SEANCE DU 3 DECEMBRE 2002
M. le président.
« Art. 72. - I. - Il est institué un fonds d'aide à l'investissement des
services départementaux d'incendie et de secours. Il est doté de 45 millions
d'euros en autorisations de programme et en crédits de paiement.
« II. - Un décret fixe la liste des différentes catégories d'opérations
prioritaires pouvant bénéficier des subventions du fonds mentionné au I, les
fourchettes de taux de subvention applicables à chacune d'elles et les
conditions dans lesquelles ces subventions sont attribuées après avis d'une
commission comprenant notamment des élus représentant les conseils
d'administration des services départementaux d'incendie et de secours. »
La parole est à M. Robert Bret, sur l'article.
M. Robert Bret.
Ce matin, j'ai eu l'occasion de rendre hommage au courage et au dévouement des
sapeurs-pompiers, qui font un travail remarquable au service de l'ensemble de
la population. Ils le font dans des conditions bien souvent difficiles.
Pourtant, 191 000, soit 85 % d'entre eux, sont des volontaires. Pour toutes ces
raisons, ils méritent qu'on leur reconnaisse enfin un vrai statut, que soient
prises des mesures qui encouragent leur recrutement et leur formation. On sait
bien que, dans les conditions actuelles, beaucoup risquent de quitter leurs
fonctions, sans qu'il soit possible de les remplacer.
Il faut aussi entendre la demande des pompiers professionnels d'être reconnus
dans les professions dangereuses et insalubres.
Cela nécessite bien entendu des moyens.
La création d'un fonds d'aide à l'investissement des SDIS, doté d'un montant
de 45 millions d'euros, permet de pérenniser ce qui est, jusqu'à présent, une
fraction de la DGE. On sait bien que les collectivités locales ont besoin du
concours de l'Etat, monsieur le ministre.
Nous savons tous que les conséquences financières liées à la
départementalisation des SDIS, qui résulte de la loi du 3 mai 1996 et qui a été
étendue par la loi relative à la démocratie de proximité, se sont révélées très
lourdes pour les collectivités locales. Il est urgent de rechercher des
ressources nouvelles.
Je rappelle, pour mémoire, que notre groupe avait déposé, en 1999, une
proposition de loi visant à faire contribuer les compagnies d'assurances au
financement des dépenses d'investissement et de fonctionnement des SDIS. Nous
proposions l'instauration d'une taxe additionnelle - dont le montant ne
pourrait excéder 1 % - à la taxe sur les conventions d'assurances. En effet, la
mise en place des SDIS profitant aussi aux compagnies d'assurances, il est
légitime qu'elles apportent leur contribution. De même, il paraîtrait légitime
que des dispositions soient prises pour faire contribuer les entreprises à
risque.
Enfin, nous pensons que, tant sur le fond que sur la forme, l'amendement de la
commission des finances est bien meilleur que le texte du Gouvernement.
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° II-30, présenté par M. Mercier, au nom de la commission des
finances, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi cet article :
« A. - La section 2 du chapitre IV du titre II du livre IV de la première
partie du code général des collectivités territoriales est complétée par une
sous-section ainsi rédigée :
« Sous-section V. - Le fonds d'aide à l'investissement des services
départementaux d'incendie et de secours
«
Art. L. 1424-36-1.
- I. - Les crédits du fonds d'aide à
l'investissement des services départementaux d'incendie et de secours sont
attribués aux services départementaux d'incendie et de secours, par les préfets
des zones de défense dont ils ressortent, sous la forme de subventions pour la
réalisation d'une opération déterminée correspondant à une dépense réelle
d'investissement et concourant au financement des systèmes de communication ou
à la mise en oeuvre des schémas départementaux d'analyse et de couverture des
risques mentionnés à l'article L. 1424-7.
