M. Denis Badré. Exactement !
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l’Union européenne. Que se serait-il passé si nous avions suivi ceux qui préconisaient de démanteler la PAC et d’abolir ce qui subsiste de la préférence communautaire ? La production agricole européenne aurait fortement chuté et, aujourd’hui, les consommateurs européens devraient se fournir sur le marché international. Cela entraînerait une hausse des prix mondiaux encore plus forte, dont les pays les moins avancés seraient les premières victimes. La crise alimentaire serait donc encore plus grave.
Ce fait me conduit à souligner que, quelles que soient nos affinités avec nos amis britanniques, il subsiste malheureusement, sur certaines questions essentielles, un fossé, qui reste à combler. Il était utile de resserrer les liens avec le Royaume-Uni, car, en matière d’action extérieure et de défense, rien n’est possible sans ce partenaire. De même, d’ailleurs, il était utile de se rapprocher des nouveaux États membres, avec lesquels, au-delà des malentendus, nous avons énormément de choses en commun.
Mais ne voyons pas dans ces démarches justifiées une alternative possible au couple franco-allemand, conduisant, en quelque sorte, à le mettre de côté, comme certains l’ont cru après le voyage du Président de la République à Londres.
L’ensemble franco-allemand ou, pour dire les choses autrement, pour employer mon propre jargon, le « fondu enchaîné » franco-allemand reste au cœur de l’Europe élargie. L’histoire comme la géographie lui donnent une capacité de synthèse et d’impulsion qui demeure irremplaçable, comme vous pourriez en témoigner, monsieur le secrétaire d'État, de par vos fonctions.
Même s’il y a inévitablement des hauts et des bas, nous devons garder le cap franco-allemand avec constance. C’est le meilleur moyen de faire en sorte que notre future présidence soit une présidence efficace et utile, ce dont l’Europe a aujourd’hui absolument besoin. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires étrangères. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le contexte dans lequel s’inscrira la présidence française ne peut pas ne pas être affecté par les suites du référendum irlandais, comme cela a déjà été indiqué. Mais rien ne serait plus préjudiciable pour l’avenir de l’Union européenne que de tirer des conclusions hâtives de cet événement, qui est une péripétie et non une tragédie.
Il importe, comme l’a fort bien dit M. Haenel, que nous laissions du temps au temps pour rechercher avec nos partenaires une ligne de conduite commune, qui permette à l’Union de fonctionner de manière efficace.
Il appartient à chacun des pays qui doivent ratifier le traité de Lisbonne de faire connaître leur choix. À la fin du processus, le bilan sera tiré et la recherche de solutions concrètes entreprise. Faut-il rappeler que, même à la suite de référendums négatifs survenus en Irlande comme au Danemark, des arrangements, qui ont mis fin au blocage des initiatives européennes, ont été trouvés ?
Pour le moment, nous n’avons qu’une certitude : il n’est pas possible à la fois de dénoncer l’éloignement des réalités par les gouvernants, les élites ou les instances européennes et de se contenter du maintien durable de structures qui empêchent toute décision commune de voir le jour.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l’Union européenne. Absolument !
M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Comment nier qu’à vingt-sept il soit très difficile de faire progresser en commun la recherche de solutions à un certain nombre de problèmes ?
M. Alain Gournac. Bien sûr !
M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Le temps presse. L’Union est assaillie de problèmes et soumise aux tensions les plus contradictoires. Il lui faut aller de l’avant, sous peine de se déliter ou de perdre toute influence dans le monde et toute crédibilité en son sein.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. La tâche de la présidence française ne sera pas aisée. Il lui faudra donner corps aux priorités qu’elle a établies et s’efforcer d’obtenir des avancées décisives dans les domaines d’action qu’elle a retenus. Ces priorités reflètent très exactement les défis auxquels l’Union est confrontée. Il faut savoir gré au Gouvernement d’avoir su les présenter.
Ne l’oublions pas, mes chers collègues, c’est en France qu’a été conçu le pari de Pascal. Ceux qui ne parient pas ne perdront pas leur mise, mais ceux qui parient pourront gagner ! Nous pouvons proposer un tel pari à tous nos partenaires.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l’Union européenne. Très bien !
