M. Patrice Gélard, vice-président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. En effet, il ne l’a pas dit !
M. David Assouline. En même temps, on n’a pas demandé au comité Balladur de réfléchir sur autre chose que la réforme constitutionnelle.
M. Patrice Gélard, vice-président de la commission des lois. C’est vrai !
M. David Assouline. Lorsqu’il a soulevé le problème, le comité Balladur s’en est remis au Parlement pour trouver les voies et moyens de le résoudre à l’occasion de la discussion à venir sur la modernisation des institutions de la Ve République. Je ne dis pas autre chose.
Le groupe socialiste, comme son président vient de le rappeler, a fait de cette question un marqueur. La réponse qui lui sera apportée pèsera lourd dans la décision que nous prendrons sur l’équilibre général de la réforme.
Devant ce problème réel, madame le garde des sceaux, au lieu de nous dire, avec autant de désinvolture : « Circulez, il n’y a rien à voir ! », vous auriez pu admettre que le sujet était important et qu’il pouvait donner lieu à une rédaction différente. Au lieu de cela, il nous a été rétorqué que ce point n’avait rien à voir dans le débat constitutionnel.
M. David Assouline. Ainsi donc, perdurera la situation actuelle, où le Président de la République peut s’exprimer autant qu’il l’entend, …
M. Alain Gournac. Le Président de la République est élu par tous les Français !
M. David Assouline. … sans droit de réponse de l’opposition, sur tous les sujets, y compris les hommages – un ministre peut aussi rendre un hommage, et pourtant ce temps d’intervention est décompté.
On voit bien que tout cela pourrait être mieux réglementé.
M. René Garrec. Réglementé ?
M. David Assouline. Madame le garde des sceaux, vous persistez à traiter cette question du pluralisme avec désinvolture et, au moment où le Sénat est réuni pour démocratiser les institutions de la Ve République, vos réponses sont nettement insuffisantes.
M. Alain Gournac. Vous ne voterez pas le texte à Versailles !
M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat, pour explication de vote.
M. Bernard Frimat. Ayant écouté la brève intervention de Jean-Jacques Hyest, je me dois de dire que l’on ne peut écarter d’un revers de main une partie de son argumentation.
Il est vrai qu’un certain nombre de prises de parole du Président de la République sont strictement inhérentes à sa fonction, par exemple, lorsqu’elles ont lieu au titre de la représentation internationale, dans le cadre de cérémonies patriotiques ou de commémorations. Il ne viendrait à l’idée de personne dans cette enceinte de mettre en cause ces interventions où le Président de la République dépasse de très loin son appartenance politique et représente la Nation.
En revanche, ce n’est une découverte pour personne, nous assistons à une modification considérable de la pratique de la fonction.
Si nous posons le problème, uniquement d’ailleurs en termes de temps de parole – nous n’avons pas eu la cruauté de le faire en temps d’image –, c’est parce qu’il existe, nous ne l’inventons pas !
Le problème est même tellement patent que le comité Balladur, que nous n’avons pas contribué à installer- nous étions plutôt partisans de confier au Parlement la préparation de la réforme de la Constitution -, a lui-même signalé ce problème, à l’unanimité.
Si l’on peut suivre l’argumentation du président de la commission des lois sur un certain nombre d’éléments, madame le garde des sceaux, la réponse du Gouvernement est, comme souvent, une non-réponse.
Vous nous dites que cet amendement n’est pas constitutionnel. Mais il revient au pouvoir constituant de réviser la Constitution. Il n’est pas là pour appliquer une quelconque jurisprudence, comme vous avez trop souvent tendance à le faire. Il est là pour dire ce que veut le peuple souverain par l’intermédiaire de ses représentants, et il n’y a pas de limite à ce pouvoir.
Vous nous renvoyez à la loi, au motif que ce point peut effectivement y figurer.
Mais on voit bien que, en ce qui concerne le Conseil supérieur de l’audiovisuel, l’on touche au ridicule, au grotesque, quand on sait que le CSA s’attache, à certaines périodes, à comptabiliser les interventions à la seconde près, pour laisser le reste du temps une totale liberté, et nous connaissons l’ampleur des dérives auxquelles cela donne lieu !
