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Souhaits de bienvenue à un parlementaire indien
M. le président. Mes chers collègues, j'ai le plaisir de saluer la présence dans les tribunes de M. Ashwani Kumar, membre de la Chambre haute du parlement indien et président du groupe d'amitié Inde-France de ce parlement
En visite dans notre pays, M. Kumar est aujourd'hui reçu dans notre assemblée à l'invitation de notre collègue Pierre Fauchon, président du groupe interparlementaire France-Inde du Sénat.
Au nom du Sénat tout entier, je lui souhaite la bienvenue dans notre hémicycle et forme le voeu que sa visite contribue à renforcer les liens entre nos deux assemblées. (M. le ministre, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.)
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures quinze, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)
PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet
M. le président. La séance est reprise.
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Questions d'actualité au Gouvernement
M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions d'actualité au Gouvernement.
Je rappelle que l'auteur de la question, de même que le ministre pour sa réponse, disposent chacun de deux minutes trente.
Situation économique et sociale de la France
M. le président. La parole est à Mme Yolande Boyer.
Mme Yolande Boyer. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre ; elle concerne la situation économique et sociale de notre pays.
En effet, 225 000 chômeurs de plus, 125 000 RMIstes de plus : tel est le triste bilan des trente-deux mois des divers gouvernements Raffarin !
Après trente-deux mois, cinq rapports sur le sujet, la création récente d'un conseil d'orientation pour l'emploi, la tenue, il y a deux jours, d'un séminaire gouvernemental, des annonces répétées, le taux de chômage a dépassé durablement les 10 % et concerne aujourd'hui près de 2,5 millions de personnes en France.
Hier, le Gouvernement nous répondait : « héritage des socialistes ! » (Oui ! sur les travées de l'UMP.)
Aujourd'hui, il nous dit : « choc pétrolier ! économie mondiale ! »
Quand reconnaîtra-t-il enfin ses responsabilités dans cette situation dramatique ? Derrière les chiffres froids, il y a des hommes, des femmes, de la souffrance et du désarroi. Vous tous, mes chers collègues, sur quelques travées que vous siégiez, vous le savez bien : vous les recevez dans vos mairies, dans vos permanences !
M. Bruno Sido. Eh oui !
Mme Yolande Boyer. Les promesses n'engagent que ceux qui les croient, a-t-on l'habitude de dire.
Les deux priorités annoncées par M. Raffarin étaient la lutte contre le chômage, avec une diminution de 10 % d'ici à la fin de 2005 - on n'en prend pas le chemin - et la baisse des impôts de 30 % en cinq ans, conformément à l'engagement du Président de la République.
Devant l'évidence, vous commencez à reconnaître que ce sera difficile à tenir.
Vous maintenez cependant l'objectif d'une baisse des impôts. L'impôt sur la fortune, par exemple, a effectivement baissé, mais en quoi cela améliore-t-il la situation des Français ?
Ce type de mesure injuste et inefficace ne fait finalement que priver encore un peu plus l'Etat de ses moyens d'actions pour l'emploi. Le Gouvernement défait les mesures efficaces du gouvernement Jospin : sur trente-deux mois, il avait, lui, obtenu que 630 000 chômeurs retrouvent un emploi ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Un sénateur socialiste. Il faut qu'il revienne !
Mme Yolande Boyer. A ce jour, aucun des dispositifs mis en place n'est couronné de succès.
Face à ce constat d'échec, comment comptez-vous redresser la barre ? Que dites-vous et que faites-vous pour les jeunes de ce pays, qui doutent de plus en plus de leur place et de leur avenir dans la société ? Quelles mesures concrètes allez-vous prendre pour apporter une réponse et un espoir aux hommes et aux femmes de ce pays qui sont dans la détresse ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. René-Pierre Signé. Le Président répondra ce soir !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, du travail, et de la cohésion sociale. Madame la sénatrice, je n'aurai pas la cruauté de vous rappeler qu'entre l'arrivée de François Mitterrand à la présidence de la République et son départ, le nombre des Français au chômage est passé de 1,5 million à 2,9 millions. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Jacques Mahéas. Vos chiffres sont faux !
