M. le président. L'amendement n° 49, présenté par Mme Schurch, M. Billout, Mme Didier, MM. Danglot et Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Mireille Schurch.

Mme Mireille Schurch. Sans surprise, nous présentons un amendement visant à supprimer l’article 1er du projet de loi.

La directive communautaire ne prévoit la réalisation d’une étude qu’à l’horizon de 2012 et uniquement dans l’objectif de préparer une ouverture plus large. Or, pendant la présidence française de l’Union européenne, un tel processus aurait pu être engagé, ce qui a été demandé à trois reprises durant les six mois de mandat par le syndicat européen des transports, notamment lors de la manifestation du 13 novembre dernier. Mais ce n’est pas le choix qui a été fait.

Nous considérons que la libéralisation du transport de voyageurs pose directement la question du maintien d’un service public des transports, comme en témoigne votre volonté de modifier l’intitulé de la section I du chapitre I du titre II de la LOTI où la notion de service public disparaît.

Se pose également la question du maintien de l’opérateur public – la SNCF –, puisque nous voyons, là encore, les prémisses d’un découpage de son activité, notamment avec la séparation comptable de la gestion de l’infrastructure et de l’exploitation des services de transports.

Pour notre part, nous considérons que le modèle d’une entreprise intégrée est un atout pour notre pays et un gage pour la sécurité.

La mission de service public confiée à la SNCF risque finalement d’être menacée par cette ouverture à la concurrence, surtout si la notion de cabotage fait l’objet d’une lecture extensive par la commission de régulation des activités ferroviaires.

En effet, il est à craindre que les nouveaux opérateurs ne s’emparent des lignes rentables, comme celles du TGV, et que la SNCF, n’ayant plus les ressources nécessaires pour effectuer une péréquation entre les activités rentables et celles qui le sont moins, n’abandonne progressivement – c’est d’ailleurs ce qui est en train de se passer pour le fret ferroviaire – l’ensemble des lignes jugées inutiles, économiquement parlant. Une telle dérive remettrait gravement en cause la présence sur l’ensemble du territoire d’une offre de transport. C’est la notion même de service public qui serait donc mise à mal.

Nous sommes également circonspects sur les bénéfices de cette ouverture à la concurrence pour les usagers. En effet, les entreprises privées sont là pour faire des bénéfices et ne sont pas dépositaires de missions de service public. Il faudra donc que l’offre qu’elles proposent soit suffisamment rentable pour leurs actionnaires. La concurrence risque donc de se porter notamment sur les normes sociales pour les personnels des entreprises. À ce titre, nous savons bien que les mécanismes de dumping social sont devenus monnaie courante au sein de l’Union européenne et constituent d’ailleurs le principal avantage concurrentiel de la route sur le rail.

Cette libéralisation fait également peser des risques sur la sécurité des usagers. En effet, il est à craindre que les nouveaux entrants ne rognent sur les normes minimales de sécurité qu’ils considèrent comme un coût. Au demeurant, nous l’avons rappelé lors de la présentation de notre motion tendant à opposer la question préalable, il est intéressant de constater la frilosité des opérateurs privés, qui craignent de voir des normes techniques de sécurité trop contraignantes s’appliquer à eux, et qu’ils considéreraient comme des entraves à leur compétitivité. On risque donc de voir les exigences de rentabilité financière prendre le pas sur la réponse aux besoins et à la sécurité des circulations.

Sur le fond, et dans l’esprit des objectifs du Grenelle de l’environnement, ajouter une concurrence interne au rail, en plus de celle qui s’exerce avec la route, n’est pas de bon augure pour les missions confiées à la SNCF en vue du développement de l’offre de transport et donc dans l’objectif d’un rééquilibrage modal.

Le groupe CRC-SPG propose, pour sa part, un autre modèle pour une Europe ferroviaire fondée sur les coopérations, l’élévation des conditions sociales des travailleurs, la sécurité des circulations et des investissements publics afin de développer durablement le ferroviaire et de participer au rééquilibrage multimodal.

