Article 5
Dans le chapitre III du titre III du livre Ier du code de l'éducation, il est inséré un article L. 133-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 133-4. - Dans le cas où un préavis a été déposé dans les conditions prévues par l'article L. 2512-2 du code du travail et en vue de la mise en place d'un service d'accueil, toute personne exerçant des fonctions d'enseignement dans une école maternelle ou élémentaire publique informe l'autorité administrative, au moins quarante-huit heures avant de participer à la grève, de son intention d'y prendre part.
« L'autorité administrative communique sans délai au maire, pour chaque école, le nombre de personnes ayant fait cette déclaration et exerçant dans la commune.
« Le maire met en place ce service d'accueil, lorsque le nombre de personnes qui ont déclaré leur intention de participer à la grève en application du premier alinéa du présent article est égal ou supérieur à 10 % du nombre des personnes exerçant des fonctions d'enseignement dans les écoles maternelles et élémentaires publiques de la commune. »
M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, sur l'article.
M. Ivan Renar. Pour cet article, comme pour tous les autres, nous aurions pu déposer un amendement de suppression, tant son contenu nous semble néfaste.
Il décrit en effet le mécanisme de l’obligation faite aux enseignants de se déclarer grévistes, et celui du transfert de l’information aux maires pour qu’ils mettent en place le service d’accueil.
Or, autant il précise les obligations des enseignants, autant il reste flou pour les autres intervenants.
En premier lieu, qui est l’autorité administrative dont il est question dans cet article ? L’inspecteur de l’éducation nationale ? Si oui, pourquoi ne pas le nommer ? Auprès de qui l’enseignant doit-il se déclarer gréviste ? Ce n’est pas précisé.
En second lieu, quelle est l’autorité administrative qui communique au maire les effectifs de grévistes ? Et quelles informations communique-t-elle ?
Il est en effet important de connaître l’âge des enfants qui devront être accueillis. Les exigences d’encadrement et d’animation varient selon les âges. Ainsi, s’ils ont besoin de faire la sieste, cela pourra poser des problèmes.
En ce qui concerne les délais, s’il est précisé que l’enseignant doit se déclarer quarante-huit heures à l’avance, aucun délai, en revanche, n’est indiqué pour l’information du maire. En effet, « sans délai », est-il écrit, mais cela ne veut rien dire !
Or, les maires ont très souvent une activité professionnelle et, dans les petites communes, le secrétariat n’est pas toujours permanent. Ainsi, dans la plupart des cas, le maire devra mettre en place l’accueil en vingt-quatre heures. Est-ce sérieux ?
Ce délai est en effet très court, si court que nous nous interrogeons sur la possibilité réelle de le respecter, en particulier dans les moyennes et grandes villes, où il faudrait parfois trouver plusieurs dizaines d’animateurs pour accueillir les enfants, ou, à l’inverse, dans les communes rurales, où trouver deux ou trois personnes ne sera pas simple non plus.
Que fera le maire quand, en plus de la grève des enseignants, il devra gérer celle du personnel municipal, en particulier celui qui intervient dans les écoles, y compris le personnel de restauration ? A-t-il une obligation de moyens ou une obligation de résultat ?
Parlons encore des obligations qui ne sont pas précisées et qui sont pourtant essentielles, au nombre desquelles la question du taux d’encadrement.
Ce taux, non précisé, sera pourtant un élément important de l’engagement de la responsabilité des maires. Il faut qu’il soit spécifié dans la loi, pour le cas où un maire devrait passer au tribunal, par exemple.
Les maires connaissent deux types de taux d’encadrement : pour les cantines, le nombre d’adulte est de un pour quarante rationnaires ; pour les centres de loisirs sans hébergement, ce sont ceux de la jeunesse et des sports qui s’appliquent.
Quel encadrement devra-t-il prévoir ? Sans aucun doute devra-t-il appliquer la norme « jeunesse et sports », à savoir, en moyenne, trois adultes pour un enseignant gréviste et un directeur de centre, car, même si le directeur ou la directrice de l’école ne sont pas grévistes, ils n’ont pas autorité sur le personnel communal.
Dans les villes comptant quelques dizaines d’écoles, ce sont très vite plus de cent personnes qu’il va falloir recruter, organiser et gérer. Ce n’est pas une mince affaire.