M. Jean-Louis Borloo, ministre. Je dirai simplement que, sur ce sujet, nous devons tous faire preuve d'une réelle modestie. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
Venons-en aux mesures précises et concrètes.
Madame la sénatrice, vous vous trompez quand vous osez dire, dans cette assemblée, que le chômage touche durablement plus de 10 % de nos concitoyens. Les mois et les semestres qui viennent démontreront le contraire. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste.)
Un train de contrats, de mesures est en place aujourd'hui.
Je citerai, tout d'abord, les nouveaux contrats d'apprentissage, pilotés par M. Laurent Hénart. Je rappelle que l'apprentissage avait été délaissé durant les cinq années du gouvernement Jospin.
Les contrats d'avenir, ensuite, permettront à près d'un million de personnes de s'adapter aux mutations et aux besoins de notre pays. Les conversions de reclassement personnalisé, les CRP, signées par l'ensemble des partenaires sociaux, vont éviter que les licenciés des entreprises de moins de 1 000 salariés, qui ne bénéficiaient d'aucune aide directe réelle, ne partent directement, dans les conditions que vous savez, aux ASSEDIC et à l'ANPE. Seront concernées 200 000 personnes par an.
Enfin, nous avons souhaité regrouper le service public de l'emploi plutôt que de laisser les chômeurs errer des ASSEDIC aux missions locales et des missions locales à l'ANPE, et ce sur la base du volontariat avec les régions, lesquelles sont pratiquement toutes de votre sensibilité, madame la sénatrice, et avec les départements.
En effet, le problème de la gestion des ressources humaines de notre pays est un défi qu'il nous incombe à tous, Etat, partenaires sociaux, villes et agglomérations, régions et départements, de relever.
C'est tous ensemble que nous ferons baisser structurellement le chômage et redonnerons un espoir à la jeunesse de notre pays. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. René-Pierre Signé. Ce n'est pas convaincant !
M. le président. Monsieur Signé, le peuple souverain vous regarde !
M. le président. La parole est à M. Philippe Nogrix.
M. Philippe Nogrix. Ma question s'adresse à Mme la ministre de la défense.
A la suite des événements tragiques de novembre 2004 survenus en Côte d'Ivoire, mon collègue M. André Vallet soulignait la légitimité historique et l'importance de la présence française dans ce pays, mais aussi le devoir qui incombait à la France envers la population locale comme envers tous nos compatriotes rapatriés dans l'urgence et dans la précarité.
Aujourd'hui, la situation connaît un nouveau tournant. C'est, en tout cas, ce que semblent nous indiquer les informations qui nous parviennent.
Grâce à l'opération Licorne, la présence militaire française en Côte d'Ivoire aux côtés de l'ONUCI, l'Opération des Nations unies en Côte d'Ivoire, a été confirmée et prolongée par un mandat du Conseil de sécurité,...
Un sénateur socialiste. C'est notre Vietnam !
M. Philippe Nogrix. ...et les nombreuses négociations menées par le Président sud-africain, M. Thabo M'Beki, soutenu par l'Union africaine, la communauté internationale et la France, ont abouti à un accord, ce dont nous sommes satisfaits.
En dépit de tous ces éléments positifs, la tension semble monter en Côte d'Ivoire. La présence française, matérialisée par les soldats de l'opération Licorne, reste controversée, malgré le calme tout relatif des jeunes patriotes.
M. Jean-Pierre Michel. Pas de néocolonialisme !
M. Philippe Nogrix. Il n'y a pas de commentaires à faire, mon cher collègue, il n'y a qu'à écouter : ce serait, au moins, une attitude digne !
La situation ne peut guère s'améliorer, compte tenu des allégations avancées par les autorités ivoiriennes quant à la légitimité et à la nature des interventions de nos forces ; je pense particulièrement à la sécurité des informations qu'elles ont collectées.
