SEANCE DU 16 DECEMBRE 2002


M. le président. « Art. 44. - I. - La loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville est ainsi modifiée :
« 1° L'article 12 est ainsi modifié :
« a) Le dernier alinéa du IV est supprimé ;
« b) Le premier alinéa du V bis est complété par une phrase ainsi rédigée : "Pour les entreprises de moins de cinq salariés, le bénéfice de l'exonération est maintenu de manière dégressive au taux de 60 % du montant des cotisations, contributions et versements précités lors des cinq années qui suivent le terme de cette exonération, de 40 % les sixième et septième années et de 20 % les huitième et neuvième années" ;
« c) Le deuxième alinéa du V bis est complété par une phrase ainsi rédigée : "Pour les entreprises de moins de cinq salariés, le bénéfice de l'exonération est maintenu de manière dégressive au taux de 30 % du montant des cotisations, contributions et versements précités lors des cinq années qui suivent le terme de cette exonération, de 20 % les sixième et septième années et de 10 % les huitième et neuvième années" ;
« d) Il est inséré un V ter ainsi rédigé :
« V ter. - Par dérogation aux dispositions du V, l'exonération prévue au I est applicable aux gains et rémunérations versés par les entreprises mentionnées au troisième alinéa du III qui s'implantent ou sont créées dans une zone franche urbaine ou qui y créent un établissement à compter du 1er janvier 2003 et jusqu'au 31 décembre 2007. L'exonération est applicable pendant une période de cinq ans à compter de la date de l'implantation ou de la création pour les salariés mentionnés au IV présents à cette date. En cas d'embauche de salariés dans les conditions fixées au IV, l'exonération est applicable, pour ces salariés, pendant une période de cinq ans à compter de la date d'effet du contrat de travail dès lors que l'embauche intervient dans les cinq années suivant la date de l'implantation ou de la création. Sans préjudice de l'application des deux derniers alinéas du III et du III bis , l'exonération prévue au I est également applicable aux gains et rémunérations des salariés mentionnés au IV dont l'emploi est transféré en zone franche urbaine jusqu'au 31 décembre 2007.
« Pour les implantations ou créations intervenues entre le 1er janvier et le 31 décembre 2002, l'exonération prévue au I est applicable pendant cinq ans à compter du 1er janvier 2003 pour les salariés mentionnés au IV présents à cette date, sans préjudice de l'application des dispositions du III bis , celles prévues au dernier alinéa du III étant applicables aux emplois transférés à compter du 1er janvier 2003. » ;
« 2° L'article 13 est complété par un II ainsi rédigé :
« II. - A compter du 1er janvier 2003, pour les entreprises créées ou implantées dans une zone franche urbaine à compter du 1er janvier 2002, lorsque l'employeur a déjà procédé à l'embauche de deux salariés ouvrant droit à l'exonération prévue à l'article 12, le maintien du bénéfice de l'exonération prévue au I de l'article 12 est subordonné, lors de toute nouvelle embauche, à la condition qu'à la date d'effet de cette embauche :
« - le nombre de salariés remplissant les conditions fixées au IV de l'article 12 et résidant dans l'une des zones urbaines sensibles définies au 3 de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire de l'unité urbaine dans laquelle est située la zone franche urbaine soit égal au moins au tiers du total des salariés employés dans les mêmes conditions ;
« - ou que le nombre de salariés embauchés à compter de la création ou de l'implantation, employés dans les conditions fixées au IV de l'article 12 et résidant dans l'une des zones urbaines sensibles de l'unité urbaine considérée, soit égal au tiers du total des salariés embauchés dans les mêmes conditions, au cours de la même période.
« Les dispositions du présent II s'appliquent pendant une période de cinq ans à compter de la création ou de l'implantation de l'entreprise dans une zone franche urbaine.
« En cas de non-respect de la proportion mentionnée aux deuxième et troisième alinéas, constaté à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la date d'effet de l'embauche, l'exonération n'est pas applicable aux gains et rémunérations versés jusqu'à la date d'effet des embauches nécessaires au respect de cette proportion.
