M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier.
Mme Anne-Marie Escoffier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il serait bien banal de rappeler la place qu’occupe le sport dans toutes nos sociétés, et cela depuis la nuit des temps.
Au pays du mens sana in corpore sano, au pays de Pierre de Coubertin, comment cependant ne pas souligner une fois encore combien la pratique du sport est source d’épanouissement, combien elle favorise le lien social et constitue un facteur d’intégration majeur pour les publics en difficulté ?
Dès lors, vous comprendrez, monsieur le secrétaire d’État, que je ne puisse sans quelque difficulté accepter de lire que « la révision générale des politiques publiques vous a simplement conduit à repenser et à recentrer les dispositifs d’intervention, dans un souci de meilleure efficacité de la dépense publique ». Votre budget ne saurait se limiter à une gestion comptable faisant fi des réalités territoriales et, au-delà, des valeurs humaines essentielles que développe le sport. Et ce ne sont pas les chiffres avancés dans la présentation pluriannuelle de l’évolution des crédits de paiement de la mission qui seront de nature à nous rassurer !
Je voudrais débuter mon intervention par des remarques portant sur le programme 219 intitulé « Sport ». Ce programme vise à contribuer au développement du sport pour tous et du sport de haut niveau.
Avec 429 millions d’euros de crédits consolidés, c’est-à-dire ceux qui sont prévus par le programme « Sport » auxquels il faut ajouter les moyens du Centre national de développement du sport, le CNDS, on enregistre une baisse de 9 %.
L’analyse de la ventilation de ces crédits montre une baisse de l’action « Promotion du sport pour le plus grand nombre ».
La fin du Plan national de développement du sport se traduit par un net repli des crédits du CNDS, chargé d’assurer un meilleur maillage du territoire national en équipements, ce qui est essentiel. Les crédits enregistrent une baisse de 21,6 %.
Comment ne pas s’étonner d’un tel désengagement alors que vous affichez, et nous y croyons, une volonté d’accroître la pratique d’activités physiques et sportives en renforçant la dimension éducative et le rôle du sport en matière d’insertion et de cohésion sociale ? Il est donc paradoxal de réduire les crédits liés à cette action.
Chacun s’accorde pourtant à reconnaître qu’il est primordial de mettre l’accent sur le développement du sport à l’école, élément déterminant dans la formation de l’individu. La pratique du sport dans le cadre scolaire, avec un personnel compétent, permet, à n’en pas douter, de combattre les inégalités sociales et territoriales. Un Zinedine Zidane, Ruthénois comme moi, un Djibril Cissé ont fait rêver des milliers d’enfants et ont suscité des vocations de jeunes sportifs, dont la vie a été réorientée par le sport !
Dans cette opération, l’État se prive de ses moyens d’intervention au niveau territorial au profit du sport pour tous.
Le CNDS cogéré par le mouvement sportif aura t-il la même vision que l’État dans ce domaine ? Et que penser de l’augmentation continue des planchers des subventions du CNDS, au profit d’économies de gestion des dossiers ?
Qu’adviendra-t-il des subventions versées aux petits clubs, et notamment à ceux qui pratiquent le sport en milieu rural ?
L’irrigation du territoire en matière de financement sportif ne doit pas être assimilée à une politique vaine de saupoudrage. Elle est essentielle, elle est la vie de ces territoires ruraux qui font de chaque petit match – vous le savez parfaitement, monsieur le secrétaire d’État – une fête locale.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
Mme Anne-Marie Escoffier. Diminuer les crédits du CNDS alors que ce dernier est en charge du développement du sport, ne pas reconduire le Plan national de développement du sport, tout cela dans un même budget, c’est une déception pour notre groupe !
Je reviens un instant sur la part de financement accordée au sport de haut niveau : je sais que ce dernier est une vitrine et un vecteur de promotion. Il ne faudrait toutefois pas que le grand vainqueur de ce budget soit exclusivement le sport d’élite, au détriment du sport pour tous.
