M. Xavier Pintat, rapporteur pour avis. Je ne doute pas que les armées seront prêtes à libérer rapidement des fréquences, mais votre ministère est-il maître de la procédure et du calendrier ? Qui, au nom de l’État, traitera avec les opérateurs et décidera des conditions de vente ? Dans quels délais cette opération pourra–t-elle être réalisée ? Nous souhaiterions avoir des précisions à ce sujet.
Ma deuxième question concerne la fin de l’exercice 2008. Pourrez-vous utiliser le volant des crédits reportés des gestions précédentes pour amortir l’impact des annulations de crédits d’équipement prévues et de l’absence de financement complémentaire des frégates multi-missions ? C’est un point important pour le démarrage de la future loi de programmation dans de bonnes conditions.
J’en viens aux actions du programme 146 « Équipement des forces » que j’ai particulièrement étudiées, les autres actions de ce programme ayant été traitées par mon collègue Daniel Reiner.
S’agissant de la dissuasion, son rôle fondamental dans notre stratégie de défense a été réaffirmé par le Livre blanc, de même que le maintien de ses deux composantes, le format des forces aériennes stratégiques étant, lui, réduit d’un tiers.
Nous constatons que le renouvellement de nos moyens de dissuasion se trouve actuellement dans une phase très active, avec deux échéances majeures : l’arrivée de l’ASMP/A l’an prochain et celle du M51 en 2010.
Dans le domaine spatial, le Livre blanc a tracé des perspectives claires, à moyen terme, qui étaient attendues, avec la pérennisation de nos capacités actuelles et l’acquisition de capacités nouvelles dans le domaine de l’écoute, tout d’abord, puis, ultérieurement, dans celui de la surveillance de l’espace et de l’alerte avancée.
La priorité est, désormais, de préparer sans plus tarder le système successeur de notre satellite d’observation Helios. Il est d’ailleurs heureux de constater que le programme Musis sera mené dans un cadre européen, bien que l’Italie n’ait pas pour l’instant statué sur sa participation.
M. Xavier Pintat, rapporteur pour avis. Bien !
Le projet de budget pour 2009 prévoit également un renforcement de nos capacités de télécommunications spatiales. La coopération franco-italienne sur le satellite militaire Sicral 2 est, semble-t-il, confirmée.
La commission des affaires étrangères souhaiterait toutefois avoir, monsieur le ministre, quelques précisions sur la démarche d’externalisation de nos télécommunications spatiales, qui est à l’étude.
M. Xavier Pintat, rapporteur pour avis. En particulier, la cession de tout ou partie du système Syracuse II a-t-elle d’ores et déjà été intégrée dans les prévisions de recettes exceptionnelles pour les trois années à venir ?
M. Xavier Pintat, rapporteur pour avis. J’ai donc ma réponse ! (Sourires.)
Compte tenu de l’effort programmé pour l’équipement, tout en gardant à l’esprit le défi que représente l’obtention de toutes les ressources attendues au cours de l’exercice 2009, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, a émis un avis favorable sur les crédits du programme « Équipement des forces » comme sur ceux de l’ensemble de la mission « Défense ».(Applaudissements.)
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Reiner, rapporteur pour avis.
M. Daniel Reiner, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je limiterai mon propos à quelques observations. Pour le reste, je vous renvoie au rapport pour avis que j’ai rédigé avec notre collègue Xavier Pintat, et dont nous avons la faiblesse de penser qu’il contient toutes les informations utiles sur le programme 146 « Équipement des forces ».
Je parlerai de la partie qui concerne les équipements conventionnels et de la délégation générale pour l’armement, la DGA.
Ce budget présente deux caractéristiques essentielles, que la commission a considérées comme positives.
Premièrement, ce budget marque la fin de présentations budgétaires souvent flatteuses, mais parfois trompeuses, visant à faire accroire que nos armées bénéficieront d’équipements que nos finances ne pourraient plus leur accorder.
