compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE M. Guy Fischer
vice-président
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PROCÈS-VERBAL
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
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Décès d'un ancien sénateur
M. le président. J'ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Jean Colin, qui fut sénateur de l'Essonne de 1968 à 1988.
3
Questions orales
M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.
situation du service public de la poste à paris
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, auteur de la question n° 1018, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur la dégradation de la qualité du service public rendu par la Poste, en particulier dans mon département, à Paris.
Depuis 2002, date de l'adoption de la directive européenne modifiant les modalités de l'ouverture à la concurrence des services postaux de la Communauté, des restructurations des activités postales ont été progressivement mises en place par La Poste sur le territoire national. La promulgation de la loi du 20 mai 2005 relative à la régulation des activités postales accélère ce processus avec la perspective d'une ouverture totale du marché envisagée pour 2009.
La concurrence acharnée à laquelle se livrent désormais La Poste et ses concurrents néerlandais et allemands se fait principalement au détriment du service public pour les usagers et les agents ; c'est le cas à Paris.
Après les fermetures de centres de tri dans plusieurs arrondissements - ce qui entraîne diverses conséquences, notamment en termes de transports -, la suppression de la deuxième tournée dans la capitale, la baisse constante du nombre d'agents aux guichets, il serait envisagé pour 2006 des centaines de suppressions d'emplois à La Poste de Paris, dont 300 postes de guichetiers supplémentaires.
Une telle mesure va une nouvelle fois imposer aux Parisiens des conditions d'accès fortement dégradées dans les bureaux de La Poste avec des attentes prolongées ne pouvant qu'exaspérer davantage les usagers et engendrer des conflits avec les agents qui, eux aussi, subissent une dégradation de leurs conditions de travail.
À cette dernière mesure s'ajoute le projet de modifier ou de réduire l'amplitude des horaires d'ouverture des bureaux de poste.
Cette question ayant déjà été posée précédemment, il a bien évidemment été répondu qu'il n'en était pas question. Si, il en est question ! Car, aujourd'hui, dans les quartiers populaires, on constate que les agents sont en nombre nettement insuffisant pour faire face aux nécessités du service public.
J'aimerais donc, madame la ministre, obtenir de votre part une réponse sur le maintien de la qualité du service public dans la capitale.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur. Madame la sénatrice, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence de M. François Loos, qui est actuellement en Algérie pour traiter des problèmes concernant des contrats de gaz.
L'ouverture à la concurrence des services postaux constitue un défi majeur auquel doit répondre La Poste pour les années à venir. Aussi doit-elle, d'ores et déjà, dessiner progressivement ce que sera la poste de demain, un service moderne et performant. Par ailleurs, La Poste doit adapter sa performance aux rythmes de la vie contemporaine et à la demande de ses clients.
C'est pourquoi le réseau des bureaux de poste entame une refonte rapide et profonde de sa stratégie en faisant place à la dynamique commerciale, à la relation client et à la convivialité de l'espace d'accueil.
Dans ce cadre et depuis longtemps, La Poste analyse de très près le phénomène des files d'attente en bureau de poste et s'efforce de le maîtriser : celui-ci est propre aux très grandes villes, il est cyclique, notamment à l'occasion du paiement des prestations sociales en début de mois et il est lié aux modes de vie puisque l'on observe une forte fréquentation des bureaux de poste en début et en fin de journée ainsi qu'en fin de matinée le samedi.
La Poste a décidé d'y apporter une réponse dans le cadre de son projet « Cap Relation Client », mis en oeuvre depuis 2005 et dont les premières réalisations donnent des résultats encourageants, selon les observations de postiers eux-mêmes.
À cette fin, un nouveau concept a été développé, le « bureau du futur », qui repose sur une répartition des clients par le responsable de l'accueil, en fonction des attentes différenciées des clients. Ainsi, les services aux clients s'organisent autour de l'espace conseil dédié aux services financiers, de l'espace guichet, des espaces libre-service et de l'espace boutique pour des achats qui peuvent souvent d'ailleurs être effectués en libre-service. Le temps d'attente est réduit et connu de l'utilisateur lorsqu'il se présente.
La grande nouveauté est la création d'un « espace accueil » situé à l'entrée du bureau afin d'orienter l'usager vers l'espace qui correspond à sa démarche. En effet, dans de nombreux cas, les demandes peuvent être traitées en dehors des guichets et les clients peuvent accéder en libre-service à toute une gamme de produits : philatélie, emballages colis, carterie, papeterie, objets de correspondance, livres et petits cadeaux liés à l'univers postal.
Cette nouvelle organisation des flux, qui donne déjà des résultats notables dans les bureaux situés place de Clichy, place de la Bourse et, bientôt, à École Militaire, revient effectivement à réorienter des emplois de guichet vers ces nouvelles fonctions d'accueil. Ainsi, en 2006 et 2007, près de 100 postes de responsables d'accueil et 130 postes de gestionnaires de clientèle vont être créés à Paris et seront par conséquent pourvus par des personnes actuellement affectées à des activités de guichet.
Par ailleurs, parallèlement à ce redéploiement des positions, La Poste développe de nouveaux services à ses clients : deuxième présentation des colis en cas d'absence du destinataire ; test de « Cityssimo » des consignes automatiques dédiées au retrait des colis ; développement de cartes de retrait adaptées aux bénéficiaires de minima sociaux ; accroissement du parc d'automates et de services en ligne.
Toutes ces actions commencent à porter leurs fruits. Dans les bureaux pionniers, le temps d'attente a été réduit de 25%.
La poursuite du programme « Cap Relation Client » permettra d'aller plus loin encore.
Le projet de La Poste est d'offrir à ses clients un service adapté à leurs besoins, simple d'accès et modernisé.
Mon collègue François Loos, ministre chargé des postes, suit avec une très grande attention les grands projets de réorganisation de La Poste, qui, tout en se modernisant, doit continuer à rester au service de l'ensemble de la population. C'est d'ailleurs la mission qui a été assignée à cet établissement public, en tant que prestataire en charge du service universel par la loi de régulation des activités postales du 20 mai 2005.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Madame la ministre, je vous remercie des éléments de réponse que vous venez de m'apporter.
J'ai moi-même constaté les transformations des bureaux de poste. Toutefois, si la réorganisation et la mise en place des agents d'accueil sont utiles, le redéploiement des postes s'est fait au détriment des guichetiers.
Dans les quartiers les plus populaires, ces mesures sont à l'heure actuelle inadaptées. Les files d'attente sont très longues, les usagers en ont assez et s'en prennent aux agents,...
Mme Hélène Luc. C'est vrai !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. ... ce qui est aberrant, à tel point que l'on finit par se demander si ce n'est pas le but recherché afin de justifier l'accélération du processus de privatisation de La Poste. Les usagers s'en prennent au service public alors que celui-ci doit être à leur disposition !
Mme Hélène Luc. Absolument !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Des pétitions ont été déposées qui ont recueilli des milliers de signatures. Le Conseil de Paris s'est prononcé en majorité pour le maintien de la qualité du service public de La Poste. Les expériences menées dans les bureaux situés place de Clichy, place de la Bourse ou à École militaire, ne doivent pas faire oublier les situations insupportables que vivent les gens dans les XVIIIe, XIXe ou XXe arrondissements, qui doivent faire la queue le matin, le soir et le samedi.
Évidemment, personne n'est opposé à une modernisation, à une réorientation des bureaux de poste et à l'amélioration de l'accueil des usagers - je préfère ce mot à celui de clients - mais cela ne peut pas se faire au détriment des guichetiers qui remplissent des fonctions indispensables et font défaut aujourd'hui. Il faut donc en tenir compte. La politique de concurrence de La Poste ne doit pas se faire principalement au détriment de la qualité du service public rendu aux usagers.
situation de l'établissement de l'imprimerie nationale à choisy-le-roi
M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc, auteur de la question n° 1021, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Mme Hélène Luc. Madame la ministre, je regrette que, bien qu'il m'ait prévenue, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, M. Breton, n'ait pu être présent. Je pense que vous êtes tout à fait habilitée à me donner une réponse, pourvu qu'elle soit positive.
L'Imprimerie nationale, institution séculaire créée par le cardinal de Richelieu en 1640, est gravement menacée dans sa pérennité. Pourtant, elle a fait preuve d'un savoir-faire indiscutable, qui lui vaut une réputation allant bien au-delà de nos frontières, qu'il s'agisse de l'imprimerie ou de son atelier artistique, mémoire du travail effectué depuis plusieurs centaines d'années et que les salariés veulent transmettre.
Depuis plus de deux ans, malgré les engagements pris auprès des salariés, des autorités de la direction générale de la concurrence de la Commission de Bruxelles et de la profession, à la suite de sa recapitalisation par des fonds publics, l'Imprimerie nationale est progressivement démantelée.
Ce démantèlement s'est déjà traduit par la vente de ses imprimeries rotatives de Bondoufle et de Strasbourg, ainsi que de ses activités « Édition technique » et « Beaux-livres », et par la cession de ses services de logistique et de vente par correspondance implantés à Douai.
Ce démantèlement prend la forme d'arrêts d'activités, de restructurations ou de filialisations et résulte de décisions financières, industrielles et politiques qui ont des conséquences sociales intolérables.
En 1993, 1900 salariés travaillaient à l'Imprimerie nationale dans le XVè arrondissement à Paris. En 2003, après un premier plan social, ils n'étaient plus que 1450 ; en 2005, après un second plan social, il restait 550 personnes. Aujourd'hui, l'annonce de la cession de Choisy-le-Roi réduirait à nouveau de 120 personnes les effectifs de l'entreprise !
L'avenir de l'établissement de Douai n'est nullement assuré puisque, malgré la décision du Conseil d'État de lui confier la fabrication et la personnalisation des passeports biométriques, ce marché ne lui a été attribué par convention que pour huit mois, alors que des résultats remarquables ont pourtant été obtenus pour la qualité, le prix de revient et le temps de réalisation de ces passeports. Madame la ministre, voilà la preuve du savoir-faire de l'Imprimerie nationale, voilà pourquoi il faut le conserver à tout prix !
La vente de l'établissement de Choisy-le-Roi à une société privée signifierait le démantèlement complet de l'Imprimerie nationale alors qu'elle appartient au patrimoine industriel et culturel de la France Le déménagement du XVè arrondissement vers Choisy-le-Roi n'aurait été qu'un leurre, alors qu'il devait être un nouveau départ !
Ce serait un véritable gâchis économique, culturel et social.
Gâchis économique, tout d'abord, puisqu'il serait la conséquence d'un désengagement de l'État, détenteur de 100 % du capital de l'entreprise, sur un site dont l'installation a été largement financée par l'argent public de l'État, de la région, du département et de la ville de Choisy-le-Roi. En outre, ce site étant implanté dans l'une des zones franches supplémentaires créées par le projet de loi pour l'égalité des chances et voulues par le Premier ministre, il serait incohérent que l'État disparaisse ainsi d'un territoire de développement prioritaire.
Gâchis culturel, ensuite, de par la perte de mémoire ; gâchis social, enfin, puisqu'un accord d'entreprise avait fixé à l'année 2008 le bilan des restructurations qui se sont traduites par la suppression de 900 emplois au niveau du groupe. Cet accord et l'échéancier annoncé doivent être respectés pour permettre le déploiement des stratégies industrielles et commerciales prévues.
Madame la ministre, il est hors de question d'accepter la vente du site de Choisy-le-Roi, car tout nouveau plan social compromettrait irrémédiablement l'avenir de l'ensemble du groupe !
Dans cette affaire, la responsabilité de l'État est entièrement engagée, car il n'a pas joué son rôle, directement ou par l'entremise du secteur public, et n'a pas assuré une charge de travail suffisante à l'imprimerie de Choisy-le-Roi.
C'est ainsi que, par exemple, depuis la décision de France Télécom de ne plus lui confier l'impression de ses annuaires, le chiffre d'affaires de l'entreprise ne cesse de diminuer, son département « sujets d'examens et de concours » ne pouvant, à lui seul, suffire à pallier ce manque. D'autres commandes, comme la note Évaluation de l'Éducation nationale ou les imprimés d'autres ministères, lui ont également fait défaut.
À quoi donc servirait une imprimerie nationale, si l'État ne se réserve pas un certain nombre de travaux, en premier lieu les documents sécurisés, à l'instar de ce qui se fait dans d'autres pays européens ?
Madame la ministre, je vous demande donc de bien vouloir m'informer des mesures que vous avez l'intention de prendre pour contribuer à assurer une charge de travail suffisante aux établissements de Douai et Choisy-le-Roi, et empêcher la vente de Choisy-le-Roi. Quelles mesures comptez-vous prendre, avec le ministre de la culture, pour reloger et faire fonctionner l'atelier d'art, provisoirement abrité dans un entrepôt à Ivry-sur-Seine ?
Ce sont les conditions essentielles pour garantir le statut de l'Imprimerie nationale et préserver sa mission de service public.
M. le président. Madame Luc, compte tenu de l'importance du problème, je vous ai laissé dépasser votre temps de parole avec une grande générosité.
Mme Hélène Luc. Je vous en remercie, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur. Madame la sénatrice, si mon habilitation à vous répondre dépend de la nature de ma réponse, je m'interroge... Je puis vous assurer, en tout cas, du regret de M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, de ne pouvoir être présent ce matin pour vous répondre.
À la suite de déficits grandissants depuis la fin des années 1990 et de la perte du marché des annuaires téléphoniques en 2002, l'Imprimerie nationale a dû faire face à la nécessité d'un plan de restructuration d'une grande ampleur, en même temps qu'au besoin d'une très forte recapitalisation.
Cette dernière a été acceptée par la Commission européenne, à hauteur de 197 millions d'euros, moyennant un très fort recentrage de l'entreprise sur les métiers les plus liés aux fonctions de souveraineté de l'État français : passeports, cartes d'identité, permis de conduire, cartes grises, notamment, tous ces documents étant désormais réalisés sur le site de Douai. Dans le cadre de ce plan, l'activité « offset feuilles », jusque-là exercée sur le site historique de Paris, a été transférée sur le nouveau site de Choisy-le-Roi au printemps 2005.
Je sais quelle a été l'implication des élus de la commune de Choisy-le-Roi et du département du Val-de-Marne pour convaincre l'Imprimerie nationale d'implanter à Choisy-le-Roi ses activités d'imprimerie « offset feuilles » et de sujets de concours, même si ces dernières, dans le plan présenté à la Commission européenne, ne faisaient pas partie du coeur de cible de l'entreprise.
J'ai conscience aussi des inquiétudes que peut nourrir actuellement le projet de cession de cette usine à un repreneur privé.
Il est fondamental, aujourd'hui, de souligner que, si le soutien de 197 millions d'euros accordé par l'État à l'Imprimerie nationale l'a été dans le strict respect de la réglementation communautaire, l'État ne peut plus aujourd'hui verser de dotation complémentaire à l'entreprise. La situation de l'Imprimerie nationale dans sa globalité demeurant très fragile, celle-ci ne peut, sans mettre sa survie en péril, conserver des activités qui, à la fois, ne relèvent pas de son coeur de métier et constituent des foyers de pertes récurrents. Le maintien de la feuille au sein des activités de l'Imprimerie Nationale dépendait donc de son retour à l'équilibre.