Mes chers collègues, nous vous invitons à supprimer cet article, qui ne répond pas à ces objectifs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Francis Grignon, rapporteur. Madame Schurch, je vous remercie d’avoir parlé du rapport d’information portant sur le fonctionnement et le financement des infrastructures de transports terrestres qui a été fait au nom de la commission des affaires économiques.

Dans ce domaine, que les choses soient claires : nous sommes d’accord pour dire que la sanctuarisation des moyens de RFF et la régénération du réseau sont une nécessité. En revanche, nous ne préconisons pas les mêmes moyens pour parvenir à atteindre ces objectifs. Espérons qu’un jour nous arriverons à être sur la même voie. 

J’en viens à votre amendement de suppression.

Vous demandez purement et simplement d’abandonner la transposition du troisième paquet ferroviaire. Reconnaissez qu’il serait difficile à la commission d’émettre un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet également un avis défavorable.

Cela étant, je voudrais revenir quelques instants sur un sujet qui a été évoqué tout à l’heure et qui est très important.

Monsieur Teston, sachez que la refonte des péages est un exercice auquel se livreront désormais tous les gouvernements, quelle que soit leur couleur politique, afin d’en faire un véritable outil économique de gestion du système ferroviaire.

Le décret n’a pas du tout été pris en catimini. (M. Michel Teston est dubitatif.) De grands débats ont eu lieu dans la presse ; nous avons également consulté l’Association des régions de France, présidée par votre collègue député Alain Rousset, ou encore l’Union des transports publics et ferroviaires, qui regroupe l’ensemble des entreprises françaises du secteur.

Pour répondre à votre question, je vous précise que notre objectif est de fixer la redevance à son prix réel, étant entendu que, afin d’éviter d’impacter les clients et d’avoir des effets négatifs en matière d’aménagement du territoire, l’État compense la différence. Réseau ferré de France dispose ainsi de moyens accrus, et c’est ce qui lui a permis de signer un contrat d’objectifs de 13 milliards d’euros avec l’État prévoyant des régénérations beaucoup plus importantes que par le passé.

Je vous signale au passage que, dans le plan de relance, un certain nombre d’opérations de régénération ont été accélérées. Les cartes des opérations sur le réseau ferroviaire pour 2009 qui ont été publiées dans La Vie du rail ou dans d’autres revues ferroviaires montrent très clairement qu’on a changé de braquet.

Tout cela nous permettra notamment, madame Goulet, de tripler la voie entre Paris et Granville le moment venu.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. Charles Revet. Il n’y en a que pour Mme Goulet aujourd’hui ! (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 49.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 1, présenté par M. Grignon, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Remplacer la seconde phrase du second alinéa du 1° de cet article par deux phrases ainsi rédigées :

Lorsque la divulgation de ces informations est susceptible de porter atteinte au secret des affaires, leur détenteur peut demander que leur diffusion à ces personnes publiques soit assurée par le ministre chargé des transports. Dans ce cas, celui-ci désigne les services habilités à procéder à cette diffusion, en précise les conditions et modalités garantissant le respect de ce secret et arrête la nature des informations pouvant être rendues publiques.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Francis Grignon, rapporteur. Les données économiques en matière de trafic et de coûts, notamment d'exploitation, relatives aux transports ferroviaires sont indispensables aux personnes publiques qui sont en charge du développement de ces infrastructures de transport, y compris les gares et les postes multimodaux. Lorsqu’une collectivité locale veut faire construire un parking près d’une gare, par exemple, il lui est nécessaire de connaître la fréquence du trafic.

Or certaines de ces données internes à des opérateurs soumis à la concurrence sont couvertes par le secret des affaires. Leur divulgation pourrait en effet leur porter préjudice.

Le présent amendement vise donc à encadrer les risques liés à une telle divulgation. Ainsi, il reviendra à un service habilité par le ministre des transports d'organiser la diffusion des informations, tout en veillant à mettre en œuvre des modalités, telles que l'agrégation des données internes ou individuelles, et des conditions – mise en place d'accords de confidentialité, sécurisations des fichiers, etc. – qui permettront aux divers acteurs de remettre ces données confidentielles en toute confiance.

