M. Daniel Reiner. C'est un euphémisme !
M. Jean-Marc Pastor. La maîtrise de l'énergie, cela passe également par l'isolation des habitations, dont nous savons depuis le premier choc pétrolier qu'elle doit être renforcée.
Or, depuis plus de trente ans, la performance de notre pays en la matière n'est pas, loin s'en faut, particulièrement satisfaisante. À la différence de nos voisins allemands, qui ont construit des maisons passives - cela a été évoqué tout à l'heure -, nous devons avoir pour objectif prioritaire d'améliorer très significativement les caractéristiques énergétiques de l'habitat ancien.
À ce sujet, je note que la principale dépense fiscale du programme correspond au crédit d'impôt pour dépenses d'équipements de l'habitation principale en faveur des économies d'énergie et du développement durable. Si nous voulons rattraper notre retard, ce dispositif incitatif doit être complété. Quelle sont vos projets sur le sujet, madame, monsieur le secrétaire d'État ?
Enfin, je relève que l'État reprend, au titre de l'après-mines, les engagements de Charbonnages de France, dont la dissolution prendra effet dans quelques jours. J'espère que certains dossiers en instance depuis malheureusement trop longtemps sur les personnels ou la remise en état des territoires trouveront enfin un aboutissement.
Enfin, la recherche énergétique - vous n'en avez pas la responsabilité, madame, monsieur le secrétaire d'État, puisqu'elle relève de la mission « Recherche et enseignement supérieur » - est une composante essentielle de la politique énergétique.
Actuellement, de nombreuses expérimentations ont lieu sur la biomasse ou la production d'hydrogène. Le Gouvernement doit encourager très fortement ce travail en amont, ainsi que les transferts de technologie afférents, afin que la France accomplisse enfin sa propre révolution énergétique.
Voilà longtemps que nous en parlons, et tout le monde est convaincu d'une telle nécessité. Il suffit désormais de peu pour que nous puissions franchir le cap. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Francis Grignon.
M. Francis Grignon. Monsieur le président, madame, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, dans le cadre de la très vaste mission « Écologie, développement et aménagement durables », je voudrais vous faire part de quelques observations sur les trois grandes familles d'infrastructures de transports que sont les routes, le rail et la voie d'eau.
Mais, avant tout, je souhaite remercier le Gouvernement d'avoir confié à la commission des affaires économiques du Sénat, sur l'initiative de son président, M. Jean-Paul Emorine, un travail de réflexion sur l'avenir de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France après 2008, s'agissant tant de ses missions ou de son organisation que de ses moyens.
Je suis l'heureux président de cette mission d'information. J'en suis honoré, mais également angoissé, parce que l'exercice n'est pas évident.
Nous aurons certaines pilules à faire avaler aux différents acteurs. Or je suis persuadé que la potion sera plus efficace et digeste si la maladie est bien diagnostiquée et bien expliquée.
Nous avons commencé l'analyse de la situation à travers un maximum d'auditions. Il s'agit pour nous à la fois d'essayer d'exprimer les besoins, de réfléchir à des extensions de missions pour l'AFITF et d'imaginer de nouveaux moyens.
Bien entendu, à un moment donné, il faudra opérer des allers et retours entre les besoins et les moyens pour trouver un juste équilibre. Cela s'effectuera probablement au détriment des exigences de certains.
Mais, à mon sens, pour que l'exercice soit réussi, il faudra, en complément des comités interministériels d'aménagement et de développement du territoire, visualiser un schéma cohérent de l'ensemble de nos infrastructures de transport, qu'elles soient routières, ferroviaires ou fluviales.
Dans cette perspective, nous devrons prendre en compte les infrastructures de transport de personnes comme de fret, notamment dans le cadre de leur intermodalité. Il faudra également intégrer dans notre réflexion les grands terminaux que sont les ports ou les plates-formes logistiques, en liaison avec le transport aérien et les autres organisations européennes dans ces domaines.
C'est compliqué, mais c'est, me semble-t-il, indispensable pour expliquer les choix politiques et la hiérarchisation des priorités d'infrastructures de transport.