Or, les résultats de ces deux dernières années sont largement déficitaires, et les projections financières pour les prochains exercices ne permettent pas d'anticiper une évolution suffisamment favorable. À ce titre, il est important de souligner que le secteur de la feuille est malheureusement, comme celui de la rotative, un secteur en difficulté, où l'État ne peut pas garantir une charge de travail, compte tenu du caractère concurrentiel de cette activité.
Désormais, il me paraît important de noter que la cession de la feuille ne signifie en aucun cas que cette activité soit destinée à disparaître. Bien au contraire, l'objectif de l'entreprise est de céder cette activité à un partenaire industriel plus à même que l'Imprimerie nationale de réussir sa consolidation et son développement, et qui soit déterminé à assurer sa pérennité sur le site de Choisy-le-Roi.
Je puis vous assurer que l'État, en tant qu'actionnaire de l'Imprimerie nationale, sera très attentif au projet industriel du repreneur et aux perspectives qu'il offrira à la division et à l'ensemble de ses salariés.
M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc.
Mme Hélène Luc. Madame la ministre, les propos que vous venez de tenir au nom de M. Breton ne me rassurent pas, je dois l'avouer franchement.
Après notre entrevue au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie avec le directeur adjoint de cabinet de M. Breton, nous espérions que vous nous feriez des propositions. Nous attendions l'annonce d'un effort commercial de la part du directeur de l'Imprimerie nationale. En effet, les commerciaux qui auraient dû être embauchés lors du déménagement du xvè arrondissement vers Choisy-le-Roi ne viennent que de l'être et n'ont donc pas été en mesure de créer les conditions pour que l'entreprise tourne à plein.
Nous ne voulons pas entendre parler d'un repreneur privé dans les conditions que vous avez mentionnées.
Dans les tribunes et devant le Sénat, des délégations de salariés de Choisy-le-Roi, de Douai et d'Ivry-sur-Seine attendent des réponses qui prouvent que l'engagement du Gouvernement à oeuvrer pour sauver l'Imprimerie nationale sera suivi d'actes concrets, comme l'a dit le directeur adjoint du cabinet de M. Breton lors de sa rencontre avec M. Daniel Davisse, maire de Choisy-le-Roi, et moi-même.
Or, tel n'est pas le cas aujourd'hui. La vente de l'imprimerie, dans les conditions envisagées par le directeur, n'apporte pas de réponse aux questions posées. La population de Choisy-le-Roi vit cette situation comme une tromperie et un gâchis inexcusable.
Des décisions commerciales urgentes et énergiques doivent être prises et, en même temps, l'État doit faire face à ses engagements. Nul doute que le personnel saura se montrer à la hauteur des exigences, comme il a su le prouver dans la confection des passeports biométriques.
Madame la ministre, comme nous l'avons déjà dit, avec le maire de Choisy-le-Roi, Daniel Davisse, le président du conseil général du Val-de-Marne, Christian Favier, nous sommes décidés à mener ce combat jusqu'au bout, aux côtés des salariés et de la population de Choisy-le-Roi et de Douai.
Plus de 4 000 pétitions ont déjà été signées et un conseil municipal ouvert à la population se tiendra le jeudi 11 mai pour renforcer la mobilisation, car le temps presse, il n'y a plus un seul jour à perdre ! Nous attendons le rendez-vous promis par M. le ministre dans quelques jours, afin de décider des mesures à prendre en fonction des solutions que propose le Gouvernement.
difficultés financières des syndicats de bassin
M. le président. La parole est à M. Simon Sutour, auteur de la question n° 1031, adressée à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
M. Simon Sutour. Madame la ministre, le bassin Rhône Méditerranée et, en particulier, le département du Gard sont caractérisés par l'existence de « structures de gestion concertée par bassin versant ». Ces dernières couvrent environ 70 % du territoire du bassin et la totalité du département du Gard.
Dans mon département, un effort constant depuis plus de quinze ans - largement encouragé par l'État et l'agence de bassin Rhône Méditerranée et relayé par le conseil général -permet aujourd'hui à l'action publique de s'appuyer sur huit « structures de gestion concertée par bassin versant » et une mutuelle départementale de financement qui réunissent les caractéristiques suivantes : territoire d'intervention cohérent au plan hydrologique, instances de décisions regroupant la quasi-totalité des collectivités locales, existence de services techniques et administratifs, autofinancement solidaire, actions en faveur de la gestion et de la préservation des ressources en eau.
Ces structures sont aujourd'hui un élément essentiel pour faire face au défi qu'impose la directive cadre de l'Union européenne concernant la bonne qualité des cours d'eau à l'horizon 2015. Elles sont à une période charnière de leur existence et doivent désormais consolider leur fonctionnement pour être à même de répondre aux nombreuses et légitimes attentes des collectivités et des habitants, traumatisés par les dernières inondations de 2002 et 2005.
Le risque réside dans un potentiel désengagement des collectivités locales, laissant à l'État et aux agences de bassin le soin d'assumer seuls ce domaine de compétences.
La question centrale qui se pose aujourd'hui, pour ces structures, est donc bien celle de la pérennisation de leurs moyens d'action. Le développement de ressources pérennes, a minima pour couvrir les frais de fonctionnement, semble nécessaire.
L'agence de bassin est sollicitée, dans le cadre de la mise en oeuvre de son neuvième programme, pour garantir un soutien fort et durable à ces structures, mobilisant ainsi une solidarité territoriale élargie, incontestablement nécessaire.
Toutefois, cela ne saurait suffire, et un dispositif complémentaire de ressources propres des structures doit être mis en place. Cependant, une redevance « pour service rendu », telle qu'en prévoit le projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques, n'est pas adaptée à certains cas.
Tout d'abord, une telle redevance est plutôt réservée au financement d'investissements, et non à la couverture de dépenses de fonctionnement.
Ensuite, elle est juridiquement fragile du fait de la grande difficulté qu'il y a à identifier précisément le « service rendu » pour asseoir le montant de la redevance en proportion de ce service.
Enfin, seuls les établissements publics territoriaux de bassin, les EPTB, pourraient prélever cette redevance. Pourtant, il existe, sur de nombreux territoires hydrologiques pertinents, des structures tout à fait légitimes, répondant à tous les critères garantissant une action publique adaptée mais ne pouvant accéder au statut d'EPTB. De ce fait, elles se verraient interdire le bénéfice de cette ressource financière propre.
Pour autant, ce dispositif est, dans son principe, intéressant, à condition qu'il puisse être ouvert à toutes les structures de gestion concertée et donner droit à la perception de redevances autres que celles « pour service rendu ».
Pour ce faire, il serait donc nécessaire d'introduire la possibilité d'instaurer une redevance qui serait perçue par l'agence de bassin sur le territoire concerné et reversée à la structure l'ayant mise en place, et de prévoir que des collectivités locales ou des groupements de collectivités locales autres que des EPTB puissent instituer et percevoir cette redevance. Sur ce dernier point, une seconde solution consisterait à ouvrir le statut d'EPTB à d'autres structures que les seuls syndicats mixtes fermés.
C'est pourquoi je vous demande, madame la ministre, si le Gouvernement compte donner la possibilité aux structures de bassin d'instaurer une redevance autre que « pour service rendu », afin d'assurer la pérennité de leur financement et de leurs indispensables actions dans le cadre de la prévention des inondations et de la préservation des ressources en eau à l'horizon 2015, comme le prévoit la directive cadre de l'Union européenne.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur. Monsieur le sénateur, permettez-moi tout d'abord d'excuser l'absence de ma collègue Nelly Olin, qui aurait souhaité vous répondre directement, mais se trouve actuellement retenue par la préparation du projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques.
M. Simon Sutour. Je pensais qu'il s'agissait des ours ! (Sourires.)
Mme Christine Lagarde, ministre déléguée. Elle s'occupe des ours et des eaux !
Mme la ministre de l'écologie et du développement durable est très consciente de l'importance du rôle joué par les syndicats de bassin versant dans la gestion équilibrée des cours d'eau et soutient vivement leur création.
L'article L. 213-10 du code de l'environnement, qui instaure officiellement ce type de structures dénommées « établissements publics territoriaux de bassin », limite leur création aux institutions interdépartementales et aux syndicats mixtes dits « ouverts », dépassant le seul échelon intercommunal.
Cette exclusion des groupements constitués uniquement de communes et de groupements intercommunaux s'est justifiée par le rôle essentiellement coordonnateur, à l'échelle d'un grand bassin, que le législateur a voulu donner aux EPTB, de façon à les distinguer, précisément, des syndicats de rivière, plus locaux et maîtres d'ouvrage des travaux.
Il s'avère finalement, à l'expérience, que cette exclusion entrave inutilement certains groupements intercommunaux couvrant un bassin hydrographique cohérent et sur lequel aucune autre structure plus large ne semble devoir se former.
Pour résoudre cette question, la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire de l'Assemblée nationale a adopté une proposition d'amendement au projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques, que le Gouvernement soutiendra, tendant à ouvrir les EPTB aux syndicats mixtes fermés.
Cet élargissement des EPTB à tout type de groupements est toutefois sans rapport avec la possibilité d'instituer une redevance pour service rendu en application de l'article L. 211-7 du code de l'environnement. Tous types de groupements de collectivités territoriales peuvent d'ores et déjà faire application de cette redevance. Seule l'utilisation des moyens de perception des agences de l'eau est réservée aux EPTB par l'actuel article 35 du projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques. Si le projet d'amendement précité est adopté, cette possibilité sera ouverte aux syndicats mixtes fermés s'étant fait reconnaître officiellement comme EPTB.
Cette redevance est insuffisamment utilisée. La complexité de sa mise en place réside surtout dans le fait que peu d'exemples existent qui permettraient d'encourager cette dernière et de la rendre systématique. Elle est pourtant l'un des meilleurs moyens existants pour financer certains travaux pris en charge volontairement par les collectivités territoriales au nom de l'intérêt général local.
M. le président. La parole est à M. Simon Sutour.
M. Simon Sutour. J'avais posé cette question à la suite d'une réunion avec des représentants de l'ensemble des structures de bassin de mon département. Je constate que leurs préoccupations ont été relayées par d'autres parlementaires, le problème ayant dû se présenter dans d'autres zones du territoire national que le département du Gard.
Votre réponse marque une avancée, madame la ministre. Le débat à l'Assemblée nationale montrera si nos collègues députés entendent aller dans ce sens. En tout cas, le texte sera examiné au Sénat au mois de juin, me semble-t-il, et nous serons alors un certain nombre à faire preuve de vigilance.
prolifération des panneaux publicitaires aux abords des villes et villages
M. le président. La parole est à M. André Boyer, auteur de la question n° 1026, adressée à M. le ministre. délégué aux collectivités territoriales.
M. André Boyer. Monsieur le ministre, on assiste en France à une inquiétante dérive qui amène la transformation des bords des routes et des abords des villes et des villages en tunnels publicitaires continus, le phénomène prenant chaque année davantage d'ampleur.
On peut s'interroger d'abord sur l'efficacité d'une telle pratique : trop de publicité tue la publicité, car à trop en voir, on ne la regarde plus. Et je ne parle même pas des panneaux publicitaires datant d'une époque révolue, telle cette vieille publicité d'une marque de matériels photographiques qui perdure dans nos campagnes, vantant encore la pellicule argentique à l'heure du numérique !
Je m'inquiète surtout, monsieur le ministre, des conséquences de cette agression contre l'environnement. Le souci que j'exprime ici est partagé, je le sais, dans les villes et pays d'art et d'histoire, par exemple dans le pays d'art et d'histoire de la vallée de la Dordogne, que je connais bien.
On parle beaucoup des pollutions atmosphérique et sonore, mais celle qui nous préoccupe aujourd'hui constitue aussi une pollution, visuelle celle-là, qui parasite à la fois les esprits et les lieux. C'en est fini de la diversité et de la richesse des paysages, l'horizon est bouché, la pensée vagabonde, privée de sortie. Cette forme de publicité est de surcroît particulièrement pernicieuse et agressive, car elle s'impose à tous, et ce quotidiennement.
Je sais, monsieur le ministre, et vous ne manquerez pas de me le rappeler, qu'une réglementation existe à cet égard. Tout en réaffirmant le principe de liberté d'information, la loi du 29 décembre 1979 relative à la publicité, aux enseignes et préenseignes, dont les dispositions ont été insérées dans le code de l'environnement, a été élaborée dans un souci de protection du cadre de vie. Comme la loi du 2 février 1995, elle donne notamment aux maires la possibilité d'adopter des règlements locaux visant à limiter la pression publicitaire.
Or force est de constater que le nombre de procédures engagées à la suite d'infractions reste trop modeste au regard de l'importance du parc de panneaux installés et que nombre de ces infractions sont relevées sans que cela débouche sur des sanctions. Des dispositifs publicitaires installés sauvagement ou sur des terrains privés finissent, hélas ! par prendre racine sans qu'intervienne un rappel à l'ordre des autorités compétentes.
Monsieur le ministre, la réglementation de la publicité a fait l'objet d'une évaluation qui a donné lieu à la publication d'un bilan à la fin de 2005. Ce volet de la question a-t-il été abordé ? Si oui, pouvez-vous nous indiquer quelles conclusions ont été tirées, et nous dire si des propositions concrètes seront faites en faveur d'une répartition équilibrée et réaliste de l'affichage publicitaire, notamment à travers la promotion d'une démarche de qualité, d'une plus grande homogénéité ou de la réduction du nombre des panneaux et de la taille de certains d'entre eux ?
Une plus grande maîtrise de la publicité extérieure, qui constitue l'un des éléments essentiels de la mise en valeur du patrimoine, ne peut qu'avoir un effet très favorable sur nos conditions de vie, mais aussi sur une fréquentation touristique qui contribue largement au développement économique de notre pays.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, vous soulevez à juste titre une question très importante pour tous ceux qui sont attachés à la qualité des abords des villes et des villages. L'arrivée anticipée dans l'hémicycle du ministre de la culture nous permettra de lui faire partager nos préoccupations sur ce sujet ! (Sourires.)
Ainsi que vous l'avez rappelé, la loi du 29 décembre 1979 relative à la publicité, aux enseignes et préenseignes, dont les dispositions ont été intégrées dans le code de l'environnement, fixe les règles applicables en matière de publicité pour assurer la protection du cadre de vie tout en réaffirmant la liberté d'expression, qu'il n'est naturellement pas question d'entraver.
Cette législation donne aux maires la possibilité d'adopter des réglementations locales, qui peuvent, en particulier, créer des règles de densité afin de limiter la pression publicitaire. À ce jour, environ 1500 règlements locaux de publicité ont été élaborés ou sont en cours d'élaboration.
