M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. S’agissant de l’amendement n° 35, nous sommes défavorables au décalage de la périodicité qu’il propose. En effet, nous risquerions ainsi de laisser s’installer progressivement le risque d’un chômage de longue durée.
Par ailleurs, je souhaite revenir sur l’exemple qui a été évoqué tout à l’heure. L’offre d’emploi à laquelle il a été fait référence pouvait donner lieu, dans le cadre législatif actuel, à une sanction envers un demandeur d’emploi qui ne l’aurait pas acceptée ; ce ne serait plus possible en revanche avec notre dispositif de l’offre raisonnable d’emploi. Voilà qui illustre le bien-fondé des critères que nous avons retenus pour définir une offre raisonnable d’emploi.
En ce qui concerne l’amendement n° 20, il ne me semble pas raisonnable de supprimer la mention de l’actualisation périodique. Cette actualisation du parcours est importante, comme le prouvent d’ailleurs certains de vos amendements tendant au même but.
L’amendement n° 37 a le même objet que l’amendement n° 35. J’y suis défavorable pour les mêmes raisons.
Dans l’amendement n° 36, pourquoi avons-nous préféré les mots « compatible avec » à « correspondant à » ? Un exemple pris en Haute-Loire – ce que M. le président appréciera certainement – me permettra de l’expliquer.
À la suite d’une procédure de licenciement collectif, une jeune femme de quarante-cinq ans, qui réceptionnait des sacs plastiques, avait certes pour qualification d’avoir travaillé dans une PME, mais elle aspirait à devenir aide-soignante par le biais d’une formation. Cet emploi ne « correspondait » pas strictement à ses qualifications, mais – et c’est tout l’intérêt du projet personnalisé – une formation lui a permis de rebondir et de réorienter sa carrière.
Encore un mot sur cet exemple : en Haute-Loire, ce ne sont pas les chats qui gardent les chèvres, peut-être parce que nous sommes plus raisonnables qu’en Provence, monsieur Fischer… (Sourires.)
L’amendement n° 38 propose de supprimer un des éléments d’évolution de l’offre raisonnable. Pour les mêmes raisons que précédemment, nous y sommes défavorables.
L’amendement n° 39 risquerait, je le crains, d’aboutir à des situations ubuesques : alors qu’une personne occupait préalablement un emploi à mi-temps, le calcul proposé aboutirait à ce que l’on ne puisse lui proposer qu’un emploi à mi-temps avec un salaire horaire deux fois plus important qu’avant !
Sur l’amendement n° 40, pour les mêmes raisons que sur les amendements n° 35 et 37, l’avis du Gouvernement est défavorable.
S’agissant du SMIC, il est très important de préciser – je réponds aux interrogations de Mme David – que les règles qui lui sont relatives sont évidemment respectées, ce qui nous prémunit de façon importante contre le dumping salarial. Je tenais à vous en apporter ici la garantie pour que cet engagement puisse être ensuite, le cas échéant, opposé à la politique du Gouvernement.
Le texte prévoyant explicitement à la fin de son article 1er le respect des règles relatives au SMIC, les amendements nos 41 et 42 sont inutiles.
J’en viens à l’amendement n° 17. Monsieur Desessard, effectivement, un problème de mobilité peut se poser à certains demandeurs d’emploi ayant l’opportunité de retrouver un travail ; nous ne devons pas le sous-estimer.
Nous avons, d’ores et déjà, commencé à améliorer les aides à la mobilité par un accès facilité au permis de conduire et par des aides permettant de bénéficier dans un premier temps, notamment par le biais d’associations, de systèmes de prêts d’automobiles. Ces aides permettent de rouvrir l’accès au travail.
Vous soulevez donc un vrai problème, mais je crois que nous le résoudrons surtout par des aides de terrain et par une amélioration des dispositifs d’aide à la mobilité, qui, aujourd’hui, ne sont pas satisfaisants ; je suis d’accord avec vous sur ce point.
