article l. 332-8 du code de la consommation

M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 387, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par le V de cet article pour l'article L. 332-8 du code de la consommation :

« Le juge statue sur les éventuelles contestations de créances et prononce la liquidation judiciaire du patrimoine personnel du débiteur dont sont exclus les biens meublants nécessaires à la vie courante et les biens non professionnels indispensables à l'exercice de son activité professionnelle. Il se prononce, le cas échéant, au vu du rapport rendu par le mandataire dans un délai de quatre mois à compter de sa désignation. »

L'amendement n° 256, présenté par MM. Mano, Dauge et Raoul, Mme San Vicente, M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :

« Dans la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé par le V de cet article pour insérer un article L. 332-8 dans le code de la consommation, supprimer les mots : "nécessaires à la vie courante". »

L'amendement n° 103, présenté par M. Hyest, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

« Compléter la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé par le V de cet article pour insérer un article L. 332-8 dans le code de la consommation par le mot : "professionnelle". »

La parole est à M. le ministre, pour présenter l'amendement n° 387.

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Pour les raisons déjà évoquées à propos de l'amendement de M. Mano, il a été prévu que le mandataire soit facultatif lorsqu'il n'était pas utile et que, notamment, quelqu'un d'autre puisse être désigné sur une liste habilitée.

Il fallait donc en tirer les conclusions afin de permettre au juge de faire quelques opérations en lieu et place du mandataire.

Tel est l'objet de cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Mano, pour présenter l'amendement n° 256.

M. Jean-Yves Mano. Cet amendement tend à préciser les notions de « biens meublants », par rapport à la référence « nécessaires à la vie courante », qui peut être source d'ambiguïté.

En effet, qu'entend-on exactement par « meubles nécessaires à la vie courante » ? Déjà, la définition des meubles meublants figurant à l'article 534 du code civil est plus large et plus explicite que celle qui est retenue dans le projet de loi, qui vise les meubles nécessaires à la vie courante. Comme le Conseil économique et social, nous estimons souhaitable de nous en tenir à la notion de « biens meublants » plutôt que d'avancer la nouvelle notion de biens de meubles courants, qui est source d'ambiguïté et de nature à favoriser des problèmes d'interprétation.

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 103.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis. Comme il est satisfait par l'amendement n° 387 du Gouvernement, auquel la commission des lois est favorable, je le retire.

M. le président. L'amendement n° 103 est retiré.

Quel est l'avis de la commission des lois sur l'amendement n° 256 ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis. Tous nos collègues connaissent par coeur l'article 534 du code civil et savent que les « biens meublants nécessaires à la vie courante » sont une notion bien connue en matière de procédure d'exécution.

Si seuls les « meubles meublants » figurent dans cet article du code de la consommation, il faudra ne plus saisir les « meubles destinés à l'usage et à l'ornement des appartements, comme tapisseries, lits, sièges, glaces, pendules, tables, porcelaines et autres objets de cette nature.

« Les tableaux et les statues qui font partie du meuble d'un appartement y sont aussi compris, mais non les collections de tableaux qui peuvent être dans les galeries ou pièces particulières.

M. Hilaire Flandre. C'est pour Fabius !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis. « Il en est de même des porcelaines : celles seulement qui font partie de la décoration d'un appartement sont comprises sous la dénomination de meubles meublants ».

Il s'agit d'une notion différente qui ne s'applique pas ici. Il faut garder la notion prévue dans le texte du Gouvernement.

M. Hilaire Flandre. Absolument !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis. L'avis de la commission des lois est donc défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Le Gouvernement considère que « les meubles nécessaires à la vie courante » sont plus adaptés. C'est déjà une exception qui était souhaitable, et je crois que les tapisseries n'ont pas grand chose à y faire.

L'avis est donc défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 387.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'amendement n° 256 n'a plus d'objet.

