M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Jour après jour, la France bat de tristes records : les déficits deviennent abyssaux et le chômage explose ; 300 000 emplois ont été détruits ces six derniers mois, dont 90 200 pour le seul mois de janvier, soit déjà le tiers de vos prévisions pour 2009 !
M. Éric Doligé. Et dans les autres pays ?...
M. Jean-Pierre Godefroy. Vous déclarez que la France résiste mieux que d’autres pays européens.
M. René-Pierre Signé. Ce n’est pas vrai !
M. Jean-Pierre Godefroy. Ce n’est pas une consolation pour les centaines de milliers de nouveaux chômeurs.
Notre « résistance » n’est due qu’à notre spécificité : un service public fort et des dispositifs de protection sociale efficaces, auxquels le Gouvernement n’a cessé de s’attaquer ces dernières années.
M. Didier Boulaud. C’est exact !
M. Jean-Pierre Godefroy. Face à cette crise d’une gravité extrême, il faut des mesures fortes. Or non seulement vous avez tardé à réagir, mais les réponses que vous apportez sont totalement décalées par rapport à ce que vivent nos concitoyens.
Vous multipliez les annonces, mais la situation ne s’arrangera pas tant que vous ne remettrez pas en cause les dogmes qui fondent votre politique.
Il est évident qu’il faut supprimer la loi TEPA, qui est un boulet pour nos finances publiques. (Protestations sur les travées de l’UMP.)
Concernant le bouclier fiscal, il coûte cher au budget de l’État, comme l’a montré la Cour des comptes, et encourage l’évasion fiscale, sans avoir le moindre effet positif sur l’activité économique.
M. René-Pierre Signé. À la casse !
M. Jean-Pierre Godefroy. Quant à la détaxation des heures supplémentaires, elle ne sert à rien, le nombre d’heures supplémentaires ayant été similaire en 2007, avant la loi, et en 2008. Elle n’est donc bien qu’un effet d’aubaine, puisque l’on a maintenant intérêt à déclarer ses heures supplémentaires pour bénéficier des avantages financiers.
Une telle mesure est catastrophique en période de récession. Il faut non pas gaspiller ainsi inutilement 3 milliards d’euros, mais mobiliser toutes les ressources de la collectivité nationale !
La question n’est plus de travailler plus pour gagner plus, mais bien d’être plus nombreux à travailler. (Très bien ! sur les travées du groupe socialiste.) Qui plus est, lorsque la reprise sera là, ce système d’heures supplémentaires constituera un frein à l’embauche.
M. René-Pierre Signé. Eh oui ! En fait, il l’est déjà !
M. Jean-Pierre Godefroy. Vous avez récemment annoncé, sur l’insistance des syndicats, la création d’un Fonds d’investissement social doté de 2,5 milliards d’euros, afin de soutenir les chômeurs et de leur permettre de suivre une formation dans l’espoir de retrouver un emploi. (Marques d’impatience sur les travées de l’UMP.)
Toutefois, à examiner les choses de près, on s’aperçoit que le Gouvernement ne consacrera, en fait, que 800 millions d’euros de crédits nouveaux. Pour le reste, …
M. le président. Posez votre question, mon cher collègue !
M. Jean-Pierre Godefroy. … vous vous contentez de réaffecter des sommes déjà programmées ou de dire aux partenaires sociaux d’aller piocher dans les caisses des ASSEDIC ou de la formation professionnelle. En un mot, les salariés licenciés, les chômeurs, n’ont qu’à s’aider eux-mêmes ! (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
Quant au plan de relance uniquement centré sur l’investissement, il ne produit aucun effet au moment même où la crise frappe le plus fort. Il est en décalage total avec l’urgence de la situation ; il risque de porter ses fruits une fois la bataille perdue.
M. le président. Votre question, j’y insiste, mon cher collègue ! Je pense à M. Peyronnet, dernier orateur inscrit.
M. Jean-Pierre Godefroy. Ma question est la suivante, monsieur le président. (Ah ! sur les travées de l’UMP.) Je vous remercie de l’attendre avec autant d’impatience, mes chers collègues !
