compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin
vice-président
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PROCÈS-VERBAL
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
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DéMISSION D'UN SéNATEUR
M. le président. M. le président a reçu de M. Paul Natali une lettre par laquelle celui-ci déclare se démettre de son mandat de sénateur de Haute-Corse le 19 mars 2005 à minuit.
Acte est donné de cette démission.
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COMMUNICATION D'AVIS D'UNE ASSEMBLéE TERRITORIALE
M. le président. M. le président a reçu, par lettre en date du 14 mars 2005, les rapports et délibérations relatifs aux avis de l'Assemblée de la Polynésie française sur :
- le projet de loi organique actualisant certaines dispositions relatives à l'application des lois et règlements et aux procédures de consultation des institutions locales dans les collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie ;
- le projet d'ordonnance relatif au régime communal et au statut des élus dans certaines collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie ;
- le projet de loi autorisant l'approbation du protocole additionnel à la convention pénale sur la corruption,
- le projet de loi autorisant l'approbation du traité sur le droit des marques ;
- et le projet de loi autorisant l'adhésion au protocole modifiant la convention de 1976 sur la limitation de la responsabilité en matière de créances maritimes.
Acte est donné de cette communication.
Ces documents ont été transmis aux commissions compétentes.
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Questions orales
M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.
fermeture du creps de montry en seine-et-marne
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, auteur de la question n° 679, adressée à M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Mme Nicole Bricq. Monsieur le ministre, vous connaissez bien le problème que je voudrais évoquer, puisqu'il concerne le site du CREPS, le Centre régional d'éducation populaire et sportive, de Montry, en Seine-et-Marne.
En 2004, ce site a accueilli 70 000 « journées stagiaires » de formation aux métiers de l'encadrement sportif. En outre, le district nord de football, la fédération de cyclisme et l'école internationale y ont leur siège. Enfin, un grand nombre d'enfants des écoles alentour profitent, le mercredi, de ces installations sportives.
Vous avez annoncé, par voie de communiqué de presse en date du 9 février dernier, la fermeture du site de Montry et de ses bâtiments, ce qui entraîne, de facto, la suppression de postes de travail concernant des titulaires et des non-titulaires.
Cette annonce n'a été précédée d'aucune concertation ni avec les personnels ni avec les collectivités territoriales. Or, je rappelle que la région d'Ile-de-France finance trois formations lourdes et que le département de Seine-et-Marne est, lui aussi, évidemment concerné par l'enjeu territorial que représentent les quarante-cinq hectares occupés par le CREPS, sans oublier les communes d'accueil et les communes limitrophes.
Et pourtant, à ce jour - c'est le point qui suscite une grande inquiétude tant chez les élus que chez les personnels - votre décision n'est motivée par aucun choix clair, alors que l'enjeu est d'importance.
En effet, voilà quelques jours, vous accueilliez la délégation chargée d'inspecter les sites pour les jeux Olympiques de Paris de 2012. Or la France - la région, la ville de Paris et l'Etat - qui, bien évidemment, est tout entière mobilisée sur ce dossier, se doit de développer ses infrastructures afin que cette candidature soit retenue ; nous sommes d'ailleurs tous derrière vous, monsieur le ministre, pour la réussite de ce projet.
C'est la raison pour laquelle la fermeture du CREPS de Montry, qui représente un véritable pôle sportif pour le nord de la Seine-et-Marne et pour tout l'est de l'Ile-de-France, en grande couronne, nous paraît incompréhensible et suscite une vive émotion au-delà même du milieu sportif local.
C'est ainsi que les personnels administratifs et ouvriers, les sportifs et les amis du sport se mobilisent et que des pétitions circulent afin que le département de Seine-et-Marne, déjà défaillant en termes d'installations sportives, ne soit pas privé de cette structure indispensable à l'évolution de tous les sports et à la pratique du sport pour tous, à laquelle je sais que vous êtes très attaché, monsieur le ministre.
