Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, puisqu’il est toujours sage d’en revenir à la littérature, je voudrais évoquer la comédie de Beaumarchais, où le célèbre Figaro explique que, dès lors qu’il n’évoque aucun des sujets qui fâchent, il peut parler de tout ou à peu près de tout, sous le contrôle de deux ou trois censeurs !
Bien sûr, monsieur le secrétaire d’État, le droit de résolution constitue une mesure positive puisqu’elle sera une nouvelle forme d’expression du Parlement. Mais le Gouvernement, lors du débat sur la révision constitutionnelle, a tellement tenu à le restreindre qu’il a été précisé : « Sont irrecevables et ne peuvent être inscrites à l’ordre du jour les propositions de résolution dont le Gouvernement estime que leur adoption ou leur rejet serait de nature à mettre en cause sa responsabilité ». Qu’il est regrettable qu’une telle restriction ait été inscrite dans la Constitution, dans un pays de liberté comme le nôtre !
M. Pierre Fauchon. Monsieur Sueur, relisez les débats sur la révision constitutionnelle ! La Constitution est révisée depuis six mois !
M. Jean-Pierre Sueur. Cher collègue Fauchon, ne réagissez pas ainsi, car je voulais justement rendre hommage aux propos que vous avez bien voulu tenir en expliquant que le rôle principal du Parlement était de faire la loi.
M. Pierre Fauchon. Elle est faite !
M. Jean-Pierre Michel. Nous avons bien l’intention d’en reparler ! Nous avons tout le temps !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nous en sommes à la loi organique !
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur Fauchon, nous débattons d’un nouveau texte. Je vous saurai donc gré de garder le calme et la sérénité qui font partie de vos principales qualités !
Nous examinons un projet de loi organique. Vous nous avez dit que notre rôle était de légiférer, et j’ai pu ajouter que le débat permettait de bien légiférer. De toute façon, les fondateurs de notre République ont considéré que les lois devaient être faites non pas par des professeurs de droit ou des experts en législation, mais par les représentants du peuple qui en discutent librement.
Par conséquent, lorsque nous débattons, nous pouvons aborder tout sujet et évoquer ce qui relève de la responsabilité du Gouvernement, même si cela ne lui convient pas.
Je ne comprends donc pas pourquoi il a fallu écrire dans la Constitution – et qu’il faille encore le préciser à l’article 3 –que seules sont recevables les résolutions dont le Gouvernement estime qu’elles ne mettent pas en cause sa responsabilité.
Monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement est responsable de beaucoup de choses !
M. Jean-Pierre Sueur. Si l’un de nos collègues décidait de déposer une résolution sur ce qui se passe actuellement aux Antilles, le ministre concerné rétorquerait-il que cela est susceptible de mettre en cause la responsabilité du Gouvernement ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Évidemment !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Pas forcément !
M. Jean-Pierre Sueur. De même, si nous évoquons l’industrie automobile, comme l’a fait à juste titre notre collègue Jean-Pierre Michel, le Gouvernement aura toute possibilité d’affirmer que sa responsabilité est engagée, comme c’est d’ailleurs très largement le cas à la suite du plan qui a été annoncé lundi dernier. Je pourrais multiplier ainsi les exemples.
Pour en revenir à Beaumarchais, le système proposé s’apparente à un droit de veto donné au Gouvernement sur les sujets que le Parlement serait susceptible d’aborder par le biais des résolutions. Aujourd'hui, un tel droit de veto n’existe pas et ne saurait être accepté pour ce qui est des débats proprement législatifs.
Je le dis, je le redis, parce qu’il faut que cela soit su, et chacun en conviendra : ces dispositions ne s’inscrivent pas dans le droit-fil des libertés républicaines. (M. le secrétaire d’État exprime son désaccord.) Monsieur le secrétaire d’État, nous ne pouvons nous résoudre à cette forme de censure, de droit de veto, où les considérations du Gouvernement l’emportent.
M. Jean-Pierre Sueur. Vous qui avez écrit – brillamment ! – sur des ministres de la IIIe République, vous le savez bien, jamais ceux-ci n’auraient admis que fût ainsi limité le droit d’expression parlementaire ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Roger Karoutchi, secrétaire d’État. Mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, je vous en prie, il faut raison garder, car j’ai entendu des propos pour le moins curieux ! À vous entendre, on restreint, on contraint, on empêche, on met son veto ; certains en viennent même à invoquer la IIIe République. C’est tout de même extraordinaire !