Encourager la pratique du sport, soutenir les milliers d’associations sportives, les millions de bénévoles, devraient être au cœur de ce budget. Les champions de demain sont aujourd’hui des anonymes dans nos clubs.
Je voudrais évoquer la loi du 15 décembre 2004 portant diverses dispositions relatives au sport professionnel.
Ce texte a permis de créer un dispositif d’exonération de charges sociales accordé au titre de la rémunération du droit à l’image des sportifs professionnels.
Ce dispositif est certes couteux, puisque, en 2008, le droit à l’image collective a fait l’objet d’une inscription de 32 millions d’euros ; mais surtout, il n’est pas maîtrisable par l’État payeur dans la mesure où il dépend de la masse salariale des sportifs bénéficiaires. C’est tout l’objet de la discussion de l’article 78 du projet de loi de finances rattaché à cette mission.
Le financement de l’intégralité du coût de la compensation auprès de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale des exonérations de charges sociales représente une somme importante dans ce budget.
À l’heure où le Gouvernement demande à chaque Français d’augmenter sa contribution au financement de l’assurance maladie, l’État est contraint de signer un chèque de plusieurs dizaines de millions d’euros, tiré sur les contribuables au bénéfice des dirigeants de clubs sportifs à objet commercial.
Cette dépense publique nouvelle, nous la devons à une requalification d’une partie de la rémunération des sportifs professionnels en redevances d’exploitation de droits à l’image qui, à l’inverse des salaires auxquels elles se substituent, sont exonérées de charges sociales.
Le dispositif bénéficie uniquement aux sportifs professionnels les mieux payés puisque la mesure ne s’applique qu’au-delà d’un seuil de rémunération fixé au double du plafond de la sécurité sociale. Ainsi, les sportifs modestes sont complètement lésés, seuls les mieux payés pouvant accéder au système.
Selon un rapport de la commission des finances du Sénat, il en résulte un coût important pour les finances publiques. La compensation de l’exonération des cotisations sociales au titre du droit à l’image collective est supportée par l’État.
On peut dès lors s’interroger sur la pertinence du maintien en vigueur de l’article L. 222-2 du code du sport. Mon collègue Yvon Collin s’est particulièrement investi dans la bonne gestion de ce dossier ; je m’en fais aujourd’hui l’interprète.
Je voudrais aborder la question de l’Institut national du sport et de l’éducation physique, l’INSEP. Le chantier avance, mais des interrogations demeurent sur sa vocation même. Ne serait-il pas opportun de rendre l’Institut plus accessible aux petites fédérations qui pourraient y inscrire leurs meilleurs sportifs ? Ce fonctionnement ne risque-t-il pas, à terme, d’être mis à mal par des structures privées qui viendront concurrencer cet outil public mis au service du sport ?
Dans le même registre, il est important de souligner l’inflation de la pénalité nette payée par l’État au consortium Stade de France, qui s’élève à 6,2 millions d’euros. Les prochaines négociations de ce contrat devront faire l’objet d’une grande vigilance. Une sous-utilisation du stade aura des conséquences sur la pénalité versée par l’État. Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous préciser votre position sur ce sujet ?
Je souhaite enfin attirer votre attention sur le mouvement associatif : ce dernier remplit des missions de service public et de cohésion sociale sur notre territoire, personne ne peut en douter.
Combien de projets associatifs vont-ils être menacés, notamment en faveur des jeunes ? La fragilisation du secteur associatif et de l’éducation populaire va accroître la précarité de ces secteurs pourtant créateurs d’emplois. L’affaiblissement des moyens consacrés aux réseaux associatifs de jeunesse fragilise leur fonctionnement voire leur existence.