À propos de l’amendement n° 50, je dirai que c’est en raison des coûts liés à la mobilité que nous n’avons pas voulu mettre en place un dispositif qui, à l’image de ce qui existe dans la plupart des pays européens, impose une mobilité beaucoup plus importante. Grâce au système envisagé, les coûts resteront raisonnables.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Vous nous garantissez que les demandeurs d’emploi ne seraient pas obligés d’accepter un emploi en dessous du SMIC. Mais pourquoi, dans ce cas, est-il dit : « Après un an d’inscription, est considérée comme raisonnable l’offre d’un emploi rémunéré au moins à hauteur du revenu de remplacement prévu à l’article L. 5421-1. » ?
En somme, d’un côté, on prévoit qu’après un an de chômage, un demandeur d’emploi devra accepter un emploi rémunéré à hauteur d’un minima social, par exemple le RMI ou l’ASS, et, de l’autre, vous dites qu’il ne sera pas obligé d’accepter un emploi rémunéré en dessous du SMIC.
Il y a là quelque chose de difficile à comprendre : à deux alinéas d’écart, le texte diffère. Le sens de nos amendements est donc de lever le doute en disant qu’on ne peut pas demander à un salarié de travailler pour l’équivalent d’un minima social, que son revenu doit être au moins égal au SMIC. Sur ce point, il semble que nous soyons d’accord, mais la rédaction actuelle n’est pas claire.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Le travail proposé peut être à temps partiel !
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l’amendement n° 36.
Mme Annie David. Si j’en juge par la réponse du président About, un demandeur d’emploi à qui l’on proposera un travail à temps partiel rémunéré à hauteur d’un minima social sera obligé de l’accepter. Or, depuis le début de la discussion, nous dénonçons précisément la précarité à outrance que ce texte va favoriser.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Si c’est ce qu’il a demandé !
Mme Annie David. Pas forcément puisqu’il est bien précisé : « Après un an d’inscription, est considérée comme raisonnable l’offre d’un emploi rémunéré au moins à hauteur du revenu de remplacement prévu à l’article L. 5421-1 ». Ce n’est pas moi qui l’invente, c’est écrit dans le texte ! Le demandeur d’emploi sera donc bien obligé d’accepter un temps partiel.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Madame David, d’abord, le demandeur d’emploi ne sera nullement obligé d’accepter une proposition de temps partiel si cela ne correspond pas aux caractéristiques de l’emploi définies conformément à ses souhaits dans le projet personnalisé d’accès à l’emploi.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Voilà !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Bien sûr ! Cela a d’ailleurs été dit en commission.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Pour expliciter le deuxième point, le meilleur parallèle que je puisse faire – ce n’est pas à vous que je vais l’apprendre ! – est celui de l’ordre social tel qu’il est défini, notamment, dans les différentes conventions imbriquées dans le droit du travail.
Ainsi, il est un socle auquel on ne peut pas toucher, c’est la définition du SMIC. Personne ne pourra donc forcer le demandeur d’emploi à accepter un travail dont la rémunération sera inférieure au SMIC.
Mme Annie David. Au SMIC horaire ?
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Au SMIC horaire, bien sûr !
Ainsi, s’agissant du revenu de remplacement, on considère que le demandeur d’emploi qui percevait, par exemple, une allocation chômage de 1 600 euros pourra accepter un emploi rémunéré à hauteur de 85 % de cette somme. Cela est très clair également.
Le demandeur d’emploi aura toujours la garantie du SMIC et sera prémuni de tout dumping salarial destiné à tirer les salaires par le bas grâce à la comparaison avec le salaire normalement pratiqué dans la région et la profession pour le type de qualification concerné.
Bref, et je comprends que, pour vous, ce point soit le plus important, on ne forcera aucun demandeur d’emploi à accepter, s’il ne le souhaite pas, un travail à temps partiel. C’est très clair : je ne veux pas d’un outil qui deviendrait une « trappe à temps partiel ».
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Monsieur le secrétaire d’État, je connais la longévité des ministres ! (Sourires.)
M. Jean Desessard. Ils restent très longtemps et toujours au même poste.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Comme ils sont jeunes, on peut effectivement espérer que cela dure !
M. Jean Desessard. Bien que n’étant pas sénateur depuis longtemps, j’en ai quand même vu passer un certain nombre ici ! Chaque fois, le discours est le même : ils nous assurent qu’ils vont résoudre le problème, mais le ministre suivant présente une mesure nouvelle, oubliant celle qui précédait…
Monsieur le secrétaire d’État, mieux vaut un texte de loi précis. Pourquoi ne pas inscrire dans le projet qu’il s’agit d’un SMIC mensuel ? Est-ce bien ce que vous voulez dire ?
