Article 3
Les articles 10 à 19 de la même loi sont ainsi modifiés :
1° A l'article 10, les mots : « des consulats » sont remplacés par les mots : « des postes consulaires » ;
2° A l'article 12 :
a) Au premier alinéa, les mots : « au vote dans les centres de vote » sont supprimés ;
b) Il est ajouté un second alinéa ainsi rédigé :
« Chaque ambassade pourvue d'une circonscription consulaire et chaque poste consulaire organise les opérations de vote pour l'élection du Président de la République. Une ambassade ou un poste consulaire peut, par décret, être chargé d'organiser ces opérations pour le compte de plusieurs circonscriptions consulaires. » ;
3° L'article 13 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. 13. - Les dispositions des articles L. 71 à L. 77 du code électoral sont applicables dans les ambassades et les postes consulaires.
« Le décret prévu à l'article 19 fixe les modalités d'adaptation de ces mesures au vote dans les ambassades et les postes consulaires. » ;
4° A l'article 14, les mots : « article 5 ci-dessus » sont remplacés par les mots : « article 7 » ;
5° Le troisième alinéa de l'article 15 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Tout électeur a le droit de contester la régularité des opérations en faisant porter au procès-verbal des opérations de vote mention de sa réclamation.
« Tout candidat peut également, dans un délai de quarante-huit heures, déférer directement au Conseil constitutionnel l'ensemble des opérations électorales. » ;
6° A l'article 16 :
a) Les trois premiers alinéas sont remplacés par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les dispositions du chapitre VII du titre Ier du livre Ier du code électoral sont applicables.
« Les infractions définies à ce chapitre sont poursuivies et réprimées comme si elles avaient été commises sur le territoire de la République. » ;
b) Au dernier alinéa, les mots : « l'ambassadeur, le consul ou l'agent diplomatique chargé des fonctions consulaires, dans la circonscription duquel est installé le centre de vote » sont remplacés par les mots : « l'ambassadeur ou le chef de poste consulaire selon le cas, ou par leur représentant » ;
7° A l'article 17 :
a) Au premier alinéa, les mots : « dans les centres de vote » sont remplacés par les mots : « dans les ambassades et les postes consulaires » ;
b) Au deuxième alinéa, les mots : « aux procédures relatives au vote dans les centres de vote » sont supprimés ;
8° L'article 18 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. 18. - Sous réserve des dispositions de la présente loi, les dispositions du code électoral auxquelles renvoient les articles précédents sont applicables dans leur rédaction en vigueur à la date de publication de la loi organique n° 2005-............ du ............. » ;
9° L'article 19 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. 19. - Un décret en Conseil d'État complétant et adaptant le décret pris en application de l'article 3 de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l'élection du Président de la République fixe les modalités d'application de la présente loi organique. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 18, présenté par M. Yung, Mmes Cerisier-ben Guiga et M. André, M. Badinter, Mme Boumediene-Thiery, MM. Collombat, Courrière, Dreyfus-Schmidt, Frimat, C. Gautier, Mahéas, Peyronnet, Sueur, Sutour et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le deuxième alinéa (1°) de cet article :
1° L'article 10 est ainsi rédigé :
« Art. 10 - Sauf dans les Etats membres de l'Union européenne et les Etats qui ont déclaré l'accepter, toute propagande est interdite à l'étranger, à l'exception de l'envoi sous pli fermé des circulaires et bulletins de vote et de l'affichage offert aux candidats à l'intérieur des ambassades et des postes consulaires. »
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. L'article 10 de la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 stipule que « toute propagande est interdite à l'étranger, à l'exception de l'envoi sous pli fermé des circulaires et bulletins de vote et de l'affichage offert aux candidats à l'intérieur des ambassades et des consulats ».
Cette mesure législative, qui a été complétée par les dispositions du décret n°76-950 du 14 octobre 1976, repose sur des « convenances internationales ». En d'autres termes, il est de coutume de ne pas diffuser ni d'organiser de « propagande » liée aux scrutins nationaux dans un Etat étranger.