Dans le Lot, vous le savez, il existe deux règlements locaux, l'un s'appliquant à la ville de Cahors, l'autre à celle de Figeac. La commune de Gramat envisagerait elle aussi de se doter d'un tel règlement dans les prochains mois, tandis que la ville de Cahors est en train de modifier le sien pour faire face à l'inflation du nombre d'enseignes constatée à l'entrée sud du chef-lieu, où sont regroupés, pour l'essentiel, les centres commerciaux.
Le développement considérable de ces règlements s'accompagne d'une très ferme volonté des pouvoirs publics de faire respecter les dispositions de cette loi.
Ainsi, dix-neuf pôles de compétence spécialisés dans ce domaine ont été créés suite à la circulaire du ministre de l'écologie en date du 5 avril 2001 relative à la mise en oeuvre des textes sur la publicité, les enseignes et les préenseignes.
Ces pôles de compétence, créés par les préfets de département, sont placés sous l'autorité d'un chef de projet. Ils ont pour objectif de coordonner l'application de la réglementation par les divers services déconcentrés de l'État concernés que sont les directions régionales de l'environnement, les directions départementales de l'équipement, les services départementaux de l'architecture et du patrimoine, les services de police, la gendarmerie et les services des préfectures.
Pour ce qui concerne votre département, monsieur le sénateur, il existe une mission spécialisée chargée de l'affichage publicitaire à l'abord des villes. Elle est confiée, depuis plus d'un an, à une fonctionnaire de la direction départementale de l'équipement, qui s'efforce de tout mettre en oeuvre pour rendre plus efficace cette politique, aussi bien dans sa dimension préventive que dans sa dimension répressive, la prévention devant bien entendu être privilégiée.
Le ministère de l'écologie et du développement durable a procédé, en 2005, à une évaluation de la réglementation, qui devrait être poursuivie en 2006 afin d'améliorer la protection du cadre de vie et de simplifier les textes, qui sont pour le moins touffus, et parfois obscurs.
Par ailleurs, le mécanisme de la déclaration préalable pour toute installation de dispositif de publicité, institué par le législateur en 1995, a confirmé son rôle dissuasif, au même titre que les possibilités de sanctions financières.
Enfin, le code de l'environnement permet aux associations de protection de la nature de demander au préfet de faire déposer tout panneau irrégulier.
Tels sont, monsieur le sénateur, les éléments que je souhaitais porter à votre connaissance. Ces différents instruments et dispositifs constituent, le plus souvent, des outils de contrôle efficaces permettant désormais de limiter la prolifération des panneaux publicitaires, notamment aux abords des villes et villages.
M. le président. La parole est à M. André Boyer.
M. André Boyer. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse et de votre rappel des initiatives locales qui ont déjà été prises dans mon département.
J'ajoute que le conseil général du Lot, sensible aux problèmes évoqués, a décidé, avec les collectivités territoriales, la mise en place d'une signalisation d'information locale permettant aux usagers de repérer les équipements et les services et conforme aux dispositions réglementaires. Il s'agit là d'une refonte complète de la signalisation directionnelle, mettant notamment en valeur toute la diversité des attraits touristiques de notre territoire.
En échange, les prestataires devront renoncer à l'implantation de préenseignes dérogatoires et a fortiori de toute publicité illégale. Ce serait un véritable gâchis économique et social. Cependant subsiste le problème des entrées des villes et des villages, où il est très difficile de mettre en place une zone publicitaire restreinte, qui permettrait pourtant, d'une part, d'éliminer les supports multiples, dont le caractère répétitif constitue souvent un bégaiement insupportable, et, d'autre part, de mettre fin à l'aspect agressif des façades des immeubles dont les propriétaires font preuve d'une complaisance intéressée.
Si les règlements existent, il faut les appliquer. L'attention des communes doit être attirée sur ce point, monsieur le ministre. Mais le développement des règlements n'est bien entendu utile que s'il s'accompagne d'une volonté ferme de faire respecter les dispositions générales de la loi, s'agissant notamment des sanctions et de la suppression des panneaux publicitaires illégaux.
logement des artistes plasticiens professionnels
M. le président. La parole est à M. Yann Gaillard, auteur de la question n° 1020, adressée à M. le ministre de la culture et de la communication.
M. Yann Gaillard. Monsieur le ministre, aujourd'hui, vous allez inaugurer solennellement l'exposition « La force de l'art » au Grand Palais. Or, ma question porte sur ce qui est à la base même de l'art, c'est-à-dire la condition des artistes. Cette condition, essentielle, consiste à ce que les artistes soient dotés d'ateliers ou d'ateliers-logements leur permettant d'exercer leur activité et d'exprimer leur créativité dans de bonnes conditions.
En Île-de-France, la grande région créative de France, il y aurait au total 2 035 ateliers d'artiste, dont 900 à la ville de Paris, 300 à l'office public d'aménagement et de construction de Paris, 440 à la direction régionale des affaires culturelles d'Ile-de-France, auxquels il faut ajouter quelques cités des arts, d'ailleurs menacées par la spéculation immobilière, comme on le constate aujourd'hui à la résidence des arts de Montmartre.
Beaucoup de problèmes se posent et la Maison des artistes a d'ailleurs créé une commission sur la condition de l'artiste qui se propose d'étudier le problème des ateliers ou des ateliers logements.
D'abord, il y a le problème de la destination des ateliers, souvent transformés en logements, qui sont quelquefois sous-loués et disparaissent donc de la géographie artistique. Ensuite, il y a le problème de la spécialisation. Avec la multiplication des techniques, l'atelier doit être différent dans sa dimension et dans sa contexture du simple atelier où l'on peut faire de la peinture abstraite avec un chevalet. Enfin, il y a le problème de la spéculation immobilière.
Je voudrais vous faire une suggestion, monsieur le ministre. Ne pourriez-vous pas vous réunir avec le maire de Paris et le président de la région d'Ile-de-France dans une sorte de grande commission oecuménique qui, sans opérer bien entendu de distinction entre la condition des artistes français et celle des artistes étrangers faisant depuis toujours la gloire de l'École de Paris, étudierait cette question émouvante au moment même où vous exaltez la force de l'art en France ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le sénateur, vous avez raison d'insister sur le lieu et les conditions de vie des artistes qui travaillent dans notre pays.
Je vous remercie aussi d'évoquer cette très grande exposition qui ouvre ses portes demain au public au Grand Palais et dont le vernissage se tient aujourd'hui même. Elle a comme objectif de mettre en valeur la création contemporaine et ce grand rendez-vous trisannuel sera peut-être pour beaucoup de nos concitoyens une première confrontation avec la création contemporaine.
Vous avez évoqué à juste titre les difficultés rencontrées par les artistes plasticiens professionnels pour se loger dans notre pays, notamment en Ile-de-France où ils sont le plus nombreux, et plus généralement le problème des ateliers et des résidences d'artistes.
Récemment, j'ai donné à tous les préfets de région, que j'avais réunis, des instructions très précises pour que, dans l'ensemble de la politique contractuelle de l'État, qu'il s'agisse de la rénovation urbaine ou du logement social, la dimension culturelle des projets d'aménagement ne soit pas oubliée.
En effet, outre le fait qu'il s'agit de rendre satisfaisantes les conditions de vie des artistes plasticiens, la présence d'un atelier ou d'une résidence d'artistes au sein d'un quartier est l'occasion de rencontres, de discussions et d'une effervescence positive. Vous avez donc entièrement raison de soulever ce problème.
Depuis le début des années soixante, le ministère de la culture et de la communication soutient activement la construction et l'aménagement d'ateliers pour artistes plasticiens afin de contribuer à résoudre le problème du manque et du coût élevé de tels locaux.
Cette action se traduit par l'octroi de subventions d'investissement en contrepartie d'un droit de réservation au bénéfice du ministère de la culture et s'est principalement développée en Île-de-France où le ministère est réservataire de près de 1 000 ateliers d'artistes, majoritairement constitués d'ateliers-logements à loyers modérés.
Très attaché à l'amélioration des conditions de travail des créateurs, j'ai confié à l'inspection générale de l'administration des affaires culturelles une mission permettant, à partir du diagnostic des pratiques mises en oeuvre sur l'ensemble du territoire par l'État et les collectivités territoriales, de déterminer sur les plans juridique, administratif et technique de nouveaux outils d'intervention de l'État en faveur de cette action.
Je retiens en tout cas votre proposition de coopération très étroite entre l'État, la région et la ville et je mènerai ce travail de concertation avec comme seuls objectifs l'efficacité et le résultat, sans aucun point de vue partisan. Nous devons les uns avec les autres résoudre ce problème des conditions de travail de nos artistes plasticiens si nous voulons que notre pays continue d'être un foyer vivant pour la création contemporaine.
Je vous signale d'ailleurs que le projet de loi relatif au droit d'auteur, dont vous allez poursuivre la discussion aujourd'hui et demain, a pour objet, notamment à propos du droit de suite, de traiter un certain nombre de problèmes concrets. De la même manière, les dispositions annoncées par le Premier ministre pour exonérer d'un certain nombre de mesures fiscales les artistes plasticiens dans les cinq premières années de leur travail sont novatrices et importantes.
M. le président. La parole est à M. Yann Gaillard.
M. Yann Gaillard. Monsieur le ministre, j'aurais mauvaise grâce à ne pas témoigner ma satisfaction devant l'ampleur de votre réponse, qui a de beaucoup dépassé l'objet limité de ma demande. Puisque vous avez fait allusion au droit de suite, je pense que nous aurons à en reparler dans quelque temps, voire quelques heures.
difficultés de réception fm dans l'est parisien
M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari, auteur de la question n° 1017, adressée à M. le ministre de la culture et de la communication.
Mme Bariza Khiari. Monsieur le ministre, en tant qu'élue de Paris, je souhaite appeler votre attention sur les difficultés qui entravent la réception FM dans l'Est parisien. Les auditeurs de l'est des XIXe et XXe arrondissements de Paris, ainsi que de la petite couronne, de Bagnolet, des Lilas et de Romainville en Seine-Saint-Denis, ne peuvent bénéficier de l'accès à la plupart des radios de la bande FM diffusées dans l'agglomération parisienne, et singulièrement aux radios nationales, donc au service public.
Je vous prie de m'excuser de ne pas entrer dans des détails trop techniques ; là n'est pas mon rôle. Mais il est en effet impossible de fixer une réception, celle-ci étant instantanément couverte par des émissions et parasites divers, quelle que soit la qualité de l'appareil de réception, j'insiste sur ce point. Cela nous semble incompréhensible, à l'heure du règne des nouvelles technologies de l'information et de la communication, de la multiplication de l'offre audiovisuelle !
Les habitants des zones concernées, au minimum 40 000 foyers, ont décidé de se regrouper pour peser sur les pouvoirs publics. Ils se sont constitués en association : ce sont les Sans radios de l'Est parisien. Pourtant, le problème perdure depuis des années. Croyez-moi, ces citoyens en ont assez d'entendre que le problème vient de la mauvaise qualité de leurs appareils ! Ils ont longtemps entendu cette réponse de la part du Conseil supérieur de l'audiovisuel, le CSA, qui prend le problème, semble-t-il, avec un peu trop de désinvolture.
Sous la pression des Sans radios, le CSA a tout de même organisé une concertation technique entre les opérateurs techniques de radiodiffusion et Radio France. Mais le problème reste entier, malgré les solutions techniques et théoriques formulées par ce groupe de travail et malgré l'implication de nombreux élus. Des voeux ont ainsi été votés par les conseils municipaux de Bagnolet, des Lilas et de Montreuil, ainsi que par le conseil régional d'Île-de-France.
Il ne s'agit pas seulement là d'une question de confort. Ce problème remet en cause le principe même d'égalité des administrés face au service public, puisque 40 000 foyers sont ainsi privés de radios nationales telles que France Info, France Culture, France Inter ou encore France Musique. Je vous rappelle que les principes d'égalité d'accès et de continuité du service public sont des principes constitutionnels. Pour moi, 40 000 foyers privés de l'information fournie par le service public, ce n'est pas une anecdote, c'est une situation grave.
Par conséquent, je vous demande, Monsieur le ministre, ce que vous comptez faire pour mettre un terme à cette situation qui prive un certain nombre de nos concitoyens de l'accès au service public.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. Madame la sénatrice, vous soulevez ici un problème réel qui interpelle les pouvoirs publics. Des auditeurs de l'Est parisien et de certaines communes de Seine-Saint-Denis peuvent en effet rencontrer des difficultés de réception des programmes radios, notamment ceux de Radio France. Le Gouvernement est particulièrement préoccupé et désireux d'établir l'égalité de tous les Français face aux progrès de la technologie. C'est ce qu'a rappelé d'ailleurs le Président de la République jeudi dernier à propos de la TNT, comme vous-même pour la radio.
Notre paysage radiophonique est riche : dans l'agglomération parisienne, on ne compte pas moins de 57 radios sur la bande FM. C'est une offre comme il n'en existe nulle part ailleurs et elle incarne notre conception de la liberté de communication. Cette richesse a un corollaire : la technique obéit à ses règles et il existe des zones de moins bonne réception résultant de l'exploitation massive des fréquences. Le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) recherche avec les opérateurs radios les solutions les mieux à même de minimiser les brouillages occasionnés sans pénaliser les auditeurs. Il est vraiment mobilisé.
Ainsi plusieurs scénarios d'amélioration ont été expérimentés depuis l'été dernier, par exemple une modification des antennes implantées sur les Tours Mercuriales à Bagnolet, ou bien le transfert temporaire à Romainville de l'émetteur d'une radio.
Parallèlement le CSA, accompagné d'opérateurs radiophoniques, s'est rendu au domicile de certains auditeurs rencontrant des difficultés de réception. Il en ressort que plusieurs actions très simples sont de nature à améliorer la réception, comme, par exemple, une meilleure orientation des antennes filaires ou une diminution de leur longueur. Ces observations ont conduit le CSA à publier, en septembre dernier, un dépliant d'information à destination des particuliers et des professionnels du secteur.
Enfin, dans le cadre des appels aux candidatures généraux en bande FM, le CSA a lancé une consultation publique sur l'Île-de-France, close depuis le 24 mars dernier. Elle doit être l'occasion pour chacun de proposer des pistes d'amélioration avant le lancement de l'appel à candidatures en septembre prochain pour les 66 % des fréquences de la bande FM en Île-de-France qui ne sont pas utilisées par le service public. .Je peux vous garantir que je vais rester particulièrement vigilant sur ce dossier en liaison et en articulation avec le CSA, qui l'est déjà particulièrement puisqu'il organise même, vous l'avez dit, des visites sur place pour constater les faits.
L'émission des programmes est une chose, leur réception par tous dans les meilleures conditions en est une autre. Il en va effectivement, et vous avez raison de le rappeler, de l'égalité devant le service public, qui est une valeur partagée par tout le monde.
M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari.
Mme Bariza Khiari. Monsieur le ministre, je vous remercie de ces précisions. Je suis sensible au fait que vous n'ayez pas allégué la mauvaise qualité des radios et des équipements des habitants de l'Est. Des réponses en ce sens leur ont souvent été faites.