M. Jean Desessard. Mais vous aviez l’air d’être d’accord !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Je l’ai clairement affirmé, c’est du SMIC horaire qu’il est question ! Il n’y a aucune ambiguïté.
Par ailleurs, monsieur Desessard, ce n’est pas le ministre qui compte, c’est la loi qui est votée et la continuité de la République.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Et ce qui figure au Journal officiel.
M. Jean Desessard. La loi ne précise pas, me semble-t-il, que c’est le SMIC mensuel qui est garanti !
M. Jean Desessard. Si c’est le SMIC horaire, le demandeur d’emploi est donc susceptible de se trouver dans l’obligation d’accepter un travail à temps partiel rémunéré à hauteur du montant de l’allocation de solidarité spécifique, l’ASS ! (M. le secrétaire d’État fait un signe de dénégation.) Mais il n’est précisé nulle part que le demandeur d’emploi peut refuser un travail à temps partiel !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Si, parce que l’offre d’emploi doit être conforme à ce qui figure dans le projet personnalité d’accès à l’emploi.
M. Jean Desessard. Mais vous pouvez en faire ce que vous voulez du PPAE ! On rétorquera au demandeur d’emploi que huit ou neuf heures de travail par semaine, c’est toujours mieux que rien. Puis viendra se greffer le RSA ! Vous verrez, cette histoire n’est pas terminée…
M. Guy Fischer. Elle est loin d’être terminée !
M. Jean Desessard.… et l’on aboutira à un travail précaire !
M. Guy Fischer. On y est déjà !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Mais non !
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l’amendement n° 38.
Mme Annie David. Je voudrais vous rappeler, mes chers collègues, la discussion que nous avons eue en commission, puis lors du repas auquel nous avons participé. Mme Collomp, présidente de la chambre sociale de la Cour de Cassation, qui était présente, nous a bien recommandé d’adopter des textes de loi clairs, afin d’éviter par la suite les contentieux.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. C’est exact !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C’est normal !
Mme Annie David. Or le texte de l’article n’est pas clair. Monsieur le secrétaire d’État, vous me répondez que le demandeur d’emploi ne sera pas obligé d’accepter un temps partiel si cela n’est pas prévu dans son PPAE. Mais celui-ci sera actualisé périodiquement !
M. Jean Desessard. Voilà !
Mme Annie David. De plus, lors de l’actualisation, les éléments seront révisés et il s’ensuivra une dégressivité des droits !
Cela me ramène aux amendements que j’ai déposés tout à l’heure afin de permettre aux demandeurs d’emploi d’être accompagnés, d’avoir un recours et de disposer d’un délai de rétractation.
Le demandeur d’emploi verra son salaire réduit un peu plus à chaque révision et finira par être obligé d’accepter la proposition qui lui sera faite sous peine d’être radié…
Je trouve assez étrange l’appellation de ce projet personnalisé, car, à l’exception des jeunes qui accèdent au marché du travail, il concerne des salariés qui, pour la plupart, sont privés d’emploi. Il est donc malvenu de leur parler d’accès à l’emploi. C’est plutôt un projet personnalisé de retour à l’emploi qu’il conviendrait de proposer à ces personnes qui sont déjà des travailleurs.
J’en reviens au temps partiel. Le fait que le texte ne soit pas plus précis est une porte ouverte aux contentieux, car il faudra bien que les tribunaux tranchent ! Du travail en perspective pour le Conseil d'État ! Il aura encore bien des arrêts à rendre en matière de droit social !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Il est parfaitement normal que nous ne soyons pas d’accord. En revanche, je ne veux pas que subsistent des ambiguïtés sur la façon dont sera appliqué le dispositif législatif, afin que le Conseil d'État n’ait aucun problème avec les décisions des juridictions.
Après trois mois de chômage, est considérée comme raisonnable l’offre d’un emploi rémunéré à hauteur de 95 % du salaire antérieurement perçu par le demandeur d’emploi. Après six mois de chômage, est considérée comme raisonnable l’offre d’un emploi rémunéré à hauteur de 85 % du salaire antérieurement perçu et situé au plus à trente kilomètres ou à une heure en transport en commun du domicile du demandeur d’emploi. Après un an de chômage, est considérée comme raisonnable l’offre d’un emploi rémunéré à hauteur du revenu de remplacement, tout en répondant aux mêmes conditions en termes d’éloignement géographique.