On comprend bien les raisons qui militent en ce sens. Toutefois, les deux exceptions contenues dans la loi de 1976 - l'envoi des circulaires, d'une part, l'affichage dans les ambassades et les consulats, d'autre part - ne permettent pas de sensibiliser de manière satisfaisante nos concitoyens établis à l'étranger lors de l'élection du Président de la République ou pendant la campagne précédant un référendum.
Selon mon expérience personnelle, ayant vécu trente-cinq ans à l'étranger dont quatorze en Allemagne, la question du bien-fondé de ces dispositions peut se poser.
J'ai, par exemple, assisté à un meeting de Pierre Mauroy sur la Place du marché à Munich, annoncé de différentes manières. En d'autres temps, M. Sarkozy a tenu des réunions publiques à Bruxelles et personne n'a soulevé de critiques. Or, l'un et l'autre, qui figurent parmi les plus hauts représentants de notre République, étaient en contradiction avec la règle en vigueur.
Afin de mettre un terme à cette incohérence entre la loi et la pratique, il faut faciliter l'organisation de véritables campagnes politiques à l'étranger, notamment au sein de l'Union européenne.
Certes, la Constitution européenne n'a pas encore été adoptée - ...
M. Robert Del Picchia. Elle va l'être !
M. Didier Boulaud. C'est pour bientôt !
M. Richard Yung. ... je ne doute pas que cela viendra ; on l'adaptera peut-être après - mais rappelons tout de même que, dans le projet de constitution, figurent plusieurs articles, notamment l'article II-71 relatif à la liberté d'expression et d'information et l'article II-72 relatif à la liberté de réunion et d'association des citoyens européens, qui reprennent des dispositions contenues dans la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales de 1950 - les articles 10 et 11 - et qui visent précisément à favoriser l'expression de la citoyenneté européenne.
Par conséquent, nous devons nous aligner sur ces deux textes fondamentaux, l'un existant et l'autre, je l'espère, à venir.
M. le président. L'amendement n° 22 rectifié bis, présenté par M. Guerry, Mmes Brisepierre et Kammermann, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le deuxième alinéa (1°) de cet article :
« 1° L'article 10 est ainsi rédigé :
« Art. 10 - Sans préjudice des dispositions des traités relatifs à la Communauté et à l'Union européenne et des actes pris pour leur application ainsi que de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 et des protocoles qui lui sont annexés, toute propagande électorale à l'étranger est interdite, à l'exception :
« 1° de l'envoi ou de la remise aux électeurs, sous pli fermé, des circulaires et bulletins de vote des candidats, effectués par les soins des postes diplomatiques ou consulaires concernés ;
« 2° de l'affichage de ces documents à l'intérieur des locaux des ambassades et des postes consulaires et, en accord avec l'Etat concerné, dans les bureaux ouverts dans d'autres locaux. »
La parole est à M. Michel Guerry.
M. Michel Guerry. Le droit européen résultant des traités sur la Communauté européenne et sur l'Union européenne consacre la liberté d'expression politique dans les Etats de l'Union.
Cette liberté a été consacrée par la Charte des droits fondamentaux de l'Union qui n'a certes pas, en l'état, de valeur normative, mais la jurisprudence communautaire y voit l'expression des « droits de l'Homme et des libertés fondamentales tels qu'ils résultent des traditions constitutionnelles communes aux Etats membres » qui font partie du droit de l'Union en tant que « principes généraux » du droit communautaire, conformément à l'article 6, paragraphe 2 du traité sur l'Union européenne.
La Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales de 1950 et l'article 3 du protocole n°1 à la Convention garantissent également ce droit à la libre expression électorale.
Dans un arrêt « Piermont contre France » du 20 mars 1995, la Cour européenne des droits de l'homme a jugé que l'appartenance d'une personne à un Etat membre de l'Union européenne ne permettait pas de lui opposer l'article 16 de la Convention de 1950 autorisant les Etats à restreindre la liberté politique des étrangers, notamment leur liberté d'expression au cours d'une campagne électorale.
La Cour a rappelé que la liberté d'expression constitue « l'un des fondements essentiels d'une société démocratique, l'une des conditions primordiales de son progrès. »
Elle a précisé, certes, que « la liberté de discussion politique ne revêt assurément pas un caractère absolu et qu'un Etat contractant peut l'assujettir à certaines "restrictions" ou "sanctions" », mais la Cour a jugé qu'il lui appartenait de statuer en dernier lieu sur leur compatibilité avec la liberté d'expression telle que la consacre l'article 10 de la Convention.
