PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet
M. le président. La séance est reprise.
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Questions d'actualité au Gouvernement
M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions d'actualité au Gouvernement.
Je rappelle que l'auteur de la question de même que le ministre pour sa réponse disposent chacun de deux minutes trente.
privatisation de gdf
M. le président. La parole est à M. Yves Coquelle.
M. Yves Coquelle. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
La privatisation de Gaz de France, dont le principe a été voté par le seul groupe UMP mardi dernier à l'Assemblée nationale, se fonde sur un véritable mensonge d'État.
MM. Alain Gournac et Henri de Raincourt. Ah !
M. Yves Coquelle. En 2004, M. Sarkozy, ministre de l'économie et des finances, avait promis le maintien de GDF dans le secteur public.
Mme Hélène Luc. Eh oui !
M. Robert Hue. Très bien !
M. Yves Coquelle. Le ministre d'État, deuxième personnage du Gouvernement, est ainsi pris en flagrant délit de mensonge.
Ce projet de loi, élaboré avec la complicité de la Commission européenne dont le dogme est « tout pour la finance, rien pour le public », a été rejeté par 94 % des personnels de EDF et de GDF. Il est rejeté par les usagers, par l'opinion publique.
Vous avez refusé d'examiner sérieusement les alternatives à la privatisation telles que la fusion de EDF-GDF dans un cadre public, ce qui était pourtant le bon sens.
Seul l'État peut préserver les entreprises des OPA et des financiers.
L'indépendance énergétique, la sécurité exigent, bien au contraire, la nationalisation de EDF et de GDF.
Partout dans notre monde, ce sont les États qui prennent en charge le secteur clé de l'énergie et vous voulez faire l'inverse.
Tout au long du débat à l'Assemblée nationale, vous avez évité de répondre sérieusement à des questions essentielles.
Pourquoi légiférer aujourd'hui, alors que nous ne connaissons toujours pas les conditions imposées par Bruxelles pour l'opération de fusion ?
C'est un chèque en blanc que les députés UMP vous ont signé. Le problème, c'est que, l'argent du compte, c'est le patrimoine industriel de la France !
M. Robert Hue. Absolument !
M. Yves Coquelle. Vous n'avez pas non plus répondu sur l'audit concluant à 20 000 suppressions d'emplois à court terme en cas de fusion de GDF et de Suez.
M. Guy Fischer. Et la hausse des tarifs ?
M. Yves Coquelle. Vous n'avez pas plus répondu sur l'envolée prévisible des tarifs.
M. René-Pierre Signé. Ce sont les consommateurs qui vont répondre !
M. Yves Coquelle. Monsieur le ministre, le Président de la République, Jacques Chirac, a lui-même était à l'initiative, en 1995, d'une réforme constitutionnelle qui élargissait le champ du référendum aux services publics.
M. Alain Gournac. C'est long, monsieur le président !
M. Yves Coquelle. Le sacrifice du service public de l'énergie sur l'autel du marché ne justifie-t-il pas l'organisation d'un tel référendum ?
M. Robert Hue. Absolument !
M. Yves Coquelle. Les Françaises et les Français ont montré avec éclat le 29 mai 2005 qu'ils répondaient « présents » lorsque l'on sollicitait leur avis.
Mme Janine Rozier. C'est long !
M. Gérard Cornu. La question !
M. Yves Coquelle. Je vous demande, monsieur le ministre, de stopper l'examen de ce texte que seul l'UMP soutient, pour permettre au Président de la République de consulter le peuple.
Oui, il faut un référendum sur une question aussi importante que l'avenir énergétique de la France. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le sénateur, nous allons avoir le temps de discuter de cette question, puisque je crois savoir que la Haute Assemblée est saisie du projet de loi relatif au secteur de l'énergie.
M. Christian Demuynck. Eh oui !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Si vous répondiez aux questions qui vous sont posées !
M. Thierry Breton, ministre. Nous avons déjà eu une réunion fort intéressante sur ce sujet, présidée par le président de la commission des affaires économiques, M. Jean-Paul Émorine, en présence du rapporteur, M. Ladislas Poniatowski, et nous allons avoir tout le loisir de nous expliquer.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On connaît vos explications : elles ne sont pas convaincantes !