Le droit de résolution est un droit nouveau, qui n’existait plus. Comment pourrions-nous, alors, mettre en place un système qui le contraigne ?
M. Bernard Frimat. C’est un droit fictif !
M. Louis Mermaz. Un leurre !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d’État. Non, monsieur Mermaz, ce droit s’ajoute au système parlementaire actuel, dans lequel le Parlement dispose d’une batterie de moyens – propositions de loi, questions orales, questions écrites – pour contrôler l’action du Gouvernement. La révision constitutionnelle introduit d’ailleurs d’autres éléments de cette nature, parmi lesquels la semaine de contrôle, que nous avons évoquée hier lors de la conférence des présidents, et la semaine d’initiative législative.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Tout à fait !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d’État. Autrement dit, un nouvel équilibre se met en place dans les relations entre l’exécutif et le législatif.
À gauche comme à droite, tout le monde s’était accordé pour dire qu’il n’était pas question d’en revenir aux résolutions de la IVe République, sources d’instabilité et de blocage. C’est d’ailleurs pour cette raison que les constituants de 1958, y compris ceux qui étaient issus de la mouvance socialiste, ont tenu à supprimer ce droit.
M. Michel Charasse. À commencer par François Mitterrand !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d’État. Aujourd'hui, le droit de résolution est réintroduit, mais avec la volonté affichée d’éviter les errances et les dérapages du passé. Je ne prétends pas que le système trouvé soit forcément idéal, et le débat permettra peut-être de le faire évoluer.
Quoi qu’il en soit, il s’agit d’un droit nouveau pour le Parlement. Ce n’est ni une arme absolue, ni un leurre. Je souhaite sincèrement que chacun le prenne comme un droit supplémentaire qui vient s’ajouter aux dispositions existantes et nouvelles, comme le partage de l’ordre du jour, pour que les pouvoirs du Gouvernement et du Parlement soient plus équilibrés.
Nous verrons à l’usage, dans les mois et les années qui viennent, si ce droit nouveau permet cet équilibre et, lorsque notre expérience sera suffisante, s’il est nécessaire de le modifier d’une manière ou d’une autre.
Voilà un droit qui n’existe plus dans ce pays depuis plus de cinquante ans et que nous rétablissons en l’encadrant, il est vrai, afin éviter les erreurs de la IVe République. Laissons-le prospérer et nous verrons s’il convient, à terme, de le modifier dans le sens d’un meilleur équilibre ! Quoi qu’il en soit, il s’agit bien d’un droit supplémentaire pour le Parlement.
Mme la présidente. L’amendement n° 71, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. J’ai déjà défendu cet amendement lors de mon intervention sur l’article, mais je tiens tout de même à reprendre la parole. Après tout, c’est encore mon droit !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Il ne faut pas en abuser !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous faites constamment référence, monsieur le secrétaire d’État, à des périodes de l’histoire où la France connaissait un régime parlementaire. Cessez de le faire ! Nous ne vivons plus sous ce type de régime depuis les révisions constitutionnelles de 1958 et de 1962 ! (Protestations sur les travées de l’UMP.)
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Si !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nous sommes dans un régime que je ne qualifierai pas de présidentiel, puisqu’il ne comporte pas les contreparties prévues par un tel régime. Je l’appellerai régime présidentialiste, d’autres le nomment régime monarchique. En tout état de cause, nous ne sommes plus sous la IIIe ou la IVe République. Comparaison n’est pas raison !
Le droit prévu à l’article 1er pourrait constituer un droit nouveau pour les parlementaires, un droit visant à rééquilibrer et à modifier les institutions issues des révisions constitutionnelles de 1958 et de 1962. Or il a été immédiatement restreint, de telle sorte qu’il représente non pas un droit nouveau, mais un simple moyen de présenter des vœux pieux.
Il est écrit à l’article 19 de la Charte constitutionnelle du 4 juin 1814 : « Les chambres ont la faculté de supplier le Roi de proposer une loi sur quelque objet que ce soit, et d’indiquer ce qu’il leur paraît convenable que la loi contienne ». Cela ne vous rappelle-t-il pas notre régime plutôt que la IVe République ? (M. le secrétaire d’État s’esclaffe.)