Je n'ignore pas qu'un appel d'offres a été lancé et que des choix doivent intervenir au mois de septembre prochain.
Je rappelle simplement que l'un des prestataires d'émissions a été condamné à démonter des antennes à la suite d'une décision judiciaire. Nous ne souhaitons pas, bien évidemment, en arriver à une telle judiciarisation de cette question, nous cherchons simplement à résoudre les problèmes.
Pour cette raison, monsieur le ministre, j'en appelle à votre vigilance sur les choix qui seront faits, qu'il s'agisse de l'offre radiophonique comme de la qualité de réception des émissions. Nous vous faisons confiance pour régler cette question le plus rapidement possible.
Engagements de la France dans le cadre du Partenariat mondial du G8 contre la prolifération des armes de destruction massive et des matières connexes
M. le président. La parole est à M. Philippe Richert, auteur de la question n° 1025, transmise à M. le ministre des affaires étrangères.
M. Philippe Richert. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, chacun a en mémoire les images de la flotte et des sous-marins nucléaires soviétiques se décomposant dans de vieux ports faisant office de cimetières navals. De telles images, régulièrement retransmises par les chaînes de télévision, ne peuvent nous laisser indifférents.
Les risques de pollution liés aux résidus nucléaires ou aux stocks d'armes sont particulièrement aigus, et le défi consistant à contrôler puis à démanteler cet arsenal concerne la planète entière, compte tenu des conséquences dramatiques qui pourraient survenir.
Face à ces menaces, les membres du G8 se sont mobilisés et ont lancé à Kananaskis, en juin 2002, un Partenariat mondial contre la prolifération des armes de destruction massive et des matières connexes. La France s'est alors engagée à participer à cet effort concerté, et nous saluons la détermination du Président de la République, qui a annoncé une contribution de 750 millions d'euros sur dix ans. Nous sommes donc parvenus à mi-chemin.
Aujourd'hui, les programmes conduits par les différents pays partenaires sont largement avancés. Le Royaume-Uni, qui s'est engagé sur un montant équivalent à celui de la France - 750 millions d'euros sur dix ans -, a déjà concrétisé de très nombreux projets, dont le chiffrage correspond bien aux engagements prévus, c'est-à-dire à environ 375 millions d'euros à la date actuelle.
J'aimerais savoir où en est la participation de notre pays, connaître les moyens qui ont déjà été engagés et ceux qui restent encore à mettre en oeuvre pour honorer, dans les délais prévus, les engagements du Président de la République, lesquels vont, bien évidemment, au-delà de l'intérêt de notre seul pays et concernent l'avenir de notre planète.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le sénateur, vous avez raison d'insister sur la mobilisation politique particulièrement forte du Président de la République sur cette question.
Dans le cadre du Partenariat mondial contre la prolifération des armes de destruction massive et des matières connexes, lancé en juin 2002 lors du sommet du G8 à Kananaskis, les pays du G8 se sont engagés à appuyer des projets de coopération, en commençant par la Russie, pour promouvoir la non-prolifération, le désarmement, la lutte contre le terrorisme et la sûreté nucléaire.
La destruction des armes chimiques, le démantèlement des sous-marins nucléaires retirés du service, l'élimination des matières fissiles et le recrutement d'anciens chercheurs du secteur de l'armement figurent parmi les principales préoccupations identifiées. Les pays du G8 se sont engagés à rassembler jusqu'à 20 milliards de dollars pour appuyer de tels projets au cours des dix prochaines années.
Ces engagements ont été confirmés depuis, et le total des contributions annoncées s'élève à l'heure actuelle à près de 18 milliards de dollars. Notre pays a annoncé que sa contribution porterait jusqu'à 750 millions d'euros sur dix ans, comme vous l'avez rappelé.
Dans le même temps, cette initiative a été élargie à de nouveaux partenaires : six nouveaux donateurs ont été accueillis - la Pologne, la Suisse, la Suède, la Finlande, la Norvège et les Pays-Bas - à Évian en 2003, puis sept autres - l'Australie, la Belgique, le Danemark, l'Irlande, la Nouvelle-Zélande, la République de Corée et la République tchèque - en 2004. Le G8 a également entériné en 2004 l'entrée de l'Ukraine dans le Partenariat comme récipiendaire potentiel.
La France poursuit, au travers de projets concrets, les objectifs que nous nous étions fixés. Le séminaire intergouvernemental franco-russe tenu cette année à Moscou a permis d'aboutir à la signature, le 14 février, des deux accords destinés à encadrer notre coopération bilatérale avec la Russie pour la mise en oeuvre de cette initiative, l'un dans le domaine chimique, l'autre dans le domaine nucléaire. Ces deux accords constituent le cadre de référence afin de fournir toutes les garanties nécessaires quant à l'utilisation des fonds mobilisés et à la protection juridique des intervenants français.
Le total des engagements de la France dans le cadre de ce Partenariat mondial s'élève à l'heure actuelle à près de 200 millions d'euros. Près de 21 millions d'euros ont effectivement été dépensés pour la mise en oeuvre concrète des projets correspondants. Afin d'optimiser son action, la France s'est engagée simultanément dans des programmes multilatéraux et bilatéraux destinés à renforcer la sécurité internationale dans les domaines nucléaire, chimique et biologique.
La France, avec une contribution annoncée de 40 millions d'euros, est ainsi le premier pays contributeur au fonds créé par la Commission européenne et par la Banque européenne de reconstruction et de développement afin de financer des programmes de démantèlement de sous-marins nucléaires russes retirés du service. La France participe également au financement des fonds internationaux destinés à la construction du nouveau sarcophage de la centrale de Tchernobyl et à la réhabilitation du site de Tchernobyl.
La France est également engagée, en premier lieu en Russie, dans plusieurs programmes bilatéraux. Ces programmes sont mis en oeuvre pour la France par le Commissariat à l'énergie atomique dans une logique de partenariat associant tant en France qu'en Russie les organismes publics et les opérateurs industriels impliqués dans la réalisation de ces projets.
La France intervient ainsi, dans le domaine nucléaire, sur le chantier naval de Severodvinsk, afin d'optimiser les capacités de traitement des déchets nucléaires sur ce site. La France conduit également, sur l'ancienne base navale russe de Gremikha, des études techniques afin d'établir un programme d'assainissement de ce site dédié au démantèlement de sous-marins nucléaires russes. La France coopère aussi au programme de modernisation des systèmes de sûreté de la centrale nucléaire de Kalinine : nous avons indiqué être prêts à consacrer 30 millions d'euros à ce projet, conduit en partenariat étroit avec EDF. Enfin, la France participe, avec la Norvège et le Canada, à un programme de démantèlement de sources radioactives dans le Grand Nord russe, afin de remplacer ces sources utilisées dans les balises de navigation par des sources d'énergie alternative ne présentant aucun risque en cas de vol ou de détournement.
Dans le domaine chimique, la signature de l'accord intergouvernemental de coopération rend désormais possible la mise en oeuvre d'actions concrètes. Un premier projet a déjà été identifié.
Dans le domaine biologique, les actions proposées par la France s'inscrivent dans le cadre du Centre international pour la science et la technologie de Moscou. Ces coopérations sont destinées à mettre en place des outils efficaces de lutte contre la menace bioterroriste. Les actions menées s'inscrivent dans le cadre de programmes de réemploi des scientifiques russes et privilégient un partenariat direct entre les laboratoires français et russes.
Dans le cadre de ce Partenariat mondial du G8 contre la prolifération des armes de destruction massive et des matières connexes, nous attachons également une importance toute particulière à la réalisation du programme d'élimination du plutonium militaire russe déclaré en excès des besoins de défense. Ce programme constitue à l'heure actuelle le principal programme d'envergure en matière de non-prolifération nucléaire à l'étude depuis plusieurs années ; la finalité de ce programme s'inscrit exactement dans l'effort de réduction de la menace mis en oeuvre par le Partenariat mondial du G8.
L'ambition de la France est donc d'intervenir dans les différents domaines identifiés par les chefs d'État et de gouvernement du G8 lors du lancement de ce Partenariat en juin 2002. Nous avons également souhaité privilégier dans notre démarche l'établissement d'un partenariat effectif entre opérateurs français et russes, pour éviter les travers d'une assistance réduite au seul volet de financement.
Cependant, la définition de notre participation aux programmes de coopération conduits en Russie dans le cadre du Partenariat mondial doit également tenir compte des positions adoptées par la partie russe. La Russie a en effet souhaité limiter le champ de ce Partenariat, en le limitant à deux priorités : la destruction des armes chimiques et le démantèlement des sous-marins nucléaires russes retirés du service.
Il nous appartient donc de poursuivre nos efforts pour mettre en oeuvre nos engagements, afin d'atteindre avec nos partenaires l'ensemble des objectifs de ce Partenariat et de contribuer ainsi au renforcement de la sécurité internationale et de la sûreté.
Vous m'excuserez d'avoir été un peu long, monsieur le sénateur, mais l'importance du sujet me semblait légitimer une réponse précise.
M. le président. La parole est à M. Philippe Richert.
M. Philippe Richert. Je tiens à remercier M. le ministre pour les précisions qu'il nous a apportées concernant les programmes déjà mis en oeuvre ou en préparation qui engagent notre pays. Les nombreux projets auxquels nous participons démontrent en effet tout l'intérêt que nous portons à ces questions.
Je souhaiterais cependant que notre pays ne soit pas en retard par rapport à d'autres États. Je me permets d'insister sur le fait que les engagements et les déclarations doivent être relayés efficacement par les moyens financiers correspondants, afin que ces programmes se traduisent concrètement par des démantèlements réels. Si j'ai cité le cas de la Grande-Bretagne, ce n'est pas par hasard : on observe en effet un important décalage entre les crédits réellement dépensés par nos deux pays. Il ne faudrait pas que notre pays donne le sentiment d'être très engagé dans ses déclarations mais en retard dans les faits.
J'ajoute que c'est l'avenir de la planète qui est engagé. Chacun, ici comme ailleurs, est préoccupé par ce qui se passe en Iran. Les montagnes de produits radioactifs qui croupissent dans des ports pourraient, demain, se trouver à la merci d'organisateurs de réseaux. Des chercheurs inemployés dans certains pays pourraient accepter de rejoindre des équipes prêtes à les accueillir pour réaliser des projets que nous voudrions tous éviter...
Il importe donc, monsieur le ministre, de concrétiser le plus rapidement possible les projets sur lesquels nous nous sommes engagés. Il y va, bien sûr, de l'image de la France et du respect de ses engagements, mais aussi de l'avenir de la planète.
Conséquences de la hausse du prix des carburants pour les pêcheurs professionnels
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel, auteur de la question n° 1024, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.
M. Pierre-Yvon Trémel. Monsieur le ministre, j'ai déposé cette question orale le 12 avril dernier, à un moment où les inquiétudes et les attentes étaient très fortes, sur les quais des ports de pêche, face à la flambée du prix du gazole, qui dépasse désormais 50 centimes d'euro le litre.
Le mercredi 26 avril, à l'occasion de l'assemblée générale de la Société centrale de crédit maritime mutuel, vous avez présenté un plan d'aides de 91 millions d'euros. J'en ai bien entendu pris connaissance, et vous avez donc déjà répondu en partie à ma question.
Je vous saurais gré, toutefois, de bien vouloir me donner des informations sur le contenu de ces aides. J'aimerais en particulier être éclairé sur les aides en faveur des dispositifs techniques permettant de réduire la consommation et donc la facture de carburant.
Au-delà de ces informations, monsieur le ministre, je souhaiterais connaître votre point de vue sur les trois questions suivantes : les aides annoncées sont-elles eurocompatibles ? Que devient exactement le fonds de prévention des aléas pêche, le FPAP ? Quand le plan d'avenir de la pêche, que vous avez annoncé en 2005 et qui est, vous le savez, très attendu, sera-t-il mis en place ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le sénateur, votre question est importante.
Avant d'y répondre, je souhaite rendre hommage, devant le Sénat, aux deux pêcheurs morts en mer ce matin et au pêcheur porté disparu au large du cap d'Antifer en Seine-Maritime, devant le port du Havre, que les recherches n'ont pas encore permis de retrouver.
Malheureusement, cette profession difficile paye un tribut épouvantable chaque année à la mer. Ces disparitions s'ajoutent, en effet, à une liste déjà longue, et votre région, la Bretagne, monsieur le sénateur, est particulièrement touchée.
En dehors du problème de la dangerosité du métier, la pêche connaît des difficultés de deux natures.
D'abord, l'Europe, qui gère la politique de la pêche, diminue les quotas pour essayer de reconstituer la ressource.
Ensuite, les charges, en particulier le poste carburant, progressent.
Cette augmentation brutale des cours du gazole, malheureusement pérenne, est très difficile à supporter par les pêcheurs. Je pense aux chalutiers, qui ont particulièrement besoin d'énergie pour tracter le chalut. La flotte de pêche française est constituée encore en majorité de chalutiers, même si, depuis quelques années, d'autres techniques de pêche moins gourmandes, tels le filet, la palangre, la senne, se sont développées.
En outre, de nombreuses entreprises sont également fragilisées par des problèmes de gestion et se sont endettées pour acquérir leur navire.
Par ailleurs, se pose également le problème des marins salariés lorsqu'ils sont rémunérés « à la part », dans le cas de la pêche artisanale où les frais communs sont partagés entre l'armateur et l'équipage.
Monsieur le sénateur, vous avez rappelé les moyens dont disposent les entreprises pour faire face à ces difficultés.
En ce qui concerne tout d'abord la couverture du risque d'envolée du prix du gazole sur les marchés à terme, nous avons mis en place en 2004 un outil, le fonds de prévention des aléas de la pêche, le FPAP, qui permettait de lisser les pics du cours du gazole.
En tout état de cause, nous ne pouvons utiliser durablement cet outil pour des raisons de compatibilité avec les règles européennes sur lesquelles je ne m'étendrai pas.
Néanmoins, tant que les dispositifs que j'ai annoncés au mois d'avril ne seront pas partout effectifs, nous continuerons d'abonder ce fonds pour aller jusqu'au bout du traitement que nous devons aux pêcheurs.
La solution souhaitable, naturellement, est l'augmentation des cours du poisson. Cette dernière est réelle, mais limitée pour l'instant à certaines espèces. Faut-il rappeler que la France importe malheureusement les deux tiers de ses besoins en produits de la mer ? Cela signifie également que nos marins sont en situation de concurrence. Lorsque les pêcheurs d'Arcachon se mettent d'accord, comme ce fut le cas la semaine dernière, avec les autorités portuaires pour augmenter de dix centimes d'euro les prix - cette mesure est tout à fait compréhensible, car elle tire les revenus vers le haut -, cela pose des problèmes à l'égard des importations et de la concurrence !
Les deux autres pistes pour améliorer la situation sont la réduction de la consommation du gazole - j'y reviendrai - et l'amélioration de la productivité des entreprises.