L'amendement n° 264, présenté par MM. Mano, Dauge et Raoul, Mme San Vicente, M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :

« Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le V de cet article pour insérer un article L. 332-8 dans le code de la consommation, supprimer les mots : "qui peut être le mandataire". »

La parole est à M. Jean-Yves Mano.

M. Jean-Yves Mano. Cet amendement se justifie par son texte même. Il vise à éviter une confusion des genres.

M. le président. Quel est l'avis de la commission des lois ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis. M. Mano a raison en ce qui concerne les procédures collectives pour les entreprises ; d'ailleurs, c'est interdit par la loi. Mais je crois qu'il n'y a vraiment aucun risque de conflit d'intérêts comme en cas de liquidation d'une entreprise.

En outre, il faut éviter d'alourdir et de renchérir les procédures. C'est l'un des soucis du Gouvernement au sujet de la mise en place de cette nouvelle procédure de rétablissement personnel : il faut vraiment qu'elle coûte le moins cher possible pour ne pas grever encore l'actif.

Je suis donc très défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 264.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 104, présenté par M. Hyest, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

« Remplacer la seconde phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le V de cet article pour insérer un article L. 332-8 dans le code de la consommation par trois phrases ainsi rédigées :

« Le jugement qui prononce la liquidation emporte de plein droit dessaisissement du débiteur de la disposition de ses biens. Ses droits et actions sur son patrimoine personnel sont exercés pendant toute la durée de la liquidation par le liquidateur. Ce dernier rend compte de sa mission au juge dans des conditions fixées par décret. »

La parole est à M. Jacques Hyest, rapporteur pour avis.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis. Cet amendement tend à éviter une référence au code du commerce et à prévoir le dessaisissement pour le débiteur de la disposition de ses biens à compter du jugement prononçant la liquidation : il vaut mieux éviter de citer le code du commerce dans le cadre d'une procédure purement civile concernant des personnes physiques.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 104.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 388, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

« Supprimer les deuxième, troisième et quatrième phrases du troisième alinéa du texte proposé par le V de cet article pour l'article L. 332-8 du code de la consommation. »

La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Il s'agit d'un amendement de simplification de la procédure portant à la fois sur les délais et sur la méthode de vente. Elle doit pouvoir se faire à l'amiable.

M. le président. Quel est l'avis de la commission des lois ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis. Favorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Mano, pour explication de vote.

M. Jean-Yves Mano. Au motif de rendre la procédure de rétablissement personnel plus simple et plus efficace, le Gouvernement supprime purement et simplement une disposition importante, adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la protection du logement du débiteur.

L'Assemblée nationale a prévu un dispositif qui associe étroitement le débiteur lorsqu'il s'agit de la cession d'un bien ou d'un droit immobiliers. Dans ce cas, le liquidateur doit notifier au débiteur les conditions de vente projetées et un délai incompressible d'un mois doit s'écouler avant que la vente puisse être effectivement conclue. Au cours de ce délai, le débiteur peut, le cas échéant, demander au juge d'interrompre la réalisation de la vente et ce dernier peut interrompre la vente s'il estime le prix proposé insuffisant.

Il convient de privilégier tout ce qui peut permettre de conserver le logement et de s'assurer, en cas de vente, que le débiteur propriétaire n'est pas lésé.

La question du logement est sensible. Le débat sur les créances prioritaires, notamment sur les créances de loyers lorsque la priorité est accordée en contrepartie du maintien dans le logement, en témoigne. Ce sujet est important.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 388.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 389, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le dernier alinéa du texte proposé par le V de cet article pour l'article L. 332-8 du code de la consommation :

« Le liquidateur procède à la répartition du produit des actifs et désintéresse les créanciers suivant le rang des sûretés assortissant leurs créances. »

L'amendement n° 297, présenté par MM. Schosteck et Cléach, est ainsi libellé :

« Compléter la dernière phrase du dernier alinéa du texte proposé par le V de cet article pour l'article L. 332-8 du code de la consommation par les mots : "sous réserve de l'application des dispositions de l'article L. 333-3-2". »

L'amendement n° 261, présenté par MM. Mano, Dauge et Raoul, Mme San Vicente, M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :

« Compléter le dernier alinéa du texte proposé par le V de cet article pour insérer un article L. 332-8 dans le code de la consommation par une phrase ainsi rédigée :

« L'intervention du liquidateur est prise en charge au titre de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. »

La parole est à M. le ministre, pour présenter l'amendement n° 389.

