PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet
M. le président. La séance est reprise.
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Questions d'actualité au Gouvernement
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
Je rappelle que l’auteur de la question, de même que la ou le ministre pour sa réponse disposent chacun de deux minutes trente.
le pétrole
M. le président. La parole est à M. Philippe Nogrix.
M. Philippe Nogrix. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi, qui n’est pas là.
Les cours du pétrole ne cessent, jour après jour, de franchir de nouveaux records…
M. Didier Boulaud. Ce n’est pas vrai !...
M. Philippe Nogrix. …et, d’après les experts, ce mouvement ne devrait pas s’inverser dans les mois à venir. Gazprom ne prévoit-il pas un baril à 250 dollars ?
M. Didier Boulaud. C’est incroyable !
M. Philippe Nogrix. Cette flambée des prix bouleverse des pans entiers de l’économie. Elle concerne les pêcheurs – pas seulement bretons –, les agriculteurs – pas seulement bretons –, les transporteurs routiers – pas seulement bretons –, les chauffeurs de taxis – plus parisiens que bretons –, mais aussi le secteur aérien et, bien sûr, des millions de ménages, qui ont de plus en plus de mal à boucler leur budget.
Face à cette situation, la Commission européenne a accepté, hier, l’idée d’allouer des aides nationales très ciblées, visant, notamment, les plus démunis et les secteurs les plus touchés, tels la pêche, l’agriculture, les transports, l’industrie chimique et l’industrie automobile.
Quels critères la France retiendra-t-elle pour mettre en œuvre ces aides ciblées ? Ces mesures ne prennent pas en compte les millions de Français qui utilisent quotidiennement leur véhicule pour leurs déplacements vers leur lieu de travail, qui subissent de plein fouet la hausse des prix des carburants et qui voient leur pouvoir d’achat nettement diminué. Comment le Gouvernement compte-t-il les soutenir ?
Par ailleurs, les ministres des finances de l’Union européenne ont écarté, la semaine dernière, toute mesure fiscale propre à lutter contre la hausse des prix de l’essence, comme le plafonnement de la TVA suggéré par le Président de la République, Nicolas Sarkozy. Quelle est la position du Gouvernement sur cette problématique concernant la TVA et la TIPP ? Il faut expliquer aux Français, qui ne comprennent pas, qui dépense et qui s’enrichit.
Enfin, dans deux jours, Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi participera à un G8 des ministres des finances visant à déterminer les actions propres à contrer la flambée des prix du pétrole. Quelle sera la position défendue par la France ? (Applaudissements sur les travées de l’UC-UDF et de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi. Monsieur le sénateur, je répondrai en lieu et place de Mme Lagarde, qui n’a pas pu être présente à cette séance de questions au Gouvernement.
Il faut dire la vérité aux Français : les prix du pétrole subissent une hausse durable ; ils ont doublé en un an et quadruplé depuis 2004.
Un paramètre de cette crise nous échappe, l’évolution de la demande et de l’offre mondiales. Pour autant, le Gouvernement ne veut pas rester inactif.
Tout d’abord, depuis plusieurs mois, Jean-Louis Borloo a travaillé avec énormément d’énergie sur le Grenelle de l’environnement, qui consiste à agir sur les comportements et sur les habitudes de consommation. Je prendrai deux exemples très concrets : le système du bonus-malus a permis de changer complètement la conception des véhicules et de favoriser des voitures qui consomment moins ; par ailleurs, les énergies renouvelables, notamment les énergies éoliennes, photovoltaïques et la biomasse ont été promues.
Mais vous l’avez dit, et le Gouvernement en est bien conscient, cela ne suffit pas. En effet, nos concitoyens doivent faire face à la hausse brutale de la facture quand ils effectuent le plein de leur véhicule tous les jours pour aller travailler ou lorsqu’ils remplissent leur cuve pour se chauffer ; c’est une réalité que vous connaissez bien, mesdames, messieurs les sénateurs, notamment dans certains territoires ruraux.
Pour répondre à cette préoccupation, le Gouvernement a décidé de doubler le montant de la prime à la cuve, fixé à 150 euros cette année. L’an prochain, 800 000 ménages parmi les plus modestes profiteront à nouveau de cette aide, dont le montant sera porté à 200 euros. Christine Lagarde a conduit une négociation particulièrement réussie avec le groupe Total, qui s’est engagé à tenir compte de cette augmentation pour déterminer sa contribution.
Notons également la mise en place du tarif de première nécessité pour l’électricité, du tarif social de solidarité pour le gaz, ou encore le travail réalisé notamment par Michel Barnier, avec le plan spécial pour aider les pêcheurs.