Si vous renvoyez à la loi, donnez-nous au moins des principes, des indications sur ce que vous voulez y mettre ! Mais, au cours de ce débat de révision constitutionnelle, à chaque fois que vous renvoyez à la loi, vous faites un renvoi muet. « Ce sera dans la loi », dites-vous. C’est un peu comme si vous aviez honte de ce que vous y inscrirez, comme s’il ne fallait surtout pas le dévoiler, soulever, même subrepticement, la page du dossier, pour nous permettre d’entrevoir son contenu.
Nous avons le sentiment que vous êtes en train d’appliquer le « secret défense » à vos projets de loi constitutionnelle.
Nous sommes donc contraints de continuer à vous questionner, non pas pour obtenir des réponses, puisque vous ne voulez pas répondre, mais pour rendre patent votre refus du dialogue, tout en nous montrant courtois les uns envers les autres.
Depuis hier, nous nous heurtons à une fin de non-recevoir, alors que nous voulions débattre.
Vous pouvez persister, tout au long de ce débat, dans cette attitude de fermeture, d’affirmation d’une position majoritaire – nous avons comme l’intuition que nos amendements ne seront peut-être pas tous adoptés –, mais ce n’est pas ce à quoi nous vous avons appelée.
M. le président. La parole est à M. Robert Bret, pour explication de vote.
M. Robert Bret. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le présent projet de loi nous conduit à débattre des lois fondamentales et de la Constitution de notre pays.
La Constitution doit rappeler, dans sa rédaction, les grands principes. Bernard Frimat et, avant lui, Robert Badinter l’ont rappelé, il n’y a pas de démocratie sans liberté d’opinion, sans liberté d’expression, sans pluralisme politique, sans pluralisme dans les médias.
J’ajouterai même, songeant au texte que le Sénat examinera prochainement concernant la représentativité des syndicats, qu’il n’y a pas non plus de démocratie sans pluralisme syndical.
Or qui peut ignorer la mainmise des grands groupes financiers sur les médias et ses conséquences en termes de pluralisme ?
Nous ne sommes plus dans la même situation qu’en 1946, au lendemain de la Libération, époque où la presse démocratique a connu, au contraire, une renaissance et un essor.
Il en va tout autrement aujourd'hui. L’omniprésence du Président de la République dans les médias rompt les équilibres, d’abord dans les médias eux-mêmes, mais aussi et surtout sur le plan du pluralisme politique, qu’elle met à mal.
Certes, il faut distinguer dans les interventions du Président de la République quand il parle au nom de la France et quand il s’exprime en tant que chef de parti.
Pour toutes ces raisons, cet amendement nous paraît fondé, tout comme l’était le précédent. Il a toute sa place dans la Constitution, qui doit garantir l’indépendance des médias et mettre en place des règles dans le cadre d’un « pacte démocratique ».
Je voterai donc cet amendement sous-amendé, et je vous invite, mes chers collègues, à faire de même.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, comme vous le savez, la pratique actuelle du CSA repose sur la théorie des trois tiers.
Mon propos est de vous démontrer que cette théorie des trois tiers est en fait celle du faux quatre-quarts ! (MM. Michel Charasse et Michel Mercier s’exclament.)
Un très beau sujet, monsieur Mercier, gastronomique au surplus, ce qui ne devrait pas vous déplaire ! (Sourires.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Pagnol !
M. Jean-Pierre Sueur. En effet, ce peut être aussi une belle référence littéraire, madame Borvo Cohen-Seat !
Un faux quatre-quarts, disais-je, avec un quart du temps dévolu à l’opposition, un quart à la majorité, un quart au Gouvernement et le dernier quart au Président de la République, mais cette dernière portion, étant, en réalité, très supérieure à un quart, de ce fait, le quart de l’opposition se trouve réduit à un cinquième, voire à un sixième.