En effet, j’observe que, dans le même temps, les crédits de paiement augmentent de 7,7 % et les autorisations d’engagement doublent d’une année sur l’autre – c’est peut-être même voir un peu grand –, dans le cadre d’un budget global de la défense lui-même en augmentation de près de 5,4 %, et ce grâce à des recettes exceptionnelles. C’est naturellement cette constatation qui a conduit la majorité de la commission des affaires étrangères à recommander l’adoption de ces crédits.
Parallèlement, toutes les cibles, ou presque, des programmes conventionnels à effet majeur diminuent très sensiblement : le nombre de Rafale a été ramené de 294 à 286 ; celui des FREMM, de 17 à 11 ; celui des véhicules blindés de combat d’infanterie, les VBCI, de 700 à 630 et, enfin, les missiles de croisière tirés à partir de la mer ont été ramenés de 250 à 200 unités. Dans le même ordre d’idées, le programme de l’avion de transport stratégique multirôle transport tanker, ou MRTT, n’est pas lancé. Enfin et surtout, la décision de lancer le second porte-avions, qui était gagée par 3 milliards d’euros d’autorisations d’engagement dans le projet de loi de finances pour 2008, est reportée à 2011 ou 2012.
Des cibles qui diminuent, des crédits qui augmentent : c’est la fameuse « bosse » de 35 milliards d’euros – c'est-à-dire la grosse bosse – de programmes non financés qu’il a fallu ainsi solder. De ce point de vue, ce budget assume donc une harmonisation entre nos ambitions et nos moyens, ce qui est plutôt louable en soi.
Second aspect positif de ce budget : il traduit une conception nouvelle de nos forces armées. En effet, envisagées globalement, l’augmentation des crédits d’équipements, la diminution des effectifs et la réduction du nombre des implantations manifestent un réel changement d’organisation. L’armée française qui verra le jour sera certes d’un format réduit,…
M. Jean-Pierre Chevènement. Sérieusement réduit !
M. Daniel Reiner. … mais elle devrait être ainsi mieux équipée, plus réactive et, partant, plus efficace.
De ce point de vue, ce budget est un budget de commencement : il marque, dix ans après, le vrai début de la professionnalisation. C’est une mutation considérable pour nos militaires et nous devons tous, ici, saluer les efforts considérables qu’elle les oblige à consentir.
J’observe, au passage, que ce budget marque également l’abandon de l’idée selon laquelle les forces armées participaient à l’aménagement du territoire. Nous l’avons redit en commission, des contreparties adéquates devront être trouvées, afin de ne pas fragiliser davantage les territoires le plus lourdement mis à contribution. Je pense là, en particulier, à ceux de l’est de la France, vous comprenez bien pourquoi : je viens de Lorraine ! (Sourires.)
Je dois néanmoins relever, s’agissant de ce projet de budget, des hypothèques, des parts d’ombre, des zones d’incertitude. J’en relèverai principalement trois.
Premièrement, le financement des FREMM pour 2008 n’est pas assuré, à concurrence de 420 millions d’euros, et rien n’est prévu à cet effet dans le projet de loi de finances rectificatives. Comment le Gouvernement entend-il s’y prendre ? Beaucoup se posent la question.
Deuxièmement, le besoin de financement des opérations extérieures pour 2008 reste non financé à hauteur de 380 millions d’euros. La loi de finances rectificative pour 2008 prévoit certes l’ouverture de 259 millions d’euros de crédits – nous le savons depuis la semaine dernière –, mais il reste 121 millions d’euros à trouver. J’ai cru comprendre que les ministères civils seraient mis à contribution : il serait bon que vous nous le confirmiez, monsieur le ministre.
Troisièmement, les ressources exceptionnelles des comptes d’affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien » et « Gestion du patrimoine immobilier de l’État » s’élèvent à un montant cumulé de 1,6 milliard d’euros. Il est évident que, si ces ressources ne sont pas au rendez-vous, les équipements militaires et, en particulier, les équipements conventionnels en pâtiront.
Ainsi, les incertitudes portent sur un total de 2,1 milliards d’euros, alors que le budget des équipements conventionnels – hors crédits de la DGA, qui sont obligatoires – est de l’ordre de 6 milliards d’euros : je ne voudrais pas que ce budget devienne la variable d’ajustement.