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Cet amendement a pour objet de préciser les termes du dernier alinéa de l'article L. 332-8 du code de la consommation.

La procédure de rétablissement personnel doit obéir à des impératifs de rapidité et de simplicité. Une fois la vente des biens effectuée par le liquidateur, il paraît donc cohérent de confier à celui-ci la répartition du produit des actifs, sous le contrôle du juge de l'exécution.

N'oublions pas qu'il s'agit là de situations où il n'y a, très franchement, que peu de chose à répartir !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Schosteck, pour présenter l'amendement n° 297.

M. Jean-Pierre Schosteck. Il paraît nécessaire, dans les procédures de traitement du surendettement, de rendre les dettes locatives des bailleurs sociaux prioritaires par rapport aux crédits à la consommation.

Pour être synthétique, on pourrait dire qu'il semble tout de même plus important de rendre prioritaires les dettes auprès des bailleurs sociaux, lesquelles, je le rappelle, sont en quelque sorte indirectement garanties par les collectivités territoriales, sur celles qui sont contractées auprès de Cofinoga - je n'ai rien contre Cofinoga, ce n'est qu'un exemple.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Mano, pour présenter l'amendement n° 261.

M. Jean-Yves Mano. Il s'agit d'un amendement de coordination avec l'amendement n° 260, qui prévoyait que l'intervention du mandataire était prise en charge au titre de l'aide juridictionnelle et sur lequel le rapporteur a émis un avis défavorable !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis. Oui, parce qu'il est satisfait par la loi de 1991 !

M. le président. Quel est l'avis de la commission des lois ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis. Je suis favorable à l'amendement n° 389 du Gouvernement.

M. Schosteck a posé une vraie question, mais je crois que, si nous abordons aujourd'hui la question des sûretés pour en modifier l'ordre ou en créer de nouvelles, nous ne nous en sortirons pas ! Il existe déjà un régime des sûretés et un régime des créanciers. En outre, le juge pourra apprécier la bonne foi des créanciers et reconnaître qu'une créance n'est pas bonne, car cela arrive.

Pourquoi rendre les bailleurs sociaux prioritaires, par exemple, sur les bailleurs privés ? Dans les deux cas, il s'agit de la situation du locataire vis-à-vis de son propriétaire ! Mon cher collègue, un tel système serait ingérable.

Remettre en cause - vous me direz qu'on peut toujours le faire : comme l'un de nos collègues le soulignait tout à l'heure, le législateur peut tout faire ! - tout le régime des sûretés, des hypothèques, des privilèges, par un simple amendement, je ne m'en sens pas capable.

Je ne peux donc pas donner un avis favorable sur l'amendement n° 297.

M. Jean-Pierre Schosteck. C'est dommage !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis. Oui, c'est dommage, mais comprenez que cela soulève trop de difficultés !

M. Mano a dit lui-même que j'étais défavorable à l'amendement n° 261, non pas du tout que l'intervention du liquidateur ne puisse pas être prise en charge au titre de l'aide juridictionnelle, mais tout simplement parce que c'est le droit commun en matière d'aide juridictionnelle. Il est donc inutile de le préciser à chaque article.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Même avis que la commission.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Schosteck, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Schosteck. J'ai entendu les arguments, mais je n'arrive pas à être convaincu. Je comprends bien qu'il faille globaliser, tout traiter ensemble, ne pas faire de cas particulier... Il se trouve tout de même que, s'agissant des bailleurs sociaux, deux observations s'imposent.