Enfin, le Président de la République a annoncé que, dès qu’un surplus de TVA interviendrait, il serait affecté à un fonds destiné à soutenir les professions les plus particulièrement touchées par cette hausse du prix du pétrole.
Face à une crise mondiale, il est hors de question d’attendre passivement : des mesures concrètes seront prises, afin d’alléger la facture supportée par nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Les routiers, les taxis, les marins pêcheurs, les agriculteurs, les serristes, les ambulanciers, les infirmiers, les services à domicile : la révolte monte chez les professionnels qui, étranglés par l’augmentation insensée du prix du baril de pétrole, ne peuvent plus vivre de leur travail. Les Français subissent de plein fouet les répercussions de cette hausse sur les produits alimentaires. Ils doivent payer toujours plus cher pour faire face à des dépenses vitales.
La flambée des prix du pétrole, organisée par toutes les formes de spéculation, est un prétexte pour augmenter les prix des matières premières, du transport et des autres énergies telles que le gaz, dont le prix est indexé abusivement sur celui du pétrole. (Protestations sur les travées de l’UMP.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Parfaitement !
Un sénateur UMP. N’importe quoi !
M. Gérard Le Cam. D’une part, les populations captives rejetées à la périphérie des villes et les populations rurales, en raison, notamment, du recul des services publics et des transports publics que vous avez organisé, et, d’autre part, les salariés qui n’ont pas d’autre choix que de prendre leur voiture pour aller travailler subissent encore davantage les effets des prix exorbitants à la pompe.
L’incurie du Gouvernement en matière de pouvoir d’achat est patente. Certes, l’augmentation de la prime à la cuve était nécessaire, mais elle reste très insuffisante. Permettez-moi de relativiser la générosité de Total, qui consent moins de 1 % de ses bénéfices, soit 102 millions d’euros, alors que la même société a gaspillé, en 2007, 1,8 milliard d’euros pour racheter ses propres actions ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC.) Depuis 2004, le groupe aura dilapidé près de 40 % de ses résultats nets en dividendes et en rachats d’actions.
La participation de Total est dérisoire quand on sait qu’elle est totalement déductible. C’est un beau coup de publicité à moindre coût !
Face à cela, la seule proposition immédiate du Gouvernement est de réaliser des économies d’énergie. En bref, à nos concitoyens qui vous demandent comment faire face à la flambée des prix du pétrole, vous répondez que vous allez leur expliquer comment s’en passer, en se serrant la ceinture ou en faisant du vélo.
M. Jean-Claude Carle. Ça, ce sont les verts !
M. Gérard Le Cam. Il est temps d’agir et de trouver des solutions du côté tant de l’État que des compagnies pétrolières. Ces solutions existent, mais pas la volonté politique pour les mettre en œuvre !
Nous proposons, depuis plusieurs mois, non seulement une baisse de la TVA et un blocage du niveau global des taxes portant sur les prix des carburants à la pompe et du fioul domestique, mais également la mise en place d’une véritable taxe sur les profits de Total.
Le Gouvernement ne peut plus ignorer la responsabilité qu’il a envers nos concitoyens et renvoyer encore la question au prochain sommet européen de juin. (Marques d’impatience sur les travées de l’UMP.) C’est immédiatement que les mesures doivent être prises !
Qu’entendez-vous faire, au niveau tant du Gouvernement que de la compagnie pétrolière Total, pour mettre un terme à ce racket permanent qui n’a que trop duré ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi. Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question, qui a le mérite de la nuance et de la pondération. (Rires sur les travées de l’UMP.) Je vais essayer de vous répondre sur le même ton.
M. Bernard Frimat. Quelle arrogance !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Tout d’abord, contrairement à ce que vous avez laissé entendre, le Gouvernement agit pour essayer de trouver des solutions.
M. René-Pierre Signé. Un peu de précision !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Première mesure concrète, au-delà des grands discours : application d’un tarif de première nécessité pour l’électricité et d’un tarif social de solidarité pour le gaz.
Deuxième mesure, la prime à la cuve,…
M. René-Pierre Signé. Financée par Total !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. … dont le montant va passer de 150 euros à 200 euros. Cette aide est appréciée sur le terrain, notamment par les ménages modestes.
Lors des négociations menées par Christine Lagarde, Total a renouvelé son engagement de participer au financement de cette prime et d’en faire bénéficier 800 000 ménages modestes.
Par ailleurs – et ce sujet est aussi important pour nos concitoyens –, le Gouvernement a tenu à voir valider l’engagement selon lequel les hausses seront lissées, alors que les baisses seront répercutées rapidement.