Une délégation des personnels, accompagnée d'élus dont j'étais, a été reçue le 8 mars par votre directeur adjoint de cabinet, M. Bertrand Jarrige. Celui-ci a confirmé la fermeture et indiqué qu'au 1er septembre un administrateur transitoire serait nommé, sans pour autant clarifier aucunement les motivations du ministère.
Dès lors, nous sommes en droit - tel est en tout cas la question que je me pose - de nous demander si cette décision a pour objet de réaliser, par la vente de quarante-cinq hectares sur un site pour le moins exceptionnel, une bonne opération financière pour renflouer les caisses de l'Etat, ou s'il s'agit de décourager des personnels qui sont déjà, à l'heure actuelle, complètement démotivés.
C'est la raison pour laquelle je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous m'indiquiez quelles sont, à ce jour, les motivations de votre décision et surtout ce que va devenir le site de Montry après sa fermeture, dès lors que cette dernière serait confirmée.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-François Lamour, ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Depuis ma prise de fonctions, j'ai entrepris de conforter le réseau des trente établissements publics nationaux du ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Cette politique, qui vise à réaffirmer la dimension nationale de ces établissements en les recentrant sur leurs missions prioritaires, s'appuie notamment sur la rénovation de leur mode de gestion et sur la rationalisation de l'implantation de leurs sites. La récente inauguration du CREPS de Bourges et la création de quatre pôles ressources nationaux installés dans des CREPS témoignent de cette volonté.
Or l'examen des conditions de fonctionnement du CREPS d'Ile-de-France a montré que moins de 50 % des activités conduites sur le site de Montry relevaient des missions d'Etat des CREPS, à savoir le sport de haut niveau et la formation professionnelle. En effet, il apparaît que se sont installées au fil du temps, sur le site de Montry, diverses activités qui, si elles contribuent, certes, à son rayonnement local, sont sans lien direct avec la spécificité d'un établissement public national.
C'est au regard de cette situation et afin de préserver la capacité du CREPS d'Ile-de-France à poursuivre son développement au bénéfice des politiques nationales conduites par le ministère qu'il a été décidé de redéployer son activité autour du site de Châtenay-Malabry.
Dans cette optique, les personnels techniques et pédagogiques exerçant à Montry restent affectés au CREPS d'Ile-de-France, ce qui permet de préserver la capacité de l'établissement à organiser des formations professionnelles - vous les avez rappelées, madame la sénatrice - dans les domaines de compétence du ministère.
S'agissant du pôle « espoirs » de tennis de table, qui constituait l'unique contribution du site de Montry aux filières d'accès au sport de haut niveau, il sera réimplanté en concertation avec la fédération française de tennis de table, dont je rencontrerai d'ailleurs très prochainement le président.
Les personnels administratifs, techniciens, ouvriers et de service, les personnels ATOS, qui travaillent à Montry participent aux mouvements organisés en 2005 dans leur corps d'origine par le ministère de l'éducation nationale. Le recteur de l'académie de Créteil s'est engagé à ce que la situation personnelle de chacun de ces agents fasse l'objet d'un examen attentif ; ils bénéficieront ainsi des mesures dites de « carte scolaire » leur accordant une priorité pour retrouver une affectation conforme à leurs voeux.
L'avenir du domaine de Montry, qui occupe, vous l'avez dit, une surface de quarante-cinq hectares, n'est pas arrêté à ce jour. Toutefois, il est clair que l'Etat n'a pas vocation à rester propriétaire d'un site qui ne s'inscrit plus dans la conduite des politiques nationales.
Il convient de noter à ce propos que plusieurs utilisateurs extérieurs - vous les avez cités, madame Bricq - ont pu s'implanter sur le domaine dans le cadre de baux et de conventions diverses : le district de football de Seine-et-Marne nord, un centre technique de la fédération française de cyclisme, et, fait assez surprenant, une école primaire internationale privée de statut associatif. Madame la sénatrice, comme vous le constatez, nous sommes bien loin du sport de haut niveau et de la formation professionnelle !