En revanche, la nature du contrat ne peut pas être imposée aux demandeurs d’emploi. Ainsi, un demandeur d’emploi qui ne le souhaite pas n’est pas tenu d’accepter un contrat à temps partiel. Pourquoi cela ne figure-t-il pas dans la loi ? Parce que nous avons fait le choix d’y inscrire seulement les obligations qui sont imposées aux demandeurs d’emploi.
Le Journal officiel étant utilisé pour interpréter les textes de loi, j’insiste donc sur ce point que j’ai déjà expliqué devant la commission des affaires sociales, afin que ne subsiste aucune ambiguïté. Je ne veux pas que ce type de dispositif puisse servir de biais pour imposer un temps partiel. Je ne peux pas être plus clair !
M. le président. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État. La précision était utile.
Je mets aux voix l’amendement n° 38.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote sur l’amendement n° 41.
M. Guy Fischer. En vérité, je souhaite poser une dernière question au Gouvernement.
Au bout d’un an, le demandeur d’emploi qui aura refusé les propositions de travail se retrouvera avec un emploi rémunéré à hauteur de l’ASS, soit 463 euros par mois ?
Mme Annie David. Oui, s’il refuse le temps partiel !
Mme Raymonde Le Texier. Si on lui propose un emploi du même niveau, il est obligé de l’accepter.
M. Guy Fischer. Je souhaite que vous me répondiez, monsieur le secrétaire d’État, car c’est un sujet trop sérieux et qui concerne les personnes les plus démunies, ceux qui se trouvent confrontés au problème de l’emploi !
M. le président. La clarification est utile, vous avez donc la parole, monsieur le secrétaire d’État.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Si, dans le projet personnalisé, le demandeur d’emploi a prévu de n’accepter que des contrats à temps plein, non seulement on ne pourra pas, au bout d’un an, lui imposer un contrat à temps partiel, mais la rémunération du contrat à temps plein ne devra pas être inférieure au SMIC. Par conséquent, personne ne l’obligera à accepter un contrat dont la rémunération sera celle de l’ASS !
Mme Annie David. Si on ne lui propose aucun contrat ?
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Si on ne lui propose aucun contrat, il est évident que l’offre raisonnable d’emploi ne jouera pas !
Que les choses soient bien claires : ce dispositif ne constituera pas un levier pour déroger à la règle du SMIC. Cela figure explicitement dans le projet de loi et aucune ambiguïté ne subsiste.
Mme Annie David. C’est vrai ; cela figure au dernier alinéa.
M. le président. L’amendement n° 42, présenté par Mme David, MM. Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par le II de cet article pour l’article L. 5411-6-4 du code du travail :
« Art. L. 5411-6-4. - Les dispositions de la présente section et du 2° de l’article L. 5412-1 ne peuvent obliger un demandeur d’emploi à accepter un niveau de salaire inférieur au salaire minimum interprofessionnel de croissance. »
Cet amendement a précédemment été défendu.
La commission et le Gouvernement se sont déjà exprimés.
Je mets aux voix l’amendement n° 42.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er, modifié.
(L’article 1er est adopté.)
Article additionnel après l’article 1er
M. le président. L’amendement n° 45, présenté par M. Cointat et Mmes Garriaud-Maylam et Kammermann, est ainsi libellé :
Supprimer le 1° de cet article.
La parole est à Mme Annie David
Mme Annie David. Malgré cet échange fort intéressant, j’avoue que je ne suis pas vraiment convaincue !
J’en viens à l’amendement n° 45.
La liberté des uns s’arrête où commence celle des autres, selon la formule consacrée. Nous en inspirant, nous pourrions également dire que les droits des uns trouvent leur origine dans les devoirs des autres ; cela s’appelle la responsabilité sociale et fonde tout notre système républicain depuis qu’au sortir de la guerre de 1939 nos constituants ont décidé de faire de notre société une république sociale reposant sur des droits collectifs importants et sur une notion qui fait notre spécificité : la solidarité nationale.