Mais cela ne suffit pas : il convient également de travailler, dans le cadre du Grenelle de l’environnement, sur tout ce qui permettra de promouvoir le développement des énergies renouvelables et des énergies innovantes, qui sont la seule réponse sur la longue durée. Nous pourrons compter sur des partenariats, notamment avec l’Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l’ADEME, ou les PME innovantes.
Monsieur le sénateur, face à cette crise mondiale, vous semblez vouloir jeter l’anathème uniquement sur le groupe Total. C’est une réponse partielle. Nous avons la chance d’avoir un champion national, qui crée des emplois sur notre territoire…
M. Gérard Le Cam. Quelques-uns !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. … et qui rapporte des recettes. Je ne suis pas sûr que la meilleure réponse à une crise mondiale consiste à décrédibiliser et à attaquer systématiquement une entreprise qui essaie d’apporter sa contribution. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP. – Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Puisque la crise se situe au niveau mondial, c’est à ce niveau que le Président de la République s’efforce de la traiter. Ainsi, dans le cadre de l’Union européenne, le Gouvernement a demandé de pouvoir disposer d’un bilan des réserves de pétrole, afin de lutter contre les pratiques spéculatives que vous avez dénoncées, monsieur le sénateur.
Le Président de la République a également sollicité le directeur général du Fonds monétaire international, que certains d’entre vous connaissent, afin de réfléchir à l’utilisation qui peut être faite de ces profits exceptionnels pour valoriser les énergies renouvelables.
Notre réponse n’est ni idéologique ni constituée de phrases toutes faites : elle est concrète ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
perennité des sous-préfectures en corse
M. le président. La parole est à M. François Vendasi.
M. François Vendasi. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
Madame la ministre, les personnels préfectoraux de Corse ont dernièrement manifesté leurs inquiétudes légitimes quant au devenir des trois sous-préfectures de notre région.
D’ores et déjà, le contrôle de légalité sera concentré dans les services des préfectures départementales, ce qui réduira le rôle des administrations d’arrondissement.
Cette décision, prise sans concertation, ne peut qu’inquiéter les agents, mais aussi tous les élus qui s’appuient sur les sous-préfectures pour l’exercice de leurs missions. Elle est d’autant plus surprenante que, parallèlement, le préfet de région a rendu hommage au rôle et à la compétence de ces personnels, dont les fonctions de proximité, d’écoute et de conseil sont particulièrement importantes dans une région montagneuse, principalement rurale, comme la nôtre.
C’est pourquoi ma question est simple : pouvez-vous me confirmer la pérennité des sous-préfectures de Corte, Calvi et Sartène et le maintien de leur rôle ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, je me suis exprimée à plusieurs reprises sur la question des sous-préfectures, et ma position est bien connue.
Dans les zones urbaines où la densité des services publics est très importante et les possibilités de circulation relativement aisées, la suppression de certaines sous-préfectures, selon les circonstances, est envisageable.
M. René-Pierre Signé. Après les tribunaux !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. En revanche, dans les lieux où les services publics sont moins nombreux et la circulation plus difficile, notamment dans les zones rurales, montagneuses ou isolées, cette présence de proximité, de conseil et de contrôle que représentent les sous-préfectures est nécessaire.
M. Didier Boulaud. Le préfet aux champs !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. À la lumière de ces critères, le maintien des sous-préfectures de Calvi, de Corte, mais également de Sartène, se justifie pleinement. Pour autant, l’État souhaite moderniser et rendre plus efficaces les méthodes de travail, notamment pour le contrôle de légalité. Je peux vous assurer que les bruits qui sont parvenus jusqu’à vos oreilles sont sans aucun fondement ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
situation de la presse écrite
M. le président. La parole est à M. Louis de Broissia.
M. Louis de Broissia. Ma question s'adresse à Mme la ministre de la culture et de la communication.
Hélas ! il s’agit encore d’une question d’actualité,…
M. René-Pierre Signé. Patrick Poivre d’Arvor !
M. Louis de Broissia. … car je vais vous parler, madame la ministre, de la presse quotidienne d’information. Celle-ci traverse des difficultés graves, récurrentes – nous en parlons depuis longtemps au Sénat –, en raison de la numérisation de l’information, de la concurrence de nouveaux médias et du développement des sources d’information. Les lecteurs se détournent de la presse papier ; selon l’historien Pierre Nora, la disparition progressive de la presse papier est déjà organisée.