Des discussions sont d'ores et déjà engagées avec chacun de ces occupants afin d'examiner dans quelles conditions leur présence pourrait perdurer au-delà du 1er septembre 2005 par l'adoption d'un mode de fonctionnement concernant, notamment la restauration et l'hébergement, qui ne dépende plus des activités de l'établissement public.
Pour le cas particulier de la fameuse école internationale privée, ces réflexions sont conduites sous l'égide de l'inspecteur d'académie de Seine-et-Marne, dans le souci de préserver les intérêts des enfants qui y sont scolarisés, ainsi que les perspectives de développement de l'enseignement international dans ce secteur.
Pour ce qui est du devenir à terme du domaine de Montry, je suis ouvert à toutes les propositions des collectivités territoriales qui s'inscriraient dans la perspective d'y développer des activités sportives et de loisirs profitant aux populations de l'est de l'Ile-de-France, en particulier dans votre département, madame Bricq, engageant enfin, de cette manière, un processus qui aurait dû être engagé depuis de nombreuses années.
J'ajouterai enfin que l'Etat, dans le domaine des sports, est loin de négliger la Seine-et-Marne. J'en veux pour preuve le soutien apporté à la réalisation du centre nautique de Vaires-sur-Marne ; il s'agit en particulier de la création d'un stade de slalom de canoë-kayak en eau vive qui permettra d'accueillir les jeux Olympiques et Paralympiques de 2012.
Je sais que vous partagez ce souci, qui est notre priorité actuelle, ainsi que l'attention que je porte, toujours dans le même département, en liaison avec ma collègue Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense, au devenir de l'Ecole interarmées des sports, l'IES.
Je rappelle à cet égard que le précédent gouvernement avait envisagé le transfert de cette école à Brest et j'avais alors émis le voeu, soutenu en cela par M. le Président de la République et Mme Michèle Alliot-Marie, que l'EIS soit maintenue à Fontainebleau.
Madame la sénatrice, notre ambition est de faire en sorte que le sport puisse continuer à se développer dans votre département tout en respectant ce qui est la règle pour les établissements publics nationaux, à savoir la réalité de l'action nationale.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre longue réponse. Si elle n'éclaire pas forcément l'avenir, elle motive - je reprends vos termes - vos choix de redéploiement, de rationalisation et de vocation nationale du site.
Ces vocables passe-partout ne me rassurent pas, monsieur le ministre. S'il fallait rationaliser, on pouvait y parvenir en réorientant la vocation du site plutôt qu'en se séparant de celui-ci de manière radicale.
Vous qui êtes élu au conseil régional, pensez-vous vraiment que ce soit un luxe, pour une région comme l'Ile-de-France, qui compte 11,2 millions d'habitants, de disposer de deux établissements de formation à vocation nationale, l'un à l'est, l'autre à l'ouest ? Je ne le crois pas. Le choix que vous avez fait ne répond pas à notre objectif.
S'agissant du devenir, vous êtes, avez-vous dit, ouvert à toute négociation avec les collectivités locales, puisque l'Etat n'a pas vocation à rester propriétaire ; cela confirme les propos que nous avions entendus. Monsieur le ministre, une fois que le sort des personnels, qui sont très inquiets, sera correctement réglé, y compris celui des personnels non titulaires, je souhaiterais que vous adoptiez une méthode différente de celle que vous avez utilisée, à savoir la concertation et la négociation avec tous les élus concernés.
Mise en application des droits à paiement unique
M. le président. La parole est à M. Dominique Mortemousque, auteur de la question n° 669, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité.
M. Dominique Mortemousque. Monsieur le secrétaire d'Etat, compte tenu de l'importance du sujet pour les agriculteurs, j'attire à nouveau votre attention sur la mise en place, en 2006, des droits à paiement unique, les DPU.