En l'espèce, la Cour a protégé le droit de libre expression des citoyens européens contre les restrictions que voulait imposer le gouvernement français. Cet arrêt consacre, par conséquent, la liberté d'expression électorale des ressortissants de l'Union dans tout Etat membre.
L'article 10 de la loi organique du 31 janvier 1976 ne respecte donc pas les dispositions actuelles du droit européen, ni les traités qui garantissent les libertés fondamentales.
En effet, tant la Charte du Conseil de l'Europe - article 10 - que les traités communautaires - article 6 du traité sur l'Union européenne - reconnaissent l'existence d'une citoyenneté européenne aux ressortissants des Etats membres.
Notre amendement a donc pour objet de rappeler les exigences de la liberté d'expression électorale sur le territoire de l'Union et des Etats membres. Seront ainsi autorisés les réunions, l'affichage, l'usage des moyens de communication, la liberté des correspondances, dans le respect de la législation du pays hôte, restant sauve l'interdiction de toute injure ou diffamation.
Notre amendement respecte les conclusions de la commission de la réforme du Conseil supérieur des Français de l'étranger, qui avait opté pour une distinction entre le régime applicable dans l'Union européenne et le régime applicable dans les autres Etats.
A la suite des délibérations de la commission des lois, j'ai préféré remanier la rédaction de cet amendement pour le rendre plus clair et j'ai saisi cette occasion pour y ajouter, au 2° de l'article 10, un membre de phrase qui est en fait une coordination avec l'amendement n° 5 rectifié bis que j'ai déposé sur le projet de loi relatif à l'Assemblée des Français de l'étranger.
M. le président. Le sous-amendement n° 24, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit les deux derniers alinéas du texte proposé par l'amendement n° 22 rectifié bis pour l'article 10 de la loi n° 76-97 du 31 janvier 1976 :
« 1° de l'envoi ou de la remise aux électeurs des circulaires et bulletins de vote des candidats effectués par les ambassades et les postes consulaires ;
« 2° de l'affichage offert aux candidats à l'intérieur des locaux des ambassades et des postes consulaires et des bureaux de vote ouverts dans d'autres locaux. »
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. le président. Le sous-amendement n° 23 rectifié, présenté par Mme Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par l'amendement n° 22 rectifié bis pour l'article 10 de la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 par un alinéa ainsi rédigé :
« Les organismes du secteur public de la communication audiovisuelle sont tenus de mener une campagne d'information civique à destination des Français établis hors de France afin de leur rappeler notamment les dates et modalités de participation aux élections. ».
La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. L'objet de ce sous-amendement est extrêmement simple. Comme je l'ai précédemment évoqué, il s'agit de rectifier une anomalie du droit commun qui constitue une discrimination envers les Français de l'étranger.
En effet, le manque d'information des Français de l'étranger en matière électorale est une discrimination au regard du droit commun. Est-il normal que les prud'hommes, par exemple, bénéficient de plusieurs centaines de spots télévisés alors que les élus français de l'étranger au suffrage universel ne peuvent y prétendre ?
Notre devoir, en tant que sénateurs représentant les Français de l'étranger, est de lutter contre toute forme de discrimination envers ces derniers.
L'objectif est, bien sûr, d'encourager la participation électorale. D'autres orateurs ont évoqué la nécessité d'une propagande électorale, de campagnes politiques, mais la première étape reste, bien évidemment, une information civique, d'autant que les difficultés d'information sont considérables à l'étranger.
A ce propos, vous me permettrez d'ouvrir une parenthèse : je regrette presque que notre collègue Robert Del Picchia ait retiré l'amendement n° 20 parce que le courrier électronique est fondamental. Le consulat de Londres, par exemple, qui compte près de 100 000 immatriculés, n'a jamais eu la possibilité matérielle d'envoyer une simple circulaire aux Français établis dans la circonscription, ne serait-ce que pour les informer qu'un ancien élu du Conseil supérieur était devenu sénateur et leur présenter son successeur !
