Mme la présidente. L'amendement n° 215 rectifié bis, présenté par MM. Dallier et Cambon, Mme Procaccia, MM. Demuynck, Retailleau et Béteille, est ainsi libellé :
Avant l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le sixième alinéa de l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation est remplacé par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Le prélèvement est diminué du montant de toute dépense exposée par la commune, pendant le pénultième exercice, visant à la mise en place d'un projet de construction de logements sociaux entériné par une délibération du conseil municipal qui doit désigner la ou les parcelles concernées.
« En cas d'acquisition de terrains, la somme déduite est équivalente à 1/15ème du prix d'acquisition du terrain, frais de notaire compris.
« Au moment où l'opération est réalisée, le montant des dépenses exposées par la commune est recalculé pour tenir compte de l'éventuelle moins-value de cession sur les terrains concernant l'opération. Pour déterminer s'il y a ou non moins-value de cession il est tenu compte des 15èmes déjà déduits de la pénalité au titre de l'acquisition des terrains par la commune. Si le total des sommes déjà déduites au titre de cette opération est supérieur au montant déductible recalculé, la commune rembourse la différence.
« Le prélèvement est diminué, lorsque la commune a garanti un ou plusieurs emprunts contractés par un bailleur social en vue de la construction de logements sociaux, du montant de la pénalité dû pour chaque logement social manquant, pour atteindre le seuil des 20 %, multiplié par le nombre de logements prévus dans l'opération. Cette somme est déduite l'année suivante.
« Si le projet de construction est abandonné pour quelque raison que ce soit, ou si aucun début de réalisation n'est constaté dans un délai de 6 ans suivant la première acquisition, la commune rembourse les sommes déduites de sa pénalité. »
La parole est à M. Philippe Dallier.
M. Philippe Dallier. Cet amendement vise à ce que soient prises en compte toutes les dépenses qu'une collectivité territoriale peut exposer en vue de la réalisation de logements sociaux.
En effet, à l'heure actuelle, seules les subventions foncières versées par la commune peuvent être déduites du prélèvement visé à l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation, et encore ne le sont-elles qu'au moment où l'opération est effectivement réalisée.
Dans ces conditions, si une commune procède à des acquisitions foncières en vue de réaliser un projet de construction de logements locatifs sociaux, les dépenses qu'elle engage à ce titre ne seront déductibles qu'à l'échéance du programme, soit quatre, cinq ou six ans plus tard. Cela signifie qu'une commune supporte financièrement une forme de portage, ce qui représente une véritable difficulté quand elle ne dispose que de ressources modestes.
Cet amendement a donc notamment pour objet de prévoir la prise en compte, pour la réduction de la pénalité, du coût d'acquisition du terrain, à concurrence de un quinzième de la somme chaque année, les collectivités territoriales empruntant en général sur quinze ans. Lors de la réalisation de l'opération, le montant des dépenses consenties par la commune serait recalculé, et si le total des quinzièmes déjà déduits de la pénalité se révélait supérieur à ce dernier, la commune devrait reverser la différence.
Il ne s'agit pas, entendons-nous bien, d'offrir les terrains à la commune. L'idée est de faire en sorte que la pénalité puisse être réduite au long de la période s'écoulant entre la délibération du conseil municipal concernant la mise en place d'un projet de construction et la réalisation effective de celui-ci. Cela me paraît être une mesure de bon sens.
Par ailleurs, comme je l'ai dit tout à l'heure, il est tout à fait possible, pour une commune, de soutenir la construction de logements sociaux sans nécessairement apporter une contribution financière, mais en garantissant les emprunts contractés par le bailleur. Cela s'est d'ailleurs pratiqué au cours des dix dernières années. Dans un tel cas de figure, la seule différence, pour la collectivité territoriale concernée, tient au fait que son droit d'attribution se trouve réduit et ne porte que sur 25 % des logements, contre un tiers d'entre eux dans les autres hypothèses.
En tout état de cause, un tel dispositif permet la réalisation de projets de construction de logements sociaux. Or le risque que la collectivité territoriale prend en garantissant les emprunts n'est pas valorisé. Nous proposons donc de remédier à cette situation, en prévoyant une réduction, dans une mesure relativement modeste, on le reconnaîtra, du prélèvement opéré sur les ressources fiscales de la commune en cas d'insuffisance du nombre de logements sociaux.
Enfin, afin de rassurer tout le monde, nous avons prévu une butée : si, dans un délai de six ans suivant la délibération du conseil municipal qui avait désigné la ou les parcelles concernées par le projet de construction, la réalisation de ce dernier n'a pas été engagée, les sommes qui avaient été déduites devront être remboursées par la commune.
Il s'agit là, je le répète, d'un dispositif de bon sens et équitable, qui permettra aux communes de conduire des projets sur une certaine durée.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Une fois encore, notre collègue Philippe Dallier soulève un vrai problème. Je partage d'ailleurs tout à fait l'analyse qu'il en fait.
Il est en effet souhaitable de revoir le dispositif des dépenses déductibles du prélèvement, car, à l'heure actuelle, on se rend compte que certaines communes ne vont pas aussi loin dans la construction de logements sociaux qu'elles seraient disposées à le faire si la mesure présentée était adoptée.
Cependant, pour toutes les raisons que j'ai déjà exposées et sur lesquelles je ne reviendrai pas, je demande à M. Dallier de bien vouloir retirer cet amendement. À défaut, je me verrai contraint d'émettre un avis défavorable.
Je reprécise, monsieur Dallier, que nous souhaitons apporter de vraies solutions aux problèmes que vous soulevez à juste titre. Or, compte tenu de la démarche que nous avons retenue, la Haute Assemblée repousse à une très large majorité toutes les propositions que vous formulez, ce qui pourrait donner à penser qu'elle est en désaccord avec vous sur le fond. Ces votes de rejet des amendements que vous maintenez risquent de nous compliquer la tâche lorsque nous devrons, dans la suite de la navette parlementaire, expliquer notre position.