La première, c'est qu'il s'agit tout de même d'argent public,...

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis. C'est l'argent des locataires !

M. Jean-Pierre Schosteck. ... et qu'il ne va pas rentrer, pesant d'autant sur les autres locataires, retardant éventuellement les travaux nécessaires dans les immeubles... C'est donc du gâchis, et c'est la raison pour laquelle j'ai illustré mon propos en citant une maison de crédit, contre laquelle vous avez compris que je n'ai par ailleurs aucun grief particulier.

Ma deuxième observation, c'est que le créancier bailleur social n'est en aucune façon responsable d'une telle dette. En effet, si les établissements de crédit pratiquent un démarchage parfois très exagéré, c'est leur choix : ils se sont mis tout seuls dans cette situation, et personne ne les a contraints à consentir des prêts à des personnes.

A contrario, les bailleurs sociaux sont, d'une certaine manière, contraints d'accepter des locataires qui sont choisis par les différentes instances compétentes, que ce soit le préfet, le 1 % ou le maire. Ce n'est donc pas aux gestionnaires de subir une situation dont ils ne sont aucunement responsables, à la différence des organismes de crédit ou des banques qui ont volontairement accordé des prêts !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 389.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, les amendements n°s 297 et 261 n'ont plus d'objet.

Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 332-8 du code de la consommation.

(Ce texte est adopté.)

 
 
 

ARTICLE L. 332-9 DU CODE DE LA CONSOMMATION

M. le président. L'amendement n° 105, présenté par M. Hyest, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le texte proposé par le V de cet article pour insérer un article L. 332-9 dans le code de la consommation :

« Art. L. 332-9. - Lorsque l'actif réalisé est suffisant pour désintéresser les créanciers, le juge prononce la clôture de la procédure. Lorsque l'actif réalisé est insuffisant pour désintéresser les créanciers ou lorsque le débiteur ne possède rien d'autre que des biens meublants nécessaires à la vie courante et des biens non professionnels indispensables à l'exercice de son activité professionnelle, le juge prononce la clôture pour insuffisance d'actif.

« La clôture entraîne l'effacement de toutes les dettes non professionnelles du débiteur, à l'exception de celles dont le prix a été payé au lieu et place du débiteur par la caution ou le coobligé.

« Le juge peut ordonner des mesures de suivi social du débiteur. »

Le sous-amendement n° 180 rectifié bis, présenté par M. Deneux, Mmes G. Gautier et Gourault, est ainsi libellé :

« Compléter le deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 105 pour l'article L. 332-9 du code de la consommation par deux phrases ainsi rédigées :

« Le bénéfice de cette mesure d'effacement ne peut dépasser cinq fois le montant annuel du plafond de la sécurité sociale. En cas de passif résiduel, le juge peut mettre en oeuvre la procédure prévue au deuxième alinéa de l'article L. 332-10. »

La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 105.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis. Par cohérence, cet amendement vise à la réécriture du texte proposé pour l'article L. 331-9 du code de la consommation.

M. le président. La parole est à M. Marcel Deneux, pour présenter le sous-amendement n° 180 rectifié bis.

M. Marcel Deneux. La création de la procédure de rétablissement personnel vise à permettre aux publics en grande difficulté financière et sociale de bénéficier d'un effacement des dettes en vue de faciliter leur retour à une vie économique normale.

Afin de réserver le bénéfice de cette procédure exorbitante du droit commun aux plus démunis, il est proposé d'instaurer un plafonnement des sommes effacées correspondant à cinq fois le montant du plafond annuel de la sécurité sociale. Le montant actuel de ce plafond étant de 29 184 euros, cela représente donc une somme de l'ordre de 145 000 euros.