M. Thierry Breton, ministre. De quoi s'agit-il, monsieur le sénateur ? Il s'agit de pouvoir transposer la directive relative au marché de l'énergie, qui vous rappelle certainement quelque chose, puisque c'est sous le gouvernement de Lionel Jospin (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.), ...
M. Alain Gournac. Vous étiez dans le Gouvernement !
M. Didier Boulaud. Mensonges !
M. Thierry Breton, ministre. ...lors du sommet de Barcelone, en 2002, qu'il a été décidé d'ouvrir les marchés de l'énergie. C'est un fait !
On peut attendre et voir ce qui se passera demain - vous êtes un peu les spécialistes de ce genre d'attitude -...
Mme Raymonde Le Texier. C'est tout ce que vous savez dire !
M. Thierry Breton, ministre. ...ou bien se donner les moyens de préserver ce à quoi nos compatriotes sont attachés, à savoir les tarifs réglementés pour l'électricité et pour le gaz, et c'est précisément l'objet du projet de loi relatif au secteur de l'énergie.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Que faites-vous de vos propres promesses ?
M. Robert Hue. Et la promesse de Sarkozy ?
M. Didier Boulaud. Vous vous reniez !
M. Thierry Breton, ministre. Il est vrai que les choses avancent vite dans notre monde contemporain.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le bradage industriel avance vite !
M. Thierry Breton, ministre. Il est vrai aussi que nous sommes désormais entrés dans ce que certains appellent une « guerre énergétique ». (Protestations continues sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Ce qui était vrai en 2000 ne l'est plus en 2006.
M. Guy Fischer. Les profits, en effet !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le CAC 40 évolue très vite !
M. Thierry Breton, ministre. Dès lors, ou bien l'on regarde dans le rétroviseur en regrettant le passé ou bien, comme nous le faisons, on assume ses responsabilités pour donner notamment à Gaz de France la possibilité d'aller de l'avant.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous aurez tout le loisir de vous prononcer en toute connaissance de cause sur cette question essentielle. En tout cas, sachez que le Gouvernement, en particulier François Loos et moi-même, sera à la disposition de la Haute Assemblée pour répondre à toutes les questions. J'ajoute que nous caressons même l'espoir de vous convaincre ! (Bravo et applaudissements sur les travées de l'UMP.- Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Si ce sont les mêmes réponses qu'à l'Assemblée nationale...
M. Guy Fischer. C'est de la provocation !
M. Jean-Pierre Sueur. Et les 70 % de M. Sarkozy ?
M. le président. Mes chers collègues, je vous prie de rester sereins.
méthode d'apprentissage de la lecture
M. le président. La parole est à M. Bernard Seillier.
M. Bernard Seillier. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Ici même, en décembre dernier, abordant le problème crucial de l'apprentissage de la lecture, vous avez annoncé le nécessaire abandon de la méthode globale et la possibilité désormais pour les enseignants d'utiliser la méthode analytique sans être sanctionnés.
Votre décision n'était ni arbitraire ni isolée. Elle était étayée par les résultats expérimentalement constatés et par des travaux des scientifiques démontrant la conformité des méthodes analytiques aux requêtes d'un cerveau d'enfant en cours de structuration.
Vous avez ensuite adressé une circulaire sur l'apprentissage de la lecture aux inspecteurs d'académie et aux directeurs des Instituts universitaires de formation des maîtres, les IUFM, le 3 janvier, suivie d'un arrêté, le 24 mars dernier.
M. Yannick Bodin. Cela a fait « pschitt » !
M. Bernard Seillier. Malheureusement, force est de constater que certains syndicats d'enseignants, bravant votre autorité ministérielle, refusent par parti pris idéologique les évidences de l'expérience confirmées par la connaissance scientifique du cerveau.
M. Jean-Pierre Sueur. C'est faux !
M. Bernard Seillier. Ils ont récemment diffusé 500 000 tracts intitulés : Apprendre à lire, pas si simple ! condamnant implicitement votre circulaire, faisant l'éloge des méthodes synthétiques et mettant l'accent sur le fait qu'aujourd'hui « les jeunes n'éprouvent pas plus de difficultés en matière de lecture que leurs aînés, bien au contraire ».