Par conséquent, je vous le dis très sincèrement, mon cher collègue, vous allez à l'encontre de la cause que vous défendez en persistant dans l'attitude qui est la vôtre. Je tenais à vous mettre en garde une dernière fois, car, étant un peu plus ancien que vous sur ces travées - ce n'est pas là vous critiquer, car je préférerais avoir encore les cheveux aussi bruns que vous (Sourires.) -, je sais qu'il n'est pas toujours facile de progresser dans la bonne direction entre deux lectures d'un texte, surtout sur un sujet aussi sensible que celui-là, or les votes émis par la Haute Assemblée lors de la première lecture sont toujours examinés de près.
Je tenais à attirer votre attention sur ce point, monsieur Dallier, et je vous demande donc de retirer votre amendement. Nous entendons, je le répète, prendre en compte tous les problèmes que vous posez, et leur apporter de vraies solutions.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Comme je le disais tout à l'heure, il est nécessaire que nous puissions examiner l'ensemble des points abordés au travers de l'article 55.
Par le biais de certains amendements, M. Dallier préconise en outre un assouplissement du dispositif, afin d'éviter qu'une règle unique ne s'applique brutalement sans que l'on puisse l'adapter aux réalités communales.
Je ne puis, à cet instant, que réaffirmer l'engagement pris par le Gouvernement. Cela étant, nous souhaitons que les problèmes ne soient pas envisagés de manière parcellaire, même si un certain nombre de questions sont, je le dis clairement, tout à fait pertinentes.
Dans cette perspective, je souhaite que vous acceptiez de retirer cet amendement, monsieur Dallier, au bénéfice de l'enrichissement de la réflexion collective que nous allons mener dans les semaines à venir.
Mme la présidente. Monsieur Dallier, l'amendement n° 215 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Philippe Dallier. Je n'avais pas imaginé un seul instant que mes amendements pourraient nous faire revenir aux temps du Sénat conservateur ! Je trouve tout de même surprenant que l'on puisse soutenir que leur maintien gênerait l'enrichissement du débat à venir ; pour ma part, j'ai plutôt tendance à penser que celui-ci s'en trouvera au contraire favorisé.
En tout état de cause, mes propositions ne remettent nullement en question la logique du texte, ni les objectifs visés, en particulier le seuil des 20 % de logements sociaux. Il s'agit d'amendements de bon sens, et je n'entends pas retirer celui-ci.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 215 rectifié bis.
Je suis saisie de deux demandes de scrutin public émanant, l'une de la commission des affaires économiques, l'autre du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 32 :
Nombre de votants | 322 |
Nombre de suffrages exprimés | 281 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 141 |
Pour l'adoption | 5 |
Contre | 276 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 213 rectifié, présenté par MM. Dallier et Cambon, Mme Procaccia, MM. Demuynck, Retailleau et Béteille, est ainsi libellé :
Avant l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans la première phrase du septième alinéa de l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation, les mots : « de l'année suivante » sont remplacés par les mots : « des trois années suivantes ».
La parole est à M. Philippe Dallier.
M. Philippe Dallier. Cet amendement a pour objet de permettre aux collectivités territoriales qui engagent des dépenses en vue de la réalisation d'une opération de construction de logements sociaux de les déduire du prélèvement pendant quatre ans, au lieu de deux ans actuellement, si leur montant est supérieur au prélèvement d'une année.
En effet, on constate un net renchérissement du foncier. À titre d'exemple, j'indiquerai que, selon une estimation du service des domaines réalisée à ma demande, un terrain de 1 300 mètres carrés situé sur le territoire de ma commune atteint une valeur de 1,4 million d'euros.
Les sommes en jeu sont donc de plus en plus importantes, et il est tout de même très regrettable que, en cas de surplus par rapport au montant de la pénalité, les dépenses engagées ne puissent être déduites que sur deux exercices. Par conséquent, nous proposons de porter à quatre années la période pendant laquelle les dépenses consenties peuvent être déduites du prélèvement.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Une nouvelle fois, je demande le retrait de l'amendement présenté, pour les mêmes raisons que précédemment et tout en indiquant que je partage pleinement la préoccupation de M. Dallier, dont la suggestion est, à mon avis, très intéressante.
Je souligne que la question soulevée sera étudiée et que le maintien de l'amendement n'accélérerait nullement le processus, puisqu'il faudra de toute manière attendre la fin de la navette parlementaire.
Sincèrement, j'estime que les engagements pris, tant du côté de la commission que de celui du Gouvernement, ont été suffisamment clairs et forts. Mon cher collègue, le petit jeu auquel nous nous livrons me semble quelque peu dérisoire, et guère digne de la Haute Assemblée.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Je me suis déjà amplement exprimé à propos d'autres amendements. Le sujet ici abordé fait partie de tous ceux sur lesquels nous devons travailler.
Si cet amendement devait ne pas être retiré, j'émettrais un avis défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Dallier, l'amendement n° 213 rectifié est-il maintenu ?
M. Philippe Dallier. Monsieur le rapporteur, je conçois mal que l'on puisse en appeler à la dignité quand des parlementaires défendent leur point de vue et refusent d'obtempérer !
M. Jean Desessard. Absolument !
M. Philippe Dallier. Il faut tout de même peser les mots que l'on emploie, monsieur le rapporteur !
Je ne comprends pas votre attitude. À quoi servent donc les parlementaires ? C'est d'ailleurs peut-être bien le problème qui se pose dans ce pays : savoir à quoi ils servent ! Quel peut être leur rôle, si l'on refuse systématiquement de les entendre au cours de la phase de préparation des textes et si, lors de l'examen de ceux-ci en séance publique, on leur demande de retirer les amendements qu'ils défendent, tout en reconnaissant que leurs propositions sont pertinentes ?
Dans ces conditions, je me sens offensé, monsieur Braye, par votre appel à la dignité ! Je vous demande de retirer vos propos. J'ai droit au respect, comme tous les parlementaires de ce pays. Je ne retirerai pas mon amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur. C'est non pas de la dignité de notre collègue dont je parlais, mais de l'image des travaux de la Haute Assemblée que nous allons donner à l'extérieur de cet hémicycle.
Ce n'est pas à moi, monsieur Dallier, que vous pourrez reprocher de ne pas être attentif aux problèmes soulevés. En effet, vous reprenez, pour l'essentiel, toutes les mesures qui figuraient dans la proposition de loi que j'avais déposée.
