Titularisation des enseignants recrutés en CDD et augmentation des effectifs de l'IUFM de La Réunion
M. le président. La parole est à Mme Gélita Hoarau, auteur de la question n° 299, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale.
Mme Gélita Hoarau. Monsieur le secrétaire d’État, du fait de sa démographie, la Réunion voit chaque année croître ses besoins en enseignants du secondaire comme du primaire, au point qu’il est aujourd’hui possible, en évoquant cette question, de parler de pénurie.
En ce qui concerne le secondaire, depuis plusieurs années, pour pallier ce déficit, le rectorat appelle les personnes figurant en tête de la liste complémentaire du certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré, le CAPES, mais en tant qu’agents contractuels à durée déterminée. Plus de 500 postes de certifiés sont ainsi pourvus.
Monsieur le secrétaire d’État, ne pourrait-on pas prévoir pour ce personnel, dont le contrat a été maintes fois reconduit plusieurs années de suite et qui a ainsi acquis une réelle expérience et une incontestable légitimité, une titularisation par voie de concours réservés et d’examens professionnels ?
Il en est de même pour les professeurs des écoles. En la matière, il incombe à l’Institut universitaire de formation des maîtres, IUFM, de la Réunion de les former. Or, par rapport au nombre de postes à pourvoir chaque année, le nombre d’enseignants sortant de l’IUFM est notoirement insuffisant puisque, à chaque rentrée scolaire, 400 à 600 enseignants sont recrutés dans d’autres académies.
Si ces postes leur étaient accessibles, nombreux sont les jeunes Réunionnais diplômés qui pourraient les occuper, d’autant que le taux de chômage des jeunes âgés de 16 à 24 ans frôle 50 %.
Aussi, monsieur le secrétaire d’État, pourquoi ne pas décider une augmentation des capacités d’accueil de l’IUFM du département et une priorité d’attribution des postes aux jeunes de la Réunion ?
Ces mesures, outre le fait qu’elles permettraient à de nombreux diplômés de la Réunion d’œuvrer à la formation de notre jeunesse, auraient également l’avantage de permettre de substantielles économies en termes de frais de voyage, d’installation, etc.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. Madame le sénateur, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence de Xavier Darcos, et je vais vous donner lecture de la réponse qu’il a préparée à votre intention.
M. Darcos constate la progression de la démographie à la Réunion. Il est vrai qu’en dix ans près de 1 750 élèves supplémentaires ont été accueillis dans le premier degré à la Réunion. C’est la raison pour laquelle 581 équivalents temps plein ont été créés, le taux d’encadrement à la Réunion devenant supérieur à celui de la métropole, avec 5,4 enseignants pour 100 élèves contre 5,3 en métropole.
Pour le second degré, collèges et lycées, le taux d’encadrement correspond à la moyenne nationale, avec 21,3 élèves par enseignant. La situation est donc favorable, la démographie étant normalement prise en compte dans l’académie de la Réunion.
Vous proposez, madame Hoarau, de titulariser les enseignants contractuels actuellement en poste dans le secondaire. Comme vous le savez – j’ai également été confronté à cette question à la Réunion lorsque j’étais ministre de l’agriculture –, on a besoin du concours national pour devenir professeur, c’est la règle de la République. Outre les concours externes, ces agents non titulaires ont la possibilité de se présenter aux concours internes, deuxième concours ou troisième voie.
Donc, pour des raisons d’égalité dans la République, il est difficile de réserver des concours pour les non-titulaires enseignant spécifiquement à la Réunion.
J’en viens à votre demande concernant l’Institut universitaire de formation des maîtres de la Réunion et ses capacités d’accueil.
Dans le premier degré, le recrutement est local. Le calibrage du nombre de postes mis au concours correspond ainsi à la couverture des besoins. Dans le second degré, les enseignants nouveaux arrivants répondent également aux besoins, leur nombre variant en fonction des disciplines.
Cependant, vous le savez, madame le sénateur, dans le cadre du mouvement national des mutations, les personnes originaires du département de la Réunion bénéficient de 1 000 points supplémentaires dans leur barème, ce qui leur donne ainsi une priorité dans les mutations inter-académiques.
Madame le sénateur, M. Darcos me prie de vous indiquer que les règles applicables aux agents de l’éducation nationale, titulaires ou non titulaires, le sont sur l’ensemble du territoire national, sans exception.
Il m’indique également que les progrès notables observés dans les établissements de l’éducation prioritaire de la Réunion sont dus à un excellent travail des enseignants et à la mise en place de dispositifs tels que l’accompagnement éducatif ou le programme personnalisé de réussite éducative.
