M. le président. La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi et porte sur le véritable scandale que constitue aujourd’hui le bouclier fiscal. (Ah ! sur les travées de l’UMP.)
M. Jean-Marc Todeschini. Eh oui !
M. François Marc. Notre pays traverse une grave crise financière, économique et sociale.
Aujourd’hui, particulièrement, le peuple de notre pays gronde. Et je vous prie d’excuser l’absence de nombre de nos collègues, actuellement aux côtés des manifestants qui, par millions, défilent en France. (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
M. Josselin de Rohan. Ils devraient être ici !
M. Alain Gournac. Le Sénat, c’est ici !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il y a du monde dans les rues !
M. François Marc. Ne nous dites pas que ces protestations sont le fruit d’une mauvaise information sur la situation ! Les Français savent faire la part des choses : ils font très bien la différence entre ce dont vous êtes comptable et ce dont vous n’avez pas la maîtrise.
M. Roland Courteau. Effectivement !
M. François Marc. Les Français, que voient-ils aujourd’hui ? Ils constatent que la majorité d’entre eux connaissent de plus en plus de difficultés, des difficultés d’emploi,…
M. Roland Courteau. C’est vrai !
M. François Marc. …de pouvoir d’achat, de logement, d’éducation, de santé.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il faut leur dire d’écouter M. Santini !
M. François Marc. En même temps, les Français voient que des entreprises – certes pas toutes, loin de là – versent de gros dividendes tout en licenciant,…
M. Roland Courteau. C’est encore vrai !
M. François Marc. …que des dirigeants d’entreprise touchent des rémunérations indécentes,
M. Roland Courteau. Vrai aussi !
M. François Marc. …et que le gouvernement auquel vous appartenez ne cesse de protéger les plus aisés et d’alléger le poids des contributions dont ils sont redevables envers la communauté nationale !
Un sénateur socialiste. Eh oui !
M. François Marc. Ainsi, alors que le déficit budgétaire pour 2009 va battre tous les records – la prévision à ce jour est de 104 milliards d’euros –, alors que le Premier ministre annonce que « les caisses sont vides », ce gouvernement trouve néanmoins l’argent nécessaire pour envoyer 834 chèques d’un montant moyen de 368 000 euros – excusez du peu ! – à des contribuables très aisés.
M. Jean-Marc Todeschini. C’est scandaleux !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Comme cadeau de fin d’année, c’est pas mal !
M. François Marc. Ce véritable scandale du bouclier fiscal illustre, à lui seul, la déraison de la politique fiscale de ce gouvernement : les impôts des plus modestes servent à faire des chèques aux plus riches ! (Voilà ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.) On est très loin des grands principes de la République, mes chers collègues !
M. Jean-Marc Todeschini. Silence à droite ! (Sourires.)
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement. Vous dites toujours la même chose ! C’est du Eugène Sue !
M. François Marc. En réclamant la suppression du bouclier fiscal,…
M. le président. Posez votre question, je vous prie.
M. François Marc. …nos concitoyens demandent à juste raison que l’on mette fin à ce dévoiement de la République.
Plusieurs sénateurs UMP. La question !
M. François Marc. Madame la ministre, si tant de voix s’élèvent aujourd’hui contre le bouclier fiscal, ce n’est pas uniquement pour une question de morale républicaine ; c’est aussi parce que le souci de lutter efficacement contre la crise…
M. Alain Gournac. La question !
M. François Marc. …et de mobiliser tous les Français à cette fin nécessite de pouvoir s’appuyer sur une vraie solidarité, une solidarité bien comprise, condition première de l’efficacité politique.
M. le président. Posez votre question !
M. François Marc. J’en viens à ma question, monsieur le président. (Ah ! sur les travées de l’UMP.)
Les gouvernements britannique et américain l’ont bien compris, en annonçant de prochaines hausses d’impôts pour les plus aisés.
Madame la ministre, le bouclier fiscal est injuste et antirépublicain.