Parallèlement, le ministère des transports définira a priori les catégories de données pouvant être rendues publiques sans porter atteinte à ce secret : statistiques de trafic annuel dans les grandes gares, trafic, etc.

Tel est l’objet de l’amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 82, présenté par MM. Teston, Daudigny, Bourquin, Ries et Mirassou, Mme Bourzai, MM. Patriat, Percheron, Courteau et Boutant, Mme Bonnefoy, M. Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter le deuxième alinéa du c du 2° de cet article par les mots :

et sous réserve de réciprocité de ces accords sur le marché de l'État tiers en question

La parole est à M. Michel Teston.

M. Michel Teston. Dans cet article 1er figure une série de dispositions dont l’objectif est l’uniformisation des règles en vigueur au sein des États membres de l’Union européenne en matière ferroviaire. Le principe de la reconnaissance mutuelle est l’un des moyens couramment utilisé en Europe.

L’article 1er consacre le principe de la reconnaissance mutuelle entre États membres de l’Union européenne rendu obligatoire par la directive 2008/57/CE, qui dispose dans le paragraphe 5 de son article 21 que « Toute autorisation accordée par l’un des États membres est valide dans tous les autres États membres, […]. Les États membres précisent, en adoptant des règles nationales spécifiques ou par la voie des dispositions nationales transposant la présente directive, si des autorisations supplémentaires sont nécessaires, conformément aux dispositions applicables de l’article 23 dans le cas des véhicules conformes aux STI ou de l’article 25 dans le cas de véhicules non conformes aux STI. »

Cette disposition devrait éviter que les États membres n’invoquent des règles nationales pour imposer des exigences inutiles et des vérifications redondantes à la mise en service de nouveaux matériels sur leur territoire. Nous n’y sommes bien sûr pas opposés.

En revanche, le Gouvernement a choisi d’étendre cette reconnaissance mutuelle aux autres États « appliquant des règles techniques et de sécurité équivalentes à celles applicables dans l’Union », ce que n’impose pas la directive que je viens de rappeler.

Les services de l’établissement français de sécurité ferroviaire ont-ils la possibilité d’apprécier ces équivalences entre les règles techniques et de sécurité auxquelles sont soumis ces autres industriels ?

Un dirigeant d’un grand constructeur ferroviaire européen a estimé récemment que les pays occidentaux « devraient refuser d’acheter des trains chinois » pour dénoncer la fermeture progressive du géant asiatique aux fournisseurs étrangers. Dans le Financial Times, au début du mois de janvier, il a ajouté : « Si le marché [chinois] se ferme aujourd’hui, nous ne pensons pas que ce soit une bonne idée que les autres pays ouvrent leurs marchés à une telle technologie parce qu’il n’y a plus de réciprocité ».

Les enjeux sont importants puisque la Chine souhaiterait privilégier les trains de conception chinoise, comme pour la future ligne à grande vitesse Shanghai-Pékin, alors que les constructeurs chinois essaient de prendre pied à l’étranger, au détriment des trois géants du secteur de la construction ferroviaire : Alstom, Bombardier Transportation et Siemens.

En Europe, il existe un précédent : dans le secteur de la construction navale, une démarche de mise en place de la reconnaissance mutuelle avait finalement été abandonnée, à la suite des difficultés soulevées par les sociétés de contrôle des entreprises de construction, notamment chinoises et hongkongaises.

C’est pourquoi nous vous proposons d’assortir la reconnaissance mutuelle d’une condition de réciprocité.

Par le vote de cet amendement, mes chers collègues, vous conservez l’esprit original du projet de loi sur ce point, et vous garantissez également les principes d’une concurrence équitable qui doit s’imposer dans les relations que l’Union entretient avec des marchés étrangers.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Francis Grignon, rapporteur. Nous avons eu en commission un débat assez long sur ce thème, aussi me permettrez-vous, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, de développer mon argumentation.