Il est évident que l'utilisation d'une adresse électronique aurait été très utile. Certes, un tel voeu avait déjà été présenté par le Conseil supérieur des Français de l'étranger, des demandes en ce sens ont été formulées auprès des consulats, mais elles n'ont malheureusement pas été suivies d'effet ; je ferme la parenthèse...
Vous remarquerez que TV 5 va diffuser, à partir de lundi prochain, une série de spots télévisés destinés aux Français de l'étranger. Ce n'est d'ailleurs pas la première fois puisque, en tant que première vice-présidente du Conseil supérieur des Français de l'étranger, j'avais obtenu, au printemps 2003, que TV 5 organise une campagne d'information. Je dois souligner que la chaîne avait accepté de réaliser puis de diffuser gracieusement ces spots d'information sur l'élection au Conseil supérieur des Français de l'étranger.
Néanmoins, il me paraît vraiment important d'inscrire cette possibilité dans la loi. Sinon, que se passera-t-il ? Nous serons toujours tributaires de la bonne volonté des rédacteurs, des présidents de chaînes de télévision ou de radio. J'avais d'ailleurs interrogé le Conseil supérieur de l'audiovisuel à ce sujet. Il m'avait répondu que la seule solution était l'inscription dans la loi, et que rien ne s'y opposait.
En définitive, je demande le simple rétablissement d'un principe fondamental du droit commun : l'égalité des citoyens devant la loi, en particulier en matière électorale, qui est, je le rappelle, l'un des fondements essentiels de notre République et de notre citoyenneté.
M. le président. L'amendement n° 21, présenté par M. Del Picchia, est ainsi libellé :
Après le deuxième alinéa (1°) de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
... ° L'article 10 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les nouvelles technologies, telles que le réseau Internet et les messageries électroniques, sont utilisées comme outil de communication et d'information des Français inscrits sur la liste électorale consulaire, sous réserve des recommandations de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. »
La parole est à M. Robert Del Picchia.
M. Robert Del Picchia. Il s'agit, là encore, d'utiliser les nouvelles technologies telles que le réseau Internet et les messageries électroniques comme outils de communication et d'information des Français inscrits sur la liste électorale consulaire, sous réserve, bien sûr, des recommandations de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, la CNIL.
Je ne reviendrai pas sur la question du rôle politique dans les pays d'accueil, que j'ai déjà eu l'occasion de développer. L'envoi ou la remise aux électeurs par les services diplomatiques consulaires de tous les documents nécessaires à l'information reste la seule manière diplomatique acceptable. Les nouvelles technologies devraient le permettre.
On va me rétorquer que cela relève du domaine réglementaire, mais je pense que c'est faux - bien sûr, je ne suis qu'un simple sénateur ; la commission des lois m'est supérieure et je peux me tromper. Si une loi organique autorise une liste de moyens techniques, le décret d'application ne peut autoriser un moyen de communication qui ne figurerait pas dans cette liste. En vertu de la hiérarchie des normes, cet amendement est donc bien de nature législative ; de surcroît, si un décret autorisait la propagande par Internet et encourageait l'utilisation de nouvelles technologies, il serait contraire à la loi et pourrait faire l'objet d'un recours en Conseil d'Etat.
Il n'est volontairement pas précisé, dans cet amendement, qui utilise les fameuses nouvelles technologies. Il est bien évident que les partis politiques et les candidats, en particulier les candidats à l'élection présidentielle, seraient alors autorisés à le faire et ne seraient donc plus obligés de passer par l'intermédiaire des consulats, comme c'est le cas actuellement. D'ailleurs, le fait que les candidats à l'élection présidentielle puissent s'adresser directement aux électeurs de l'étranger leur ferait certainement prendre un peu plus conscience de leur existence...
L'article 4 de la Constitution reconnaît aux partis politiques un véritable rôle dans l'épanouissement de la démocratie. J'en rappelle les termes : « Les partis et groupements politiques concourent à l'expression du suffrage. Ils se forment et exercent leur activité librement. Ils doivent respecter les principes de la souveraineté nationale et de la démocratie. »
Voilà pourquoi je vous propose, mes chers collègues, d'adopter cet amendement visant à utiliser les nouvelles technologies comme outils de communication et d'information des Français inscrits sur la liste électorale consulaire.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Christian Cointat, rapporteur. La commission des partage pleinement le point de vue de M. Yung. Il serait regrettable d'adopter une loi qui ne tienne pas compte de l'évolution tant du monde qui nous entoure que des textes qui nous régissent depuis 1976. C'est clair !