M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. C’est dans cet esprit qu’il convient d’aborder la présidence française, fondée sur les convictions et non sur la contrainte.
Quelles sont les priorités de la présidence française de l’Union européenne ?
Il s’agit, tout d’abord, d’une Europe qui protège, d’une Europe qui puisse constituer un levier face aux dysfonctionnements de la mondialisation.
Face à la forte hausse du prix des hydrocarbures, qui pénalise en Europe l’ensemble de ses citoyens, son agriculture et son économie, les institutions européennes ne peuvent pas rester inactives. Les inquiétudes dont témoignent les pêcheurs et les transporteurs aujourd'hui appellent une réponse, faute de quoi l’Europe apparaîtra comme étant inefficace. Il faut savoir gré au Président de la République de n’avoir pas hésité à poser les problèmes tels qu’ils sont.
Les citoyens attendent de l’Europe des réponses à leurs préoccupations concrètes. C’est de cette manière que l’Union européenne pourra démontrer son utilité ; à défaut, elle fera preuve de son inefficacité.
Il s’agit aussi d’une Europe qui sache répondre aux nouveaux défis, comme le réchauffement climatique, l’indépendance énergétique ou encore l’immigration et la sécurité face au terrorisme.
Enfin, la dernière priorité sur laquelle je veux insister concerne la place de l’Europe dans le monde et l’Europe de la défense.
J’ai la conviction que le domaine de la politique étrangère et de la défense constitue notre horizon pour l’Europe. C’est là que s’exprime l’attente des citoyens.
Le traité de Lisbonne comporte des avancées importantes sur ces questions, comme la création d’une présidence stable du Conseil européen, la nomination d’un haut représentant pour les affaires étrangères et la politique de sécurité ou encore l’existence d’un service européen pour l’action extérieure.
Toutefois, l’influence de l’Europe dépend moins des mécanismes institutionnels que de la volonté politique des Européens.
L’Union européenne ne parviendra à faire entendre sa voix sur la scène internationale que si une réelle unité existe entre les Européens, condition première d’une politique étrangère commune.
Lors du prochain Conseil européen, les chefs d’État et de gouvernement devraient évoquer la situation des pays des Balkans occidentaux, notamment la mise en place de l’opération EULEX Kosovo.
C’est dans cette région, déjà marquée par de terribles conflits dans un passé récent, que se joue la crédibilité de la politique étrangère et de sécurité de l’Union européenne.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l’Union européenne. Tout à fait !
M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Si l’Union européenne ne parvient pas à apporter des réponses durables pour maintenir la paix et la stabilité sur son propre continent, comment peut-elle espérer jouer un rôle sur la scène internationale et contribuer à régler des conflits ailleurs dans le monde ?
Mes chers collègues, il suffit de fréquenter les instances européennes, de rencontrer les présidents des commissions des affaires étrangères ou de la défense pour se rendre compte de ce que l’Union européenne représente, pour les pays candidats à l’Union européenne, d’espoir de développement et de paix.
Nous savons tous très bien que, sans adhésion à l’Union européenne, la Serbie ne pourra trouver sa place dans les Balkans, une place qui lui permettra d’aller vers la démocratie et la paix.
Je conseille à tous les eurosceptiques de se rendre dans ces pays, pour se rendre compte à quel point l’attente de l’Europe y est forte,…
M. Alain Gournac. Bravo !
M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. … à quel point ils sont persuadés qu’il n’y a pas d’autre solution ni d’autre avenir pour eux que l’Europe.
Nous qui avons l’expérience de plus de cinquante années d’Europe sommes quelque peu blasés et, pour beaucoup de ces nations, faisons figure d’égoïstes et de nantis. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l’Union européenne. Très bien !
M. Alain Gournac. Bravo !
M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Bien évidemment, les relations avec la rive sud de la Méditerranée représentent un enjeu particulier pour notre pays.
Le projet d’Union pour la Méditerranée, lancé par le Président de la République, devrait constituer un projet important de la présidence française.
Peut-être pourrez-vous nous renseigner tout à l’heure, monsieur le secrétaire d’État, à l’occasion de vos réponses à nos interventions, sur l’état d’avancement de ce projet et les réactions des pays de l’autre rive ?
Enfin, la relance pragmatique de l’Europe de la défense doit rester l’un de nos principaux objectifs.
