M. Ivan Renar. Quelle passion !
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le rapporteur, je ne mets pas en doute la pureté de vos intentions. Vous nous dites qu’il s’agit de répondre à une question que les familles nous posent. Mais à qui la posent-elles ? À l'État ! Et c’est au maire d’apporter la réponse ? Très bien !
Au demeurant, j’évoque ce point parce que vous l’avez soulevé, mais je veux en revenir à l’amendement. La mesure proposée est-elle de nature à améliorer les choses et, encore une fois, l’établissement de la liste est-il obligatoire ?
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Oui, c’est une obligation !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Darcos, ministre. Je comprends que ce sujet, qui a été longuement discuté en commission, suscite un débat et je trouve tout à fait légitimes les interrogations qui ont été soulevées, notamment par M. Collombat.
Oui, l’établissement de cette liste est obligatoire ! D’abord, elle constitue une garantie pour le maire d’avoir la certitude de disposer des personnels nécessaires pour le service d’accueil. Ensuite, elle représente une sécurité pour les familles, car on ne peut exclure l’éventualité, même si elle est exceptionnelle, de repérer dans les listes proposées des personnes ayant un casier judiciaire.
Par conséquent, la disposition proposée par la commission, qui n’était pas évidente à trouver, est tout à fait judicieuse.
M. Jean-Claude Carle. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 10 rectifié.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 7.
Article 8
Dans le chapitre III du titre III du livre Ier du code de l'éducation, il est inséré un article L. 133-7 ainsi rédigé :
« Art. L. 133-7. - L'État verse une contribution financière à chaque commune qui a mis en place le service d'accueil au titre des dépenses exposées pour la rémunération des personnes chargées de cet accueil.
« Cette contribution est fonction du nombre d'élèves accueillis. Son montant et les modalités de son versement sont fixés par décret. »
M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, sur l'article.
M. Ivan Renar. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avions déposé deux amendements, qui ont été déclarés irrecevables au titre de l’article 40 de la Constitution. J’en suis fort contrit et encore tout ébaubi, parce que je ne peux même pas les défendre.
Mais cela ne m’empêchera pas de m’exprimer pour dire que le refus de ces deux amendements confirme nos craintes.
Nous demandions qu’il soit inscrit dans la loi que l’État rembourse la totalité des frais engagés à l’occasion de la mise en place, par une commune, d’un service d’accueil en cas de grève des enseignants.
C’est bien la preuve, qu’il s’agisse de « contribution » ou de « compensation », c’est-à-dire du texte d’origine ou des amendements présentés par les deux commissions, que les maires ont au moins une assurance : ils ne seront remboursés qu’en partie, et non pas en totalité. Au moins les choses sont-elles claires !
Aucun cadre ne réglemente les moyens devant être mis en œuvre pour ces accueils, mais le Gouvernement a déjà décidé de ce qu’il paiera. Aux communes de se débrouiller avec ce qu’on leur donne !
De plus, alors que nous proposions, dans un autre amendement, lui aussi refusé, que ce remboursement s’appuie sur le nombre d’enseignants grévistes, l’article 40 a encore frappé. Là encore, les choses sont claires !
Les maires devront prévoir les effectifs nécessaires à l’encadrement de ces accueils en se fondant sur le nombre de grévistes. Mais si, au final, le service d’accueil n’intéresse pas les parents et si peu d’élèves sont présents, les communes en seront pour leurs frais. Seul le nombre d’enfants accueillis fera se délier la bourse du Gouvernement.
Quant au personnel, en surnombre certes, mais qu’il fallait prévoir et recruter au cas où, il faudra gérer administrativement la prestation et il reviendra aux communes d’en assurer le financement. Ainsi, le dispositif prévu dans cette loi, pour le moins contestable, déclarée d’urgence et mal faite, car élaborée dans la précipitation, à partir d’une expérimentation non concluante, devra être pris en charge par les communes.
D’un côté, le Gouvernement réalise des économies et, de l’autre, il fait payer ses charges par les impôts locaux.
Dans ces conditions, nous voterons bien entendu contre l’article 8.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. C’est très bien ainsi !