Enfin, dans cet article est prévue la mise en œuvre de cet accueil scolaire dès que 10 % des enseignants se déclarent grévistes. Compte tenu des effectifs de nos écoles, dans 90 % des cas, dès qu’un enseignant sera en grève, il faudra mettre en place cet accueil.
Comment justifier un si faible taux, quand, dans l’exposé des motifs de ce projet de loi, il est précisé que cet accueil doit être mis en place en cas « de grève importante » ? Les syndicalistes seront heureux d’apprendre qu’avec 10 % de grévistes une grève est importante !
Monsieur le ministre, vous ne serez donc pas étonné que, compte tenu de tout ce que cet article contient et de tout ce qui n’y est pas précisé, nous ne pourrons que voter contre.
M. le président. Je suis saisi de huit amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 44, présenté par M. Lagauche, Mme Blandin, M. Bodin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Serge Lagauche.
M. Serge Lagauche. Dans la logique de notre opposition de principe à la création d’une nouvelle charge pour les communes, nous nous opposons aussi à ses modalités de mise en œuvre.
Soulignons que le seuil de 10 % d’enseignants grévistes, au-delà duquel la commune devra organiser le service d’accueil, sera atteint dès lors qu’un seul enseignant fera grève dans de très nombreuses communes, à savoir celles qui disposent de moins de dix classes sur l’ensemble de leur territoire, si l’on exclut le cas des enseignants à temps partiel.
Ainsi, en zone rurale, c’est potentiellement l’ensemble des communes qui devra mettre en œuvre ce service, alors même que c’est dans ce type de municipalités que les maires auront le plus de difficultés à l’organiser dans des conditions acceptables pour maintenir la sécurité et la qualité d’accueil des enfants.
Je le rappelle, selon l’AMF, sur les 22 500 communes possédant une école publique du premier degré, 20 000 ne seront pas en mesure d’assurer ce service d’accueil.
À l’article 5, le Gouvernement – dans sa grande générosité ! – octroie aux maires quarante-huit heures, dans le meilleur des cas, pour organiser un service d’accueil les jours de grève. Autrement dit, il leur faut trouver les personnels à même d’effectuer cet accueil en nombre suffisant, alors même que le nombre d’enfants concernés sera le plus souvent difficile à comptabiliser. On notera aussi la difficulté pour les communes à estimer le nombre réel de grévistes, certains pouvant se rétracter au dernier moment.
À ce titre, nous sommes extrêmement inquiets du manque d’exigence du projet de loi quant à la qualité des personnels qui seront appelés à s’occuper d’enfants.
Des normes drastiques sont imposées aux communes en matière d’accueil en centres de loisirs et lors des activités périscolaires.
En termes de sécurité des élèves accueillis, il aurait été opportun, tout au moins, de prévoir que le personnel assurant ce service d’accueil doit satisfaire aux mêmes exigences que celles qui sont posées pour l’encadrement dans les centres de loisirs sans hébergement et lors des activités périscolaires, à savoir la détention du BAFA ou du BAFD, et ce conformément aux dispositions de l’arrêté du 20 mars 1984.
En outre, en vertu de l’instruction du 23 mai 2003 et de la loi du 17 juillet 2001, les exigences d’encadrement varient en fonction de l’âge des enfants. Je les rappelle : pour les moins de six ans, il faut un animateur pour huit enfants en centres de loisirs et un pour dix en période périscolaire ; pour les six ans et plus, un animateur pour douze enfants en centres de loisirs et un pour quatorze en période périscolaire est requis.
Certes, allez-vous me répondre, monsieur le ministre, le respect des exigences minimales au regard de la sécurité des enfants que je viens d’évoquer rendrait encore plus difficile l’organisation de ce service d’accueil pour la plupart des communes.
Nous avions déposé un amendement de repli destiné à apporter des garanties de qualification des personnels assurant le service d’accueil. Une fois de plus, l’article 40 de la Constitution nous a été opposé, et nous ne pourrons pas défendre notre proposition. L’irrecevabilité financière a bon dos, surtout quand il s’agit de la sécurité des enfants !