Hier, mercredi 11 juin, la direction de douze quotidiens nationaux a publié un communiqué d’une page entière : « Lettre ouverte à ceux qui veulent tuer la presse nationale quotidienne », pour protester contre l’appel lancé par la CGT-Syndicat du livre et de la communication écrite à un arrêt de travail de vingt-quatre heures ; aujourd’hui, faute de journaux, le kiosque situé en face du Sénat est fermé. (Marques d’ironie sur les travées du groupe CRC.)
Hier, trois cents cégétistes jusqu’au-boutistes, salariés des Nouvelles messageries de la presse parisienne, les NMPP, ont occupé le siège de la société Lagardère, s’opposant à des remaniements dans la filière de la production.
Madame la ministre, voilà deux semaines, le Président de la République a souhaité que soient organisés des États généraux de la presse écrite.
M. René-Pierre Signé. Et TF1 ?
M. Louis de Broissia. Nous ne discutons pas de TF1 ! Nous parlons d’une chose sérieuse : le maintien de la presse écrite et de l’information !
M. Didier Boulaud. Ce n’est pas sérieux ?...
M. Louis de Broissia. L’an dernier, le Sénat a publié, au nom de la commission des affaires culturelles, présidée par Jacques Valade, un rapport que j’ai rédigé ; un groupe de travail sur le sujet avait été mis en place. J’ai hésité entre trois titres : j’avais d’abord pensé à Madame, la presse se meurt, madame, la presse est morte – je l’ai écarté ! – ; puis à Tout va très bien, madame la marquise, titre un peu connoté ; finalement, j’ai intitulé ce rapport : Presse quotidienne d’information : chronique d’une mort annoncée ?
M. François Autain. C’est original !
M. Didier Boulaud. Sarko m’a tué !
M. Louis de Broissia. Madame la ministre, nous avons évoqué des pistes. Le Gouvernement va-t-il s’emparer en urgence d’une question cruciale pour la démocratie, la presse quotidienne d’information, qui est aujourd’hui en danger ? (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le sénateur, vous avez rappelé toutes les difficultés rencontrées par la presse écrite, laquelle a d’ailleurs fait l’objet d’un excellent rapport, que vous avez établi sous l’égide du président Jacques Valade.
La presse écrite est, il est vrai, confrontée à Internet, à la concurrence des journaux gratuits et à la hausse des coûts de production. Nous en sommes conscients, et le Gouvernement s’est vraiment impliqué en la matière : je pense au plan des NMPP « Défi 2010 », qui est extrêmement important. Notre participation passera de 8 millions d’euros à 12 millions d’euros, afin de porter le nombre des points de vente de 28 000 à 33 000.
Au cours des derniers mois, 600 points de vente ont été créés, ce qui est déjà un beau succès. Il faut mieux former les kiosquiers, mieux les rémunérer. Le nombre des dépôts doit diminuer. À cette fin, un plan de départ extrêmement généreux prévoit le versement de 60 millions d’euros pour trois cents départs. Ces chiffres donnent une idée des conditions actuelles de travail et de rémunération des ouvriers du livre.
Je regrette donc que des syndicats jusqu’au-boutistes…
M. Alain Gournac. Corporatistes !
Mme Christine Albanel, ministre. …créent aujourd’hui cette situation de grève, qui met un peu plus en danger la presse écrite.
Nous œuvrons également en faveur du renouvellement du jeune lectorat ; c’était d’ailleurs l’un des aspects de votre rapport. Je compte aller plus loin, afin de créer un désir de presse, écrite ou en ligne. Ainsi, 50 millions d’euros sont prévus pour la modernisation de la presse et les services en ligne.
Tous ces sujets, qui ont déjà été largement abordés, seront encore évoqués à l’automne prochain, lors des États généraux de la presse. Ils seront l’occasion de parler des nouveaux modes de distribution comme le portage – il est très développé dans l’est de la France, un peu à Paris, et très peu ailleurs – et d’autres problèmes, à savoir la sous-capitalisation de la presse, qui est une question récurrente.
Mme Nicole Bricq. Interrogez les capitalistes, ce sont eux les propriétaires !
M. Paul Raoult. Lagardère !
Mme Christine Albanel, ministre. Bien sûr, nous nous appuierons sur votre rapport, monsieur le sénateur, qui met chacun face à ses responsabilités : les syndicats, les éditeurs, l’État et les journalistes. Nous agirons avec le soutien de la représentation nationale, car c’est un enjeu de démocratie. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
prix du pétrole
M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau.
M. Bernard Cazeau. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi.
La crise est là ! La France est prise dans le piège du pétrole cher, comme l’ont dit tout à l’heure nos collègues. Les manifestations succèdent aux « opérations escargots », barrages filtrants, et autres.