M. Éric Doligé. On ne l’attend pas !
M. Jean-Pierre Godefroy. Avez-vous enfin l’intention d’orienter les efforts de la nation en priorité vers la relance de la consommation ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Monsieur le sénateur, revenons précisément sur quelques chiffres et rectifions-les chaque fois qu’ils ne sont pas justes.
L’économie française n’a pas détruit 600 000 emplois ! Il s’agit du nombre des demandeurs d’emploi, et non pas de celui des destructions d’emplois.
M. René-Pierre Signé. 350 000 !
Mme Christine Lagarde, ministre. Nous prévoyons pour l’année 2009, l’année la plus difficile en cette période de crise, 350 000 destructions d’emplois. Ne confondons pas les choses et n’induisons personne en erreur !
J’aborderai maintenant la question de la consommation. Monsieur le sénateur, dans quel domaine l’économie française a-t-elle réalisé son meilleur score en janvier ? Dans celui de l’exportation ? Non ! Dans celui des investissements ? Non ! Précisément dans celui de la consommation, …
M. Jacques Mahéas. Et alors ?
M. René-Pierre Signé. C’est l’effet des fêtes !
Mme Christine Lagarde, ministre. Il faut donc centrer prioritairement notre effort non pas dans ce secteur, mais sur l’investissement et le soutien aux populations qui sont les plus victimes de la crise.
Tels sont les deux axes principaux de notre action, et nous avons pris de multiples mesures à cet effet.
Examinons maintenant les chiffres du chômage, puisque vous y avez fait allusion, monsieur le sénateur.
Les chiffres du quatrième trimestre de l’année 2008 dénotent une progression sensible du chômage, …
M. René-Pierre Signé. Catastrophique !
Mme Christine Lagarde, ministre. … mais nous sommes partis du taux le plus bas depuis vingt-cinq ans : de 7,2 %, …
M. René-Pierre Signé. Avec les emplois aidés !
Mme Christine Lagarde, ministre. … nous passons à 7,8 %. Cette augmentation s’explique par le freinage brutal de l’économie française, puisque cette dernière a connu une croissance négative de 1,2 % au quatrième trimestre 2008. Dans ces conditions, il était inéluctable de connaître un accroissement du chômage au cours du quatrième trimestre.
Toutefois, nous ne sommes pas restés les deux pieds dans le même sabot !
M. Bernard Frimat. Vous n’avez même plus de sabots !
Mme Christine Lagarde, ministre. Nous avons pris une série de dispositions.
Premièrement, nous avons augmenté de manière progressive l’indemnisation du chômage partiel, en la faisant passer de 50 % à 60 %, puis à 75 %, et nous avons accru le quota d’heures supplémentaires autorisées pour les sociétés qui doivent recourir à des mesures d’activités partielles en le portant à 1 000 heures.
M. Jean-Pierre Godefroy. Faites le calcul !
Mme Christine Lagarde, ministre. Par ailleurs, nous avons encouragé les très petites entreprises de moins de dix salariés à embaucher en franchise totale de contributions sociales.
Aujourd'hui, les petites entreprises de moins de dix salariés embauchent à un rythme de 2 000 nouveaux salariés par jour, et ce depuis maintenant quinze jours. (M. Didier Boulaud montre le titre d’un article de journal intitulé : « Chômage record ».)
Renforcer l’indemnisation partielle du chômage et encourager les TPE à embaucher, car nous savons que ce sont elles qui embauchent : telles sont les deux mesures que nous avons prises pour inciter les entreprises à maintenir les salariés dans l’emploi.
M. le président. Je vous demande de bien vouloir conclure, madame la ministre !
Mme Christine Lagarde, ministre. Sous l’autorité de François Fillon, le Gouvernement a engagé les partenaires sociaux à améliorer le système d’indemnisation du chômage.
Sur les deux fronts que j’ai cités, nous luttons donc contre un taux de chômage dégradé en raison du freinage de l’économie française. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Nous savons aujourd'hui que M. le Président de la République et M. Balladur sont sur la même longueur d’onde pour ce qui concerne la reprise en main des collectivités territoriales par l’État et la réduction des dépenses publiques utiles.