M. Alain Gournac. Toujours pas de question !
M. François Marc. Quand allez-vous le supprimer ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme Raymonde Le Texier. Tout de suite !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. André Santini, secrétaire d'État chargé de la fonction publique. Mesdames, messieurs les sénateurs, je vois que le sujet passionne sur toutes les travées, puisqu’il donnera lieu à une troisième question tout à l’heure ; je vais m’efforcer de ne pas me répéter pour ne pas vous lasser ! (M. Roland Courteau s’exclame.)
Monsieur le sénateur, un bouclier à 50 %, c’est tout simplement juste ! Qui peut dire le contraire ? (Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) C’est même une règle de valeur constitutionnelle chez plusieurs de nos voisins. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Nicole Bricq. Non !
M. Pierre-Yves Collombat. C’est une plaisanterie !
M. André Santini, secrétaire d'État. Il s’agit d’éviter que l’on ne travaille plus d’un jour sur deux pour l’État.
En face de cela, la majorité a bien veillé, grâce au plafonnement des niches fiscales, à ce qu’un contribuable ne puisse plus s’exonérer de l’impôt en cumulant les avantages fiscaux.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est sympa !
M. André Santini, secrétaire d'État. Le bouclier fiscal de 2008, mesuré au 12 février 2009 – dernières données chiffrées disponibles –, représente 458 millions d’euros sur 7,7 milliards liés à la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite « loi TEPA ».
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est un différentiel !
M. André Santini, secrétaire d'État. Entendons-nous bien, le bouclier fiscal, c’est 6 % du total lié à la loi TEPA, pas plus ! (Mme Nicole Bricq s’exclame.)
La loi TEPA, ce sont d’abord des mesures pour le plus grand nombre, à commencer par les heures supplémentaires qui concernent tout le monde. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean-Pierre Bel. Ce n’est pas la question !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il n’y a plus d’emplois !
M. André Santini, secrétaire d'État. À la vérité, nous trouvons ce débat un peu contre-productif. Gagner de l’argent en France est-il illégitime ? À question directe, réponse directe : non, bien sûr que non !
M. Pierre-Yves Collombat. Ça dépend comment on le gagne !
M. André Santini, secrétaire d'État. Et nous nous étonnons que vous la posiez en ces termes, monsieur le sénateur. Serions-nous pervertis au point de dénigrer ceux qui réussissent ? (Protestations sur les travées du groupe socialiste.) Seriez-vous prêt à montrer du doigt les chefs d’entreprise de votre circonscription qui réussissent, qui ont décidé d’y investir, d’y créer des richesses et de l’emploi. (Exclamations sur les mêmes travées.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ils délocalisent !
M. André Santini, secrétaire d'État. Plafonner la pression fiscale, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est limiter le départ des Français vers des pays dont la fiscalité est moins élevée.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Justement, ils partent tous les jours ! Comment expliquez-vous cela ?
M. Jean-Marc Todeschini. C’est un peu court !
Mme Nicole Bricq. Ils ne sont pas revenus !
M. Yannick Bodin. Ils sont à Coblence ! (Sourires.)
M. André Santini, secrétaire d'État. Nous croyons qu’il faut cesser la politique politicienne (Exclamations sur les travées du groupe socialiste) et, disons-le, la démagogie pour en convenir tous ensemble : il y avait dans notre pays deux offenses à la justice fiscale, deux « péchés contre l’esprit ».
M. Jean-Marc Todeschini. La démocratie, c’est quoi ?
M. André Santini, secrétaire d'État. Le premier péché, c’était que l’on puisse payer plus de 50 % de son revenu, parfois même 100 % ou plus, en impôts annuels.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est surtout que l’on puisse avoir des revenus démentiels !
M. André Santini, secrétaire d'État. Le second péché, celui contre lequel personne n’avait trouvé de solution avant cette législature (Ah ! sur les travées du groupe socialiste), c’est que la multiplication et le déplafonnement de certaines niches fiscales permettaient à des contribuables de s’exonérer complètement d’impôt sur le revenu.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est vrai : quand on est riche, on ne paie pas d’impôts !