En guise de remarque préliminaire, je me demande si les auteurs de cet amendement ont bien perçu que les dispositions du projet de loi concernent la possibilité pour un matériel roulant de passer les frontières sans avoir besoin de faire l’objet d’une obligation de mise en exploitation à chaque fois qu’il traverse une frontière nationale. Ce système de reconnaissance mutuelle est la base de la construction d’un espace de libre circulation ferroviaire. Il n’est pas question spécifiquement d’exportation de matériel d’un pays vers un autre. La problématique est donc celle de la sécurité des équipements et non celle d’un protectionnisme industriel.

Cela étant dit, je comprends la préoccupation de nos collègues, mais leur proposition est en contradiction directe avec nos obligations communautaires, et ce quel que soit le cas de figure.

Premier cas : lorsqu’il s’agit de matériel d’un autre pays de l’Union, nous n’avons pas le choix puisque la directive nous impose à tous d’accepter le matériel mis en exploitation chez les autres. Il ne s’agit donc ici que d’une transposition du droit européen ; il y a déjà réciprocité par définition.

Deuxième cas : quand il s’agit du matériel d’un pays ayant signé un accord avec l’Union européenne, nous ne pouvons pas non plus imposer des conditions nationales restreignant l’application d’un acte juridique qui engage les vingt-sept États membres. Rappelons d’ailleurs qu’aucun accord de ce type n’a encore été signé par la Commission européenne. Mais lorsque le cas se présentera, il conviendra bien sûr de veiller à Bruxelles à ce que la Commission exige la réciprocité.

Quant au troisième cas, celui d’un accord bilatéral signé directement avec la France, il n’est plus envisageable dans la mesure où, précisément, les autorisations de circulation de matériel roulant relèvent désormais du niveau communautaire.

Les auteurs de cet amendement soulèvent une question réelle, mais l’on n’y répondra pas en insérant dans le texte des dispositions violant directement le droit communautaire. Il revient en revanche au Conseil et au Parlement européen de s’assurer que la Commission veille au respect du principe de réciprocité dans les accords de reconnaissance qu’elle pourrait signer avec des pays tiers.

Cela pourrait tout à fait faire l’objet d’une résolution européenne, comme nous l’avons évoqué en commission, qui pourrait être examinée par la commission des affaires économiques, et ce d’autant plus qu’aucun accord de reconnaissance tel que prévu par le texte n’a encore été signé entre l’Union européenne et un pays tiers.

Vous comprendrez donc que la commission émette, si cet amendement est maintenu, un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Le Gouvernement est également défavorable à l’amendement.

Je voudrais dire à M. Teston comme aux autres sénateurs de l’opposition qu’il ne s’agit nullement d’une position de principe du Gouvernement à l’égard de tous les amendements présentés par l’opposition. Nous aurons l’occasion, à d’autres moments, de donner un avis favorable. (Ah ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. Michel Teston, pour explication de vote.

M. Michel Teston. J’ai bien entendu l’argument de Francis Grignon, qu’il avait d'ailleurs développé devant la commission des affaires économiques.

M. Charles Revet. C’est logique !

M. Michel Teston. Notre rapporteur considère qu’il appartient à l’Union européenne de prendre en compte la notion de réciprocité dans ses relations avec les États extérieurs à l’Union.

Cela étant, l’adoption de notre amendement donnerait un argument supplémentaire au Gouvernement pour faire valoir auprès de l’Union européenne la prise en compte de cette notion de réciprocité dans les échanges avec les autres pays.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 82.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 2, présenté par M. Grignon, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans le dernier alinéa (d) du 2° de cet article, remplacer le mot :

cinquième

par le mot :

quatrième

La parole est à M. le rapporteur.

M. Francis Grignon, rapporteur. Il s’agit simplement de rectifier une erreur de référence juridique.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 42 est présenté par Mme Schurch, M. Billout, Mme Didier, MM. Danglot et Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 83 est présenté par MM. Teston, Daudigny, Bourquin, Ries et Mirassou, Mme Bourzai, MM. Patriat, Percheron, Courteau et Boutant, Mme Bonnefoy, M. Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Dans le 4° de cet article, après le mot :

ferroviaire

insérer les mots :

et du service public ferroviaire

La parole est à Mme Mireille Schurch, pour présenter l’amendement n° 42.