M. Ivan Renar. Et nous demandons que le Sénat se prononce par scrutin public sur cet article, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, sur l'article.
Mme Nicole Bricq. A ce stade du débat sur l’article 8, qui traite, en l’état actuel, de la contribution financière de l’État, j’aborderai plusieurs points.
En premier lieu, je souhaite poursuivre le débat qui a été engagé hier au sein de la commission des finances à la suite du rapport de notre collègue rapporteur pour avis, M. Longuet
Nous voulions présenter un amendement prévoyant le remboursement intégral des frais engagés par les communes. Le terme « intégral » a subi le couperet de l’article 40 de la Constitution, article que nous ne sommes pas parvenus – pas encore, dirai-je – à supprimer lors de l’examen, voilà peu, du projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la Ve République.
Monsieur le ministre, lors de votre audition par la commission des affaires culturelles, le 18 juin dernier, vous avez dit que le projet de loi créait « une nouvelle compétence au profit des communes » et que, à ce titre, il appartenait « au législateur de fixer le montant et les modalités de la compensation financière attribuée aux collectivités pour l’accomplissement de cette tâche ».
Vous avez donc, ce jour-là, prononcé le mot « compensation », ce qui permet à nos collègues rapporteurs de présenter deux amendements identiques et de substituer au terme « contribution » celui de « compensation ». On avance !
Mais, pour notre part, nous voulions que cette compensation soit intégrale. A la lecture du compte rendu analytique des débats de ce matin, je note que M. Richert a utilisé le terme « intégrale », ce qui veut bien dire que nous étions dans le même esprit que nos collègues en défendant la notion de compensation intégrale.
Notre amendement a été refusé au motif qu’il allait au-delà des intentions du Gouvernement, qui n’avait pas la volonté de rembourser sur facture les collectivités ; M. le ministre s’en expliquera d’ailleurs tout à l’heure, puisque le Gouvernement présente lui-même un amendement relatif à la compensation.
Nous craignons, en tout cas à ce stade, que les communes ne soient pas remboursées à l’euro près de l’intégralité des frais qu’elles auront eu à payer pour l’organisation de cet accueil. Outre les frais concernant le personnel chargé de cet accueil, elles devront supporter les dépenses annexes telles que le chauffage, l’électricité ou le transport scolaire, s’il y a lieu.
Connaissant les mauvaises habitudes de l’État, nous pensons qu’il laissera une partie du coût financier de la mise en place de cet accueil à la charge des communes.
En deuxième lieu, je souhaite attirer l’attention du ministre et des rapporteurs sur la rédaction actuelle de l’article 8, qui reprend celle de la circulaire parue en janvier 2008, quant aux critères de fixation de cette contribution financière : je n’entre pas dans le détail, mais celle-ci est fonction du nombre d’élèves accueillis.
Là encore, nous redoutons le pire, parce que nous souhaitons que le critère retenu soit non pas celui du nombre d’élèves accueillis, mais celui des charges réellement exposées par la commune pour mettre en place ce service minimum.
De toute façon, les communes ne pourraient pas se satisfaire d’une indemnité forfaitaire qui serait d’emblée sous-évaluée.
Je vous rappelle que l’Association des maires de France a jugé, à de nombreuses reprises, que la contribution évoquée jusqu’ici était insuffisante au motif qu’elle ne prendrait en charge qu’une partie des frais.
En troisième lieu, et cet argument est important, l’article 8 nous paraît contraire aux dispositions de l’article 72-2 de la Constitution, qui dispose : « Toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d’augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi ».
Or l’article 8 du projet de loi renvoie à un décret le soin de fixer le montant et les modalités de versement de cette contribution. Il se pose donc un problème constitutionnel, que je ne développerai pas. Dans votre amendement, monsieur le ministre, vous renvoyez également à un décret le soin de fixer le montant d’une contribution minimale. Nous attendrons donc l’appréciation du Conseil constitutionnel, qui, nous l’espérons, reconnaîtra les pouvoirs du Parlement, car c’est au Parlement qu’il appartient de fixer le montant de cette contribution, et non à l’exécutif.
