalisation à domicile doivent pouvoir intervenir dans tous les lieux où résident leurs patients. Il faut éviter toute ambigüité en la matière.
La commission est donc favorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je remercie M. Beaumont de cet excellent amendement. Mme Létard et moi-même y sommes favorables ; le domaine concerné est en effet au confluent du champ sanitaire et du domaine médicosocial.
La proposition d’étendre l’intervention des établissements de santé à domicile à l’ensemble des structures de soins médicosociales dans lesquelles sont hébergés durablement certains patients – personnes âgées, personnes handicapées – est tout à fait pertinente : le droit positif n’apportant pas, pour l’instant, de réponse à la question du domicile du patient, il était utile de préciser par voie législative que celui-ci peut être une structure médicosociale avec hébergement. Nombre de personnes attendaient cette précision. (Très bien ! sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Paul Blanc, pour explication de vote.
M. Jacques Blanc. J’aimerais être assuré que le fait d’apporter cette précision ne change en rien la notion de domicile de secours. (Mme la ministre fait un signe d’assentiment.)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Bien sûr !
M. le président. L'amendement n° 309, présenté par MM. Le Menn et Cazeau, Mmes Alquier et Blondin, M. Botrel, Mme Campion, M. Chastan, Mme Chevé, MM. Daudigny et Daunis, Mme Demontès, M. Desessard, Mme Durrieu, MM. Fauconnier et Fichet, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot et Lagauche, Mmes Le Texier et Printz, MM. Mirassou et Rebsamen, Mme Schillinger, M. Teulade et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 6111-2 du code de la santé publique, après le mot :
santé
insérer les mots :
, dans le cadre d'une démarche partenariale impliquant l'ensemble des corps professionnels concernés par la démarche de soins,
La parole est à M. Jacky Le Menn.
M. Jacky Le Menn. Cet amendement vise à parfaire la qualité et la sécurité des soins. En effet, le paragraphe II de l’article 1er a trait à l’élaboration et à la mise en œuvre par les établissements de santé, d’une part, d’une politique d’amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins, d’autre part, d’une gestion des risques destinée à prévenir et à traiter les événements indésirables liés à leur activité.
On doit noter qu’une démarche globale de gestion des risques destinée à assurer la sécurité des personnes et des pratiques représente un enjeu de taille, compte tenu du nombre important d’événements indésirables graves liés aux soins qui surviennent chaque année en cours d’hospitalisation. Selon une enquête relativement récente, ces derniers seraient estimés à près de 190 000 par an, ce qui n’est pas rien.
C’est pourquoi nous proposons que cette politique d’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins soit élaborée selon une démarche partenariale impliquant l’ensemble des corps professionnels concernés.
La concertation, qui est au cœur d’une démarche partenariale entre tous les professionnels intervenant dans l’établissement de santé – médecins, infirmiers, aides-soignants, psychologues, ou autres –, démarche tournée vers la prévention et la réduction des risques, semble en effet essentielle pour rendre plus efficace le combat constant qui doit être conduit en faveur de la qualité et de la sécurité des soins.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Il est évident que les médecins ne sont pas les seuls à agir en faveur de l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins. L’article 1er traite des missions qui incombent aux établissements pris dans leur ensemble.
La commission, estimant que cet amendement n’était pas utile, a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. La démarche proposée ne relève pas de la loi. Pour cette raison, l’avis du Gouvernement est défavorable.
M. le président. L'amendement n° 310, présenté par M. Desessard, Mme Voynet, MM. Le Menn et Cazeau, Mmes Alquier et Blondin, M. Botrel, Mme Campion, M. Chastan, Mme Chevé, MM. Daudigny et Daunis, Mmes Demontès et Durrieu, MM. Fauconnier et Fichet, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot et Lagauche, Mmes Le Texier et Printz, MM. Mirassou et Rebsamen, Mme Schillinger, M. Teulade et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 6111-2 du code de la santé publique, après le mot :
soins
insérer les mots :
, de l'accueil, de l'information et du droit d'accès des patients à leur dossier médical,
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet. Il est fondamental d’assurer la qualité et la sécurité des soins, de lutter contre les maladies nosocomiales.
Si la qualité des soins, au sens de sécurité des soins, semble être acquise, en revanche, la politique de qualité doit, selon nous, prendre en compte non seulement les conditions d’accueil des patients et leur information, mais aussi leur droit d’accéder aux informations médicales qui les concernent : c’est là un objectif un peu différent de ceux qui sont affichés dans le texte tel qu’il est actuellement rédigé, mais tout à fait complémentaire.
Les rédacteurs de cet article ont complètement évacué cette dimension pour se concentrer uniquement sur la lutte contre les événements indésirables. C’est une chose regrettable, que nous proposons de corriger par cet amendement : il vise à élargir le champ de la politique de qualité à l’accueil des patients, à leur information, à leur droit d’accès à leur dossier médical.
Certes, il pourrait m’être objecté que tout cela est déjà prévu dans la loi. Cependant, les associations d’usagers ont bien mis en évidence les difficultés auxquelles se heurtent les personnes qui demandent la consultation de leur dossier après coup.
Chacun connaît la situation des services d’urgence : encombrement, patients attendant des heures sur des brancards alignés dans un couloir faute de places disponibles dans les services, diagnostics tardifs, suivis, parfois, de conséquences irréversibles faute d’une prise en charge en temps et en heure, autant de dysfonctionnements pour lesquels les usagers attendent des réponses concrètes.
La qualité de l’accueil doit être une préoccupation constante du corps médical et des personnels soignants.
