M. Paul Loridant. Ah !

M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est même, à la vérité, un avis favorable qu'elle émet. (Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Paul Loridant. C'est dur à sortir !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Alain Lambert, ministre délégué. En toute chose, il ne faut pas confondre la fin et les moyens. (Eh oui ! sur les travées de l'UMP.)

Sur la fin, je pense que nous pouvons dégager un accord presque unanime : la finalité de toute politique, dans les années que nous traversons, est de permettre à chaque personne, dès lors qu'elle est en âge et en capacité de travailler, d'accéder à un emploi. Il faut lui offrir une chance de promotion sociale, une occasion de donner un sens à sa vie, en éprouvant ce sentiment d'utilité dont nous avons tous besoin et qui contribue à la dignité de la personne. Avant d'attribuer une allocation ou un revenu minimum, la collectivité nationale doit, chaque fois qu'elle le peut, permettre à ses membres d'accéder à l'emploi ou à l'activité.

Telle est la fin qu'il ne faut jamais oublier de rappeler en préambule de nos débats, parce que, lorsque nous la perdons de vue, nous entrons dans des discussions absconses sur les modalités au détriment de l'essentiel, ce que nos compatriotes ne manquent pas de nous reprocher.

Cela étant dit, j'évoquerai maintenant successivement les amendements et sous-amendements déposés à l'article 40.

L'adoption de l'amendement de suppression n° I-96 aurait pour effet de rendre inconstitutionnel le transfert de la gestion du RMI aux départements. Or le Gouvernement pense que ces derniers, qui sont déjà engagés dans l'action en faveur de l'insertion des personnes exclues et privées d'emploi, constituent l'échelon le mieux à même d'assumer cette mission impérieuse et de favoriser le retour à l'emploi.

M. Thierry Foucaud ne s'étonnera donc pas que, à la suite de la commission des finances, j'émette un avis défavorable sur l'amendement n° I-96.

L'amendement n° I-173, qui a été présenté par M. Gérard Miquel, vise notamment à instaurer une indexation de la dotation générale de décentralisation sur la dotation globale de fonctionnement. Or le Gouvernement a fait le choix, en matière de compensation des nouveaux transferts de compétences, qu'il s'agisse du revenu minimum d'insertion ou des transferts qui seront opérés à compter de 2005 par la future loi relative aux responsabilités locales, d'attribuer aux collectivités territoriales des ressources fiscales, notamment sous la forme d'un partage du produit de l'impôt national. Le système de dotation présenté par les auteurs de l'amendement n'ayant pas donné satisfaction dans le passé, le Gouvernement émet un avis défavorable.

L'amendement n° I-174 tend quant à lui à augmenter forfaitairement d'un milliard d'euros la part du produit de la TIPP affectée aux départements, qui se verraient ainsi attribuer une recette supplémentaire. Une telle disposition est contraire aux principes qui gouvernent la décentralisation, et j'y suis donc défavorable.

Toutefois, le Gouvernement a entendu la préoccupation exprimée par les exécutifs départementaux, qui a d'ailleurs été reprise tout à l'heure, à l'occasion de l'examen de certains amendements, par M. le rapporteur général, M. Adnot et M. Mercier, quant aux effets présumés de la réforme de l'ASS et de la création du RMA. Vous constaterez dans un instant, mesdames, messieurs les sénateurs, que le Gouvernement accueillera favorablement des propositions qui ont été formulées par les auteurs de certains amendements.

S'agissant du sous-amendement n° I-305 de M. Michel Charasse, je fais mienne la réponse qu'a donnée M. le rapporteur général. J'ajoute que la loi organique relative aux lois de finances dispose que les affections d'impôts à un tiers doivent être inscrites dans une loi de finances, or il s'agit bien, en l'occurrence, de transférer une fraction d'impôt aux départements. Je pense que ces éléments devraient inciter M. Charasse à retirer son sous-amendement.

