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couverture du territoire par la téléphonie mobile
Suite de la discussion d'une question orale avec débat
(Ordre du jour réservé)
M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion orale avec débat n° 9 de M. Bruno Sido à M. le ministre délégué à l'industrie sur la couverture du territoire par la téléphonie mobile.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Alain Fouché.
M. Alain Fouché. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, renforcer l'attractivité économique des territoires ruraux, aménager et préserver les espaces spécifiques et sensibles sont des objectifs primordiaux. Nous avons besoin d'une ruralité active et équilibrée, et le Gouvernement a compris qu'il fallait améliorer l'accessibilité des territoires, notamment à travers les dessertes routières, aériennes, ferroviaires, ainsi qu'à travers la téléphonie mobile et le haut débit.
Deux comités interministériels pour l'aménagement et le développement du territoire, CIADT, ont d'ailleurs été consacrés à ce sujet. Les nouvelles technologies de l'information et de la communication représentent sans aucun doute une véritable chance pour les territoires ruraux. Le Gouvernement a lancé le 15 juillet 2003, avec les trois opérateurs français un plan « zones blanches » visant à couvrir d'ici à 2007 les 3 000 communes qui ne sont pas actuellement couvertes par un opérateur de téléphonie mobile ; la discussion n'a pas été facile.
Nous savons que la première phase de ce plan, destinée à desservir 1 800 communes, représente un investissement de 44 millions d'euros pour l'État et des financements de plus en plus nombreux de la part des collectivités locales et des opérateurs.
Nous savons aussi que la période d'identification des sites sur le terrain a été longue, parce que techniquement difficile, mais j'ai déjà abordé cette question à cette même tribune voilà quelques mois.
Dans certains cas, en effet, des pylônes appartenant à la société Télédiffusion de France peuvent être utilisés dans le cadre de ce plan. L'utilisation et l'aménagement de pylônes existants présentent un avantage financier incontestable pour les collectivités maîtres d'ouvrage, permettent de faire progresser plus rapidement le plan et évitent des oppositions locales de plus en plus fréquentes lors de la construction de nouveaux pylônes, à cause notamment de problèmes environnementaux.
M. Philippe Arnaud. Très bien !
M. Alain Fouché. Utiliser ces structures présente donc de nombreux avantages.
Cependant, l'utilisation de ces pylônes a soulevé un certain nombre de problèmes, liés en particulier à une difficulté d'imputation budgétaire. Monsieur le ministre, cette situation est-elle aujourd'hui réglée ? Est-il envisagé d'utiliser tous les pylônes de Télédiffusion de France existants pour faire accélérer la seconde phase du plan « zones blanches » et répondre, dans les délais prévus, à l'attente très forte de nos concitoyens ? Il est essentiel que notre pays accède au « tout-numérique » d'ici à 2007 pour que tous les usagers aient accès à la téléphonie mobile de première et de deuxième génération, quel que soit le secteur dans lequel ils habitent.
L'insertion des territoires ruraux dans la société de l'information est la seule façon de compenser l'absence, parfois, d'infrastructures majeures, et elle permettra d'attirer les entreprises, les services, les populations vers les territoires ruraux, et donc de créer des bassins d'emploi.
Qu'il s'agisse du haut débit ou de la téléphonie mobile, rendre les nouvelles technologies de l'information et de la communication accessibles à tous, sur l'ensemble du territoire, représente un défi majeur, et nous comptons sur le Gouvernement pour le relever d'ici à 2007. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
(Mme Michèle André remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE Mme Michèle André
vice-présidente
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Vial.
M. Jean-Pierre Vial. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je remercie à mon tour notre collègue Bruno Sido d'avoir replacé une nouvelle fois la question de la couverture du territoire par la téléphonie mobile au centre du débat sur l'aménagement du territoire.
En décembre dernier, M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales, avait bien voulu répondre à la question orale relative à la fracture numérique que j'avais alors posée.
Les chiffres avancés par le Gouvernement ont tout lieu de nous convaincre que les objectifs de couverture annoncés pour 2007 seront atteints. Mais ce constat ne doit pas occulter une situation qui ne saurait être acceptée et qui nous préoccupe. La fracture numérique des territoires ruraux et, par surcroît, des territoires de montagne ne saurait masquer, derrière de faux prétextes techniques, les vraies questions sur les enjeux et la responsabilité en matière d'aménagement du territoire.
À cet égard, permettez-moi de faire une comparaison entre la téléphonie mobile et la couverture en haut débit.
En janvier 2004, j'ai signé, avec Thierry Breton, alors président-directeur général de France Télécom, la charte des départements innovants pour essayer d'améliorer la couverture haut débit ADSL de mon département, la Savoie.
En 2004, la couverture ADSL de ce département n'était que de 40 %. À la fin de l'année 2005, la couverture était supérieure à 90 %. En 2006, elle atteindra 97 %.
M. Jean-Pierre Vial. Au début de cette semaine, j'ai reçu des entreprises de technologies alternatives pour étudier la couverture des territoires de mon canton qui ne peuvent pas bénéficier de l'accès à l'ADSL. Ainsi, dans quelques mois, la couverture haut débit de mon département devrait être assurée à pratiquement 100 %. Or, monsieur le ministre, ces mêmes territoires ne seront toujours pas traités au titre des zones blanches.
M. Henri de Raincourt. Eh oui !
M. Jean-Pierre Vial. Pourtant, lors du CIADT de Limoges du 9 juillet 2001, le gouvernement de l'époque s'était engagé à assurer cette couverture dans les trois ans.
C'est dans ce contexte que notre collègue Bruno Sido a déposé, en septembre 2002, une proposition de loi relative à la couverture téléphonique et l'itinérance locale pour « donner une impulsion aux engagements pris lors du CIADT de 2001 ».
J'aborderai trois points successifs : l'itinérance, la société Télédiffusion de France et, surtout, la position des opérateurs.
Aujourd'hui, le constat est simple : s'agissant de l'itinérance, les opérateurs n'ont pas bougé, malgré leurs engagements ; ils poursuivent l'installation de leurs antennes respectives sur un même territoire et, quelquefois même, en limite des territoires qui, eux, sont toujours en zone blanche.
Monsieur le ministre, sans vouloir ouvrir un débat sur les opérateurs, la non mise en oeuvre de l'itinérance est une situation choquante. Plutôt que de privilégier la qualité de couverture, on privilégie le surinvestissement d'équipements concurrents sur un même territoire, au mépris d'autres espaces moins couverts ou pas couverts.