Le développement du sport est avant tout une mission de service public, et laisser penser que des financements privés vont se substituer aux baisses de crédits de l’État est dangereux. Les logiques ne sont pas les mêmes. L’État, dans ce domaine, comme dans celui de l’éducation ou de la santé, ne peut pas avoir une gestion purement comptable.
Dans nos départements, nos régions, nous sommes les premiers interlocuteurs du monde sportif. Que nous soyons élu local ou départemental, nous nous inquiétons quant à l’avenir.
Je sais, monsieur le secrétaire d’État, que vous mettrez toute votre détermination, tout votre esprit de compétition à sauvegarder le sport dans ses dimensions les plus essentielles, garantes de la bonne santé de notre société. Mais, aujourd’hui, le sport et sa politique nous semblent malades : le groupe RDSE, que je représente, ne peut qu’exprimer son avis défavorable sur le budget que vous nous présentez. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à Mme Bernadette Bourzai.
Mme Bernadette Bourzai. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je souhaite d’abord exprimer mon regret que ce débat ait été reporté à aujourd’hui, empêchant de nombreux sénateurs d’y assister et de participer aux échanges sur un sujet qui, s’il est peu doté au niveau budgétaire, concerne le quotidien de nombre de nos concitoyens. J’associe donc à mon intervention sur ce budget Mme Marie-Christine Blandin, qui n’a pu se libérer et a souhaité que je porte sa parole sur de nombreux points.
La part relativement belle ayant été faite au programme « Sport », le programme « Jeunesse et vie associative » ne représente que 15,1 % des crédits de paiement de toute la mission, soit 119,1 millions d’euros. À périmètre constant, ces crédits affichent, par rapport à 2008, une baisse de 12,1 % en autorisations d’engagement et de 11,7 % en crédits de paiement.
Toutes les actions de ce programme sont touchées par les coupes budgétaires : la vie associative, moins 13,7 % ; la jeunesse, moins 12,8 % ; l’éducation populaire, moins 0,9 % ; la promotion de l’animation et de l’encadrement associatif, moins 8,5 %. Il n’y a, hélas ! que des « moins » !
Ces données chiffrées et la nouvelle diminution nette des crédits par rapport à 2008 s’inscrivent dans une tendance lourde de désengagement de l’État depuis 2005. Contrairement aux annonces qui avaient été faites, la jeunesse et la vie associative sont donc loin de constituer une priorité pour le Gouvernement, ainsi que ces chiffres l’attestent clairement.
Mme Odette Terrade. Effectivement !
Mme Bernadette Bourzai. Cette situation est vraiment regrettable et, selon moi, dangereuse. En effet, le mouvement associatif, qui remplit des missions d’intérêt général, promeut des activités socialement utiles et joue un rôle essentiel de cohésion sociale et d’intégration dans notre pays, risque d’être profondément déstabilisé si cette logique de restrictions est poursuivie.
Paradoxalement, nous pouvons lire dans le fascicule bleu budgétaire concernant la mission « Sport, jeunesse et vie associative » que les associations constituent « un relais efficace des politiques publiques qu’elles complètent ou enrichissent ». Encore faudrait-il que le budget suive !
D’ailleurs, les perspectives de dégradation de la situation économique et sociale et le climat de morosité actuel déjà prégnant devraient, au contraire, pousser le Gouvernement à soutenir ces initiatives qui créent du lien social, remplissent des missions de service public, et créent aussi des emplois directs et induits.
Les associations représentent, dans notre pays, un million d’emplois salariés ; ne l’oublions pas, au risque d’aggraver finalement la situation économique et sociale en voulant faire des économies.
Pour certaines associations, la diminution de la subvention de l’État pourra atteindre plus de 40 % en deux ans. Autant prononcer leur arrêt de mort directement, car cette précarité n’est pas soutenable !