M. Éric Doligé. Il était temps !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Car ce sont bien là, à nos yeux, les principales caractéristiques des propositions de M. Balladur : …
M. Didier Boulaud. Oui !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. … transformation des collectivités locales en services déconcentrés de l’État, plan social territorial ou étranglement financier.
En supprimant la compétence générale des départements, des régions et des communes membres de métropoles, l’État sera en effet seul à disposer du pouvoir de dire qui a le droit de faire quoi dans chaque collectivité locale. Ce faisant, vous niez les libertés locales et le rôle des élus locaux – mettre en œuvre les politiques souhaitées par la population – avec, en prime, un éloignement des élus et des citoyens, alors que ceux-ci revendiquent très largement une plus grande proximité.
Votre projet du Grand Paris est caricatural : il s’agit d’une gestion directe de la région par l’Élysée. (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
Mme Éliane Assassi. Eh oui !
M. Philippe Dallier. N’importe quoi !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Avec beaucoup de démagogie, vous avez essayé de convaincre la population qu’il fallait mettre fin au millefeuille territorial qui rendait les collectivités « inefficaces et coûteuses ». Mais ce millefeuille, c’est bien vous ou votre prédécesseur qui l’avez créé, avec la décentralisation Raffarin, un chef-d’œuvre d’émiettement des compétences conjointes, concurrentes ou émiettées !
M. Alain Fouché. L’émiettement, c’est vous !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Financièrement, vous avez chargé la barque des collectivités sans compensation réelle et, pour couronner le tout, avant même le rapport Balladur, le Président de la République a annoncé la suppression de la taxe professionnelle. Curieuse façon de soutenir l’investissement en cette période de crise, surtout quand on sait que les trois quarts de l’investissement public sont réalisés par les collectivités locales ! Mais sans doute préférez-vous privilégier les grands groupes financiers. (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
M. Alain Fouché. C’est toujours la même chose !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur le Premier ministre, le Président de la République vous a demandé d’élaborer un texte reprenant les propositions Balladur. Quasiment toutes les associations d’élus ont émis, globalement ou partiellement, des critiques au fur et à mesure que les intentions de M. Balladur étaient dévoilées.
M. Didier Boulaud. Balladur à la retraite !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Comment allez-vous organiser une véritable discussion avec les élus et, surtout, un débat public avec la population sur la démocratie locale, sur le rôle de chacune des collectivités et sur les moyens financiers leur permettant de répondre aux besoins des populations ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. René-Pierre Signé. Balladur, élu local !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Madame le sénateur, si j’ai bien compris, tout va bien, il ne faut rien changer !
M. André Dulait. Voilà !
M. René-Pierre Signé. Il ne faut pas changer ainsi !
M. Bernard Frimat. Il faut changer le Gouvernement !
M. Didier Boulaud. Il faut changer Sarkozy !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. À vous écouter, il est inutile de clarifier la situation pour donner davantage de lisibilité à nos concitoyens sur l’administration des villes, des communautés, des départements et des régions.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous avez mal entendu !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Si je vous ai bien comprise, il est inutile d’améliorer la rapidité et l’efficacité des décisions.
Mme Éliane Assassi. Vous avez mal compris !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Madame le sénateur, ne soyez pas aussi conservatrice et, j’allais dire, aussi passéiste ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste. – Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Écoutez ce que disent les élus !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Il me semble que l’ensemble de nos concitoyens souhaitent savoir plus clairement qui fait quoi et qui prend telle ou telle décision.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Avec quels moyens !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Les élus ont aussi besoin d’une réelle lisibilité sur leur rôle et leurs compétences !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Écoutez les élus !
M. René-Pierre Signé. Balladur, élu local !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Au sein de la commission présidée par M. Balladur, qui comprenait également des membres de l’opposition, …
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Pas tous !