Mais si la non mise en oeuvre de l'itinérance est une vraie question, la non mobilisation du réseau de couverture de TDF est peut-être encore plus regrettable et plus choquante.
La couverture des zones blanches relève aujourd'hui de la mise en oeuvre des différents CIADT. Les communes concernées sont classées en deux tranches : la tranche 1 si les équipements sont pris en charge par les collectivités, la tranche 2 s'ils sont pris en charge par les opérateurs. L'installation d'un pylône de téléphonie mobile coûte aujourd'hui 180 000 euros.
Or TDF dispose d'équipements sur la totalité du territoire national qui permettraient de couvrir l'essentiel des zones blanches.
Monsieur le ministre, dans mon département, TDF dispose de soixante-deux équipements, qui ont été financés en partie par les collectivités, quand ils ne l'ont pas été à 100 %. Je dois reconnaître aujourd'hui que TDF, après de longues et difficiles discussions, accepte non pas de les mettre gratuitement à disposition - ce qui n'aurait pas été anormal vu l'origine de leur financement -, mais de proposer un tarif acceptable. Cela aurait dû permettre de débloquer la situation, puisque toutes les zones blanches peuvent être couvertes par des équipements TDF. Or tel n'est pas le cas. En effet, ce sont les opérateurs qui posent maintenant problème, et les raisons en sont simples.
La première raison invoquée est l'absence d'accord, sur le plan national, entre les opérateurs. Il est pour le moins étonnant de devoir faire un tel constat alors que la presse reproche justement aux opérateurs d'être plutôt d'accord entre eux.
La seconde raison, que nous avons déjà évoquée avec la question de l'itinérance, c'est de toute évidence la difficulté éprouvée par les opérateurs pour accepter d'utiliser des équipements dont ils n'ont pas la propriété.
En Savoie, sept des soixante-deux équipements de retransmission dont dispose TDF suffiraient à couvrir la totalité des huit zones blanches du département. Si nous pouvions les utiliser, nous économiserions ainsi 1,4 million d'euros. Or, à ce jour, nous ne sommes pas parvenus pas à débloquer la situation avec les opérateurs.
Deux ans après celle que j'avais signée avec Thierry Breton, je signe demain avec France Télécom une nouvelle convention pour la couverture en très haut débit. Paradoxalement, mon département va accéder au très haut débit alors même que je ne parviens pas à faire avancer le dossier de la résorption des zones blanches.
Aussi, monsieur le ministre, nous attendons que vous interveniez auprès des opérateurs afin qu'ils débloquent la situation. Cela ne leur coûtera rien puisque nous possédons les équipements nécessaires. Ils doivent s'engager de manière loyale et transparente et se mobiliser pour nous permettre d'avancer dans ce domaine. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Le Grand.
M. Jean-François Le Grand. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, être l'un des derniers intervenants présente l'avantage de ne pas répéter un certain nombre de choses qui ont été précédemment dites de manière excellente, bien mieux qu'on aurait pu les dire soi-même.
Je limiterai mon propos à deux observations, lesquelles appuieront deux objectifs.
Nous sommes à une étape fondamentale de notre histoire dans le domaine de la communication. Aussi, le Gouvernement doit promouvoir et faciliter le développement des technologies de l'information et de la communication, agir comme une force et non comme un frein. C'est ma première observation.
En outre, il doit veiller à l'accompagnement législatif des collectivités et des entreprises, mais en faisant en sorte que celles-ci ne soient pas gênées aux entournures. C'est ma seconde observation.
J'en viens à mes deux illustrations.
Les départements ont mis en oeuvre des délégations de service public, les DSP. Pour ma part, j'ai l'honneur de présider aux destinées du département de la Manche qui a mis en oeuvre une telle DSP.
À cet égard, je remercie à mon tour Bruno Sido d'avoir déposé cette question orale avec débat, parce qu'elle nous permet de faire un point intéressant.
Je ne reviendrai pas sur la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, si ce n'est pour rappeler que la commission des affaires économiques a beaucoup réfléchi à cette question, grâce à son rapporteur Bruno Sido, qui a fait preuve d'une très grande ouverture. Il aura été très difficile de faire évoluer les choses, notamment l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, qui avait été au centre d'un débat, d'une problématique et qui a été un enjeu politique de première importance. Cet article, conformément à mes voeux, a autorisé les collectivités à devenir « opérateurs d'opérateurs », constituant en cela un changement culturel extrêmement profond. Les collectivités peuvent désormais adapter ou retenir des stratégies de développement de l'accès à Internet, même si celles-ci sont différentes. Dans ce domaine, l'enjeu est de pouvoir disposer de la quantité et de la qualité. C'est ce qu'a permis l'article précité.
Allier la qualité et la quantité, c'est faire en sorte, que l'on raisonne en mégabits ou en gigabits à l'échelle de l'ensemble du territoire et que les tarifs restent compétitifs.
Un certain nombre de départements ont retenu la procédure de la DSP. Je suis un peu surpris que cette procédure, là où elle est engagée, suscite une certaine suspicion et qu'elle soit fréquemment remise en cause. Ce sont des combats d'arrière-garde. Monsieur le ministre, j'attire votre attention sur ces DSP. Elles visent à compléter les infrastructures qui existent, propriété de France Télécom, qui les loue - c'est la technique du dégroupage, partiel ou total -, ou à accompagner les départements dans leurs efforts de réalisation d'infrastructures, qui, pour ce faire, font appel à des entreprises privées.
Le département de la Manche, pour sa part, a retenu le groupement LD Collectivités, Vinci Networks et Axia France. Il a créé le syndicat mixte Manche Numérique, qui est chargé de l'aménagement numérique du territoire.
Mon insistance n'a pas pour objet de mettre en valeur nos actions en la matière. Nous ne sommes pas les seuls. En revanche, je veux attirer votre attention sur le fait que ce système permet aux grandes villes du département, à savoir Cherbourg et Saint-Lô, de bénéficier des mêmes tarifs que Paris et aux chefs-lieux de canton, notamment ceux qui sont situés dans des zones rurales, des mêmes tarifs que Rennes, Caen, Toulouse ou Bordeaux. L'accès en quantité et à des tarifs extrêmement compétitifs, voilà la vraie réduction de la fracture numérique ! Les DSP nous le permettent.
Je souhaiterais donc, monsieur le ministre, que des consignes soient données pour éviter que les DSP, qui sont des actes importants et parfois délicats, ne subissent des combats d'arrière-garde.
