Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, sur l'article.

Mme Nathalie Goulet. Cet article concerne notamment l’application de la taxe générale sur les activités polluantes, la TGAP, aux granulats.

Nous avions, l’année dernière, discuté de ce sujet en séance publique, à propos d’un amendement de M. le rapporteur général, sous-amendé. Il était proposé qu’une partie de la TGAP puisse profiter aux communes qui comptent des carrières sur leur territoire.

Ces communes subissent souvent une « double peine » : elles supportent les nombreux désagréments dus à ces activités et, de surcroît, elles pâtissent d’un écrêtement de la taxe professionnelle.

Je rappelle que, en France, environ 400 millions de tonnes de granulats sont produites chaque année.

À titre d’exemple, une commune de 464 habitants comme celle de Chailloué, dans l’Orne, perçoit un montant de taxe professionnelle de 126 000 euros et l’écrêtement s’établit à 1 654 045 euros. Les ordres de grandeur sont les mêmes pour la commune de Brieux, dont la population est de 94 habitants. En outre, on enregistre le passage de quelque quatre cents camions par jour. Au total, une dizaine de communes de ce département comptent des carrières sur leur territoire.

Comment compenser, pour les communes, une partie des nuisances dues à l’exploitation des carrières, sachant qu’elles ne peuvent bénéficier à plein de la taxe professionnelle à cause de l’écrêtement ?

L’année dernière, l’amendement en question avait été retiré, au bénéfice de la promesse de constituer un groupe de travail sur le sujet.

Ledit groupe de travail s’est réuni, après moult difficultés, le 2 juillet dernier. Il a été procédé à un premier tour de table, au demeurant très intéressant, dont sont ressorties, à défaut bien sûr de résultats concrets, quelques informations, entre autres celle-ci : les douanes, pour prélever la TGAP, utilisent un formulaire qui ne présente aucune ventilation des lieux d’extraction.

Ce défaut de présentation va poser un grave problème : pour que les communes puissent bénéficier de tout ou partie de la TGAP, il faudra avant tout revoir la façon dont les douanes perçoivent cette taxe et modifier ce formulaire, pour savoir exactement quelle proportion du produit affecter à chaque territoire.

Nous espérons que, grâce au débat qui va s’ouvrir sur cet article 9, nous pourrons régler ce problème, latent depuis l’année dernière, étant entendu que, si le syndicat des carrières se montre toujours extrêmement désireux d’aider les communes, il ne dispose cependant d’aucun outil à fiscalité constante pour ce faire.

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Foucaud, sur l'article.

M. Thierry Foucaud. L’article 9, s’appuyant sur les conclusions du Grenelle de l’environnement, traduit les orientations de cette consultation nationale en augmentant de manière significative la taxe générale sur les activités polluantes.

Cette TGAP renforcée apparaît de plus en plus comme l’outil essentiel d’application du principe pollueur-payeur, principe dont la mise en œuvre souffre d’ailleurs de quelques manques, et comme l’instrument de financement de l’action de l’ADEME, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie.

On notera que, pour le moment – c’est là, sans doute, un point qu’il convient de soulever dans ce débat –, la visée écologique de la politique gouvernementale va de pair avec une pratique assumée de la fiscalité comme outil de financement.

Ainsi, alors même que l’on envisage une augmentation des ressources de l’ADEME, on met aussi en œuvre une politique d’incitation fiscale par le biais de crédits d’impôt labellisés « verts », moins généreux que les instruments actuels.

En effet, tandis que l’on prévoit la hausse du rendement de la TGAP, on « écologise » les crédits d’impôt à destination des particuliers : c’est ainsi que l’aide fiscale aux gros travaux de réparation des logements particuliers est réduite, ainsi que la prise en charge partielle des intérêts d’emprunt pour l’accession à la propriété.

Les effets de l’instruction fiscale relative aux travaux éligibles à la réduction d’impôt pour gros travaux sont connus : elle entraîne une perte de 400 millions d’euros pour le pouvoir d’achat des ménages, dès lors que les travaux en question n’intègrent pas certains critères « écologiques ».

Le Grenelle de l’environnement, surfant sur la vague des préoccupations environnementales, va-t-il devenir une source de mutation de la fiscalité, telle que l’on tend de plus en plus à la concevoir ?