Le sous-amendement n° I-302 vise à ce que soit pris en compte, dans la compensation du transfert aux départements de la gestion du RMI, le coût des personnels affectés à celle-ci. Le Gouvernement a pris en considération cette préoccupation et a présenté à l'Assemblée nationale, à l'occasion de la discussion du projet de loi portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité, un amendement, qui a été adopté, ayant pour objet la mise à disposition transitoire, pour 2004, des agents de l'Etat chargés actuellement de la gestion du RMI dans les DDASS, qu'ils s'occupent de la gestion des allocations ou de l'insertion sociale et professionnelle. La liste des agents concernés sera établie par le représentant de l'Etat dans le département, en liaison avec le conseil général, dans un délai d'un mois suivant la date de promulgation de la loi. La mise à disposition s'effectuera à compter de cette date, dans l'attente de l'entrée en application, au 1er janvier 2005, de la loi relative aux responsabilités locales, qui organise les conditions générales des transferts de personnels.

J'espère que ces informations répondent à vos préoccupations, monsieur Miquel, et que vous voudrez bien, en conséquence, retirer le sous-amendement n° I-302.

En ce qui concerne l'amendement n° I-297 rectifié, monsieur le rapporteur général, la compensation financière proposée par le Gouvernement pour le transfert aux départements de la gestion du RMI est tout à fait conforme aux principes constitutionnels qui régissent désormais la décentralisation.

Fondée sur les dépenses exposées en 2003, elle est en outre favorable aux départements à long terme, puisque, en raison de la conjoncture économique, elle correspond à un point haut de la courbe du nombre des bénéficiaires du RMI.

Je tiens par ailleurs à rappeler ici que toute politique de l'emploi conduite par le Gouvernement tend à inciter au retour à l'activité. Les efforts qu'il déploie dans ce domaine, dans la mesure où ils visent à réduire le chômage, devraient avoir des effets positifs directs sur les finances départementales.

J'ai bien noté, monsieur le rapporteur général, que vous présentiez non pas un mécanisme d'ajustement automatique des ressources aux dépenses, mais une révision de la base de compensation, à partir d'évaluations sérieuses des effets de la réforme de l'ASS et de la création du RMA en 2004. Si ma mémoire est bonne, vous avez évoqué un « travail en confiance », une « prise en compte du facteur temps ». (M. le rapporteur général acquiesce.) Vous avez souligné que c'était l'occasion, pour le Gouvernement, de délivrer une sorte de message sur sa conception des transferts de compétence. J'en profite donc pour affirmer que je tiens absolument à ce que s'instaure un climat de confiance entre l'Etat et les collectivités locales s'agissant de leurs relations financières. Cela suppose de faire en sorte que les parties puissent avoir une pleine connaissance des responsabilités qu'elles prennent dans le cadre des transferts de compétence opérés.

Cela étant précisé, le Gouvernement s'en remettra à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° I-297 rectifié. Chacun aura naturellement compris qu'il s'agit d'un avis de sagesse positive !

L'amendement n° I-175 vise, quant à lui, à indexer la part du produit de la TIPP versée aux départements sur l'évolution du nombre d'allocataires du RMI et du RMA. Je voudrais peser mes mots pour ne pas froisser les auteurs de l'amendement, mais préconiser une telle méthode revient à considérer que les personnes privées d'emploi le sont de manière définitive, et constituent un stock. Or chacune d'entre elles a une valeur personnelle, et il faut que la collectivité nationale trouve les moyens de les faire accéder de nouveau à l'activité et à l'emploi. Tel est l'enjeu !

Par conséquent, proposer que les départements recevront une part du produit de la TIPP appelée à évoluer en fonction du nombre d'allocataires du RMI et du RMA va à l'encontre de l'esprit même de la réforme engagée, qui se fonde sur l'idée que les départements seront plus efficaces que l'Etat, parce que plus proches du terrain.

Le Gouvernement ne peut donc qu'être très défavorable à l'amendement n° I-175.

Pour ce qui concerne l'amendement n° I-262, M. Adnot semble craindre que les modalités de compensation ne conduisent à amputer celle-ci d'un douzième. Je puis lui assurer qu'il n'en sera rien : pour les départements, la comptabilisation des dépenses afférentes au RMI sera établie sur la base du service rendu, le fait générateur de la dépense étant le paiement de l'allocation par les caisses d'allocations familiales, qui intervient, à terme échu, le 5 du mois suivant. Ainsi, que ce soit pour 2004 ou pour les années suivantes, les départements assureront douze mois de dépenses et bénéficieront de douze douzièmes de la part de recette de la TIPP affectée. Si l'on retenait, en l'état, la proposition des auteurs de l'amendement, cela se traduirait par un mois de charges supplémentaires pour les départements.