La paix reste précaire, comme le montrent les tensions entre le Président Laurent Gbagbo, qui - j'emploie le conditionnel - utiliserait des mercenaires pour déstabiliser la rébellion et les Forces nouvelles.
Le retour à la démocratie dans ce pays sera extrêmement difficile sans une volonté clairement affichée par le pouvoir actuel. Et nous n'en sommes pas encore là.
Nous sommes très inquiets, madame la ministre, pour nos soldats, pour la paix, la sécurité et la démocratie en Côte d'Ivoire.
Dans cette perspective, pourriez-vous nous rassurer, si cela est possible ou, pour le moins, nous donner des indications sur l'aboutissement de la médiation du Président M'Beki ?
Son arbitrage, en ce qui concerne les futures élections présidentielles, sera un signe. Le Président Gbagbo s'y conformera-t-il en donnant à ses opposants la possibilité d'être candidats ?
Pensez-vous que les négociations sur le désarmement entre le Président et les forces rebelles, en application des accords de Pretoria, ont des chances d'aboutir ? (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense. Monsieur Nogrix, vous avez raison de souligner que la situation en Côte d'Ivoire est extrêmement instable et fragile. Les accrochages qui ont lieu tous les jours près de la zone de confiance, comme l'insécurité qui règne à Abidjan, le prouvent.
Pour autant, il faut bien constater - nous nous en réjouissons tous - que la médiation du président M'Beki dans des conditions particulières, c'est-à-dire avec, simplement, les parties africaines concernées, représente un élément nouveau important et porteur d'espoir.
L'accord qui a été passé et a été contresigné par tous les partenaires prévoit, en effet, l'arrêt des combats, le désarmement, notamment celui des milices, le démantèlement de celles-ci, la révision des lois liées au processus électoral et le respect des échéances électorales.
Le problème crucial est, bien entendu, celui de la tenue des élections et de l'éligibilité des candidats pour les élections présidentielles.
Un accord n'ayant pu intervenir lors de la réunion de l'ensemble des parties prenantes, celles-ci ont demandé au Président M'Beki de procéder à un arbitrage. Celui-ci a indiqué hier que tous ceux qui étaient présents à la réunion de Pretoria devraient pouvoir se présenter aux élections. Il a par ailleurs demandé au Président Laurent Gbagbo de mettre en oeuvre les lois nécessaires pour ce faire.
L'accord de Pretoria semble donc bien déboucher sur des avancées concrètes, qui s'inscrivent d'ailleurs dans la droite ligne des accords de Marcoussi et d'Accra.
Nous sommes tous conscients de la fragilité de la situation. Il faut néanmoins saisir l'opportunité que constitue l'accompagnement de l'ONU. Vous l'avez dit, celle-ci a prolongé d'un mois le mandat des forces impartiales, c'est-à-dire celles de l'ONU et celles de l'opération Licorne. Une nouvelle résolution sera prise afin d'accompagner le développement de ce processus.
En Côte d'Ivoire aujourd'hui, la situation est telle, tant d'un point de vue sécuritaire que d'un point de vue économique, qu'il est temps que l'ensemble des responsables prennent conscience de la nécessité de faire avancer ce processus politique.
Il y va de l'avenir de la Cote d'ivoire. Il y va aussi de l'avenir de l'Afrique de l'Ouest. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Transports combinés
M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc.
Mme Hélène Luc. Monsieur le secrétaire d'Etat, l'an dernier déjà, le plan Fret 2006 de la SNCF prévoyait la réduction d'un tiers du fret ferroviaire et, s'agissant du transport combiné, l'abandon des liaisons d'une longueur inférieure à 800 kilomètres. Les subventions sont passées de 92 millions d'euros en 2002 à 16 millions d'euros en 2005.