La seule chose qui m'intéresse, c'est le résultat auquel nous aboutirons à l'issue du processus parlementaire. À cet égard, j'ai essayé de vous expliquer que, à mon sens, votre attitude ne permettrait pas de faire prévaloir dans les meilleures conditions les solutions que vous préconisez. Je suis intimement persuadé que votre façon de procéder n'est pas la meilleure en termes d'efficacité, et il relève manifestement de ma responsabilité d'attirer votre attention sur ce fait.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 213 rectifié.
Je suis saisie de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, de la commission des affaires économiques, l'autre, du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 33 :
Nombre de votants | 330 |
Nombre de suffrages exprimés | 297 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 148 |
Pour l'adoption | 13 |
Contre | 284 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 214 rectifié ter, présenté par MM. Dallier et Cambon et Mme Procaccia, MM. Demuynck et Retailleau est ainsi libellé :
Avant l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le septième alinéa de l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
« Le prélèvement ne peut avoir pour effet de faire tomber l'épargne nette de la commune, telle que définie par la nomenclature M14, pour le pénultième exercice, à un niveau inférieur à 30 % de celle constatée, en moyenne, pour les communes de la strate régionale.
« Afin de ne pas favoriser les communes dont le coefficient de mobilisation du potentiel fiscal est inférieur à la moyenne régionale de la strate, le coefficient moyen est retenu pour le calcul de l'épargne nette.
« La partie de la pénalité n'ayant pu être prélevée, du fait de ce plafonnement, le sera lorsque le niveau de l'épargne nette dépassera à nouveau le seuil de 30 % de l'épargne nette constatée, en moyenne, pour les communes de la strate régionale. »
La parole est à M. Philippe Dallier.
M. Philippe Dallier. C'est un amendement de repli par rapport à l'amendement n° 204 rectifié que j'ai présenté en début de séance.
Il vise à vérifier que le prélèvement effectué au titre de l'article 55 de la loi SRU n'a pas pour conséquence de faire chuter sous le seuil de 30 % l'épargne nette de la commune par rapport à la strate régionale dans laquelle cette dernière s'inscrit. Il s'agit de permettre à la collectivité de conserver une épargne nette suffisante pour réaliser les équipements publics qui lui sont nécessaires.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Je ne peux que demander le retrait de cet amendement, tout en partageant, je le répète, les préoccupations de son auteur. Si ce dernier n'accédait pas à ma demande, j'émettrais un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement est-il maintenu, monsieur Dallier ?
M. Philippe Dallier. Oui, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. En tant que maire d'une commune de l'agglomération non pas parisienne mais tourangelle, je ne pâtis peut-être pas des handicaps dont a fait précédemment état M. Dallier. Je considère néanmoins que l'on peut fort bien avoir une épargne nette dangereusement amoindrie par les décisions gouvernementales qui nous sont régulièrement imposées En outre, la forme que vous choisissez, monsieur Dallier, pour répondre à ce problème et à la question des besoins en logements sociaux ne me semble nullement pertinente.
Par rapport à l'intervention de M. Desessard, je tiens à préciser que ma commune est de celles qui construisent plus de logements sociaux qu'elles n'en ont l'obligation. Pour ma part, j'ai fait en sorte, qu'il s'agisse des prêts locatifs aidés d'intervention, les PLAI, des prêts locatifs intermédiaires, les PLI, ou des prêts locatifs sociaux, les PLS, que ces constructions puissent être réalisées grâce à des financements communaux, tout simplement pour avoir un niveau de loyers plus bas. J'ai donc fait les efforts nécessaires et je continue, parce que les populations que nous accueillons ont besoin d'être accompagnées dans ce domaine comme dans d'autres.
Au vu du déficit de logements sociaux dont nous souffrons actuellement, j'estime que c'est envoyer un signe très négatif que de chercher à atténuer la loi SRU, et tout particulièrement l'obligation qu'elle prévoit en son article 55.
Il me semblerait plus pertinent que l'État contribue à faciliter la construction de logements sociaux en améliorant l'attribution de l'aide à la pierre.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 214 rectifié ter.
Je suis saisie de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, de la commission des affaires économiques, l'autre, du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 34 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 288 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 145 |
Pour l'adoption | 5 |
Contre | 283 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 148 rectifié bis, présenté par Mme Létard, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Avant l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 302-8 du code de la construction et de l'habitation est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Dans les communes mentionnées dans la première phrase de l'article L. 302-5, les projets portant sur la construction ou la réhabilitation d'un nombre de logements supérieur à dix-neuf ne sont autorisés, dans des conditions fixées par décret, que s'ils comportent une proportion minimale de 20 % de logements sociaux au sens du même article L. 302-5. »
La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Valérie Létard, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Dans le même esprit que celui que j'ai présenté hier, cet amendement prévoit que l'octroi de tout permis de construire est subordonné à la réalisation d'un ou de plusieurs projets de construction ou de réhabilitation comportant obligatoirement 20 % de logements sociaux.
Lors de l'examen de ces amendements en commission des affaires sociales, son président, Nicolas About, mais aussi d'autres collègues, ont fourni plusieurs exemples d'application de cette règle qui permet de mixer dans un même projet de l'accession sociale à la propriété, du locatif social et des logements privés.
Ainsi, une telle mesure permettra d'introduire de la mixité sociale dans tous les nouveaux programmes que nous mettrons en oeuvre. Surtout, en ne prévoyant pas une pénalité unique, et donc sans venir complexifier encore la règle des 20 % de logements sociaux pour les communes qui rencontrent des difficultés, nous imposons à celles qui auront la capacité de construire vingt logements, d'en réserver quatre au logement social. C'est une mesure qui me paraît équitable, parfaitement réalisable et qui va dans le sens d'un effort partagé en vue de produire de logements sociaux.
Si, demain, avec une capacité à produire du logement, avec un foncier suffisant et les moyens de développer du locatif, ce quota des 20 % n'est pas atteint, il sera logique de contribuer à l'effort national pour éviter de toujours produire du logement social et du logement privé haut de gamme dans les mêmes secteurs.
Cette mesure de justice et d'équité est aussi la plus simple et la moins contraignante pour éviter les concentrations massives de population et obtenir un développement social harmonieux. Elle doit permettre à des groupes sociaux différents, appartenant à des catégories sociologiques différentes, qui ne demandent qu'à partager leurs expériences, de vivre ensemble et d'être solidaires.