« Le maire peut fournir à l'employeur, à sa demande, des éléments d'information relatifs à la qualité de résident dans la zone nécessaires à la détermination de la proportion mentionnée aux deuxième et troisième alinéas. » ;
« 3° L'article 14 est ainsi modifié :
« a) Le I est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les entreprises de moins de cinq salariés, le bénéfice de l'exonération est maintenu de manière dégressive au taux de 60 % du montant des cotisations, contributions et versements précités lors des cinq années qui suivent le terme de cette exonération, de 40 % les sixième et septième années et de 20 % les huitième et neuvième années. » ;
« b) Il est complété par un III ainsi rédigé :
« III. - Les personnes exerçant, dans une zone franche urbaine définie au B du 3 de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 précitée, une activité non salariée non agricole mentionnée aux a et b du 1° de l'article L. 615-1 du code de la sécurité sociale sont exonérées, dans les conditions fixées par les deux premières phrases du I et par le II du présent article, sans préjudice de leurs droits aux prestations, du versement de leurs cotisations sociales au titre de l'assurance maladie et maternité pendant une durée d'au plus cinq ans à compter du 1er janvier 2003 ou à compter du début de la première année d'activité non salariée dans la zone franche urbaine s'il intervient au plus tard le 31 décembre 2007.
« Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables aux personnes, à l'exception des entreprises de moins de cinq salariés, qui bénéficient ou ont bénéficié de l'exonération prévue au I ou, sauf si elles se sont installées au cours de l'année 2002 dans une zone franche urbaine, de celle prévue par l'article 146 de la loi de finances pour 2002 (n° 2001-1275 du 28 décembre 2001). »
« II. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° L'article 44 octies est ainsi modifié :
« a) Dans le premier alinéa du I, il est inséré, avant la dernière phrase, une phrase ainsi rédigée : "Cependant, pour les entreprises de moins de cinq salariés, ces bénéfices sont soumis à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés à hauteur de 40 %, 60 % ou 80 % de leur montant selon qu'ils sont réalisés respectivement au cours des cinq premières, de la sixième et septième ou de la huitième et neuvième période de douze mois suivant cette période d'exonération" ;
« b) Il est complété par un V ainsi rédigé :
« V. - Les dispositions des I à IV sont applicables aux contribuables qui créent des activités entre le 1er janvier 2002 et le 31 décembre 2007 dans les zones franches urbaines visées au premier alinéa du I. Toutefois, pour les contribuables qui créent des activités dans ces zones en 2002, le point de départ de la période d'application des allègements est fixé au 1er janvier 2003.
« L'exonération ne s'applique pas aux contribuables qui créent une activité dans le cadre d'un transfert, d'une concentration ou d'une restructuration d'activités préexistantes exercées dans les zones franches urbaines ou qui reprennent de telles activités, sauf pour la durée restant à courir, si l'activité reprise ou transférée bénéficie ou à bénéficié du régime d'exonération prévu au présent article. » ;
« 2° L'article 1383 B est ainsi modifié :
« a) Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L'exonération s'applique dans les conditions prévues aux trois alinéas précédents aux immeubles affectés à une activité entrant dans le champ d'application de la taxe professionnelle et exercée pour la première fois entre le 1er janvier 2002 et le 1er janvier 2008. » ;
« b) Le quatrième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : "En cas de changement d'exploitant avant le 1er janvier 2008 au cours d'une période d'exonération ouverte après le 1er janvier 2002, l'exonération s'applique pour la période restant à courir et dans les conditions prévues pour le prédécesseur."
« 3° L'article 1466 A est ainsi modifié :
« a) Dans la première phrase du cinquième alinéa du I ter , après l'année : "2001", sont insérés les mots : "ou de l'une des opérations prévues au deuxième alinéa du I quater dans les zones mentionnées au premier alinéa du I quater " ;
« b) Dans la première phrase du deuxième alinéa du I quater , après le mot : "création", sont insérés les mots : "entre cette date et le 1er janvier 2008".