Ainsi, pour prendre l’exemple du brevet des collèges dans les établissements du réseau « ambition réussite », les taux de réussite sont passés de 64,5 % en 2006 à 71, 8 % en 2008, ce qui signifie que l’ensemble de la communauté éducative de la Réunion fournit une excellente prestation aux enfants de votre département.
M. le président. La parole est à Mme Gélita Hoarau.
Mme Gélita Hoarau. À vous entendre, monsieur le secrétaire d’État, tout va bien à la Réunion ! Je suis désolée de ne pas partager votre constat.
Il y a eu par le passé, monsieur le secrétaire d’État, des concours spécifiques organisés pour notre département afin de pallier la précarisation dans l’éducation nationale. Le besoin est réel, puisque 500 à 600 postes sont reconduits tous les ans dans le second degré – certaines personnes ont huit à dix ans d’ancienneté –, traduisant une précarisation dans l’éducation nationale et, plus généralement, dans la fonction publique.
Avec une volonté politique, il me paraît possible d’avancer sur cette question.
M. Darcos a souligné la progression de la démographie à la Réunion. Nous constatons que nos classes se remplissent d’année en année. Quant aux résultats obtenus, ils restent mitigés.
Avenir de la desserte TNT du territoire de la Dordogne
M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau, auteur de la question n° 238, transmise à M. le secrétaire d'État chargé de la prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement de l'économie numérique.
M. Bernard Cazeau. Je souhaite attirer votre attention, monsieur le secrétaire d’État, sur l’avenir de la desserte par la télévision numérique terrestre, ou TNT, du territoire de la Dordogne. Sans doute cette question intéressera-t-elle bon nombre de mes collègues élus de territoires ruraux.
La loi du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur prévoyait que le Conseil supérieur de l’audiovisuel, CSA, fixe les modalités et le calendrier de déploiement des réseaux terrestres permettant d’assurer la diffusion numérique des programmes télévisés auprès de la population française.
À la date du 10 juillet 2007, l’engagement avait ainsi été pris par le CSA de respecter l’objectif d’un taux minimum de couverture de 75 % par département à la fin de l’année 2008 et de 85 % à la fin de l’année 2009.
Pour parvenir à ce taux de couverture et répondre à cette ambition, quatre nouveaux émetteurs devaient être mis en service cette année en Dordogne. Malheureusement, tel ne sera pas le cas !
Les objectifs annoncés ne seront pas tenus, puisque la mise en service des sites de Ribérac, Saint-Astier et Mussidan, initialement programmée au mois de juin 2008, n’est toujours pas effective. Celle de l’émetteur de Saint-Julien-de-Lampon, à l’origine prévue pour la fin de l’année 2008, a tout simplement été renvoyée à l’été prochain.
On peut ajouter le site de Limoges-Les-Cars, essentiel pour la desserte du nord de la Dordogne. Son équipement n’interviendra qu’avec l’arrêt de la diffusion analogique, c’est-à-dire pas avant 2011 !
Aucun autre site n’est à ce jour prévu dans mon département d’ici au second semestre 2009, contrairement aux nombreuses améliorations de couverture programmées sur d’autres territoires ruraux.
C’est la majeure partie du nord de la Dordogne qui devrait ainsi une nouvelle fois rester en marge du progrès technologique et du désenclavement numérique.
J’attire par ailleurs votre attention sur le fait que le déploiement d’un réseau d’émetteurs hertziens demeure plus que jamais préférable à l’utilisation hypothétique du bouquet satellitaire. La solution satellite pénalise les usagers contraints d’y recourir dans la mesure où les coûts d’installation d’un tel équipement restent plus élevés que les coûts d’acquisition d’un décodeur.
Je vous demande donc, monsieur le secrétaire d’État, de bien vouloir préciser quelles mesures le Gouvernement compte mettre en œuvre, d’une part, afin de faire respecter les engagements de couverture pris par le CSA dans le cadre de la loi du 5 mars 2007 et, d’autre part, afin que le recours à l’option satellitaire demeure strictement réservé aux seules zones se trouvant hors d’atteinte des émetteurs TNT prévus au terme de ce plan de déploiement.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Éric Besson, secrétaire d'État chargé de la prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement de l'économie numérique. Monsieur le sénateur, vous avez rappelé en préambule les engagements de notre pays. Comme j’ai moi-même eu l’occasion de le réaffirmer la semaine dernière, nous voulons apporter dix-huit chaînes gratuites de TNT à tous les Français avant le 30 novembre 2011.