S’agissant maintenant de la TGAP, son accroissement sensible, tel qu’il est prévu à cet article 9, pose la question récurrente de l’orientation du comportement des acteurs économiques que la fiscalité peut induire.

Soyons clairs : ce n’est pas au travers de la seule TGAP que nous créerons, grâce à son caractère plus ou moins incitatif, les conditions de l’adoption d’autres comportements en matière environnementale.

Nous devons faire en sorte que la TGAP soit bien conçue et qu’elle ne conduise pas, au final, à accroître sans cesse les coûts de l’élimination des déchets pour les seuls consommateurs privés.

Il est évident que tout doit être fait pour favoriser la pratique du recyclage et de la valorisation des déchets, ménagers comme industriels, et, autant que faire se peut, réduire au minimum la production de déchets ultimes destinés à l’incinération ou à l’enfouissement.

Ce n’est qu’une fois ces choix faits que nous pourrons réellement répondre concrètement et efficacement aux attentes et aux espoirs nés du Grenelle de l’environnement.

Les incitations fiscales, qu’il s’agisse de pénaliser ou d’inciter, ne suffiront pas –  faut-il le préciser ? – à mener à bien cette démarche, et nous ne pouvons, faute d’une politique plus ambitieuse, adopter en l’état l’article 9, qui vise à augmenter sensiblement la taxe générale sur les activités polluantes.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Braye, sur l'article.

M. Dominique Braye. C’est en tant que président du groupe d’études sur la gestion des déchets et représentant d’un certain nombre d’élus de terrain que je prends la parole.

Il est prévu, à cet article 9, d’augmenter très fortement la TGAP sur le stockage des déchets et de créer une TGAP sur l’incinération. Vous le savez, monsieur le ministre, ces dispositions suscitent de fortes inquiétudes parmi les élus locaux.

Vous justifiez cette hausse par la volonté d’augmenter la part du recyclage dans le traitement des déchets. Nous approuvons tous, bien entendu, cet objectif, mais il faudrait tout d’abord s’entendre sur le taux actuel exact de déchets recyclés en France.

En effet, aux termes du projet de loi « Grenelle I », il était de 24 % en 2004, alors que le chiffre de 17 % était avancé au début des débats du Grenelle de l’environnement, tandis que, voilà quelques jours à peine, un membre de cabinet ministériel évoquait, lors des discussions d’un groupe interdéchets, un taux de 30 %. Nous sommes en 2008 : il me semblerait souhaitable que le Parlement dispose, avant de voter des mesures aux conséquences fiscales très importantes, de données de référence un peu plus récentes !

De plus, il est souvent reproché à la France de n’être pas très bien classée à l’échelon européen en matière de recyclage, mais cette comparaison a-t-elle un sens, l’assiette prise en compte pour déterminer le taux de recyclage variant considérablement d’un pays à l’autre ? Est-il donc envisagé d’harmoniser enfin les modes de calcul au plan européen ?

De très nombreux élus s’interrogent sur la philosophie qui sous-tend la hausse de la TGAP.

Je rappelle que la France est le pays d’Europe qui rejette le moins de CO2 par habitant et qu’elle est le premier producteur européen de matériaux issus du recyclage. Cela prouve à l’évidence que, depuis 1992, le recyclage s’y est développé sans que le recours à une fiscalité punitive ait été nécessaire.

En effet, c’est bien de cela qu’il s’agit : la taxation, conçue au départ comme devant être incitative, est devenue, dans le projet de loi relatif à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement, dissuasive, et même punitive dans le présent projet de loi de finances.

Elle pénalise d’abord les collectivités territoriales qui se sont lancées dans des investissements très lourds, presque toujours, d’ailleurs, sous la pression des services de l’État et de son bras armé, l’ADEME, alors que la durée d’amortissement de ces équipements est de vingt-cinq ans et que l’on change les règles en cours de jeu.

Ces changements radicaux et incessants de stratégie de l’État se soldent par un gaspillage considérable d’argent public. Ce seront, au final, les ménages qui en supporteront les conséquences. Ils comprendront très difficilement pourquoi plus leurs élus se sont conformés aux recommandations de l’État pour développer le tri des déchets, plus ils devront payer demain.