Quand je représentais les Français du Luxembourg, l'un de mes adversaires à l'élection au Conseil supérieur des Français de l'étranger se présentait aux élections européennes qui avaient lieu le même jour, sur une liste luxembourgeoise, et bénéficiait à ce titre de panneaux d'affichage, ce qui m'était à l'époque théoriquement interdit. Cela ne m'a pas empêché d'être élu confortablement !
M. Richard Yung. Voilà !
M. Christian Cointat, rapporteur. Même si l'importance de ces questions est souvent théorique, je partage pleinement votre sentiment, monsieur Yung : il convient d'en tenir compte.
Toutefois, il y a deux façons d'appréhender la situation : l'autoriser, mais prévoir des restrictions, ou bien l'interdire, mais envisager des ouvertures. Nous avons intérêt, me semble t-il, à privilégier la seconde approche, qui est plus sûre. En effet, si nous autorisons la propagande électorale à l'étranger, nous devrons engager des négociations avec chaque pays, y compris au sein de l'Union européenne, afin d'en encadrer la pratique.
En revanche, nous sommes dans une situation juridiquement plus confortable si le principe général reste l'interdiction - principe d'égalité dans l'ensemble du monde - sauf dans les pays où la propagande électorale est autorisée et encadrée par des textes de niveau juridique supérieur.
M. Guerry a fort bien fait de rappeler l'arrêt Piermont, par lequel la Cour européenne des droits de l'homme de Strasbourg - et non pas, curieusement, la Cour de justice des Communautés européennes de Luxembourg - a jugé que l'on ne pouvait entraver la liberté d'expression politique, pour autant qu'elle ne trouble pas l'ordre public, d'un ressortissant de l'Union européenne. Nous sommes donc obligés d'en tenir compte.
C'est la raison pour laquelle la commission des lois, après en avoir débattu, s'est ralliée à l'amendement de M. Guerry, qui paraît plus fédérateur. Elle vous invite donc, monsieur Yung, à retirer l'amendement n° 18 au bénéfice de l'amendement n° 22 rectifié bis, lequel nous apporte toutes les garanties dans nos relations avec les Etats membres de l'Union européenne et, au-delà, avec les quarante-cinq Etats signataires de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La portée de ce texte est donc supérieure, et sous une forme qui ne peut être contestée puisqu'elle a été ratifiée par ces Etats.
Il serait, en effet, paradoxal que nous refusions un droit que nous invitons par ailleurs les Français à reconnaître en approuvant par référendum le traité établissant une constitution pour l'Europe, d'autant que ce droit figure déjà dans la Charte des droits fondamentaux. Cela étant, les traités de Maastricht et d'Amsterdam reconnaissent la citoyenneté européenne et les droits qui y sont liés. Cette citoyenneté n'est ni un vain mot ni un symbole ; elle est une réalité.
Le sous-amendement n° 24 du Gouvernement, qui vise à rédiger deux alinéas de l'amendement n° 22 rectifié bis, n'a pas été examiné par la commission des lois. Les modifications apportées au second alinéa sont d'ordre rédactionnel. La commission des lois ne m'en voudra pas d'indiquer que je préfère, à titre personnel, un texte plus élégamment rédigé.
En revanche, la rédaction du premier alinéa intéresse directement M. Del Picchia. Il convient de remarquer, en effet, que les mots « sous pli fermé » ne figurent plus, témoignant de la volonté de recourir à d'autres moyens. Or quels sont les autres moyens si ce n'est la voie électronique et Internet ? Finalement, par ce sous-amendement, nous avons un premier témoignage tangible, concret, de l'engagement pris par M. le secrétaire d'Etat tout à l'heure.
Par conséquent, à titre personnel, compte tenu de la position de la commission des lois qui était favorable au principe soutenu par M. Del Picchia dans son amendement, je ne peux qu'approuver le sous-amendement n° 24.