De son côté, le 3 mars dernier, la Commission européenne a autorisé l'Etat français à « accorder des financements à la SNCF », à condition que celle-ci se plie à son ultimatum et diminue sa capacité de 18 %.
La SNCF devrait donc fermer le point nodal d'Ile-de-France, le hub de Villeneuve-Saint-Georges, le plus grand centre de transit. Le centre multitechnique de la Compagnie nationale de conteneurs, la CNC, qui est situé à Valenton-Bonneuil et compte 170 salariés, serait supprimé, ce qui entraînerait la suppression des cinq centres de Clermont-Ferrand, de Tours, de Grenoble, d'Hendaye et de Toulouse, sur les onze existants.
Par ailleurs, le prétendu plan de modernisation et de restructuration serait assorti de l'ouverture anticipée du marché ferroviaire français à de nouveaux opérateurs privés, qui géreraient ces terminaux, et l'ouverture du capital de la CNC et de Novatrans à de nouveaux actionnaires privés.
Tout cela est inacceptable !
Les transports de marchandises augmenteront de 40 % d'ici à 2020. Il s'agit là d'un enjeu de société : quatre millions de tonnes transportées par combiné représentent 200 000 camions en moins sur les routes et dans les villes.
Tous les modes de transports doivent être utilisés, mais il faut accorder toute sa place au ferroviaire. Il associe en effet les qualités de la route, en termes de proximité et de souplesse, aux atouts du rail, en termes de maillage du territoire, de sécurité, de régularité, d'économies d'énergie, de respect de l'environnement et de diminution des maladies allergiques dues à la pollution.
Le projet de protection de l'atmosphère en Ile-de-France et dans tous le pays en dépend.
Monsieur le secrétaire d'Etat, les engagements que Jean-Claude Gayssot avait pris en 2002, au nom de l'Etat, doivent être tenus : doublement du fret ferroviaire et triplement du transport combiné rail-route. Mais, pour cela, il faut garder la maîtrise publique du transport combiné et ferroviaire.
M. le président. Veuillez poser votre question, madame Luc !
Mme Hélène Luc. La voilà la différence avec les services d'intérêt général que propose la Constitution européenne aux Français !
Ma question est simple, monsieur le secrétaire d'Etat : je vous demande de revenir sur votre décision et de retirer ce plan global de réorganisation du transport combiné. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Goulard, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Madame la sénatrice, dans le domaine du transport ferroviaire, comme dans les autres, il y a les paroles, il y a les promesses et il y a les actes. (Ah oui ! sur les travées du groupe socialiste.)
Vous avez évoqué la promesse de M. Gayssot...
Mme Hélène Luc. Ce n'était pas une promesse, mais un plan !
M. Josselin de Rohan. Il ne payait pas !
M. François Goulard, secrétaire d'Etat. Or, à partir du moment où M. Gayssot a promis le doublement du transport ferroviaire de marchandises,...
M. René-Pierre Signé. Et voilà, tout va être la faute de Jean-Claude Gayssot !
M. François Goulard, secrétaire d'Etat. ...non seulement la part de marché du ferroviaire s'est écroulée, mais, en valeur absolue, le transport de marchandises par chemin de fer a baissé régulièrement, année après année. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme Hélène Luc. A qui la faute ?
M. François Goulard, secrétaire d'Etat. Cette baisse s'est accompagnée du creusement du déficit imputable au fret ferroviaire, au point de menacer la grande entreprise publique qu'est la SNCF.
M. Pierre Hérisson. Très bien !
M. François Goulard, secrétaire d'Etat. Au total, 450 millions d'euros de déficit étaient imputables au fret.
Qu'a fait le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin ?
M. René-Pierre Signé. Rien !
Mme Hélène Luc. Vous avez diminué les subventions, c'est clair !
M. René-Pierre Signé. En fermant les gares de bois !
M. François Goulard, secrétaire d'Etat. ...qui s'est traduit par l'attribution d'une subvention, avec l'accord de la Commission européenne, de 800 000 millions d'euros, auxquels il faut ajouter un effort de 700 000 millions d'euros, émanant de la SNCF,...