Certes, face aux réticences de certains de nos partenaires, il ne faut pas s’attendre à des avancées spectaculaires. La défense a ainsi certainement joué un rôle dans le « non » irlandais au traité de Lisbonne.
Toutefois, les choses progressent. Qui aurait imaginé, il y a encore quelques mois, que la Pologne se montrerait désireuse d’aller plus loin dans la voie d’une défense européenne autonome ?
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l’Union européenne. C’est vrai !
M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Pour progresser, il faut s’inspirer de la méthode de Jean Monnet et réaliser des avancées concrètes créant des solidarités de fait.
L’idée des coopérations structurées permanentes prévue dans le traité de Lisbonne me paraît être adaptée pour développer des projets entre Européens.
Les domaines de coopération ne manquent pas. Je pense, notamment, à la mutualisation de certaines de nos actions en matière de formation ou d’entretien des matériels, au rapprochement de nos industries et aux programmes communs d’équipements.
Nous devons également tenir compte des difficultés rencontrées dans la mise en œuvre de l’opération EUFOR au Tchad, en dotant l’Union européenne d’un véritable centre de planification et de conduite des opérations. J’ai bien conscience que ce sera une tâche difficile.
L’Union européenne ne parviendra à faire entendre sa voix sur la scène internationale, à être une puissance dans la mondialisation, que si elle dispose d’une politique étrangère et d’une défense européenne réellement autonome.
Prétendre apporter des réformes définitives aux questions abordées pendant cette présidence serait présomptueux. Renoncer à les traiter serait irresponsable.
Aussi est-ce avec humilité, mais avec détermination, avec courage et avec audace, qu’il faut nous engager.
Nous faisons confiance à l’habileté et à la ténacité du Président de la République pour faire de la présidence française une réussite en dépit d’un environnement difficile. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l’Union européenne, et M. Alain Gournac. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’ai souhaité m’exprimer aujourd’hui sur les enjeux de la politique européenne dans les secteurs de compétences de la commission des affaires culturelles.
J’avais en effet envisagé de répondre à la proposition formulée par le bureau du Sénat en organisant une réunion des commissions chargées de l’éducation, de la recherche, de la culture et de la communication au sein des États de l’Union européenne. Une concertation des responsables européens de ces secteurs stratégiques me paraissait utile, pour ne pas dire indispensable, à l’occasion de la présidence française.
Or, la tenue de cette manifestation supposait l’accord de l’Assemblée nationale, puisque ces réunions sont mixtes. La commission des affaires familiales, culturelles et sociales de l’Assemblée nationale n’a pas souhaité donner suite à cette proposition, ayant retenu le thème du financement de la protection sociale pour une réunion commune avec notre commission des affaires sociales et nos homologues des parlements de l’Union européenne.
La séance d’aujourd’hui est en quelque sorte une session de rattrapage particulièrement bienvenue, dont je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État. Nous savons que le Gouvernement attache une grande importance à la promotion de la culture européenne, comme en témoigne la tenue en novembre prochain du forum d’Avignon, première rencontre mondiale consacrée à la culture, aux médias et à l’économie.
J’évoquerai plus particulièrement quatre points dans les secteurs de compétences qui sont les nôtres.
Tout d’abord, la défense de la propriété intellectuelle et du droit d’auteur, spécificité bien française héritée de Beaumarchais, reste totalement d’actualité, même si elle est loin de faire l’unanimité chez nos voisins européens.
Je souhaite que le Gouvernement soit vigilant dans ce domaine.
En effet, à l’occasion de la révision des directives concernant le service universel et la protection de la vie privée, la France est apparue très isolée sur ces questions.
Au regard des enjeux pour la défense de la propriété intellectuelle, il est nécessaire qu’une mobilisation politique et diplomatique française s’organise rapidement, afin de sensibiliser et de convaincre nos partenaires européens au Conseil et au Parlement.
Sans l’engagement fort des pouvoirs publics français, qui, par le passé, et quelles que soient les majorités politiques en place, ont toujours apporté à la création et à la diversité culturelle un soutien sans faille, il est à craindre que la chance offerte par la réforme du paquet « télécoms » de consolider le respect du droit d’auteur à l’ère numérique ne soit gâchée.