M. le président. Quel est l'avis de la commission des lois ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis. Ce sous-amendement vise à réserver les situations les plus modestes, soit. Mais, à partir du moment où l'on prend en compte les accidents de la vie, on doit garder à l'esprit qu'il peut très bien arriver qu'une personne qui est dans une situation extrêmement aisée demande demain le RMI, et que le passif sera alors plus important. Et on lui dira qu'elle n'y a pas droit ?

Il n'est pas raisonnable de fixer un plafond, même si je comprends bien l'intention, qui est de protéger ceux qui ont prêté et vont y perdre. En outre, le plafonnement est inutile : que se passera-t-il si le débiteur n'a pas l'argent nécessaire pour payer le solde ? On lui dira qu'on va continuer à le poursuivre ! S'il n'y a rien à poursuivre, cela ne changera rien !

Il faut laisser au juge d'apprécier la bonne foi, je l'ai rappelé, puis, en fonction de l'actif disponible, de procéder le cas échéant à une liquidation, comme cela se fait pour toute personne, notamment en Alsace-Mosellle. Fixer un plafond, ce serait avant toute chose limiter les pouvoirs du juge, ce qui ne me paraît pas sain.

Pour toutes ces raisons, la commission des lois a émis un avis défavorable sur le sous-amendement n° 180 rectifié bis.

M. Hilaire Flandre J'espère qu'elle sait ce qu'elle fait !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Par définition, les accidents peuvent être brutaux, excessifs !

La communauté bancaire a été en quelque sorte traumatisée à l'idée que le président d'un grand groupe français pourrait passer à travers les mailles du filet et, invité par trois grands présidents de banque, j'ai pu constater qu'ils appelaient cela l'« amendement anti-Messier ».

L'existence d'un seuil finit toujours par aller contre les bonnes raisons qui ont motivé son instauration. Nous avions envisagé cette solution, mais nous avions imaginé divers cliquets. En réalité, il faut lire les textes à l'envers : un plafonnement est toujours utilisé comme une autorisation et devient un droit de tirage quasi automatique.

Non, le juge est là pour vérifier la bonne foi, et il est hors de question que celle-ci ne soit pas le critère décisif.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis. Exactement !

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. C'est la raison pour laquelle nous sommes fondamentalement défavorables au sous-amendement n° 180 rectifié bis, même si nous sommes conscients du fait qu'il faut être prudent. J'ai d'ailleurs dit dans la discussion générale que nous avions l'intention de réunir les procureurs de la République dès avant Noël pour les rendre très attentifs aux risques de dérives, car il y a une grande différence en effet entre la procédure judiciaire et la procédure administrative : la fraude au jugement et la constitution notoire d'insolvabilité n'existent pas dans les commissions de surendettement.

Le droit français est parfaitement adapté au traitement de ces sujets. Aussi, attention à ne pas faire d'un seuil un vrai droit de tirage !

Le Gouvernement est donc défavorable au sous-amendement, mais il est favorable à l'amendement de la commission.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 180 rectifié bis.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 105.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, le texte proposé pour l'article L. 332-9 du code de la consommation est ainsi rédigé.

 
 
 

ARTICLE L. 332-10 DU CODE DE LA CONSOMMATION

M. le président. Je suis saisi de six amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 106, présenté par M. Hyest, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

« Supprimer le texte proposé par le V de cet article pour insérer un article L. 332-10 dans le code de la consommation. »

L'amendement n° 390, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le texte proposé par le V de cet article pour insérer un article L. 332-10 dans le code de la consommation :

« Art. L. 332-10 - A titre exceptionnel, si, au vu du rapport du mandataire, le juge estime que la liquidation judiciaire peut être évitée, il établit, suivant les propositions du mandataire, un plan comportant, le cas échéant, les mesures visées à l'article L. 331-7.