M. René-Pierre Signé. Ce n'est pas vrai !
M. François Goulard, secrétaire d'Etat. ...afin de renouveler le matériel, de rationaliser le service, de diminuer les pertes.
Mme Hélène Luc. Et de supprimer cinq centres !
M. François Goulard, secrétaire d'Etat. Cet effort est important, mais il sera difficile de redresser la situation de ce mode de transport. C'est grâce à des mesures de gestion, des mesures d'investissement courageuses que nous avons une chance d'y parvenir.
M. Pierre Hérisson. Très bien !
M. François Goulard, secrétaire d'Etat. Vous avez évoqué le transport combiné, madame la sénatrice. Ce mode de transport, qui est un mode de transport intelligent, était, lui aussi, en train de s'effondrer, parce que, dans ce secteur également, les déficits se creusaient. Il n'avait pas été procédé à la rationalisation nécessaire. Nous la faisons aujourd'hui. Cela nous conduit à reconsidérer le schéma de transport combiné.
M. René-Pierre Signé. Ce n'est pas vrai !
M. François Goulard, secrétaire d'Etat. Nous fermons en effet le point nodal d'Ile-de-France, situé à Villeneuve-Saint-Georges,...
Mme Hélène Luc. Qui était promis à un grand développement !
M. François Goulard, secrétaire d'Etat. ...parce qu'il n'est pas rationnel de regrouper les trafics en Ile-de-France pour les éclater ensuite vers toute la France.
Mme Hélène Luc. C'était le premier !
M. François Goulard, secrétaire d'Etat. Le transport combiné est surtout nécessaire pour les dessertes portuaires qui, jusqu'à présent, étaient mal assurées.
Mme Hélène Luc. Cela, vous ne le ferez pas passer !
M. François Goulard, secrétaire d'Etat. Là encore, nous mettons des moyens. Nous augmentons la subvention par conteneur. Celle-ci passe en effet de 10 euros à 12 euros.
Mme Hélène Luc. Vous supprimez cinq centres en même temps !
M. François Goulard, secrétaire d'Etat. Nous rationalisons l'organisation du transport combiné. C'est le seul moyen de sauver ce mode de transport, qui est en effet intéressant en termes de protection de l'environnement. Voilà le travail du Gouvernement ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme Hélène Luc. Allez-vous retirer votre plan ? Répondez, monsieur le secrétaire d'Etat !
M. le président. La parole est à M. Georges Othily.
M. Georges Othily. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, au cours des dix-huit derniers mois, la guerre déclarée au Darfour a fait au moins 180 000 morts. Deux millions de personnes ont été déplacées. Plus de 200 000 réfugiés sont actuellement au Tchad, où la guerre s'étend.
L'Organisation des Nations unies a dénoncé le nettoyage ethnique au Darfour. Les Etats-Unis ont été les premiers à qualifier les crimes qui y sont perpétrés de génocide.
Tous les témoignages se recoupent et décrivent l'horreur de ce conflit. Les tribus noires, partagées entre confessions chrétiennes et animistes, sont persécutées par les tribus arabes, soutenues par le régime islamiste de Khartoum. Ce terrible conflit résulte de l'agrégation d'incidents ethniques, religieux et politiques très graves, que les cessez-le-feu, obtenus sous la pression internationale, ne parviennent pas à résorber.
L'Europe et les Etats-Unis tentent de remédier à l'impunité des miliciens Jenjawids, les tribus arabes du Darfour encadrées par l'année soudanaise, dont les exactions aggravent les difficultés d'acheminement de l'aide humanitaire destinée aux réfugiés.
Une mise au point ferme et urgente s'impose sur la situation dans cette région, déchirée par une guerre dont les enjeux humains, politiques et économiques dépassent la sphère soudanaise : la Chine, les Etats-Unis, la France sont ainsi en concurrence dans la compétition ouverte pour l'exploitation pétrolière des ressources que recèlent ces territoires.