Il me semble que c'est le devoir de la commission des affaires sociales que de proposer des amendements de cette nature.
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont présentés par Mme Demontès, MM. Siffre et Godefroy, Mmes Alquier, Printz, Schillinger et Le Texier, MM. Repentin, Raoul, Caffet et Bel, Mme Y. Boyer, MM. Courteau et Dussaut, Mmes Herviaux, Hurel et Khiari, MM. Krattinger, Lejeune, Pastor, Piras, Raoult, Reiner, Ries, Saunier, Teston, Trémel, Lise, Vézinhet, Picheral et Madec, Mme San Vicente, MM. Plancade, Gillot et les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 364 est ainsi libellé :
Avant l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 302-8 du code de la construction de l'habitation est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Dans les communes mentionnées dans la première phrase de l'article L. 302-5, les projets portant sur la construction ou la réhabilitation d'un nombre de logements supérieurs à dix-neuf ne sont autorisés que s'ils comportent une proportion minimale de 20 % de logement sociaux au sens du même article L. 302-5. »
L'amendement n° 363 est ainsi libellé :
Avant l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 302-8 du code de la construction de l'habitation est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Dans les communes mentionnées dans la première phrase de l'article L. 302-5, les projets portant sur la construction ou la réhabilitation d'un nombre de logements supérieurs à dix ne sont autorisés que s'ils comportent une proportion minimale de 20 % de logement sociaux au sens du même article L. 302-5. »
La parole est à M. Thierry Repentin, pour présenter ces deux amendements.
M. Thierry Repentin. Mes chers collègues, j'espère que vous avez prêté attention à la suggestion du rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, dont je partage complètement la vision des choses. Il faut que nous produisions enfin des logements abritant une réelle diversité sociale, pour que chacun trouve sa place, dans toutes les villes.
Cet amendement présente un autre avantage, et important. Si le contenu d'un permis de construire est conforme au PLU, en droit de l'urbanisme, le maire ne peut s'y opposer même au motif qu'il ne comporterait pas de logements sociaux accessibles. Le maire ne peut donc refuser la délivrance d'un permis de construire déposé par un promoteur qui ne réalise que du logement libre, même si sa commune contrevient aux dispositions de l'article 55 de la loi SRU.
Finalement, en votant cet amendement, dont la rédaction est très proche mais sans doute plus aboutie que celle de l'amendement n° 364 que nous avons déposé, on donne au maire un outil dont il ne dispose pas aujourd'hui.
Vous me direz que l'on peut toujours, dans le cadre de la négociation, imposer à un promoteur immobilier la réalisation de 20 %, 30 % ou 40 % de logements sociaux. Oui, si le maire est armé d'une solide culture juridique, notamment en droit de l'urbanisme, ce qui n'est pas nécessairement le cas. Et notre droit de l'urbanisme est tellement compliqué ! Les mairies ne disposent pas non plus toujours des services compétents pour les accompagner au quotidien.
En outre, dans les grandes villes comme Paris, un promoteur qui ne répondrait pas à la demande « appuyée » du maire sait qu'il pourrait, à l'avenir, rencontrer plus de difficultés pour obtenir un permis de construire... On peut donc profiter dans ce cas du rapport de force qui s'établit, mais, qui dit rapport de force, dit force de part et d'autre, ce qui ne reflète que rarement la réalité dans les communes de taille modeste.
Votre amendement, madame le rapporteur pour avis, donne une force aux maires qui ne disposent pas de l'accompagnement juridique nécessaire à l'instruction des permis de construire. Là, d'emblée, tout porteur de projet de construction ou de réhabilitation dans une commune saura qu'il devra dans son projet faire vivre la mixité sociale.
L'amendement n° 364 n'aura plus d'objet si l'amendement n° 148 rectifié bis est adopté. Nous saurons en tenir compte au moment du vote.
L'argumentation vaut pour l'amendement n° 363, qui n'est qu'une petite variante du précédent.
Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Létard, rapporteur pour avis.
Mme Valérie Létard, rapporteur pour avis. Je tenais à compléter mon intervention en vous citant, mes chers collègues, les propos tenus par M. le Premier ministre, le 16 septembre dernier, devant le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Voici ce que déclarait M. le Premier ministre à cette occasion : « J'ai demandé à M. Jean-Louis Borloo d'étudier la possibilité de fixer une part de logements intermédiaires, de logements sociaux, dans chaque construction nouvelle. »
L'amendement de la commission des affaires sociales est donc en parfaite harmonie avec les attentes de M. le Premier ministre s'agissant de l'avenir de la production de logements sociaux et du partage de l'effort sur notre territoire.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur les trois amendements en discussion commune ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Madame le rapporteur pour avis, votre idée est intéressante, nous en discutions encore aujourd'hui, à deux heures du matin, avec M. Jean-Louis Borloo. Nous vous avions expliqué pourquoi, en toute logique, la commission des affaires économiques ne pourrait pas être favorable à votre amendement.
Si celui-ci ne touche pas de façon fondamentale aux dispositions de la loi SRU, il introduit tout de même une contrainte supplémentaire pour le maire. De plus, par cet amendement, vous passez d'une notion de stock à une notion de flux, ce qui peut se révéler une très bonne chose, mais demande une étude préalable.
Nous sommes attachés, comme vous, à faire progresser ce dossier, et nous vous demandons tout simplement de retirer l'amendement, afin que nous puissions en discuter d'ici à la deuxième lecture. Les collègues qui avaient présenté, eux aussi, des amendements qu'ils estimaient tout à fait légitimes, les ont retirés dans leur quasi-totalité.
En tant que rapporteur, j'en appelle à votre sens des responsabilités sur ce point, tout en renouvelant l'engagement que j'ai pris hier : ce problème sera étudié au fond avant la deuxième lecture et fera l'objet d'une proposition.
Quant aux amendements nos 364 et 363, la commission émet naturellement le même avis. Encore plus coercitif puisqu'il cumule le quota et un seuil de déclenchement très bas- dix-neuf ou dix logements - ce dispositif serait encore plus difficile à respecter.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Je ne conteste pas la volonté du Gouvernement d'examiner, à l'occasion de la navette parlementaire, l'ensemble de l'article 55 de la loi SRU.
Premièrement, je voudrais tout simplement vous renvoyer au d) du paragraphe III de l'article 2 - il complète d'ailleurs le code de l'urbanisme, et non pas l'article 55 de la loi SRU -, ...