Je crois vous avoir donné l'assurance que vous souhaitiez, monsieur Adnot. Cela devrait vous permettre de retirer l'amendement n° I-262.

S'agissant de l'amendement n° I-263 rectifié, je vous confirme, monsieur Adnot, que les départements devront rembourser aux caisses d'allocations familiales l'allocation versée aux RMIstes le 5 janvier 2004. Cependant, les départements ne devront procéder à ce remboursement qu'à la fin du mois de janvier 2004. Entre-temps, ils auront perçu un douzième de la part de recette de la TIPP affectée. Il en sera ainsi chaque mois, de sorte que, normalement, les départements ne devraient pas avoir à subir de frais financiers.

Je suis prêt à entendre les observations complémentaires que vous formulerez éventuellement à l'occasion des explications de vote, monsieur Adnot, mais je pense que les indications que je viens de donner et que je pourrai le cas échéant compléter auront atténué vos inquiétudes. En tout état de cause, je vous demande de bien vouloir retirer l'amendement n° I-263 rectifié. Dans le cas contraire, je serai amené à en préconiser le rejet.

J'en viens à l'amendement n° I-37 rectifié bis. M. Michel Mercier propose que, après un rapport d'évaluation portant sur les premiers résultats de la réforme de l'ASS, un décret - car, comme il l'a dit, cela relève du domaine réglementaire - fixe les conditions dans lesquelles un bénéficiaire de l'ASS pourrait saisir, à l'échéance de la période de versement de l'allocation, une commission de recours.

Cette commission pourrait décider, le cas échéant, de prolonger le versement de l'ASS, à condition, bien sûr, que l'intéressé entre dans un processus de recherche active d'emploi. C'est d'ailleurs par là que M. Mercier avait commencé son intervention.

Si le Gouvernement estime que, en l'état, le texte est satisfaisant, il comprend, monsieur Mercier, que vous souhaitiez que chaque personne qui effectue des démarches actives et sincères de recherche d'emploi ne soit pas, sans examen supplémentaire, exclue du bénéfice de l'ASS. Il note aussi que les conditions dans lesquelles ces personnes en recherche d'emploi pourront voir leur ASS prolongée seront fixées par décret après un rapport d'évaluation.

Bien que la rédaction de cet amendement puisse souffrir telle ou telle observation technique, je souhaite, comme l'ensemble du Gouvernement, traduire dans les textes le fait que nous voulons tous encourager la réinsertion effective sur le marché du travail du plus grand nombre possible de personnes. C'est pourquoi j'émets un avis favorable sur cet amendement.

Plusieurs sénateurs de l'UMP. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je voudrais remercier M. le ministre de l'avis qu'il vient d'émettre sur l'amendement de la commission des finances. Cette disposition permettra aux conseils généraux, dès le 1er janvier 2004, de se saisir de ce transfert de compétence. Je pense que les craintes légitimes reçoivent les apaisements attendus et qu'ainsi les départements vont pouvoir s'engager.

Au-delà de l'enjeu mécanique, il ne faut pas oublier la dimension humaniste, qui ne nous a pas échappé. Je confirme que la commission des finances, lorsqu'elle a examiné cet amendement, a émis à l'unanimité un avis favorable. Comme l'a dit M. le ministre, la rédaction est perfectible. Si le Sénat adopte cet amendement, nous disposerons, d'ici à la commission mixte paritaire, de quelques semaines pour parfaire cette rédaction, et je ne doute pas que nous y parvenions. Vous le constatez, mes chers collègues, la commission des finances a un coeur.

M. Michel Charasse. Ah ! Ah !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Qui en aurait douté ?

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-96.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel.

M. Gérard Miquel. Compte tenu des assurances données par M. le ministre et puisque nous allons voter l'amendement de la commission des finances, qui nous paraît garantir les départements contre tout dérapage budgétaire...

M. Michel Charasse. Sur ce point !

M. Gérard Miquel. ... dans cette nouvelle compétence qui leur est attribuée s'agissant du RMI et du RMA, nous retirons les amendements n°s I-173 et I-174.