Mme Garriaud-Maylam a posé un problème extrêmement important en matière d'équité. Les Français établis hors de France, puisqu'on leur donne la possibilité de voter, notamment dans les consulats et les postes consulaires, doivent bénéficier des mêmes conditions d'information que les Français de France, ou tout au moins du minimum vital, si je puis m'exprimer ainsi ! Sinon, à quoi bon les inviter à voter ? Nous pouvons donc féliciter Mme Garriaud-Maylam d'avoir déposé ce sous-amendement.
Ce sous-amendement peut-il, en l'état, être suivi d'effet ? C'est une autre question ! La commission des lois en a reconnu le bien-fondé, l'intérêt et la très forte valeur tant symbolique que pratique. C'est la raison pour laquelle elle a donné un avis favorable, sous réserve de l'avis du Gouvernement, dans la mesure où nous ne maîtrisons pas forcément toutes les implications.
Par conséquent, monsieur le secrétaire d'Etat, nous serions très heureux de connaître votre sentiment, afin de déterminer les suites qu'il convient de réserver à ce sous-amendement au demeurant fort intéressant.
S'agissant de l'amendement n° 21, monsieur Del Picchia, nous approuvons votre démarche, nous estimons que le concours des nouvelles technologies est nécessaire et que le Gouvernement doit donner des instructions très claires à ses services en ce sens. L'obstacle que constituait la mention « sous pli fermé » est levé - si nous adoptons, bien entendu, le sous-amendement n° 24 du Gouvernement.
La commission des lois, qui reconnaît l'intérêt de cet amendement, a cependant remarqué que l'organisation de l'envoi relevait du domaine réglementaire. Voilà pourquoi, monsieur Del Picchia, je vous invite à le retirer, étant entendu que M. le secrétaire d'Etat pourra peut-être vous apporter quelques compléments d'information.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Muselier, secrétaire d'Etat. En ce qui concerne l'amendement n° 18, je m'inscris dans la même logique que la commission : il paraît de bon aloi de le retirer, puisque l'amendement n° 22 rectifié bis participe d'une démarche similaire.
Je suis, bien entendu, favorable à cet amendement n° 22 rectifié bis, modifié par le sous-amendement du Gouvernement.
Madame Garriaud-Maylam, le sous-amendement n° 23 rectifié aborde un sujet particulièrement sensible. J'ai bien entendu vos propositions : il est vrai, je l'ai dit lors de la discussion générale, que la discrimination, quelle qu'elle soit, n'est pas acceptable.
M. le rapporteur a émis, sur le principe de ce sous- amendement, un avis favorable ; il est en effet nécessaire d'aller dans ce sens. Néanmoins, mon avis sera plutôt défavorable et je m'explique.
Inciter les Français établis à l'étranger à exercer leur droit de vote est, bien sûr, une ambition que le Gouvernement partage, madame la sénatrice. Toutefois, je ne pense pas que la méthode retenue ici soit la bonne.
D'abord, une telle disposition relève non pas de la loi organique, mais plus normalement des cahiers des charges des sociétés de l'audiovisuel public, par exemple ; elle figure, d'ailleurs, déjà spécifiquement dans le cahier des charges de la société RFI.
Ensuite, ce sous- amendement est trop imprécis. En effet, tel qu'il est rédigé, il s'appliquerait à des sociétés comme l'Institut national de l'audiovisuel, l'INA, dont la mission de service public est d'archiver des programmes et non de les diffuser.
Enfin, toutes les sociétés de l'audiovisuel public ne sont pas diffusées hors de France. La loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de la communication assigne à chacune de ces sociétés des missions particulières, mais seules certaines d'entre elles sont diffusées à l'étranger. Tels messages sont donc particulièrement pertinents pour RFI ou pour TV5, mais ne le sont pas, par exemple, pour France 3 ou pour France 5.
Les sociétés concernées sont d'ailleurs sensibilisées. Ainsi, dans le cadre du prochain référendum, TV5 a produit et diffusera une campagne d'information civique spécifiquement adressée aux Français de l'étranger - vous l'avez souligné -, financée par le service d'information du Gouvernement. Ce message, qui sera diffusé à compter du 16 mai prochain, rappelle les dates du scrutin et ses modalités. Cela répond donc à votre préoccupation, madame la sénatrice.