En outre, ces mesures se concentrent à l’extrême sur les déchets ménagers, alors que ceux-ci ne représentent que 6 % du total des déchets. Quand, monsieur le ministre, s’attaquera-t-on enfin sérieusement aux 94 % de déchets autres, à la source de pollutions beaucoup plus graves ?

L’accord auquel seraient parvenues les parties prenantes au Grenelle de l’environnement est constamment mis en avant pour justifier que les parlementaires adoptent presque sans discuter les mesures qui leur sont soumises.

C’est pourquoi j’aimerais, sur le sujet précis que nous examinons aujourd’hui, effectuer quelques mises au point.

Je sais, pour avoir fait partie du comité opérationnel sur les déchets, le Comop, que ses participants se sont globalement mis d’accord sur le principe de taxer plus fortement le stockage et l’incinération, mais, dans ce projet de loi de finances, la déclinaison de ce principe est très loin de respecter l’ensemble des conditions sur lesquelles ce groupe s’est mis d’accord.

Tout d’abord, le Comop unanime souhaitait que la totalité du produit supplémentaire de la TGAP soit affectée à la politique de prévention de la production de déchets par l’intermédiaire d’un fonds hébergé par l’ADEME : or, finalement, cette recette supplémentaire ira au budget général, et nous devons nous en remettre à la seule parole du Gouvernement pour son affectation.

Nous avons, certes, obtenu des gages pour les trois années à venir, mais qu’en sera-t-il au-delà ? Mes chers collègues, nous avons toutes les raisons d’être inquiets, surtout lorsqu’on sait que, sur les 260 millions d'euros collectés aujourd’hui au titre de la TGAP, quelque 30 millions d'euros seulement, soit un peu plus de 10 %, vont à l’ADEME.

Ensuite, la hausse de la TGAP faisait partie d’un paquet global de mesures, qui comportait notamment la création de nouvelles filières de traitement reposant sur le principe de la responsabilité élargie du producteur, la fameuse REP.

Aujourd'hui, monsieur le ministre, vous nous proposez la hausse de la taxe, mais où sont passées les « filières REP », qui constituent le fondement d’une politique de gestion des déchets pertinente ? La filière REP concernant les DASRI, les déchets d’activités de soins à risques infectieux, est, semble-t-il, prévue dans le projet de loi de transition environnementale, mais l’adoption de ce texte n’est pas attendue avant plusieurs mois, comme toujours. Que de temps perdu !

C’est pourquoi je présenterai un certain nombre d’amendements visant à accélérer la mise en place de ces filières, qui, je le rappelle, allait de pair, dans l’esprit des participants au Grenelle de l’environnement, avec la hausse de la TGAP. Il était en effet hors de question, pour eux, de dissocier ces deux éléments.

Enfin, il est clairement indiqué, dans le rapport, que le groupe n’a pas pu se mettre d’accord sur les critères de modulation des taux des TGAP « stockage » et « incinération ».

Le groupe n’a donc nullement tranché, ni dans un sens ni dans l’autre. C’est le Gouvernement qui a décidé, au travers de l’article 9, de prévoir une modulation extrêmement faible en fonction du critère environnemental.

Ainsi, le fait, pour les collectivités, d’avoir investi pour obtenir la certification de leurs installations de stockage ne leur rapportera pas grand-chose, et vouloir valoriser le biogaz, pour être « environnementalement » ou « grenellement » compatibles, ne leur rapportera absolument rien !

En un mot, les collectivités territoriales qui s’en tireront le mieux sont celles qui n’ont jamais suivi les recommandations de l’État et qui n’ont jamais rien fait !

M. Yves Détraigne. Absolument !

M. Dominique Braye. Les autres devront naturellement encore amortir pendant des années, si ce n’est des décennies, les équipements qu’elles ont mis en place, sans qu’aucune différence ou presque ne soit faite avec celles qui sont restées inactives.

Monsieur le ministre, ce point est particulièrement sensible pour les élus qui ont fait des investissements coûteux pour disposer d’installations à performance énergétique supérieure et à moindre incidence environnementale. Ils n’accepteront pas d’être traités de la même façon que ceux qui n’ont rien fait.

Nous ne comprenons pas la philosophie de cette nouvelle taxe, qui ne respecte pas le principe fondamental arrêté lors du Grenelle de l’environnement, selon lequel moins vous polluez, moins vous devez payer, et plus vous polluez, plus vous devez payer : c’est le principe du « pollueur-payeur », dont on parle depuis trente ans !