« Le jugement qui arrête le plan le rend opposable à tous. La durée du plan est fixée par le juge. Elle ne peut excéder dix ans. En cas d'inexécution du plan, le juge en prononce la résolution. »

L'amendement n° 371, présenté par M. Loridant, Mmes Terrade, Beaufils et Didier, MM. Coquelle, Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le début de la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le V de cet article pour l'article L. 332-10 du code de la consommation :

« Lorsque le débiteur ne possède rien d'autre que des biens meublants et des biens non professionnels indispensables à l'exercice de son activité,... »

L'amendement n° 257, présenté par MM. Mano, Dauge et Raoul, Mme San Vicente, M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :

« Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le V de cet article pour insérer un article L. 332-10 dans le code de la consommation, supprimer les mots : "nécessaires à la vie courante". »

L'amendement n° 146, présenté par M. Doligé, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

« Supprimer le second alinéa du texte proposé par le V de cet article pour l'article L. 332-10 du code de la consommation. »

L'amendement n° 266, présenté par MM. Mano, Dauge et Raoul, Mme San Vicente, M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :

« Au début de la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le V de cet article pour insérer un article L. 332-10 dans le code de la consommation, supprimer les mots : "A titre exceptionnel". »

La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 106.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis. Le souci de la commission était d'éviter qu'on ne judiciarise à l'excès le traitement du surendettement, même dans les cas exceptionnels. Admettre que le juge puisse faire des plans conventionnels de redressement revient en fin de compte à priver en partie les commissions de surendettement de leur raison d'être. Il ne devrait donc pas y avoir de procédure de redressement personnel lorsque la situation n'est pas irrémédiablement compromise.

Néanmoins, il se peut que le travail ait déjà été fait par le mandataire. Revenir devant la commission de surendettement alors que tous les éléments sont réunis serait alors inutile. Dans ce cas, à condition qu'il n'élabore pas un plan conventionnel, car cela n'aurait pas de sens, le juge tranche le litige et établit un plan de redressement, ce qui permet de ne pas allonger les procédures et de les simplifier.

Monsieur le président, je retire l'amendement n° 106 au bénéfice de l'amendement n° 390 du Gouvernement.

M. le président. L'amendement n° 106 est retiré.

La parole est à M. le ministre, pour présenter l'amendement n° 390.

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Lorsque l'on est devant le juge, c'est-à-dire en procédure collective ou collectivisée des créanciers, et qu'il apparaît qu'un plan d'apurement pourrait éviter la liquidation pure et simple, il faut recourir à cette solution.

Cela peut être le cas quand un plan conventionnel n'a pu être établi - par exemple parce que l'ensemble des créanciers n'a pas été sollicité ou parce qu'il y a des créances fiscales -, mais que la liquidation n'est pas pour autant à coup sûr nécessaire.

Il s'agit de cas exceptionnels : je crois m'en être bien expliqué avec la commission, et c'est pourquoi j'invite le Sénat à voter l'amendement n° 390.

M. le président. La parole est à M. Paul Loridant, pour présenter l'amendement n° 371.

M. Paul Loridant. Cet amendement n° 371 porte sur la question de la procédure simplifiée de rétablissement personnel.

Signe de la précipitation avec laquelle le présent projet de loi a finalement été présenté devant notre assemblée, nous nous trouvons face à une proposition de suppression de la procédure par l'amendement de la commission, qui vient d'ailleurs d'être retiré, de réécriture de l'article L. 332-10 par l'amendement du Gouvernement et d'amélioration par notre amendement n° 371, qui tombera si celui du Gouvernement est adopté.

En l'occurrence, il s'agit concrètement de faire en sorte que des garanties soient accordées au débiteur ne disposant que du minimum vital.

Le texte de l'amendement gouvernemental fait expressément référence à l'évitement de la liquidation, ce qui change assez profondément le sens de l'article L. 332-10. Les cas patents d'insuffisance d'actifs seront-ils par nature compris dans le périmètre délimité par cet article ?

Si tel est le cas, nous aurions quelque préférence pour l'amendement n° 390. Dans le cas contraire, vous vous doutez bien que nous ne pourrions le suivre.