En dernier lieu, les contributions versées seraient financées par les retenues sur salaire des enseignants grévistes du primaire et du secondaire. Monsieur Longuet, vous avez utilisé cet argument hier et, selon vos calculs, ce mécanisme devrait permettre d’équilibrer les finances de l’État.
Permettez-nous de nous méfier ! Comparaison n’est pas raison, mais nous avons trop l’habitude des calculs qui nous sont présentés par le Gouvernement. Nous en avons notamment un très mauvais exemple avec le bonus-malus vendu par M. Borloo : il ne devait pas coûter un sou à quiconque, mais, dès les quatre premiers mois d’application du dispositif, force est de constater que son coût s’élèvera à environ 200 millions d’euros !
Mes chers collègues, nous ne pouvons pas laisser le Gouvernement faire porter sur les collectivités locales l’essentiel du rééquilibrage des finances publiques. Il ressort de la présentation faite, hier, par le Premier président de la Cour de comptes, Philippe Séguin, sur l’état des finances publiques et l’orientation prise par rapport à l’objectif de retour à l’équilibre en 2012, que l’État fait porter les deux tiers de cet engagement sur les dépenses des collectivités locales, et nous savons tous que cela n’a aucun caractère de réalité.
Monsieur le ministre, ayant été vous-même maire pendant douze ans, sans doute comprendrez-vous la position non partisane prise par M. Alain Lambert, auteur d’un important rapport sénatorial sur la fiscalité locale, position que nous partageons tous au sein de la commission des finances – vous pouvez en faire part à votre collègue ministre du budget –, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons : il faudrait, dans la dépense publique au titre des collectivités locales, séparer les dépenses relevant de l’autorité délibérante – la commune, le département, la région – et celles qui sont d’origine législative et réglementaire. C’est le cœur de notre débat !
Cela rétablirait la réalité des dépenses engagées par les collectivités locales et cela éviterait au Gouvernement de faire porter sur elles la très grosse responsabilité du déficit des finances publiques.
M. Jean-Claude Carle. Il fallait le dire à M. Jospin lorsqu’il était Premier ministre !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 11 est présenté par M. Richert, au nom de la commission des affaires culturelles.
L'amendement n° 54 est présenté par M. Longuet, au nom de la commission des finances.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Dans le premier alinéa et la première phrase du second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 133-7 du code de l'éducation, remplacer (deux fois) le mot :
contribution
par le mot :
compensation
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l’amendement n° 11.
M. Philippe Richert, rapporteur. L’amendement n° 11 tend à substituer le mot « compensation » au mot « contribution », s’agissant de la participation financière de l’État. Il vise ainsi à rendre l’article 8 du projet de loi conforme à l’article 72-2 de la Constitution.
Nous n’avons pas prévu de compensation intégrale. En effet, le service d’accueil devant être organisé et encadré, l'État ne peut financer toutes les dépenses engagées à ce titre par une commune. Cette dernière pourrait décider, par exemple, de mettre en place un encadrement beaucoup plus important que celui qui est envisagé par l’État.
Le Gouvernement engage donc un dialogue en proposant un encadrant pour quinze élèves.
Le Gouvernement reprend un amendement qui avait été initialement déposé par Jean-Claude Carle, aux termes duquel il s’engage à verser une compensation d’un montant minimal à toutes les communes organisant un service d’accueil, en particulier aux plus petites d’entre elles, afin de garantir les dépenses qu’elles engageront à cette fin. Ce point est important.
Il serait peut-être utile, monsieur le ministre, que vous nous précisiez quel sera ce montant minimum, qui sera fixé par décret. Vous nous aviez indiqué précédemment qu’il pourrait être versé entre 80 et 90 euros par tranche de quinze élèves. À cet égard, je dois dire que les entretiens que j’ai eus avec les représentants de l’Association des maires de France ont été très positifs, ceux-ci ayant vraiment eu le sentiment d’être écoutés. Ils ont accueilli avec une grande satisfaction les propositions que je leur ai faites en vue d’améliorer le texte du Gouvernement, notamment l'augmentation du montant minimal de cette compensation de 80 ou 90 euros à 100 ou 120 euros.
Je le répète, monsieur le ministre, il serait utile que vous nous précisiez le montant de la compensation que l’État versera aux communes assurant le service d’accueil des élèves.