M. Jean-Pierre Sueur. Non au scientisme !
M. Bernard Seillier. Et ce alors qu'il est de notoriété publique qu'un collégien sur cinq ne maîtrise pas correctement la lecture à son entrée en sixième !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On licencie ceux qui ne pensent pas la même chose !
M. Bernard Seillier. Or la première égalité des chances à l'école n'est-elle pas que tous les enfants apprennent à lire avec succès par la méthode dite « syllabique » parce qu'elle respecte le fonctionnement cérébral, associant consonnes et voyelles en syllabes, puis les syllabes entre elles, permettant ainsi de lire les mots avec sûreté ?
M. Didier Boulaud. Même moi, je n'ai pas appris avec la méthode globale !
M. Bernard Seillier. Devant cette situation plutôt scandaleuse quand on pense que l'attitude contestataire vient de personnes dont la mission est aussi de transmettre l'instruction civique et les règles démocratiques, quelles initiatives, quelles mesures concrètes pensez-vous prendre, monsieur le ministre, pour que tous les professeurs des écoles déjà prêts à utiliser la méthode syllabique puissent le faire sans intimidation...
M. Didier Boulaud. Quel retour en arrière !
M. René-Pierre Signé. C'est trop long !
M. Bernard Seillier. ... et avec possibilité de recours en cas d'abus, et pour que les autres professeurs soient très rapidement formés dès cet automne 2006 ? C'est tout à fait réalisable quand on sait que, devant la débâcle actuelle, un peu partout en France des parents, quelles que soient leurs opinions, s'organisent pour se former en quelques jours afin d'apprendre à lire à leurs enfants...
M. Didier Boulaud. C'est une mystification ! La vérité, c'est que la méthode globale n'existe plus depuis 1954 !
M. Bernard Seillier. ...photocopiant des fiches, vrais samizdats pédagogiques dans un pays qui doit rester celui de la liberté. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, l'apprentissage de la lecture se fait dès les premières leçons du cours préparatoire par l'apprentissage des lettres et des sons qui forment des syllabes.
M. Didier Boulaud. À la maternelle, on apprend à lire !
M. Gilles de Robien, ministre. L'on forme ensuite les mots, puis les phrases qui font sens. Les scientifiques ont clairement dit que le cerveau apprenait par éléments.
M. Didier Boulaud. Vous êtes en retard d'une guerre !
M. Gilles de Robien, ministre. Nous avons évidemment le devoir de suivre les recommandations des scientifiques.
M. Jean-Pierre Sueur. Quels scientifiques ?
M. Didier Boulaud. Des oukases !
M. Gilles de Robien, ministre. Premièrement, 350 000 plaquettes d'explication ont été envoyées aux professeurs des écoles.
Deuxièmement, un DVD a été réalisé et les scientifiques s'y expriment sur ce sujet.
M. Didier Boulaud. Pas ceux que vous avez licenciés !
M. Gilles de Robien, ministre. Troisièmement, l'inspection générale est mobilisée : elle me remettra un rapport à la fin du mois d'octobre.
Quatrièmement, je demande à tous les recteurs de France de mettre en place, dans le cadre de la formation continue,...
M. Didier Boulaud. Vérifiez qu'ils savent lire avant !
M. Gilles de Robien, ministre. ... des apprentissages et des formations continues à l'intention des maîtres d'école en poste actuellement, de façon qu'il n'y ait aucune ambiguïté et qu'ils puissent suivre les textes officiels.
Par ailleurs, je travaille actuellement sur le cahier des charges des futurs IUFM...
M. Didier Boulaud. En licenciant les professeurs !
M. Gilles de Robien, ministre. ... dans le cadre de la loi d'orientation que vous avez votée, monsieur le sénateur ; sachez que les textes officiels s'appliqueront aux futurs enseignants.
Monsieur le sénateur, je suis sûr que l'immense majorité de la communauté éducative est tout à fait loyale vis-à-vis des textes officiels.