Les nouveaux moyens, les progrès des technologies sont tels qu’il importe de mettre en place rapidement des mesures enfin efficaces.
Il y va, en fait, de la possibilité de bénéficier d’un cadre européen qui concilie le respect de la vie privée et le droit d’auteur, sans empêcher le développement par les États d’outils permettant de lutter efficacement contre les téléchargements et les piratages illicites.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l’Union européenne. Voilà !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Il y va également de l’avenir d’une réponse graduée, telle qu’elle a été imaginée, qui constitue une opportunité d’apporter une réplique juste et proportionnée au développement des téléchargements illicites sur Internet et qui a fait l’objet, pour l’instant, en Europe, d’une campagne de dénigrement fondée sur des approximations et débouchant sur des incertitudes.
À l’évidence, un travail de pédagogie et d’explication doit être mené sans tarder.
À cet égard, les résultats de la réunion qui s’est tenue à Luxembourg le 12 juin dernier sont encourageants et un consensus pourrait se dégager sur la proposition de la Commission visant à ce que les opérateurs de télécommunications informent leurs abonnés, avant la signature du contrat, de leurs obligations en matière de droit d’auteur.
La deuxième préoccupation de la commission des affaires culturelles que je tiens à relayer auprès du Gouvernement concerne la réglementation européenne en matière d’audiovisuel.
Le sujet est on ne peut plus d’actualité, chacun ici l’imagine bien, compte tenu des chantiers d’importance lancés par le Président de la République et par le Gouvernement en ce domaine : commission pour la nouvelle télévision publique, réforme des décrets Tasca, réforme de l’audiovisuel extérieur, notamment.
Cependant, il me semble néanmoins important de rappeler que notre pays devra se conformer, mais après l’avoir transposée d’ici à décembre 2009, à certaines dispositions de la directive « Services de médias audiovisuels sans frontières ».
La transposition de toutes les dispositions contenues dans la directive n’est sans doute pas impérative.
Il appartiendra notamment à la représentation nationale de juger de l’opportunité d’assouplir les règles relatives à la publicité pour les services télévisés privés. Cet assouplissement me paraît indispensable et doit être réalisé, pour la santé économique du secteur, dans les meilleurs délais, à la condition de renforcer, bien sûr, dans le même temps, la place du secteur public : la commission des affaires culturelles considère cette démarche comme indispensable.
Le troisième thème que je veux aborder est celui de la reconnaissance des diplômes au plan européen.
La commission des affaires culturelles souhaite que la France s’approprie rapidement le cadre européen des certifications actuellement en cours de finalisation, en positionnant avec clarté ses différents diplômes par rapport aux repères fixés par le cadre.
Même si l’harmonisation des diplômes secondaires suppose à l’évidence encore un long travail, il est nécessaire que les outils d’ores et déjà disponibles soient pleinement utilisés.
Il en va ainsi du portfolio européen des langues, qui définit des niveaux de maîtrise des langues étrangères reconnus partout en Europe.
Nous souhaitons que le ministère de l’éducation nationale aille plus loin encore, en utilisant ce cadre comme référence pour l’évaluation des élèves au baccalauréat.
Enfin, j’évoquerai la question du sport, dont les problématiques sont de plus en plus internationales : dopage, violence dans les stades, organisation des compétitions professionnelles, régulation de l’activité des agents de joueurs et protection des mineurs sportifs sont autant de défis auxquels les États européens ne peuvent répondre qu’ensemble, sous peine d’être complètement débordés.
L’insertion d’une référence au sport dans le traité de Lisbonne est une excellente nouvelle : elle permettra que le sport ne soit pas considéré comme une simple activité économique par la Cour de justice des Communautés européennes.
Toutefois, il faut aussi profiter de la circonstance pour en tirer des bénéfices concrets, et la France doit se saisir de ces questions pour faire avancer ses points de vue.
Elle devrait notamment avoir pour objectif la mise en place d’un fichier européen des interdits de stade, l’ouverture de la négociation sur la question du « 6+5 », c’est-à-dire le rapport du nombre de joueurs français et étrangers dans les équipes de clubs, l’instauration d’une régulation européenne de l’activité d’agent de joueur et la mise en place d’un contrôle de gestion des clubs au plan communautaire.