Selon les projets, un tel schéma devrait être exprimé à moyen et long terme. Ainsi, nous pourrions retenir une perspective, d'une part, d'une dizaine d'années pour le ferroviaire et la route et, d'autre part, d'une vingtaine d'années pour les voies navigables. Bien entendu, comme nous le savons bien, le schéma devrait être réactualisé chaque année en fonction des difficultés rencontrées dans sa réalisation.
Nous disposerions ainsi d'une réponse scientifique et technique argumentée à la problématique des infrastructures de notre pays, ce qui permettrait de transgresser les éventuelles alternances politiques. En face, nous aurions des moyens qui ne dépendraient pas de l'annualité budgétaire. C'est un rêve pour tous ceux qui suivent de tels sujets depuis longtemps ! (Sourires.)
Certes, cela n'est pas du ressort de la mission qui nous a été confiée par le Gouvernement. C'est la raison pour laquelle je me permets de vous faire passer ce message, madame, monsieur le secrétaire d'État.
Pour l'heure, nous continuons notre travail sur des approches d'investissements en moyennes budgétaires annuelles.
Cependant - je le répète -, nous serons peut-être amenés à proposer des contraintes budgétaires. Pour qu'elles puissent être acceptées, leurs motifs devront être bien expliqués dans un schéma d'ensemble à long terme, en parallèle à nos conclusions.
S'agissant des routes, dont la gestion incombe désormais essentiellement aux départements ou aux concessionnaires, je partage l'analyse selon laquelle les nouveaux investissements de l'État doivent être limités au strict nécessaire. Comme le préconise notre collègue Georges Gruillot, il faudra en particulier mettre l'accent sur l'entretien.
Toutefois, si vous le permettez, je souhaiterais évoquer la taxe « poids lourds », dispositif dont je peux observer la mise en oeuvre dans mon département, le Bas-Rhin.
Dès lors qu'elle est pour le moment appliquée seulement dans deux départements, en l'occurrence le Bas-Rhin et le Haut-Rhin, une telle taxe présente l'inconvénient majeur de pénaliser fortement les entreprises alsaciennes. Environ 80 % du péage serait ainsi à leur charge.
J'aurai l'occasion de m'exprimer en détail sur le sujet du ferroviaire lors du débat que nous aurons le 12 décembre sur la thématique du fret ferroviaire.
Pour le moment, méfions-nous de certaines conclusions hâtives. On ne peut pas rendre la SNCF responsable des manques d'infrastructures cohérentes et de sillons qui permettraient une meilleure offre pour le fret.
M. Daniel Reiner. Très bien !
M. Francis Grignon. De même, nous ne pouvons pas la rendre responsable du manque de clients, puisque le transport massif des pondéreux miniers a pratiquement disparu dans notre pays.
À côté des équipements pour la grande vitesse, et afin de ne pas pénaliser le fret ferroviaire, je pense indispensable de régénérer les infrastructures existantes là où cela s'impose.
M. Charles Revet. C'est-à-dire presque partout !
M. Francis Grignon. Enfin, je voudrais aborder la question du transport fluvial. Il s'agit, j'en suis bien conscient, d'un travail de longue haleine. C'est une raison de plus pour élaborer un schéma prospectif à très long terme.
Mon collègue Georges Gruillot et moi-même avons remis un rapport sur le sujet au Sénat. La France a trois « territoires mouillés », comme l'on dit, raccordables entre eux et avec le reste de l'Europe.
M. Francis Grignon. Il s'agit de la Seine et de ses affluents, du Rhin et de la Moselle et, enfin, du Rhône. Le projet de canal Seine-Nord est, n'en doutons pas, bien parti. Tant mieux.
Sincèrement, à mon sens, la prochaine étape consistera à prendre en compte le plus rapidement possible la liaison du Rhône avec l'est de la France, en toute objectivité économique, environnementale et sociétale, et sans a priori politique. C'est tout ce que nous demandons.
Puis, nous envisagerons ultérieurement le raccordement qu'il sera possible d'effectuer, c'est-à-dire le projet Seine-Est.