M. Didier Boulaud. Préparez vos valises, votre CDD sera bientôt terminé !
M. Gilles de Robien, ministre. Comme tous les fonctionnaires, ils ont le devoir de suivre les textes officiels.
D'ailleurs, un inspecteur de l'éducation nationale fait actuellement l'objet d'une procédure disciplinaire motivée par un manquement grave et caractérisé à ses obligations.
Je rappelle qu'un cadre de la fonction publique doit appliquer les instructions du ministre et doit également les faire appliquer. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.- Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Didier Boulaud. Quand c'est absurde, ils ont le droit de se révolter !
surpopulation carcérale en polynésie
M. le président. La parole est à M. Gaston Flosse.
M. Gaston Flosse. Ma question s'adresse à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Gaston Flosse. Durant ces derniers mois, j'ai essayé à plusieurs reprises, mais en vain, de vous alerter sur le sujet, désormais explosif, du centre pénitentiaire de Tahiti-Faa'a.
Ce dernier, construit il y a une trentaine d'années pour 126 détenus, en héberge aujourd'hui 352 !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce n'est pas nouveau !
M. Gaston Flosse. À cette promiscuité vient s'ajouter la vétusté des locaux, une vétusté inacceptable en termes d'hygiène, de sécurité et tout simplement d'humanité.
Le problème particulier des conditions de détention des femmes a été soulevé à maintes reprises par le syndicat national des personnels de l'administration pénitentiaire : pas de grilles aux salles d'activités, pas de formation à la lutte contre l'incendie, absence d'extincteurs en état de fonctionnement et nombreux autres dysfonctionnements.
Le syndicat pénitentiaire de la Polynésie française, le CSTP, m'a également alerté de la situation alarmante des effectifs, dans cet établissement comme dans l'ensemble des établissements polynésiens. Il convient de souligner le déficit d'agents résultant de la différence entre l'effectif de référence des établissements pénitentiaires établi par l'administration pénitentiaire et l'effectif réel. Je vous avais écrit à ce sujet le 10 mai 2005 : le déficit était alors de dix-huit agents.
Le quartier des femmes en particulier manque cruellement de surveillantes, alors que le bâtiment est hors de l'enceinte de Nuutania. Il n'y aurait pas assez de détenues pour faire un roulement de deux surveillantes, comme en métropole. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste.)
M. Yannick Bodin. Allez, un petit effort !
M. René-Pierre Signé. Oui, il faut plus de femmes en prison !
M. Gaston Flosse. Aujourd'hui, les représentants syndicaux sont prêts à se mobiliser fortement si aucun geste n'est fait en leur faveur et si la prise de conscience de l'urgence de la situation n'est pas affichée clairement.
Mme Raymonde Le Texier. Quatre minutes !
M. Gaston Flosse. Cette mobilisation pourrait être de surcroît relayée par la population, très inquiète de l'impossibilité matérielle d'appliquer les peines d'emprisonnement prononcées à l'encontre d'environ 200 condamnés qui sont donc aujourd'hui en liberté. C'est intolérable !
M. le président. Veuillez poser votre question, mon cher collègue.
M. Gaston Flosse. Monsieur le garde des sceaux, allez-vous enfin répondre à ces alertes et prendre les décisions qui s'imposent ? Combien faudra-t-il de demandes pour que nous soyons écoutés et que nous obtenions des réponses concrètes ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur Flosse, je connais personnellement la prison de Faa'a, dont vous venez de décrire la situation avec précision.
M. Didier Boulaud. Et émotion !
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Sachez que je partage votre émotion quant à la surpopulation considérable de cet établissement.
Lorsque je l'avais visité, voilà deux ans, je m'étais demandé comment on avait pu laisser subsister un établissement dans cet état pendant si longtemps.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Et cela n'a pas changé !
M. Pascal Clément, garde des sceaux. J'ai demandé aux pouvoirs publics de proposer à la chancellerie un terrain susceptible d'accueillir un second établissement pénitentiaire. Mais il est vrai que le foncier est difficile à trouver, en particulier sur l'île de Tahiti. Faute d'avoir pu trouver un terrain disponible, nous avons décidé d'augmenter de cent places les capacités d'accueil de l'actuel centre pénitentiaire de Faa'a.