Mes questions sont les suivantes.
Que compte faire la France pour que la Cour pénale internationale siège le plus rapidement possible ?
Quel est le poids de la France dans l'aide financière de 4,5 milliards de dollars qui vient d'être attribuée au Soudan ? Cette dernière sera-t-elle clairement conditionnée à la cessation des exactions commises au Darfour ?
Enfin, alors que les tensions entre le Tchad et le Soudan semblent avoir atteint un point de non-retour, que compte faire la France pour aider le Tchad à faire face à l'afflux de réfugiés et pour que la guerre civile ne s'étende pas à ce pays ? Le Tchad ne pourra répondre seul aux besoins de ces populations. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP. - Mme Catherine Tasca applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Xavier Darcos, ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Monsieur le sénateur, j'ai reçu ce matin même le représentant spécial du secrétariat général des Nations unies pour le Soudan, M. Jan Pronk, qui revenait de la conférence des donateurs qui s'est terminée hier, à Oslo.
Votre question, monsieur le sénateur, arrive au bon moment. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste.) Je suis en mesure de vous répondre de manière directe.
M. René-Pierre Signé. Cela, c'est de la communication !
M. Xavier Darcos, ministre délégué. Ce dossier comporte deux volets : l'accord de paix dans le sud et le problème du Darfour, que vous avez évoqués tour à tour.
L'accord de paix dans le sud a été signé en janvier dernier à Naïvasha. Il recevra un appui considérable de la communauté internationale. Les bailleurs de fonds, qui étaient réunis il y a encore deux jours à Oslo, ont en effet décidé de s'engager à hauteur de 4,7 milliards de dollars pour la seule période 2005-2007. La France, pour sa part, contribuera à cet effort à hauteur de 120 millions d'euros.
Par ailleurs, se met en place, sur proposition américaine, une opération de maintien de la paix, à laquelle la France a bien entendu donné son accord : 10 000 hommes seront déployés pendant six ans.
Mais, bien entendu, et vous l'avez dit vous-même, il n'y aura pas de paix durable au Soudan, au Sud-Soudan en particulier, sans paix au Darfour. Là, les drames se prolongent, et c'est à juste titre qu'il faut s'en préoccuper.
La France a été la première à soulever l'ampleur et l'impact du drame du Darfour, au moment où la communauté internationale semblait être surtout attentive à la conclusion de l'accord dans le sud.
Je rappelle que Dominique de Villepin fut le premier représentant d'un gouvernement occidental à se rendre au Soudan et au Tchad. Depuis, Michel Barnier, Renaud Muselier et moi-même nous sommes rendus dans cette région.
Dès la fin de l'année 2003, la France a engagé des moyens pour venir en aide aux populations menacées. Elle a sensibilisé les autorités soudanaises à la nécessité de régler rapidement cette question. L'apport total de la France pour le seul Darfour s'élève d'ores et déjà à 80 millions d'euros.
La France a également porté une attention toute particulière au Tchad. La frontière est du Tchad a en effet été très fragilisée par ce conflit. Nous avons mis en place là-bas des politiques d'accueil aux réfugiés.
Enfin, monsieur le sénateur, vous vous interrogez sur le rôle de la Cour pénale internationale. La France s'est mobilisée à cet égard aux Nations unies.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre.
M. Xavier Darcos, ministre délégué. La solution pacifique doit s'accompagner, selon nous, d'une décision judiciaire. Il ne faut pas que tout se fasse dans l'impunité.
Monsieur le sénateur, la France veillera sans relâche, avec les instances internationales européennes, à la fin du conflit du Darfour, auquel elle porte une grande attention. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Application du principe de précaution
M. le président. La parole est à M. Dominique Mortemousque.
M. Dominique Mortemousque. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, le plan Climat, publié le 22 juillet 2004, décrit les objectifs du Gouvernement en matière de lutte contre l'effet de serre, afin de répondre aux exigences du protocole de Kyoto qui vient d'entrer en application, voire d'aller au-delà, grâce à des mesures destinées à relever un véritable défi énergétique.