À cet égard, je ne résiste pas au désir de vous lire le commentaire de notre collègue Jean Arthuis, président de la commission des finances, pour justifier l’irrecevabilité : « L’absence de contraintes quant aux qualifications des encadrants permet aux communes de recourir à leurs employés pour assurer le service minimum. » (M. Pierre-Yves Collombat s’esclaffe.) M. Arthuis poursuit : « L’institution d’une contrainte en termes de qualification contraindra les communes, notamment rurales, qui ne disposeraient pas de personnel qualifié à en recruter temporairement, ce qui constitue une charge publique supplémentaire. »
Ainsi, la majorité sénatoriale se satisferait d’un accueil des enfants par le cantonnier, du moins quand la commune en a un ! Telle n’est pas notre conception d’un service d’accueil digne de ce nom.
Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de cet article. (M. Pierre-Yves Collombat applaudit.)
M. le président. L’amendement n° 17, présenté par MM. Carle, Valade, Richert, Besse, Billard, J. Blanc, P. Blanc, Bordier, de Broissia, Brun, César, Chauveau, Cornu, Couderc et Demuynck, Mme Descamps, MM. Doublet et Dufaut, Mme Dumas, MM. A. Dupont, Duvernois, Émin, Esneu, Fournier, Garrec, Gérard, Ginésy, F. Giraud et Girod, Mme Henneron, MM. Hérisson et Humbert, Mme Hummel, MM. Huré, Jarlier, Legendre et Leroy, Mme Malovry, M. Martin, Mme Mélot, MM. Miraux, Mortemousque, Murat et Nachbar, Mme Papon et MM. Pointereau, Texier et Souvet, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l’article L. 133-4 du code de l’éducation, après les mots :
quarante-huit heures
insérer les mots :
comprenant au moins un jour ouvré
La parole est à M. Jean-Claude Carle.
M. Jean-Claude Carle. Je serai bref, car cet amendement est suffisamment clair et explicite. De surcroît, j’ai eu l’occasion de l’évoquer dans la discussion générale, et vous nous aviez alors annoncé votre intention d’y donner une suite favorable, monsieur le ministre.
Cet amendement vise en effet à améliorer l’information des élus, en prévoyant d’inclure un jour ouvré dans le délai de quarante-huit heures, afin d’assurer le meilleur accueil possible. Il s’agit d’une mesure attendue notamment par un certain nombre d’élus de petites communes qui ne disposent pas de services suffisamment étoffés pour s’organiser au mieux.
M. le président. L’amendement n° 7, présenté par M. Richert, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Après le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l’article L. 133-4 du code de l’éducation, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le cadre de la négociation préalable prévue à l’article L. 133-2, l’État et la ou les organisations syndicales représentatives des personnels qui ont procédé à la notification prévue au II de ce même article peuvent s’entendre sur les modalités selon lesquelles ces déclarations préalables sont portées à la connaissance de l’autorité administrative. En tout état de cause, cette dernière doit être informée, au plus tard quarante-huit heures avant le début de la grève, du nombre, par école, des personnes ayant déclaré leur intention d’y participer.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Richert, rapporteur. Il s’agit d’un amendement important, puisqu’il a trait aux relations entre les enseignants et l’autorité employeur, à savoir le ministère de l’éducation nationale.
En effet, le service d’accueil ne pourra être mis en œuvre si le nombre de grévistes n’est pas connu par avance, au moins approximativement. C’est ce qui justifie la déclaration obligatoire quarante-huit heures à l’avance. Mais le mouvement se sera déclenché treize jours auparavant ! Donc, les communes savent déjà qu’il risque d’y avoir une grève. Elles sont « en veille », si je puis dire.
M. Serge Lagauche. Il faut privilégier la négociation !
M. Philippe Richert, rapporteur. Certes, mais celle-ci a eu lieu alors même que le risque de grève est avéré. La commune peut donc contacter les personnes qui seraient concernées.
Le principe posé par le projet de loi est le suivant : quarante-huit heures avant la grève, les enseignants ayant l’intention d’y participer doivent se déclarer nominativement à leur hiérarchie ; parallèlement, comme le veut la tradition, ils informent les parents.