M. Thierry Repentin. C'est un épouvantail !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. ...que vous avez adopté : « À délimiter des secteurs »- les secteurs du PLU - « dans lesquels, en cas de construction d'un programme de logements, un pourcentage de ce programme devra être affecté à des catégories de logements locatifs qu'il définit. »
M. Thierry Repentin Il manque l'adjectif « social », monsieur le ministre !
M. Jean-Pierre Caffet. Oui, le locatif, ce n'est pas forcément du social !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. C'est un pouvoir qui est donné aux élus.
Deuxièmement, je vous ferai part d'une observation d'ordre technique : s'il s'agit du permis de construire, c'est bien le PLU qui doit prescrire une telle mesure.
M. Jean-Pierre Caffet. Nous sommes d'accord !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Je pense donc que nous devons travailler sur cet aspect de la question.
Nous nous rejoignons sur la nécessité d'une réforme globale, équilibrée, consensuelle. Compte tenu des observations que je viens de formuler, je demande, comme M. le rapporteur, le retrait de ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Jarlier, rapporteur pour avis.
M. Pierre Jarlier, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. L'amendement présenté par la commission des affaires sociales est intéressant en ce qu'il devrait justement permettre de favoriser la construction de logements sociaux lorsque la commune n'a pas atteint l'objectif fixé par la loi.
Néanmoins, et je rejoins ici ce qui a été dit au sujet d'autres amendements, il nécessite un certain nombre d'adaptations techniques qui justifient un renvoi en deuxième lecture. Pour ma part, j'en vois deux.
Premièrement, comme l'a dit M. le ministre, on a défini à l'article 2 des périmètres dans les documents d'urbanisme permettant d'instituer des zones dans lesquelles il faudra construire des logements qui auront notamment une vocation sociale.
J'indique à M. Repentin que le Sénat a voté un amendement de la commission des lois visant à assurer, dans ces zones, de la mixité sociale, et donc de la construction de logements sociaux. (M. Jean Desessard s'exclame.)
On pourrait parfaitement imaginer imposer aux communes qui n'ont pas atteint leur objectif la définition de tels périmètres. Pour l'instant, c'est une faculté, mais cette réflexion doit faire partie du débat en deuxième lecture.
Deuxièmement, je ne vois pas comment nous pourrions imposer un pourcentage de logements sociaux pour tout permis de construire. Certains maîtres d'ouvrage ne peuvent justement pas assurer cette mixité.
Mme Valérie Létard, rapporteur pour avis. Bien sûr que si !
M. Pierre Jarlier, rapporteur pour avis. L'objectif est très difficile, notamment pour l'office d'HLM qui réalise exclusivement du logement social, ou pour d'autres organismes qui construisent uniquement d'autres types de logements. En revanche, pour aller plus vite dans la construction de logements sociaux, nous pourrions tout à fait imaginer que cet objectif soit atteint sur une année. Dans ce cas, nous entrons dans la logique des flux.
Cet amendement mérite vraiment d'être retravaillé, ce à quoi s'attellera le groupe de travail qui va être installé à cet effet avant la deuxième lecture. Je souhaite donc que Mme Létard le retire, même si, sur le fond, je partage son objectif.
Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Létard, rapporteur pour avis.
Mme Valérie Létard, rapporteur pour avis. Je vais essayer de répondre aux objections qui viennent d'être formulées.
Tout d'abord, la possibilité de fixer certaines modalités dans le cadre des PLU vaut pour tout le territoire national. Cet amendement vise les communes qui n'ont pas atteint le quota de 20 % de logements sociaux et qui doivent s'y conformer.
M. Jean Desessard. Très bien !
Mme Valérie Létard, rapporteur pour avis. La possibilité offerte aux maires d'organiser la production de logement social sur leur territoire est une très bonne mesure, mais notre proposition est différente.
Notre amendement renvoie à des conditions fixées par décret. Nous pourrions travailler sur ce décret d'application. Prévoir quatre logements sociaux dans un projet en comportant plus de vingt ne me semble pas irréalisable. Il me semble techniquement tout à fait possible de prévoir deux opérateurs sur un même projet d'architecte : l'un pour le logement privé, l'autre pour les quatre logements sociaux.
M. Jean Desessard. Très bien !
M. Jean-Pierre Caffet. Cela se fait, d'ailleurs !
Mme Valérie Létard, rapporteur pour avis. En conclusion, mes chers collègues, cet amendement n'est sans doute pas parfait, mais la navette parlementaire sert à lancer des pistes, en fonction des préoccupations dont nous font part les élus et les populations sur nos territoires, afin de les faire mûrir et évoluer. Nous avons la chance de débattre d'un texte qui n'a pas été déclaré d'urgence.
M. Jean Desessard. Eh oui !
Mme Valérie Létard, rapporteur pour avis. Il nous semble justement que le travail parlementaire - M. Dallier l'évoquait tout à l'heure - consiste à exprimer des idées qui nous tiennent à coeur, avec notre sensibilité individuelle et notre légitimité, et à en débattre ensemble.
Bien évidemment, la commission des affaires sociales salue la proposition de M. Borloo de travailler au sein d'un groupe de réflexion. Cela étant, il ne me paraît pas excessif de tracer quelques pistes, au travers de quelques amendements, sur des points qui ne déséquilibrent pas le périmètre du texte. Ainsi, le Sénat montre qu'il se préoccupe de la façon dont nous pouvons atteindre une production minimale de logements sociaux, et ce de manière équilibrée sur notre territoire.
Pour ces raisons, je peux, au nom de la commission des affaires sociales, maintenir cet amendement sans créer un déséquilibre catastrophique et irréversible. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF ainsi que sur celles du groupe socialiste.)
M. Jean Desessard. C'est clair, limpide, fluide !
Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote sur l'amendement n° 148 rectifié bis.
M. Thierry Repentin. Je partage la philosophie et l'approche de Mme Létard.
Je voulais apporter quelques précisions à M. le ministre, qui n'était pas des nôtres - et c'est bien naturel - la nuit dernière, au sujet du paragraphe III de l'article 2.