« II. - Une commission instituée auprès du préfet de zone de défense et
composée de représentants des conseils d'administration des services
départementaux d'incendie et de secours fixe chaque année la liste des
différentes catégories d'opérations prioritaires pouvant bénéficier des
subventions du fonds et, dans les limites fixées par décret, les taux minima et
maxima de subvention applicables à chacune d'elles.
« III. - Le préfet de zone de défense arrête chaque année, suivant les
catégories et dans les limites fixées par la commission, la liste des
opérations à subventionner ainsi que le montant de l'aide de l'Etat qui leur
est attribuée. Il en informe la commission.
« IV. - Un décret fixe les modalités d'application du présent article. »
« B. - Le fonds d'aide à l'investissement des services départementaux
d'incendie et de secours est doté de 45 millions d'euros en autorisations de
programme et en crédits de paiement. »
L'amendement n° II-46, présenté par M. Détraigne, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le II de cet article :
« II. - Un décret fixera le taux annuel de subvention sur la base du montant
des investissements constatés aux derniers comptes administratifs connus. »
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter l'amendement n°
II-30.
M. Michel Mercier,
rapporteur spécial.
Comme nous l'avons souligné et comme M. le ministre
vient de dire, la création d'un fonds d'aide à l'investissement des services
départementaux d'incendie et de secours est un premier pas dans la bonne
direction. En effet, ce que nous avions pu mettre en place précédemment était
forcément provisoire puisqu'il s'agissait principalement d'utiliser des crédits
qui n'avaient pas été consommés et qui arrivaient à leur fin. Toutes les autres
solutions qui ont été proposées pour financer les SDIS se sont révélées plus
des leurres que de véritables solutions. La création de ce fonds d'aide à
l'investissement des SDIS va donc réellement dans le bon sens. Ces 45 millions
d'euros seront bienvenus pour les services départementaux d'incendie et de
secours.
L'amendement que je présente, au nom de la commission des finances, a pour
objet de préciser les choses.
D'abord, il vise, en quelque sorte, à reconnaître ce fonds en l'inscrivant
dans le code général des collectivités territoriales. Ainsi, ce fonds deviendra
une des composantes de notre droit des collectivités locales.
Ensuite, une fois ce fonds définitivement créé, doté chaque année le mieux
possible, compte tenu de la situation générale du budget, l'amendement prévoit
que les crédits seront gérés de façon déconcentrée par les préfets des zones de
défense, qui ont une compétence en matière de sécurité, et selon une procédure
identique à celle qui prévaut pour la DGE des communes, c'est-à-dire un préfet
de zone de défense assisté d'une commission d'élus représentant les conseils
d'administration des SDIS.
Enfin, l'amendement précise que le fonds a pour objet de financer, d'une part,
les investissements servant à financer les systèmes de communication - si nous
avons un seul système de communication pour l'ensemble des forces de sécurité
dans notre pays, ce sera une très bonne chose - et, d'autre part, les
investissements destinés à la mise en oeuvre des schémas départementaux
d'analyse et de couverture des risques. Je rappelle que ces schémas
départementaux sont arrêtés par les préfets, sur avis conforme des conseils
d'administration des SDIS. Les autorités locales et les autorités déconcentrées
se mettent d'accord sur ce qui est nécessaire pour que les SDIS fonctionnent
bien. Il est bon que ce fonds aide à financer ces investissements.
Cet amendement a donc pour objet de conforter le fonds créé par le
Gouvernement et de préciser son mode de fonctionnement.
M. le président.
La parole est à M. Yves Détraigne, pour présenter l'amendement n° II-46.
M. Yves Détraigne.
Mon amendement vise à laisser une plus grande liberté aux conseils
d'administration des SDIS dans la détermination des investissements qu'ils
considèrent comme prioritaires. A une époque où nous parlons beaucoup de
décentralisation et de déconcentration, il serait de bonne politique de laisser
aux SDIS, qui, comme M. le ministre l'a rappelé tout à l'heure, sont des
services de proximité, la liberté de déterminer des investissements qu'ils
considèrent comme prioritaires compte tenu du contexte local qu'ils sont les
mieux à même d'apprécier.