Quant aux détracteurs du transport fluvial, selon lesquels il est impossible de franchir des seuils, et ce uniquement pour des raisons économiques, voire - et c'est encore pire - écologiques, je les invite à raisonner globalement et à long terme, à l'instar de nos voisins, qui n'ont pas hésité à réaliser le canal Rhin-Main-Danube.
Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie par avance des réponses que vous pourrez apporter à toutes ces interrogations. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. La nouvelle mission « Écologie, développement et aménagement durables » rassemble, dans le projet de loi de finances pour 2008, des programmes précédemment inclus dans les missions « Transports » et « Écologie et développement durable », ainsi que dans certains programmes des missions « Politique des territoires » et « Développement et régulation économiques ».
S'il est nécessaire d'avoir une vision transversale de la politique du ministère de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, il reste que les changements de périmètres, les fusions de programmes rendent quelque peu illisible la présentation des crédits réellement alloués aux politiques environnementales.
Après la tenue du « Grenelle de l'environnement », nos concitoyens sont en attente de mesures fortes qui devraient logiquement se traduire par un engagement budgétaire de l'État.
Or, nous constatons qu'aucun crédit n'apparaît en prévision du financement des premières mesures retenues dans le cadre du Grenelle et susceptibles d'être mises en oeuvre dès l'exercice budgétaire de 2008. On peut comprendre que ce budget soit un budget de transition, madame la secrétaire d'État. Pour autant, nous souhaiterions que vous puissiez nous apporter des précisions : prévoyez-vous de traiter cette question dans un collectif budgétaire supplémentaire ? Une loi de programmation ou d'orientation sera-t-elle présentée au Parlement, comme la presse l'a rapporté ce matin ?
En ce qui concerne le programme 181 « Protection de l'environnement et prévention des risques », les moyens budgétaires sont en augmentation, et nous nous en réjouissons. Cependant, cette hausse est à relativiser puisque les dotations budgétaires sont largement subsidiaires par rapport aux taxes affectées et aux fonds de concours, ce qui revient encore une fois à faire peser en dernière instance une grande partie de l'effort financier ailleurs, notamment sur les collectivités.
De plus, force est de constater que les dépenses fiscales connaissent une hausse de 1 000 millions d'euros par rapport à 2007. Le Gouvernement confirme ainsi son habitude de financer ses politiques par la dépense fiscale, ce qui n'est pas, selon nous, une bonne solution pour conduire une politique cohérente et efficace à long terme.
Vous avez annoncé également un effort de 1 milliard d'euros supplémentaire durant quatre ans dans le domaine des nouvelles technologies, de l'énergie et de la protection de l'environnement. De quel milliard parlons-nous ? S'agit-il du milliard qui a été annoncé dans le budget de la recherche, auquel cas nous pourrions parler d'une présentation très optimisée du budget ? J'aimerais que vous puissiez nous apporter des précisions sur ce point, madame la secrétaire d'État.
Je ne m'attarderai pas sur la politique de l'eau. Les actions de cette politique sont dispersées dans plusieurs missions. De surcroît, l'importance des ressources extrabudgétaires qui participent à la mise en oeuvre de cette politique rend difficile une vue d'ensemble par le seul biais de la présente mission.
Quant à la question des eaux résiduelles urbaines, vous prévoyez que l'intégralité du territoire national soit en bon état d'ici à 2012. Nous soutenons entièrement cet objectif, mais je souhaiterais connaître la part de l'État dans le financement des travaux. Un emprunt de 2 millions d'euros à la Caisse des dépôts et consignations a été évoqué : j'aimerais savoir qui va emprunter et donc financer ces travaux, madame la secrétaire d'État.
À propos des actions relatives aux plans de prévention des risques naturels, financées à 25 % par des crédits budgétaires et à 75 % par des crédits du fonds de prévention des risques naturels majeurs, le fonds Barnier, notre rapporteur spécial a noté à juste titre la situation financière précaire de ce fonds. Il est alimenté à concurrence de 4 % par le fonds de prévention des catastrophes naturelles, lui-même alimenté par les cotisations des entreprises d'assurance.