En réalité, un certain nombre d’enseignants très attentifs à ces questions se sont inquiétés du fait de devoir se déclarer grévistes auprès de leur autorité hiérarchique et ont émis le souhait de pouvoir conserver l’anonymat. La commission comprend de telles inquiétudes. Même si c’est très peu probable, des pressions peuvent en effet toujours avoir lieu. En tout état de cause, ce type de déclaration peut créer un certain malaise.
Par conséquent, la commission a proposé un aménagement des modalités de déclaration, au moment même où certaines organisations syndicales exprimaient un souhait similaire.
De ce dialogue croisé entre le ministre, les syndicats et la commission est né cet amendement, qui permettrait aux syndicats et au ministère de convenir ensemble de modalités de déclaration assouplies, au cours de la négociation préalable instituée par l’article 3 du projet de loi. Il est ainsi tout à fait possible d’imaginer que le directeur d’école puisse recueillir les déclarations d’intention de ses collègues et transmettre à l’autorité académique uniquement le nombre de grévistes déclarés dans l’école, sans préciser le nom des personnes concernées.
Un tel aménagement permettrait, en cas d’accord entre les syndicats et l’autorité employeur, à savoir le ministère, d’éviter le recours à une déclaration nominative. En respectant ainsi une certaine confidentialité, même si l’on saura tout de même qui fait grève, la commission répond à la demande des enseignants.
M. le président. L’amendement n° 28 rectifié, présenté par MM. Gélard et Alduy, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l’article L. 133-4 du code de l’éducation :
« Lorsque le nombre des enseignants qui ont déclaré leur intention de participer à la grève ne permet pas d’ouvrir les locaux d’une école maternelle ou primaire dans une commune, celle-ci organise le dispositif nécessaire à l’accueil des enfants. Cet accueil est mis en place pendant les heures au cours desquelles les enseignements sont dispensés. Lorsqu’il y a plus d’un enseignant non gréviste, l’établissement scolaire assure l’accueil des enfants qui se présentent sous la responsabilité de l’Éducation nationale. »
Cet amendement n’est pas soutenu.
L’amendement n° 8, présenté par M. Richert, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l’article L. 133-4 du code de l’éducation :
« La commune met en place ce service d’accueil à destination des élèves d’une école maternelle ou élémentaire publique située sur son territoire lorsque le nombre des personnes qui ont déclaré leur intention de participer à la grève en application du premier alinéa du présent article est égal ou supérieur à 20 % du nombre de personnes qui exercent des fonctions d’enseignement dans cette école. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Richert, rapporteur. Avec cet amendement, nous abordons la question du taux d’enseignants grévistes à partir duquel le processus s’enclenche.
Le Gouvernement a proposé de fixer ce seuil à 10 % de grévistes par commune. Or, dans les municipalités les plus importantes, il peut y avoir, les jours de grève, de grandes variations d’une école à l’autre, avec, par exemple, 50 % de grévistes dans un établissement et aucun dans un autre : au final, si ce seuil était appliqué, un nombre important de grévistes dans une école ne suffirait pas à déclencher le processus.
C’est la raison pour laquelle il nous semble plus raisonnable de mettre en place un dispositif qui prenne en compte la situation école par école, et non plus globalement, commune par commune. Ce faisant, le seuil peut être relevé.
Si le seuil de 10 % a été initialement retenu, c’est parce qu’il était prévu de faire une moyenne sur l’ensemble d’une commune : il convenait alors de prendre en compte la situation des grandes municipalités et de prévoir un taux relativement bas, afin de pouvoir faire face à des cas extrêmes, où certaines écoles pourraient compter un nombre important de grévistes.
De là est née l’idée de la commission de retenir un pourcentage de 20 %, apprécié école par école ; certains, en particulier sur les travées de gauche, mais aussi sur celles de droite, l’ont d’ailleurs déjà évoquée.
Prenons ainsi l’exemple d’une école avec huit classes, c’est-à-dire d’un établissement relativement important : en appliquant un seuil de 10 %, le processus s’enclenche dès qu’un enseignant se déclare gréviste, ce qui serait tout de même quelque peu contre-productif ; avec un seuil de 20 %, on passe à deux enseignants grévistes, ce qui paraît plus raisonnable ; avec 30 %, il faudrait trois grévistes, soit trois classes à répartir dans cinq autres, ce qui semble pour le moins compliqué.