Aujourd'hui, le dégroupage concerne plus de 70 % du territoire de la Manche et plus de 85 % de sa population. Certaines entreprises proposent des capacités de plusieurs gigabits à des tarifs qui sont le fruit de la concurrence.
En outre - et c'est ma seconde illustration -, je vous demande, monsieur le ministre, de faire en sorte que l'administration puisse accompagner le développement des usages. À quoi servirait-il de disposer d'infrastructures si elles ne devaient pas être utilisées ? Pourquoi construire une route si aucun véhicule n'y circule ? Le développement des usages contribuera à réduire les différentiels d'aménagement du territoire. Voilà qui va contribuer à réduire la fatalité territoriale pour nous orienter durablement vers une vie choisie et non contrainte, qui échappera aux déterminismes d'une ruralité un peu éloignée.
L'aménagement numérique du territoire passe notamment par le développement des usages. Ce dernier passera par les e-services à la personne et par le e-enseignement. Nous avons les uns et les autres un certain nombre d'idées en la matière et j'ai noté avec intérêt que plusieurs présidents de conseil général se sont exprimés sur ces sujets, qui constituent un enjeu extraordinaire en termes d'aménagement du territoire. Cela passera également par la e-santé - le département de la Manche s'est doté d'un certain nombre de systèmes, notamment le portail Manche Santé sur le plan numérique, dont l'objectif est de conforter l'action médicale et d'aider le médecin à poser un diagnostic ou à donner un conseil. Bref, il faut développer les e-services et le e-enseignement, qui est si important.
S'agissant particulièrement de la e-administration, monsieur le ministre, il faut permettre à nos concitoyens d'obtenir des documents administratifs de la manière la plus simple possible, quel que soit le lieu où ils habitent. À cette fin, nous avons mené l'expérience des VisioGuichets. Néanmoins, le VisioGuichet requiert une personne référente dans l'administration de l'État et dans l'administration départementale. Aussi, seule une action conjointe de l'État et du département permettra à tout un chacun, pour autant qu'il soit équipé d'une imprimante, d'obtenir un document administratif quelconque sans se déplacer, au seul moyen du VisioGuichet. Pour simple qu'elle soit, la mise en oeuvre de ces actions et l'utilisation des nouvelles technologies requièrent la mobilisation des agents de l'État et des départements, lesquels doivent changer quelques peu leur culture et sortir des sentiers battus pour se mettre à la disposition des citoyens.
Monsieur le ministre, soyez facilitateur, soyez promoteur, encadrez-nous mais laissez-nous de la liberté ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Barraux.
M. Bernard Barraux. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux a traduit la volonté politique forte du Gouvernement de mettre un terme à la désertification d'un certain nombre de nos territoires et de créer une nouvelle dynamique au profit des espaces ruraux.
Cette loi a souligné la spécificité des besoins et des solutions à apporter aux problèmes ruraux. Elle a rappelé les objectifs du développement de ces territoires et défini les actions à mener autour de trois grands principes : le développement de l'économie et de l'emploi, l'offre de services au public et la préservation des espaces spécifiques et sensibles.
La loi du 5 janvier 2006 d'orientation agricole a apporté quelques avancées supplémentaires. Celles-ci ont porté notamment sur le renforcement des politiques de soutien à l'emploi dans les campagnes, grâce aux pôles d'excellence rurale.
D'autres lois récentes du gouvernement Raffarin ont également participé d'une façon ou d'une autre au développement des territoires ruraux. Citons la loi du 1er août 2003 pour l'initiative économique, la loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises ou la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique.
Nous avons voulu donner des chances nouvelles à ces territoires ruraux. Les discours, Dieu merci, se sont transformés en actes législatifs, en décrets et en réalisations, ce dont nous nous réjouissons.
Nous attendons d'ailleurs impatiemment, et nous l'avons fait savoir récemment, la publication des derniers décrets d'application de ces lois, en particulier ceux de la loi relative aux territoires ruraux, d'autant que le Sénat a joué un rôle positif et important dans l'élaboration de ce texte.
Le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin a donc initié une politique visant à réduire la fracture territoriale. Jusqu'à présent, certains territoires étaient restés quelque peu marginalisés et n'avaient pas profité de la modernisation et de toutes les techniques.
Cette politique vise à permettre aux habitants de nos campagnes de bénéficier du même niveau de services, de la même ouverture permanente au monde que les habitants de nos villes.
Qu'ils soient agriculteurs, commerçants, artisans, salariés d'entreprise publiques ou privées, ces personnes doivent avoir accès à toutes les techniques nouvelles pour s'implanter sur un territoire, pour y rester, pour s'y développer. C'est à cette seule condition que nous pourrons profiter de l'arrivée de ces nouvelles populations dont la masse, je l'espère bien, augmentera.
Bref, il faut que ces personnes puissent profiter de toutes les techniques de communication que le monde moderne met aujourd'hui à notre disposition.
La complémentarité entre le monde rural et le milieu urbain a sans cesse été prêchée, mais elle n'a pas aussi souvent été appliquée qu'on veut bien le dire. Certes, les disparités entre les communes rurales et urbaines s'atténuent lentement et progressivement. Mais vous savez très bien, monsieur le ministre, qu'il subsiste encore un grand fossé entre les moyens des communautés de communes et les moyens des communautés d'agglomération.
Les derniers recensements nous donnent raison. Un grand nombre de mes collègues vous ont rappelé que le désert français n'existe plus puisqu'un nombre croissant de jeunes initiatives viennent s'implanter en milieu rural, ce dont nous nous réjouissons.
Avec les pôles de compétitivité, le gouvernement de Dominique de Villepin vient de créer un outil qui permettra à des régions françaises et à leurs bassins industriels et technologiques de faire fructifier leurs richesses et leurs savoir-faire.
Je me répète, mais en politique, ou l'on se répète, on l'on se contredit ! (Sourires.) J'ai choisi la première solution ! L'essor des technologies de l'information et de la communication est essentiel pour l'attractivité et le développement des territoires ruraux, notamment pour inciter les entreprises à s'installer, tout le monde le sait, et pour encourager leurs collaborateurs à y rester. Il s'agit d'une question de fond. Nous ne pouvons pas nous permettre d'entretenir un quelconque retard dans l'application de toutes ces techniques modernes, alors qu'il nous a été suffisamment reproché d'avoir mis trop de temps à les mettre en oeuvre. Nos pieds sont toujours dans la bouse de vache, mais ils sentent un peu moins mauvais, écoutez-nous ! (Sourires.)