Au moment où, dans une circonstance politique européenne difficile – M. le président de la commission des affaires étrangères a parlé tout à l’heure de « péripétie », il ne s’agit pas d’un drame –, notre pays va assumer la présidence de l’Union européenne, il me paraissait utile de rappeler ces quelques points d’actualité qui nous concernent.
Je demeure persuadé que nous aurions eu intérêt à rencontrer, sur l’initiative française, nos homologues européens. Cela n’a pas été possible et je souhaite, monsieur le secrétaire d’État, que vous vouliez bien relayer les préoccupations que je viens d’évoquer.
La presse nous apprend que le secrétariat général de la présidence française vient de décider de développer des actions de communication auprès des entreprises, des universités et des grandes écoles. Nous sommes parfaitement en situation ; dans ce domaine, notre contribution a toujours été et sera permanente. Je vous remercie par avance d’être notre porte-parole, aux côtés de vos collègues du Gouvernement concernés, des initiatives et de la volonté de la France dans nos domaines de responsabilité. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord d’exprimer, au nom de la commission des affaires économiques, ma satisfaction de pouvoir aborder, dans cet hémicycle, les questions européennes et la manière dont la France se prépare à une présidence charnière, ponctuée de grands rendez-vous.
Cette présidence intervient en effet à un moment particulier pour l’Union européenne : le traité de Lisbonne, porteur d’une réforme institutionnelle sans précédent, est en cours de ratification et le calendrier européen sera marqué par le renouvellement, en 2009, des institutions européennes.
Dans ce contexte, le « non » irlandais à la ratification du traité de Lisbonne ne doit pas remettre en cause le tempo imprimé à la construction européenne. Cependant, il relance indéniablement le débat sur l’Europe politique et le sens à donner à l’avenir de l’Union européenne.
Il nous rappelle de façon impérieuse que cette construction ne peut se réduire à des documents paraphés compris des seules élites, mais qu’elle doit s’incarner à travers un projet commun ambitieux dans lequel les citoyens européens se retrouvent et auquel ils peuvent adhérer.
Le résultat irlandais ne doit pas mettre un terme aux réformes institutionnelles qui permettront à l’Union européenne de mieux fonctionner avec vingt-sept membres.
Bien au contraire, il nous appartient, sous présidence française, de redoubler de pédagogie vis-à-vis de l’opinion publique afin de lui rappeler tout ce que la construction européenne nous a apporté en termes de paix, de stabilité et de croissance économique partagée.
Au-delà de la question institutionnelle, il nous faut impérativement définir et mettre en œuvre des politiques européennes visibles dans les secteurs qui intéressent le plus les citoyens européens.
Les 19 et 20 juin prochains se tiendra, à Bruxelles, le dernier Conseil européen de la présidence slovène. Les questions économiques à l’ordre du jour concerneront principalement l’énergie et le climat, ces dossiers constituant également des priorités pour la présidence française.
Le 1er juillet prochain, la France prendra donc la succession de la Slovénie, pour un semestre marquant effectivement son retour en Europe comme une force de proposition et d’entraînement, ainsi que l’avait souhaité le Président de la République. Les priorités que celui-ci et le Premier ministre ont fixées pour le second semestre de 2008 intéressent particulièrement notre commission.
À cet égard, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je souhaite aborder plus spécifiquement trois dossiers économiques majeurs figurant à l’ordre du jour de la présidence française.
Le premier concerne le paquet « énergie-climat » et la politique énergétique européenne.
La commission des affaires économiques s’est déjà très largement mobilisée à propos de ce dossier, et ce dès la publication des propositions de la Commission européenne le 23 janvier dernier, puisqu’elle a constitué un groupe de travail sur le paquet « énergie-climat », présidé par nos collègues Marcel Deneux et Daniel Raoul.
L’ambition de la présidence française est de parvenir cette année à un accord politique sur l’ensemble de ce paquet.
Des objectifs élevés ont été fixés dans plusieurs domaines : réduction de 20 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2020, révision du système communautaire d’échange de quotas de CO2, recours aux biocarburants, répartition entre les États membres de l’effort pour développer les énergies renouvelables.