M. Patrice Gélard. Ce n’est pas très convaincant !
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. Je ne suis pas loin de partager ce qui a été dit par les uns et les autres au sujet des résolutions. Pour ma part, je n’étais pas très favorable, lors du débat sur la révision constitutionnelle, à cette disposition.
Au fond, qu’est-ce que le droit de résolution au sens parlementaire du texte, sinon une invention de la procédure parlementaire, sous les IIIe et IVe Républiques, destinée plus ou moins à renverser le Gouvernement ?
M. René Garrec. Exactement !
M. Michel Charasse. C’était cela, le système des résolutions !
M. René Garrec. Tout à fait !
M. Michel Charasse. Ces résolutions se concluaient généralement, mes chers amis, par le vote d’un ordre du jour contraire à celui qui avait été demandé par le Gouvernement. C’était donc le rejet de l’ordre du jour gouvernemental qui entraînait la démission du Gouvernement, sans que celui-ci y soit d’ailleurs contraint, sauf en cas de majorité qualifiée, qui n’a été atteinte qu’une ou deux fois sous la IVe République, ce qui a conduit, notamment, à la dissolution demandée par le gouvernement dirigé par Edgar Faure.
Je n’étais donc pas très favorable à cette disposition qui participe à l’instabilité. Mais il se trouve, mes chers collègues, qu’elle a été votée. Or, si nous commençons à refuser d’adopter les projets de loi organique et les règlements nécessaires à l’application des nouvelles dispositions de la Constitution, alors il ne fallait pas voter la Constitution !
Nous ne pouvons pas – et je suis prêt à vous donner des explications sur le fond ! –, refuser d’appliquer un texte constitutionnel. Dans ce cas, nous pourrions faire de même à l’occasion de tous les articles inscrits dans ce projet de loi organique, puis refuser d’appliquer les lois organiques suivantes, en disant qu’on n’applique rien !
Nous nous trouverons alors dans une situation où la Constitution, qui est ce qu’elle est et dont on peut penser ce que l’on veut, ne sera pas appliquée parce que l’on aura refusé de la mettre en œuvre en votant les textes nécessaires !
Si je suis d’accord sur le fond avec ce qui a été dit, je ne peux donc pas suivre cette démarche qui consiste à refuser le principe même des textes nécessaires à l’application de la Constitution.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cet amendement ayant été présenté, il est normal que la commission donne son avis !
Madame Borvo Cohen-Seat, votre amendement est paradoxal puisqu’il tend à supprimer l’article 1er, qui a pour objet de favoriser l’exercice du droit de résolution. Je rappelle que ce droit avait été proposé par le comité présidé par Édouard Balladur. Il s’agissait, à l’époque, d’éviter le vote des lois mémorielles, qui créent nombre de difficultés. Légiférer pour l’histoire, pour ma part, je n’aime pas cela !
Le problème n’est d’ailleurs pas le sujet des résolutions, puisque le Parlement aura le droit d’en adopter sur des questions d’actualité. Les résolutions ne devront pas avoir pour objet de mettre en cause la responsabilité du Gouvernement ou de lui adresser des injonctions. Mais rien n’interdit de déposer des résolutions, et de les faire voter, sur des questions d’intérêt général ou pour exprimer des souhaits du Parlement.
Je ne souhaite pas que l’on revienne sur le débat constitutionnel que nous avons eu sur ce sujet. Il s’agit aujourd’hui de mettre en application ce droit de résolution qui figure dans la Constitution et les conditions de sa mise en œuvre. La commission proposera ensuite des amendements tendant à aménager et à clarifier ce droit individuel afin qu’il représente véritablement un droit nouveau pour les parlementaires.
Je ne puis qu’être défavorable à l’amendement n° 71, car l’article 1er ne fait qu’appliquer un article de la Constitution résultant de la dernière révision constitutionnelle.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Roger Karoutchi, secrétaire d’État. Conformément à ce que j’ai expliqué, j’émets un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Fauchon, pour explication de vote.