Par conséquent, il est très facile de démontrer, madame le garde des sceaux, – je pense que vous m’avez suivi –, que nous sommes dans l’injustice et dans l’iniquité. Aussi, puisque vous êtes garde des sceaux, ministre de la justice, je ne doute pas que vous soyez très préoccupée de réparer cette inégalité, ce à quoi nous nous sommes attelés.
C’est pourquoi cet amendement devrait tout à fait vous convenir, et ce d’autant mieux qu’il est mesuré, je dirai même modéré. Après tout, nous serions fondés à demander davantage !
M. David Assouline. La moitié !
M. Jean-Pierre Sueur. Enfin, mes chers collègues, tout le monde sait que coexistent deux conceptions du rôle du Président de la République : d’une part, celle qui fut illustrée par René Coty, ancien sénateur, celle d’un président neutre, en quelque sorte, ce qui n’enlevait rien à ses mérites ; d’autre part, celle qui est illustrée par M. Sarkozy et qui l’a été, dans une moindre mesure, par ses prédécesseurs, celle d’un président fortement engagé.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. C’est sûr, certains présidents ont été totalement effacés !
M. Jean-Pierre Sueur. Lorsque le Président de la République effectue un déplacement dans un département, les parlementaires de l’opposition le rencontrent, en vertu d’un principe républicain. Puis, soudainement, la rencontre prend fin pour permettre au Président de se rendre à une réunion de l’UMP. Certes, il en a parfaitement le droit, mais alors qu’on ne vienne pas nous expliquer qu’il se situe au-dessus de partis et que sa parole ne l’engage pas sur un plan politique !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il est chef de parti !
M. Jean-Pierre Sueur. De la même manière, j’ai cru comprendre – peut-être nous le confirmerez-vous, madame le garde des sceaux – que le Président de la République organisait des réunions de l’UMP à l’Élysée. Là encore, il a parfaitement le droit d’organiser autant de réunions qu’il veut à l’Élysée, mais, en l’occurrence, celles-ci concernent un parti politique…
M. Michel Charasse. Il en a toujours été ainsi !
M. Jean-Pierre Sueur. Je n’ignore pas, monsieur Charasse, que François Mitterrand organisait lui aussi de telles réunions ; je sais aussi qu’il lui arrivait parfois d’adresser un message au parti socialiste à l’occasion de la tenue de son congrès. Néanmoins, je vous saurais gré, cher collègue, de ne pas entrer dans les considérations internes aux différents partis politiques, en particulier à l’un d’entre eux que vous connaissez bien et qui vous connaît bien. (Sourires.)
De nos jours, il serait vraiment absurde de considérer que la parole du Président de la République est neutre et incolore, si l’on s’en tient à la définition du mot « neutralité ». Tout le monde sait bien que c’est faux !
M. Alain Gournac. Tout cela a déjà été dit !
M. Christian Cointat. Nous avons compris !
M. Jean-Pierre Sueur. C’est pourquoi nous proposons que les temps de parole se répartissent entre le Président de la République et le Gouvernement pour un tiers du temps, les personnalités appartenant à la majorité parlementaire pour un autre tiers, et les personnalités appartenant à l’opposition parlementaire pour un dernier tiers. Cette proposition est très mesurée, mes chers collègues.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Même si je suis de ceux qui considèrent que cet amendement n’a pas forcément sa place dans la Constitution, je suis plutôt enclin à le voter. Cependant, je souhaiterais demander à mes collègues socialistes d’accepter une légère modification, d’une part, en précisant qu’il s’agit des « services publics » de radio et de télévision, et non pas simplement des « services » – on ne sait pas ce que c’est –, d’autre part, en prévoyant que cette règle s’applique « sauf en temps de crise ». En temps de crise, le décompte est quand même très difficile à effectuer !
J’ai vécu, avec d’autres, la guerre du Golfe au sein du pouvoir exécutif. Il s’agissait d’une période de crise. Nous devions faire des communications. Nous ne pouvions quand même pas prendre en considération, toutes les cinq minutes, les compteurs du CSA !