Vous le savez, la TNT, c’est à la fois plus de choix pour les téléspectateurs, notamment grâce aux chaînes d’information, de sport ou d’émissions destinées à la jeunesse, et plus de qualité, s’agissant tant de l’image que du son.
À la fin du mois de juillet dernier, les réseaux de TNT couvraient 82,2 % de la population et cette proportion devrait atteindre 89 % à la fin de cette année.
Pour la Dordogne, votre département, monsieur Cazeau, l’objectif initial du CSA est de parvenir à un taux de couverture de 75 % de la population avant la fin de l’année 2008, grâce notamment à la mise en service de cinq nouveaux émetteurs. Comme vous l’avez souligné, le CSA a pris du retard dans sa planification. Toutefois, je peux vous le confirmer, trois nouveaux émetteurs seront ouverts à Mussidan, à Ribérac et à Saint-Astier le 30 novembre 2008. De même, l’émetteur de Saint-Julien-de-Lampon sera activé d’ici au 30 mai 2009.
Les travaux techniques relatifs au dernier émetteur, celui de Limoges-Les-Cars, sont plus complexes. Néanmoins, je peux vous le garantir, il sera mis en service lors du passage au tout numérique de votre région pour minimiser les perturbations pour les foyers.
En outre, et afin d’apporter plus d’informations et de transparence, cet été, à l’occasion de l’adoption de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, nous avons demandé, avec vous, au CSA la publication du calendrier prévisionnel d’extension de la TNT d’ici à la fin de l’année.
Ainsi, nos concitoyens, notamment les habitants de votre département, pourront savoir avec précision dans quels délais et selon quelles modalités ils auront accès à la TNT.
Par ailleurs, au-delà de votre département et de votre région, monsieur le sénateur, permettez-moi de rappeler quelques éléments complémentaires. Dès l’année prochaine, la zone de Cherbourg, qui regroupe plus de 100 000 habitants, passera au tout numérique. Puis ce sera au tour de l’Alsace à la fin de l’année 2009, suivie par les régions Lorraine, Champagne-Ardenne et Franche-Comté en 2010. En parallèle, nous entamerons le passage à la télévision tout numérique dans l’ouest de la France, avec les régions Bretagne, Pays-de-Loire et Basse-Normandie.
Vous le voyez, qu’il s’agisse de votre région ou des autres, nous allons passer progressivement à la TNT sur l’ensemble du territoire, afin de respecter l’échéance fixée par le Président de la République et le Premier ministre, c'est-à-dire le passage à un taux de couverture du territoire de 100 % avant la fin du mois de novembre 2011.
M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau.
M. Bernard Cazeau. Je vais me mettre en veille à partir du 30 novembre prochain pour vérifier si les trois émetteurs que vous avez évoqués seront effectivement activés. (Sourires.)
Toutefois, je regrette le retard pris par l’installation de l’émetteur de Saint-Julien-de-Lampon. À présent, on nous annonce comme date de mise en service le mois de mai 2009.
Je voudrais profiter de l’occasion qui m’est offerte aujourd'hui pour élargir le débat. De mon point de vue, il est anormal que des collectivités locales soient souvent mises à contribution pour financer l’implantation de nouvelles technologies dans les territoires ruraux.
Ainsi, le conseil général de Dordogne, que je préside, doit investir à hauteur de 3 millions d’euros pour éviter que certaines zones ne restent « blanches » en matière de téléphonie mobile. Et ce n’est pas fini ! Dans le même ordre d’idée, nous devons mobiliser 6 millions d’euros pour la couverture Internet de notre département. Selon les fournisseurs, nos territoires ruraux ne seraient pas suffisamment « rentables ».
M. Bernard Cazeau. Dont acte, monsieur le secrétaire d’État.
Quoi qu’il en soit, en matière de TNT, nous sommes une nouvelle fois obligés de nous fier à ce qui nous est annoncé, jusqu’à preuve du contraire. J’espère que les engagements pris seront tenus. Si ce n’était pas le cas, comptez sur moi, monsieur le secrétaire d’État, pour venir les rappeler dans cet hémicycle.
délocalisation des personnels de la statistique publique
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, auteur de la question n° 298, adressée à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Le 2 septembre dernier, le Président de la République a annoncé à une délégation d’élus de Moselle, inquiets des conséquences économiques et sociales des fermetures de casernes, la délocalisation d’un millier d’emplois publics pour créer un pôle statistique à Metz.