Nous souhaiterions en particulier que les précisions fort utiles apportées par le second alinéa du texte adopté par l'Assemblée nationale figurent encore dans le texte de l'article L. 332-10.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Mano, pour présenter l'amendement n° 257.

M. Jean-Yves Mano. C'est un amendement de coordination par rapport à l'amendement déposé à l'article L. 332-8 : il est préférable de s'en tenir à la notion de « meubles meublants », l'expression « meubles nécessaires à la vie courante » pouvant être source d'ambiguïté.

M. le président. La parole est à M. Eric Doligé, rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 146.

M. Eric Doligé, rapporteur pour avis. L'amendement n° 146 étant satisfait par l'amendement du Gouvernement, je le retire.

M. le président. L'amendement n° 146 est retiré.

La parole est à M. Jean-Yves Mano, pour présenter l'amendement n° 266.

M. Jean-Yves Mano. La mission de conciliation a un caractère exceptionnel. A nos yeux, il ne s'agit pas de méconnaître le rôle essentiel joué par les commissions de surendettement ni le fait que le juge de l'exécution ait pour mission principale de trancher les litiges portés devant lui et de statuer sur les procédures de rétablissement personnel.

Mais l'article L. 332-10 nouveau du code de la consommation vise le cas où il ressortirait du rapport du mandataire que la liquidation judiciaire peut être évitée. Dans ce cas, le juge de l'exécution doit être à même de chercher à concilier les parties en vue d'élaborer un plan de redressement. Il y va de l'intérêt du débiteur. En effet, cette procédure offre l'avantage de permettre l'élaboration d'un plan qui est opposable à tous, contrairement au plan conventionnel traditionnel, qui n'est opposable qu'aux parties, aux créanciers signalés par le débiteur ou avisés par la commission.

En raison de l'objectif recherché, cette faculté devrait même faire partie intégrante de la procédure et non être ouverte seulement à titre exceptionnel. Le débat sur le degré de transposition du dispositif de la faillite civile dans le droit commun du traitement des situations de surendettement est certes intéressant. Toutefois, il demeure secondaire au regard de l'objectif assigné dès l'origine au dispositif législatif de traitement du surendettement des particuliers et des familles.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis. Sur l'amendement n° 371, la commission émet un avis défavorable, car il est contraire à l'amendement n° 390 du Gouvernement. En fait, le texte prévoit des dispositifs simplifiés quand il n'y a pas d'actif. Nous n'avons pas supprimé les dispositions relatives aux débiteurs qui n'ont aucun actif, nous les avons seulement déplacées à un autre endroit du texte.

Quant aux notions de « meubles nécessaires à la vie courante » et de « meubles meublants », je vous épargnerai, monsieur Mano, une deuxième lecture du code civil, bien qu'il soit très intéressant et marqué d'une certaine poésie, mais vous comprendrez que la commission soit défavorable à l'amendement n° 257.

Enfin, je suis tout à fait défavorable à l'amendement n° 266.

La procédure de la conciliation doit rester exceptionnelle, sinon on va tout réjudiciariser.

M. Dominique Braye. Absolument !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis. Ou bien il y a liquidation et rétablissement personnel, ou bien il y a redressement judiciaire. On entre alors parfaitement dans le système de faillite civile. Nous n'allons pas rouvrir le débat à ce sujet, mais je crois que supprimer « à titre exceptionnel » reviendrait à tout réjudiciariser et, dans trois ans, on entendrait certainement de nouveau qu'il faut une procédure moins judiciaire !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué. Malgré une vue moins pessimiste que M. le rapporteur, le Gouvernement suit son avis sur l'ensemble de ces amendements.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 390.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, le texte proposé pour l'article L. 332-10 du code de la consommation est ainsi rédigé et les amendements n°s 371, 257 et 266 n'ont plus d'objet.

M. Paul Loridant. Dommage !