Une telle incertitude ne serait sans doute pas admise pour une collectivité locale. Mais le budget de l’État n’est pas celui d’une collectivité locale !
Cela étant, la majorité du Sénat considère qu’il faut voir le bon côté des choses et la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées demande donc au Sénat de voter les crédits de cette mission. (Applaudissements.)
Mme la présidente. La parole est à M. André Dulait, rapporteur pour avis.
M. André Dulait, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’année 2009 marquera le début de la mise en œuvre des conclusions du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale et de la révision générale des politiques publiques, articulées dans une réforme globale de notre outil de défense.
Nous attendons beaucoup de cette réforme : une armée resserrée mais mieux équipée, des personnels moins nombreux mais mieux rémunérés grâce à la mise en œuvre des statuts particuliers, un outil de défense recentré sur ses missions opérationnelles grâce à des soutiens rationalisés.
Dans le contexte budgétaire que nous connaissons, « la réforme nourrit la réforme » : les économies de personnels doivent être réinvesties dans la défense et elles doivent provenir des réorganisations et des mutualisations. Nous sommes tous conscients que, si l’on diminuait les effectifs sans réformer l’organisation en profondeur, c’est l’outil militaire dans sa globalité qui serait mis en péril.
Sur la période 2009-2011, le ministère prévoit en moyenne une baisse de 8 400 équivalents temps plein par an par régulation des flux, reclassement dans la fonction publique ou attribution de pécule.
Pour 2009, en dépit de cette baisse d’effectifs programmée, le programme 178 « Préparation et emploi des forces », que j’ai l’honneur de vous présenter, est placé sous forte tension. Dans l’immédiat, les suppressions d’effectifs ne dégagent pas de marges de manœuvre suffisantes pour compenser les facteurs d’augmentation que sont le point d’indice, la mise en œuvre des statuts particuliers ou encore la contribution employeur au compte d’affectation spéciale « Pensions ».
L’équilibre des dépenses de personnel repose pour beaucoup sur un effet « glissement vieillesse technicité » fortement négatif, ce qui suppose, monsieur le ministre, que les baisses d’effectifs s’opèrent en premier lieu par des départs importants et non par un moindre recrutement. Il faut noter que les diminutions d’effectifs ont été plus importantes que prévu en 2008 et que, pour autant, les crédits de rémunération des personnels ont été intégralement consommés.
Il est vrai que le signal adressé aux candidats potentiels au recrutement est actuellement brouillé : on annonce des suppressions d’effectifs très importantes, mais les armées ont toujours besoin de recruter. Si la déflation d’effectifs s’opérait au détriment des recrutements, cela se traduirait par le vieillissement des armées, un déséquilibre de la pyramide des grades, un embouteillage des carrières et, vraisemblablement, un gonflement des services de soutien. Ces évolutions, à l’opposé de ce que nous recherchons, induiraient une désorganisation des structures opérationnelles. Nous devons donc être très vigilants et nous sommes certains que vous le serez également, monsieur le ministre.
J’évoquerai rapidement, comme l’ont fait mes prédécesseurs à la tribune, les surcoûts des opérations extérieures. Notre commission se félicite de la progression de la dotation de la loi de finances initiale à 510 millions d’euros pour 2009. Elle rappelle son attachement à une budgétisation la plus complète possible : en 2008, ces surcoûts atteignent 832 millions d’euros.
Les opérations extérieures relèvent désormais du fonctionnement normal de nos armées. Elles ne sont plus ni imprévisibles ni ponctuelles. Comme l’a indiqué le chef d’état-major des armées, elles se caractérisent par leur durée, leur durcissement, leur dispersion géographique et leur diversité. Elles doivent donc être prévues, autant que possible, en construction budgétaire dès la loi de finances initiale.
Notre commission pense aussi qu’une revue des différents théâtres pourrait être envisagée, en liaison avec le ministère des affaires étrangères, pour examiner toutes les marges de manœuvre disponibles.