Pourquoi seulement cent places ? Tout simplement parce que le terrain sur lequel est implanté le centre de détention, bien que très vaste, a une forte déclivité, ce qui nous interdit de construire plus de cent places. Il s'agit là d'un vrai problème.
La Polynésie compte deux autres maisons d'arrêt : la première, très modeste, de quelques places seulement, aux îles Marquises, et la seconde, sur l'archipel de la Société, comportant vingt places.
La situation n'en demeure pas moins très difficile.
Au-delà, et en attendant la construction de ces cent places ainsi que d'un centre de semi-liberté de trente places, j'ai demandé à la protection judiciaire de la jeunesse de bien vouloir examiner l'hypothèse de la construction d'un centre éducatif fermé pour les mineurs. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe CRC.) Je pense que cela est de nature à remédier au problème qui se pose avec gravité en Polynésie française.
J'ajoute enfin que, s'agissant des personnels, dans le projet de budget que j'aurai l'honneur de présenter au Sénat dans quelques semaines, 700 postes nets seront inscrits pour l'administration pénitentiaire. Cela permettra de renforcer les effectifs, aujourd'hui insuffisants, du centre pénitentiaire de Faa'a en Polynésie française. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
privatisation de gdf
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à l'industrie.
Alors que l'Assemblée nationale vient tout juste de se prononcer sur le projet de loi visant notamment à privatiser Gaz de France (Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE), voilà que le Sénat, sans délai et au pas de charge, est à son tour invité à légiférer.
Mme Janine Rozier. Au pas de charge ?
M. Roland Courteau. Pourquoi une telle obsession à vouloir à toute force privatiser GDF, alors que les nouveaux défis justifient l'accroissement de l'intervention des pouvoirs publics pour assurer le contrôle de l'énergie ?
Pourquoi un tel acharnement à démolir les fondements mêmes de notre service public de l'énergie qui, pourtant, a fait la preuve de son efficacité ?
M. René-Pierre Signé. Par idéologie !
M. Roland Courteau. N'eût-il pas été plus responsable, en cette fin de législature et sur un dossier aussi essentiel et aussi lourd de conséquences, de renvoyer une telle décision au vote des Français lors des élections de 2007 ?
M. René-Pierre Signé. Voilà !
M. Roland Courteau. Mais peut-être avez-vous peur de leur jugement ?
Quelle funeste erreur que de favoriser la transformation d'un monopole public en un monopole privé, pour le plus grand bénéfice de quelques actionnaires, alors que d'autres solutions existent !
Quelle faute majeure que d'abandonner les Français à la jungle des tarifs les plus fous...
M. René-Pierre Signé. Ça, ils vont payer !
M. Roland Courteau. ... à travers un projet de loi de complaisance à l'égard du marché et de négligence envers l'avenir ! Votre responsabilité sera écrasante, car on ne joue pas au Monopoly avec les entreprises publiques.
M. Jean-Jacques Hyest. Pour ça, vous pouvez parler !
M. Alain Gournac. Vous l'avez fait !
M. Roland Courteau. La morale ne s'y retrouve pas davantage et le Gouvernement, qui avait engagé sa parole, en sort décrédibilisée.
En effet, M. Sarkozy, voilà à peine quelques mois, affirmait que : « Compte tenu de leur caractère déterminant pour les intérêts vitaux de la France en termes de sécurité d'approvisionnement et de sécurité nucléaire, l'État conservera une part majoritaire du capital des entreprises EDF et GDF. »
M. Robert Hue. Bravo !
M. Roland Courteau. Et M. Sarkozy poursuivait en ces termes : « Je l'affirme parce que c'est un engagement du Gouvernement : EDF et GDF ne seront pas privatisés. » (M. Boulaud pointe le pouce vers le bas.)
M. René-Pierre Signé. Il l'affirme !
M. Roland Courteau. Et M. Sarkozy concluait en ces termes : « Ce qui nous garantit que la loi ne permettra pas de privatiser ultérieurement, c'est la parole de l'État ! » (M. Boulaud s'esclaffe !)
D'où ma question : monsieur le Premier ministre, que vaut la parole de l'État par les temps qui courent ?
M. Didier Boulaud. Rien !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Zéro !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. René-Pierre Signé. Bien embarrassé pour répondre !