Mme Mireille Schurch. Depuis de nombreuses années, la logique capitaliste nous a fait perdre de vue la nécessité d’un développement équilibré et solidaire de notre territoire. Or, il y a là un service public à préserver en raison de l’urgence écologique. Le Grenelle I prévoit que le recours au transport ferroviaire doit être favorisé et encouragé.

Vous le savez, le droit communautaire n’a pas d’influence sur la qualification ou non d’un service public. Il appartient à la puissance publique d’identifier l’intérêt général. Il nous revient, en tant que législateur, de manifester notre volonté politique pour le maintien de cette activité collective. Il ne devrait pas en être autrement face à l’urgence écologique.

Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, voilà 365 ans, l’expression « service public » faisait son apparition dans un édit relatif aux transports. Aujourd’hui, le Gouvernement nous propose de mettre fin à plus de trois siècles et demi d’histoire et d’attachement à un service d’importance vitale.

Le réseau, dans sa conception initiale, n’aurait pourtant pas existé sans l’intervention publique. Mis à part le réseau ferré lui-même, nous connaissons tous le caractère central de la gare dans l’aménagement de nos communes. Les gares doivent être considérées comme des biens publics gérés par du personnel pour développer la politique intermodale. Il nous paraît donc inacceptable que le projet de loi retire de l’intitulé du titre l’expression « service public ».

L’ouverture à la concurrence que vous proposez n’est pas incompatible avec le maintien de la notion de service public ferroviaire dans ce texte.

La Commission européenne a adopté un règlement sur les obligations de service public dans les transports, règlement qui instaure un cadre légal d’octroi de compensations ou de droits exclusifs pour les contrats de service public. Ce règlement conduit, quoique de façon imparfaite, à préserver les services publics de transports.

C’est pourquoi nous demandons que l’intitulé de la section I du chapitre I du titre II de la LOTI soit ainsi rédigé : « De l’organisation du transport ferroviaire et du service public ferroviaire ».

M. le président. La parole est à M. Michel Teston, pour présenter l’amendement n° 83.

M. Michel Teston. Mes chers collègues, alors qu’il a été décidé de réduire le droit d’amendement, droit pourtant individuel, il est à mon sens plus que jamais nécessaire de réfléchir au poids des mots, ceux que nous utilisons mais aussi ceux que nous nous abstenons d’utiliser.

Cette remarque a pour objet d’attirer votre attention sur une omission de ce projet de loi sur laquelle nous souhaitons revenir avec cet amendement.

En effet, alors que la loi 30 décembre 1982 d’orientation des transports intérieurs avait pour objectif l’organisation d’un véritable service public des transports, ces mots ont disparu dans le projet de loi qui nous est soumis.

Pourtant, le Gouvernement n’a de cesse d’évoquer le service public. À la lecture de l’exposé des motifs du présent projet de loi, nous constatons qu’il est régulièrement fait référence « au bon fonctionnement du service public ». Si cet exposé des motifs est sincère, le Gouvernement entend lui aussi garantir la protection du service public ferroviaire.

Alors que la commission des transports du Parlement européen ne se cache pas de préparer déjà une ouverture des marchés nationaux d’ici à 2017, alors que certains aimeraient expérimenter la libéralisation du transport de voyageurs au niveau régional, il est de notre devoir, mes chers collègues, de rappeler notre objectif premier, qui est de garantir l’intégrité du service public du transport ferroviaire.

C’est pourquoi je vous appelle solennellement à voter ces deux amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Francis Grignon, rapporteur. Mes chers collègues, vous avez raison : ce chapitre de la LOTI correspond vraiment à des notions de service public. Aussi, la commission a émis un avis favorable sur ces deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Le Gouvernement est également favorable à ces amendements.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 42 et 83.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de neuf amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 48, présenté par Mme Schurch, M. Billout, Mme Didier, MM. Danglot et Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer le texte proposé par le 5° de cet article pour l'article 17-1 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs.

La parole est à Mme Mireille Schurch.

Mme Mireille Schurch. L’article 1er du présent projet de loi vise à insérer un article 17-1 dans la LOTI.