Le logement locatif auquel il est fait référence dans ce paragraphe, où il est question de « logement locatif » et non de logement social, n'a aucune valeur. Je veux dire par là que les logements à loyer maîtrisé réhabilités par l'ANAH, dont les loyers se situent au-delà du marché, de même que les logements construits à l'aide des différents dispositifs de défiscalisation « Robien », notamment, sont considérés comme du logement locatif. Pour autant, ce n'est pas du logement accessible, il y a une différence.
Par ailleurs, le Gouvernement a choisi d'inscrire cette disposition à l'article L. 123-2 du code de l'urbanisme. Ce faisant, il a créé le droit de délaissement : au lendemain de l'adoption du PLU, les propriétaires pourront mettre les maires en demeure d'acheter les terrains qui font l'objet d'un « ciblage » social, si je puis m'exprimer ainsi.
Dans la mesure où la municipalité ne peut acheter tous les terrains dès l'adoption du PLU, cette disposition tombe de facto et est inapplicable dès le lendemain de l'adoption du PLU !
Je tenais, mes chers collègues, à apporter cette explication pour replacer dans leur contexte les propos de M. le ministre.
M. Jean Desessard. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Fourcade. Madame la présidente monsieur le ministre, mes chers collègues, à Boulogne-Billancourt, dans le cadre d'un programme de construction dont est chargée la société d'aménagement d'économie mixte Val-de-Seine Aménagement sur les terrains Renault, il est prévu que 30 % des 6 000 logements seront consacrés au logement social. Par conséquent, la ville dont je suis le maire est au-delà de l'objectif fixé par Mme Létard.
Pour autant, l'amendement que Mme le rapporteur nous propose n'est pas bon, et ce pour deux raisons.
Tout d'abord, pour les grandes villes, qui ont donc des programmes de logements un peu plus importants, le seuil de dix-neuf logements est ridicule. À Boulogne-Billancourt, les programmes de construction concernent 40, 50, 60, 100, 200 logements !
Mme Valérie Létard, rapporteur pour avis. Le seuil est à partir de dix-neuf !
M. Jean-Pierre Fourcade. Par ailleurs, le fait d'intégrer des logements sociaux dans tous les programmes neufs est techniquement absurde, pour l'urbanisme comme pour la gestion quotidienne du développement d'une grande ville.
En revanche, l'idée de faire un parallèle entre la construction de logements et le nombre de logements sociaux, et d'instaurer une proportion de 20 % de logements sociaux dans le PLU me paraît bonne. Il faudrait ériger ce principe en obligation.
Le PLU de Boulogne-Billancourt prévoyait des réserves pour les logements sociaux, car je savais que de grandes sociétés - je n'en citerai aucune - vendaient des blocs de 400, 500, 600, 700 appartements loués à un prix inférieur au marché locatif, mais supérieur aux loyers sociaux. Or ces réserves ont été annulées par le tribunal administratif, qui a considéré que la municipalité n'avait pas le droit de les constituer !
Par conséquent, ce dispositif est contraignant, même s'il est bon dans son esprit. Obliger les communes à atteindre 20 % de logements sociaux en instaurant une règle de proportionnalité, pourquoi pas ? Ma municipalité consacre bien 30 % des logements nouveaux sur les terrains Renault au logement social dès le premier programme. Mais faisons-le de manière correcte !
L'amendement de la commission des affaires sociales, en l'état, ne me paraît pas bon. C'est la raison pour laquelle je ne le voterai pas.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Seillier, pour explication de vote.
M. Bernard Seillier. Nous avons eu le temps de nous habituer à la ritournelle de M. le rapporteur de la commission des affaires économiques, car nous l'entendons maintenant depuis un certain nombre d'heures !
Chaque fois que des amendements tendent à modifier certaines parties de la loi SRU, il oppose à leurs auteurs une fin de non-recevoir et émet un avis défavorable pour une raison de procédure, nous expliquant que des études de cohérence sont encore à faire, que ces propositions vont dans le bon sens et qu'au terme de la navette parlementaire elles seront intégrées dans le texte final.
Le choix d'une telle tactique m'étonne, monsieur le rapporteur. Pour avancer, ne faut-il pas partir d'une proposition existante ? M. Fourcade vient de nous en offrir la démonstration à l'instant même : il a approuvé le fond et l'esprit de cet amendement, mais a remis en cause ses modalités, notamment le pourcentage. C'est typiquement le genre de perfectionnement qui peut s'obtenir dans le cours d'une navette parlementaire !
Surtout, monsieur le rapporteur, pourquoi mettre le Sénat dans la situation de devoir repousser, et à une très forte majorité, par scrutin public, des propositions qui sont bonnes, alors que vous comptez, finalement, les faire adopter en deuxième lecture ?
Il y aurait une méthode beaucoup plus simple : nous laisser approuver très largement les amendements que vous faites actuellement lourdement rejeter en première lecture, et procéder à un ajustement par la suite. Une telle tactique serait tout à fait acceptable, monsieur le rapporteur, mais celle que vous nous opposez est plutôt sophistiquée !
M. Jean Desessard. J'aurais dit primaire, plus que sophistiquée !
M. Bernard Seillier. Je rappelle à nos collègues la réunion de deux heures et demie que le Premier ministre a consacrée au Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, à Matignon, le 16 septembre. Mme Létard vient de rapporter les propos qu'a tenus le Premier ministre à cette occasion, et tous ceux qui étaient autour de la table ce jour-là ont pu les entendre comme moi !
Je ne suis pas près d'oublier cette séance, d'une part, parce qu'elle a eu lieu, exceptionnellement, et pour la première fois, à Matignon et, d'autre part, parce que ce conseil a été élargi, pour la première fois de son existence, et de manière définitive, aux partenaires sociaux. La présidente du MEDEF nous a même fait l'honneur d'assister, en personne, à cette réunion.
Depuis cette date, j'ai présidé deux autres réunions du conseil - le 13 octobre et le 17 novembre - et j'en présiderai une la semaine prochaine - le 2 décembre. Inutile de vous dire que les questions examinées au cours de telles réunions portent sur les mêmes sujets que ceux qui nous occupent aujourd'hui !
Le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale compte parmi ses membres le Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées, l'Union sociale pour l'habitat, l'USH, et la Fédération des associations pour la promotion et l'insertion par le logement, la FAPIL, en tant que membres désignés par décret du Premier ministre.