M. Didier Boulaud. Pourtant, la question est embarrassante !
M. François Loos, ministre délégué. C'est nous qui avons adopté une attitude responsable en déposant sans attendre le projet de loi relatif au secteur de l'énergie.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est qui « nous » ?
M. François Loos, ministre délégué. C'est nous qui prenons nos responsabilités.
Si nous n'avions rien fait, la directive européenne sur l'ouverture des marchés se serait appliquée automatiquement au 1er juillet 2007, ce qui aurait eu pour effet de supprimer les tarifs régulés dans notre pays.
M. Ladislas Poniatowski. Absolument !
M. Alain Gournac. Eh oui !
M. François Loos, ministre délégué. Monsieur Courteau, c'est parce que nous voulons maintenir l'intervention de l'État et les tarifs régulés, parce que nous savons que c'est fondamental pour les consommateurs français et pour l'économie de notre pays que nous sommes obligés de transposer la directive européenne avant la fin de l'année. Ainsi, au 1er juillet 2007, ...
M. Didier Boulaud. Nous serons revenus aux affaires !
M. René-Pierre Signé. Préparez vos vacances !
M. François Loos, ministre délégué. ... les consommateurs français pourront conserver les tarifs régulés qui, vous le savez, sont particulièrement intéressants, dans l'absolu et par rapport à ceux qui sont pratiqués dans les autres pays européens.
M. Guy Fischer. On en reparlera !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela fera long feu !
M. François Loos, ministre délégué. Par ailleurs, vous aurez sans doute observé que, depuis 2004, les prix du pétrole et du gaz ont été multipliés par 2,5.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est pour cette raison que vous privatisez !
M. François Loos, ministre délégué. Face à de très grands vendeurs qui possèdent de très importantes réserves, ...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce sont des États !
M. François Loos, ministre délégué. ...ce qui compte, c'est la capacité des entreprises à acheter sur le long terme, à investir dans des gisements, à acquérir elles-mêmes des ressources. Or Gaz de France ne possédant pas de gisement a besoin d'acquérir une taille plus importante.
Aujourd'hui, Gaz de France détient des réseaux de distribution et des fichiers de clients.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il fallait décider la fusion de EDF avec GDF. Que vient faire Suez là-dedans ?
M. François Loos, ministre délégué. Aujourd'hui, il nous faut donner à Gaz de France une dimension internationale. À cette fin, nous devons la doter des moyens nécessaires et d'une taille appropriée. C'est la raison pour laquelle nous avons préféré ouvrir le capital de Gaz de France plutôt que de demander à l'entreprise de s'endetter pour faire face à cette situation.
Alors, mesdames, messieurs les sénateurs, qui a raison en termes de calendrier ? Qui prend ses responsabilités ? C'est nous ! (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. René-Pierre Signé. C'est la méthode Coué !
M. Yannick Bodin. C'est surtout la condamnation de Sarkozy !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela fera onze millions d'abonnés de GDF pour les actionnaires de Suez. Vous n'êtes pas convaincant, monsieur le ministre !
M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche.
En mars dernier, le Sénat a adopté en première lecture le projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés.
Ce texte avait deux objectifs principaux : le premier était de nous mettre en conformité avec les directives européennes de 1998 et de 2001, dont la transposition tardive fait peser sur notre pays la menace d'une astreinte de 168 000 euros par jour de retard ; le second était de doter la France d'un cadre législatif pour encadrer la recherche et la nécessaire expérimentation sur les OGM.
Le Gouvernement s'était alors engagé à « traiter enfin une question trop longtemps laissée en jachère sous d'autres législatures ». Pourtant, compte tenu de l'encombrement du calendrier parlementaire et de la suspension des travaux du Parlement dès la mi-février 2007 du fait des prochaines échéances électorales, ce texte semble désormais reporté sine die. La réglementation des OGM n'est donc plus une priorité du Gouvernement.
Dans le même temps, des commandos anti-OGM ont continué à sévir partout en France cet été.