M. le président. Les amendements n°s I-173 et I-174 sont retirés.

Monsieur Charasse, le sous-amendement n° I-305 est-il maintenu ?

M. Michel Charasse. J'ai bien entendu ce qu'ont indiqué successivement le rapporteur général et le ministre au sujet de ce sous-amendement rédactionnel.

MM. Marini et Lambert, qui connaissent bien la nouvelle loi organique relative aux lois de finances, ont indiqué que, désormais, en application de cette loi organique, ce type de dotation et de prélèvement pour les collectivités locales relève exclusivement de la loi de finances. Personnellement, je trouve que c'est assez fâcheux car cela signifie qu'en votant cette disposition, à laquelle je n'avais pas prêté attention sur le moment, nous nous sommes liés les mains.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Dura lex, sed lex !

M. Michel Charasse. En effet, nous nous sommes interdits de faire quelque proposition de loi que ce soit dans le courant de l'année. Nous sommes dans un domaine où seul le Gouvernement dispose du droit d'initiative et nous ne pouvons agir qu'après qu'il l'a exercé, par amendement.

Monsieur le président, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues et vous-même, monsieur le ministre, qui êtes l'auteur de la loi organique, auteur brillant d'ailleurs, je voudrais vous faire observer que les alinéas successifs de l'article 72-2 de la Constitution tel que nous l'avons adopté au printemps dernier et qui concerne les ressources des collectivités locales ne vise que la loi, et non la loi de finances. Et si cet article évoque la possibilité d'une loi organique, c'est uniquement pour fixer la « part déterminante ». Aussi, je me demande si, sur ce point, la nouvelle loi organique, qui date du 1er août 2001, est bien conforme à la Constitution telle qu'on l'a votée au printemps dernier. Mais je n'insiste pas.

Concernant le problème rédactionnel, le fait de savoir s'il s'agit ou non d'une injonction, je dirai à M. le rapporteur général - et, vous le constatez, nos échanges, d'ordre juridique, sont d'une grande courtoisie - que le législateur ne peut pas se lier les mains. Le Conseil constitutionnel l'a dit à plusieurs reprises : ce qu'une loi a fait, une autre loi peut le défaire.

Par ailleurs, le Gouvernement n'est pas toujours obligé d'agir. Aussi, lui imposer de le faire, comme le prévoit la rédaction actuelle de la première ligne de l'amendement de la commission - j'abandonne la discussion sur loi de finances ou pas loi de finances -, peut être considéré comme une injonction. Or on pourrait très bien établir une créance, dire que les collectivités ont une créance sans imposer une formalité de cette nature. Il serait tout de même fâcheux que cet article soit annulé par le Conseil constitutionnel.

Monsieur le président, je ne maintiens pas mon sous-amendement. Je demande simplement à nos collègues et amis qui siégeront à la commission mixte paritaire de bien s'assurer, d'ici là, que l'on ne court pas de risque. Il serait tout de même lamentable de devoir, en catastrophe, voter un projet de loi de finances rectificative comportant un article pour régler ce problème. Il s'agit d'une simple précaution, qui ne visait pas à remettre en question la qualité du travail technique qui est fait par la commission des finances, ses membres bien sûr, son président et son rapporteur général, ainsi que par les services qui les assistent.

M. le président. Le sous-amendement n° I-305 est retiré.

La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je souhaite lever une ambiguïté. Je comprends bien les observations de M. Michel Charasse, mais, en l'occurrence, il ne s'agit pas d'une injonction. Ce que nous voulons, c'est expliciter l'intention du législateur. Il s'agit simplement de veiller à ce que, pratiquement en temps réel, les dépenses engagées par les départements soient couvertes par l'Etat. En effet, si l'on s'accommodait d'une simple constatation de créance, on pourrait imaginer aussi que l'Etat honore cette créance cinq années plus tard. Cela serait contraire à l'esprit de la loi que nous votons. Nous voulons simplement préciser que, prenant appui sur une loi de finances rectificative, nous pourrons ainsi permettre de liquider la créance acquise par les départements sur l'Etat au titre des suppléments de dépense qu'ils auront à supporter du fait des transferts de compétence.