Le programme 178 se caractérise par une construction budgétaire tendue, notamment en raison de la question récurrente des opérations extérieures. Elle fait peser deux types de risques : une déflation d’effectifs plus importante que prévue pour rester dans l’enveloppe et une mise en cause des programmes d’équipements par des annulations de crédits sur le titre 5 pour compenser les déficits du titre 2. Or la loi de programmation militaire l’exclut précisément. Aussi notre commission souhaiterait-elle, monsieur le ministre, que vous lui exposiez précisément selon quelles modalités vous envisager d’éviter cet écueil.
Mes chers collègues, consciente de la tâche immense qui s’annonce pour le ministère de la défense, tout comme des chances et des risques qui s’attachent à cette réforme, votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné un avis favorable quant à l’adoption des crédits de la mission « Défense ». (Applaudissements.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Carrère, rapporteur pour avis.
M. Jean-Louis Carrère, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous présente maintenant les crédits de fonctionnement du programme 178, c’est-à-dire, pour l’essentiel, ceux qui sont affectés au maintien en condition opérationnelle des matériels, ou MCO, et au soutien de l’homme.
En 2009, le titre 3 reçoit 6,31 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 5,752 milliards d’euros de crédits de paiement, soit une croissance des autorisations d’engagement et des crédits de paiement de, respectivement, 17,8 % et 4,7 % par rapport à 2008. Cette forte croissance des autorisations d’engagement est destinée au financement des marchés de MCO à tranches pluriannuelles, dont les quatre cinquièmes iront à l’entretien programmé des matériels aéronautiques et terrestres et le cinquième restant à l’entretien des matériels de dissuasion.
Je me réjouis qu’un apport financier substantiel soit accordé à l’entretien des matériels, mais je regrette, à ce sujet, que nous soyons conduits à examiner le projet de loi de finances pour 2009, qui constituera la première année de la future loi de programmation 2009-2014, avant même d’avoir pu examiner celle-ci.
La restructuration en cours du budget de la défense s’appuie sur une maîtrise des coûts « des fonctions sans lien avec l’activité opérationnelle des armées, notamment la logistique, les transports, les achats, la communication et l’informatique », selon vos propres termes, monsieur le ministre, et vise à renforcer les crédits consacrés aux missions opérationnelles. Ces fonctions de support relèvent toutes du titre 3, dont les composantes font l’objet d’une réflexion d’ensemble, sous la direction de l’état-major des armées. J’ai pu rencontrer les responsables de ce projet et je salue la qualité de leur engagement dans la mission qui leur est assignée.
L’amélioration des financements affectés au MCO des équipements a permis de redresser des taux de disponibilité parfois inférieurs à 50 %. Une rationalisation des modalités du MCO a été entreprise avec la création, en 2000, du service de soutien de la flotte, puis, en 2002, de la structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques de la défense, dont l’action est prolongée par celle du service industriel de l’aéronautique.
L’armée de terre évolue en ce sens, avec la création, en 2009, d’un service unique de soutien à caractère industriel, la structure interarmées de maintenance des matériels terrestres, qui se substituera à la direction centrale du matériel de l’armée de terre. Cette création s’ajoutera à la politique d’emploi et de gestion des parcs rationalisant l’utilisation de ces matériels lourds, pour en réduire le coût de soutien.
J’en viens aux restructurations des implantations militaires qui toucheront particulièrement l’armée de terre. Sur 82 unités supprimées et 33 autres transférées d’ici à 2014, elle en perdra une cinquantaine, l’armée de l’air une dizaine, et la marine abandonnera le site aéronaval de Nîmes-Garons. Parallèlement, 80 à 90 bases de défense interarmées seront créées, regroupant les moyens administratifs et de soutien qui relèveront directement de l’état-major des armées.
Ce resserrement des infrastructures sera accompagné d’une évolution des commissariats propres à chacune des armées pour les fondre, à l’horizon 2011, au sein d’un service d’administration générale et des soutiens communs.
Les crédits et l’organisation du soutien des armées appellent deux remarques principales.