Quelles solutions proposez-vous pour alimenter le fonds Barnier, madame, monsieur le secrétaire d'État ? Il serait juste d'augmenter la contribution des entreprises d'assurance. En effet, en participant au financement de travaux préventifs - digues, zones d'expansion, etc. -, les entreprises d'assurance réduiraient les risques pour elles, et donc leur part de financement pour payer les dégâts. Certes, elles répercuteraient sans doute ensuite le coût sur les primes d'assurances, ce qui serait un peu gênant. J'aurais aimé entendre dire qu'elles diminueraient légèrement la part donnée aux actionnaires...
Je voudrais dire quelques mots de la prévention des risques et du contrôle des installations classées. Le projet de loi de finances n'augmente pas les effectifs. Pourtant, nous savons tous qu'il est nécessaire d'augmenter le nombre d'inspecteurs des installations classées, lesquelles comptent la plupart des installations industrielles et artisanales importantes.
Aujourd'hui, pour faire face à la diversité des risques et des pollutions, 1 000 inspecteurs ont pour mission de surveiller environ 500 000 installations classées. Cela représente une visite tous les dix ans, d'après les calculs réalisés par la Fédération française des associations de protection de la nature et de l'environnement, la FNE. Mener une politique de prévention des risques nécessite que l'État s'engage fortement afin que les moyens en personnels soient à la hauteur des missions.
Je souhaiterais à présent aborder le programme « Énergie et matières premières », dont nous avons vu l'importance en matière de développement durable et de préservation de l'environnement. Sur le fond, ce nouveau programme traite principalement de la gestion de l'après-mines, qui regroupe 94 % des crédits.
Je veux d'abord souligner la montée en puissance du budget de l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, l'ANDRA. Je m'en réjouis. La politique énergétique de la France doit en effet trouver une traduction budgétaire forte et nécessairement transversale, notamment dans le budget de la recherche.
Par ailleurs, comment ne pas reconnaître que la question de fond pour les matières premières énergétiques est celle de l'épuisement des ressources naturelles à l'échelle mondiale, ainsi que l'impératif de réduction de l'émission de gaz à effet de serre ?
Cette nécessité écologique et économique nous conduit - vous n'en serez pas étonnés - à prôner une forte maîtrise publique des outils industriels que sont EDF, GDF et Areva.
Le Gouvernement, bien au contraire, organise progressivement la privatisation de toutes ces entreprises nationales, se privant de leviers d'action importants. Nous sommes très inquiets de la cession de 2,5 % du capital d'EDF et nous craignons que celle-ci n'annonce, à terme, la privatisation étape par étape de l'entreprise publique.
M. Daniel Reiner. Absolument !
Mme Évelyne Didier. Il est tentant, nous le voyons bien, d'utiliser cet argent pour financer des actions.
Nous ne pouvons souscrire à cette politique, car, s'il est urgent de prendre des mesures efficaces pour moderniser le service public de l'enseignement supérieur, il ne faut pas le faire au détriment des autres services publics !
La vente du patrimoine, si vous me permettez l'expression, mes chers collègues, est un fusil à un coup ! Ensuite, que ferons-nous ? Nous continuons de penser que seule la puissance publique, garante de l'intérêt général et disposant de meilleurs outils prospectifs, dégagée des impératifs de court terme du marché, a la compétence et les capacités pour trouver des solutions nouvelles. Rappelons que c'est la nation qui a financé l'industrie nucléaire, bénéfique en termes de tarifs, d'indépendance énergétique et d'émissions de gaz à effet de serre.
Nous constatons d'ailleurs que la réalisation d'un prototype de réacteur de quatrième génération à l'horizon 2020 ne s'accompagne pas, pour l'instant, des crédits nécessaires. Pouvez-vous nous donner des informations sur la pérennité de ce programme, madame, monsieur le secrétaire d'État ?