Telles sont, exposées très succinctement, les raisons pour lesquelles nous souhaitons, par cet amendement, remplacer le mot « contribution » par le mot « compensation ».
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l’amendement n° 54.
M. Gérard Longuet, rapporteur pour avis. Sur cette question, la position de la commission des finances est identique à celle de la commission des affaires culturelles.
Monsieur le ministre, nous avons estimé que le mot « contribution » appartenait sans doute au vocabulaire historique des impôts, qu’il fallait l’entendre au sens des contributions républicaines à la vie collective, et qu’il ne satisfaisait pas aux exigences posées notamment par la nouvelle rédaction de l’article 72–2 de la Constitution, adoptée en 2003. C’est la raison pour laquelle nous avons souhaité lui substituer le mot « compensation ».
Madame Bricq, pourquoi cette compensation n’est-elle ni juste ni intégrale ? Parce qu’il s’agit d’ouvrir un dialogue permettant d’en définir le montant pertinent. Il appartient au législateur de décider s’il veut confier ou non aux collectivités locales la mission d’accueillir les élèves en cas de grève. Ce n’est pas le pouvoir exécutif qui la leur impose. Parallèlement, comme il y a toujours veillé jusqu’à présent, le législateur doit respecter le principe de leur libre administration et leur laisser le soin de définir le modèle qui leur paraît le plus approprié aux contraintes qui sont les leurs. Par exemple, si les communes obéissent à des règles d’hygiène pour la construction des écoles primaires, pour autant, il ne leur est imposé aucun modèle architectural centralisé ; elles ont toute liberté pour construire tel ou tel type d’école compte tenu de leurs ressources, de leurs capacités, de leurs perspectives, de leurs projets et de leur évolution démographique.
Monsieur le ministre, nous souhaitons, par ces deux amendements identiques, ouvrir un dialogue avec vous. Nous aimerions que vous nous apportiez des précisions sur le montant, déterminé par décret, de la contribution minimale qui sera versée aux communes et que vous nous entreteniez de l’effet taille. Nous représentons des communes de toute nature, dont les écoles sont de tailles extrêmement diverses. De fait, les frais engagés pour l’accueil des élèves ne sont pas strictement proportionnels aux effectifs, contrairement à ce qui était sous-tendu par la rédaction initiale de l’article 8 du projet de loi.
M. Jean-Claude Carle. Tout à fait !
M. Gérard Longuet, rapporteur pour avis. La mise en place d’un service d’accueil induira des frais fixes, et l’on peut simplement espérer que le coût total sera décroissant en fonction du nombre d’enfants qui seront accueillis. (M. Jean-Claude Carle approuve.) C’est la raison pour laquelle nous souhaitons que soit fixé un montant minimal à la compensation versée par l’État.
Madame Bricq, c’est le sens du dialogue que nous ouvrons avec le Gouvernement au moment où le législateur s’apprête à demander aux communes d’organiser un service d’accueil des élèves.
M. Jean-Claude Carle. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Darcos, ministre. Le Gouvernement est favorable à ces dispositions. J’y reviendrai plus longuement dans quelques instants, en présentant l’amendement n° 57 du Gouvernement.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 11 et 54.
Mme Nicole Bricq. Le groupe socialiste s’abstient.
M. le président. L'amendement n° 57, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 133-7 du code de l'éducation par un alinéa ainsi rédigé :
« Ce décret fixe le montant minimal de la compensation versée à toute commune ayant mis en place le service d'accueil, ainsi que l'indexation de cette dernière. »
La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Darcos, ministre. Cet amendement est le fruit d’un travail que nous avons engagé avec les communes, avec les élus, en particulier avec l’Association nationale des élus de la montagne, l’ANEM, ainsi qu’avec le sénateur Jean-Claude Carle et le député Martial Saddier, et, évidemment, avec la commission.
Pour des raisons de recevabilité au titre de l’article 40, il appartenait au Gouvernement de le présenter, ce qu’il fait volontiers.
Comme vient de le souligner brillamment M. le rapporteur pour avis, il s’agit indéniablement d’une avancée.