En réalité, l’amendement auquel je serais prêt à me rallier pourrait être ainsi rédigé : « Afin d’assurer l’expression pluraliste des courants de pensée et d’opinion, … » - c’est le début de l’amendement de nos collègues – « … une loi organique, adoptée par les deux assemblées à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés, fixe, sauf en période de crise, la répartition du temps de parole entre les autorités du pouvoir exécutif, la majorité et l’opposition parlementaire et les conditions de leur mise en œuvre par le service public de la radio et de la télévision. »
M. le président. Tel qu’il est libellé, on peut considérer qu’il s’agit là d’un amendement nouveau, monsieur Charasse !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. C’est un « sur-amendement » ! (Sourires.)
M. Michel Charasse. C’est un sous-amendement qui est fortement teinté d’amendement ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. C’est en effet un « sur-amendement » !
M. Michel Charasse. À tout le moins, je propose que l’on ajoute le mot « publics » après les mots « les services », car je ne sais pas sinon ce que sont ces « services » ; en outre, je propose qu’on ajoute les mots «, sauf en temps de crise » après « leurs programmes ».
Mme Alima Boumediene-Thiery. Qu’entendez-vous par « crise » ?
M. Michel Charasse. La crise, ce peut être la guerre ou l’état d’urgence. Dans ces moments-là, le Président de la République peut être amené à faire des communications. Ce n’est quand même pas le président d’une association de boulistes !
M. Alain Gournac. La crise des présidentiables socialistes ! (Sourires.)
M. Bernard Frimat. En effet, il s’agit d’un « sur-amendement » !
M. le président. Je suis donc saisi d’un sous-amendement n° 513, présenté par M. Michel Charasse, et ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 424 rectifié pour l'article 4 de la Constitution, après les mots :
les services
insérer le mot :
publics
et après les mots :
leurs programmes
insérer les mots :
, sauf en temps de crise
La parole est à M. Patrice Gélard, vice-président de la commission des lois.
M. Patrice Gélard, vice-président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je voudrais faire brièvement une remarque d’ordre général.
La Constitution n’est pas un fourre-tout, mes chers collègues.
M. Alain Gournac. Exactement !
M. Patrice Gélard, vice-président de la commission des lois. On ne doit pas y mettre tout et n’importe quoi !
À une certaine époque, la Constitution suisse contenait tellement de dispositions d’ordre réglementaire ou législatif que les Suisses ont dû la refondre entièrement pour la moderniser. Or je crains que, en nous engageant dans la voie que proposent certains d’entre nous, nous ne négligions complètement la hiérarchie des normes.
Je rappelle que, en vertu de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ont pleinement valeur constitutionnelle. Aussi, pourquoi inscrire dans la Constitution ce dont le Conseil constitutionnel a déjà pris acte ?
En outre, n’oublions pas que s’imposent à la France un certain nombre de conventions internationales qu’elle a ratifiées, conventions qui ont une valeur supraconstitutionnelle. Aussi, il est inutile de les constitutionnaliser.
Nous pouvons recourir à d’autres moyens, qu’il s’agisse des lois organiques que nous devrons adopter pour mettre en œuvre certaines des modifications prévues par le présent texte, ou de lois ordinaires, qui ont toute leur valeur, au regard d’une série de points que nous avons abordés aujourd’hui.
M. Bernard Frimat. Oui, mais que mettrez-vous dans ces textes de loi ?
M. Patrice Gélard, vice-président de la commission des lois. Mes chers collègues, gardons-nous de banaliser la Constitution et d’en faire un bric-à-brac, même si les problèmes posés sont importants et nous tiennent à cœur. Conservons-lui son rang de loi fondamentale ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les sous-amendements nos 512 et 513 ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Bien évidemment, la commission n’a pas examiné ces deux sous-amendements. Toujours est-il que l’idée Mme Borvo Cohen-Seat de substituer les mots « aux groupes parlementaires d’opposition » aux mots « à l’opposition parlementaire » est intéressante. Nous aborderons d’ailleurs la question de l’opposition parlementaire lorsque nous débattrons de l’article 24.
S’agissant du sous-amendement n° 513 de M. Charasse, la commission aurait pu émettre un avis favorable, mais elle n’en fera rien, car ce sous-amendement ne modifie absolument pas la nature d’un amendement auquel elle est défavorable.