M. Pierre Fauchon. J’ai dit avant-hier, lors de l’examen de la motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité, que je m’inquiétais que l’article 13 du projet de loi organique prévoie certaines hypothèses pouvant conduire au vote d’amendements sans discussion. J’avais conclu mon intervention en disant qu’il fallait y réfléchir.
Ce qui vient de se passer alimente ma réflexion dans un sens favorable à la thèse selon laquelle, au-delà d’une certaine limite, il convient de mettre fin à nos discussions. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat sourit.) Les propos tenus sont quelquefois tellement oiseux et inutiles qu’ils ont pour résultat de nous discréditer complètement.
Nous avons adopté, que cela plaise ou non, la dernière révision constitutionnelle, qui offre au Parlement un droit nouveau, même s’il est extrêmement restreint. J’étais d’ailleurs de ceux qui regrettaient la rédaction de l’article en question. Mais cet article a été adopté ! Or, comme si tel n’était pas le cas, M. Sueur reprend le débat à zéro et nous explique que nous aurions dû voter différemment.
M. Jean-Pierre Sueur. Je parlais des articles 1er, 2 et 3 du présent texte !
M. Pierre Fauchon. Quant à Mme Borvo Cohen-Seat, elle propose de supprimer purement et simplement le droit de résolution. Nous nous trouvons dans une situation absurde et complètement surréaliste ! En outre, cette discussion n’intéresse personne, sinon les vingt ou trente sénateurs ici présents, et surtout pas nos compatriotes !
La bonne réflexion, qui n’est en aucun cas politique, doit en revanche nous conduire à trouver une organisation de nos travaux plus digne et plus conforme à l’idée que l’on peut se faire d’une assemblée parlementaire ! (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP ; M. Michel Charasse applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Frimat, pour explication de vote.
M. Bernard Frimat. J’écoute toujours M. Pierre Fauchon avec beaucoup d’intérêt, mais il ne faut pas tout confondre, comme il vient de le faire.
M. Michel Charasse. On est bien obligé d’appliquer le texte, même s’il ne plaît pas !
M. Bernard Frimat. Le groupe socialiste est intervenu à deux reprises sur cet article. M. Sueur a évoqué deux articles du projet de loi organique. Cela ne me paraît pas exorbitant ! Il me semble tout à fait normal que l’on puisse dire, à l’occasion de ces prises de parole, que le droit de résolution tel qu’il résulte du présent texte n’est pas conforme à ce que nous souhaitions.
Nous n’allons pas voter l’amendement de Mme Borvo Cohen-Seat, non parce que nous sommes en désaccord avec elle sur le fond – au contraire, nous l’approuvons ! –, mais parce que la révision constitutionnelle a été votée, même si nous y étions défavorables. Comme l’a expliqué Michel Charasse, nous sommes dans l’obligation d’adopter une loi organique précisant les modalités de fonctionnement de ce droit de résolution réduit à l’approbation et aux acquêts. Ce faisant, nous n’accomplissons que notre devoir de parlementaire.
Pour ce qui est de l’intérêt de nos discussions, je vous rappelle, monsieur Fauchon, que nous ne sommes pas maîtres de l’ordre du jour ; nous débattons des textes que l’on nous propose. Je suis tout à fait d’accord avec vous pour dire qu’il n’était pas de la première urgence d’obliger le Parlement à débattre de la suppression de la publicité à la télévision, qui ne figurait pas parmi les préoccupations majeures des Français, et de susciter de telles discussions parlementaires en décembre et en janvier.
Il n’était pas non plus indispensable de procéder de la même façon pour un certain nombre d’autres textes. D’autres démarches étaient envisageables !
Mais, lorsque la table est mise, comme c’est le cas aujourd’hui en prévision du 18 février, nous sommes bien obligés d’ingurgiter le brouet que l’on nous propose !
M. Pierre Fauchon. C’est joliment dit !
Mme la présidente. Je suis saisi de neuf amendements faisant l’objet d'une discussion commune.