Or votre proposition ne respecte pas ce principe aussi fondamental que simple et, aurais-je tendance à dire, moral.

Avec votre système, quels que soient les efforts des collectivités, elles devront payer plus. Je le répète, celles qui s’en tireront le mieux seront celles qui n’ont rien fait jusqu’à ce jour.

Non, monsieur le ministre, vous ne pouvez pas traiter ainsi les collectivités qui ont engagé de gros efforts pour préserver l’environnement, en suivant les conseils de l’État et de son bras armé en la matière, l’ADEME.

En outre, mes chers collègues, comment nous, élus de terrain, pourrons-nous inciter nos concitoyens à mieux trier leurs déchets pour atteindre les objectifs extrêmement ambitieux qui ont été fixés en matière de taux de valorisation des déchets ménagers – 35 % en 2012 et 45 % en 2015 –, si leur facture, quels que soient leurs efforts, augmente de façon importante ?

Sur tous ces points, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, je présenterai donc, au nom du groupe d’études sur la gestion des déchets et, au-delà, au nom de nombreux élus, des amendements qui, je l’espère, trouveront auprès de vous un écho favorable. Je proposerai, tout simplement, d’en revenir à l’engagement fondamental exprimé dans le cadre du Grenelle de l'environnement. (Applaudissements sur certaines travées de lUMP et de lUnion centriste.)

Mme la présidente. Je suis saisie de dix amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-235 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

I. - Dans le a du 1° du I de cet article, remplacer les mots :

ou par incinération

par les mots :

, par incinération ou par co-incinération

II. - Rédiger comme suit le b du A du 1 du texte proposé par le III de cet article pour l’article 266 nonies du code des douanes :

« b) Déchets ménagers et assimilés réceptionnés dans une installation d’incinération ou de co-incinération de déchets ou transférés vers une telle installation située dans un autre État :

DÉSIGNATION

des matières ou opérations imposables

Unité de

perception

Quotité 2009

Quotité 2010

Quotité 2011

Quotité

2012

Quotité à compter de 2013

Déchets réceptionnés dans une installation d’incinération ou de co-incinération de déchets ménagers et assimilés ou transférés vers une telle installation située dans un autre État

 

 

 

 

 

 

A. ayant fait l’objet d’un enregistrement dans le cadre du système communautaire de management environnemental et d’audit (EMAS) défini par le règlement (CE) n° 761/2001 du Parlement européen et du Conseil du 19 mars 2001 ou dont le système de management environnement a été certifié conforme à la norme internationale ISO 14001 par un organisme accrédité

Tonne

4

4

6,4

6,4

8

B. présentant une performance énergétique dont le niveau, apprécié dans des conditions fixées par un arrêté conjoint des ministres chargés du budget et de l’environnement, est élevé

Tonne

3,5

3,5

5,6

5,6

7

C. dont les valeurs d’émission de NOx sont inférieures à 80 mg/Nm3

Tonne

3,5

3,5

5,6

5,6

7

D. relevant à la fois du A et du B, du A et du C, du B et du C ou des A, B et C qui précèdent

Tonne

2

2

3,2

3,2

4

Autres

Tonne

7

7

11,2

11,2

14

« Les déchets réceptionnés dans une installation d’incinération ou de co-incinération de déchets ménagers ou assimilés visée aux A, B, C ou D du tableau du présent b ou transférés vers une telle installation située dans un autre État bénéficient d’une réduction à raison des tonnages dont le transfert entre le site de regroupement et le site de traitement final est effectué par voie ferroviaire ou fluviale, sous réserve que la desserte routière terminale, lorsqu’elle est nécessaire, n’excède pas 20 % du kilométrage de l’itinéraire global.

« Cette réduction est égale à 0,50 euro par tonne en 2009 et 2010, 0,80 euro par tonne en 2011 et 2012 et 1 euro par tonne à compter de 2013. Elle est, à compter du 1er janvier 2014, revalorisée dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche de l’impôt sur le revenu. »

III. - Au début du troisième alinéa du B du même 1, remplacer la mention :

1.

par la mention :

1 bis.