M. le Président de la République a fixé comme objectif l'accès de toutes les communes de France à l'Internet à haut débit à l'horizon 2007. Monsieur le ministre, vous allez, je le sais, sans doute me dire que cet engagement sera respecté. (M. le ministre délégué opine.) Je compte bien qu'il le soit !
Reste le problème de la téléphonie mobile, qui a été abordé tout au long de cet après-midi. Permettez-moi tout de même de vous rappeler que, dans ma France profonde, les opérateurs ne se bousculent pas pour planter leurs poteaux, et que nous ne sommes pas du tout pollués. Si certains craignent que les ondes ne rendent les enfants malades et les vieux barjos : il n'y a rien de tel chez nous ! (Rires.)
Vous allez sans doute me dire que le pourcentage des personnes qui se servent du téléphone mobile est très important. Nous, et M. Biwer l'a dit tout à l'heure, ce qui nous intéresse, vous le savez bien, c'est le pourcentage du territoire qui est desservi. Que tous les gars de Paris aient un téléphone mobile m'indiffère dès lors que je n'en ai pas.
Mon adorable et charmant village de Marcillat-en-Combraille fait partie des 2 500 à 3 000 communes de l'Hexagone qui sont privées de ces progrès techniques. Pleins d'illusions, mes petits camarades et moi-même avons fait comme les autres : nous avons succombé à la tentation d'acquérir ce genre d'appareil, en étant persuadés que, tôt ou tard, nous pourrions en profiter. C'est ce qui arrive lorsque nous mettons notre costume du dimanche et que nous allons à la ville voisine ou à Paris. Mais chez nous, nous ne pouvons l'utiliser. Nous l'avons simplement pour faire beau et parce que nous pensons que cela fait plus moderne. (Rires.) Quand je vais en ville et que je m'aperçois que même les gamins des écoles maternelles en ont un, j'avoue que je suis un peu énervé. Mais c'est ainsi, il faut se faire une raison.
Permettez-moi tout de même de vous rappeler, avant de conclure, que le milieu rural a bénéficié du téléphone automatique trente-cinq ans après notre adorable capitale nationale. De grâce, ne nous faites pas attendre encore trente-cinq ans ! J'ai bien peur de ne plus avoir besoin de téléphoner à ce moment-là. (Nouveaux rires.)
La première phase de déploiement de la téléphonie mobile devait couvrir 1 250 sites en 2003 et en 2004, et la seconde phase devait s'achever en 2005-2007. Je vous en supplie, monsieur le ministre, dites-nous que cela se fera très vite et que nous aurons tous le téléphone mobile ailleurs que dans notre poche pour faire les malins. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Mme la présidente. Notre collègue s'est exprimé avec humour et bonne humeur.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Loos, ministre délégué à l'industrie. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, - j'aurai envie d'ajouter : messieurs les présidents de conseil général, parce qu'un certain nombre d'entre eux figuraient parmi les orateurs -, le développement du téléphone mobile a changé la vie des 48 millions d'abonnés qui en possèdent un et qui s'en servent pour téléphoner.
Cette nouvelle technologie, accessible à tous, représente une nouvelle opportunité de créer des contacts entre les habitants. De plus, le téléphone mobile facilite l'accès d'urgence, là où cela fonctionne. Enfin, beaucoup de commerce s'est créé autour de ces activités.
J'en profite pour répondre brièvement aux usages dont parlait tout à l'heure M. Le Grand. Ce matin, au conseil des ministres, Jean-François Copé a fait une communication sur l'utilisation de l'Internet pour tous les formulaires de l'administration. Il s'est engagé à ce que, au cours du premier semestre de l'année 2007, 100 % des formulaires soient accessibles par Internet.
Des opportunités considérables sont offertes par la téléphonie mobile, par l'Internet. Les évolutions du numérique dans tous les domaines permettent aujourd'hui d'offrir des services améliorés.
En tant que présidents de conseils généraux, vous prêtez une grande attention à la situation des personnes âgées, à leur sécurité, aux relations qu'elles entretiennent avec leurs proches, leur médecin et leurs infirmières. Dorénavant, il est possible, dans de nombreux endroits, de contacter ces personnes partout où elles se trouvent.
Dans le même temps, le numérique a devant lui un énorme potentiel d'innovation. On a beaucoup avancé et très rapidement, mais lorsque les fréquences nécessaires seront plus nombreuses à être disponibles, du fait de l'abandon progressif de l'analogique, avec des normes qui seront de plus en plus performantes et qui pourront faire passer des débits de plus en plus importants, avec des services innovants qui restent à inventer ou à découvrir, de très nombreux services seront proposés.
C'est l'intérêt de nos concitoyens d'utiliser ces services. C'est l'intérêt de notre économie, de nos industries et des services d'être porteurs de ces technologies les plus modernes afin non seulement de favoriser la compétitivité des entreprises, mais aussi de générer des emplois grâce à ces innovations.
Puisque vous vous préoccupez des zones blanches en téléphonie mobile, je m'y attarderai un instant. Comme l'a rappelé tout à l'heure M. Sido, la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique a prévu la couverture sous trois ans par les opérateurs de téléphonie mobile des centre-bourgs et des axes de transport prioritaires identifiés comme non couverts. Cette loi s'inscrit en fait dans le prolongement des actions engagées par le Gouvernement depuis 2002 en vue d'améliorer la couverture du territoire français par la téléphonie mobile.
Une convention avait d'ailleurs été signée le 15 juillet 2003 entre l'Autorité de régulation des télécommunications, l'Assemblée des départements de France, l'Association des maires de France, les trois opérateurs mobiles et le Gouvernement. Une étude préalable avait alors permis de recenser 3 000 zones blanches, les zones blanches étant entendues comme des centre-bourgs et des axes de transport prioritaires, mais aussi des zones touristiques à forte affluence, non couverts par les opérateurs, alors que les zones grises sont couvertes par au moins un opérateur. La loi pour la confiance dans l'économie numérique a permis de préciser et de consolider la démarche engagée dès le 15 juillet 2003.
En application de cette loi, un décret en Conseil d'État mettant à jour les conditions techniques et tarifaires de mises à disposition des infrastructures établies par les collectivités aux opérateurs était nécessaire : il a été publié comme prévu au Journal officiel du 31 décembre 2005.
Selon l'article 52 de la loi de 2004, « le ministre chargé de l'aménagement du territoire fait rapport annuellement au Parlement sur la progression de ce déploiement », mais la question m'étant posée, je peux vous donner le premier bilan du plan national de couverture des zones blanches.