C’est la raison pour laquelle, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission vous propose ce seuil de 20 %, qui lui paraît plus réaliste.
M. le président. L’amendement n° 35 rectifié, présenté par MM. Détraigne, Arnaud et Zocchetto, Mmes Payet, Dini et les membres du groupe Union centriste-UDF, est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l’article L. 133-4 du code de l’éducation, remplacer les mots :
met en place
par les mots :
peut mettre en place
Cet amendement n’est pas soutenu.
L’amendement n° 45, présenté par M. Lagauche, Mme Blandin, M. Bodin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après les mots :
égal ou supérieur
rédiger ainsi la fin du dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l’article L. 133-4 du code de l’éducation
, par école, à 50 % du nombre des personnes exerçant des fonctions d’enseignement dans cette école
La parole est à M. Serge Lagauche.
M. Serge Lagauche. Nous proposons un seuil de 50 %, mais loin de nous l’idée de faire de la surenchère !
M. le président. L’amendement n° 36 rectifié, présenté par MM. Détraigne, Arnaud et Zocchetto, Mmes Payet, Dini et les membres du groupe Union centriste-UDF, est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l’article L. 133-4 du code de l’éducation, remplacer le pourcentage :
10 %
par le pourcentage :
30 %
La parole est à Mme Muguette Dini.
Mme Muguette Dini. J’ai bien entendu les arguments présentés par M. le rapporteur, mais, pour notre part, nous souhaitons faire passer ce seuil de 10 % à 30 %.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Richert, rapporteur. Sur l’amendement n° 44 de suppression de l'article 5, je ne reviendrai pas sur le fond, car nous avons déjà eu l’occasion d’en débattre.
Monsieur Lagauche, le dispositif que l’on a choisi de mettre en place devrait permettre d’éviter les situations que vous avez évoquées, comme le fait de confier la garde des enfants à un cantonnier qui n’aurait aucune compétence en la matière.
C'est la raison pour laquelle nous avons proposé de prévoir la constitution, dans les communes, d’un « vivier » de personnes connues d’avance, capables d’assurer la prise en charge des élèves et à qui l’on pourra faire appel. Grâce, en particulier, à des entretiens individuels, on se sera assuré au préalable que celles-ci ont les compétences, l’expérience et la motivation requises pour faire face à de telles situations.
Par ailleurs, la commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° 17. Il semble en effet important que le délai de quarante-huit heures comprenne au moins un jour ouvré, pour laisser la possibilité de contacter l'ensemble des partenaires et, notamment, ceux qui sont appelés à organiser le service d’accueil des élèves.
Monsieur Lagauche, par l’amendement n° 45, vous nous proposez de retenir finalement le seuil de 50 % d’enseignants grévistes. Or, en pratique, un tel pourcentage risque de n’être que peu souvent atteint. À mes yeux, les situations auxquelles il faut pouvoir faire face sont déjà constatées à un niveau bien inférieur.
Comme cela se fait en général, les élèves d’une classe dont l’enseignant est gréviste sont répartis dans les autres classes. Par conséquent, pour une école de dix classes qui compte 40 % de grévistes, dans l’hypothèse où le service d’accueil n’est pas mis en place, cela suppose que les six enseignants restants prennent en charge les élèves concernés. Très franchement, cela me paraît tout de même très compliqué !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Bien sûr !
M. Philippe Richert, rapporteur. C'est la raison pour laquelle, sur ma proposition, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Madame Dini, en ce qui concerne l’amendement n° 36 rectifié, votre proposition de relever le seuil à 30 % me laisse, je dois le reconnaître, quelque peu perplexe. Initialement, le ministère avait prévu un taux de 10 %. Après réflexion, j’ai moi-même proposé un seuil de 20 %, apprécié école par école. M. le ministre pourra en témoigner, j’ai dû batailler pour faire accepter cette idée, mais j’y suis parvenu !