M. le président. Veuillez conclure, monsieur le secrétaire d’État,… pour l’absolution. (Rires.)
M. André Santini, secrétaire d'État. …nous avons eu raison de le faire, et nous le revendiquons ! Cette vérité-là, nous aimerions que tout le monde s’attache à la rappeler ! (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
M. Jean-Pierre Bel. Il n’est pas là !
M. Jean-Marc Todeschini. Il a mal au dos ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
M. Bernard Vera. Je tiens tout d’abord à saluer le mouvement social, puissant et rassembleur, qui se déroule aujourd’hui et se traduit par de nombreuses manifestations réunissant plusieurs millions de salariés, soutenu par 80 % de l’opinion publique. La plupart des sénatrices et des sénateurs du groupe CRC-SPG sont d’ailleurs présents dans ces manifestations.
Ce mouvement est le signe évident de l’inquiétude et de la colère de la France qui travaille et qui crée les richesses, un signe qui appelle d’autres réponses que les « mesurettes » fort limitées annoncées par le Gouvernement.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. Bernard Vera. Il participe aussi, après les succès des mouvements revendicatifs de l’outre-mer, d’une profonde et large aspiration à trouver, dans la situation de crise, d’autres solutions que la litanie des plans de licenciement, le développement du chômage partiel ou le blocage des salaires et des pensions.
Cette aspiration à la justice sociale est si forte qu’elle rend indécente l’existence du bouclier fiscal, comme celle des rémunérations et des bonus exorbitants des patrons du CAC 40 et des plus grandes entreprises !
Le bouclier fiscal est bel et bien un cadeau éhonté destiné à une infime minorité de privilégiés, au moment où la grande majorité du peuple de notre pays doit se serrer la ceinture !
Si le ministère des finances ose prétendre que les deux tiers des 14 000 bénéficiaires du bouclier fiscal sont de condition modeste, c’est pour mieux masquer que 834 ménages fortunés ont obtenu du Trésor public plus de 368 000 euros de remboursement en 2008, soit 300 années de SMIC par contribuable !
Au total, le bouclier fiscal coûte 458 millions d’euros. C’est plus que les crédits de rénovation urbaine et que les aides versées par le ministère de la jeunesse et des sports !
Affirmer que le bouclier fiscal a favorisé le retour des émigrés fiscaux est un pur effet d’affichage !
M. le président. Veuillez poser votre question, mon cher collègue !
M. Bernard Vera. J’y viens, monsieur le président.
Les parlementaires de mon groupe, soucieux de l’équilibre des deniers publics et de la justice fiscale, ont déposé, le 15 octobre dernier, une proposition de loi tendant à abroger le bouclier fiscal.
Ce texte est inscrit à l’ordre du jour du Sénat le 26 mars prochain, mais la majorité de droite semble décidée à empêcher son adoption
M. Alain Gournac. Eh oui !
M. Bernard Vera. Je regrette l’absence de M. le Premier ministre, comme celle des ministres concernés, mais ma question est simple : le Gouvernement va-t-il enfin entendre le peuple ?
Allez-vous supprimer cette disposition inique ? Appuierez-vous notre proposition d’abrogation du bouclier fiscal, qui viendra en débat le 26 mars ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste. – Exclamations sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
Plusieurs sénateurs de l’UMP. André ! André !
M. Jean-Pierre Bel. Voilà l’épilogue !
M. Bernard Frimat. L’auteur du texte va-t-il changer ? (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
M. André Santini, secrétaire d'État chargé de la fonction publique. On connaissait le bis, on n’avait pas le ter ! (Sourires.)
Monsieur le sénateur Vera, je risque de représenter le Gouvernement le jour de l’examen de votre proposition de loi.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Alors développez vos arguments !
M. André Santini, secrétaire d'État. C’est bien sûr ce que je vais faire !
Il n’est pas juste de stigmatiser les bénéficiaires du bouclier fiscal. (Mme Raymonde Le Texier s’exclame.) Ce sont des personnes qui ont un remboursement total de 458 millions d’euros, mais qui avaient préalablement payé plus de 1,1 milliard d’euros d’impôts ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les pauvres !