M. Michel Charasse. Mon sous-amendement vise à préciser les termes de l’amendement n° 424 rectifié, dans le cas où celui-ci serait adopté !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Le Gouvernement, qui est défavorable à l’amendement, émet un avis défavorable sur ces deux sous-amendements. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Robert Bret. Pour quelles raisons ?
M. Jean-Pierre Bel. Cette réponse est un peu courte !
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Il ne me paraît pas utile de compléter les propos de M. Gélard sur ce point, et ce n’est pas de la désinvolture de ma part, monsieur Assouline.
Cette question du temps de parole n’a pas sa place dans la Constitution ; elle relève d’une loi organique ou d’une loi ordinaire.
M. Alain Gournac. Absolument !
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Voilà pourquoi le Gouvernement a émis un avis défavorable sur les amendements nos 423 rectifié et 424 rectifié.
Bien évidemment, le pluralisme a valeur constitutionnelle, mais attendons les conclusions du comité Veil pour, éventuellement, inscrire ce principe dans le préambule de la Constitution.
Pour le reste, les dispositions proposées ne sont pas de nature constitutionnelle et n’ont rien à voir avec la modernisation des institutions, objet du présent texte. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous ai répondu sur la modernisation des institutions, et c’est en considération de cette préoccupation que je confirme l’avis défavorable du Gouvernement sur l’amendement n° 424 rectifié comme sur les deux sous-amendements dont il est maintenant assorti. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Jean-Pierre Bel. Si je comprends bien, M. Balladur raconte n’importe quoi !
M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 513.
M. Michel Mercier. Mon explication de vote vaudra aussi pour le sous-amendement n° 512 et pour l’amendement n° 424 rectifié.
Tout à l’heure, nous avons souhaité envoyer un signal clair parce qu’il s’agissait de questions de principe. En revanche, dans le cas présent, il ne me paraît pas opportun que les dispositions proposées soient inscrites dans la Constitution.
L’amendement et les deux sous-amendements soulèvent un certain nombre de questions.
Nous pourrions souscrire à la proposition de Mme Borvo Cohen-Seat, si du moins celle-ci supprimait le dernier mot de son sous-amendement… (Sourires.)
Toujours est-il que nous ne voterons ni les sous-amendements ni l’amendement. (M. René Garrec applaudit.)
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Si j’ai bien compris, quand les dispositions que nous proposons sont objectivement de nature constitutionnelle parce qu’elles concernent des principes à valeur constitutionnelle, on nous demande d’attendre que le comité Veil rende ses conclusions - ou l’on nous répond que tout est déjà dans la déclaration de 1789. Mais quand, afin d’éviter des interprétations divergentes, compte tenu du contexte et de la présente actualité, nous proposons d’inscrire dans la Constitution ce qui apparaît comme un droit formel, on nous renvoie à la loi, organique ou ordinaire.
Après tout, nous pouvons entendre cet argument, car nous ne nous plaçons pas dans un débat juridique. Nous admettons volontiers que nos propositions trouvent leur place dans une loi, mais, dans ce cas, donnez-nous l’assurance que c’est bien la direction que vous voulez prendre ! Or vous ne nous donnez aucune assurance en ce sens ; c’est pourquoi nous profitons de ce débat pour tenter d’obtenir de votre part quelques indications concrètes.
S’agissant du sous-amendement présenté par M. Charasse, je ne comprends pas la raison pour laquelle il veut ajouter le mot « publics » pour qualifier les services dont il est question. Le CSA veille aux temps de parole sur l’ensemble des services de radio et de télévision !
M. Michel Charasse. Il n’est pas compétent pour les radios privées !
M. David Assouline. Ce n’est pas vrai !
M. Michel Charasse. Sauf en période électorale !
M. Alain Gournac. Radios privées ou pas, en voilà assez !
M. David Assouline. Que les choses soient claires : nous réclamons que la règle des trois tiers qui prévaut pendant les campagnes électorales s’applique aussi en dehors de ces périodes. Dans ce dernier cas, il s’agit bien entendu d’un impératif pour les services publics ; en revanche, pendant les périodes électorales, cette règle s’impose à l’ensemble des moyens de communication. C’est pourquoi nous préférons viser les services de radio et de télévision dans leur ensemble.