Je vous rappelle que tous les DPU de la ferme France doivent être mobilisés en 2006 pour permettre aux agriculteurs en activité, au moment où la nouvelle PAC entrera en vigueur, de bénéficier des soutiens publics octroyés au titre du premier pilier de la PAC.
Il paraît inconcevable que des agriculteurs qui ont perçu des aides compensatoires pour baisse de prix avant l'introduction de la réforme soient subitement privés de soutiens publics en 2006 parce qu'ils ont repris des surfaces ou des exploitations sans clause de transfert, alors que, dans le même temps, des DPU seraient conservés par des producteurs qui ont cessé leur activité. Cela risquerait, en effet, de conduire à effectuer des prélèvements importants pour abonder la réserve initiale et amputerait d'autant le revenu des agriculteurs en activité. Dans ce cas, la ferme France pourrait ne pas bénéficier de l'intégralité de l'enveloppe financière qui lui est attribuée.
En conséquence, monsieur le secrétaire d'Etat, je vous demande de bien vouloir me confirmer que les DPU doivent garder leur caractère de compensation économique pour permettre à des producteurs de rester compétitifs et aussi pour éviter d'accroître la réserve de DPU dits « dormants ».
Je vous demande également de me dire, puisque vous avez, je le sais, beaucoup travaillé sur ce dossier, ce que je peux répondre, à ce jour, à mes collègues agriculteurs ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et à la ruralité. Monsieur le sénateur, la réforme des droits à paiement unique est importante et constitue un tournant qui ne l'est pas moins. Sans revenir en détail sur cette réforme, la réponse à votre question va me permettre de clarifier de façon précise le système complexe du découplage des aides, qui confirme le passage du soutien à la production à celui du soutien au producteur.
La réforme de la PAC adoptée en juin 2003 à Luxembourg a, vous le savez, introduit un système découplé d'aide au revenu se traduisant, en 2006, par l'attribution aux agriculteurs de droits à paiement unique, calculés sur la base des aides qui leur ont été versées durant la période de référence : 2000, 2001 et 2002.
Pour tenir compte des évolutions juridiques et foncières intervenues sur les exploitations agricoles depuis 2000, des mécanismes d'ajustement liés à ces évolutions sont prévus par la réglementation communautaire. Certaines règles de cadrage sont d'ores et déjà définies. II en est ainsi, par exemple, pour les taux de prélèvements sur les transferts de DPU.
Au cours des négociations, la France a obtenu de pouvoir appliquer des taux de prélèvement variables, afin que les droits à paiement restent, le plus possible, liés au foncier qui les a générés. En effet, lorsqu'un agriculteur souhaitera céder ses DPU avec ses terres, il sera soumis à un taux de prélèvement faible - de manière générale, entre 3 % et 10 % -, voire nul en cas de cession au profit d'un jeune agriculteur qui s'installe.
En revanche, lorsqu'un agriculteur souhaitera céder ses DPU sans terres, il devra avoir la possibilité réglementaire de le faire, et il sera ensuite soumis, jusqu'en 2009, à un taux de prélèvements dissuasif de 50 %. Aussi, monsieur le sénateur, nous avons décidé d'activer les mécanismes pour que les DPU restent, le plus possible, liés aux terres qui les ont générés.
Pour autant, les conditions de mise en oeuvre de cette réforme, négociée à quinze dans un contexte international fortement marqué par les contraintes de l'Organisation mondiale du commerce, l'OMC, ne sont pas entièrement satisfaisantes aujourd'hui.
Dominique Bussereau et moi-même avons pleinement conscience que les préoccupations que vous avez exprimées, avec la grande expérience qui est la vôtre dans le domaine agricole, sont largement partagées par les acteurs du monde agricole. En effet, depuis notre arrivée rue de Varenne, les organisations professionnelles nous ont sensibilisés au fait que certaines modalités envisagées pour la mise en oeuvre des DPU ne permettaient pas d'assurer une gestion optimale de ces droits.