Comment pourrai-je leur expliquer, le 2 décembre prochain, le rejet de l'amendement de la commission des affaires sociales ? Car ils sont au courant : tous les amendements qui sont proposés par les différents organismes circulent très librement, ce qui est heureux. Nous sommes, que je sache, dans un pays de liberté où l'on peut discuter dans la transparence de certaines propositions, relever des contradictions et justifier éventuellement des rejets.
Oui, monsieur le rapporteur, que vais-je bien pouvoir leur dire ? Qu'il ne faut pas s'en faire, que la disposition est à l'étude, alors que l'amendement hautement symbolique de la commission des affaires sociales, commission dont je suis également vice-président, n'aura pas été adopté !
Symboliquement, sur une question de cette importance, mes chers collègues, je ne peux faire autrement que d'approuver cet amendement.
M. Jean Desessard. Très bien ! Belle intervention !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Caffet, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Caffet. Je partage le point de vue de M. Seillier.
Il est question, depuis cinq jours maintenant, d'un engagement national pour le logement. Or, chaque fois que nous essayons d'avancer sur le logement locatif social, nous nous heurtons à un véritable mur, que ce soit de la part de la majorité sénatoriale ou de la part du Gouvernement.
Comment pourrions-nous, au vu de la situation que connaît le pays, accepter un texte dont les seules avancées concerneraient le logement locatif libre ? Il y a en France, dans certaines grandes villes, des centaines de milliers de demandeurs de logement social en attente.
M. Thierry Repentin. Oui, 1,3 million de demandes !
M. Jean-Pierre Caffet. J'étais encore loin du compte !
Comment pourrions-nous sortir de ce débat sans leur adresser un signe si petit soit-il ?
Très franchement, quel que soit l'amendement adopté, qu'il s'agisse des amendements présentés par M. Repentin ou de l'amendement de Mme Létard, le plus important est que nous puissions avancer sur le terrain du logement locatif social.
Quant à M. Fourcade, je veux lui dire que toutes les villes n'ont pas la chance de disposer d'un terrain de plusieurs dizaines d'hectares, et donc de pouvoir en réserver une partie pour des logements sociaux en engageant des programmes de construction de centaines de logements !
M. Jean-Pierre Fourcade. Exact !
M. Jean-Pierre Caffet. Eh oui !
M. Philippe Dallier. Mais on vous a expliqué ça pendant des heures !
M. Christian Demuynck. On vous l'a dit et redit !
M. Jean-Pierre Caffet. Paris compte encore quelques terrains disponibles et le pourcentage de logements sociaux fixé en général sur les zones d'aménagement concerté, les ZAC, est de l'ordre de 50 %. Toutes les villes n'ont pas cette chance. Qui plus est, les terrains libres se raréfient également à Paris.
La proposition de créer du logement social dans le secteur diffus répond aux besoins du locatif social, tout en favorisant la mixité et la diversité de la population. C'est l'objectif à atteindre, mes chers collègues. Nous ne devons pas simplement chercher à donner demain aux maires la possibilité d'inscrire dans les PLU un certain nombre de périmètres réservés aux dispositifs « Robien » !
Pourquoi, depuis cinq jours, nous butons-nous sur un mur à propos du logement locatif social ? De grâce, que le Sénat fasse aujourd'hui un geste en direction des plus défavorisés en adoptant l'amendement n° 148 rectifié bis !
Quant aux modalités - faut-il raisonner en termes de logements ou en termes de SHON, pour établir un seuil à partir duquel le mécanisme se déclencherait ? - peu importe ! Nous sommes prêts à nous ranger, au cours de la navette parlementaire, à la meilleure formule.
Mes chers collègues, sortons de ce blocage et adressons au moins un petit signe en faveur du logement locatif social.
M. Jean Desessard. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Sur le principe, je trouve cet amendement plutôt bon. Mais qu'en est-il des modalités ?
Pour ce qui me concerne, mes chers collègues, j'essaie de garder à l'esprit que nous légiférons pour traiter la totalité des cas de figure. Or que nous apprend l'expérience ? Lorsqu'il est question d'une opération mixte, les bailleurs sociaux veulent que les logements soient répartis par cages d'escaliers, ce qui est effectivement plus facile à gérer pour eux. Quant aux promoteurs, procéder de manière diffuse peut leur poser des problèmes.
M. Jean-Pierre Caffet. Ce n'est pas vrai !
M. Philippe Dallier. C'est ce que j'entends en tant que maire !
Les promoteurs n'acceptent le logement social diffus qu'à la condition que les constructions soient financées par des prêts locatifs sociaux. Pour le reste, nous devons essayer de traiter au cas par cas les opérations individuelles, comme les opérations en ZAC, car, si un permis de construire peut avoir été accordé uniquement à un bailleur social, une opération privée peut se faire juste à côté.
M. Pierre Jarlier, rapporteur pour avis de la commission des lois. Voilà !
M. Philippe Dallier. Inscrire dans le texte une proportion minimale de 20 % par projet de construction, posera nécessairement des difficultés.
L'idée me semble intéressante à creuser, mais les modalités d'application proposées présentent en l'état de gros inconvénients. C'est la raison pour laquelle je m'abstiendrai sur cet amendement un peu trop général.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Avant de faire partie de la commission des finances, j'étais membre de la commission des affaires économiques. Nous avions déjà débattu de la question d'imposer 20 % de logements sociaux dans tous les futurs projets de construction, monsieur le ministre, à l'époque où vous étiez président de cette commission !
Mme Marie-France Beaufils. Cette discussion est donc bien plus ancienne que ce que les uns et les autres en ont dit !
Déjà, à l'époque, une grande partie de la commission des affaires économiques approuvait cette proposition. Je trouve donc d'autant plus dommage que l'on nous demande maintenant d'attendre encore un peu avant de l'adopter.
Je suis d'accord avec ce que mes collègues ont dit : afin d'éviter les programmes où une seule conception prévaut, nous devons intervenir et contraindre, s'il le faut.
En effet, comme le dit M. Dallier, nos partenaires lors de la construction de logements sociaux veulent souvent une cage d'escalier « typée ». Il faudrait donc bousculer un peu leurs habitudes. Avec ce projet de loi, les élus pourraient s'appuyer sur une déclaration relativement forte, qui leur permettrait de dire à leurs interlocuteurs : « réfléchissons ensemble » !