M. le président. Monsieur Haut, le sous-amendement n° I-302 est-il maintenu ?

M. Claude Haut. Compte tenu de vos propos, monsieur le ministre, nous retirons ce sous-amendement. Toutefois, je souhaite que les directives que vous venez d'évoquer soient bien communiquées aux préfets, et je vous demande d'y veiller personnellement. En effet, à ce jour, le préfet de Vaucluse n'a pas été informé, puisqu'il m'a dit que ces personnels restaient à l'Etat et que le département devait se débrouiller s'agissant de la gestion du RMI. Je voudrais que les choses soient claires et que tous les préfets reçoivent les mêmes instructions !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Il suffira de lire le Journal officiel !

M. le président. Le sous-amendement n° I-302 est retiré.

La parole est à M. le ministre.

M. Alain Lambert, ministre délégué. S'agissant de l'amendement n° I-297 rectifié, je lève le gage, monsieur le président.

M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° I-297 rectifié bis.

La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.

M. Bruno Sido. Je voterai, bien sûr, cet amendement.

Cela étant dit, je reviens sur le sous-amendement qui a été retiré par M. Miquel, et je m'exprime en tant que président de conseil général. Un certain nombre de sénateurs sont présidents de conseils généraux : c'est sans doute pourquoi nous sommes assez nombreux à siéger dans cet hémicycle à cette heure.

Un amendement, adopté par l'Assemblée nationale, prévoit le transfert gratuit du personnel d'Etat en 2004. Vous le savez, le diable se cache dans le détail. Le transfert du RMI-RMA interviendra le 1er janvier 2004. Or, en Haute-Marne, aucun fonctionnaire ne travaille pour le RMI, tandis que l'on n'en compte qu'un dans l'Yonne, et j'ai cru comprendre que, notamment dans le Vaucluse et dans le Lot, la question n'est pas complètement réglée. Je souhaiterais obtenir des précisions sur le mode de calcul des personnels d'Etat qui travaillent pour le RMI dans les départements. D'ailleurs, nous aurions pu instaurer un ratio de personnels par RMIste ou prévoir un autre mode de calcul. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous apporter des précisions sur le transfert, qui demeurera peut-être virtuel puisqu'il est possible que les personnels d'Etat ne viennent pas dans les départements ?

Selon moi, le sous-amendement de M. Miquel était bien rédigé, puisqu'y était évoqué le coût du personnel généré par la gestion du RMI. Je ne sais pas pourquoi vous l'avez retiré, mon cher collègue.

M. Paul Loridant. Il fallait le reprendre ! (Sourires.)

M. Philippe Marini, rapporteur général. Il a été retiré parce que M. Miquel a été convaincu !

M. Bruno Sido. Je suis persuadé que M. le ministre va nous apporter d'utiles précisions.

M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote.

M. Michel Mercier. D'abord, je remercie la commission des finances et M. le rapporteur général d'avoir déposé l'amendement n° I-297 rectifié. En l'occurrence, il s'agit du premier transfert de compétence de l'acte II de la décentralisation. Il est donc très important de bien cadrer les choses car cela fera jurisprudence pour les transferts qui résulteront du projet de loi relatif aux responsabilités locales.

Le transfert du RMI s'accompagne de la création d'une nouvelle compétence, le RMA, d'où la complexité. Aussi, nous devions réaliser un travail d'orfèvre ; c'est ce qui a été fait.

Pour avoir une vue exacte et globale de la façon dont s'organise la compensation financière du transfert, il faut avoir en main l'amendement n° I-297 rectifié que vient de présenter M. le rapporteur général et celui qui a été adopté par nos collègues de l'Assemblée nationale à l'article 3 du projet de loi instaurant le transfert du RMI.

Ils vont permettre de prendre en compte les dépenses réelles de 2003, d'ajuster, dans une loi de finances rectificative, les conséquences de la création du RMA et, enfin, au vu du compte administratif du département, de calculer le montant exact de la TIPP à transférer. Ainsi, l'ensemble des coûts du transfert seront couverts.

Cette façon de faire, telle que nous l'a exposée M. le rapporteur général, couvre en effet l'ensemble des risques que les départements peuvent courir à l'occasion de ce transfert de compétence. Cela peut apparaître complexe dans un premier temps, mais le fait qu'il y ait trois étapes, aussi bien décrites par M. le rapporteur général, apporte une pleine garantie aux départements.