Le Gouvernement et les opérateurs ont ainsi planifié d'équiper, en deux phases, environ 2 000 sites permettant de couvrir d'ici à 2007 les 3 000 communes recensées. À la fin de 2005, 378 pylônes, dont 314 en phase 1 et 64 en phase 2, étaient opérationnels et 577 communes avaient déjà bénéficié de la couverture dans ce cadre. Les opérateurs se sont par ailleurs engagés à rendre opérationnels plus de 1 000 sites d'ici à la fin de 2006, ce qui devrait permettre d'étendre la téléphonie mobile à environ 1 500 communes.
Le plan continue d'avancer rapidement, puisque au début du mois de février 2006, 983 sites de la phase 1 ont fait l'objet d'un accord entre opérateurs et collectivités territoriales sur leur lieu d'implantation, 75 protocoles départementaux ont été signés, 385 infrastructures sont d'ores et déjà mises à disposition des opérateurs par les collectivités - elles seront donc ouvertes commercialement dans les prochains mois - et 329 sites sont déjà ouverts commercialement, 404 avec la phase 2.
La phase 2 a par ailleurs véritablement décollé avec 75 sites ouverts dans 28 départements, seulement six mois après l'inauguration du premier site de phase 2. Cette accélération a été rendue possible grâce à la volonté des opérateurs d'anticiper sur leur engagement en équipant les départements qui ont mis à disposition au moins un site en phase 1.
Je citerai quelques exemples.
En Haute-Marne, monsieur Sido, on a identifié 119 sites nécessaires : 57 sites sont ouverts et 5 sites seront disponibles dans les trois mois à venir. Pour passer de 57 à 119 sites ouverts, le rythme de cinq sites tous les trois mois ne suffira pas et devra être plus soutenu. Mais les choses avancent.
M. Gérard Delfau. Et l'Hérault ?
M. François Loos, ministre délégué. En Haute-Loire, monsieur Jean Boyer, 47 sites ont été identifiés, cinq sites seulement sont ouverts aujourd'hui, mais dix le seront dans les trois mois à venir.
Dans les Côtes-d'Armor, monsieur Trémel, 16 sites ont été identifiés, 12 sites sont ouverts, mais aucun ne le sera dans les trois mois à venir.
En Savoie, monsieur Vial, 12 sites ont été identifiés, aucun n'est ouvert et aucun ne sera disponible dans les trois mois à venir.
Certes, les situations sont variables, mais, dans la plupart des cas, les sites ouverts dans les trois mois montrent une accélération de l'effort entrepris.
Je peux donc confirmer à M. Sido et à tous les orateurs qui m'ont interrogé sur ce point que l'objectif d'une couverture de 98 % de la population à la fin de 2006 et de 99 % à la fin de 2007 - je vous laisse calculer ce que cela représente comme territoire - est à notre portée et sera réalisé.
J'ai ici la carte des zones blanches qui ont été résorbées en 2005. (M. le ministre délégué montre un document.)
M. Gérard Delfau. On ne voit rien !
M. François Loos, ministre délégué. On ne voit pas grand-chose, mais sur la carte de 2007 (M. le ministre délégué montre le document), il y en a au moins vingt fois plus par rapport au résultat des actions qui sont engagées aujourd'hui en phase 1 et en phase 2.
Certes, le démarrage a pris un certain temps, mais ce n'est pas forcément l'État qui a pris du retard. Certains départements n'ont pas encore décidé d'adhérer au système. En outre, des collectivités ont besoin d'un peu de temps pour mettre en oeuvre le plan et passer des marchés pour les pylônes. La dynamique est excellente, et je puis vous assurer que les objectifs seront tenus.
Je souhaiterais faire une petite parenthèse sur la comparaison internationale dans ce domaine. Il est intéressant de constater que, à ma connaissance, nous sommes à peu près le seul pays qui agit de la sorte. Certes, nos voisins ont souvent une couverture qui est excellente, mais ils ont aussi une densité beaucoup plus importante que la nôtre. Donc, si l'on souhaite établir une comparaison, il faut observer des pays dont la densité est la même. En Grande-Bretagne, on invite le client à emménager à Londres ! Les efforts que nous accomplissons pour l'aménagement du territoire dans ce domaine sont exemplaires à l'échelon européen.
MM. Fouché, Barraux et Vial ont parlé longuement des pylônes TDF.
Il s'agit, d'abord, d'un problème d'imputation budgétaire concernant les pylônes TDF : la situation a été réglée en 2005, par un transfert de crédits entre l'État et les collectivités territoriales pour la plupart des départements - ceux où moins de un tiers des pylônes étaient des pylônes TDF -, et par un transfert de 2 millions d'euros entre le titre IV et le titre VI pour trois départements où le nombre de sites TDF était plus important.
MM. Barraux et Vial ont abordé plus généralement la question de l'utilisation des pylônes de TDF. Partout où cela est possible, les points existants, dont les pylônes TDF, sont réutilisés dans la mesure où cela peut permettre un déploiement plus rapide, un meilleur respect de l'environnement, mais aussi une économie par rapport à la construction d'un nouveau pylône. À titre d'illustration, le nombre de sites TDF susceptibles d'être réutilisés dans ce cadre est estimé à près d'un sur quatre, soit une proportion très importante. D'ores et déjà, environ 150 sites TDF ont ainsi fait l'objet d'une commande.
Pour le haut débit, l'utilisation de pylônes TDF n'a de sens que pour les technologies hertziennes alternatives, comme le WiMax, pour lequel le Gouvernement vient de lancer un appel à candidatures. Dans cet appel à candidatures, le Gouvernement a notamment retenu comme critère de sélection, celui de l'aménagement du territoire. Le régulateur, l'ARCEP, sera donc particulièrement sensible aux projets qui prévoient de réutiliser des infrastructures existantes. Il convient à ce titre de noter que TDF, en partenariat avec d'autres acteurs, a décidé de présenter sa candidature.
Il y a ensuite la question des services fournis dans les zones nouvellement couvertes dans le cadre du plan « zones blanches ». M. Sido a mentionné que certains services comme la recharge des mobicartes ou l'accès à Internet n'étaient pas disponibles. C'est un sujet qu'il faudra aborder avec les opérateurs, mais je dois souligner que la technique de l'itinérance locale utilisée dans la plupart des cas peut rendre difficile d'offrir l'accès à certains services ; quand on bénéficie de cet avantage, on ne peut pas en avoir d'autres. C'est quelque chose que l'on constate également lorsqu'on utilise son portable à l'étranger. De plus, on doit reconnaître qu'en matière d'offre de services dans les zones nouvellement couvertes, les opérateurs sont allés au delà de ce que leur impose la loi pour la confiance dans l'économie numérique.