M. André Santini, secrétaire d'État. Je constate que votre cœur demeure inaccessible à ce genre de détresse, mais il faut néanmoins que les chiffres soient cités !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Mais combien gagnent-ils ?
M. André Santini, secrétaire d'État. Ils versaient plus de 80 %, voire 100 % de leurs revenus aux impôts, et leur contribution a été ramenée à 50 % !
L’impôt, monsieur le sénateur, est une affaire de citoyenneté,…
Mme Nicole Bricq. Ah oui ! Justement !
M. André Santini, secrétaire d'État. …non de confiscation ! Vous avez invoqué la justice : est-il juste de payer plus de 50 % de ses revenus en impôts ? Est-il juste de travailler plus d’un jour sur deux pour l’État ?
M. Jean-Marc Todeschini. C’est dur le métier de secrétaire d'État ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Si, elle existe ailleurs !
M. André Santini, secrétaire d'État. En France, la coexistence d’un impôt sur le revenu élevé et d’un impôt sur le patrimoine également élevé impose de plafonner la pression fiscale, d’où l’instauration du bouclier fiscal, qui est un système juste.
La véritable injustice, c’était que certains contribuables puissent s’exonérer de l’impôt à travers l’utilisation excessive d’avantages fiscaux par le recours aux niches fiscales : c’est pourquoi nous avons décidé de plafonner ces dernières.
Enfin, monsieur le sénateur, en France, lorsqu’on gagne de l’argent parce qu’on a réussi, on n’est pas un voleur !
M. Bernard Vera. Qui a dit ça ?
M. André Santini, secrétaire d'État. Si l’on veut faire partir de la France toute sa richesse, alors il faut prendre les mesures que vous préconisez.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Mais ils partent !
M. André Santini, secrétaire d'État. À une époque de très grande mobilité du capital et de compétition très rude,…
M. le président. Veuillez conclure, monsieur le secrétaire d'État.
M. André Santini, secrétaire d'État. …notamment entre pays européens, surtaxer aboutit en réalité à détaxer !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Avec les aides publiques, ils vont produire en Chine !
M. André Santini, secrétaire d'État. En 2007, les départs du territoire ont baissé de 15 % et les retours ont augmenté de 10 %. Ce coup de frein aux départs, c’est la première fois qu’on l’observe depuis 2000 et ce n’est pas un hasard si c’est la première année de mise en œuvre du bouclier fiscal ! (Applaudissements sur plusieurs travées de l’Union centriste et sur les travées de l’UMP.)
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Très bien ! Remarquable !
politique agricole commune : le problème des zones intermédiaires
M. le président. La parole est à M. Henri de Raincourt. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Henri de Raincourt. Ma question s’adressant au ministre de l’agriculture, elle se situe sur un autre registre que celui sur lequel nous « entonnons » depuis la reprise de la séance ! (Sourires.)
Il s’agit d’une question agricole et M. Karoutchi y répondra. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce n’est pas M. Santini, spécialiste de l’agriculture, qui va le faire ? (Sourires sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. André Santini, secrétaire d'État. Si cela peut vous faire plaisir, madame la sénatrice ! (Sourires.)
M. Henri de Raincourt. Le ministre de l’agriculture nous a présenté, il y a peu, les modalités de mise en œuvre du bilan de santé de la politique agricole commune, la PAC, au terme d’une très longue concertation.
Près de 1, 4 milliard d’euros d’aides directes reçues par les agriculteurs seront réorientées en 2010 pour consolider l’économie et l’emploi dans les territoires, pour soutenir l’élevage à l’herbe, pour prévoir un développement durable et pour instaurer la gestion des risques.
La profession sait qu’il est indispensable d’adapter la politique agricole commune dans la perspective de 2013.