Le transfert du RMI, la création du RMA et la prise en compte des conséquences de la réforme de l'ASS étant bien pris en compte par l'amendement de la commission, l'évolution de la fiscalité permettra de couvrir les dépenses des départements au titre de cette compétence nouvelle.

Assisterons-nous à une croissance telle que le nombre de bénéficiaires du RMI diminuera ? Nous le souhaitons tous. Les départements auront-ils une meilleure gestion ? C'est probable. En tout cas, ils ne feront pas plus mal.

En tout état de cause, nous prendrons un bon départ, grâce à l'amendement présenté par M. le rapporteur général. C'est la raison pour laquelle je voterai sans état d'âme cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Je voudrais remercier M. Michel Mercier de ses propos très agréables à entendre pour la commission, dont il est l'un des principaux acteurs en matière de décentralisation.

Monsieur le ministre, je voudrais insister sur la réforme de l'Etat, qui est en quelque sorte sous-jacente dans le transfert et la création de la nouvelle compétence. Plusieurs de nos collègues ont fait état de leur expérience locale. Le nombre de personnes affectées semble varier d'un endroit à l'autre, voire d'un moment à l'autre, et il y aurait, dans certains départements, un effet d'attrition un peu surprenant.

Cette fonction de la décentralisation, comme révélateur de la manière dont les services déconcentrés de l'Etat sont organisés, est vraiment un bon levier, pour savoir ce qui se passe, pour savoir comment les tâches sont faites, ce que cela coûte, et, enfin, pour faire des économies en assurant mieux les fonctions collectives.

A la suite de ce que nous avons entendu sur différentes travées, permettez-moi, monsieur le ministre, d'émettre le souhait qu'une évaluation neutre et globale soit réalisée et suivie afin qu'il n'y ait pas de situations hétérogènes : dans un département, on jouerait bien le jeu et, dans un autre, on le jouerait moins bien. Les autorités compétentes, qu'il s'agisse du ministère de l'intérieur, tuteur des préfectures, ou du ministère des affaires sociales, tuteur technique des services déconcentrés concernés, doivent veiller à l'homogénéité des transferts de personnel, et donc des compensations, le jour venu, entre l'Etat et les départements.

C'est d'ailleurs un thème important de contrôle que la commission des finances, pour sa part et à sa place, s'efforcera de traiter.

Cet après-midi, des responsables d'exécutif départemental nous ont apporté des témoignages extrêmement utiles.

La réforme que nous allons voter permettra d'instaurer la confiance dans les relations financières grâce à une transparence accrue. Bien entendu, la priorité devra être donnée à l'efficacité du dispositif, en particulier pour s'assurer que toutes celles et ceux qui le peuvent reviendront à l'emploi, se réinséreront en toute dignité dans la vie de travail, comme nous le souhaitons tous.

En conclusion, je souhaite rappeler - mais vous vous en souvenez au moins aussi bien que nous, monsieur le ministre - que le revenu minimum d'activité, même si c'était sous une forme un peu différente, est né ici même. C'est le Sénat qui a adopté ce dispositif au temps où le gouvernement d'alors n'acceptait pas une démarche visant à activer les dépenses passives, trop passives, de préservation du niveau de vie des personnes en difficulté. Il faut préserver ce niveau de vie, mais, en même temps, il faut tout faire pour que la réinsertion par le travail, par tous moyens, soit une réalité.

M. Bruno Sido. Bravo !

(M. Bernard Angels remplace M. Guy Fischer au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. BERNARD ANGELS

vice-président

M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.

M. Michel Charasse. Nous avançons et nous cernons maintenant beaucoup mieux le périmètre des compensations.

Il faut que les choses soient claires : l'affaire RMI-RMA présente deux aspects.

En premier lieu, il y a mise à disposition de personnels. Elle ne coûte rien, et les transferts de personnels qui suivent donnent lieu, le moment venu, à compensation spécifique.

Mais cette compensation relèvera non pas des règles applicables au RMI et au RMA, mais des modalités qui seront définies dans le projet de loi relatif à la décentralisation qui est en cours de discussion. Il y a des modalités de calcul pour les transferts de personnels et ce sont celles-ci qui joueront. A mon avis, la somme résultant des transferts de personnels ne fera pas partie de la compensation RMI-RMA, puisqu'elle fera partie de la compensation globale des transferts de personnel.