Parmi leurs inquiétudes, exprimées à juste titre, figurent la crainte de voir chaque année geler une partie des DPU par des exploitants ne pouvant activer tous leurs droits faute de terres, ou bien encore l'obligation d'attribuer des DPU à des agriculteurs qui sont présents sur la période de référence 2000-2002, mais qui ne sont pas ou plus réellement productifs en 2006.
Par conséquent, comment garder le caractère de compensation économique - personnellement, je parlerai même de soutien à la compétitivité - que peut représenter la politique agricole commune ? C'est toute la question que vous avez posée.
Alertés par les professionnels et les parlementaires comme vous, Dominique Bussereau et moi-même nous sommes entretenus à plusieurs reprises de ces sujets avec la Commission de Bruxelles dès le mois de janvier dernier. Nous lui avons indiqué que la mise en oeuvre d'un tel dispositif nécessitait de prendre tous les ajustements compatibles avec les termes de l'accord de Luxembourg.
Cela supposait aussi que nous ayons, en 2005, année transitoire, une gestion très active du dossier des DPU. Dans un premier temps, Dominique Bussereau a modifié le calendrier initialement prévu, en prenant la décision de reporter jusqu'au mois de juin l'envoi des références historiques aux exploitants agricoles qui devait avoir lieu en février. Cela nous permet de parfaire la réforme des DPU.
Dans un second temps, nous avons mis en place un groupe de travail composé de professionnels, de députés, de sénateurs et d'experts de nos services, afin d'examiner les adaptations et les améliorations susceptibles d'être apportées dans l'attribution des DPU.
Le groupe de travail s'est déjà réuni à de nombreuses reprises et les réunions vont se poursuivre dans les deux mois qui viennent.
Enfin, afin d'expertiser les conditions de mise en oeuvre de la réforme de la PAC dans les autres Etats membres, d'étudier les choix retenus pour résoudre certaines difficultés rencontrées et de profiter de l'expérience qu'ils ont acquise, nous avons souhaité que des missions associant des parlementaires, des représentants professionnels et des experts du ministère se rendent dans des pays appliquant, depuis le 1er janvier 2005, le système des DPU, afin de comparer nos approches. Ainsi, six missions sont actuellement prévues en Wallonie, en Irlande, aux Pays Bas, en Italie, en Allemagne, en Italie et au Danemark.
L'expertise de ces missions et les conclusions du groupe de travail mis en place devraient permettre d'optimiser la gestion des droits au paiement en tenant compte des réalités du monde agricole que vous avez évoquées.
Monsieur le sénateur, très conscient de la complexité de ce dossier, je conclurai en vous confirmant que ces démarches se déroulent bien.
M. le président. La parole est à M. Dominique Mortemousque.
M. Dominique Mortemousque. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie sincèrement, M. Dominique Bussereau et vous-même, d'avoir pris la mesure des difficultés qui sont les nôtres dans ce dossier.
Je voudrais dire ici que le monde paysan n'est pas contre l'Europe ; il a seulement été heurté par un certain nombre de procédures qui n'ont pas été suffisamment mûries. Mais je sais que, depuis quelques mois, Dominique Bussereau et vous-même faites tout ce que vous pouvez pour résoudre le problème, ce dont je vous sais gré. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Avenir de la pêche à Saint-Pierre-et-Miquelon
M. le président. La parole est à M. Denis Detcheverry, auteur de la question n° 677, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité.
M. Denis Detcheverry. Monsieur le secrétaire d'Etat, ma question porte sur l'exploitation de la mer dans l'archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon.
Le moratoire sur la pêche à la morue de 1993 a provoqué un marasme économique général ; je vous rappelle que Saint-Pierre-et-Miquelon a été dépossédé de tous ses droits historiques au cours des années 1992 et 1993.
Les efforts de diversification économique n'ont pas donné les résultats escomptés à ce jour.