Cependant, en abordant le financement des quatre objectifs que je viens de rappeler, on s’aperçoit que les prélèvements de solidarité, en particulier sur les cultures végétales, risquent de créer de vraies difficultés aux « zones intermédiaires », qui ont des rendements moyens sur des sols relativement médiocres, sur lesquelles sont implantées le plus souvent des exploitations elles-mêmes de taille moyenne.
Les conséquences pourraient conduire à supprimer ces soutiens indispensables à la survie de nombreuses exploitations, qui pourraient perdre jusqu’à 80 euros à l’hectare.
Je souhaite vous poser trois questions.
Comment faire évoluer le système pour qu’il prenne en compte la diversité de nos régions et assure à nos céréaliers, quelle que soit la région, la juste rétribution de leur travail ?
Pourrait-on envisager une mise en application progressive sur la période 2010-2013 des mesures qui ont été prises ?
Pourrait-on accompagner financièrement les exploitations de type « spécialisé » ou « polyculture–élevage », ayant des surfaces consacrées aux productions végétales, qui s’engageraient sur les axes de développement de la biodiversité ou de réduction de la dépendance énergétique grâce à des choix culturaux ? (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Bernard Frimat. Un élu d’un département agricole ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, je vous prie d’excuser l’absence de Michel Barnier. Il aurait eu bonheur et plaisir à vous répondre, mais il est aujourd'hui à Bruxelles, en négociation justement sur la PAC. (Mme Nicole Bricq et M. Jean-Marc Todeschini s’exclament.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il n’est pas à la manif ?
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Monsieur Henri de Raincourt, vous avez exprimé plusieurs inquiétudes auxquelles le Gouvernement est très sensible.
Premier point, malheureusement, et vous le savez, la réorientation des aides de 1,4 milliard d’euros ne peut pas être appliquée avec progressivité. Elle interviendra donc sur les aides payées en décembre 2010. Il s’agit d’un accord européen, et nous ne disposons pas d’une entière liberté.
Cependant, le ministre de l’agriculture est très attentif à la situation des départements des secteurs intermédiaires, qui sont, en réalité, les secteurs les plus en difficulté par rapport au rééquilibrage et à la réorientation.
Michel Barnier a mis en débat, dans le cadre des groupes de travail, la situation des territoires intermédiaires, qui ont des niveaux de soutien et de revenus plus faibles que les régions à fort potentiel, et plus forts que les régions qui connaissent de vraies difficultés. Ces territoires intermédiaires sont ceux qui ont le plus de problèmes par rapport à la réorientation des aides.
Diverses voies ont été ouvertes et sont à l’étude. M. le ministre de l’agriculture annoncera au début du mois d’avril un certain nombre de mesures.
Parmi ces voies à l’étude, il convient de citer la réattribution prioritaire d’une partie des aides aux grandes cultures – vous avez évoqué, monsieur le sénateur, les zones végétales et céréalières –, l’accompagnement de la réorientation des systèmes de production, l’engagement sur un développement durable – nous en avons parlé dans le cadre du Grenelle 1 et nous aurons l’occasion d’aborder de nouveau le sujet, car il faut peut-être faire des efforts en la matière.
Les décisions qui vont être prises et qui seront annoncées pour partie au début du mois d’avril doivent préfigurer de nouveaux modes de soutien pour notre agriculture et engagent sur la voie d’une sortie progressive de références historiques qui ne peuvent plus être des références actuelles.
La pire des solutions pour notre agriculture serait le statu quo. Nous allons donc, et le ministre de l’agriculture s’y est engagé, avec vous et l’ensemble des acteurs, essayer de définir des politiques prioritaires pour les zones intermédiaires.
Monsieur de Raincourt, soyez assuré que le Gouvernement prend bien en considération la situation particulière des zones intermédiaires dont vous êtes l’un des porte-parole les plus émérites. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
crise économique et situation de l'emploi
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Monsieur le président, mesdames et messieurs les ministres, mes chers collègues, je souhaite interroger le Gouvernement sur sa politique économique et sociale dans une situation de crise grave pour notre pays, pour nos territoires et pour tous les Français.