En second lieu, il y a le transfert du RMI et du RMA, qui donne lieu à compensation.

Pour l'instant, nous ne connaissons pas son montant, et l'amendement de M. le rapporteur général vise à le déterminer le plus rapidement possible. Nous serons bien obligés, à un moment ou à un autre, de procéder à une évaluation. Il faudra alors tout prendre en considération, y compris les éventuels coûts administratifs.

La commission des finances se propose à juste titre de procéder à la vérification. Dont acte ! Il est toutefois une institution dont c'est précisément le rôle, du moins jusqu'à ce que le projet de loi de décentralisation soit définitivement adopté et entre en vigueur : la commission d'évaluation des charges, dont un certain nombre d'entre nous font partie.

Dès lors, si l'on fait une compensation sans inclure les coûts administratifs hors personnels transférés, qui relèvent d'une autre compensation, la commission d'évaluation des charges sera conduite à faire les observations nécessaires. Je parle sous le contrôle de M. Mercier qui siège avec moi dans cette commission.

Il ne faut pas qu'il y ait confusion dans nos esprits : la compensation RMI-RMA ne concernera pas les personnels transférés, qui relèvent d'un autre type de compensation. Mais on ne pourra pas éluder les coûts administratifs que l'on constatera après calcul et qui feront partie des charges globales du transfert RMI-RMA.

Telles sont les précisions que je voulais apporter sur ce point pour lever toute ambiguïté.

Indépendamment de ce que la commission des finances pourra faire pour contrôler le calcul, la commission d'évaluation des charges a ses compétences. Je peux vous dire, pour savoir comment elle fonctionne, qu'elle n'hésitera pas à jouer son rôle, comme elle l'a toujours fait.

M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.

M. Alain Vasselle. Il est utile de s'attarder quelque temps sur cet amendement important concernant la compensation. Nous ne pouvons que nous féliciter de cette heureuse initiative de la commission, de M. le rapporteur général en particulier.

Tout d'abord, M. le rapporteur général a fait référence à la nécessaire évaluation et je serais heureux d'entendre M. le ministre nous confirmer que c'est la voie dans laquelle le Gouvernement, en liaison avec le Parlement, va s'engager, afin qu'il n'y ait aucune arrière-pensée.

Ensuite, M. Philippe Adnot a déposé un amendement faisant référence aux droits constatés.

La proposition de M. Adnot est bonne - il a pourtant décidé de retirer son amendement - car même si nous n'avons aucune raison de mettre en doute la volonté du Gouvernement, je crois que cela va mieux en l'écrivant. Monsieur le ministre, si vous confirmiez que le calcul se fera en fonction des droits constatés, vous apporteriez une garantie supplémentaire au Parlement.

Le compte administratif de l'exercice 2004 que M. Mercier a évoqué, va répertorier la situation comptable des engagements de dépenses et de recettes, mais ne prendra pas forcément en compte les dépenses engagées qui pourraient être reportées sur l'exercice suivant.

Les droits constatés permettent de prendre en compte les dépenses engagées et non comptablement constatées au cours de l'exercice comptable. Ils constituent une garantie supplémentaire qu'il m'apparaîtrait souhaitable d'introduire dans la loi. Cela éviterait toute ambiguïté et montrerait la volonté du Gouvernement d'établir des comptes qui soient vraiment bien équilibrés pour chaque partie.

Je tire des enseignements tout à fait enrichissants de ce débat. En effet, j'espère, qu'au moment où nous engagerons la réforme de la branche maladie de la sécurité sociale, dans quelques mois, lorsque nous définirons les nouveaux périmètres des dépenses de l'Etat, d'une part, et de la sécurité sociale, d'autre part, nous saurons faire les comptes à l'euro près.

Le Gouvernement aurait été bien inspiré d'accepter ce principe dès aujourd'hui. Nous aurons l'occasion d'en reparler.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Les bons comptes font les bons amis !

Je ne doute pas que, en progressant dans la sincérité comptable, nous renforcerons le pacte républicain et nous nous donnerons les bons outils pour la réforme de l'Etat.