C'est la raison pour laquelle je propose que le taux de subvention soit fixé
non par une autorité extérieure, mais en fonction des investissements constatés
dans le département au cours de l'exercice précédent.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° II-46 ?
M. Michel Mercier,
rapporteur spécial.
Je comprends bien le souci qu'a notre collègue M.
Détraigne de ne pas modifier le système que nous connaissions ces dernières
années, dans lequel était arrêté un taux de concours variant chaque année en
fonction du montant des investissements décidés par les SDIS. Par son
amendement, il propose que, plus les SDIS décident d'investir, plus le taux de
concours soit faible.
Ce mécanisme protège assez largement la liberté des SDIS, mais il est quelque
peu aveugle : il conduit à saupoudrer des sommes qui, certes, ne sont pas
négligeables, mais qui ne sont pas suffisamment importantes non plus pour que,
une fois qu'on a agité la sucrière, on s'aperçoive qu'il y a eu du sucre.
(Sourires.)
Le souci de préserver la liberté des élus qui motive l'amendement de M. Yves
Détraigne est tout à fait satisfait par les dispositions de l'amendement de la
commission des finances, qui tendent à associer doublement les élus des SDIS :
une première fois lors de l'élaboration du schéma départemental d'analyse et de
couverture des risques, au cours de laquelle les investissements lourds du SDIS
sont réellement décidés ; une seconde fois quand le préfet de zone arrête sa
décision en fonction de l'avis que lui rend une commission composée de
représentants des conseils d'administration des SDIS.
Le souci qu'a témoigné notre collègue M. Détraigne que les décisions soient
prises, à l'échelon local, par les élus responsable, me paraît tout à fait
légitime et louable, au moment où le processus de décentralisation est
relancé.
Cependant l'amendement n° II-46 est satisfait, je le répète, par l'amendement
de la commission. Je demande donc à son auteur de le retirer. Je serais sinon
navré de devoir aller plus loin.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n° II-30 et II-46 ?
M. Patrick Devedjian,
ministre délégué.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° II-30,
et ce pour trois raisons.
D'abord, l'adoption de cet amendement permettrait le rattachement de l'article
72 du projet de loi de finances au code général des collectivités
territoriales, et le juriste que je suis - avec une certaine connivence,
monsieur Mercier ! - y trouve une satisfaction tout intellectuelle, car c'est
un principe d'ordre juridique qui n'est pas négligeable.
Ensuite, la définition des opérations subventionnables qu'il contient renvoie
soit au schéma départemental d'analyse et de couverture des risques, soit au
financement des systèmes de communication, ce qui correspond très exactement à
l'utilisation que le Gouvernement souhaite faire du fonds d'aide à
l'investissement des SDIS.
Enfin, cet amendement vise à aménager le mode d'attribution des subventions en
le calquant sur celui de la DGE des communes, système qui a fait ses
preuves.
En ce qui concerne l'amendement n° II-46, je dirai simplement, à l'instar de
M. Mercier, que, l'amendement de la commission vous donne en grande partie
satisfaction monsieur Détraigne, et que, pour le reste, les deux amendements
sont contradictoires. Par conséquent, faites un beau geste ! Si vous retiriez
votre amendement, tout le monde serait content !
M. le président.
Monsieur Détraigne, l'amendement n° II-46 est-il maintenu ?
M. Yves Détraigne.
Compte tenu des avis concordants de M. le rapporteur spécial et de M. le
ministre, et du fait que l'amendement de la commission tient compte, dans la
répartition des schémas départementaux d'analyse et de couverture des risques,
de l'avis conforme des conseils d'administration des SDIS, je retire mon
amendement.
M. le président.
L'amendement n° II-46 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° II-30.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 72 est ainsi rédigé.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant la décentralisation et, par là même, l'examen des dispositions
concernant le ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des
libertés locales.
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