Je ne suis donc pas favorable à ce sous-amendement, car, selon moi, il n'a pas sa place dans le projet de loi organique. Je vous demande donc, madame Garriaud-Maylam, de bien vouloir le retirer.
Néanmoins, madame la sénatrice, puisque le Gouvernement et la commission partagent votre préoccupation, je m'engage à rencontrer le ministre chargé de l'audiovisuel afin que nous puissions retravailler avec lui dans le sens que vous proposez.
Quant à l'amendement n° 21, la circulaire du 4 mai 2005, qui a reçu l'avis favorable du Conseil constitutionnel, permet aux ambassades et aux postes consulaires, qui sont responsables des votes, d'adresser aux électeurs, par courrier électronique, des informations relatives, par exemple, aux horaires, aux bureaux de vote, ou de la documentation électorale si le chef de poste estime que la voie postale ne permet pas d'acheminer cette documentation avant la date du scrutin.
En conséquence, cet amendement est déjà satisfait par la voie réglementaire et j'émets donc un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Yung, l'amendement n° 18 est-il maintenu ?
M. Richard Yung. Non, je le retire, monsieur le président. Je me rends aux arguments de la commission.
M. le président. L'amendement n° 18 est retiré.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 24.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Madame Garriaud-Maylam, le sous-amendement n° 23 rectifié est-il maintenu ?
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Je remercie la commission d'avoir soutenu ce sous-amendement.
Je ne partage pas vraiment la lecture qu'en fait M. le secrétaire d'Etat ; il me le pardonnera, je l'espère.
J'y insiste, il me semble que l'information des Français de l'étranger est très importante. Nous ne devons pas avoir une vision limitative des sociétés d'information. Bien évidement, celles qui ne sont pas destinées à diffuser de l'information ne sont pas concernées. En revanche, de nombreux Français de l'étranger regardent les émissions de France 2 et de France 3. Pour ma part, je les vois très régulièrement en Grande-Bretagne. Une réflexion doit donc être menée.
Quoi qu'il en soit, je prends acte de la volonté manifestée par le Gouvernement de travailler sur ce sujet. Seul le résultat compte, bien évidemment. Monsieur le secrétaire d'Etat, je me tiens à votre entière disposition pour vous apporter mon concours sur un sujet que je connais bien, et pour revoir éventuellement la formulation de ce sous-amendement qu'en l'instant je retire.
Je compte sur vous, car les Français de l'étranger attendent cette disposition depuis de très nombreuses années. Ils vous seraient extrêmement reconnaissants si elle était mise en oeuvre et je ne manquerai pas de vous rappeler votre engagement.
M. le président. Le sous-amendement n° 23 rectifié est retiré.
Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 22 rectifié bis.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Monsieur Del Picchia, l'amendement n° 21 est-il maintenu ?
M. Robert Del Picchia. Monsieur le secrétaire d'Etat, au travers de cet amendement, je demande que les nouvelles technologies soient utilisées comme un outil de communication et d'information. En le présentant, j'ai bien précisé que les candidats passent, pour l'instant, par les consulats, qui transmettent les informations, conformément à la circulaire du 4 mai 2005 que vous avez évoquée.
Telle est la procédure, même si le consulat utilise la voie électronique.
Je veux bien retirer mon amendement, monsieur le secrétaire d'Etat, mais je suis prêt à prendre les paris pour les prochaines élections présidentielles : pensez-vous réellement que les candidats s'adresseront à chaque consulat et qu'ils ne feront pas eux-mêmes leur campagne sur Internet en envoyant à tous les Français de l'étranger les informations qui les concernent ? Cela s'est déjà vu. Internet est utilisé régulièrement par les partis politiques pour des envois d'informations vers l'étranger.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je ne vois pas quel mal il y aurait à adopter des procédures simplifiées qui, quoi qu'il en soit, sont déjà utilisées !
Je retire mon amendement, mais à regret pour les futurs candidats à la présidence de la République.