IV. - Dans le sixième alinéa (b) du même B, remplacer le millésime :

2012

par le millésime :

2014

V. - Pour compenser la perte de recettes résultant pour l’État des I à IV, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l’État des modifications de tarifs de la TGAP est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Cher Dominique Braye, la commission des finances s’est efforcée d’approfondir ce sujet, sur lequel beaucoup d’entre nous sont intervenus. Au vu du grand nombre d’amendements déposés par nos collègues, la discussion très nourrie que nous avons eue en commission fut, en quelque sorte, la préfiguration du débat que nous allons avoir sur cet article 9.

Mes chers collègues, comme vous pouvez le constater à la lecture de mon rapport, le principe que nous avons retenu, s’agissant de la TGAP « déchets », est celui de la nécessaire prise en compte des investissements déjà consentis par les collectivités territoriales.

Si nous ne sommes naturellement pas opposés à un système d’éco-taxe qui permette d’aboutir, en matière de développement durable, à un optimum dans les comportements, deux conditions doivent, à nos yeux, être respectées.

En premier lieu, il importe que le bonus-malus ait suffisamment d’ampleur pour que l’incitation à se conformer aux bons principes soit elle-même suffisante.

En second lieu, il convient d’éviter de placer des collectivités territoriales dans une situation impossible. En d’autres termes, il ne serait pas justifiable que celles qui ont fait le maximum d’efforts concevables au regard des règlements existants et dans les conditions physiques et géographiques où elles se trouvent se voient demander un effort supplémentaire. Cela paraîtrait contraire à la nature même de l’éco-taxe, qui, je le répète, est censée permettre l’ajustement des comportements pour qu’ils se rapprochent d’un certain optimum.

Mue par le souci de respecter ces principes, la commission des finances a travaillé en deux temps.

Dans un premier temps, nous avons élaboré un certain nombre d’amendements, qui ont été adoptés lors d’une précédente réunion de commission.

Dans un second temps, nous nous sommes efforcés, en analysant les amendements dits « extérieurs », de voir lesquels d’entre eux étaient de même nature que les nôtres et, partant, susceptibles de s’intégrer dans un seul et même dispositif.

Pour en revenir à notre approche initiale, nous avons raisonné à partir d’un objectif précis : moduler à la baisse la TGAP frappant les installations d’incinération les plus performantes sur le plan environnemental.

C’est pourquoi nous souhaitons introduire une diminution du tarif applicable aux installations d’incinération qui se prévalent, d'une part, d’une certification EMAS ou ISO 14001, et, d'autre part, d’un niveau élevé de performance énergétique.

De plus, nous entendons également introduire une réduction des tarifs applicables aux installations d’incinération pour les tonnages acheminés par des modes de transport alternatifs à la route, autrement dit par voie ferroviaire ou fluviale. Nous avons d’ailleurs déposé un amendement prévoyant une disposition analogue pour les centres d’enfouissement technique, car il n’y a aucune raison de traiter différemment les modes d’acheminement vers l’une ou l’autre de ces catégories d’installations de traitement.

Mes chers collègues, la réduction liée à l’usage de modes de transport alternatifs à la route serait ainsi de 0,50 euro par tonne en 2009, de 0,80 euro en 2010 et de 1 euro à compter de 2011. Cela se justifie par la nécessité de compenser les surcoûts consentis en vue d’implanter ces modes de transport en site propre, de les faire fonctionner et de réaliser tous les investissements correspondants.

Par ailleurs, afin de ne pas dégrader le volume global des recettes et de renforcer le caractère incitatif du dispositif proposé, nous avons veillé à limiter le bénéfice de la réduction octroyée sur le fondement du recours aux modes de transport alternatifs à la route aux installations d’incinération certifiées EMAS ou ISO 14001, ou présentant un niveau élevé de performance énergétique.

Dans le même esprit, les réductions de tarifs proposées seraient gagées sur une augmentation des tarifs applicables aux centres d’incinération les moins performants, c’est-à-dire ceux qui ne peuvent se prévaloir d’une telle certification.

Mes chers collègues, le second temps de notre réflexion a été consacré à l’examen de vos différentes propositions, pour voir dans quelle mesure celles-ci pourraient s’intégrer dans un seul et unique dispositif.

C’est sur cette base que nous nous sommes efforcés de réaliser une synthèse, et c’est donc au travers de l’amendement n° I-235 rectifié que nous vous proposons un dispositif d’ensemble, qui s’articule de la façon suivante.