Or, comme le rappelle notre rapporteur, « ces interventions de l’État sont nécessaires parce qu’elles permettent de "boucler des budgets", mais aussi et surtout parce qu’elles offrent une reconnaissance aux bénéficiaires qui leur permet souvent d’obtenir d’autres soutiens. » Ces autres soutiens viennent en particulier des collectivités locales et territoriales, lesquelles, une nouvelle fois, seront sollicitées pour compenser les défaillances de l’État.
Quant aux actions en faveur de la jeunesse, les coupes sont encore plus claires.
L’opération « Envie d’agir », qui permet aux jeunes de réaliser des actions à caractère culturel, sportif, humanitaire ou civique, a perdu près de 66 % de son budget. Comment pouvez-vous accepter, monsieur le secrétaire d’État, que le gouvernement français abandonne ces actions et renonce à favoriser les initiatives de la jeunesse ?
Nous devons au contraire tout faire pour développer la participation des jeunes à la vie publique, promouvoir leur esprit d’initiative, d’entreprise et de créativité. C’est le devoir d’une société d’aider ses jeunes à agir et à s’engager. C’est pourquoi je soutiens pleinement l’amendement de mon collègue M. Michel Sergent concernant cette ligne budgétaire.
Quant à l’éducation populaire, « elle fait un travail remarquable pour les enfants, il faut la soutenir et lui donner les moyens de se développer », indiquait le Président de la République voilà à peine quelques mois. Je trouve donc assez curieux que le budget de cette action ne suive pas les injonctions présidentielles.
En effet, le budget du fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire, dit FONJEP, va être réduit, ce qui aura pour effet de supprimer de nombreux postes de personnels permanents remplissant des fonctions d’animation et de gestion dans des mouvements de jeunesse, des associations d’éducation populaire ou des organismes privés à but non lucratif concourant à l’action sociale.
Monsieur le secrétaire d’État, comment pensez-vous compenser les pertes financières et donc humaines des associations qui étaient bénéficiaires, et comment allez-vous remplacer ce dispositif pluriannuel et cofinancé qui constitue un véritable outil d’aide au développement de l’éducation populaire ?
Pour sa part, Mme Marie-Christine Blandin s’interroge sur un autre point : présenté en « action » pour 2009, en « objectif » en 2008, le programme « Jeunesse et vie associative » ne compte plus le soutien à l’économie sociale et solidaire. La permanence et la pertinence de celle-ci en temps de crise rend-elle le sujet trop gênant ?
Elle souhaite préciser que, dans la région Nord-Pas-de-Calais, entre 2002 et 2006, les établissements relevant de l’économie sociale ont pourtant augmenté de 19 %. Ce secteur crée des emplois, il apporte des réponses à la précarité et au désir d’insertion dans une activité qui a un sens.
Où se trouve aujourd’hui la politique nationale de soutien à l’expérimentation et à l’innovation sociale ? Où se trouve sa délégation interministérielle ? Que sont devenues les paroles du candidat Nicolas Sarkozy flattant le bénévolat et envisageant « une année de cotisations de retraite pour dix ans de bénévolat » ?
Vous pourriez nous répondre que l’effort gouvernemental en matière de politique de la jeunesse est interministériel ; nous en avons conscience.
Le programme « Jeunesse et vie associative » ne prend pas en compte l’ensemble des politiques publiques orientées vers la jeunesse, beaucoup d’entre elles étant pilotées par d’autres ministères – l’éducation nationale, l’agriculture, le logement, les affaires sociales. On pourrait donc espérer que les coupes budgétaires que connaît ce programme soient compensées par ailleurs. Malheureusement, il n’en est rien.
Même si nous ne disposons pas d’un document récapitulant de façon transversale l’ensemble des actions gouvernementales menées en faveur de la jeunesse et de la vie associative, nous pouvons hélas ! constater que la tendance à la réduction budgétaire des actions en faveur de la jeunesse et de la vie associative est la même dans les autres ministères.
Je vous en citerai deux exemples.