Néanmoins, depuis maintenant quatre ans, une entreprise locale a beaucoup investi dans un projet d'aquaculture très prometteur et innovant.
La viabilité de cette initiative est aujourd'hui incontestable. Elle nous permet d'employer plus de soixante personnes, ce qui représente plus de 20 % de la population active de Miquelon, et de moins dépendre des ressources halieutiques gérées par nos voisins canadiens. Après avoir surmonté avec courage et persévérance la période d'expérimentation, sans véritable assistance technique, l'entreprise en question sait que la réussite est à portée de main.
En collaboration avec le ministère de l'outre-mer, vous avez diligenté une mission sur notre archipel afin de valider ce projet et d'étudier l'organisation de la filière pêche en général.
Monsieur le secrétaire d'Etat, ma question est double.
Votre ministère est-il prêt, comme il s'y était engagé, à accompagner, financièrement et techniquement, à court et à moyen terme, ce projet d'aquaculture qui contribue très concrètement à pérenniser les activités liées à la mer à Saint-Pierre-et-Miquelon ?
Par ailleurs, pouvez-vous nous garantir que votre ministère apportera son concours financier et technique pour le développement durable de l'exploitation des produits de la mer, de manière globale et à long terme ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et à la ruralité. Monsieur le sénateur, j'ai récemment eu l'occasion de discuter avec vous des problèmes de Saint-Pierre-et-Miquelon, des espoirs et des projets, notamment celui que vous avez évoqué s'agissant de l'aquaculture.
Votre souhait de maintenir et de développer des activités économiques durables à Saint-Pierre-et-Miquelon est, je vous le dis avec force, pleinement partagé par le Gouvernement. Le développement de l'aquaculture, à côté de la pêche artisanale, est, comme vous l'avez dit et je le confirme, une voie particulièrement intéressante, mais difficile. Il faut donc saluer les efforts réalisés par l'entreprise EDC pour lancer une production de coquilles Saint-Jacques à Saint-Pierre-et-Miquelon.
L'Etat a aidé le démarrage des activités de cette entreprise et les premières productions sont attendues pour cette année. Le ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité a ainsi versé plus de 550 000 euros au titre d'aides à l'investissement. Les demandes d'aides en instance au ministère chargé de la pêche et de l'aquaculture sont à l'étude, l'objectif étant de dégager une enveloppe de 300 000 euros.
La surveillance sanitaire de la production et des produits fait par ailleurs l'objet d'une assistance technique afin de permettre une commercialisation sécurisée des coquilles sur le marché communautaire. Cette assistance est importante, car l'inquiétude et l'incertitude sont source de difficultés, comme nous avons encore pu le constater récemment en Bretagne, sur certains bassins de production, y compris en aquaculture. Il est donc important d'avoir une assistance technique forte, et c'est ce que nous faisons.
Au stade de développement de cette activité, mais aussi de la pêche maritime, il apparaît nécessaire de bien définir les options de croissance de ce secteur économique.
Il importe, d'abord, d'observer comment l'activité aquacole va se pérenniser dans les conditions habituelles du marché de la coquille Saint-Jacques. Il faut ensuite mesurer les implications du développement de cette entreprise sur l'ensemble de la filière halieutique locale.
A cet effet, j'ai demandé, avec M. Dominique Bussereau, à M. Philippe Ferlin, inspecteur général du génie rural, des eaux et forêts, qui a une bonne expérience dans ce domaine, de mener une étude approfondie des différents aspects de cette filière halieutique. Il se rendra à Saint-Pierre et à Miquelon dans les meilleurs délais.
Il lui incombera notamment de vérifier la connaissance que nous avons des ressources disponibles, des marchés accessibles aux producteurs locaux ainsi que des modes de production existants. J'insiste sur ce point, car il serait dangereux, et je suis persuadé que vous en êtes conscient, de développer cette production sans avoir vérifié au préalable l'état et la bonne connexion des marchés.