De même, les patients sont souvent confrontés à des difficultés pour obtenir des renseignements de la part du corps médical sur l’état d’avancement de leurs examens et sur les traitements prescrits. Cela est dû non pas à la mauvaise volonté du personnel ou du corps médical, mais au manque de temps pour répondre de façon intelligible, adaptée et non anxiogène, surtout en situation d’urgence. La charge de travail dans les services est telle qu’il est difficile d’apporter ces réponses tout en respectant la souffrance et l’angoisse des familles.
Le principe du droit d’accès au dossier médical et à des informations adaptées me paraît devoir être revu. Ce sont désormais des obligations auxquelles les établissements de santé ne doivent plus pouvoir se soustraire.
Les accidents médicaux qui ont plusieurs fois conduit à des décès dans les hôpitaux de la région parisienne ces derniers mois étaient dus non pas à des infections nosocomiales, mais à des problèmes liés à la surcharge de travail et au manque d’attention portée aux patients qu’elle entraîne inévitablement.
En réservant du temps à l’écoute et à la prise en compte des besoins des patients, en dégageant les moyens nécessaires, on contribuera sans doute à réduire ce type de dysfonctionnement.
Vous me répondrez peut-être que cela fait déjà partie des missions de la commission des relations avec les usagers et de la prise en charge du patient.
Mme Dominique Voynet. Sans doute ! Cependant, une commission réfléchit et formule des propositions. Cela ne remplace pas le travail du législateur, qui doit intégrer dans la loi le résultat de ce travail et cette volonté d’améliorer la qualité et la sécurité des soins, notamment par un meilleur accueil et de meilleures informations.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L’article 71–2 traite exclusivement de la politique d’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins. C’est un autre sujet que ceux de l’accueil et du droit à l’information des malades, qui font d’ailleurs l’objet d’autres dispositions du code de la santé publique.
La commission, préférant laisser à l’article 1er sa cohérence, émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Les intentions louables de Mme Voynet sont d’ores et déjà traduites dans les faits. Des dispositions complémentaires viendront appuyer cette démarche, dispositions que nous examinerons ultérieurement.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.
M. François Autain. Je soutiendrai cet amendement. J’estime en effet que, même si une telle mesure n’a pas sa place dans cette partie du texte, elle doit figurer dans le code de la santé publique compte tenu des difficultés, voire de l’impossibilité pour les malades d’obtenir leur dossier médical ; ils sont souvent obligés de passer par la CADA, la commission d’accès aux documents administratifs. Insérer une telle disposition dans le code de la santé publique rendrait peut-être cet accès plus facile.
Selon Mme la ministre, cet accès serait déjà possible dans les faits. Je constate que tel n’est malheureusement pas le cas.
La loi du 4 mars 2002, relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, fait obligation aux structures hospitalières de mettre l’accent sur l’information, cette dernière étant reconnue comme étant un élément très important dans la démarche de soins.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Vous êtes donc satisfait !
M. François Autain. Cette obligation n’est pas toujours bien respectée !
Je reviens, pour y insister, sur le droit d’accès des patients à leur dossier médical : je voudrais être sûr que tout patient qui le désire peut accéder à son dossier médical. Une disposition comme celle qui nous est proposée permettrait sans aucun doute de résoudre ce problème.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 586 rectifié bis, présenté par MM. Barbier, Collin, Baylet, Charasse et Chevènement, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Marsin, Mézard, Milhau, de Montesquiou, Plancade, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l’article L. 6111-2 du code de la santé publique, après le mot :
médicament
insérer les mots :
, en particulier des génériques,
La parole est à M. Gilbert Barbier.
M. Gilbert Barbier. Je souhaite que les établissements de santé, dans le cadre de la politique du médicament qu’ils sont amenés à définir, fassent en particulier la promotion des médicaments génériques. Il s’agit en effet d’une précision importante à mes yeux.
Dans les hôpitaux, les chefs de service prescrivent une molécule, mais le pharmacien de l’établissement, lié au marché conclu avec le fournisseur, ne délivre souvent qu’une seule spécialité de cette molécule. Si cette situation n’a pas de graves conséquences lorsque le médicament est similaire à celui qui est prescrit, elle peut cependant avoir un double effet.
D'une part, dans le cas de présentations quelque peu différentes, cela peut influencer la poursuite du traitement.
D'autre part, madame la ministre, vous avez vous-même mené une politique de promotion des médicaments génériques en médecine de ville. Or, lorsque le patient quitte l’hôpital, c’est très souvent la spécialité qui lui a été administrée dans l’établissement qui se retrouve prescrite sur l’ordonnance.
Par conséquent, il convient de laisser aux chefs de service une liberté de prescription au sein des établissements et de poursuivre la politique en faveur des médicaments génériques, qui commence à porter ses fruits en médecine de ville.
Je constate d’ailleurs que, sur ce point, ma collègue Dominique Voynet et moi-même partageons la même préoccupation, bien que nous ayons souvent eu des divergences de vue par le passé !
M. le président. Le sous-amendement n° 1215, présenté par M. Fortassin, est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa de l’amendement n° 586 rectifié, après le mot :
génériques
insérer les mots :
dûment contrôlés
Ce sous-amendement n’est pas soutenu.
L’amendement n° 311, présenté par M. Desessard, Mme Voynet, MM. Le Menn et Cazeau, Mmes Alquier et Blondin, M. Botrel, Mme Campion, M. Chastan, Mme Chevé, MM. Daudigny et Daunis, Mmes Demontès et Durrieu, MM. Fauconnier et Fichet, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot et Lagauche, Mmes Le Texier et Printz, MM. Mirassou et Rebsamen, Mme Schillinger, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l’article L. 6111-2 du code de la santé publique, après le mot :
stériles
insérer les mots :
, notamment en faveur de l’usage des médicaments génériques,
La parole est à Mme Dominique Voynet.