Ce paquet est un élément clé de l’exemplarité de l’Europe, devant permettre de conforter son rôle moteur dans les négociations internationales sur le climat, en vue de la conférence de Copenhague qui se tiendra en 2009. L’Union européenne devra donc diminuer sa consommation d’énergie et augmenter la part des énergies renouvelables.
Néanmoins, tout en nous inscrivant résolument dans le cadre de la politique européenne de lutte contre le changement climatique, mes collègues de la commission des affaires économiques et moi-même souhaitons attirer l’attention de la présidence française sur la nécessité de prendre en compte la compétitivité des entreprises européennes et de faire reconnaître à l’échelon européen la spécificité de la composition du bouquet énergétique français, particulièrement sobre en carbone en raison de la production d’électricité d’origine nucléaire.
La commission des affaires économiques sera donc particulièrement attentive aux propositions de la présidence française sur ce point, car elle est convaincue du rôle important que l’énergie d’origine nucléaire peut jouer dans la lutte contre le changement climatique. Cependant, je tiens à le dire ici, la France ne pourra pas rester le « château d’eau nucléaire » de l’Europe sans que ce rôle soit effectivement pris en compte, notamment dans l’allocation des quotas.
Au-delà du paquet « énergie-climat », la présidence française fera des propositions en matière de sécurité énergétique concernant à la fois l’Union européenne elle-même et ses relations avec ses partenaires majeurs, notamment la Russie.
Pour la commission des affaires économiques, il est absolument nécessaire d’assurer une meilleure interconnexion entre les pays européens, de rendre les infrastructures accessibles à différents opérateurs et de faire bénéficier le consommateur de meilleurs prix. Toutefois, la libéralisation ne doit pas aboutir à un affaiblissement de nos opérateurs.
Le troisième paquet « énergie », présenté par la Commission en septembre 2007 et qui a fait l’objet d’une résolution du Sénat le 27 mai dernier, a été largement discuté, s’agissant en particulier de la question de la séparation patrimoniale des réseaux de production et de distribution d’énergie. Je me félicite de ce qu’un accord sur les aspects clés de la libéralisation soit intervenu lors du conseil Énergie du 6 juin dernier. Les ministres sont ainsi parvenus à un compromis sur la « troisième voie », option préconisée par la France et moins radicale que la dissociation patrimoniale, ce qui permettra d’éviter le démantèlement de nos grands groupes énergétiques.
Assurer la sécurité des approvisionnements de l’Union européenne sera également l’un des grands axes de la présidence française.
Je me réjouis que la commission des affaires économiques se soit saisie, avec d’autres commissions, de ce sujet capital dès 2006, en l’évoquant dans le rapport de la mission commune d’information sénatoriale sur la sécurité d’approvisionnement électrique de la France et les moyens de la préserver, présidée par notre collègue Bruno Sido.
Le transport durable fera également partie des dossiers prioritaires de la présidence française, l’objectif principal étant de faire avancer les débats sur l’internalisation des coûts externes du secteur. Notre commission suivra avec attention l’important paquet « greening transport », que doit présenter la Commission européenne le 2 juillet prochain et qui vise notamment la modification de la directive « Eurovignette ». La France tentera de parvenir à un texte de conclusions lors du conseil Transports d’octobre, après le conseil informel qui se tiendra les 1er et 2 septembre prochains à La Rochelle.
L’accord sur les émissions de CO2 des automobiles, intervenu le 9 juin dernier entre le Président de la République et la Chancelière allemande, constitue une avancée importante contribuant à la réalisation de l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2020.
Je me félicite à cet égard de ce que, dans le cadre des réunions interparlementaires prévues sous la présidence française, nous organisions le 10 juillet prochain, avec la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, une réunion sur le thème des transports et du développement durable. L’implication de ce secteur est en effet essentielle, compte tenu des émissions de gaz à effet de serre qu’il génère.
Le deuxième dossier majeur de la présidence française concerne la politique agricole commune, la PAC.
La commission des affaires économiques suit avec attention l’actualité particulière liée au « bilan de santé » de la PAC, depuis la publication des propositions de la Commission européenne le 20 mai dernier. Elle a ainsi décidé de constituer un groupe de travail sur ce thème, convaincue qu’il ne faut pas attendre 2013 pour discuter de la réforme de la PAC,…