« III. - Pour l'application au titre de 2003 des dispositions des 2° et 3° du II, les délibérations contraires des collectivités locales ou de leurs établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre doivent intervenir au plus tard au 31 janvier 2003. Les entreprises, tenues de déclarer leurs bases d'imposition avant le 31 décembre 2002 dans les conditions prévues au a du II de l'article 1477, doivent demander, avant le 31 janvier 2003, pour chacun de leurs établissements, à bénéficier de l'exonération.
« L'Etat compense chaque année, à compter de 2003, les pertes de recettes résultant des dispositions du 2° du II pour les collectivités territoriales ou les établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre, dans les conditions prévues au III de l'article 7 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville.
« L'Etat compense chaque année, à compter de 2003, les pertes de recettes résultant des dispositions du 3° du II pour les collectivités territoriales, les établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre ou fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle, dans les conditions prévues aux cinquième, sixième et septième alinéas du B de l'article 4 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 précitée. »
La parole est à M. Pierre André, sur l'article.
M. Pierre André. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est un grand plaisir de constater, avec cet article 44, que le Gouvernement qui avait, par la voix de M. le Premier ministre, annoncé la relance des zones franches urbaines dans sa déclaration de politique générale tient parole. C'était un engagement de M. le Président de la République.
Monsieur le ministre, en cette période de fêtes, c'est un beau cadeau pour nos concitoyens habitant les quartiers les plus défavorisés. Vous avez réagi rapidement, et nous vous en félicitons.
Je constate aujourd'hui qu'il ne reste plus guère que quelques irréductibles pour critiquer les zones franches urbaines et leurs résultats.
M. Philippe Marini, rapporteur général. On va les entendre !
M. Pierre André. Ceux qui sont sur le terrain connaissent les résultats obtenus : des milliers d'emplois et d'entreprises créés, comme je l'ai souligné dans le rapport qui a été approuvé par la commission des affaires économiques en juin dernier.
Compte tenu de l'heure tardive, je vous dispenserai des chiffres et j'insisterai sur la revalorisation de l'image même des quartiers en difficulté, ce qui est le plus important.
J'ajoute qu'aucun des quarante-quatre maires bénéficiant d'une zone franche urbaine, quelle que soit leur sensibilité politique, ne s'est opposé ou ne s'opposera au redémarrage de ce dispositif dans sa ville. En fait, pour le gouvernement précédent ainsi que pour les détracteurs des villes franches, le seul défaut de ce dispositif était d'avoir été mis en place par le gouvernement d'Alain Juppé et par les ministres Jean-Claude Gaudin et Eric Raoult.
Je défendrai tout à l'heure deux amendements pour conforter la place de la très petite entreprise dans nos quartiers en difficulté, mais permettez-moi, monsieur le ministre, d'attirer votre attention sur deux sujets : d'une part, l'application de cette loi et, d'autre part, l'évaluation de ses résultats.
L'application de la loi doit être rapide. Sur ce point, j'ai constaté en élaborant mon rapport que si certaines URSSAF ont eu une action exemplaire d'information auprès des entreprises, d'autres, en revanche, ont appliqué la loi à reculons - c'est le moins que l'on puisse dire.
Le Gouvernement aurait intérêt à prendre des dispositions afin que les mêmes causes ne produisent pas les mêmes effets et que l'on ne retombe pas dans les errements du passé.
S'agissant de l'évaluation de la loi, force est de constater que les services de l'Etat ont été incapables, entre 1997 et 2002, de mettre au point une synthèse.
Il s'agit, à côté d'une question d'organisation, d'un véritable problème politique : voulons-nous, oui ou non, que les zones franches urbaines soient évaluées en temps réel afin qu'elles ne prêtent pas le flanc aux reproches infondés de leurs détracteurs ?
A ce titre, je souhaiterais que les services de l'Etat se mobilisent pour évaluer, en liaison avec les collectivités locales concernées, les effets des dispositions que nous allons voter. C'est aussi cela la coopération entre l'Etat central et la France d'« en bas » !
Je le dis d'autant plus fort que je trouve M. le ministre de la ville fort modeste dans ses déclarations. Il a en effet déployé une énergie farouche, surtout face à Bruxelles, pour relancer les zones franches urbaines.