A cet égard, la mission de M. Philippe Ferlin aura à caractériser le profil des entreprises de l'archipel.
Un aspect important de la mission sera de définir les synergies possibles, à l'intérieur de la filière, entre aquaculteurs et pêcheurs, y compris avec les activités encore présentes dans la pêche industrielle.
Ce travail comportera des aspects prospectifs pour permettre au ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité, mais aussi au ministère de l'outre mer, avec lequel la mission se mettra en rapport, de définir une politique de développement durable de la filière halieutique, conformément au voeu que vous avez exprimé tout à l'heure.
C'est sur cette base que les modalités d'accompagnement par l'Etat et les autres partenaires pourront être fixées pour l'avenir, au-delà des premières aides que nous avons déjà apportées, et que j'ai rappelées.
Monsieur le sénateur, le Gouvernement, reste déterminé à soutenir les efforts de restructuration et d'organisation de la filière pêche et aquaculture à Saint-Pierre-et-Miquelon, avec volonté et confiance.
M. le président. La parole est à M. Denis Detcheverry.
M. Denis Detcheverry. Je vous remercie de ces réponses, monsieur le secrétaire d'État. Le secteur de la pêche, sur lequel j'insiste beaucoup, est le seul dans lequel nous pouvons encore être productifs et qui nous permet d'exporter un peu. C'est la raison pour laquelle je le défends avec force.
difficultés de fonctionnement des universités françaises
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Bockel, auteur de la question n° 631, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
M. Jean-Marie Bockel. Monsieur le secrétaire d'État, face aux défis que constituent la démocratisation de l'enseignement supérieur et la mise en place effective d'un espace européen de l'enseignement supérieur et de la recherche à travers la généralisation du système licence mastère doctorat, dit LMD, une réforme à la fois budgétaire et structurelle est nécessaire d'autant plus que les universités, creuset de la recherche publique, sont les maillons fondamentaux de l'économie de la connaissance que nous appelons de nos voeux.
Or le léger effort inscrit dans la loi de finances pour 2005 en matière d'emploi, de crédits de fonctionnement et d'investissement demeure insuffisant face à l'ampleur des besoins. Ainsi, concernant les crédits de fonctionnement des établissements d'enseignement supérieur public, l'augmentation des crédits de 13 millions d'euros correspond à une hausse des moyens de fonctionnement de seulement 1,3 %. Cette hausse, inférieure à l'inflation, s'apparente en réalité à une baisse des moyens à structure constante.
Un tel engagement, limité, ne permettra pas d'adapter les structures des universités à l'afflux des étudiants. Il ne pourra pas davantage répondre de manière satisfaisante aux besoins qu'engendrera la mise en place du système LMD. Cette réforme, positive sur le fond, qui s'est faite à moyens constants, aura du mal à se mettre en oeuvre.
Le manque d'enseignants et de personnels administratifs demeure. Le sous-encadrement devient même chronique pour les jeunes universités puisque, dans les régions, il n'est pas rare d'observer un taux d'encadrement de 80 %, voire moins, comme c'est le cas de l'université de Haute Alsace, dont la plupart des bâtiments sont situés à Mulhouse.
Se pose en l'espèce la question de l'équitable répartition des ressources allouées par l'Etat.
Plus généralement, il importe d'effectuer une analyse objective des moyens réels affectés aux universités, qui dépendent pour partie du montant des droits d'inscription. Alors que la professionnalisation est un maître mot de la réforme du système LMD, la récente modification des droits d'inscription a abouti, pour les universités professionnalisées, à une baisse sensible de leurs ressources, qui représente 76 000 euros, soit une diminution de 10 % du total des crédits de fonctionnement, pour l'université de Haute Alsace.
Il revient à l'Etat de prendre en charge la différence entre ces ressources propres et les besoins de fonctionnement.