Après avoir accédé à la propriété, certains propriétaires peuvent parfaitement décider, au bout de quelques années, de mettre leur logement en location. La cage d'escalier finit donc par être peuplée de propriétaires et des locataires, et tout cela se vit très bien !
Dès lors, lorsque l'on décide de construire des logements neufs, pourquoi ne pourrait-on pas également décider de créer de la mixité dès le départ ? Il me paraît en effet aberrant de ne pas arriver à faire aujourd'hui bouger les mentalités et changer les habitudes des constructeurs, y compris sur des programmes importants.
Moi, je le fais dans ma commune. J'ai un programme de 110 logements - c'est à la taille de ma commune - réalisé par un investisseur relativement important. Eh bien, le promoteur a accepté qu'il y ait une part de logements sociaux achetés par un organisme de logement social dans le cadre d'une vente en l'état futur d'achèvement !
C'est donc tout à fait possible. Il n'y a pas d'obstacle technique, c'est juste une question de volonté. L'inscrire dans la loi serait un signe très positif au regard de la situation que nous connaissons et des insuffisances qui sont relevées.
On ne peut pas sortir de la première lecture d'un texte qui s'intitule « projet de loi portant engagement national pour le logement » sans avoir pris d'engagements réels afin de répondre à la majorité des besoins.
On parle de construire du PLI ou du PLS, mais de nombreuses familles qui recherchent un logement ne peuvent pas y accéder, faute de ressources suffisantes. Il faut donc créer pour elles du véritable logement social avec un montant de loyer qui leur soit accessible.
Ceux qui ont les plus faibles ressources ne doivent plus être regroupés dans la partie du parc de logement social la plus ancienne, sinon on continuera à créer des ghettos. Or, tout le monde a pu le constater avec ce qui vient de se passer dans les banlieues, ces regroupements ont prouvé leur nocivité.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Les interventions pour défendre cet amendement sont excellentes. Mais je veux quand même, moi aussi, apporter mon petit éclairage.
Lorsque l'on a fait remarquer à M. le ministre Borloo, dans la discussion générale, que le projet de loi ne comportait que onze articles, il nous a répondu que le débat parlementaire servirait à enrichir le texte. Or, chaque fois qu'un amendement présente un intérêt, on nous rétorque qu'il ne faut encore rien faire, même si l'on y réfléchit depuis trois ans.
Je ne vois donc pas comment on réussira à enrichir le texte si, à chaque fois qu'il y a des propositions dont les sénateurs approuvent la philosophie, on les renvoie à plus tard. Je ne parle pas bien entendu des amendements que j'ai déposés, dont l'excellente philosophie n'a pas fait l'unanimité, (Sourires) mais de ceux dont l'intérêt est reconnu par tous.
À ce train-là, l'engagement national pour le logement ne sera bientôt plus qu'une « promesse nationale pour le logement ». Et, avec la navette, que restera-t-il des promesses ? (Nouveaux sourires.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 148 rectifié bis.
Je suis saisie de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, de la commission des affaires économiques, l'autre, du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 35 :
Nombre de votants329
Nombre de suffrages exprimés328
Majorité absolue des suffrages exprimés165
Pour l'adoption162
Contre 166
Le Sénat n'a pas adopté.
La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote sur l'amendement n° 364.
M. Thierry Repentin. M. le rapporteur, répondant à M. Dallier, nous disait tout le prix qu'il attache à la dignité du Sénat. Ce qui vient de se passer, convenons-en, mes chers collègues, ne contribuera pas à améliorer notre image à l'extérieur et à gagner à notre cause ceux qui ne voient en notre assemblée qu'un anachronisme !
Plusieurs intervenants se sont succédé pour le rappeler, la Haute Assemblée partage avec l'Assemblée nationale l'initiative parlementaire ; nous sommes donc fondés à tenter d'améliorer un tant soit peu ce texte par des dispositions qui trouveront leur forme finale à l'issue de la navette.
Le scrutin public a au moins le mérite de rappeler le poids du vote de groupe. Compte tenu des déclarations qui ont précédé ce scrutin, nous pouvions nous attendre à ce que l'amendement dégage une majorité en sa faveur. L'amendement n°148 rectifié bis aurait pu, aurait dû être adopté. Tel n'a pas été le cas.
J'espère qu'aucun journaliste ne suit nos débats, car il constaterait que, en dépit des discours à la tribune ou devant les micros, les actes ne suivent pas les paroles !
Souhaitant moi aussi préserver la dignité de cette assemblée et voulant éviter que l'on ne dise à l'extérieur qu'elle est anachronique, je retire les amendements nos 364 et 363.
Mme la présidente. Les amendements n°s 364 et 363 sont retirés.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la présidente, je voudrais rappeler au Gouvernement et à mes collègues que le Sénat a entamé hier la discussion du projet de loi de finances pour 2006.
Naturellement, je ne voyais aucun inconvénient à ce que le Sénat poursuive ce matin la discussion du projet de loi portant engagement national pour le logement. Néanmoins, je souhaite que nous puissions reprendre l'examen du projet de loi de finances dès quinze heures. Nous avons en effet à examiner plus de trois cents amendements sur la première partie. Il nous faut de surcroît compter désormais avec les deux débats thématiques que nous n'avions pas les années passées et qui nous occuperont une partie de la journée de mercredi. Nous sommes par conséquent obligés de siéger ce soir.
Donc, contrairement à ce que nous avions imaginé dans un premier temps, vous ne pourrez pas reprendre vos travaux sur le présent projet de loi avant demain matin, samedi, mes chers collègues.
Par conséquent, madame la présidente, si vous pouviez suspendre maintenant la séance, j'y verrais beaucoup d'avantages.
Mme la présidente. Monsieur Arthuis, l'organisation de nos travaux est conforme aux conclusions de la conférence des présidents, conférence à laquelle nous avons assisté les uns et les autres. Il n'était de toute manière pas prévu que nous poursuivions ce soir la discussion du projet de loi portant engagement national pour le logement, mais il est maintenant évident que nous devrons siéger demain toute la journée, ce qui n'est pas sans présenter certains inconvénients.
La suite de la discussion est donc renvoyée à une prochaine séance.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quinze heures cinq.)
Mme la présidente. La séance est reprise.