En dehors du FPAP, qui ira vers l'extinction quand les autres mesures seront en oeuvre, j'ai proposé un plan de restructuration et de modernisation de notre flotte, solution durable pour permettre à nos entreprises de vivre avec un gazole qui sera certainement cher encore pendant de nombreuses années.
Des solutions existent d'ores et déjà pour réduire la consommation de gazole.
Il s'agit, par exemple, d'aider les pêcheurs à mieux régler leur moteur. Nous devons encourager la généralisation des dispositifs allant en ce sens.
À moyen terme, de nouvelles pratiques de pêche devront remplacer le chalut.
De même, les moteurs doivent être plus performants pour être moins consommateurs d'énergie. Des substituts au gazole doivent être testés, notamment les biocarburants. La loi d'orientation agricole a d'ailleurs ouvert la possibilité aux pêcheurs d'utiliser des huiles végétales pures.
Le Gouvernement accompagnera cette restructuration, et 40 millions d'euros y seront consacrés pour aider les entreprises à investir.
Néanmoins, les entreprises doivent disposer d'un peu de temps pour se restructurer. C'est pourquoi, monsieur Trémel, des soutiens immédiats seront apportés aux entreprises afin de conforter leur trésorerie jusqu'à la restructuration.
Des avances de trésorerie et des allégements de charges seront accordés aux entreprises qui s'engagent dans un processus de restructuration.
Pour les armements hauturiers, qui vont au-delà de la mer territoriale, un aménagement de la taxe professionnelle sera réalisé. Par ailleurs, des mesures sociales seront prises en direction de leurs équipages.
Ce volet « soutien » représentera également 40 millions d'euros, monsieur le sénateur, et je précise, pour répondre à votre question, que ce plan sera notifié à la Commission européenne. Il prendra effet après la réalisation d'un bilan précis de la situation, bilan que nous sommes en train d'élaborer. Sous trois mois, nous disposerons d'une analyse de la situation, entreprise par entreprise. Les aides seront accordées au regard de cette étude et prendront la suite des avances du FPAP.
Cette restructuration de la flotte est donc un chantier important.
Pour autant, je n'oublie pas les autres pistes à explorer : la productivité et l'augmentation des prix au producteur. Telle est la mission qui a été confiée à la députée du Finistère Mme Hélène Tanguy, dont j'attends les propositions pour le mois de juin prochain.
D'autres défis doivent aujourd'hui être relevés pour assurer un avenir à ce secteur : la gestion des ressources, la réforme de l'organisation professionnelle, l'installation des jeunes, la transmission des entreprises, la rémunération des marins, la formation et la sécurité - encore aujourd'hui au coeur de nos préoccupations.
Le plan d'avenir de la pêche, que j'ai annoncé en octobre à Nantes, sera proposé à la fin du mois de mai ou dans le courant du mois de juin. Sur tous les points que je viens de citer, en dehors du plan de restructuration, nous présenterons des solutions et des outils concrets, complétés par les propositions de Mme Tanguy, lesquelles seront naturellement intégrées en partie dans ce plan d'avenir de la pêche.
Tel est l'état des lieux de la pêche en France, monsieur Trémel. Il s'agit d'une filière qui connaît de vraies difficultés. Je sais que les collectivités territoriales, notamment la région Bretagne et votre département, s'attachent à être aux côtés de l'État dans la gestion de ce dossier, car nous devons unir nos efforts pour aider nos pêcheurs.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. Je vous remercie, monsieur le ministre, de toutes les informations que vous avez bien voulu me transmettre.
Nous le savons bien, la pêche française doute très fortement de son avenir. En vingt ans, la flotte de notre pays a été réduite de 52 %, et de fortes menaces continuent à peser sur les petits armements, en particulier sur la pêche artisanale. Les territoires sont donc menacés.
Quoi qu'il en soit, aviculture, pêche : dure dure, la vie de ministre ! (Sourires.) Je vous souhaite donc bon courage, monsieur le ministre, et vous donne rendez-vous au mois de juin prochain pour parler de nouveau de ce très attendu plan d'avenir pour la pêche.
financement des contrats d'agriculture durable
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, auteur de la question n° 1008, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.
M. Alain Vasselle. Monsieur le ministre, il y a peu, lors de questions d'actualité au Gouvernement, je vous avais interpellé en vous rappelant que l'agriculture française était soumise à trois contraintes : des contraintes administratives, liées aux déclarations de la politique agricole commune, la PAC ; des contraintes financières, avec la mise en place de la modulation et du fonds de réserve national pour les droits à paiement unique, les DPU ; enfin, des contraintes environnementales, liées à l'écoconditionnalité.
Nous avons tous connu la première réforme de la PAC en 1992, dont l'objet était de compenser les prix par une aide publique afin d'assurer le maintien du revenu des agriculteurs.
La compensation, à l'époque, était intégrale. Or, depuis cette date, Bruxelles n'a cessé de rechercher les voies et moyens lui permettant de diminuer le budget destiné à l'agriculture.
C'est ainsi qu'a été lancée la deuxième réforme de la PAC, avec la mise en place des DPU, qui érodent encore un peu plus le revenu de l'agriculteur. Non seulement ils ne compensent plus la baisse des revenus mais, de surcroît, ils substituent à un dispositif d'aide à la production des droits découplés, qui se traduisent par une baisse globale des aides, accentuée elle-même par la modulation et le prélèvement destinés à la réserve nationale !
Enfin, en vue de se montrer vertueux à l'égard de l'opinion publique, il a été décidé de conditionner le versement au respect de nouvelles contraintes environnementales qui pèsent sur les coûts de production, sans compenser les charges qu'elles engendrent.
Les agriculteurs et les éleveurs se trouvent donc ainsi doublement pénalisés.
M. Glavany avait inventé la modulation pour prendre de l'argent aux riches agriculteurs en vue de le redistribuer aux pauvres. En réalité, c'était prendre de l'argent aux grandes structures pour le redistribuer aux petites structures. C'est ainsi que fut créé le fameux contrat territorial d'exploitation, le CTE !
Le CTE, financé pour moitié par la modulation et pour moitié par les crédits européens, avait une double visée : sociale et environnementale. Il n'était pas plafonné.
M. Glavany en avait profité pour « vendre » la modulation à l'Europe. Cette dernière ne s'est d'ailleurs pas fait prier, prenant la mesure comme une aubaine lui permettant de diminuer son budget et de faire financer l'écoconditionnalité aux agriculteurs !
M. Gaymard, quant à lui, n'a pas remis en cause la modulation, que nous avions d'ailleurs condamnée au Sénat, et a transformé les CTE en contrats d'agriculture durable, les CAD, en les plafonnant. Il faut dire que son prédécesseur avait omis de financer les CTE !
Aujourd'hui, les CAD sont devenus peau de chagrin en raison de la régulation budgétaire. Bercy a fermé le « robinet » : 2 000 CAD seront finançables en 2006, alors que de 8 000 à 10 000 CAD par an avaient été financés en 2004 et en 2005.
Compte tenu de la baisse des crédits, les CAD sont donc dorénavant limités à la culture biologique, à la filière ovine et aux mesures agro-environnementales.
Ainsi, les exploitations céréalières du nord de la Loire continueront-elles à financer les CAD à travers la modulation, sans pouvoir y accéder puisqu'elles ne seront plus éligibles à ce dispositif. Pourtant, elles sont elles-mêmes soumises à de fortes contraintes environnementales au travers de l'utilisation des engrais - notamment l'azote - et des produits phytosanitaires.
Les CAD, comme les feus CTE, avaient pourtant pour objet le financement de mesures environnementales, ce qui constituait une compensation financière à ces contraintes pour les exploitations.
L'Oise, compte tenu des crédits qui lui sont octroyés, ne pourra financer que deux CAD pour 2006, monsieur le ministre, alors que ce département en avait financé soixante en 2005 !
Que comptez-vous faire pour permettre à ce département de financer les soixante CAD en attente et le renouvellement des CTE ?
Quelle agriculture réservez-vous à notre pays au-delà de 2013, monsieur le ministre, avec la disparition de ces aides qui font, vous le savez très bien, le revenu des agriculteurs ? La disparition de ces dernières entraînera le dépôt de bilan de milliers d'exploitations.
Une hausse des prix à la production est-elle envisageable alors que, dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce, l'OMC, l'Europe s'apprête à sacrifier l'agriculture au profit d'intérêts industriels ?
Quels professionnels en France, mes chers collègues, consentiraient, pour une baisse des prix à la consommation, à transformer une partie de leurs revenus en aide publique quand cette aide n'est compensée qu'à 70 % ou à 80 % de son niveau d'origine ?
Monsieur le ministre, il est plus que temps de rassurer la profession, car son moral est tellement bas qu'elle n'a même plus la force de réagir !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le sénateur, avant de répondre à votre question, je dirai devant la Haute Assemblée deux choses importantes
Premièrement, dans l'affaire de l'OMC, il ne faut pas être pessimiste. La France est mobilisée, et nous ne sommes pas tout seuls : il y a autour de nous une majorité d'États européens pour résister aux volontés de M. Lamy, à l'action du G20 et à celle d'un certain nombre de pays du groupe de Cairns. J'ajoute que nous n'avons pas l'intention de baisser la garde dans cette affaire !
Ainsi, nous avons résisté à Hong-Kong, au mois de décembre. Les réunions qui devaient se tenir au début du mois de mai à Genève n'ont pu avoir lieu en raison d'un manque d'avancées sur ce dossier, et nous avons l'intention de nous battre jusqu'au bout !
M. Alain Vasselle. Très bien !
M. Dominique Bussereau, ministre. Deuxièmement, en ce qui concerne l'après 2013, je n'en sais pas plus que vous, monsieur le sénateur !
Nous savons simplement qu'une étape intermédiaire de réflexion débutera en 2009-2010.
Le Président de la République a bien obtenu de Bruxelles, à la fin de l'année dernière, que les financements de la politique européenne soient pérennes en ce qui concerne le premier et le deuxième pilier jusqu'en 2013.
Le Parlement européen vient d'ailleurs de voter l'enveloppe pour le deuxième pilier, ce qui fait que nous connaissons d'ores et déjà la réalité de ce dernier jusqu'en 2013.
Il appartiendra ensuite aux gouvernements qui se succéderont après 2007 de se battre pour qu'en 2013 ne soient pas remis en cause les fondements de la politique agricole commune.
En ce qui concerne les CAD, il est vrai que nous disposons de moins d'argent, et pas simplement d'ailleurs en raison de la régulation budgétaire. En effet, dès l'examen du projet de loi de finances, j'ai malheureusement dû accepter une réduction du nombre de CAD.
Comme vous l'avez indiqué - vous connaissez d'ailleurs merveilleusement bien ces sujets -, nous ne pourrons donc dégager que 100 millions d'euros cette année. Nous avons accordé trois priorités : le maintien des pâturages extensifs fondamentaux, la filière ovine et les contrats d'agriculture biologique.
En 2003, M. Hervé Gaymard, alors ministre de l'agriculture, a créé la prime herbagère agri-environnementale, la PHAE. Les agriculteurs engagés depuis plusieurs années dans des contrats de gestion extensive de système herbager, prime à l'herbe puis contrat territorial d'exploitation peuvent donc souscrire une PHAE à l'issue de leur CTE.
Une enveloppe a également été affectée à l'agriculture biologique.
Cette situation explique la diminution de la dotation pour la région Picardie, et donc pour votre département de l'Oise. Néanmoins, de nouveaux investissements sont envisagés.
Comme il était inscrit en loi de finances, un plan végétal pour l'environnement viendra remplacer cette année les volets « investissements » des CAD. Ce plan sera effectif à partir du second semestre, et nous mobiliserons 14 millions d'euros pour répondre aux objectifs de protection de l'environnement, d'investissements spécifiques, d'acquisition d' « agro-équipements environnementaux ».
Ce plan végétal pour l'environnement, qui avait été annoncé par le Premier ministre à l'automne dernier à Rennes au salon SPACE, le salon des productions animales-Carrefour européen, pourra se mettre en place dans votre département de l'Oise.
Enfin, nous mettrons en oeuvre le règlement de développement rural 2007-2013. En la matière, vous connaissez le choix du Gouvernement : 50 % de crédits déconcentrés, le maintien, dans la part nationale, de l'indemnité compensatoire de handicap naturel, de l'installation des jeunes et de la politique de la forêt.
Là encore, les préfets de région recevront un mandat afin de bâtir le volet déconcentré de la programmation. Une enveloppe suffisante du FEADER, le fonds européen agricole pour le développement rural, sera mise en place, à laquelle s'ajouteront des crédits nationaux. De cette manière, un certain nombre de mesures nouvelles pourront être mises en oeuvre dans votre région.
J'ajoute, monsieur Vasselle - mais vous connaissez mieux que moi la mécanique financière du Sénat -, que si, au moment de l'examen du projet de loi de finances rectificative, nous parvenons à dégager des moyens supplémentaires ou à obtenir des dégels en cours d'année, je les consacrerai en priorité aux CAD. Naturellement, je penserai aux départements qui ont été mal servis, comme celui de l'Oise que vous représentez.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle.
M. Alain Vasselle. Monsieur le ministre, je tiens à vous remercier des éléments de réponse que vous avez bien voulu porter à la connaissance de la Haute Assemblée. Je ne manquerai pas de m'en faire écho auprès de la profession agricole de mon département.
Quelques-unes de ces informations sont de nature à apaiser les inquiétudes. Des mesures de substitution permettront en effet aux agriculteurs qui ne seront plus éligibles au CAD de pouvoir bénéficier du plan végétal pour l'environnement et des mesures agro-environnementales.
J'entends bien que vous attendez du collectif budgétaire la possibilité d'obtenir des crédits supplémentaires pour les CAD qui n'ont pas pu être financés jusqu'à présent.
Toutefois, je souhaite que le collectif budgétaire ainsi que la prochaine loi de finances permettent d'aller au-delà des crédits qui seront mobilisés en faveur du plan végétal pour l'environnement. En effet, 14 millions d'euros pour financer des mesures agro-environnementales pour tous les professionnels agricoles du nord de la Loire, c'est bien peu à côté des 100 millions d'euros réservés au CAD !
J'ai également conscience que votre marge de manoeuvre est très étroite et que vous dépendez totalement de la politique européenne.
J'entends bien également que vous-même et le Président de la République faites preuve de la plus grande fermeté afin de ne pas sacrifier les intérêts de l'agriculture française.
Enfin, je souhaite appeler votre attention sur un point, mais je ne sais pas comment vous pourriez le graver dans le marbre.
Je sais que l'Europe offre la possibilité aux États qui le souhaitent de pouvoir faire passer la modulation de 5 % à 25 %. Or ma grande crainte est que, dans les années à venir, l'un des gouvernements qui succèdera à celui auquel vous appartenez ne soit tenté d'utiliser cette marge de manoeuvre. Il ne faudrait surtout pas que cela se produise, et nous ferons tout pour l'éviter. À défaut, l'agriculture française serait mise à mal et se retrouverait en sérieuse difficulté : non seulement la trésorerie des exploitations serait consommée, mais en plus on commencerait à creuser le trou !