Plus de 1 500 postes d’enseignants mis à la disposition des associations parascolaires et d’éducation populaire vont être supprimés par le ministère de l’éducation nationale, mettant en grave difficulté les associations éducatives complémentaires de l’enseignement public, qui bénéficient depuis très longtemps de l’agrément de ce ministère et du soutien de l’État.
Or, les enseignants mis à la disposition de ces associations sont garants de la qualité éducative des projets, comme du respect des principes fondamentaux de l’école de la République. Leurs missions sont régulièrement évaluées et les évaluations confirment, le plus souvent, le bien-fondé de leur action, car leur rôle est essentiel. Ils permettent notamment de favoriser la liaison entre les établissements d’enseignement et les organismes associatifs à caractère éducatif.
Sont concernés les CEMEA, les Centres d’entraînement aux méthodes d’éducation active, les Éclaireuses éclaireurs de France, la FOEVEN, la Fédération des œuvres éducatives et de vacances de l’éducation nationale, la Jeunesse au plein air, les FRANCAS, la Fédération nationale laïque de structures et d’activités éducatives, sociales et culturelles, la FLASEN, la Ligue de l’enseignement, l’OCCE, l’Office central de la coopération à l’école, et la FGPEP, la Fédération générale des associations départementales des pupilles de l’enseignement public, l’USEP, l’Union sportive de l’enseignement du premier degré, au sein de la Fédération multisports affinitaire UFOLEP. J’espère n’avoir oublié personne !
Cette « rupture de contrat » entre l’éducation nationale et ses premiers partenaires n’est pas acceptable ; elle l’est encore moins dans une période où les questions de formation, d’éducation à la citoyenneté, de réussite éducative, de laïcité, d’intégration sociale devraient être au premier plan.
Monsieur le secrétaire d’État, quelles mesures entendez-vous prendre pour compenser ces postes d’enseignants et la charge salariale afférente à leur remplacement, puisque nous savons que les fonds nécessaires ne se trouvent pas dans la ligne budgétaire relative à la vie associative ? Comment les associations seront-elles capables de répondre aux appels d’offres du ministère de l’éducation nationale sans ces moyens humains et donc sans cette ingénierie mise à leur disposition ?
De plus, « cerise sur le gâteau », ces associations ont appris très récemment, alors que la plupart des engagements financiers sont déjà bouclés, que le ministère de l’éducation nationale ne tiendrait pas ses engagements. Dès cette année, elles vont subir une réduction de 25 % du financement des actions conventionnées pour 2008, ce qui menace évidemment leur équilibre budgétaire et leur existence même dans un bon nombre de cas.
Sachez par exemple que, dans mon département, la Corrèze, 700 associations salarient aujourd’hui près de 50 personnes et regroupent près de 43 500 adhérents, soit un habitant sur cinq. C’est dire que cela touche tout le monde !
Avec les diminutions annoncées par le ministère de l’éducation nationale, qui correspondent à une amputation moyenne à l’horizon de 2010 de 70 % des divers financements reçus, c’est la mort annoncée de près d’un siècle d’accompagnement de l’école publique.
J’ai également de grandes inquiétudes concernant l’avenir des associations œuvrant pour l’animation en milieu rural. La suppression initialement prévue de leur ligne budgétaire de 7,5 millions d’euros dans le budget de l’agriculture et finalement compensée à hauteur de 700 000 euros va avoir de graves conséquences sur la vie en milieu rural et donc sur la cohésion territoriale.
Enfin, avec Mme Marie-Christine Blandin, je souhaite rappeler que, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, la RGPP, les personnels relevant des directions de la jeunesse, des sports et de la vie associative se posent légitiment des questions.
Ces personnels ont entendu parler de « partenariat rénové », de culture du résultat, de mise en concurrence et de code des marchés publics.