Sur la question du nucléaire, vous ne serez pas étonnés que nous restions des opposants déterminés à la privatisation d'Areva, suggérée par le Président de la République. Nous estimons que la sûreté nucléaire, les enjeux de recherche et notamment, puisqu'il en est question dans ce budget, la gestion des déchets nucléaires sont des sujets trop importants pour être laissés à la discrétion des actionnaires des grands groupes privés. Le rapporteur spécial à l'Assemblée nationale, M. Cacheux, a précisé à juste titre que, afin de renforcer la capacité d'investissement du groupe Areva, l'appel au marché pouvait parfaitement se faire par l'endettement.
Je souhaite à présent intervenir sur l'un de mes sujets de prédilection : le programme « Passifs financiers miniers ». En effet, comme chaque année lors de l'examen de ce budget, je m'inquiète principalement des moyens qui vont être mis en oeuvre pour la préservation des droits acquis par les anciens mineurs.
En premier lieu, j'évoquerai la question du droit au logement gratuit, qui est garanti au nom de l'État, comme vous le savez, par l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs. Malheureusement, le jeu de cessions et de rétrocessions successives qui touche le parc immobilier minier fragilise de plus en plus ce droit au logement ; c'est la dissolution progressive du lien direct et historique qui existait entre le propriétaire - la mine - et le locataire - le mineur.
Dans le but de mieux comprendre cette situation qui devient complexe et de mieux la gérer, il devient essentiel de mettre en place un observatoire au sein de l'Agence afin que cette dernière puisse disposer en temps réel des informations sur les cessions. Or, alors même que cette mission est l'une des priorités de l'Agence, les procédures mises en place jusqu'à présent pour y parvenir ont fait défaut, en raison bien souvent de l'attitude désinvolte de certains bailleurs.
C'est la raison pour laquelle, madame, monsieur le secrétaire d'État, je souhaiterais que vous permettiez à l'Agence d'assurer sa mission en lui donnant les moyens de suivre le parc de logements.
Ensuite, j'aborderai brièvement le problème du démantèlement du régime spécial de la sécurité sociale minière. Alors même que les bénéficiaires ont des besoins croissants, cette année encore, les chiffres parlent d'eux-mêmes : le pouvoir d'achat a diminué de 22 %, et 50 % des dispensaires seront fermés d'ici à la fin de l'année. Dans le cadre de la refonte des régimes spéciaux, le Gouvernement a dit ne pas vouloir toucher au régime minier, mais je pense que ce dernier est déjà touché !
Il ne me reste malheureusement pas assez de temps pour développer tous les sujets. J'évoquerai simplement brièvement la question de l'indemnisation des victimes d'affaissements miniers, comme à Moutiers, où les sinistrés se trouvent en attente d'une régularisation, ou bien à Piennes et à Landres, dont les dossiers restent bloqués en attendant une éventuelle modification de la loi.
L'État s'était engagé à reprendre l'ensemble des obligations des exploitants miniers envers les collectivités et les mineurs, que ce soit en matière de sécurité, d'indemnisation ou de garanties des droits. C'est un sujet important sur lequel, je l'espère, nous tiendrons parole. Nous voyons bien, en effet, que l'arrêt des mines de charbon pose de lourds problèmes à la fois aux collectivités et aux particuliers.
Pour conclure, nous savons vos convictions et nous reconnaissons que vous avez fait avancer la cause de l'environnement et du développement durable, madame la secrétaire d'État, mais nous n'avons pas encore de vision globale des suites qui seront données au Grenelle de l'environnement. Il est certes encore trop tôt, et je reconnais que beaucoup de choses sont déjà lancées. Il nous est cependant difficile de nous prononcer en l'état. Il y a comme un hiatus entre notre discussion de ce jour et les suites du Grenelle dont nous aurions aimé parler.
Aujourd'hui, nous sommes réunis pour un exercice très précis : donner notre avis sur les crédits d'une mission. Sur cet ensemble, notre avis est clairement négatif. C'est pourquoi nous voterons contre ce projet de budget ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Claude Biwer.
M. Claude Biwer. Monsieur le président, madame, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, mon intervention portera plus particulièrement sur les transports terrestres, et notamment sur la nécessité de voir se développer certaines infrastructures routières et ferroviaires en Lorraine, singulièrement dans mon département, la Meuse.