Premièrement, le poste de dépense le plus important, le MCO, notamment aéronautique, a fait l’objet depuis 2002 d’une forte restructuration ; il faut cependant constater que ces efforts ne parviennent pas à juguler les coûts, qui restent orientés à la hausse.
Deuxièmement, les coûts entraînés par la sous-traitance d’activités non militaires pèsent fortement sur les dépenses courantes de fonctionnement. Il faut donc espérer que le resserrement des implantations permettra de réduire l’ampleur des tâches sous-traitées et d’en améliorer la qualité.
L’enjeu constitué par la refonte de la carte militaire et la réforme en cours visant à la mutualisation des soutiens sous l’égide de l’état-major des armées est donc majeur.
Il faut donner à nos forces les moyens nécessaires pour passer à une autre étape de leur professionnalisation.
Sous le bénéfice de ces observations, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a adopté les crédits affectés à la préparation et à l’emploi des forces par le projet de loi de finances pour 2009, à la majorité de ses membres, monsieur le ministre. (Applaudissements.)
M. Jean-Louis Carrère, rapporteur pour avis. Non, à la majorité.
M. Hervé Morin, ministre. Le groupe socialiste n’a pas eu la même attitude à l’Assemblée nationale !
M. Jean-Louis Carrère, rapporteur pour avis. Nous ne sommes pas à l’Assemblée nationale !
M. Didier Boulaud. Ils ne connaissaient pas le décret d’annulation !
Mme la présidente. J’indique au Sénat que la conférence des présidents a décidé d’attribuer un temps de parole de dix minutes aux groupes UMP, socialiste, UC, CRC-SPG et RDSE et de cinq minutes à la réunion des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Le Gouvernement répondra aux orateurs.
Ensuite, un certain nombre de nos collègues poseront des questions, le Gouvernement répondant immédiatement à chacune. La durée de la discussion de chaque question est limitée à six minutes, réparties de la manière suivante : deux minutes trente pour la question, deux minutes trente pour la réponse, et, s’il le souhaite, l’auteur de chaque question dispose d’une minute pour la réplique éventuelle.
La conférence des présidents a décidé d’attribuer cinq questions aux groupes UMP et socialiste, deux questions aux groupes UC, CRC-SPG et RDSE et une question à la réunion des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Dans la suite du débat, la parole est à M. André Dulait.
M. André Dulait. Monsieur le ministre, je prends une nouvelle fois la parole, mais c’est pour m’exprimer, cette fois-ci, au nom du groupe UMP.
Le budget que nous nous apprêtons à voter est particulièrement important ; les années 2008 et 2009 marqueront en effet un tournant pour nos armées comme pour la vie des hommes et des femmes qui s’y sont engagés.
Ce budget traduit avant tout la mise en œuvre des conclusions du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, présenté par le Président de la République le 17 juin dernier.
Je me réjouis, au nom de mon groupe, de l’effort important qui est consenti cette année, notamment pour ce qui concerne l’équipement de nos forces, qui devrait enregistrer une hausse de 10%.
À cet égard, nous pouvons saluer l’augmentation de 5,4 % des crédits pour l’année 2009, preuve de la détermination du Gouvernement de poursuivre la réforme de nos forces armées. Ce budget est réaliste et sincère.
De plus, la programmation triennale 2009-2011 permettra, d’une part, au ministère d’avoir une visibilité accrue sur ses actions et, d’autre part, de garantir les montants alloués.
Notre pays doit faire face à des menaces de plus en plus diffuses et de plus en plus difficiles à identifier, car non étatiques. Plus que jamais, nous avons besoin d’une armée mieux équipée et encore mieux formée. L’ère de la guerre dite classique semble révolue.
À ce titre, le Livre blanc est novateur, car il instaure un continuum entre les problèmes de sécurité et la politique de défense, dont les axes majeurs doivent être la réactivité et l’anticipation.
Sur ce point, je tiens à souligner l’avancée fondamentale que constituent les « crash programmes », en particulier le système FELIN, fantassins à équipement et liaisons intégrés. Il était temps que « la panoplie du soldat du futur » dépasse le stade du projet.