D’une part, il est prévu la création d’une compensation plancher, c'est-à-dire un forfait minimal que toute commune pourra se voir verser, et ce quel que soit le nombre d’enfants qui auront été accueillis, quand bien même celui-ci serait très faible, voire nul. Cette compensation, dont le montant sera fixé par décret, intéressera tout spécialement les petites communes rurales ; c’est sans doute ce qui explique l’abstention du groupe socialiste sur les amendements identiques des deux commissions. À ce stade, nous envisageons de fixer ce forfait à 200 euros par jour.
D’autre part, cet amendement prévoit que cette compensation sera indexée. Là encore, le mode d’indexation sera fixé par décret, le principe étant qu’il ne puisse pas décrocher de l’évolution des coûts liés à la mise en place du service.
Je répondrai maintenant aux objections d’ordre constitutionnel avancées par Mme Bricq. Ce sont là des questions essentielles.
Le projet de loi qualifiait les nouvelles ressources de « contributions de l’État ». La commission des affaires culturelles et la commission des finances ont préféré le terme « compensation ». Pourquoi pas ? Au-delà du simple point de vue juridique, pourquoi cette compensation ne saurait être intégrale, puisque telle est la question qui est posée ?
Premièrement, ce projet de loi visant à créer une compétence de services d’accueil des enfants du premier degré lors de grèves, l’État ne saurait compenser intégralement une dépense qu’il n’avait pas précédemment engagée. En outre, lorsque l’État exerce ses responsabilités au quotidien, cette dépense est proche de zéro. Par conséquent, ce serait une fort mauvaise affaire pour les collectivités que d’être remboursées ou financées sur la base des dépenses qui étaient exposées auparavant par l’État.
Deuxièmement, le financement apporté par l’État ne saurait, en droit et pour des raisons pratiques bien compréhensibles, prendre la forme d’un remboursement sans limite de toutes les factures que pourrait lui présenter chaque commune. Je ne veux par méjuger des intentions des maires, mais on pourrait imaginer que l’un d’entre eux prétende avoir eu besoin de recourir à une dizaine ou à une vingtaine d’adultes pour accueillir les enfants lors de grèves, et présente la facture correspondante.
M. Pierre-Yves Collombat. Et vous confieriez les enfants à de tels irresponsables ? (Sourires.)
M. Xavier Darcos, ministre. Je reconnais que c’est un argument un peu malicieux ! Mais peut-être un collectif de maires pourrait-il avoir cette mauvaise idée pour nous gêner ! (Nouveaux sourires.)
Il ne serait ni raisonnable ni respectueux du contribuable de rendre possible une telle situation.
Pour autant, je le répète, le Gouvernement a bien entendu les attentes et les aspirations des élus, relayées par la Haute Assemblée, qui connaît bien les élus territoriaux et ruraux. C’est pourquoi je prends devant vous deux engagements – ils figureront au compte rendu des débats – qui devraient permettre d’améliorer le financement apporté aux communes.
Premièrement, le forfait minimal de 200 euros pour les petites communes rurales leur sera versé quel que soit le nombre d’élèves accueillis.
Deuxièmement, nous avions, lors de l’expérimentation conduite en janvier et en mai dernier, prévu un financement de 90 euros par groupe de un à quinze élèves pour six heures d’accueil. Nous avions fait ce calcul en fonction du coût du service d’un enseignant pour une journée devant vingt élèves. Certaines communes ont aspiré à un financement supérieur, considérant que le service serait mieux accompli et que les volontaires seraient plus nombreux. Pour cette raison, qui m’a semblé convaincante, nous sommes prêts à ce que le financement de l’État aux communes soit porté à 110 euros, au lieu de 90 euros, par groupe de quinze élèves.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles, et M. Philippe Richert, rapporteur. Merci, monsieur le ministre !
M. Xavier Darcos, ministre. Ce geste financier de l’État devrait permettre d’assurer la réussite du nouveau service et de rassurer définitivement les communes.