Alors que les effets annoncés du plan de relance se font toujours attendre, en particulier pour ceux, de plus en nombreux, qui souffrent d’une forte diminution de leur pouvoir d’achat, vous vous refusez toujours à agir sur la consommation, privilégiant le seul investissement.
C’est pourquoi je vous invite à lire le récent rapport du Sénat, rédigé par notre collègue Bernard Angels, dans lequel ce dernier démontre qu’une relance directe par la consommation serait d’une grande et d’une rapide efficacité.
Les faits et les chiffres sont là : les entreprises licencient, ajoutant la crise sociale à la crise industrielle.
Alors, pourquoi persistez-vous dans la mauvaise direction ?
Avec mes collègues radicaux de gauche et la majorité du groupe RDSE, je partage les inquiétudes des Français qui s’expriment, avec force, aujourd’hui, dans tout le pays sur les conséquences de la politique qui est menée, en particulier sur les orientations prises en matière d’emploi et de pouvoir d’achat pour les plus modestes.
Cette politique et les priorités retenues enfoncent chaque jour un peu plus les Français dans la précarité, l’appauvrissement et l’incertitude.
Dans le secteur public, la mise en œuvre de la révision générale des politiques publiques est synonyme de réduction drastique des emplois sur l’ensemble du territoire, y compris en zone rurale et dans les quartiers sensibles. Je pense, en particulier, aux secteurs de la santé, de l’éducation, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Dans tous ces domaines, force est de constater que notre pays régresse.
Dans le secteur privé, 400 000 chômeurs supplémentaires sont déjà annoncés pour 2009. Les indicateurs sont au rouge et les réponses du Gouvernement sont insuffisantes, quand elles ne sont pas inadaptées.
M. le président. Veuillez poser votre question, ma chère collègue.
Mme Françoise Laborde. Dans ces conditions, combien de temps faudra-t-il encore attendre avant que Gouvernement ne prenne la mesure de la crise qui frappe les Français ?
Quand allez-vous cesser de gérer la crise et quand interviendrez-vous enfin avec force et détermination ?
Quand allez-vous préférer le bouclier social à l’injuste et si indécent bouclier fiscal ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Quand allez-vous agir sur le seul véritable levier de relance qui soit : la consommation ? (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Hervé Novelli, secrétaire d’État chargé du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services. Madame le sénateur Françoise Laborde, nous ne partageons pas votre analyse (Exclamations sur les travées du groupe socialiste) et l’histoire nous donne raison ! Vous connaissez l’échec historique du plan de relance par la consommation engagé par le président Mitterrand dans les années 1980. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – M. Yves Pozzo di Borgo applaudit.)
M. Pierre-Yves Collombat. Mais c’est faux !
M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Ce plan a entraîné un recentrage de la politique économique, largement commenté dans les manuels de science économique, qui nous instruit sur l’inanité d’une relance par la consommation.
M. Pierre-Yves Collombat. Cela figure dans les manuels, mais c’est faux !
M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Nous avons préféré la relance par l’investissement en choisissant, en premier lieu la réactivité,…
M. Jean-Marc Todeschini. Les riches !
M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. …avec un plan qui est aujourd’hui l’un des plus puissants de ceux qui sont engagés par tous les pays de l’Union européenne. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste.)
M. Bernard Vera. Cela ne marche pas !
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Permettez-moi de vous rappeler quelques chiffres qu’il ne faut pas oublier, madame le sénateur. Cette crise n’est pas française…
M. Jean-Pierre Bel. Ce n’est pas vrai !
M. Thierry Foucaud. Trois points de récession !
M. Pierre-Yves Collombat. Personne n’y est pour rien !
M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Vos amis socialistes espagnols en sont aujourd’hui, sur le seul mois de janvier, à 350 000 chômeurs supplémentaires ! Vos amis travaillistes anglais traversent une des crises les plus profondes de leur histoire. Aussi, il ne sert à rien de dénoncer les responsabilités de tel ou tel gouvernement !
Un sénateur socialiste. Mais si !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Pourtant, vous trouviez que la Grande-Bretagne et l’Espagne avaient une bonne politique !