Mais comment peut-on assurer une mission éducative quand les relais naturels que sont les associations d’éducation populaire sont sabrés ? Comment travailler avec des effectifs revus à la baisse, des missions asséchées, vidées de leur contenu, et un avenir de guichet d’enregistrement des agréments ? Où est l’action d’accompagnement au projet, à la qualification et la stimulation, à l’accompagnement et à l’évaluation des acteurs ?
Vous l’aurez compris, monsieur le secrétaire d'État, les sénateurs socialistes et Verts ne voteront pas les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » pour 2009. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. Jean-François Voguet.
M. Jean-François Voguet. Monsieur le secrétaire d’État, les choix politiques portés par votre budget sont clairs, et la rupture annoncée aura bien lieu.
Que ce soit dans le domaine des sports, de la jeunesse ou de la vie associative, le mouvement de baisse engagé l’an dernier s’amplifiera dans les prochaines années.
L’heure n’est plus au manque d’ambition au ou saupoudrage, comme c’était le cas dans les budgets précédents. Au nom de la RGPP, la fameuse « régression généralisée des politiques publiques », voici le temps de la réduction drastique des dépenses publiques.
Le désengagement est tel, pour 2009, mais également dans vos prévisions pour 2010 et pour 2011, que l’on peut même s’interroger sur des budgets de si faibles montants. Peuvent-ils encore porter de réelles politiques publiques ? Nous commençons à en douter.
Prenons par exemple le domaine des sports.
Le total des crédits affectés au sport, en y intégrant le budget du Centre national pour le développement du sport passera de 474 millions d’euros à 429 millions d’euros, soit une baisse de 10 %. Et encore ! En tenant compte de l’érosion monétaire et des nouvelles dépenses, la diminution réelle est d’environ 70 millions, c'est-à-dire de 15 %.
En l’espace de deux ans, c'est-à-dire depuis que vous êtes aux affaires, monsieur le secrétaire d’État, les budgets en faveur du sport auront subi une baisse de près de 25 %.
Il en va de même de votre action en faveur de la jeunesse.
L’ancienne action « Protection de la jeunesse » étant intégrée au sein de l’action « Promotion des actions en faveur de la jeunesse », l’ensemble des financements au profit de la jeunesse passent en deux ans de 63 millions d’euros à seulement 50 millions d’euros, soit une chute de plus de 25 % si l’on tient compte de l’érosion monétaire.
Et que dire des moyens financiers pour soutenir la vie associative dans notre pays ?
L’an dernier, le Sénat s’était déjà ému des réductions prévues pour 2008. Aussi un amendement tendant à renforcer le budget de ce programme avait-il été adopté à l’unanimité.
Cette année, la baisse que vous prévoyez est encore plus forte. Le budget du programme « Jeunesse et vie associative » passe de 134 millions d’euros à 119 millions d’euros, soit une diminution de 11 %. En deux ans, les budgets en faveur de ce programme auront chuté de près de 15 %.
Devant des prévisions budgétaires aussi catastrophiques pour l’ensemble de cette mission, je ne dresserai pas l’analyse critique des dispositions budgétaires de chaque action. Certes, une telle étude serait nécessaire pour révéler les aspects les plus nocifs de vos choix. Mais les huit petites minutes dont je dispose ne sauraient suffire à examiner point par point votre budget. Aussi, je me bornerai à centrer mon intervention sur quatre aspects qui me paraissent essentiels et dangereux.
Tout d’abord, je voudrais évoquer les actions en faveur du sport pour le plus grand nombre, qui vont subir un véritable « tsunami de destruction budgétaire » ! Ce faisant, l’avenir du sport tout entier est aujourd’hui posé.
En l’occurrence, les dépenses de cette action passent de 27 millions d’euros à 22 millions d’euros, soit une baisse de 23 % en un an. C’est considérable, d’autant que, je vous le rappelle, la diminution avait déjà été de 23 % en 2008.
Dans le même temps, le Programme national de développement du sport, le PNDS, disparaît en 2009. L’an dernier, 39 millions d’euros de ce programme avaient été affectés à des actions en faveur du sport pour tous.