Pour ce qui est des communes ayant fait l'objet d'une fusion-association dans le cadre de la loi Marcellin de 1971, il est possible que seul un centre-bourg ait été pris en compte alors que la commune en compte plusieurs. Il s'agit d'une question qui peut sans doute être traitée localement, par un ajustement de la liste des zones à couvrir en accord avec les opérateurs. Il faut donc avancer dans la négociation avec les opérateurs sur le plan local pour leur dire qu'il s'agit non pas d'un site, mais de deux.
Il reste, enfin, comme l'a rappelé M. Sido, huit départements qui n'ont pas encore signé les protocoles départementaux permettant la mise en oeuvre du dispositif sur leurs territoires. J'invite les conseils généraux concernés à rejoindre rapidement le processus national afin que leurs départements ne pâtissent pas d'un retard de couverture en téléphonie mobile préjudiciable à leurs habitants, comme l'a rappelé M. Teston et, comme il l'a également rappelée, je ne citerai pas la liste de ces départements, Christian Estrosi l'a fait publiquement il y a quelques semaines.
Financièrement, l'État consacre à ce plan plus de 60 millions d'euros, y compris l'abattement de TVA accordé aux collectivités territoriales, c'est-à-dire 44 millions d'euros sans la TVA, auxquels s'ajoutent les efforts propres de celles-ci ainsi que ceux des opérateurs de téléphonie mobile et de l'Union européenne.
Je précise à M. Teston que l'État tient ses engagements, M. Estrosi fera d'ailleurs un nouveau point d'étape sur ce sujet le 30 juin prochain.
Par ailleurs, les nouvelles obligations de couverture retenues par le Gouvernement dans le cadre du renouvellement des licences de Orange et SFR - auxquelles Bouygues Télécom a également souscrit alors que cette société n'était pas encore concernée par le renouvellement de licence - obligeront les opérateurs à couvrir à leur frais les 1 200 communes de la phase 2 du plan « zones blanches » et à assurer une couverture de 99 % de la population métropolitaine avant la fin de l'année 2007, ainsi que la couverture des axes de transport prioritaires de chaque département. Cette préoccupation particulière a été évoquée par M. Jean Boyer pour le trajet entre le Puy-en-Velay et Paris.
MM. Jean Boyer, Biwer et Hérisson ont mentionné la question des zones grises.
La situation des zones grises est très différente de celle des zones blanches, puisque, par définition, elles sont couvertes par un opérateur qui a pris le risque d'y investir.
Monsieur Vial, la résorption totale des zones grises par l'intervention publique doit être envisagée avec précaution, car elle ne doit pas nuire au maintien d'une concurrence saine par la couverture et la qualité entre les opérateurs. Une obligation d'itinérance, par exemple, risquerait d'inciter les opérateurs à se placer en situation d'attente et à retarder leurs investissements. Comme le disait M. Le Grand, nous devons arbitrer entre, d'une part, une liberté que nous accordons et la concurrence que nous voulons faire jouer et, d'autre part, l'impulsion que nous sommes bien obligés de donner pour compléter la couverture de certaines zones.
Or, grâce à la concurrence et à la politique menée pour la réduction des seules zones blanches, les opérateurs ont, au contraire, continué à investir dans leurs infrastructures pour couvrir à ce jour plus de 98 % de la population.
Par ailleurs, le plan de couverture des zones blanches constitue une incitation pour les opérateurs à investir dans les zones grises afin d'assurer la continuité de leur service sur le territoire et d'éviter un effet « tache de léopard ». En effet, dans les zones les moins rentables, rien n'empêche les opérateurs de conclure des accords pour mutualiser leurs infrastructures passives - les pylônes - et réduire leurs coûts. C'est ce qui est fait dans les zones blanches : 70 % des sites sont en itinérance locale et 30 % sont en mutualisation des infrastructures. C'est un processus méconnu qui est déjà très engagé entre les opérateurs.
Enfin, les nouvelles obligations de couverture négociées par les pouvoirs publics dans le cadre du renouvellement des licences de Orange et SFR devraient également diminuer de fait l'ensemble des zones grises sur le territoire.
En ce qui concerne le changement d'opérateur dans les zones frontalières, monsieur Hérisson, il existe un opérateur mobile virtuel, un MVNO, qui a des accords avec plusieurs pays frontaliers et qui gère les basculements d'opérateurs de manière transparente pour l'utilisateur. Cet opérateur a pensé à répondre au souhait des utilisateurs d'obtenir des tarifs nationaux dans les pays frontaliers. Créé voilà quelques années, il compte aujourd'hui un nombre important d'abonnés et commence à faire de la publicité pour se faire plus connaître. Il s'agit d'une start up qui est partie de rien et qui peut désormais faire de la publicité pour la performance technique et financière qu'elle offre.
Toujours soucieux de l'avenir, M. Sido a porté son regard au delà des problèmes actuels pour aborder la couverture du territoire par la téléphonie mobile de troisième génération.
La téléphonie mobile de troisième génération, la 3G, est en plein décollage. Les opérateurs investissent massivement dans leurs réseaux et le problème de la couverture ne se pose pas encore. Toutefois, et je partage l'opinion de M. Sido sur ce point, c'est un sujet dont il convient de commencer à se préoccuper dès maintenant. À cet égard, il est clair qu'une couverture étendue du territoire par la 3G dans des conditions économiques acceptables pour les opérateurs et les pouvoirs publics nécessitera des fréquences plus adaptées que celles qui sont actuellement disponibles autour de deux gigahertz. Dans un premier temps, il faudra réutiliser les fréquences du GSM. Mais, au-delà, se pose la question du « dividende numérique ». La libération des fréquences liée à l'arrêt de la télévision analogique, qui sera définitif vers 2011, représente une formidable opportunité. La question de leur utilisation pour améliorer la couverture du territoire par les réseaux de communication électronique est posée, et nous allons en profiter pour permettre d'être plus efficace dans ce domaine. Il convient de noter que la 2,5G, c'est-à-dire la norme EDGE, qui est une évolution technologique du GSM, permet déjà d'offrir des services mobiles haut débit à la plus grande partie de la population.
Avant d'aborder la question du haut débit, je vais prendre quelques instants pour répondre à M. Biwer, qui a évoqué la qualité du réseau fixe et à M. Sido, qui s'est exprimé sur la portabilité.
En ce qui concerne le réseau fixe, il est évident que le développement de la concurrence ne doit pas aboutir à une dégradation de la qualité de service.