L’amendement n° 2, présenté par M. Hyest, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Le nombre de propositions de résolution déposées par un ou plusieurs membres d'une assemblée ne peut être limité.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de simplification rédactionnelle visant à supprimer la précision inutile selon laquelle les propositions de résolution sont déposées sur le bureau de l’assemblée. Cela paraît évident.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 194, présenté par MM. Frimat, Bel, Mermaz, Sueur, Rebsamen et Michel, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Anziani, Bérit-Débat, Bodin, Collombat, C. Gautier et Godefroy, Mme Klès, MM. Mahéas, Peyronnet, Povinelli et Sutour, Mme Tasca, MM. Tuheiava, Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après le premier alinéa de l'amendement n° 2, insérer un alinéa ainsi rédigé :
Le dépôt d'une proposition de résolution sur le bureau d'une assemblée au titre de l'article 34-1 de la Constitution est un droit individuel des membres de cette assemblée.
La parole est à M. Claude Bérit-Débat.
M. Claude Bérit-Débat. Ce sous-amendement a un double objet.
Tout d’abord, il vise à simplifier la rédaction de l’article 1er. Puisque le projet de loi organique ne fixe pas le nombre minimal de signataires d’une proposition de résolution, il n’y a pas lieu de préciser que ces résolutions doivent être signées par un ou plusieurs parlementaires.
Ensuite, au-delà de la simplification qui est proposée, ce sous-amendement a aussi et surtout une portée de principe.
Il convient de solenniser la nouvelle rédaction de l’article 1er en affirmant clairement que le droit d'initiative en matière de proposition de résolution au titre de l’article 34-1 de la Constitution est bien un droit individuel des membres du Parlement.
On le voit, les préoccupations de forme rejoignent les préoccupations de fond, et je dirais même les préoccupations fondamentales. Préciser ici que le droit de résolution est un droit individuel des parlementaires revient à considérer que l’activité législative est avant tout, et je vous prie de m’excuser pour cette tautologie, le fait des parlementaires, qui sont en premier lieu, individuellement, des représentants de la nation.
En tant que représentant de la nation, chacun d’entre nous doit donc pouvoir s’exprimer librement, en conscience. Cela doit valoir pour les résolutions, mais aussi pour les amendements. Mais n’anticipons pas !
Le droit de résolution est un droit de chaque parlementaire. Il est donc bon de réaffirmer dès à présent ce qui relève de l’individuel et du collectif dans ce projet de loi organique, en insistant bien sur les attributions que confère à chacun de nous notre fonction. Il me semble aussi nécessaire de bien s’accorder sur ce que l’on attend des représentants de la nation et sur le Parlement que nous souhaitons.
Si l’on veut un Parlement rénové, qui exerce au mieux un véritable contrôle politique et sa fonction législative, cela ne devra pas se faire contre les parlementaires.
Nous sommes tous, je crois, suffisamment responsables, et bien conscients des devoirs qui nous incombent. Si nous avons donc tous un devoir de responsabilité, chacun d’entre nous doit aussi avoir la garantie que ses droits seront respectés. C’est en s’appuyant sur cette éthique de responsabilité que nous pourrons donner enfin aux parlementaires les droits qui devraient être effectivement les leurs sous la Ve République. C’est en ce sens que la reconnaissance du droit d’initiative individuelle en matière de résolution nous paraît nécessaire.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 195, présenté par MM. Frimat, Bel, Mermaz, Sueur, Rebsamen et Michel, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Anziani, Bérit-Débat, Bodin, Collombat, C. Gautier et Godefroy, Mme Klès, MM. Mahéas, Peyronnet, Povinelli et Sutour, Mme Tasca, MM. Tuheiava, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. - Dans le second alinéa de l'amendement n° 2, après le mot :
déposées
insérer les mots :
sur le bureau d'une assemblée
II. - En conséquence dans le même alinéa, remplacer les mots :
d'une assemblée
par les mots :
de cette assemblée
La parole est à M. Jean-Pierre Michel.
M. Jean-Pierre Michel. M. Hyest, qui a pour habitude de défendre les droits du Parlement, tout au moins ceux du Sénat, nous présente néanmoins l’amendement n° 2, qui aboutit à restreindre les pouvoirs du Parlement. Il considère en effet qu’il est inutile de préciser que les propositions de résolutions seront déposées sur le bureau d’une assemblée.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. On ne le précise pas davantage pour les propositions de loi !
M. Jean-Pierre Michel. Donc, il donne pleins pouvoirs au président, puisque les propositions de résolution lui seront adressées directement.