Cela étant, je ne peux pas affirmer catégoriquement qu’un seuil de 30 % est moins pertinent qu’un seuil de 20 %. Néanmoins, au point de la discussion où nous en sommes, mieux vaut à mon sens en rester à 20 % pour le moment, ce qui correspond déjà à un relèvement significatif du seuil. Le texte va repartir à l’Assemblée nationale. Si cette dernière n’est pas d’accord avec notre proposition, nous aurons toujours l’occasion, en commission mixte paritaire, de revenir sur cette question importante.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Darcos, ministre. L’adoption de l’amendement n° 44 défendu par M. Lagauche aurait pour effet de vider le texte de sa substance. Bien entendu, je ne peux l’accepter.
En ce qui concerne l’amendement n° 17 de M. Carle, l’idée d’inclure un jour ouvré dans le délai de quarante-huit heures fixé pour les déclarations individuelles est très bonne. Cet amendement est d’ailleurs le fruit d’un travail de grande qualité mené par la commission des affaires culturelles, sous la présidence de M. Valade. Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur cet amendement.
À l’évidence, le Gouvernement est également tout à fait favorable à l’amendement n° 7 de la commission, qui a pour objet de laisser aux organisations syndicales la possibilité de négocier les modalités de déclaration de grève avec l’autorité administrative. Je remercie M. le rapporteur de l’avoir présenté, car il reprend les conclusions des discussions que mes propres services ont conduites avec François Chérèque. Je me réjouis qu’un tel amendement ait pu être repris au Sénat, car cette disposition est véritablement de nature à favoriser le dialogue avec nos personnels.
Madame Dini, avec l’amendement n° 36 rectifié, nous en revenons à la question compliquée du seuil, sur laquelle nous avons longuement hésité. Permettez-moi de le rappeler, dans le premier degré, on considère qu’une grève est très importante lorsqu’il y a 25 % à 30 % de grévistes. Par conséquent, si le seuil était fixé à 30 %, le dispositif ne s’appliquerait que très rarement. Ce pourcentage est trop élevé !
De surcroît, fixer le seuil de déclenchement à un niveau aussi élevé reviendrait à créer une double peine pour les non-grévistes puisqu’ils devraient, en plus de leur classe, prendre en charge près d’un tiers des élèves d’une école.
Donc, madame Dini, même si je comprends que vous vous préoccupiez de l’intérêt général, je souhaiterais que nous nous en tenions finalement à la proposition de M. Richert fixant à 20 % par école le seuil de grévistes.
Je pensais m’en remettre à la sagesse du Sénat, mais, à la réflexion, je vais émettre un avis favorable sur l’amendement de M. Richert.
M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote sur l'amendement n° 7.
M. Ivan Renar. L’article 5 suscite, à juste titre, l’émotion des organisations syndicales. En effet, il inverse la procédure de déclaration de grève. Jusqu’à aujourd’hui, les enseignants informent simplement le directeur de leur école et les parents de leur intention de faire grève. C’est ensuite à l’inspecteur de l’éducation nationale de constater l’état de grève.
Avec cet article 5, les enseignants vont être obligés de déclarer leur « intention de prendre part à la grève » auprès de leur autorité administrative. Informer son autorité administrative de son « intention de prendre part à la grève », cela ne veut pas dire obligatoirement faire grève au final. D’où votre amendement, monsieur le rapporteur, pour tenter d’arrondir les angles, ce qui est d’ailleurs à votre honneur.
Mais prévoir que l’État et la ou les organisations syndicales « peuvent s’entendre sur les modalités selon lesquelles ces déclarations préalables sont portées à la connaissance de l’autorité administrative » – laquelle n’est, encore une fois, pas précisément nommée – qu’est-ce que cela signifie ? Pas grand-chose : elles peuvent s’entendre, comme elles peuvent ne pas s’entendre. Il n’y a aucune obligation de résultat. Ce n’est pas ce que l’on peut appeler un dialogue social très vivifiant !
Quant à l’idée vague « d’anonymat » que vous laissez entendre, elle me laisse perplexe, à moins que l’autorité administrative que vous visez ne soit pas l’inspection de l’éducation nationale, laquelle sait forcément qui a fait grève puisque c’est elle qui réalise les retenues sur salaire.
Nous voterons donc contre cet amendement, qui ne crée aucun droit ; il ouvre simplement une vague possibilité.
M. le président. En conséquence, les amendements nos 45 et 36 rectifié n'ont plus d'objet.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote sur l’article 5.