La fonte du pouvoir d’achat est la cause première de l’inquiétude grandissante des Français, avec une inflation à son plus haut niveau depuis deux décennies.
Les rouages de l’économie, à leur tour, se grippent, car la hausse des coûts de production exerce un effet dépressif sur l’activité, et la grogne monte dans les secteurs du transport, de l’agriculture, des travaux publics, des pêcheurs, etc.
Les Français se tournent aujourd’hui vers les pouvoirs publics, dont ils attendent des réponses. Pour le moment, ils ont eu droit à beaucoup de déclarations, mais à peu de solutions.
Le Président de la République nous a annoncé une TVA plafonnée ; il a aussitôt été désavoué par les ministres des finances de nos partenaires européens. Qu’en est-il ?
Le Gouvernement a également annoncé, au bénéfice des entreprises, des clauses de répercussion directe des coûts sur les consommateurs. Est-ce possible ?
La requalification fiscale des profits pétroliers est-elle une piste que vous envisagez ?
Alors que le leader français du secteur ristourne 1 % de ses bénéfices en direction des consommateurs aux bas revenus, les actionnaires seront-ils les seuls à engranger les dividendes des superprofits ?
N’oublions pas que, par-delà l’urgence, il y a le long terme et l’épuisement tendanciel des ressources qui s’annonce.
Le choc pétrolier dont nous vivons aujourd’hui les prémices exige des mesures politiques ambitieuses, préparant la cure de désintoxication pétrolière. On ne rayera pas un siècle de dépendance d’un trait de plume. Sur ce terrain, votre action se résume encore aujourd’hui, il faut bien le dire, aux intentions.
On nous parle de la multiplication des lignes à grande vitesse, mais dans ma région on reporte sine die les projets structurants.
M. Alain Gournac. La question !
M. Bernard Cazeau. On nous parle de développement du fret ferroviaire, mais dans mon département on ferme les gares de fret à un rythme inédit.
M. Robert Hue. Absolument !
M. Bernard Cazeau. On nous parle de transports urbains en sites propres, mais dans mon agglomération on demande aux collectivités de les payer.
On nous parle de 20 % d’énergie renouvelable dans dix ans, mais on se garde bien d’annoncer les moyens pour y parvenir.
Monsieur le ministre, la France attend une action réelle, car, dans peu de mois, ce sera l’hiver et dans nombre de familles on devra choisir entre se chauffer, se soigner ou se nourrir correctement ; et cela, ce n’est pas de l’idéologie ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre d'État.
M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire. Monsieur le sénateur, la question que vous posez mérite, me semble-t-il, un peu de hauteur de vue. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
À la différence des deux premiers chocs pétroliers, celui-ci n’a pas pour fondement un événement géopolitique ou militaire. Nous sommes face à une situation…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Spéculative !
M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État. …où nous ne pouvons pas prédire précisément quelle sera l’évolution du prix du baril de pétrole dans les mois qui viennent, mais nous savons que notre système énergétique et économique est en train de subir un changement fondamental.
L’Agence internationale de l’énergie a exposé la semaine dernière, à Tokyo – j’étais présent – les évolutions prévisibles, quoi qu’il arrive, pour les trente prochaines années, et les indispensables adaptations de nos économies.
Elle a insisté sur la nécessité de relancer le nucléaire en construisant trente-cinq centrales par an, sur la montée en puissance de l’ensemble des énergies renouvelables, qu’il s’agisse des techniques classiques, comme la géothermie et la biomasse, ou des techniques plus modernes et complémentaires, comme la capture et les séquestrations de carbone.
Monsieur le sénateur, nous évoquons un sujet fondamental.
Mme Nicole Bricq. C’est vrai !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il faut anticiper !
M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État. En tout état de cause, et indépendamment des souffrances particulières d’un certain nombre de professions ou de personnes auxquelles le Gouvernement entend répondre de manière ciblée, un changement de modèle économique et d’infrastructures se dessine. J’espère que vous soutiendrez le Grenelle de l’environnement, car, dans notre pays, premier consommateur d’énergie, 42 % de la consommation thermique est utilisée pour les bâtiments. Nous sommes, dans ce domaine, encore en retard.
J’espère que nous aurons un grand débat sur les voies navigables, les lignes à grande vitesse et l’évolution des structures agricoles françaises, afin de réduire leurs besoins énergétiques. Nous devons trouver les moyens de permettre à la société française, consommateurs et producteurs, de s’adapter à cette nouvelle donne. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)