Je sais que vous avez conscience de tout cela, monsieur le ministre. C'est pourquoi je vous remercie de tout faire pour continuer à défendre avec le talent qui est le vôtre l'intérêt de la profession agricole.
Institution d'un fonds de solidarité nationale intervenant lors de certaines procédures de licenciement
M. le président. La parole est à M. Louis Souvet, auteur de la question n° 1011, adressée à M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes.
M. Louis Souvet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les mécanismes de prise en charge des salariés lors des licenciements collectifs sont ce qu'ils sont, à savoir toujours perfectibles. Cependant, ils ont au moins le mérite de permettre le versement des reliquats de salaires, des primes diverses, etc. Encore faut-il que toutes les pièces administratives ad hoc soient fournies. Selon les contextes et les enjeux tant économiques que sociaux du moment, cela n'est pas toujours le cas.
Les salariés en question, avec des dossiers temporairement incomplets - j'insiste sur le terme « temporairement » -, ne peuvent prétendre percevoir ces indemnités en temps utile. Certains licenciements collectifs se déroulent en effet dans des circonstances telles que le strict respect de la procédure ne peut pas toujours être assuré. Il conviendrait donc, à l'instar des accidents de voiture impliquant un conducteur non assuré, de mettre en place un fonds national de solidarité, qui, de façon temporaire, permettrait de verser des avances de trésorerie aux salariés ne pouvant pas apporter provisoirement toutes les pièces nécessaires à l'administration.
Il s'agit non pas d'instituer un énième mécanisme de versement d'allocations chômage, mais de pallier les conséquences financières d'un plan social ne se déroulant pas strictement selon les exigences légales.
Les organismes officiels - l'ANPE, les ASSEDIC - ne peuvent logiquement prendre en compte que des dossiers complets. Or, il existe un risque avéré que, pendant l'instruction des dossiers, les paiements soient différés de quelques mois, avec toutes les conséquences financières que cela induit pour les ménages concernés.
Afin que l'esprit de mon intervention soit bien compris, j'insiste, d'une part, sur le caractère collectif d'une telle situation et, d'autre part, sur l'impossibilité temporaire pour les salariés en question de percevoir des indemnités et des salaires qui sont indiscutables, car ils découlent de règles très précises et encadrées.
Par conséquent, monsieur le ministre, et sans vouloir aucunement remettre en cause les principaux équilibres et les dispositions essentielles de la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, entrée en vigueur le 1er janvier 2006 et complétant le décret n° 85-295 du 1er mars 1985 pris pour application de la loi relative à la prévention et au règlement amiable des difficultés des entreprises, je vous demande si de telles situations bien spécifiques pourraient être prises en compte.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Monsieur le sénateur, vous appelez l'attention du Gouvernement sur les difficultés que peuvent rencontrer certains demandeurs d'emploi pour justifier de leurs droits aux allocations chômage et sur la mise en place d'un fonds national de solidarité se substituant temporairement, comme vous l'avez précisé, à l'assurance chômage pour des procédures collectives.
Tout d'abord, il est bon que je rappelle la situation. Ensuite, parce que c'est d'actualité, je tracerai les perspectives ouvertes par la signature de l'accord tripartite entre l'État, l'ANPE et l'UNEDIC, qui a eu lieu le 5 mai dernier et qui jette les bases d'un rapprochement longtemps espéré et que le Gouvernement vient de réussir à accomplir.
En ce qui concerne la situation, je rappelle que, afin de bénéficier du droit aux allocations, le demandeur d'emploi doit remettre à l'ASSEDIC dont il dépend les pièces justificatives permettant le calcul de ses droits, notamment l'attestation prévue à l'article R. 351-5 du code du travail. Selon les termes de ce même article, l'employeur est d'ailleurs tenu de lui délivrer cette attestation au moment de la résiliation, de l'expiration ou de la rupture du contrat de travail sous peine de sanctions.
À la suite d'un décret du 30 mars 2006 - c'est donc tout à fait récent - modifiant l'article L. 351-5 du code du travail, les employeurs doivent désormais transmettre directement l'attestation aux organismes d'assurance chômage. Cette démarche obligatoire doit permettre de simplifier les démarches du demandeur d'emploi au moment de son inscription et d'accélérer sa prise en charge par le régime d'assurance chômage, lui évitant ainsi le risque de se trouver temporairement sans ressource.
En cas d'impossibilité totale d'obtenir ce document - cela peut effectivement se produire, y compris lors de procédures collectives, et j'ai d'ailleurs un cas de ce type présent à l'esprit -, si l'employeur n'existe plus au moment de la demande d'ouverture des droits, les ASSEDIC peuvent prononcer une ouverture des droits après examen du dossier par une commission paritaire.
Par ailleurs, il convient de rappeler que, dans le cadre d'une procédure de licenciement, les conditions de prise en charge au titre de l'assurance chômage, notamment celles qui ont trait au délai de versement de l'allocation, peuvent varier sensiblement selon la situation des personnes ayant été licenciées, voire suivant les options qu'elles auraient prises : je pense à cet égard à une convention de reclassement personnalisée, sachant que 50 000 conventions de reclassement personnalisé ont déjà été signées, alors que ce système n'a été mis en place qu'en juin dernier.
Les règles d'assurance chômage prévoient un décalage dans le temps du début de l'indemnisation. Celui-ci doit notamment tenir compte des indemnités versées par l'employeur au titre des congés payés non pris et des indemnités de licenciement dont le montant serait supérieur aux minima légaux en vigueur.
Dans nombre de cas, le versement de l'allocation chômage ne peut intervenir dès le lendemain de la cessation du contrat de travail. Selon le niveau des indemnités qu'aura perçu le salarié, ce décalage peut atteindre plusieurs semaines. Sans pour autant constituer un prétexte pour l'employeur à se décharger de ces obligations, ce décalage peut atténuer les conséquences d'un éventuel retard.
J'en viens aux perspectives que vous tracez, monsieur le sénateur.
Les règles de prise en charge des allocataires par l'assurance chômage, les nouvelles obligations que j'évoquais, qui pèsent sur les employeurs du fait des dispositions prévues par le code du travail, devraient permettre de réduire au maximum les délais de prise en charge des demandeurs d'emploi.
Plus généralement, et nous partageons votre préoccupation, la réduction des délais et la simplification des démarches sont des objectifs importants pour les partenaires sociaux et pour l'État. Il s'agit de réduire au maximum les risques de rupture, non seulement en termes de prise en charge au titre de l'indemnisation, mais aussi au titre de l'accompagnement du demandeur d'emploi dans sa recherche d'emploi.
En ce sens, la signature du 5 mai 2006 - soit vendredi dernier - de la convention entre l'État, l'ANPE et l'UNEDIC relative à la coordination des actions du service public de l'emploi nous paraît constituer une étape importante. Elle permettra de simplifier les démarches des demandeurs d'emploi et d'améliorer l'efficacité de leur accompagnement. Je rappelle les objectifs : un guichet unique, un parcours d'accompagnement différencié, un dossier unique du demandeur d'emploi et un système informatique unique. Ce ne sont donc plus simplement des perspectives, c'est aujourd'hui une réalité !
Une évaluation est prévue au bout d'un an. Le comité de pilotage tripartite examinera si les difficultés que vous avez soulignées ont pu être réduites. Si tel n'était pas le cas, il pourrait être envisagé un dispositif de solidarité en essayant de trouver une formule simple. En effet, comme vous l'avez dit vous-même, s'agissant de procédures par nature complexes et variant suivant la situation du salarié, nous pourrions paradoxalement assister à une complexification au moment d'établir les compensations.
Voilà pourquoi la signature de cette convention tripartie est un moment important. Je sais que la Haute Assemblée la souhaitait depuis longtemps. La commission des affaires sociales, au sein de laquelle vous jouez un rôle important, monsieur Souvet, la demandait. Cette convention tripartite est donc le fruit d'un long travail, qui s'est déroulé dans le dialogue et la concertation.
Il sera également important que la représentation nationale puisse examiner au bout d'une année si, parmi toutes les préoccupations, la vôtre a été prise en compte par le travail réalisé en commun dans le cadre de la convention tripartite.
M. le président. La parole est à M. Louis Souvet.
M. Louis Souvet. Monsieur le ministre, je voudrais vous remercier des précisions que vous venez d'apporter.
Si je vous ai posé cette question, c'est parce que j'ai malheureusement vécu de tels cas, de surcroît avec des employeurs étrangers, ce qui rendait la situation encore plus complexe. Dans ces conditions, je persiste et signe.
Comme vous l'avez proposé, il est nécessaire que, dans un an - peut-être pour un nombre de cas limités, mais qui sont graves -, le Parlement se penche sur l'application de la convention passée entre l'État, l'ANPE et l'UNEDIC. Ainsi, nous aurons l'occasion d'évaluer s'il est nécessaire de créer ou non un fonds national de solidarité.
réglementation du marché du travail
M. le président. La parole est à M. Georges Mouly, auteur de la question n° 1019, adressée à M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes.
M. Georges Mouly. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en janvier dernier, le Sénat a examiné le projet de loi déclaré d'urgence pour le retour à l'emploi et les droits et les devoirs des bénéficiaires de minima sociaux.
J'avais approuvé ce texte, mais j'avais également regretté que la démarche ne se situe pas dans le cadre d'une réforme globale tendant à apporter plus de lisibilité. De ce point de vue - c'est une preuve a contrario -, j'avais mentionné l'existence d'une dizaine de contrats, en en omettant sans doute autant, et j'en oublierais encore aujourd'hui si je me hasardais à vouloir tous les citer. J'avais conclu en exprimant le souhait que l'on prenne toujours le temps de dresser le bilan d'une formule existante et de bien clarifier, expliquer et informer en vue d'une meilleure mobilisation en faveur de l'emploi.
Depuis plusieurs mois, le chômage diminue. On ne peut évidemment que s'en réjouir. Ce résultat est lié au retour de la croissance, mais il est également le fruit d'une politique gouvernementale avec des éléments forts, et disant cela, je pense notamment à certains aspects du plan de cohésion sociale.
Dans ce contexte, et même si cela peut paraître paradoxal alors que la situation s'améliore, il serait à mon avis souhaitable - mon collègue M. Bernard Murat m'a d'ailleurs demandé de l'associer à cette démarche - d'y voir plus clair dans ce que d'aucuns ont appelé la « galaxie des contrats », ainsi peut-être que dans les aides aux entreprises.
Ainsi, le Conseil d'État observe que de « nouveaux contrats de travail spéciaux aidés ou dérogatoires sont constamment créés ». De même, le Haut Conseil de la population et de la famille regrette la segmentation par âge et constate que la lourdeur et la complexité des procédures contribuent à créer une instabilité juridique.
Même s'il est exprimé différemment, ce sentiment est d'ailleurs partagé par le MEDEF et le Conseil d'État. Ce dernier relève la complexité croissante du droit, ainsi que l'insécurité juridique qui en découle pour les entreprises, en particulier pour les plus petites d'entre elles.
Je mentionnerai également un autre point de vue, celui du Centre des jeunes dirigeants d'entreprise, dont la présidente déclarait récemment que « trop de contrats tue l'efficacité » ; elle ajoutait ceci : « je défie n'importe quel chef d'entreprise de me citer tous les contrats existants ».
Monsieur le ministre, je n'irai pas jusqu'à poser aujourd'hui la question de savoir, même si c'est le point de vue de quelques personnes autorisées, s'il faudrait mettre en place des contrats spécifiques ou plutôt opérer une réforme générale du contrat à durée indéterminée, le CDI.
Mais n'y aurait-il pas lieu - c'est là ma question - que le Gouvernement et l'ensemble des acteurs concernés envisagent une réflexion sur le sujet précis d'une simplification destinée à apporter plus de clarté dans cette galaxie des contrats ? Au demeurant, n'est-ce pas déjà une démarche de ce type qui a abouti à la proposition de loi sur l'accès des jeunes à la vie active en entreprise ? Ce sont en effet trois contrats précisément ciblés.
À cet égard, je citerai l'invitation faite par le Gouvernement aux employeurs : « Simplifiez-vous l'embauche ! Des outils adaptés pour un recrutement plus facile ».
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Monsieur le sénateur, vous avez mentionné le projet de loi pour le retour à l'emploi et les droits et les devoirs des bénéficiaires de minima sociaux. Vous avez également évoqué la situation de l'emploi et les 200 000 chômeurs de moins.
Permettez-moi d'aborder la question de l'apprentissage. Dans le cadre de la journée de l'Europe, je recevais ce matin des apprentis, dont certains sont engagés dans le programme Leonardo. Celui-ci nous permettra d'élargir les échanges avec d'autres pays européens, échanges qui concernent seulement 2 % de nos apprentis aujourd'hui. L'objectif du Gouvernement est de multiplier ce nombre par quatre pour donner plus d'ouvertures à ces jeunes.
C'est d'ailleurs l'un des éléments des contrats d'objectifs et de moyens que nous avons signés avec toutes les régions métropolitaines. Sur les trois premiers mois de l'année, le nombre des contrats de professionnalisation signés a progressé de 30 %. Cela fait partie d'un certain nombre de signes tout à fait encourageants.
Mais j'en reviens au nombre de contrats. Je vais me hasarder à vous donner un chiffre, monsieur le sénateur. Il y a une vingtaine de contrats ou, du moins, dix-sept familles différentes de contrats. Je parle bien de contrats de travail, et non de dispositifs que l'on qualifie abusivement de contrats, mais qui, en tant que tels, ne recouvrent pas tel ou tel point soit législatif, soit réglementaire, soit issu d'accords conventionnels. Tout cela entraîne un certain manque de lisibilité du fait de la segmentation, à laquelle s'ajoutent des recoupements partiels.
Afin de contribuer à la mise en oeuvre d'une politique d'égalité des chances, vous vous demandez s'il ne serait pas opportun d'organiser une table ronde rassemblant les pouvoirs publics et les partenaires sociaux en vue d'une nécessaire simplification.
Il est exact que le code du travail est devenu difficile d'accès et peu lisible. Un certain nombre de contrats ont été créés depuis de longues années pour répondre à des situations diverses en vue de favoriser le retour à l'emploi, notamment des personnes en difficulté.
La démarche qui a conduit à la création d'une vingtaine de types de contrats avait pour objet d'essayer de lutter contre le chômage et de faciliter le retour à l'emploi.
Ces contrats sont parfois mal connus et participent d'une certaine complexité. Or, tous les acteurs concernés, qu'ils soient salariés, employeurs, organisations professionnelles ou syndicales et corps de contrôle, doivent pouvoir appliquer l'ensemble des dispositifs existants, et ce avec une totale sécurité juridique.
Voilà pourquoi nous avons souhaité engager le chantier de la recodification du droit du travail d'abord à droits constants. La mise en cohérence qui en résultera facilitera la compréhension des différents contrats existants. C'est un aspect de l'effort de simplification du droit mené par le Gouvernement.