Pour 2009, ce sont près de 44 millions d’euros, soit les deux tiers des budgets précédents, qui disparaîtront. C’est évidemment inacceptable.
Même si l’on met de côté les fonds du PNDS, le budget de cette action passe de 54 millions d’euros en 2006 à 22 millions d’euros en 2009, soit une baisse de 60 %.
Ainsi, nous pouvons prendre les budgets dans tous les sens, les moyens mis à disposition de ces actions sont en voie de disparition.
À titre d’exemple, lorsque mon amie Marie-George Buffet créait les « coupons sport » pour aider les jeunes à s’inscrire dans un club sportif, les moyens financiers mis à disposition permettaient à près de 400 jeunes de ma ville d’être soutenus. Aujourd’hui, l’aide personnalisée en concerne 70. Voilà, me semble-t-il, un exemple éclairant sur l’action gouvernementale.
Il n’y a plus – en tout cas, c’est mon avis – de politique publique favorisant le sport pour tous.
D’ailleurs, le choc des chiffres est frontal et éclaire vos choix politiques. D’un côté, vous prévoyez de dépenser 22 millions d’euros en faveur des millions de licenciés sportifs. De l’autre, vous décidez de dépenser 26 millions d’euros au seul profit des quelques centaines de sportifs les mieux rémunérés et des clubs professionnels.
Aujourd’hui, plus encore qu’hier, si nous faisons appel à la solidarité des sportifs pour leur faire comprendre qu’il faut réduire les dépenses en ces temps de crise, nous ne devons écarter personne de l’effort collectif !
C’est pourquoi, monsieur le secrétaire d’État, je vous demande de revenir au plus vite sur cette disposition, qui n’a pas fait la preuve de son efficacité et qui est particulièrement injuste, car elle vient en réduction des sommes allouées au plus grand nombre.
Il est également urgent de réformer le contrat de concession du Stade de France.
Après dix ans de versement annuel de plusieurs millions d’euros – 6 millions d’euros en 2009 – aux actionnaires du consortium gérant ce stade, n’est-il pas temps de supprimer la clause sur le manque d’équipe résidente ?
Au vu du bilan de cette société, il apparaît qu’une équipe résidente n’est nullement nécessaire à la viabilité économique de ce fabuleux équipement.
Le deuxième aspect du budget des sports que je souhaite aborder concerne le CNDS et les investissements dans les équipements sportifs.
Depuis la création de ce centre, je ne cesse de réclamer une augmentation de ses financements. À chaque fois, il m’est répondu que ce n’est pas nécessaire, ce qui traduit une méconnaissance des réalités du terrain. En effet, les subventions du CNDS dépassent rarement 10 % des projets, ce qui constitue un faible effet de levier.
Néanmoins, il faut également rappeler que le nombre de départements dont la quantité d’équipements sportifs est inférieure à 80 % du taux moyen national n’évolue guère. Que ce soit pour les salles spécialisées, les gymnases, les plateaux d’éducation physique et sportive, ou EPS, et les piscines, le sous-équipement concerne, vous le savez, entre un quart et un tiers des départements. Au rythme actuel, compte tenu des financements disponibles, il nous faudra plus de trente ans pour permettre à ces départements de rattraper leur retard. Et je ne parle ici que du manque d’équipements neufs. Or chacun sait que l’état actuel des équipements sportifs nécessiterait un véritable plan national de rénovation.
Qu’on ne vienne plus dire que les fonds du CNDS sont suffisants ! D’ailleurs, votre ministère s’est désengagé : ses dépenses d’investissement sont en chute libre, passant de 54 millions d’euros à 38 millions d’euros en deux ans.
Oui, il faut renforcer les fonds disponibles du CNDS, en augmentant les prélèvements sur la Française des jeux, comme le préconise le Comité national olympique et sportif français, le CNOSF, et en déplafonnant ces prélèvements !