M. le président. L'amendement n° 21 est retiré.
L'amendement n° 11, présenté par M. Cointat, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le début de la seconde phrase du texte proposé par le b) du 2° de cet article pour le second alinéa de l'article 12 de la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 :
Toutefois, en cas de nécessité, une ambassade ...
La parole est à M. le rapporteur.
M. Christian Cointat, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination avec l'amendement n° 5, précédemment adopté.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 12, présenté par M. Cointat, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par le 3° de cet article pour l'article 13 de la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 :
« Art. 13.- Les électeurs inscrits sur une liste électorale consulaire peuvent exercer, sur leur demande, leur droit de vote par procuration.
Les dispositions des articles L. 72 à L. 77 du code électoral sont applicables dans les ambassades et les postes consulaires. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Christian Cointat, rapporteur. Cet amendement donne une base juridique véritable au vote par procuration des Français établis hors de France.
En effet, les dispositions de l'article L.71 du code électoral sont peu adaptées aux Français établis hors de France. Il existe d'autres articles, me direz-vous, mais il a semblé préférable à la commission de bien codifier ce point une fois pour toutes.
Par ailleurs, la commission est favorable au sous-amendement n° 19 du Gouvernement, qui vise à aligner ces dispositions sur le droit commun, de sorte qu'il n'y ait pas de rupture dans l'égalité de traitement. En effet, si nous ne voulons pas de discrimination, l'égalité de traitement, quelles que soient les circonstances, est nécessaire.
M. le président. Le sous-amendement n° 19, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 12 pour l'article 13 de la loi organique n° 76-97 du 12 janvier 1976 par les mots :
lorsqu'ils attestent sur l'honneur être dans l'impossibilité de se rendre au bureau de vote le jour du scrutin.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Renaud Muselier, secrétaire d'Etat. M. le rapporteur a tout dit ! (Sourires.)
La commission a très bien travaillé, de concert avec le Gouvernement. Nous sommes parfaitement en phase et nous avançons ensemble.
M. le président. L'amendement n° 13, présenté par M. Cointat, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par le 5° de cet article pour remplacer le troisième alinéa de l'article 15 de la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 :
« Les opérations électorales peuvent être contestées par tout électeur et tout candidat dans les conditions prévues par la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Christian Cointat, rapporteur. Les dispositions prévues par l'article 3 pour le troisième alinéa de l'article 15 de la loi organique de 1976 précisent les modalités des recours ouverts à l'encontre des opérations des commissions chargées de la révision des listes.
Cet amendement tend à supprimer la mention explicite de ces dispositifs, qui ont une valeur réglementaire pour l'élection du Président de la République - article 30 du décret n° 2001-213 du 8 mars 2001 - et sont directement issus de la loi référendaire du 6 novembre 1962. Aussi, effectue-t-il un renvoi explicite à cette loi pour harmoniser les recours ouverts aux électeurs et aux candidats de l'élection présidentielle.
Il paraissait, en effet, peu convenable qu'il existe deux dispositifs de recours différents selon que l'on vote en France où à l'étranger, alors qu'il s'agit d'une seule et même élection.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 14, présenté par M. Cointat, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Au début du texte proposé par le 8° de cet article pour l'article 18 de la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976, supprimer les mots :
Sous réserve des dispositions de la présente loi,
La parole est à M. le rapporteur.
M. Christian Cointat, rapporteur. L'article 18 de la loi organique de 1976 prévoit que les dispositions du code électoral auxquelles renvoient les articles précédents de la loi organique sont applicables dans leur rédaction en vigueur à la date de publication du présent texte.
Cette précision, qui cristallise le droit applicable afin d'éviter qu'une modification des articles du code électoral visés n'entraîne celle de la loi organique, reprend une jurisprudence constante du Conseil constitutionnel.
Le principe de l'application des dispositions du code électoral sous réserve des dispositions de la loi organique a déjà été posé à l'article 9. Cette mention est donc inutile dans cet article.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 15, présenté par M. Cointat, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par le 9° de cet article pour l'article 19 de la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 :
« Art. 19 - Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application de la présente loi organique. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Christian Cointat, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel, corollaire des différents amendements qui viennent d'être adoptés.
Il faut un décret, et il n'est nul besoin de développer à ce stade le contenu de ce décret, puisque cela a été fait précédemment.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?