Pour notre part, nous estimons cette précision indispensable. Le bureau est une instance collégiale au sein de laquelle toutes les sensibilités politiques sont représentées. Loin d’avoir un rôle secondaire, le bureau a la charge d’organiser nos débats et de se prononcer sur la procédure législative. Il est juge, par exemple, de la recevabilité des propositions de lois susceptibles d’avoir des conséquences financières ; il procède à la vérification du quorum.
Donc, dès le dépôt d’une proposition de résolution, le bureau sera en mesure de se prononcer sur sa recevabilité au titre de l’article 34-1. Il pourra aussi s’opposer au Gouvernement si celui-ci refuse d’inscrire cette proposition de résolution à l’ordre du jour de l’assemblée. En effet, nous proposerons ultérieurement une procédure permettant de trancher les différends entre le Gouvernement et l’assemblée sur l’exception d’irrecevabilité, et ce dans un délai réduit.
Par conséquent, il faut prévoir dans l’article que les propositions de résolution sont déposées sur le bureau des assemblées. Ce pouvoir ne relève pas uniquement du président de l’assemblée saisie au motif que, parmi les membres du bureau, certains ne sont pas conviés à la discussion politique qui devrait avoir lieu.
C’est la raison pour laquelle nous demandons, par ce sous-amendement, de revenir à la rédaction de l’Assemblée nationale.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 196, présenté par MM. Frimat, Bel, Mermaz, Sueur, Rebsamen et Michel, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Anziani, Bérit-Débat, Bodin, Collombat, C. Gautier et Godefroy, Mme Klès, MM. Mahéas, Peyronnet, Povinelli et Sutour, Mme Tasca, MM. Tuheiava, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa de l'amendement n° 2, remplacer le mot :
déposées
par les mots :
susceptibles d'être déposées à tout moment
La parole est à M. Bernard Frimat.
M. Bernard Frimat. Le sous-amendement n° 196 traite du moment du dépôt. Nous ne revenons pas sur le fait que ces résolutions, outre qu’elles sont très encadrées, se réduisent comme peau de chagrin. (M. le secrétaire d’État le conteste.) C’est notre sentiment, monsieur le secrétaire d’État, et je sais que vous allez le partager bientôt ! (Sourires.)
Le projet de loi organique comme la nouvelle rédaction proposée par M. le rapporteur ne mentionnent aucune période de dépôt des propositions de résolution. Si nous nous accordons tous sur le caractère individuel du droit de résolution, celui-ci n’a pas à être limité – il l’est déjà suffisamment par le contrôle du Gouvernement – dans le temps : les propositions de résolution doivent pouvoir être déposées à tout moment. Les droits du Parlement se trouveraient ainsi renforcés.
Le Président de la République, qui n’est pas l’un de mes auteurs favoris, avait déclaré, lors de la mise en place du comité Balladur : vous pourrez examiner l’opportunité de permettre au Parlement de déposer des résolutions « susceptibles d’influencer le travail gouvernemental ». Si ce dernier membre de phrase - au-delà de son côté un peu surréaliste – a un début de vérité, comme nous soupçonnons le Gouvernement de travailler aussi hors session, eh bien ! les parlementaires doivent pouvoir déposer des propositions de résolution à tout moment. Un certain nombre d’événements importants peuvent en effet survenir hors session…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est vrai !
M. Bernard Frimat. …et conduire les parlementaires, à titre individuel ou au nom de leur groupe, à déposer une proposition de résolution afin d’alimenter le débat public.
Nous souhaitons donc que les parlementaires soient libres de déposer, lorsqu’ils l’estiment nécessaire, des propositions de résolution, même s’il ne s’agit que de toutes petites résolutions. (Sourires.)
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 197, présenté par MM. Frimat, Bel, Mermaz, Sueur, Rebsamen et Michel, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Anziani, Bérit-Débat, Bodin, Collombat, C. Gautier et Godefroy, Mme Klès, MM. Mahéas, Peyronnet, Povinelli et Sutour, Mme Tasca, MM. Tuheiava, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa de l'amendement n° 2, après le mot :
assemblée
insérer les mots :
, au cours d'une session ordinaire et extraordinaire,
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Tout d’abord, je souhaite remercier M. le secrétaire d’État des précisions qu’il a bien voulu m’apporter sur Jean Zay, pour lequel nous partageons la même admiration.