Premièrement, il étend l’assiette de la TGAP « incinération » aux installations de co-incinération, c’est-à-dire aux installations qui utilisent des déchets comme combustible principal ou d’appoint. Une telle extension est de nature à satisfaire les amendements nos I-73 rectifié et I-135 rectifié bis, dont les premiers signataires sont, respectivement, M. Miquel et M. Braye.

Deuxièmement, il lisse sur cinq ans, au lieu de trois, l’augmentation des tarifs de la TGAP. Ce lissage reprend l’idée exprimée par M. Braye et plusieurs de ses collègues dans l’amendement n° I-134 rectifié.

Troisièmement, il introduit une diminution du tarif applicable aux installations d’incinération pouvant se prévaloir à la fois d’une certification EMAS ou ISO 14001 et d’un niveau élevé de performance énergétique. Cette diminution reprend notre idée initiale, mais est de nature, en outre, à satisfaire, au moins en partie, l’amendement n° I-210.

Quatrièmement, il étend le tarif réduit accordé aux installations à haute performance énergétique aux installations les plus performantes en matière d’émissions d’oxyde d’azote. Cette extension est de nature à satisfaire les amendements nos I-70 et I-213, dont les premiers signataires sont respectivement M. Angels et M. Béteille. Si nos collègues proposent toutefois une baisse de tarif plus forte, j’espère qu’ils se retrouveront, au moins pour une bonne partie, dans l’amendement de la commission des finances.

Cinquièmement, il crée une réduction des tarifs applicables aux installations d’incinération pour les tonnages acheminés au moyen de modes de transport alternatifs à la route, c’est-à-dire dont le transfert entre le site de regroupement et le site de traitement final est effectué par voie ferroviaire ou fluviale. Je l’ai dit, cette réduction se justifie par la compensation des surcoûts ainsi consentis. Combiné avec l’amendement n° I-233 de la commission portant sur le stockage, qui vise à instaurer une disposition analogue, cet amendement est de nature à satisfaire l’amendement n° I-207.

Mes chers collègues, voilà, pour l’essentiel, ce que je souhaitais vous indiquer sur ce dispositif, « auto-compensé », qui tend à solliciter un peu moins les uns et un peu plus les autres, conformément, je l’espère, à la logique des positions prises lors du Grenelle de l'environnement.

Je vous prie de m’excuser d’avoir été un peu long dans cette présentation, mais, dès lors qu’il s’agissait d’un exercice de synthèse, cela me permettra d’abréger mes commentaires sur les autres amendements de la liasse.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !

Mme la présidente. L'amendement n° I-73 rectifié, présenté par MM. Miquel et Pastor, Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. - Dans le a) du 1° du I de cet article, remplacer les mots :

ou par incinération

par les mots :

, par incinération, ou par co-incinération

II. - Dans le premier alinéa du b) du A du 1 du texte proposé par le III de cet article pour l'article 266 nonies du code des douanes, après les mots :

d'incinération

insérer les mots :

ou de co-incinération

III. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... Les conséquences financières pour l'État résultant de l'inclusion de la co-incinération dans le champ de la taxe générale sur les activités polluantes sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Bernard Angels.

M. Bernard Angels. Puisque l'article 9 prévoit de soumettre dorénavant à la taxe générale sur les activités polluantes les déchets destinés à l’incinération, il est légitime d’y soumettre également les déchets ménagers et assimilés traités dans les installations de co-incinération.

Les principales industries susceptibles de pratiquer la co-incinération sont les cimenteries. Or, les collectivités territoriales qui collectent les déchets, principalement des pneus, doivent généralement payer ces industries pour qu’elles acceptent de les incinérer.

Ce système est doublement injuste : d'une part, les collectivités paient pour les déchets qu’elles récoltent ; d'autre part, si elles devaient avoir elles-mêmes recours à l’incinération, elles seraient également soumises à la TGAP.

Par conséquent, pour éviter toute distorsion de concurrence entre les différentes solutions de valorisation énergétique, il serait normal que la co-incinération soit soumise à la TGAP.

Madame la présidente, dans la mesure où l’amendement n° I-235 rectifié de la commission, que M. le rapporteur général a longuement présenté, me satisfait sur ce point, je m’y rallie et je retire mon amendement.