Je ne sais pas jusqu'à quel niveau d'Etat il faut aller dans la loi. Mais, aujourd'hui, il est très important que le principe d'équité soit bien formalisé.

Ce transfert de compétences s'inscrit dans une démarche de recherche de l'efficacité de la dépense publique. La décentralisation peut y contribuer et nous aider à être à la fois plus efficaces et peut-être plus humains à l'égard de celles et ceux qui sont à la recherche d'un emploi, d'une activité, d'une utilité sociale.

Monsieur le ministre, je reprends volontiers à mon compte les observations de notre collègue M. Bruno Sido.

D'après les présidents de conseil général avec les préfets, les effectifs des directions départementales des affaires sanitaires et sociales qui ont eu des contacts étaient affectés au traitement du RMI ont, en quelque sorte, fondu au fil des semaines. Je voudrais vraiment vous mettre en garde, monsieur le ministre, contre cette fausse bonne idée, contre cette stratégie des administrations décentralisées de l'Etat tendant à considérer que ce qui est transféré aux départements ne mobilise pratiquement aucun collaborateur.

M. Michel Charasse. Ce sont les caisses d'allocations familiales qui s'en occupent !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Effectivement, les CAF et les MSA s'investissent beaucoup dans le traitement administratif des dossiers. Cela dit, personne ne comprendrait qu'il n'y ait pas quelques cadres et quelques agents d'exécution dans les directions départementales des affaires sanitaires et sociales qui, aujourd'hui, assurent le traitement du RMI, au nom de l'Etat.

Soyons attentifs, faute de quoi il y aurait en quelque sorte confiscation de la réforme et le Gouvernement n'obtiendrait pas les résultats qu'il attend.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Alain Lambert, ministre délégué. Au fond, nous sommes face au premier transfert de compétences de la deuxième génération. Réussissons-le, d'autant plus qu'il a une haute valeur humaine ajoutée, parce qu'il s'agit non de transférer la gestion d'une infrastructure, mais de trouver du travail, une activité à des personnes qui sont aujourd'hui menacées d'exclusion et, pour certaines, exclues.

L'enjeu est si beau qu'il convient de mettre en oeuvre tous les moyens humains et matériels pour atteindre cet objectif.

Il convient d'arriver à déterminer ce qui doit être payé par les uns et par les autres afin que le nombre de personnes concernées diminue. Dans le cas contraire, comme le disait Michel Mercier tout à l'heure, il faudrait se demander si notre pays ne souffre pas d'un mal profond et n'a pas, avec le travail, une relation qui ne serait pas comparable à celle de nos voisins. Il s'agit donc d'un problème de cohésion nationale.

Même si ce transfert de compétences ne relève pas de mes attributions, j'y apporterai un soin tout particulier puisque j'aurai eu à le défendre devant vous. Je m'appliquerai les exigences de sincérité et de transparence évoquées par M. le président de la commission des finances qui faisait écho aux propos de M. le rapporteur général.

Quand j'entends que les préfets disent qu'ils n'ont pas de fonctionnaires attachés à l'exercice de fonctions de l'Etat, le ministre du budget que je suis s'en réjouit. Si l'action de l'Etat peut désormais s'exercer sans personnels, j'en prendrai acte très rapidement ! (Rires.)

Nous essaierons, comme l'ont souhaité M. le rapporteur général et M. Alain Vasselle, de nous fonder sur une évaluation neutre, globale, suivie et homogène sur l'ensemble des départements, notamment s'agissant des personnels. Nous devrions obtenir un résultat satisfaisant.

En tout état de cause, le Sénat et le Gouvernement se reverront - je ne sais pas dans quelles conditions, mais vous aurez plus de chances que moi de pouvoir le faire ! - dans un an sur ce sujet. Il sera alors intéressant de faire le point.

Le Gouvernement souhaite que ce transfert de compétences soit réussi, parce que ce qui compte, c'est de réduire le nombre de personnes éligibles au RMI et à l'ASS et de favoriser l'insertion de ces allocataires, le tout dans la sincérité et la transparence afin que cette génération de transferts de compétences se fasse dans des conditions satisfaisantes pour les deux parties, l'Etat et les collectivités locales, (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)