M. Éric Doligé. Heureusement !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. … certains élus de gauche, je note que, sur les vingt propositions, seize d’entre elles ont été adoptées à l’unanimité.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est bien regrettable !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Quoi qu’il en soit, je puis vous assurer que le rapport remis ce matin par M. Balladur au Président de la République va effectivement faire l’objet d’une vaste concertation, …
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ah, vous répondez à ma question !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. … afin d’examiner les propositions et le bien-fondé de certaines critiques.
M. René-Pierre Signé. La majorité se couche !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. M. le Premier ministre va d’ailleurs réunir dans les tout prochains jours une conférence des élus locaux. Pour ma part, j’organiserai une concertation.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On a effectivement besoin de débats !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Un projet de loi-cadre sera déposé devant le Parlement et suivi d’un ou de plusieurs projets de loi.
Nous aurons donc très largement l’occasion de discuter de toutes ces questions en vue d’obtenir le plus grand consensus possible. En matière d’institutions, il est essentiel de se soucier d’abord de l’intérêt général, en oubliant les égoïsmes particuliers !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On l’a vu avec la révision constitutionnelle !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Et c’est ce que nous faisons ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. René-Pierre Signé. On n’a pas besoin de réformes comme celles-là !
rapprochement de la caisse d'épargne et de la banque populaire
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade. Ma question s'adresse à Mme le ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
M. Didier Boulaud. Surtout de l’emploi !
M. René-Pierre Signé. De la justice et de l’emploi !
M. Jean-Pierre Fourcade. Madame le ministre, la semaine dernière, la fusion de deux entités, la Caisse d’Épargne et la Banque populaire, a donné naissance à une très grande banque, la deuxième banque française. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Forte de 34 millions de clients environ, de plus de 7 millions de sociétaires et d’une importante assise territoriale au travers de 7 700 agences, …
M. Didier Boulaud. Je vais me dépêcher de changer de banque, car je n’ai pas confiance : je ne veux pas que les copains de Sarkozy me piquent mon argent !
M. Jean-Pierre Fourcade. … avec près de 110 000 salariés au total, cette nouvelle structure bancaire se met en place avec quelques handicaps : les pertes constatées en 2008 pour les deux réseaux et leur filiale commune Natixis, ainsi que l’effet sur leurs dépôts de la banalisation des livrets d’épargne depuis le 1er janvier de cette année.
Bien sûr, l’essentiel des pertes concerne non pas la clientèle traditionnelle de ces deux entités, …
M. Paul Raoult. C’est pourtant elle qui va payer !
M. Jean-Pierre Fourcade. … mais les opérations de diversification, de marché ou de grande clientèle à l’international auxquelles les deux structures ont voulu se confronter.
Il importe de redonner confiance aux millions de porteurs de livret A, …
M. René-Pierre Signé. Ils sont partis ! Ils n’ont plus confiance !
M. Jean-Pierre Fourcade. … de rassurer les quelque 110 000 salariés du groupe, ainsi que les sociétaires et les emprunteurs.
Le Gouvernement se doit d’apporter des réponses positives concernant aussi bien les fonds propres de la nouvelle banque que son organisation.
Pouvez-vous nous dire, madame le ministre, comment sera conçu l’organe central des deux réseaux ?
M. François Marc. À l’Élysée !
M. Jean-Pierre Fourcade. Comment ces derniers fonctionneront-ils à l’avenir…
M. René-Pierre Signé. Elle n’en sait rien !
M. Jean-Pierre Fourcade. … et dans quelle mesure le statut mutualiste actuellement en place sera-t-il protégé ?
M. Didier Boulaud. Parlez-nous de son président !
M. Jean-Pierre Fourcade. Enfin, pouvez-vous nous indiquer sous quelle forme se traduira le soutien du Gouvernement à ces banques ? (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. René-Pierre Signé. Avec l’argent public !
M. Didier Boulaud. Avec l’argent des contribuables ! Il faut reprendre la formule de Poniatowski : « les copains… » !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Monsieur le sénateur, vous avez évoqué l’ensemble des raisons pour lesquelles la Banque populaire et la Caisse d’Épargne ont enfin décidé de fusionner, mais il en est une que vous n’avez pas mentionnée : leur histoire commune, qui se décline de deux façons.