II nous faut également, monsieur le ministre, acheter « sur étagère » ; les besoins du temps réel ne peuvent souffrir l’attente des livraisons de matériels qui seront honorées dans des délais de huit à douze mois. C’est là un des points forts de ce budget.
Permettez-moi, mes chers collègues, de profiter de ces quelques minutes pour insister sur certains points, à mon sens, primordiaux.
Je souhaite rappeler devant le Sénat que les forces armées connaissent aujourd’hui leur deuxième réforme. En effet, la professionnalisation des personnels militaires constitua la première étape de la restructuration. Peu de corps de la fonction publique peuvent se prévaloir de s’être réformés en profondeur comme l’ont fait ceux du ministère de la défense.
M. André Dulait. Les sénateurs de l’UMP ne peuvent qu’être favorables à cette réorganisation et à cette restructuration, qui doivent concourir à de meilleurs résultats, mais ce, à une seule condition : garder à l’esprit la spécificité de l’armée, son essence même, qui va jusqu’au sacrifice de la vie des hommes qui la composent.
M. Jean-Louis Carrère. Comme pour la gendarmerie !
M. Alain Gournac. Oui, et alors ?
M. André Dulait. Comme pour la gendarmerie, en effet !
L’émotion de la nation devant les cercueils est bien normale, mais ne parlons pas d’« inexpérience » : cela résonne comme un outrage fait à nos armées ainsi qu’à ceux qui continuent à combattre et qui ont à cœur d’honorer leur mission.
C’est précisément à cet instant que se concrétise le lien entre l’armée et la nation. Il est temps que les Français redeviennent fiers de leurs soldats au quotidien et non pas uniquement pendant les périodes de deuil. Depuis trop longtemps, le rapport des Français à leurs armées a été empreint d’une certaine indifférence.
Je souhaitais attirer votre attention sur ce sujet, monsieur le ministre, car, à l’heure où plus de 54 000 postes militaires vont être supprimés à l’horizon de 2014, il est aussi très important d’anticiper le retour à la vie civile des soldats. Si la reconversion est garantie par le statut général des militaires, elle constitue un axe majeur de la politique du ministère de la défense.
À cet égard, le plan d’accompagnement des restructurations doit demeurer à la hauteur de la réforme qui a été entreprise. La reconversion des personnels militaires nécessite une politique de formation engagée bien plus en amont, suivie d’un accompagnement spécifique.
Aussi, monsieur le ministre, devons-nous souhaiter que le dispositif rénové d’accès aux emplois réservés mis en place en mai dernier porte ses fruits et que des passerelles soient établies avec d’autres corps de la fonction publique. Lors de leur intégration dans l’armée, ces personnels y ont appris le service de l’État. En conséquence, leur affectation dans d’autres corps de fonctionnaires civils est susceptible de revêtir un sens fort.
Ainsi, et j’en terminerai par là, je pense sincèrement que les soldats peuvent apporter beaucoup à la société civile. Au cours de leur expérience unique sur les théâtres d’opération, ils ont pu s’imprégner de valeurs telles que le dépassement et la maîtrise de soi, valeurs qui doivent être transmises aux futures générations, pour lesquelles elles constituent des vecteurs humains indispensables. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le général de Gaulle a dit : « Il n’est de richesse que d’hommes ». Nous sommes collectivement très fiers de ces hommes et de ces femmes pour qui le sens du devoir n’est pas un vain mot et qui sont prêts à aller dans leur dévouement à l’intérêt général jusqu’au sacrifice suprême. Je tenais à leur rendre ici hommage.
Mais il faut bien aussi donner à ces hommes et à ces femmes les moyens de leur mission et nous ne pouvons que nous réjouir du projet de budget que vous nous présentez pour 2009, dans un contexte budgétaire extrêmement difficile.
L’augmentation des ressources totales progresse de plus de 5 %. La mission « Défense » disposera de 47 798 milliards d’euros, répartis sur différents programmes et, avec l’ensemble de mes collègues du groupe UMP, je salue cet effort considérable.
Trop souvent, en effet, le budget de la défense a été considéré comme une variable d’ajustement.