En fait, l'adaptation du droit des contrats de travail est un mouvement permanent. Cela doit permettre de favoriser la rencontre de l'offre et de la demande sur le marché du travail, qui a lui-même évolué.
Monsieur le sénateur, vous nous suggérez l'organisation d'une table ronde. M. le Premier ministre l'a souhaitée devant la commission nationale de la négociation collective le 12 décembre dernier.
L'équilibre semble pouvoir être amélioré. Voilà quelques semaines, le MEDEF a adressé un courrier à l'ensemble des organisations syndicales afin de les inviter à faire le point sur de nouveaux sujets de discussion, notamment pour réfléchir sur l'ensemble des situations de précarité et de flexibilité. J'ai naturellement rencontré les partenaires sociaux depuis l'envoi de ce courrier. Des rencontres entre ces derniers doivent se dérouler d'ici à la fin du mois de mai et au cours du mois de juin.
Des sujets comme la sécurisation des parcours professionnels et la rupture négociée pourraient être abordés en liaison avec les partenaires sociaux et dans le respect du dialogue entre ces derniers. Le Gouvernement suivra avec attention ces dossiers.
Nous avons récemment eu un débat national sur le contrat de travail. Nous avons rencontré des difficultés, mais un certain nombre d'idées ont fait leur chemin. Les partenaires sociaux sont, je crois, en train de se saisir de l'idée d'une nécessité de nous adapter aux réalités du marché du travail tout en sécurisant les parcours et en luttant contre la précarité. Il y a là des terrains nouveaux. Nul doute que le dialogue social permettra de les enrichir dans les semaines à venir. Quoi qu'il en soit, le Gouvernement est extrêmement attentif à ces questions, tout comme il sera attentif - vous aurez bientôt à connaître ce sujet - à l'avancement de la recodification du droit du travail à droits constants, recodification que nous souhaitons voir aboutir avant la fin de cette année.
M. le président. La parole est à M. Georges Mouly.
M. Georges Mouly. Monsieur le ministre, je vous remercie de la teneur de votre propos, qui me donne satisfaction sur le fond.
Certes, j'ai bien conscience que la création de multiples contrats avait pour objet de répondre à des situations précises, chaque contrat correspondant à une réalité donnée. Il n'empêche que le résultat en est bien la situation que j'ai décrite. Vous en convenez d'ailleurs, monsieur le ministre, si j'ai bien compris.
Puisque vous avez évoqué l'apprentissage, permettez-moi de faire une brève parenthèse. J'avais prévu de poser une question orale avec débat sur ce sujet, mais je crois que je vais y renoncer, et ce pour plusieurs raisons. D'abord, nombre d'actions sont déjà menées. Ensuite, j'ai sous les yeux un document relatif aux journées de l'apprentissage, au cours desquelles nombre de choses ont été dites. Toujours est-il que je resterai très vigilant sur ce sujet, qui constitue un aspect de la politique gouvernementale et sociale auquel je tiens beaucoup.
Monsieur le ministre, ce n'est pas à vous que j'apprendrai la qualité et la nécessité du dialogue. De ce point de vue-là, je vous remercie de votre action. En l'occurrence, le dialogue que je souhaitais est entamé. J'espère que, entre autres résultats, nous parviendrons à ce que j'appelle encore de mes voeux, à savoir la clarté nécessaire pour parvenir à la situation souhaitée par tous.
conditions d'exercice de la compétence « route » transférée aux départements
M. le président. La parole est à M. Alain Fouché, auteur de la question n° 995, adressée à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.
M. Alain Fouché. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question est certes de nature technique, mais elle est importante s'agissant des transferts de compétence.
Dans le cadre de l'application de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, je souhaite vous interroger sur la mise en oeuvre du transfert aux conseils généraux des moyens mis à leur disposition au titre de la compétence des routes départementales et des moyens correspondant au transfert des routes nationales d'intérêt local.
En effet, s'agissant des moyens en personnel, les éléments qui sont aujourd'hui notifiés aux présidents des conseils généraux font apparaître, d'une part, le nombre d'agents calculé en équivalent temps plein nécessaire à l'exercice des compétences et, d'autre part, l'effectif transféré, qui est limité au nombre entier d'agents calculé dans chaque catégorie de personnel.
Dans le département de la Vienne, que j'ai l'honneur de présider, le calcul effectué au titre des activités dites « supports » fait apparaître que deux agents et demi devraient être transférés, alors qu'un seul le sera.
Ainsi, l'État, dans une période où il doit rechercher des économies et la meilleure gestion possible de ses moyens en personnel, ne transfère pas aux départements les moyens nécessaires à l'exercice de leurs compétences, et les effectifs non transférés donnent lieu à une compensation financière.
Par conséquent, monsieur le ministre, je vous remercie de bien vouloir, d'une part, me confirmer que les départements recevront effectivement, pour exercer leurs compétences, les moyens nécessaires tels qu'ils ont été définis par les calculs conduits en application de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, et, d'autre part, m'indiquer si le transfert aux départements d'un nombre d'agents arrondi selon des modalités négociées ou en fonction d'une masse salariale équivalente peut être envisagé.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Perben, ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer. Monsieur le sénateur, je voudrais d'abord vous rassurer sur le fait que les départements se verront bien transférer au titre de la compétence « route » les moyens équivalents à ceux que l'État consacrait avant transfert, comme le prévoit la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.
Le dimensionnement des moyens humains a effectivement constitué la question la plus difficile. Nous avons d'ailleurs déjà eu l'occasion d'en débattre, monsieur le sénateur. En effet, après la définition du réseau transféré et du réseau maintenu sous responsabilité d'État, la question la plus difficile a été celle des effectifs humains, et donc du transfert à prévoir en ce domaine.
Le principe retenu, s'agissant des moyens humains, est celui d'une discussion entre le conseil général et les services de l'équipement, sous l'égide du préfet.
Ces moyens se décomposent en deux volets.
Le premier volet comprend les emplois en nombre entier sur lesquels des agents pourront se positionner. Ce point est très important. Le processus se déroulera en effet en deux phases : tout d'abord, le nombre d'emplois transférés sera défini ; ensuite, le personnel pourra se porter candidat soit aux emplois transférés, soit aux emplois maintenus.
Le second volet comprend les fractions d'emplois qui seront compensées financièrement, conformément à la loi.
Ces fractions peuvent effectivement donner lieu à des discussions. À cet égard, monsieur le sénateur, vous avez cité l'exemple précis d'une catégorie de personnels de la Vienne. Il faut en effet veiller à ce que l'enveloppe financière correspondant aux fractions d'emplois ne soit pas utilisée comme marge de manoeuvre, en vue de faciliter les choses.
J'ai donc demandé aux directeurs de l'équipement et aux préfets, dans leurs discussions avec les conseils généraux, de privilégier le premier volet, c'est-à-dire les emplois entiers ; ces derniers correspondent en effet à des personnels qui sont en poste, qui connaissent le métier, ont de l'expérience, et sont donc susceptibles, s'ils le souhaitent, d'entrer dans les organigrammes proposés par les conseils généraux. L'enveloppe financière doit donc être limitée au minimum incontournable.
Par ailleurs, vous indiquez, monsieur le sénateur, que l'État est maintenant parvenu à un accord avec la très grande majorité des départements. C'est d'ailleurs le cas avec votre propre département.
Toutefois, un certain nombre de départements restent en désaccord avec les services du ministère. Dans ces cas-là, les arrêtés de mise à disposition ne seront pris qu'après avis motivé de la Commission nationale de conciliation, comme le prévoit la loi du 13 août 2004.
M. le président. La parole est à M. Alain Fouché.
M. Alain Fouché. Je vous remercie, monsieur le ministre, des explications que vous avez données. Je suis heureux que, dans ce domaine, les emplois entiers soient privilégiés.
Circulation des ambulances sur les voies réservées aux bus et taxis à Paris
M. le président. La parole est à M. Roger Madec, auteur de la question n° 993, adressée à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.
M. Roger Madec. Je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur les difficultés croissantes rencontrées à Paris par les ambulanciers dans l'accomplissement de leur mission.
En effet, au terme de la réglementation, le droit d'utiliser les voies réservées renvoie à deux logiques distinctes, le transport de voyageurs, d'une part, et le transport d'urgence, d'autre part.
Ainsi, l'article L. 2213-3 du code général des collectivités territoriales précise que des voies de circulation peuvent être réservées aux transports publics de voyageurs et aux taxis. La notion d'urgence relève, quant à elle, du code de la route, qui définit à l'article R.311-1 les catégories de véhicules d'intérêt général prioritaires et de véhicules d'intérêt général bénéficiant de facilités de passage.
En pratique, le recours aux couloirs d'autobus est exceptionnellement possible pour les ambulanciers, qui sont considérés comme des véhicules d'intérêt général, alors qu'il est permis aux taxis.
Cette distorsion dans le traitement des patients tend à accroître l'activité des unités mobiles hospitalières, mais aussi celle des pompiers de Paris. En outre, elle entraîne, de fait, une concurrence déloyale entre les compagnies d'ambulances privées et les taxis parisiens. On dénombre, à Paris et dans sa petite couronne, quelque cinq cents ambulances. L'autorisation de circuler dans les couloirs de bus et de taxis ne me paraît donc pas de nature à favoriser un usage abusif des voies réservées.
Enfin, je tiens à rappeler que, au cours du mois de juillet 2005, quatre caméras automatiques ont été installées dans les couloirs de bus. Cette mesure a engendré une multitude de contraventions à l'encontre des ambulanciers parisiens. Les compagnies d'ambulances, selon leurs estimations, ont cumulé plus de 1 million d'euros d'amendes.
Ces difficultés mettent l'activité des ambulanciers parisiens en danger.
Je souhaiterais donc, monsieur le ministre, que, pour répondre à l'inquiétude de ces professionnels, vous procédiez à une modification de la réglementation.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Perben, ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer. Monsieur le sénateur, vous avez rappelé l'état actuel du droit, qui peut effectivement donner lieu à un certain nombre de confusions.
Aujourd'hui, les services mobiles d'urgence et de réanimation rattachés à un SAMU sont prioritaires.
S'agissant des véhicules de transport sanitaire, plus particulièrement les véhicules sanitaires légers, les VSL, il y a effectivement une différence de traitement. Les ambulances sont considérées comme des véhicules d'intérêt général bénéficiant de facilités de passage, les VSL étant, quant à eux, considérés comme des véhicules normaux.
Une différence existe également entre Paris et les autres villes.
À Paris, aux termes de l'ordonnance préfectorale du 15 septembre 1971, les ambulances ont accès aux couloirs d'autobus, mais uniquement lorsqu'elles interviennent en urgence. Cela pose, j'en conviens, une difficulté d'interprétation : dans quels cas la situation est-elle urgente ? Dans quels cas l'est-elle moins ?
Dans les autres villes au contraire, aucun texte n'autorise les ambulances à emprunter les couloirs réservés, alors que cette facilité est offerte, comme vous l'avez rappelé, aux autobus et aux taxis.
Il faut en effet sortir de cette situation. Je suis donc tout à fait favorable à ce qu'une réflexion s'engage sur l'ouverture des voies réservées, dans des conditions restant à déterminer, non seulement aux ambulances, mais également à l'ensemble des véhicules de transport sanitaire, y compris les VSL.
Le plus simple serait de procéder à une modification de l'article L. 2213-3 du code général des collectivités territoriales afin d'ajouter les véhicules de transport sanitaire à la liste des véhicules dont les maires peuvent faciliter la circulation dans les voies réservées. Un véhicule législatif doit être trouvé pour modifier cet article, en lien étroit avec le ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, mais je pense que nous devrions y parvenir.
En ce qui me concerne, je suis tout à fait prêt à aller dans cette direction. La situation actuelle n'est en effet pas satisfaisante, car elle n'est pas conforme au bon sens.
M. le président. La parole est à M. Roger Madec.
M. Roger Madec. Je me félicite de notre convergence de vue, monsieur le ministre. Il faut en effet mettre fin à ce dysfonctionnement.
Avenir du port de Dieppe
M. le président. La parole est à Mme Sandrine Hurel, auteur de la question n° 1016, adressée à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.
Mme Sandrine Hurel. Monsieur le ministre, Dieppe, ville maritime et touristique située entre Rouen et Le Havre, a en partie bâti son économie autour de quatre activités portuaires : le Transmanche, lien économique entre la France et la Grande-Bretagne ; la pêche, Dieppe étant le premier port pour la coquille Saint-Jacques ; la plaisance, qui constitue un vecteur économique et touristique important ; enfin, le port de commerce, qui génère plus de 2 000 emplois directs et indirects.
Or, depuis des années, le Gouvernement a laissé à l'abandon le port de Dieppe, qui est pourtant un port d'intérêt national.
Récemment, le Gouvernement, par la voix de son représentant, le préfet de région, a annoncé sa décision de ne pas financer un certain nombre de projets liés à la rénovation du port de Dieppe et au désenclavement de notre territoire, notamment l'achèvement de la route nationale 27, restée dans le giron de l'État, ces projets étant pourtant inscrits dans le contrat de plan État-région signé en 2000.
Sur la forme, je ne peux que regretter la méthode consistant à faire connaître par voie de presse les intentions du Gouvernement, en ignorant totalement les élus locaux concernés.
Sur le fond, au moment même où la vocation portuaire de Dieppe est réaffirmée avec force par le département et la région, il n'est pas acceptable que le Gouvernement réduise à néant le travail entrepris depuis des mois par tous les acteurs économiques et politiques.
En ne respectant pas le contrat de plan État-région, le Gouvernement compromet concrètement la nécessaire remise à niveau des équipements portuaires. Il compromet également le transfert du port de Dieppe, qui doit intervenir le 1er janvier 2007, conformément à la loi du 13 août 2004, et, en premier lieu, la négociation avec la région Haute-Normandie.
Six mois après avoir fait acte de candidature à la reprise du port de Dieppe, la région ne dispose toujours pas de l'ensemble des informations administratives, techniques et financières lui permettant d'appréhender l'état du port et de réfléchir ainsi en toute connaissance de cause à sa stratégie de développement future.
Je pense en particulier au devenir de la concession et de la dette contractée par l'actuel concessionnaire, à savoir la chambre de commerce et d'industrie de Dieppe, à la liste des personnels concernés par ce transfert, à la délimitation des limites administratives du port, mais aussi et surtout - c'est le plus important - au montant des dotations financières transférables à la région.
Je vous demande donc, monsieur le ministre, de bien vouloir clarifier la situation à cet égard. Il s'agit en effet de questions capitales pour la collectivité qui assumera la compétence du port et vitales pour l'avenir économique de la région dieppoise.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Perben, ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer. Madame la sénatrice, je sais comme vous combien la situation du port de Dieppe est préoccupante, alors que le principal importateur, filiale du groupe Sea-invest, vient d'indiquer qu'il arrêtait toutes ses escales commerciales.