M. Raymond Courrière. C'est une coquille vide !
M. Dominique Mortemousque. L'Union européenne met en place les outils juridiques nécessaires au respect de l'environnement et à la mise en oeuvre du développement durable. La politique européenne sera fondée sur les principes de précaution, de prévention et de correction.
M. René-Pierre Signé. Lui, il va voter « oui » à la Constitution européenne !
M. Dominique Mortemousque. Sur l'initiative du Président de la République, Jacques Chirac, la charte de l'environnement figure désormais dans notre Constitution.
M. René-Pierre Signé. Il va le dire ce soir !
M. Dominique Mortemousque. Cette charte oriente notre développement social, économique et industriel vers des activités intégrant la protection de l'environnement. Les Français sont fiers de leur patrimoine naturel et ont envie d'agir pour préserver leur environnement, mais tous ces textes qui viennent réglementer leur quotidien les inquiètent.
M. Jacques Mahéas. Bien sûr !
M. Dominique Mortemousque. A ce jour, monsieur le ministre, il serait nécessaire que l'on nous précise, de façon concrète, comment va se traduire, dans la vie de chacun de nos concitoyens, et plus particulièrement dans la vie de nos agriculteurs, artisans, industriels, membres des professions libérales qui contribuent à la richesse de notre pays, l'article 5 de la charte, qui définit le principe de précaution, lequel préoccupe un grand nombre d'entre nous. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Serge Lepeltier, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le sénateur, je vous remercie d'avoir posé cette question extrêmement pertinente qui traite d'un sujet assez difficile. Elle reflète une véritable inquiétude que manifestent nombre de nos concitoyens.
Le principe de précaution en lui-même n'est pas une nouveauté puisqu'il figure dans le code de l'environnement depuis 1995. Il est également consacré dans le projet de Constitution européenne.
La charte de l'environnement, que le Parlement a récemment adoptée, grâce à la détermination du Président de la République et du Premier ministre,...
M. René-Pierre Signé. Petit coup de pommade en passant !
M. Serge Lepeltier, ministre. ... a permis de porter ce principe au niveau constitutionnel, c'est-à-dire au niveau juridique le plus élevé.
De quoi s'agit-il ? Il s'agit de se prémunir contre des risques de dommages graves et irréversibles à l'environnement dont la réalisation est incertaine en l'état des connaissances scientifiques.
Dès lors que ces conditions d'application sont réunies, le principe de précaution impose aux autorités publiques de prendre des mesures immédiates et proportionnelles, par leur coût et leur ampleur, aux risques éventuels.
En outre, les autorités publiques doivent, dans le même temps, favoriser toute expertise utile pour apprécier le risque et pour moduler les mesures prises.
La rédaction équilibrée de cette charte de l'environnement exclut donc, par principe, toute mesure d'interdiction totale et définitive.
Par ailleurs, l'application de l'article 5 de la charte ne provoquera pas d'inflation réglementaire qui entraverait inutilement le quotidien de nos concitoyens, puisque le Gouvernement entend poursuivre son action déterminée en matière de simplification du droit. Dans ce domaine, mon ministère se veut exemplaire. Mesdames, messieurs les sénateurs, j'envisage de solliciter bientôt votre autorisation pour simplifier, par ordonnance, la partie législative du code de l'environnement.
M. Jacques Mahéas. C'est plus facile !
M. Serge Lepeltier, ministre. Dans les prochains mois, le Gouvernement démontrera que l'application du principe de précaution conduit non pas à l'inaction, comme certains pouvaient le craindre, mais, au contraire, à l'action, en particulier à la promotion d'une innovation et d'une recherche responsables. J'en veux d'ores et déjà pour preuve la création de l'Agence nationale pour l'innovation. Vous le voyez : le Gouvernement travaille pour l'avenir de notre pays. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)