Cette décision, prise sans concertation et annoncée par voie de presse, inquiète fortement les personnels et les élus. Dans mon département, les Hauts-de-Seine, les agents de l’Institut national de la statistique et des études économiques, l’INSEE, à Malakoff et du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, le MEEDAT, à La Défense sont concernés.
Quinze jours plus tard, le Premier ministre a adressé une lettre de mission au directeur général de l’INSEE et au vice-président du Conseil national de l’information statistique, qui doivent lui proposer, avant le 30 novembre prochain, les contours, les effectifs et l’organisation d’un pôle de la statistique, avec un chiffre imposé : délocaliser mille cinq cents emplois publics d’ici à la fin de l’année 2011.
L’objectif notamment fixé à cette réforme est de « préserver la qualité du service statistique public ». Ma crainte, comme celle des personnels, est que cette démarche n’aboutisse au contraire à l’affaiblir, en déstructurant son organisation actuelle.
De quoi parlons-nous ? La statistique publique française compte un peu plus de 8 000 agents, dont les deux tiers se trouvent en région. Elle est donc déjà largement déconcentrée.
Ce n’est pas le choix de Metz qui pose problème. S’il s’agissait d’y créer une nouvelle implantation locale, en recrutant des agents, pour répondre aux sollicitations grandissantes des élus locaux du fait de la décentralisation, les personnels et leurs organisations s’en féliciteraient.
Mais le transfert, décidé dans la précipitation, d’une partie non négligeable des agents, un sur trois pour la région parisienne, fait courir le risque de désorganiser la statistique publique.
Comment ? Vous le savez – de nombreux exemples l’ont montré –, une majorité des agents concernés par une délocalisation choisissent souvent de ne pas partir. Cette proportion atteint parfois jusqu’à 80 %.
Il vous faudrait alors puiser dans le vivier des directions régionales, dans un contexte de départs en retraite – il devrait y en avoir 3 000 d’ici à 2015 – et de non-remplacement d’un départ sur deux, comme l’exige la révision générale des politiques publiques, la RGPP. L’effet sur les implantations locales risque d’être fatal, ce qui aura des conséquences sur toute la chaîne du métier et sur sa spécificité.
Pourtant, le travail de l’INSEE est reconnu internationalement. Il répond notamment à un principe fondamental dans une démocratie : l’indépendance. Ses règles de publication garantissent que les chiffres ne sont pas cachés, même quand ils dérangent.
De ce point de vue, une telle délocalisation est ressentie comme une sanction par les agents.
Je m’interroge donc fortement sur cette décision, qui d’ailleurs rencontre l’opposition des agents à tous les niveaux de la hiérarchie, comme en témoignent leur récent mouvement de grève, la pétition lancée et les interpellations d’élus en région.
Combien cette délocalisation coûtera-t-elle ? Et pour quels bénéfices ? Pourrez-vous garantir aujourd'hui que les missions du système statistique public seront toujours assurées ?
M. Jean-Pierre Sueur. Très bien ! Excellente question !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Éric Besson, secrétaire d'État chargé de la prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement de l'économie numérique. Madame la sénatrice, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence de Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, qui accompagne le Président de la République ce matin dans les Ardennes. Elle m’a donc chargé de vous donner lecture de la réponse qu’elle a préparée à votre intention.
« Madame la sénatrice, vous avez bien voulu me faire part de vos inquiétudes sur les conséquences du projet de délocalisation à Metz des personnels de la statistique publique.
« Vous vous interrogez plus particulièrement sur le maintien de la qualité de cette statistique, ainsi que sur les inquiétudes exprimées par les agents des administrations concernées.
« Je vous rappelle que le Président de la République a souhaité relancer une politique d’implantation d’emplois publics en région qui devra atteindre les objectifs suivants : apporter de l’activité économique à des territoires qui en ont besoin, réduire le coût de gestion des administrations, en particulier en matière immobilière, et réaliser des synergies permettant une meilleure efficacité et une meilleure efficience des services publics. Compte tenu de la restructuration en cours des forces armées, il a effectivement fait savoir que cette politique s’appliquera prioritairement à l’agglomération de Metz, à hauteur de 1 500 emplois concernant l’ensemble de la fonction publique.
« En ce qui concerne plus particulièrement la statistique publique, la proximité de cette ville avec l’Office statistique européen, ainsi que sa desserte par le TGV, ont conduit le Gouvernement à identifier le service statistique public comme pouvant contribuer à l’opération de délocalisation envisagée vers la Moselle.