Les principes contenus dans cet article reprennent pour partie les dispositions du décret du 7 mars 2003 pris sur le fondement des deux premiers paquets ferroviaires. Ainsi, cet article entreprend un exercice de définition du réseau ouvert aux opérateurs. Il inscrit le principe de la séparation comptable des activités d’opérateur de transport et de gestionnaire d’infrastructure, principe contenu dans la directive 91/440/CEE.

Aujourd’hui, les missions de RFF en termes de gestion des circulations et d’entretien des équipements de sécurité sont réalisées par la SNCF.

Cette mission a été confiée à l’opérateur public dans la LOTI pour les deux raisons suivantes : d’une part, les compétences pour l’exercice de ces missions n’étaient détenues que par les personnels de l’entreprise publique ; d’autre part, les rédacteurs de la loi avaient légitimement considéré qu’il n’était pas cohérent de séparer la gestion des infrastructures de celui qui s’occupe du transport. Lorsque cette séparation a été réalisée, notamment en Grande-Bretagne, elle s’est accompagnée de catastrophes dramatiques.

Nous considérons qu’il est important de conserver un système ferroviaire intégré. Même si le projet de loi qui nous est soumis ne prévoit qu’une séparation comptable, les discussions au sein de la commission des affaires économiques ont montré que cette approche était déjà dépassée puisque l’on évoque maintenant un nouvel établissement public.

Pour toutes les raisons que nous avons indiquées, nous sommes défavorables à une telle évolution, qui éclaterait encore un peu plus le système ferroviaire et découperait l’entreprise publique SNCF.

Par ailleurs, ce texte stipule que d’autres personnes que des entreprises ferroviaires peuvent demander l’attribution de sillons. Il s’agit notamment d’offrir cette faculté aux chargeurs. Nous ne sommes pas favorables à cet élargissement, notamment parce qu’il permet d’introduire une nouvelle concurrence entre chargeurs et entreprises ferroviaires, en lieu et place des nécessaires collaborations.

De surcroît, il est à craindre que les chargeurs n’exercent une pression dans le choix de l’entreprise ferroviaire qui exploitera le sillon dans le sens du moins-disant social.

Voilà pourquoi nous demandons la suppression de ce nouvel article 17-1 dans la LOTI.

M. le président. L'amendement n° 73, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :

 Dans le premier alinéa du I du texte proposé par le 5° de cet article pour l'article 17-1 de la loi n° 82-4153 du 30 décembre 1982, après les mots :

ouvertes à la circulation publique

insérer les mots :

ou désaffectées

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Je ne suis pas spécialiste de la vie du rail, mais mon département est confronté à un certain nombre de problèmes avec des voies ferrées ou avec des gares désaffectées, je pense notamment à la célèbre station de Bagnoles-de-l’Orne.

Mon amendement a pour objet de permettre aux collectivités qui en exprimeraient le désir, selon des modalités propres, de réhabiliter des tronçons de voies ferrées désaffectées.

M. le président. L'amendement n° 72, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :

Après le premier alinéa du I du texte proposé par le 5° de cet article pour l'article 17-1 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Il comprend aussi les lignes même non ouvertes au public qui desservent des exploitations minières ou des carrières.

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Toujours dans le même esprit, je vous propose de compléter cet article en y ajoutant les mots : « Il comprend aussi les lignes même non ouvertes au public qui desservent des exploitations minières ou des carrières. »

Si vous le permettez, monsieur le secrétaire d’État, mes explications seront un peu plus longues. En effet, je ne me suis pas exprimée lors de la discussion générale, car j’estimais plus astucieux de garder du temps de parole pour présenter mes amendements. En l’occurrence, je souhaite aborder un sujet un peu délicat, celui des carrières.

D’ailleurs, nous aurons de nouveau l’occasion de discuter de cette question lors de l’examen de l’article 2. Pour ma part, je suis mobilisée sur un dossier douloureux, que vous suivez depuis 2002, monsieur le secrétaire d’État. Vous vous êtes même engagé à trouver une solution. À mon sens, la privatisation d’une partie des lignes couvrant les carrières est tout à fait « Grenello-compatible ». Mais je pense que nous aurons l’occasion d’en débattre plus longuement lors de l’examen de l’article 2.