Je sais que la chambre de commerce et d'industrie s'emploie à trouver de nouvelles perspectives de développement. Je suis d'ailleurs actuellement en discussion avec sa présidente et le bureau de la chambre, que je dois recevoir de nouveau dans les prochains jours.
Pour l'heure, cette situation a conduit à la liquidation de la société de manutention et au licenciement des quarante-sept dockers du port. J'ai demandé, dès le mois de février dernier, au préfet de région d'engager avec l'opérateur et les collectivités partenaires du port des discussions pour trouver le meilleur dispositif possible afin d'atténuer les conséquences de cette situation pour les personnels. Je souhaite que, comme cela a été le cas récemment pour Brest, des réponses puissent être trouvées à un tel sinistre.
La situation de la concession portuaire, qui est difficile, fait l'objet d'une attention toute particulière de la part de mes services et de moi-même, ainsi que de la part des autres services de l'État concernés et de la chambre de commerce et d'industrie de Dieppe.
Le préfet discute également du transfert de ce port avec la région Haute-Normandie, dans le cadre de la loi du 13 août 2004. Des décisions difficiles doivent être prises.
Vous avez rappelé l'essentiel des problèmes qui se posent : que va-t-il en effet se passer concernant les engagements financiers, les dettes ? Où en sont les discussions entre le concessionnaire actuel et la structure porteuse de demain ? Ces discussions n'ont pas abouti pour l'instant, mais il est effectivement indispensable de les accélérer.
Vous avez également évoqué, madame la sénatrice, les projets inscrits dans le contrat de plan État-région. Il est vrai que les difficultés du port n'ont pas permis de suivre le déroulement prévu.
Toutefois, plusieurs opérations inscrites dans ce plan doivent être réalisées cette année, le niveau d'engagement de l'État pour 2006 s'élevant à près de 500 000 euros : les études nécessaires à la restauration des quais seront menées ; les travaux du quai de la Marne seront lancés. Les études préalables à la remise en état du système de manoeuvre du pont Jean Ango seront également réalisées.
Quant aux crédits de paiement, prévus à hauteur de 840 000 euros cette année, ils permettront, avec l'accord de la région, la restauration des portes du bassin de pêche.
Je peux donc vous assurer que cette question retient toute l'attention de l'État et que celui-ci se mobilise afin de trouver la meilleure issue possible à la situation actuelle.
Vous avez également évoqué la desserte routière du port de Dieppe, la section de la RN 27 située entre Manéhouville et Dieppe, qui constitue le dernier maillon de la liaison vers Rouen et doit être aménagée en deux fois deux voies. Cet itinéraire a été maintenu, vous l'avez dit, dans le réseau routier national. Cette liaison, très importante pour l'État, est d'intérêt national.
La concertation conduite avec l'ensemble des collectivités locales et des acteurs socio-économiques concernés a permis d'arrêter un tracé en 2005. Le projet est déclaré d'utilité publique depuis le mois de novembre dernier. Nous poursuivons les études de détail nécessaires. Les travaux pourront être engagés sur cette voie de desserte en 2007, grâce aux crédits inscrits dans l'actuel contrat de plan État-région, comme cela avait été prévu.
M. le président. La parole est à Mme Sandrine Hurel.
Mme Sandrine Hurel. Je vous remercie, monsieur le ministre, de toutes ces précisions, qui laissent penser que vous êtes effectivement attentif à l'avenir du port de Dieppe.
Vous comprendrez, bien sûr, que les élus, les acteurs économiques et sociaux, ainsi que les habitants de la région de Dieppe soient inquiets. L'activité du port est en effet importante pour l'économie dieppoise.
Permettez-moi d'ajouter une précision s'agissant des discussions qui sont engagées avec le préfet sur le licenciement des dockers. Le département et la région ont fait des propositions financières ; nous attendons maintenant l'accord des personnels, dont il faut régler la situation, pour finaliser ce dossier.
J'espère, monsieur le ministre, que nous aurons, dans un avenir proche, l'occasion de nous réjouir d'une issue positive. J'espère aussi que nous pourrons avancer avec vos services concernant le transfert du port de Dieppe, car la région est prête à donner à ce dernier une nouvelle dynamique et à investir en ce sens. Pour cela, vous l'avez compris, nous avons besoin de disposer de toutes les informations le concernant et, surtout, de moyens financiers.
réforme de la filière d'enseignement des sciences et techniques de laboratoire
M. le président. La parole est à M. Philippe Madrelle, auteur de la question n° 1014, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
M. Philippe Madrelle. Monsieur le ministre, je souhaiterais vivement que vous nous apportiez des précisions sur le projet de réforme des baccalauréats de la série technologique « sciences et technologies de laboratoire » dans les lycées professionnels. Ce matin, je me fais le porte-parole d'une certaine catégorie de professeurs, les enseignants des sciences et techniques de laboratoire, qui sont inquiets face au projet de rénovation des enseignements dispensés au sein de cette filière.
Trop souvent délaissé, pour ne pas dire méprisé, au profit de l'enseignement dit « classique », l'enseignement technique présente pourtant un certain nombre d'avantages puisqu'il propose aux élèves un véritable choix entre différentes matières. En effet, jusqu'à maintenant, les lycéens ayant opté pour ce type d'enseignement pouvaient choisir entre les trois options « physique », « chimie » ou « biologie-génie biologique », qui correspondent à des domaines technologiques bien différenciés.
Grâce à cette faculté de choix, les lycéens peuvent exercer leurs talents notamment au cours des différentes séances de travaux pratiques effectuées en laboratoire sous la conduite de leurs enseignants respectifs. Ces séances devaient permettre à certains élèves de se révéler dans telle ou telle matière, de trouver ainsi leur voie et leur motivation pour préparer et pour passer avec succès un baccalauréat scientifique.
Ces mêmes élèves, souvent issus de milieux sociaux défavorisés, n'auraient peut-être pas pu atteindre cet objectif en suivant une filière classique qui les aurait conduits à l'échec.
Chaque filière, qui débouche sur une offre riche en matière d'enseignement supérieur, permet aux titulaires du baccalauréat de poursuivre soit en BTS, soit en DUT ou, pour les meilleurs d'entre eux, en section de classes préparatoires aux grandes écoles.
Il suffit de consulter les statistiques d'insertion professionnelle de ces jeunes dans les différents emplois de technicien, de technicien supérieur, d'ingénieur pour constater leur réussite professionnelle.
Vous en conviendrez, monsieur le ministre, la qualité des baccalauréats technologiques n'est plus à démontrer. Cette force repose sur la construction de la réussite des élèves à partir d'une pédagogie fondée sur la motivation des jeunes dans un domaine technologique donné associée à un enseignement technologique lourd. Face à un succès aussi encourageant, pourquoi envisager une réforme d'un système qui fonctionne et qui a fait ses preuves ?
Vous comprendrez donc l'inquiétude des enseignants des lycées techniques face à ce projet de fusion des enseignements qui risque de conduire à un ensemble informe et incohérent, annulant de facto la performance pédagogique et scientifique de ces sections.
Au moment où la jeunesse de notre pays est inquiète et attend des réponses fortes quant à son avenir, il me paraît essentiel, monsieur le ministre, de revoir ce projet de réforme des baccalauréats de la série technologique « sciences et technologies de laboratoire », en fonction des objectifs de réussite scolaire et professionnelle des lycéens et en privilégiant le dialogue et la concertation.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Perben, ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer. Monsieur le président, je répondrai à la place de M. de Robien, qui ne peut être présent au Sénat ce matin.
Monsieur Madrelle, la rénovation de la voie technologique a pour objet de permettre à un plus grand nombre de lycéens suivant ce type d'enseignement d'accéder, s'ils le souhaitent, à l'enseignement supérieur. L'objectif consistant à faire en sorte que l'enseignement supérieur soit accessible, quelles que soient les filières suivies dans l'enseignement secondaire, est largement partagé.
M. de Robien tient à rappeler qu'il a rénové la série « sciences et technologies tertiaires », dorénavant dénommée « sciences et technologies de la gestion ».
Au cours des derniers mois, les services de l'éducation nationale ont étudié plusieurs hypothèses pour adapter les enseignements des autres séries à l'évolution technologique.
Ces travaux préparatoires ont permis de lancer, au cours du mois dernier, la consultation des enseignants sur les nouveaux programmes proposés pour la série « sciences médico-sociales » qui seront mis en application à la rentrée 2007 en classe de première.
S'agissant de la série « sciences et technologies de laboratoire », dont relèvent les spécialités « physique », « chimie » et « biochimie-génie biologie », je tiens à vous informer que sa rénovation n'a fait l'objet que de réflexions préparatoires. À ce stade - il est important de le souligner -, aucune décision n'a été prise quant à la fusion de ces matières.
J'ajoute qu'il n'a pas été envisagé de remettre en cause l'importance des travaux pratiques en laboratoire. Bien au contraire, les réflexions en cours préconisent de valoriser leur importance dans le cadre d'un projet technologique interdisciplinaire. Ce point vous tient à coeur, monsieur le sénateur, et il est vrai que de nombreux jeunes peuvent se découvrir un goût, une aptitude pour un métier à travers ces travaux pratiques.
Monsieur le sénateur, soyez donc assuré que, lorsque le ministère de l'éducation nationale arrêtera la rénovation de la série « sciences et technologies de laboratoire », comme cela a été fait récemment pour la série « sciences et technologies de la gestion » et le sera très prochainement pour la série « sciences médico-sociales », mon collègue en charge de ce dossier sera très attentif à l'objectif que vous avez rappelé, à savoir que cette réforme permette une bonne insertion professionnelle des jeunes.
M. le président. La parole est à M. Philippe Madrelle.
M. Philippe Madrelle. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. J'ose espérer que la situation va s'arranger, car il n'est pas possible de laisser disparaître des formations grâce auxquelles de nombreux jeunes peuvent exercer des métiers scientifiques en conformité avec leurs aptitudes et leurs motivations.
compétence commerciale du tribunal de grande instance de saint-pierre
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet, auteur de la question n° 1015, adressée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Anne-Marie Payet. Dans un courrier en date du 12 janvier 2006, j'ai appelé l'attention de M. le garde des sceaux sur la question de la compétence commerciale du tribunal de grande instance de Saint-Pierre. M. Clément m'a répondu le 16 mars, ce dont je le remercie. Cependant, je regrette que sa réponse n'apporte d'éléments positifs que sur un aspect partiel de la question, deux problèmes ayant été entremêlés.
S'agissant de la compétence pour connaître des procédures collectives concernant les personnes qui ne sont ni artisans ni commerçants, le décret du 27 janvier 2006 rectifie en effet les dispositions du décret du 30 décembre 2005. Cette rectification concerne non seulement la Réunion mais également quatre-vingt-un tribunaux de grande instance de France métropolitaine.
Je tiens à souligner que ces procédures, peu nombreuses, représentent une fraction modeste de l'activité en matière de procédures collectives. L'essentiel de l'activité concerne, bien évidemment, les commerçants et artisans, et la réponse de M. le garde des sceaux ne fournit aucune précision sur ce sujet.
Pour un commerçant de Cilaos, de Saint-Joseph ou de Saint-Philippe, ou de toute autre commune du Sud, il est donc toujours obligatoire de s'adresser au tribunal de Saint-Denis, avec tous les inconvénients liés à l'éloignement et aux difficultés de transport que connaît notre département et qu'a pu constater récemment, lors d'une mission, M. le président Fischer.
L'actualité récente illustre de façon dramatique les inconvénients majeurs que crée une telle situation. Ainsi, les intempéries du mois de mars ont souligné la vulnérabilité de notre réseau routier et le danger qui en résulte pour la sécurité et la vie des personnes ; la fermeture totale de la route du littoral pendant plus d'un mois après l'éboulement du 24 mars en est un autre exemple. Enfin, l'épidémie de chikungunya a placé nombre d'entreprises dans une situation économique extrêmement précaire, ce qui laisse présager une hausse brutale du nombre de procédures de sauvegarde et de redressement judiciaire.
Le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis éprouve déjà de sérieuses difficultés à absorber les affaires en provenance du Sud. Dans le contexte actuel, cette situation ne peut que se dégrader au détriment des entreprises commerciales et artisanales de l'ensemble du département.
J'ajoute que les juridictions de l'outre-mer font l'objet d'un traitement différent que celui qui est réservé aux juridictions situées sur le territoire métropolitain. En effet, les DOM-TOM sont les seuls ressorts dans lesquels un seul tribunal a compétence pour tout le département, alors qu'il en existe plusieurs. Dans les départements métropolitains possédant plusieurs tribunaux de commerce, ces derniers ont tous conservé leur compétence. Tel est le cas du département du Calvados dans lequel coexistent cinq tribunaux de commerce. Les nouvelles procédures collectives qu'ont eu à traiter les tribunaux de Bayeux, Lisieux et Honfleur s'élèvent respectivement à cinquante et une, soixante et onze et quatre-vingt-douze en 2004. Ces tribunaux ont conservé leur compétence alors que leur activité est nettement inférieure au tribunal de Saint-Pierre, lequel a connu deux cents procédures nouvelles en 2004 et deux cent soixante-dix en 2005.
Je ne pense pas que les difficultés de transport, notamment, soient les mêmes que celles que connaît la Réunion et puissent justifier ce traitement inégalitaire.
En conséquence, monsieur le ministre, je vous demande de bien vouloir me faire connaître les mesures que vous envisagez de mettre en oeuvre afin de remédier à cette situation.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Perben, ministre. Madame la sénatrice, comme vous le savez, le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer que je suis se trouvait voilà quelques jours à la Réunion. Une fois de plus, j'ai pu constater la nécessité de sécuriser les relations routières notamment entre le nord et le sud de l'île.
Tout en conservant ce fait à l'esprit, je vous répondrai en lieu et place de M. Pascal Clément, qui ne peut être présent au Sénat ce matin.
Vous avez raison de souligner que le décret du 20 février 2006 ne règle effectivement qu'une petite partie de la question que vous avez soulevée. Ainsi, le tribunal de grande instance de Saint-Pierre sera compétent pour ce qui concerne les procédures intéressant les personnes qui ne sont ni commerçants ni artisans.
Je vais maintenant vous annoncer une bonne nouvelle : M. le garde des sceaux va transmettre dans les meilleurs délais au Conseil d'État un projet de décret, actuellement soumis pour avis au ministère de l'outre-mer, attribuant compétence pour les procédures collectives concernant les commerçants et les artisans à la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Saint-Pierre. Le problème sera ainsi réglé.
Ce décret devrait donc permettre aux communes du sud de la Réunion de voir leurs dossiers administratifs ou judiciaires traités dans cette partie de l'île, ce qui permettrait de répondre à votre attente, madame la sénatrice.
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, qui confirme ce que j'ai appris voilà quelques jours par voie de presse, dans Le Journal de l'Île. J'aurais préféré, je l'avoue, que la primeur de l'information me soit réservée. J'ai néanmoins maintenu ma question orale afin qu'une confirmation officielle me soit apportée.
M. le président. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures trente, est reprise à seize heures, sous la présidence de Mme Michèle André.)