En conséquence, monsieur le secrétaire d'Etat, quels dispositifs d'aide au fonctionnement des universités le Gouvernement envisage-t-il de prendre afin de leur permettre d'accomplir au mieux leurs nombreuses missions ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et à la ruralité. Je vous prie de bien vouloir excuser M. François Fillon, actuellement retenu au ministère de l'éducation nationale. Aussi m'a-t-il demandé de bien vouloir vous communiquer les éléments de réponse suivants.
Monsieur le sénateur : agir, et non gémir ! Cette volonté est celle du Gouvernement. Elle s'est traduite dans la loi de finances pour 2005.
Le budget de l'enseignement supérieur pour 2005 est, en effet, en progression de 3 %, soit beaucoup plus que le budget de l'Etat, qui, je le rappelle, augmente globalement de 1,8 %. Ce sont ainsi presque 300 millions d'euros supplémentaires qui ont été dégagés pour le renforcement des moyens de fonctionnement et d'équipement des universités, ainsi que pour la vie étudiante.
S'agissant des emplois d'enseignants-chercheurs en particulier, l'effort de l'Etat doit être souligné. Outre la création, au 1er janvier de 700 emplois, dont 245 professeurs d'université, 150 emplois de maîtres de conférence seront également créés au 1er septembre 2005. Viennent s'ajouter à ces emplois de titulaires, depuis le 1er janvier 2005, 150 supports d'attaché temporaire d'enseignement et de recherche.
Au total, un millier d'enseignants-chercheurs supplémentaires travailleront dans les établissements d'enseignement supérieur ! Je pense que ces chiffres répondent avec précision à vos interrogations sur l'évolution des moyens.
Ces créations de postes ont un double objet : tout d'abord contribuer à la résorption du sous-encadrement constaté depuis de longues années dans certaines universités ; ensuite, participer au renforcement de la recherche universitaire, objectif majeur pour le Gouvernement.
Au-delà des moyens nouveaux inscrits dans le projet de loi de finances initiale, le ministère effectue, lors des campagnes de répartitions d'emplois, des redéploiements pour répondre au mieux aux besoins des établissements les moins biens dotés.
Le souci d'équité sous-tend les principes de répartition mis en oeuvre par le ministère. La suppression des disparités flagrantes est une priorité constante.
La refonte des droits d'inscription dans le cadre du système LMD vise à une simplification et à une harmonisation des montants versés par les étudiants lors de leur inscription dans un établissement d'enseignement supérieur.
Sur le plan national, ce dispositif a accru les ressources des établissements d'enseignement supérieur de près de 6,9 millions d'euros. Toutefois, ponctuellement, et vous l'avez souligné à juste titre, certains établissements aux caractéristiques particulières ont vu chuter le montant des droits d'inscription qu'ils percevaient. Dans ces rares cas - 30 établissements sont concernés sur un total de 245 - M. François Fillon a décidé de réaliser une compensation directe de ce manque à gagner. Dans cette optique, l'université de Haute Alsace, qui est effectivement touchée, a bénéficié d'une dotation de compensation de plus de 81 000 euros.
Monsieur le sénateur, telles sont les informations et les précisions que M. François Fillon souhaitait vous transmettre.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Bockel.
M. Jean-Marie Bockel. « Agir, et non gémir », avez-vous dit, monsieur le secrétaire d'État.
Comme vous le savez, la plupart des collectivités locales françaises, qu'il s'agisse des régions, des départements ou des communes, augmentent d'année en année leur soutien financier aux universités qu'elles accueillent, bien que cela ne relève pas de leurs compétences. Je peux moi-même en témoigner en qualité de maire de Mulhouse. De ce point de vue, nous sommes bien dans l'état d'esprit : aide-toi...
Votre réponse, quelque peu générale, ne me rassure pas complètement sur la différence qui subsiste avec les universités émergentes. Vous avez toutefois, à la fin de votre propos, apporté quelques précisions qui seront transmises aux intéressés et qui, je l'espère, seront de nature à les apaiser.