Le troisième aspect qui pose particulièrement problème dans votre projet de budget – cela a été évoqué à plusieurs reprises – concerne la vie associative. Ce problème est d’ailleurs posé dans toutes les missions budgétaires participant aux financements des associations. Je pense au sport, mais également à l’éducation nationale et au périscolaire, aux loisirs et aux vacances, au développement rural, à l’accompagnement social, à la santé, ainsi qu’à la justice et à l’action internationale.
Partout, l’heure est aux réductions. C’est dramatique pour l’activité de centaines d’associations qui portent la solidarité et le soutien aux populations en difficulté à travers le pays et qui œuvrent également en faveur du plus grand nombre, par d’innombrables actions sociales pour faciliter et soutenir la vie de chacun et pour renforcer le vivre-ensemble.
Ainsi, dans le programme « Jeunesse et vie associative », les dépenses d’intervention en faveur des associations passent de 71 millions d’euros à 65 millions d’euros, soit – cela a été souligné – une baisse de 9 %, qui vient de surcroît après des années difficiles. En 2008, les subventions aux associations nationales agréées avaient déjà diminué de 14 %. Et vous poursuivez ce mouvement en 2009, avec une nouvelle réduction de 13 %. Une baisse de plus du quart des subventions sur deux ans, c’est insupportable !
Mais c’est sans doute dans le domaine du soutien à l’emploi associatif et au bénévolat que les coupes sont les plus franches. Ce sont celles qui hypothèquent l’avenir.
Vous baissez les subventions dans le cadre du Conseil du développement de la vie associative, du Fonds de coopération de la jeunesse et l’éducation populaire, le FONJEP, de l’accompagnement à la formation des bénévoles et de l’emploi-formation pour l’encadrement associatif, et vous mettez un coup de frein décisif au volontariat associatif.
Ainsi, dans le domaine de la vie associative comme dans celui des sports, les financements publics contredisent totalement les diverses déclarations du Président de la République, qui s’est pourtant engagé à soutenir et à développer ces activités.
Enfin, le dernier aspect qui pose problème dans votre budget porte sur les moyens du service public et de l’administration dont vous avez la charge.
Dans le cadre de la réorganisation territoriale annoncée, une perte de lisibilité, de visibilité, de compétence et de proximité des actions et des soutiens sur le terrain est fortement à craindre, d’autant que cette nouvelle organisation intégrera une baisse supplémentaire sensible des effectifs.
Après un transfert de 710 postes vers les personnels attachés au programme « Sport », ce sont les personnels relevant du programme « Conduite et pilotage de la politique du sport, de la jeunesse et de la vie associative » qui seront exclusivement touchés par cette réduction d’effectifs, soit une baisse de près de 10 %. Nous ne pouvons que condamner cette mesure de restriction.
Monsieur le secrétaire d’État, vous poursuivez l’œuvre de destruction de l’emploi public entreprise avec constance par votre prédécesseur à ce poste.
En outre, nous sommes inquiets quant à l’avenir des grandes structures publiques qui soutiennent l’action de votre ministère.
Nous souhaiterions obtenir des éclaircissements et des engagements concernant l’avenir de l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire et des centres régionaux de l’éducation populaire et de sport, dont les missions en faveur de la promotion du sport pour tous et au profit de la jeunesse et de l’éducation populaire semblent être en voie de disparition, avec des budgets en chute de près de 50 %. Des bruits de fermeture circulent. Quels sont donc vos objectifs ?
Vous le comprendrez aisément, pour toutes ces raisons, et pour bien d’autres encore, le groupe que je représente ne peut que rejeter le projet de budget de cette mission. Nous refusons de voir disparaître des pans entiers des politiques publiques en faveur du sport, de la jeunesse et de la vie associative que vos prédécesseurs s’étaient attachés à construire. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)