Je suis très heureux de vous avoir comme nouveaux interlocuteurs sur ces sujets, madame, monsieur le secrétaire d'État : vous n'avez pas encore eu le plaisir d'entendre nos plaidoyers répétés et insistants ; j'ose espérer que, ce soir, je serai non seulement écouté, mais aussi un peu entendu.
Sur un plan plus général, j'observe que le programme « Réseau routier national » retient comme priorités l'entretien du réseau et la sécurité des usagers : je partage bien entendu cette préoccupation en regrettant, une fois de plus, que l'État se soit largement désengagé dans ce domaine, en transférant 18 000 kilomètres de routes nationales aux départements.
S'agissant de la sécurité routière, celle-ci ne doit pas se résumer à l'implantation de radars automatiques supplémentaires ; elle doit aussi se traduire par des actions de prévention à destination des jeunes, des piétons et des conducteurs de deux-roues, motorisés ou non.
J'ajoute que l'implantation des radars mobiles doit s'effectuer dans des zones particulièrement accidentogènes non encore couvertes par des radars fixes, et non, comme c'est malheureusement trop souvent le cas à l'heure actuelle, en des lieux où le rapport peut être plus élevé.
Le Grenelle de l'environnement a placé le secteur des transports dans une perspective de développement durable avec, à la clé, de multiples objectifs aussi ambitieux que coûteux dont on peut se demander s'ils pourront effectivement être atteints.
Je ne vous cacherai pas, par ailleurs, que la perspective de « ne pas créer de nouvelles routes et autoroutes sauf en cas de sécurité et de congestion ou d'intérêt local » m'a laissé perplexe.
En effet, chargé d'un rapport sénatorial sur le désenclavement de la ruralité française, je constate que certaines zones ont encore besoin d'infrastructures pour éviter l'isolement. Nous sommes encore bien loin d'atteindre l'objectif fixé par l'ancienne loi Pasqua de 1995, prévoyant que tous les secteurs de notre territoire devaient se trouver à moins de cinquante kilomètres ou de quarante-cinq minutes d'un grand axe ferroviaire ou routier !
Nous avons en Lorraine une autoroute largement saturée, à savoir l'A31. Pour vous en rendre compte, je vous invite, madame, monsieur le secrétaire d'État, à l'emprunter entre sept heures et neuf heures ou entre dix-sept heures et dix-neuf heures, et de préférence sans escorte policière. Cela vous donnera la mesure de l'inquiétante insécurité qui y règne pour les automobilistes se rendant de Metz à Luxembourg et retour.
M. Roland Courteau. Il n'y a pas que là !
M. Claude Biwer. Son doublement a fait l'objet de multiples rapports et de nombreux débats, mais rien n'a été décidé et, bien entendu, rien ne se fait.
J'ai toujours estimé que la création d'une autoroute parallèle et proche de l'actuelle A31 était une solution trop coûteuse. Afin de favoriser l'aménagement du territoire, je continue donc à plaider en faveur de la création d'une voie rapide reliant la Belgique à Toul ou allant vers la Haute-Marne, puis la vallée de la Loire, en s'appuyant sur des axes routiers nationaux, tels que la RN 18, devenue la RD 618, et en les aménageant.
Je suis également convaincu qu'un axe Ouest-Est proche de la frontière reliant, depuis Charleville-Mézières et Sedan, le Luxembourg par Montmédy et Longwy relancerait très sérieusement l'économie locale transfrontalière. Pour l'instant, le trafic se fait plutôt sur le trajet belge Lille-Luxembourg.
Par ailleurs, le volet routier du contrat de plan État-région 2000-2006 ayant été prolongé jusqu'au 31 décembre 2008, je souhaite que les opérations routières concernant le département de la Meuse qui n'ont pu être achevées le soient d'ici là et que d'autres soient lancées : je pense au désenclavement du secteur de Bar-le-Duc et à la réalisation du contournement de certaines villes.