Premièrement, ces deux établissements, tout comme le Gouvernement, sont très attachés à leur culture mutualiste. J’espère que celle-ci sera maintenue dans le projet de loi qui sera présenté devant la Haute Assemblée ; il nous donnera l’occasion d’évoquer la structure de tête permettant de fusionner les deux établissements, puisque cette question relève de la loi.
Deuxièmement, ce projet de fusion occupe les deux groupes depuis pratiquement dix ans. Annoncé à la presse et aux marchés financiers, il progressait lentement depuis le mois d’octobre.
C’est pour toutes ces raisons que l’État est intervenu pour accélérer le processus. Après fusion, ces deux établissements financiers constitueront, vous l’avez souligné, monsieur le sénateur, le deuxième groupe bancaire français. Il ne faut donc pas attendre, ni tergiverser.
M. Didier Boulaud. Cela fera une plus grosse catastrophe ! Vous deviez surtout vous dépêcher de caser quelqu’un, M. Pérol !
Mme Christine Lagarde, ministre. J’ai personnellement demandé aux deux groupes d’accélérer leurs négociations et de les conclure avant le 26 février dernier, date de publication de leurs résultats.
Le Gouvernement est également intervenu pour renforcer les fonds propres. Il s’agira en effet d’un groupe important, avec 30 millions de clients, qui gèrera, d’un côté, l’épargne des Français et, de l’autre, le crédit aux entreprises puisque les activités de ces deux établissements vont non pas se faire concurrence, mais, au contraire, se compléter.
Il était important que l’État apporte une contribution aux fonds propres, pour consolider cette structure…
M. Didier Boulaud. Moi, je vais tout mettre La Poste !
Mme Christine Lagarde, ministre. … et participer à la définition de la stratégie : l’orientation de Natixis devra être clairement réexaminée.
M. Didier Boulaud. Ce sera vite fait !
Mme Christine Lagarde, ministre. C’est ce que nous demanderons à l’ensemble des dirigeants de ce groupe. La participation de l’État s’élèvera au maximum à 5 milliards d’euros, sous forme de titres super-privilégiés ou d’actions préférentielles, …
M. Didier Boulaud. Tous à La Poste !
Mme Christine Lagarde, ministre. … qui seront éventuellement convertibles en actions ordinaires assorties, si nécessaire, d’un droit de vote, ce qui donnerait à l’État un maximum de 20 % de participation dans le capital des deux établissements ainsi réunis.
Mais cette fusion, c’est vous qui la déciderez, puisque le projet de loi vous sera présenté dans les mois qui viennent. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Simon Sutour.
M. Simon Sutour. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
À l’heure où la mode est d’évoquer les métropoles, je vais vous parler des territoires ruraux. (Ah ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Didier Boulaud. Balladur est un spécialiste !
M. Simon Sutour. Qu’il est loin le temps où la fracture territoriale était le thème majeur du débat public !
Je voudrais me faire l’écho dans notre assemblée, qui est le « grand conseil des communes de France » et qui représente les collectivités territoriales, du découragement et de l’exaspération des élus des zones rurales de notre pays. Ces derniers ne sont plus en mesure de répondre aux besoins élémentaires de leurs administrés en termes de service public, …
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Oui ! Et on me traite de conservatrice !
M. Simon Sutour. … alors même que le contexte actuel de crise économique et sociale aiguë appelle au contraire une intervention publique plus forte à destination de nos concitoyens les plus fragiles.
Certes, l’évolution des services publics ne doit pas être un tabou, mais nombre d’élus locaux ont le sentiment d’une politique purement comptable, conséquence de la révision générale des politiques publiques, et non d’une politique de fond, en particulier avec les récentes réformes des cartes judiciaire, militaire ou hospitalière.