M. Rémy Pointereau. Ce n'est pas normal !
M. Jean-Jacques Hyest. Non, en effet !
M. Yves Détraigne. De la Moselle à la Haute-Garonne, du Tarn au Puy-de-Dôme, du Loiret à l'Eure-et-Loir, ce sont près de 65 % des essais de culture d'OGM - pourtant réalisés dans la plus totale légalité - qui ont été saccagés au nom du fameux principe de précaution.
M. René-Pierre Signé. Le principe de précaution ? Mais c'est Jacques Chirac !
M. Yves Détraigne. Le scénario est toujours le même : les faucheurs agissent sans véritable opposition des forces de l'ordre. Quelques-uns des meneurs sont ensuite interpellés par la gendarmerie et passent une ou deux nuits en garde à vue, ce qui donne d'ailleurs l'occasion à leurs sympathisants de manifester publiquement leur indignation.
Remis en liberté, ils peuvent recommencer leurs actes de vandalisme, assurés de la noblesse de leur cause par des décisions de justice malheureusement imprévisibles : parfois des peines d'emprisonnement, parfois des amendes ou des dédommagements, parfois aussi des décisions favorables aux faucheurs au motif qu'il y aurait « état de nécessité ».
M. Didier Boulaud. Mais que fait le garde des sceaux ?
M. Yves Détraigne. Monsieur le ministre délégué, l'esprit de désobéissance civile dont se targuent ces individus...
M. Roland Muzeau. Ces individus sont des citoyens !
M. Yves Détraigne. ... ne doit pas devenir la règle.
M. Rémy Pointereau. Très bien !
M. Yves Détraigne. La France va-t-elle oui ou non se décider à réglementer enfin la culture des OGM de sorte que la règle soit la même pour tout le monde et que notre pays cesse de prendre du retard ou bien le Gouvernement préfère-t-il laisser perdurer l'incertitude dans laquelle nous sommes depuis plusieurs années et qui finit par donner le sentiment que notre pays ne sait pas ce qu'il veut ? (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Goulard, ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche. Monsieur le sénateur, les actions violentes qui ont été menées sont évidemment condamnables car leurs auteurs enfreignent la loi. Il n'en demeure pas moins, et je vous rejoins sur ce point, que nous sommes contraints de revoir notre législation, parce que c'est nécessaire et parce que nous devons transposer deux directives européennes.
Comme vous l'avez rappelé, le Sénat a commencé à travailler sur ce sujet. Ses travaux, d'une grande qualité, notamment les longs débats qui ont eu lieu, sans idéologie, avec l'ensemble des groupes, ont permis d'améliorer le projet de loi qui a été déposé.
Ce texte, je le rappelle, met en oeuvre le principe constitutionnel de précaution, ce qui était évidemment nécessaire. Nous devons en effet nous préoccuper, s'agissant d'espèces nouvelles, des conséquences éventuelles sur l'environnement et sur la santé humaine. Parallèlement, il permettra à notre pays de bénéficier des progrès considérables permis par les OGM, à condition de respecter le principe de précaution.
Je rappelle que notre pays est à la fois une grande puissance agricole, comme chacun le sait, mais aussi une grande puissance scientifique dans le domaine de le l'agronomie. Le Premier ministre a d'ailleurs annoncé hier la constitution d'un réseau thématique de recherche avancée en agronomie, dont le centre sera situé à Montpellier.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est formidable !
M. François Goulard, ministre délégué. Par conséquent, l'examen de ce texte devra naturellement se poursuivre. Dès que le calendrier parlementaire le permettra - vous avez rappelé, monsieur le sénateur, qu'il est très chargé -, le projet de loi sera examiné par l'Assemblée nationale. Et je forme le voeu - mais je suis sûr d'être exaucé ! - que les débats qui se dérouleront à l'Assemblée nationale seront aussi riches que ceux qui ont eu lieu dans cet hémicycle.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Quand ?
M. François Goulard, ministre délégué. Une législation rénovée et conforme aux directives européennes est nécessaire dans ce domaine, qui est, à de nombreux points de vue, extrêmement important pour notre pays. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Mes chers collègues, nous venons d'écouter M. le ministre délégué dans la sérénité. Je suis certain que ceux qui nous regardent ont apprécié. Bravo et merci à tous ! (Sourires.)