Je n'oublie pas que, lors de mes rencontres au sein de la Commission, au début de cette année, l'hostilité était grande, car toutes les informations que possédaient les responsables découlaient du rapport tendancieux réalisé par l'Inspection générale des affaires sociales, l'IGAS, en 1998.
M. Philippe Marini. rapporteur général. Un rapport bien regrettable, en effet !
M. Pierre André. Mais nous savons que Jean-Louis Borloo est aussi un brillant avocat et qu'il a su convraincre M. Monti.
M. Paul Loridant. C'est la brosse à reluire !
M. Pierre André. Grâce aux mesures en faveur de la sécurité et de la rénovation urbaine - elles donnent à la politique de la ville une dimension économique et d'intégration par le travail - s'ouvre une nouvelle espérance chez les personnes les plus défavorisées de nos quartiers.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 25, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° 12, présenté par M. Pierre André, est ainsi libellé :
« A. - Dans le texte proposé par le b du 3° du I de cet article pour le III de l'article 14 de la loi du 14 novembre 1996, après les mots : "les conditions fixées" remplacer les mots : "par les deux premières phrases du I et par le II du présent article" par les mots : "par le I et le II du présent article".
« B. - Pour compenser les pertes de recettes résultant du A ci-dessus, compléter cet article par deux paragraphes additionnels ainsi rédigés :
« ... - Les pertes de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant de l'extension du bénéfice de la prolongation de l'exonération des cotisations sociales au titre de l'assurance maladie et maternité sont compensées par un relèvement à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
« ... - Les pertes de recettes éventuelles de l'Etat sont compensées à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux droits de consommation sur les tabacs prévues aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° 13 rectifié, présenté par M. Pierre André, est ainsi libellé :
« A. - Compléter le 3° du II de cet article par un c et un d ainsi rédigés :
« c) Le premier alinéa du I quater est complété par trois phrases ainsi rédigées : "Par exception aux dispositions prévues au cinquième alinéa du I ter, pour les entreprises de moins de cinq salariés, pendant la période de référence retenue pour la dernière année d'application du dispositif prévu au quatrième alinéa du I ter, le montant de l'abattement est égal, les cinq premières années, à 60 % de la base exonérée la dernière année d'application du dispositif prévu au quatrième alinéa du I ter. Il est ramené à 40 % les sixième et septième années et à 20 % les huitième et neuvième années. L'application de cet abattement ne peut conduire à réduire la base de l'imposition de l'année considérée de plus de 60 % de son montant les cinq premières années, 40 % les sixième et septième années et 20 % les huitième et neuvième années." ;
« d) Pour l'application des dispositions du c du 3° du II au titre de 2003, les délibérations mentionnées au cinquième alinéa du I ter doivent intervenir au plus tard au 31 janvier 2003. »
« B. - Après le II de cet article, insérer trois paragraphes additionnels ainsi rédigés :
« ... - L'Etat compense chaque année, à compter de 2003, les pertes de recettes résultant des dispositions du c du 3° du II pour les collectivités territoriales, les établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre ou fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle, dans les conditions prévues aux cinquième, sixième et septième alinéas du B de l'article 4 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville.
« ... - Avant la dernière phrase du premier alinéa du I de l'article 44 octies du code général des impôts, il est inséré une phrase ainsi rédigée : "L'effectif salarié s'apprécie au cours de la dernière période d'imposition au titre de laquelle l'exonération au taux de 100 % s'applique. Les salariés saisonniers ou à temps incomplet sont pris en compte au prorata de la durée du temps de travail prévue à leur contrat."
« ... - Les dispositions résultant de la compensation par l'Etat à compter de 2003 aux collectivités territoriales, établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre ou fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle des pertes de recettes résultant des dispositions du c du 3° du II sont compensées à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux droits de consommation sur les tabacs prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Thierry Foucaud, pour présenter l'amendement n° 25.