France Télécom a été désignée au début de 2005 comme opérateur chargé du service universel de téléphonie fixe. Les obligations de qualité de service qui lui étaient imposées antérieurement ont été confirmées à cette occasion et reprises dans son cahier des charges. Il appartient à l'ARCEP d'en vérifier le respect au quotidien.
M. Sido s'est demandé si le dispositif actuel de portabilité des numéros permettait de changer d'opérateur dans des conditions satisfaisantes. Ce n'est pas encore le cas, et c'est la raison pour laquelle nous sommes en train de le revoir entièrement. La portabilité ne fonctionne pas bien car les délais sont trop longs - souvent plus de deux mois - et le processus est trop compliqué. Pour améliorer le dispositif, la loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises a prévu un guichet unique et un délai de portage de dix jours maximum. Le décret d'application est paru le 28 janvier. Le nouveau dispositif sera mis en oeuvre au début de 2007 pour les numéros mobiles en métropole. À partir de cette date, il sera possible de changer d'opérateur en gardant son numéro en moins de dix jours et en une seule démarche. Ce délai peut paraître long, mais il est le résultat d'un changement complet de système par rapport à celui qui avait été voulu quelques années auparavant par les associations de consommateurs et qui avait entraîné des investissements et des choix technologiques qui sont remis en cause par la création de ce guichet unique. L'ARCEP est chargée de piloter cette opération, et nous avons fixé ce délai dans le décret d'application.
MM. Trémel et Billout ont évoqué le service universel. Le développement de la téléphonie mobile, dont 48 millions de nos concitoyens sont aujourd'hui utilisateurs, ainsi que le développement de l'accès à Internet à haut débit, pose la question de l'inclusion de ces prestations dans le service universel.
De façon générale, le service universel ayant vocation à regrouper l'ensemble des services essentiels pour la population, l'inclusion de la téléphonie mobile et de l'accès à Internet à haut débit dans le service universel apparaît donc comme une perspective assez naturelle, puisque l'on souhaite une couverture de 100 %. Cette inclusion est cependant prématurée.
S'agissant de l'accès à Internet à haut débit, le développement encore limité du service, malgré une croissance très rapide du marché, ne permet pas d'envisager qu'une obligation de fourniture sur l'ensemble du territoire à un tarif abordable soit retenue.
Pour ce qui est de la téléphonie mobile, l'inclusion dans le service universel à court terme poserait plusieurs types de difficultés.
D'abord, elle risquerait de perturber fortement le jeu de la concurrence entre les opérateurs. Quand on dit que France Télécom est l'opérateur du service universel, on donne à France Télécom un avantage par rapport aux autres opérateurs. Si l'on voulait faire la même chose avec les opérateurs de téléphonie mobile, il faudrait désigner un opérateur et le charger du service universel. Or cela perturberait énormément les conditions de concurrence dans lesquelles ce marché se développe. L'avantage concurrentiel procuré par une couverture étendue du territoire est plus important dans le cas de la téléphonie mobile que dans le cas de la téléphonie fixe. L'opérateur chargé de fournir un service universel mobile bénéficierait, du fait de la couverture étendue qu'il devrait assurer, d'un avantage concurrentiel significatif puisque la couverture du territoire reste, pour le moment, un facteur de différenciation.
Ensuite, l'extension du service universel à la téléphonie mobile serait de nature à retarder les travaux engagés pour améliorer la couverture du territoire en particulier la seconde phase du plan « zones blanches ». En effet, comme on incite les trois opérateurs à couvrir l'ensemble du territoire, le fait de charger l'un d'entre eux diminuerait la vitesse à laquelle les trois opérateurs peuvent assurer cette couverture.
Enfin, il est aujourd'hui très improbable qu'une majorité d'États membres de l'Union européenne se dégage pour soutenir une évolution de la réglementation européenne sur ce sujet. Actuellement, nos partenaires européens ne formulent aucune demande en ce sens.
Toutefois, à terme, l'inclusion de la téléphonie mobile, mais aussi du haut débit, dans le service universel apparaît comme une perspective assez naturelle, sous réserve qu'une solution raisonnable puisse être trouvée à la question du financement. Elle devrait donc être étudiée dans le cadre des prochains examens de la question au plan européen, le prochain « paquet télécom », en 2008, lorsque seront levés les obstacles que je viens de mentionner.
M. Trémel a également abordé la question des relations entre opérateurs et consommateurs. Je peux lui confirmer que je suis très attentivement la mise en oeuvre des vingt et une décisions arrêtées lors de la table ronde du 27 septembre. Je réunirai de nouveau les opérateurs et les associations de consommateurs le 20 mars pour faire un point d'ensemble et définir les étapes suivantes. J'ai d'ores et déjà évoqué la portabilité, l'un des vingt et un points, la gratuité du temps d'attente pour les fournisseurs d'accès, les opérateurs mobiles. De nombreuses actions ont été réalisées et d'autres sont engagées.
Concernant l'amélioration de la couverture des réseaux haut débit en France, il est utile de rappeler que, à la fin de l'année 2005, la France comptait environ 9 millions d'abonnements haut débit. En quelques années, la progression a été spectaculaire puisque le nombre d'abonnés haut débit est passé de moins de 100 000 à la fin de 1999 à 1,7 million à la fin de 2002. L'objectif fixé en 2002 de dix millions de connexions haut débit en 2007, qui apparaissait à l'époque très ambitieux, est pratiquement atteint. Le Gouvernement a la certitude qu'il sera réalisé au cours de cette année.
En quelques années, l'accès haut débit est passé du statut de produit de luxe à celui de bien de grande consommation pour les ménages et de service de première nécessité pour les entreprises. Parallèlement, les usages du haut débit évoluent et les offres dites « triple play », incluant accès à Internet, téléphone et télévision, sont devenues la référence. Un peu plus de deux millions d'abonnés utilisent des services de voix sur large bande, soit quatre fois plus qu'il y a un an, et un demi-million de foyers disposent de la télévision par ADSL. Ces données montrent l'importance croissante que prend le haut débit dans notre société, et nous ne sommes qu'au début de ce type d'application.
Face à l'enjeu primordial que constitue la diffusion du haut débit, le Gouvernement mène déjà un ensemble d'actions convergentes.
Il établit un cadre favorable à l'investissement des opérateurs dans le haut débit, notamment à travers le dégroupage. L'ADSL sera ainsi installé sur l'ensemble des répartiteurs téléphoniques de France Télécom en 2007. La France est à un stade beaucoup plus avancé que ses partenaires européens.