S’il était adopté, le sous-amendement de M. Charasse exclurait du champ d’application de notre amendement des médias tels que TF1, Europe 1 ou RTL. Or on ne peut pas dire que ce sont eux qui ont l’impact le plus faible sur l’opinion !
M. Michel Charasse. Mais ils sont privés, tout de même !
M. David Assouline. Pour ces raisons, je suis en désaccord avec ce sous-amendement.
En outre, pourquoi préciser que cette règle des trois tiers ne s’appliquerait plus en période de crise ? Cela va de soi dans ces cas d’exception !
Dans la mesure où il modifie substantiellement l’équilibre de notre amendement, nous n’y sommes pas favorables.
En revanche, le sous-amendement de Mme Borvo Cohen-Seat apporte une précision utile, notamment pour le groupe CRC lui-même… C’est pourquoi nous le voterons.
M. le président. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Le sous-amendement présenté par Mme Borvo Cohen-Seat est intéressant, car il vise à refléter la diversité de l’opposition.
La modernisation de la Constitution telle qu’elle nous est proposée vise, soi-disant, à donner à l’opposition une place bien plus importante et davantage de pouvoirs. Dès lors, reconnaissons alors sa diversité et votons ce sous-amendement.
Concernant le « sur-amendement » de M. Charasse, j’essaie de comprendre ce que vous entendez par le mot « crise », mon cher collègue, et j’aimerais que vous nous en donniez une définition.
M. Michel Charasse. Vous savez tout de même ce qu’est une crise !
Mme Alima Boumediene-Thiery. La France, en tant qu’État de droit, peut être confrontée à différentes crises, qui demandent chacune un traitement différencié : ce peut être une crise sociale comme une crise économique. Or j’ai le sentiment que notre pays est presque en crise permanente. C’est pourquoi nous devons faire très attention.
M. Ladislas Poniatowski. La crise, c’est quand le parti socialiste vire Charasse ! (Sourires.)
Mme Alima Boumediene-Thiery. Par ailleurs, je suis quelque peu étonnée que vous repoussiez si facilement nos idées, comme d’un revers de la main.
Quels sont les arguments que vous opposez à chacune de nos propositions ? Leur inutilité, et d’invoquer telle convention internationale, telle charte, telle loi qui traiteraient déjà du sujet. Mais alors, à quoi servons-nous, si nous ne pouvons rien proposer, surtout à l’occasion de la révision de la Constitution, c’est-à-dire de notre loi fondamentale ?
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Mme Borvo Cohen-Seat propose, dans son sous-amendement, de remplacer les mots « à l’opposition parlementaire » par les mots « aux groupes parlementaires d’opposition », ce qui signifie que les parlementaires d’opposition non inscrits n’ont aucun droit !
M. Robert del Picchia. Eh oui !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Tout à fait !
M. Michel Charasse. C’est pourquoi cette disposition me gêne.
Madame Boumediene-Thiery, tout le monde sait ce qu’est un temps de crise ou un état de crise. Il suffit d’avoir exercé ne serait-ce que quelques responsabilités dans l’État pour savoir ce que cela veut dire.
Je préfère la réponse de M. Assouline lorsqu’il dit que nous sommes capables de faire preuve de souplesse et de compréhension dans une situation difficile. Il est bien évident que la « guerre des boutons » entre deux villages ne saurait conduire à bouleverser l’équilibre des temps de parole !
M. David Assouline. Mai 68, était-ce un temps de crise ?
M. Michel Charasse. Sûrement ! Si le gouvernement de l’époque n’avait pas assuré la continuité des services publics, des gens auraient pu mourir.
Si ce n’était pas un état de crise, alors je ne sais pas comment cela s’appelle !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 424 rectifié.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 103 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 329 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 165 |
Pour l’adoption | 126 |
Contre | 203 |
Le Sénat n'a pas adopté.