M. Thierry Foucaud. Cet article 44 a été introduit sur initiative gouvernementale, ce qui pose d'ailleurs la question de savoir pourquoi il ne figurait pas dans le texte initial. Cela aurait sans doute permis une expertise plus approfondie des enjeux mêmes de ce dispositif dit « d'incitation fiscale et sociale ».
On va certes nous traiter d'irréductibles, mais nous devons débattre !
Un récent rapport sénatorial rédigé sous la direction de notre collègue Pierre André encourageait à la prolongation du dispositif en vigueur au motif qu'il serait porteur de solutions pour l'emploi. Nous pourrions effectivement nous demander si les choix opérés en ces matières n'ont pas facilité le maintien d'une certaine activité économique dans les quartiers considérés. Mais d'autres paramètres doivent, à notre avis, être mesurés pour procéder à une lecture plus juste des faits.
On ne peut oublier que ce dispositif fiscal est élargi alors que le même collectif budgétaire prévoit plus de 200 millions d'euros d'annulations de crédits sur le budget du logement et que 58 millions d'euros de dépenses d'intervention du budget de la ville sont également annulés. Je dis tout cela pour ramener les choses à leur juste proportion.
Toute incitation fiscale ou sociale dévolue aux entreprises implantées dans les zones franches urbaines ne peut dissimuler l'insuffisance criante des crédits du développement urbain dans leur ensemble, notamment en matière de logement, d'éducation ou d'action sociale et culturelle.
Mes chers collègues, vous ne compenserez pas la suppression des emplois-jeunes par des mesures d'incitation fiscale ! Avec ces mesures, vous ne parviendrez pas à corriger des inégalités et à résoudre les problèmes sociaux et économiques dans les villes !
Un autre paramètre nous est fourni par l'INSEE : la situation sociale et économique des résidents des quartiers éligibles ne s'est pas améliorée dans la dernière période ; c'est notamment flagrant en région parisienne, où l'on constate un accroissement très sensible des inégalités de revenus entre les banlieues chic de l'ouest parisien et les zones urbaines sensibles, qu'il s'agisse de la banlieue nord comme de la vallée de la Seine.
Selon une étude conjointe de l'institut d'aménagement et d'urbanisme de la région d'Ile-de-France, de l'IAURIF, et de l'INSEE, des villes comme Mantes-la-Jolie, Sarcelles, la Courneuve ou Grigny connaissent un appauvrissement de leur population. Cela montre bien les limites réelles de la politique de la ville sur la durée.
Alors, chers collègues, en toute objectivité, quelques incitations fiscales, qui, d'ailleurs, créent des distorsions de concurrence entre entreprises, peuvent-elles suffire à répondre aux enjeux posés par cette « spatialisation » des inégalités, par cette « ghettoïsation » des quartiers qui laisse entre eux, dans un doux cocon, les plus riches et, entre eux aussi, dans la misère la plus noire, les plus pauvres ?
Nous ne le pensons pas. C'est pour ces motifs que nous estimons inutile cette extension du dispositif du pacte de relance pour la ville et que nous vous invitons à adopter cet amendement de suppression de l'article 44.
M. le président. La parole est à M. Pierre André, pour présenter les amendements n°s 12 et 13 rectifiés.
M. Pierre André. Ces deux amendements visent à renforcer et à maintenir la présence des très petites entreprises dans les secteurs difficiles. On s'est aperçu que le petit commerce et l'artisanat disparaissaient de ces secteurs, bien souvent pour des raisons de sécurité. Or, pour qu'il y ait encore une vie dans ces quartiers, il est nécessaire de maintenir une activité économique.
L'amendement n° 12 vise à étendre le bénéfice de la prolongation de l'exonération des cotisations sociales au titre de l'assurance maladie et maternité pour les personnes exerçant une activité non salariée non agricole dans les entreprises de moins de cinq salariés qui s'implanteront dans les zones urbaines à partir de 2002.