Des actions en faveur du développement des technologies alternatives, notamment celles qui sont adaptées aux zones rurales, sont également menées : la baisse des redevances d'utilisation des fréquences pour permettre le développement sur notre territoire de multiples offres d'accès à haut débit bidirectionnel par satellite ; la clarification du cadre juridique du recours à la technologie des courants porteurs en ligne, réalisée dans la Manche - Internet par les réseaux électriques - avec la publication d'un guide des bonnes pratiques en la matière ; le lancement d'un appel à candidatures pour l'attribution des fréquences de boucle locale radio WiMax, qui permettra, comme l'a rappelé le président du conseil général de la Savoie, une couverture à 100 % d'un département montagneux.
Une action complémentaire des collectivités territoriales, dont les compétences ont été étendues par la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, est également menée. Selon l'ARCEP, l'action des collectivités est aujourd'hui déterminante pour l'extension géographique du dégroupage qui, après la couverture des zones blanches, constitue la priorité en matière de diffusion du haut débit sur le territoire. Les trois quarts des nouveaux centraux équipés en haut débit par les opérateurs alternatifs sont directement liés à des initiatives publiques locales, auxquelles je rends hommage.
Le soutien à l'utilisation des technologies de l'information et de la communication, les TIC, par les entreprises est aussi institué. Le plan TIC-PME 2010, que j'ai lancé en 2005, permettra de soutenir l'investissement des PME dans ces technologies en vue d'organiser des chaînes numériques entre elles. Il a connu un très vif succès puisque soixante-quinze dossiers sont en cours d'examen. Il s'agit de soixante-quinze dossiers non pas pour soixante-quinze PME mais pour soixante-quinze chaînes numériques que créent les entreprises avec leurs fournisseurs, leurs clients, leur service après vente, bref, avec tous les partenaires qui entretiennent des relations régulières avec elles.
Enfin, un soutien financier est également mis en oeuvre. Le Gouvernement a donné mandat à la Caisse des dépôts et consignations pour soutenir les projets territoriaux, par des mesures d'accompagnement des études en amont et par un accompagnement en capital lorsque les projets se concrétisent. Il a décidé, en outre, la création d'un fonds national de soutien au déploiement du haut débit sur la période 2004-2007. Près de 130 millions d'euros provenant du Fonds européen de développement régional, le FEDER, ont ainsi été orientés vers des projets d'infrastructures de réseaux à haut débit. L'objectif du Gouvernement de réserver 100 millions d'euros dans le cadre du fonds de soutien au déploiement du haut débit a ainsi été dépassé.
Ces actions, essentiellement grâce au développement du dégroupage et à la concurrence accrue des fournisseurs d'accès à Internet, se sont traduites en 2005 par une nette amélioration de la couverture du territoire en haut débit.
Mesdames, messieurs les sénateurs, comme vous l'avez peut-être lu dans la presse hier, Mme Vivian Reding, commissaire chargé de la société de l'information à Bruxelles, a adressé des félicitations à la France pour ses succès dans ce domaine. J'en suis extrêmement heureux car cela montre que le dégroupage et la concurrence, tels qu'ils ont été réalisés par notre pays, ont porté leurs fruits bien plus rapidement que ce qui a pu être constaté dans les autres pays européens.
Le bilan de ces actions fait effectivement ressortir qu'à la fin de l'année 2005 près de 59 millions de Français avaient la possibilité technique d'accéder à une connexion permanente à l'Internet. Le taux de couverture de la population sera ainsi passé de 62 % à la fin de 2002 à près de 96 % à la fin de 2005. De ce fait, la France a rattrapé son retard en se hissant à la deuxième place européenne pour ce qui concerne le nombre de lignes raccordées en technologie DSL. Afin de répondre précisément à la question posée par M. Trémel, j'indique que l'on compte aujourd'hui 3 millions de lignes dégroupées et 650 000 en dégroupage total.
Toutefois, bien que l'évolution soit favorable et rapide, il convient de noter un petit bémol. En effet, les situations territoriales restent contrastées. Ainsi, plus de 5 000 communes n'ont pas encore accès de manière permanente à l'Internet et seulement 54 % de la population aurait accès à une offre DSL dégroupée, dans laquelle plusieurs opérateurs se trouvent donc en concurrence.
Quelles sont les perspectives ?
Les améliorations réalisées en matière de couverture en haut débit ne devraient pas s'arrêter là. D'ici à la fin de cette année, la couverture des technologies DSL devrait dépasser 98 % de la population, selon le plan d'investissement de France Télécom.
Enfin, l'usage de technologies alternatives - satellite, WiFi, WiMax, courant porteur en ligne - permettra d'offrir des services de même ordre sur l'ensemble du territoire.
La France est à ce titre l'un des premiers pays d'Europe à attribuer à nouveau des licences de boucle locale radio, le Gouvernement ayant décidé, au mois d'août 2005, de lancer un appel à candidatures pour deux nouvelles licences WiMax dans la bande 3,4-3,6 gigahertz.
La boucle locale radio est l'une des technologies alternatives qui a l'un des plus forts potentiels. L'attribution de nouvelles fréquences de boucle locale radio et les évolutions technologiques, telles les possibilités de nomadisme mi-2006, devraient notamment permettre de dynamiser le marché de l'accès Internet haut débit en France, sur tout le territoire national. Trente-cinq acteurs ont ainsi déposé une demande pour disposer d'une licence sur une ou plusieurs régions françaises. L'ARCEP procède actuellement à leur sélection en fonction de trois critères : la couverture de l'ensemble du territoire d'une région, le développement de la concurrence afin de permettre l'accès, à un endroit donné, à plusieurs opérateurs, et le montant de la redevance.
Mesdames, messieurs les sénateurs, comme vous pouvez le constater, la lutte contre la fracture numérique est largement engagée. Des succès incontestables doivent être d'ores et déjà relevés.
Les bilans nécessaires seront faits régulièrement. Des conclusions en seront tirées, avec les collectivités et les consommateurs, afin d'orienter la politique que le Gouvernement mène à l'égard des opérateurs.
Soyez assurés que les progrès réalisés depuis l'année 2004 ne sont qu'une étape. Le Gouvernement a la volonté de faire franchir à notre pays les prochaines étapes, qu'il s'agisse de celles qui sont prévues ou de celles qui nécessitent ou peuvent bénéficier des progrès techniques qui se font jour, et de les lui faire franchir parmi les premiers aux plans mondial et européen. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Mme la présidente. En application de l'article 83 du règlement, je constate que le débat est clos.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-deux heures.)
Mme la présidente. La séance est reprise.