Il s’agit d’une solidarité des jeunes à l’égard des plus âgés, des biens portant à l’égard des malades, des travailleurs en direction des salariés privés involontairement d’emplois. Mais il s’agit également des devoirs des entreprises à destination des travailleurs sur le fondement d’un principe simple : les travailleurs participant au développement et à la richesse de l’entreprise, celle-ci doit, en retour, donner au salarié les moyens de vivre et de s’épanouir.
Or, si vous renforcez les obligations des demandeurs d’emplois par ce texte, vous ne renforcez aucun de leurs droits et n’en créez pas de nouveaux, malgré tous les amendements que nous avons déposés.
Celui que nous vous proposons d’adopter vise à créer, à l’égard des employeurs, une obligation de dépôt des offres d’emploi à la nouvelle institution.
Il serait en effet injuste de condamner les demandeurs d’emploi, alors que seuls 30 % des offres d’emplois font l’objet d’une transmission à l’ANPE, la grande majorité des offres d’emplois échappant au service public pour, soit être déposées sur des structures privées, notamment dématérialisées – je pense à Internet en l’occurrence –, soit reposant sur les connaissances. À exigences importantes à l’égard des demandeurs d’emploi, droits importants, aurais-je envie de dire !
Mais il est vrai qu’avec la réforme du service public de l’emploi vous avez pris une autre option : privilégier les structures privées contre les structures publiques.
Il y a de cela quelques mois, M. Jean-Marc Boulanger, inspecteur général des affaires sociales, remettait à Mme Lagarde un rapport, ou plus précisément une « Contribution à la préparation de la convention tripartite entre l’État, l’UNEDIC et la nouvelle institution créée par la loi du 13 février 2008 ».
Cela ne vous étonnera guère, les sénatrices et sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen ne partagent pas les conclusions de ce document, conclusions qui, semble-t-il, ont très largement inspiré votre projet de loi. J’en veux pour exemple la proposition faite de tripler le nombre de demandeurs d’emploi dont le placement serait confié à des organismes de droit privé.
Sans vous renvoyer à nos débats sur le projet de loi relatif à la modernisation du marché du travail, je voudrais dire que les craintes que nous avions alors formulées de privatisation rampante de la mission de service public se confirment malheureusement.
Vous n’hésitez d’ailleurs pas à vous contredire, à l’image de M. Boulanger, qui préconise le recours aux sociétés privées de placement, tout en précisant, je le cite : « Il n’existe pas de preuve générale que le secteur privé soit plus efficace que le secteur public. » Vous comprendrez donc pourquoi nous vous invitons à voter en faveur de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Par cet amendement, vous souhaitez réintroduire une disposition qui a disparu lors de l’adoption de la loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005, à savoir le monopole de l’ANPE.
À ce propos, je souhaite revenir sur la notion d’engagement réciproque, qui lie le demandeur d’emploi, mais aussi le nouvel opérateur. Il n’a jamais été question d’imposer à ce dernier une productivité plus grande ! En revanche, il existe une obligation de résultat, et c’est une exigence que l’on trouve partout. Si nous voulons réussir à réinsérer le plus rapidement possible nos demandeurs d’emploi dans le monde du travail, il faut que le nouvel opérateur soit à la hauteur de sa mission et se plie à cette contrainte. C’est d’ailleurs l’objet de la grande réforme visant à faire fusionner l’UNEDIC et l’ANPE. C’est peut-être nouveau, mais cela représente à nos yeux l’un des aspects essentiels du service public.
La commission est donc défavorable à l’amendement n° 45.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Indépendamment de ce que l’on peut penser sur le fond, une convention de l’OIT, l’Organisation internationale du travail, nous interdit de rétablir le monopole de placement.
Le Gouvernement a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Monsieur le rapporteur, vous nous dites que cette nouvelle institution doit être « à la hauteur ». Or, justement, je propose qu’elle puisse recueillir, pour être à la hauteur, un maximum d’informations sur les offres d’emploi proposées par les employeurs. Dans le meilleur des cas, cette nouvelle institution devra regrouper l’ensemble des offres. Celles-ci pourront ensuite être réparties là où elles doivent l’être. C’est le moins que l’on puisse exiger pour que les demandeurs d’emploi soient informés de toutes les offres disponibles.