L'amendement n° 13 rectifié a pour objet, quant à lui, d'étendre au régime de la taxe professionnelle les exonérations des charges sociales patronales, les cotisations sociales personnelles, maladie et maternité et d'impôt sur les sociétés instaurées par l'article 44 pour les entreprises de moins de cinq salariés implantées dans les zones franches urbaines. Il tend également à préciser les modalités d'appréciation du seuil de moins de cinq salariés en matière d'impôt sur les sociétés. M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'analyse de la commission est beaucoup plus proche des orientations générales, des thèmes développés par M. Pierre André dans sa prise de parole sur l'article que des thèses défendues par M. Thierry Foucaud dans la présentation de son amendement.
J'espère que M. Foucaud ne m'en voudra pas d'émettre un avis défavorable sur son amendement. Nos divergences découlent du positionnement politique des uns et des autres : les uns croient aux vertus de l'incitation fiscale, tandis que les autres souhaitent agir davantage par la dépense publique directe. C'est une ligne de clivage comme une autre.
S'agissant des deux amendements présentés par M. Pierre André, la commission les approuve, car ils permettront des avancées utiles en apportant des précisions qui complètent opportunément l'article 44 qui nous a été transmis par l'Assemblée nationale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. S'agissant de l'amendement n° 25 de M. Thierry Foucaud, je citerai quelques chiffres très simples.
Le nombre d'entreprises présentes dans ces quartiers défavorisés a crû de 12 000 à plus de 20 000 sur une période de cinq ans, avec 6 000 créations d'entreprises. Ces seuls chiffres suffisent à justifiier un avis défavorable.
Monsieur Pierre André, j'ai écouté avec un grand intérêt votre intervention sur l'article 44, et c'est avec étonnement que j'ai appris que des services de l'URSSAF appliquaient avec difficulté, si j'ai bien compris, la loi de la République. Cela me paraît inimaginable parce que les services des impôts et le réseau du Trésor public qui collecte l'impôt sont des services qui obéissent à la loi de la République.
Je ne veux pas créer de polémique entre les différents réseaux, mais je ferai en sorte de transmettre à mon collègue en charge de ces questions l'information que vous m'avez donnée.
Avec l'amendement n° 12, monsieur le sénateur, vousproposez une sortie dégressive sur neuf ans du dispositif qui est proposé par le Gouvernement. Cette mesure va dans le sens des améliorations qui ont été apportées au dispositif élaboré par l'Assemblée nationale. J'émets donc un avis favorable sur cet amendement, et je lève le gage.
La position du Gouvernement est la même s'agissant de l'amendement n° 13 rectifié : il y est favorable, et il lève le gage. Je reprends ainsi l'expression que vous avez utilisée, monsieur le sénateur : il s'agit d'offrir une nouvelle espérance aux personnes les plus défavorisées de ces quartiers.
M. le président. Il s'agit donc des amendements n°s 12 rectifié et 13 rectifié bis.
La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote sur l'amendement n° 25.
M. Thierry Foucaud. Qu'allons-nous faire des 180 000 emplois-jeunes ? Il faut ouvrir le débat, parler des véritables enjeux et non pas se contenter de citer quelques chiffres, comme ce fut le cas toute cette journée !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Les collectivités locales n'ont pas vocation à embaucher tout le monde !
M. Thierry Foucaud. La question est d'autant plus importante que les jeunes concernés sont issus de ces quartiers ! Il faut aussi se demander comment nous allons aider ces quartiers en difficulté, surtout quand on sait que 58 millions d'euros de dépenses d'intervention du budget de la ville vont être annulés !
Tels sont les sujets sur lesquels le groupe CRC et moi-même aurions souhaité débattre à la fois avec la commission et le Gouvernement.
M. le ministre nous dit qu'il faut aider les entreprises dans les zones franches urbaines. Selon l'INSEE et d'autres organismes, cela ne rapporte rien en termes d'emplois. En fait, on s'aperçoit que rien n'est fait pour prolonger les emplois-jeunes, ce qui va laisser 180 000 jeunes « sur le carreau », notamment dans les quartiers difficiles. Et ce ne sont pas les 58 millions d'euros annulés qui leur permettront d'avoir une vie sociale digne dans ces quartiers !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 25.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12 rectifié.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 13 rectifié bis .

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 44, modifié.

(L'article 44 est adopté.)

Article 45