« Toutefois, le Gouvernement s’est fixé comme objectif que cette réorganisation territoriale se traduise par l’amélioration de la qualité de notre appareil statistique, et non pas, comme vous paraissez le craindre, par sa détérioration. Il a en effet plus que jamais besoin d’une sphère statistique fiable et diversifiée qui permette d’éclairer son action, ainsi que de répondre aux nombreuses questions économiques et sociétales que se posent nos concitoyens.
« Dans ce cadre, le Premier ministre a demandé, le 17 septembre dernier, à M. Jean-Pierre Duport, vice-président du Conseil national de l’information statistique, et à M. Jean-Philippe Cotis, directeur général de l’INSEE, de lui proposer pour la fin du mois de novembre prochain les contours, les effectifs et l’organisation du pôle statistique de Metz. Les objectifs suivants devront avoir été pris en compte : préserver la qualité de la production du service public statistique, apporter une véritable valeur ajoutée au fonctionnement des administrations, en exploitant toutes les sources de synergies et créer à Metz un acteur important du service statistique public et un bassin d’emploi attractif pour les agents.
« Sur le premier point, je vous rappelle que l’ensemble des administrations de la statistique publique sont concernées, comme la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, la sécurité sociale ou la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques du ministère du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité.
« Enfin, il faut faciliter l’installation des agents via les mesures d’accompagnement appropriées. Ces propositions devraient permettre, madame la sénatrice, de répondre aux inquiétudes des agents, que, tout comme vous, nous avons entendues.
« Une équipe d’experts de haut niveau a été réunie par MM. Duport et Cotis pour mener à bien cette mission dans le délai imparti, en procédant à toutes les consultations nécessaires.
« Le Gouvernement n’a pas l’intention de brader la statistique publique, alors qu’il a présenté l’été dernier à votre approbation l’article 144 de la loi de modernisation de l’économie, qui crée une Autorité de la statistique publique, garante de l’indépendance professionnelle dans la conception, la production et la diffusion des statistiques, de l’objectivité, de l’impartialité, de la pertinence et de la qualité des données produites.
« Cette mesure montre avec éloquence l’importance que le Gouvernement attache au service public statistique et à ses agents, dont la compétence et l’impartialité sont reconnues chez nous et bien au-delà de nos frontières. »
M. Jean-Pierre Sueur. Il n’y a pas un mot sur ce qui se passe dans les régions ! Nous n’en savons pas plus sur le maintien du service public de la statistique, à part en Lorraine !
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Je suis sceptique sur deux arguments qui viennent d’être avancés à l’appui d’une telle délocalisation, en l’occurrence la qualité du service public et l’efficacité économique.
Les différentes implantations actuelles de l’INSEE ne relèvent pas du hasard. Il ne s’agit pas de pions sur un échiquier que l’on pourrait déplacer impunément.
M. Jean-Pierre Sueur. Absolument !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. À mon sens, la force de la statistique publique, c’est l’essaimage des cadres et des agents dans les organismes centraux à Paris près des décideurs politiques, des ministères, mais également des milieux de la recherche et, dans les territoires, auprès des conseils régionaux et généraux, des préfectures, des syndicats et de l’ensemble du secteur associatif.
Nous n’avons aucune assurance sur l’acceptation par les agents de leur délocalisation. Or, si nous ne pouvons pas délocaliser, qu’en sera-t-il de la réalisation concrète et de l’efficacité localement produite ?
Vous le savez, il faut du temps, près de trente-six mois, pour former un agent de la statistique. Si nous ne pouvons pas répondre à ce besoin de formation, comment ferons-nous ? Devrons-nous faire appel à des contractuels ? Je le rappelle, il y a beaucoup d’inquiétudes et cette réforme a été décidée sans concertation.
Par ailleurs, je doute de l’efficacité en termes d’emplois induits localement. Le secteur de la statistique publique n’a qu’un faible besoin de sous-traitance.
En outre, aucune évaluation financière n’a été réalisée avant qu’une telle décision soit prise. Or nous connaissons tous des exemples d’« aventures » qui se sont finalement révélées très coûteuses. Ainsi, la délocalisation du Centre national d’études à distance, le CNED, a représenté une dépense de 50 000 euros par poste. Celle de l’INSEE a été évaluée par certains à près de 100 millions d’euros. C’est une somme énorme.
Dans ces conditions, mieux vaudrait, me semble-t-il, évaluer les conséquences d’une telle délocalisation avant de l’engager. C'est la raison pour laquelle je vous demande d’y surseoir.
M. Jean-Pierre Sueur. Très bien !