S'agissant des infrastructures ferroviaires, le Grenelle de l'environnement propose également des objectifs très ambitieux de construction de nouvelles lignes à grande vitesse.
En Lorraine, nous avons la chance de pouvoir disposer de la nouvelle ligne du TGV Est, qui traverse mon département.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. Avec la belle gare Meuse !
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. Très fréquentée !
M. Claude Biwer. Malheureusement, les trains ne s'y arrêtent pas, monsieur le secrétaire d'État.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. Ils s'y arrêtent quand même !
M. Claude Biwer. Nous avons un train le matin et un autre le soir. Disons les choses comme elles sont : il est plus facile de venir de Strasbourg que de la Meuse ! Il faudrait faire en sorte que nous puissions emprunter ces lignes.
Je ne sais comment je repartirai d'ici, après la séance de demain. Ma voiture est garée à la gare Meuse. Mais si je rate l'unique train, je devrai sans doute passer par Strasbourg pour rentrer chez moi ! Nous en sommes là !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. C'est vrai !
M. Claude Biwer. On nous dit que les choses vont être revues et que la situation va s'améliorer. Mais si vous pouviez me l'annoncer officiellement, j'en serais ravi.
J'ajoute que le ferroviaire ne doit pas se cantonner aux TGV. Le chef-lieu de mon département, Bar-le-Duc, est moins bien desservi aujourd'hui qu'avant la mise en service du TGV. Si l'on veut faire disparaître de nos routes un maximum de véhicules afin de limiter la pollution, encore faudrait-il que l'offre de transport ferroviaire corresponde aux besoins de la population, ce qui est loin d'être le cas !
Ainsi conviendrait-il de développer certaines lignes à caractère régional : je pense à celle reliant Metz, Châlons-en-Champagne ou Reims, par exemple. J'aimerais également souligner que, près de la frontière, l'ancienne ligne Paris-Luxembourg subit de tels ralentissements qu'elle n'est pratiquement plus empruntée. Je trouve dommage qu'une ligne de cette qualité, qui est électrifiée, ne puisse pas être davantage fréquentée.
Je plaide depuis des années pour le prolongement jusqu'au Luxembourg, ce qui éviterait à des centaines, voire à des milliers de frontaliers d'utiliser leur voiture pour se rendre chaque jour à leur travail en Belgique ou au Luxembourg.
Comme vous le voyez, au-delà des grands sujets de préoccupation comme le Grenelle de l'environnement, il y a aussi les réalités régionales et locales. J'ai le sentiment que des investissements sans doute moins prestigieux et moins coûteux, tels que ceux que je viens d'évoquer, seraient certainement mieux à même de rendre service à nos concitoyens et mériteraient une réflexion.
Je compte sur vous afin que ces préoccupations soient entendues. C'est avec cet espoir, et confiant en vos réponses, que j'approuverai ce budget. Espérons qu'il nous permettra de réaliser ce que je vous ai demandé. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Yves Krattinger.
M. Yves Krattinger. Monsieur le président, madame, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l'examen du projet de budget pour 2008 conduit à dresser un constat inquiétant : l'entretien du réseau routier national ne semble plus être une priorité de l'État.
M. Daniel Reiner. Cela fait déjà un moment !
M. Yves Krattinger. Les crédits consacrés à l'entretien des routes nationales accusent une baisse sensible, et le transfert à l'AFITF du financement de l'action « Développement des infrastructures routières » ne règle rien sur le fond.
La question du financement de tous les engagements pris par l'État est donc nettement posée : les autorisations d'engagement sont en chute libre de 35 % ; les 875 millions d'euros versés par les collectivités locales pour cette action sont largement supérieurs à l'engagement de l'AFITF, dont la pérennité des ressources pose de graves problèmes sur lesquels j'aurai l'occasion de revenir.
Les collectivités territoriales engagées à financer avec l'État des projets impérieux de désenclavement espéraient mieux pour leur territoire que ce budget amaigri. Ce dernier repose en majeure partie sur une agence fonctionnant financièrement à flux tendus, qui est inscrite dans une vision à court terme dépourvue de toute ambition programmatique.