M. René-Pierre Signé. Sans oublier les gendarmes !
M. Simon Sutour. Dans les domaines du service postal et des télécommunications, la situation est préoccupante, vous le savez. Chaque jour, nous sommes saisis, les uns et les autres, sur l’ensemble des travées de cette assemblée, de la dégradation du service postal, avec des fermetures de bureaux de poste, et pas uniquement dans les zones les moins peuplées.
Le service téléphonique voit sa qualité diminuer et les coupures de téléphones fixes sont désormais monnaie courante. La fracture numérique demeure, avec un accès au haut débit limité et des zones blanches importantes en matière de téléphonie mobile.
Depuis quelque temps, on apprend régulièrement la fermeture d’agences EDF–GDF.
Tribunaux de proximité, trésoreries, bases militaires, hôpitaux ruraux : on ne compte plus les suppressions de services publics !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et M. Thierry Foucaud. C’est vrai !
M. Simon Sutour. Mais je voudrais, madame la ministre, insister sur deux points qui sont plus particulièrement de votre compétence ministérielle.
M. le président. Veuillez poser votre question, mon cher collègue !
M. Simon Sutour. J’y viens, monsieur le président !
Il s’agit des sous-préfectures et des brigades de gendarmeries. En ce qui concerne les premières, certaines seront supprimées, d’autres maintenues, mais sans sous-préfet !
M. Alain Fouché. Ce n’est pas vrai !
M. René-Pierre Signé. Elles ne vont pas durer bien longtemps !
M. Simon Sutour. Cela semble être le cas, dans mon département, de la sous-préfecture du Vigan.
Pour ce qui est des brigades de gendarmerie, des études semblent être en cours, qui pourraient aboutir à de nombreuses suppressions, dont deux dans mon département : à Sauve et à Génolhac.
Pouvez-vous, madame la ministre, préciser les intentions du Gouvernement à ce sujet, et, d’une manière plus large, nous indiquer quelle politique il entend mener en matière de territoires ruraux, afin d’éviter que la fracture territoriale ne devienne un gouffre territorial ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Didier Boulaud. Il faut demander à Balladur, c’est un spécialiste de la ruralité !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Et vous parlez de conservatisme !
M. le président. La parole est à Mme le ministre
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, vous savez combien je suis attachée au monde rural et à la présence de l’État sur tout notre territoire.
M. Didier Boulaud. Et les gendarmeries ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous fermez les bureaux de poste !
M. Jean-Pierre Bel. Et il n’y a pas que cela !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Pour autant, il ne faut pas avoir une vision nostalgique du XIXe siècle ou du début du XXe siècle ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. François Marc. C’est la République, tout simplement !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Il existe de nouvelles façons de travailler et il faut prendre en compte un certain nombre de réalités.
Lorsqu’un bureau de poste ne reçoit que trois personnes par jour au maximum, on peut s’interroger sur l’emploi qui est fait de l’argent des contribuables français, …
M. Didier Boulaud. Et les gendarmeries ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. … au regard du service rendu. C’est la raison pour laquelle des rationalisations peuvent intervenir, à condition que le service public soit effectivement assuré à nos concitoyens de façon égale.
M. Jean-Pierre Bel. Cela va beaucoup plus loin, et vous le savez !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. D’ailleurs, c’est ce qui se passe dans un certain nombre de petits villages, notamment en ce qui concerne les bureaux de poste.
S’agissant plus particulièrement des gendarmeries, monsieur Sutour, je suis très attachée au maillage territorial…
M. Didier Boulaud. Vous l’étiez, mais vous ne l’êtes plus !
M. Didier Boulaud. Vous étiez tellement attachée aux gendarmeries que vous les avez récupérées au ministère de l’intérieur !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Ce maillage existe, et il continuera d’exister ! Pour autant, il nous faut réfléchir à un meilleur fonctionnement des brigades. Dans votre département, par exemple, monsieur le sénateur, sur une distance de quinze kilomètres, sur un axe routier, on trouve trois brigades de gendarmerie. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Plusieurs sénateurs du groupe socialiste. Où ça ?
M. René-Pierre Signé. C’est faux ! Venez voir !
M. Jean-Pierre Sueur. C’est l’exception !