Telles sont à la fois les réserves d’interprétation, mais aussi les avancées concrètes que je souhaitais vous présenter. S’agissant des amendements identiques présentés par les deux commissions, je m’en remets à la sagesse, bien connue, de votre Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Carle, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Carle. Comme l’ensemble du groupe UMP, je voterai bien évidemment l’amendement n° 57 du Gouvernement. Comme l’a dit M. le ministre, il est identique à celui que j’avais initialement déposé, mais qui, pour les raisons qu’a énoncées ce matin M. le rapporteur pour avis, a été déclaré irrecevable par la commission des finances.
Cet amendement très important était attendu, en particulier par les petites communes. En effet, il est exact que l’accueil des élèves induira pour elles un certain nombre de frais, dont des frais fixes minimums. Par conséquent, la compensation qu’elles percevront devra tenir compte de ce paramètre. La somme de 90 euros prévue initialement par tranche de quinze élèves accueillis aurait été insuffisante ; sa revalorisation à 110 euros, conformément au vœu exprimé par l’ANEM, va dans le bon sens. De même, le forfait de 200 euros me semble très intéressant.
En outre, il faut saluer le fait que cet amendement prévoie une indexation de la compensation.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Pardonnez-moi ces comptes d’apothicaire, auxquels nous sommes néanmoins habitués dans les communes rurales, mais imaginons le cas d’une commune qui serait obligée de recruter deux personnes pour assurer l’accueil de trente enfants. Si je calcule bien, cela signifie que chacune d’elles sera rémunérée sur la base de six heures de travail, voire de sept heures, si l’on considère qu’elles doivent arriver un peu avant leur prise de service et repartir un peu après. Cela revient à les rémunérer environ 15,50 euros par heure. Faudra-il s’acquitter du paiement des cotisations sociales ? Peut-être faudra-t-il acheter un tube de peinture pour occuper les enfants pendant les six heures… Je n’ai pas l’impression que la compensation se fasse à l’euro près !
Notre collègue Gérard Longuet nous a dit tout à l’heure que, lors d’une grève, l’État économisait environ 24 millions d’euros. Aussi, monsieur le ministre, peut-être pourriez-vous faire un effort supplémentaire ?
M. Gérard Longuet, rapporteur pour avis. Il n’économise rien du tout !
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. J’ai fait, moi aussi, procéder à des calculs. On connaît grosso modo le coût d’un enfant en maternelle et à l’école élémentaire ; vous savez très bien qu’il est bien plus important dans le second cas que dans le premier. Aussi, l’honnêteté oblige à dire que cette somme de 110 euros est insuffisante.
Mais tel n’était pas le sens de mon intervention. Monsieur le ministre, vous avez annoncé que la compensation s’élèverait à 110 euros par tranche de quinze élèves et fixé un plancher minimal à 200 euros. Je constate que ces décisions sont le fruit d’une concertation. Je suppose que vous associerez aussi nos collègues de la majorité à la rédaction du décret. Je remarque, une fois de plus, que la majorité s’arrange entre elle. Nous sommes membres de l’opposition, de la minorité. Je souhaite néanmoins que M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles et M. le rapporteur pour avis de la commission des finances nous tiennent informés des dernières décisions avant la parution du décret. (Assentiment sur le banc des commissions.) Ce serait la moindre des choses, car nous nous sommes efforcés de faire avancer le dispositif.
Pour autant, comme l’ont indiqué nos collègues ce matin dans la discussion générale, cela ne modifie en rien notre opposition de fond à ce mécanisme. De fait, l’accueil sera financé par les retenues effectuées sur les salaires des grévistes, ce qui est une première dans la République.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 57.
M. le président. L'amendement n° 32 rectifié, présenté par MM. Gélard et Alduy, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 133-7 du code de l'éducation par un alinéa ainsi rédigé :
« Le délai de remboursement par l'État des frais engagés par la commune ou par l'établissement public de coopération intercommunal ne peut être supérieur à un mois après la notification par la commune concernée. »
Cet amendement n’est pas soutenu.
L'amendement n° 50 rectifié, présenté par M. Lagauche, Mme Blandin, M. Bodin, Mme Bricq, M. Marc et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 133-7 du code de l'éducation par un alinéa ainsi rédigé :
« Le versement de cette contribution intervient au maximum 35 jours après notification par le maire, à l'autorité académique ou à son représentant, des éléments nécessaires au calcul de cette compensation.»
La parole est à M. Serge Lagauche.