L'AFITF, imaginée en 2003, est un projet désormais caduc. En vendant les sociétés concessionnaires d'autoroutes, l'État a décidé de faucher le blé sans attendre le grain.
M. Paul Raoult. Belle formule !
M. Yves Krattinger. Les territoires ont besoin d'être rassurés. Pour ma part, je souhaite avoir des garanties sur le financement, en 2008, des opérations engagées dans mon département : la déviation de Luxeuil, la déviation de Lure et la nouvelle RN 19 jusqu'à l'A36.
Une programmation pluriannuelle glissante, sur une période de dix années, englobant les phases d'étude et de réalisation, s'impose pour l'ensemble des infrastructures de transport de notre pays.
Il devient extrêmement urgent que soit engagé un travail de réflexion sur le statut de l'AFITF, plus précisément sur son mode de gouvernance, ses missions et ses ressources.
La structure et le fonctionnement de l'AFITF en font aujourd'hui un simple exécutant des décisions de l'État, avec des marges de manoeuvre quasiment nulles. Or il s'agit d'une agence et non d'une caisse. Un nouveau mode de gouvernance doit donc être instauré afin que l'AFITF devienne un lieu de débat plus contradictoire et de préparation des grandes orientations. Il faut qu'elle soit une force de proposition et le levier d'une politique ambitieuse en matière d'infrastructures de transports durables !
Les collectivités locales doivent être associées de manière plus structurée à la gouvernance de cette agence au titre des PDMI et des routes départementales, pour les départements, des PDMI et du ferroviaire, pour les régions, et des transports en site propre, pour les communautés urbaines et les communautés d'agglomération.
Vingt-cinq ans après l'acte I de la décentralisation, l'État a besoin d'un partenariat renforcé avec les collectivités locales pour conduire et mettre en oeuvre la quasi-totalité des politiques publiques, dont celle des infrastructures.
Une telle réforme du fonctionnement de l'AFITF ne sera possible qu'à condition de satisfaire à un certain nombre d'exigences : lui définir des missions nettement stratégiques et claires, lui confier la fonction de vigie sur la mise en oeuvre des projets décidés, la mandater pour flécher les crédits des grands projets programmés, lui demander de veiller à la pérennité du patrimoine de l'État et de Réseau ferré de France en matière d'infrastructures, lui affecter des ressources pérennes à l'abri des convoitises ainsi qu'à la hauteur des programmes d'investissements pluriannuels qu'elle doit financer, la mandater pour organiser le péage dématérialisé pour les poids lourds.
Sans nouvelles ressources, l'AFITF sera en très grande difficulté dès 2009. Quelles seront ses ressources à cette date ?
Il lui manquera plus de 10 milliards d'euros d'ici à 2012 pour financer les projets programmés, sans compter les nouveaux choix énoncés récemment : 2 000 kilomètres de nouvelles voies pour le TGV et 1 500 kilomètres pour les tramways et les bus en site propre, avec un engagement total estimé à 20 milliards d'euros.
Monsieur le secrétaire d'État, où comptez-vous puiser cet argent ? Si vous ne le trouvez pas, comment allez-vous arbitrer les prochains budgets ?
M. Roland Courteau. Bonnes questions !
M. Yves Krattinger. Inspirée de la directive « Eurovignette » de juin 2006, la mise en place d'une redevance kilométrique sur les véhicules poids lourds pourrait peut-être constituer, à dater de 2011 semble-t-il, une ressource pérenne, incitative et écologique pour l'AFITF. Même si les 800 millions d'euros attendus chaque année ne sont pas négligeables, ils ne seront pas à la hauteur des besoins de financement déjà connus.
Encore faudra-t-il que cette recette ne soit pas destinée à alimenter le budget général de l'État. Pour cela, il faut clairement opter pour la création d'une redevance, dont le produit serait affecté à l'AFITF, et non pour une taxe, qui est par nature budgétaire et donc susceptible d'être l'objet de toutes les convoitises.
M. Jean-Marc Pastor. Il faut se méfier !