Ce budget témoigne de l’engagement du Président de la République selon lequel nos armées doivent enfin pouvoir bénéficier des moyens appropriés à la mission de sécurité qu’elles ont à assumer.
Ce budget est aussi la juste traduction du Livre blanc et de la réforme engagée dans le cadre de la révision générale des politiques publiques.
Vous me permettrez cependant de regretter, monsieur le ministre, que les réserves - je pense en particulier à la réserve citoyenne, qui, malgré son jeune âge, a largement fait ses preuves en matière de lien armée-nation - ne soient pas mieux associées à la montée en puissance de notre défense et aux problématiques afférentes.
Dans le cadre de sa présidence à la tête de l’Union européenne, la France a réaffirmé son ambition de relancer l’Europe de la défense, notamment dans le règlement des conflits. Ainsi, l’Europe renoue avec l’une des raisons de sa création et nous ne pouvons que nous en réjouir.
L’exemple du Darfour et celui de l’opération EUFOR, au Tchad, sont caractéristiques. La résolution 1778 du Conseil de sécurité autorisant le déploiement d’un volet militaire européen de sécurisation et de protection préfigure le rôle croissant de notre pays au sein de la Communauté européenne. Sur place, nous avons plus de 1 700 hommes, qui travaillent en coordination avec les forces des Nations unies, les forces de sécurité tchadiennes et centrafricaines.
Ce type d’opération n’est qu’un exemple parmi d’autres. Face à l’insécurité grandissante et à la multiplication des menaces, c’est à l’échelle multinationale qu’il nous faut agir et nous devons exiger de nos partenaires européens des efforts soutenus en matière d’engagement et de moyens.
Force est de rappeler, en effet, que la France est le quatrième contributeur sur le plan financier, le cinquième s’agissant des effectifs engagés en opération et qu’elle est un acteur majeur de la force de réaction de l’OTAN sur les plans tant quantitatif que qualitatif.
À ce titre, il est primordial que les pays géographiquement concernés soient non seulement associés, comme c’est le cas avec la force hybride de l’Union africaine des Nations unies ou dans le cadre de l’opération PAMIR en Afghanistan, mais qu’ils soient aussi responsabilisés.
Au moment même où la France procède à une véritable restructuration de ses forces, il n’est plus concevable que nous nous positionnions toujours et encore dans le seul rôle de pacificateur, qui suscite parfois des réactions d’incompréhension ou de violence de la part des populations locales, alors que la vie de nos hommes est en jeu.
Alors que nous mettons en œuvre une politique de sécurisation dans ces zones, d’autres pays s’implantent massivement dans un but économique, sans se soucier d’autres considérations. Nous pensons, bien évidemment, au recul de l’influence française en Afrique, alors que l’on y trouve pourtant une très forte attente à l’égard de la France, de la francophonie et de l’Europe.
C’est pourquoi, monsieur le ministre, nous devons promouvoir le développement de capacités structurantes qui donneront à l’Europe de la défense, mais aussi à l’Europe politique, puisque les deux sont intimement liées, les moyens de ses ambitions.
La mise en place d’une stratégie européenne de sécurité est indissociable de la réforme que nous engageons. Il nous faut prendre en compte les nouveaux défis, les nouvelles menaces d’un monde fragmenté, de plus en plus dangereux, et parvenir à un équilibre entre notre politique de gestion des crises extérieures et notre politique de sécurité intérieure, les deux étant d'ailleurs interdépendantes.
Par ailleurs, si ce budget concourt à renforcer les performances de notre industrie de défense, je souhaiterais, à titre personnel, attirer votre attention sur notre action en termes de désarmement.
Ces politiques ne sont pas incompatibles, loin de là. Dans moins de deux jours, la France signera à Oslo la convention visant à l’abolition des armes à sous-munitions. Je tiens sincèrement à vous remercier, monsieur le ministre, des initiatives courageuses que vous avez prises en ce domaine avec votre collègue des affaires étrangères. Plusieurs de nos soldats ont déjà été victimes de mines antipersonnel ; d’autres auraient pu l’être de ces armes abominables, qui sont une honte pour l’humanité. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)