SEANCE DU 26 NOVEMBRE 2002
SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. ADRIEN GOUTEYRON
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Loi de finances pour 2003.
- Suite de la discussion d'un projet de loi (p.
1
).
M. le président.
Articles additionnels après l'article 12 (p. 2 )
Amendement n° I-40 de M. Joseph Ostermann. - MM. Joseph Ostermann, Philippe
Marini, rapporteur général de la commission des finances ; Alain Lambert,
ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire. - Retrait.
Amendement n° I-21 rectifié de M. Gérard Bailly. - MM. Charles Guené, le
rapporteur général, le ministre délégué. - Adoption de l'amendement insérant un
article additionnel.
Article 15. - Adoption (p.
3
)
Article 16 (p.
4
)
Amendement n° I-181 de M. Thierry Foucaud. - MM. Thierry Foucaud, le rapporteur
général, le ministre délégué. - Rejet.
Adoption de l'article.
Article 17 (p. 5 )
Amendement n° I-182 de M. Thierry Foucaud. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le
rapporteur général, le ministre délégué. - Rejet.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l'article 17 (p. 6 )
Amendement n° I-183 de M. Thierry Foucaud. - MM. Thierry Foucaud, le rapporteur
général, le ministre délégué. - Rejet.
Amendements identiques n°s I-67 de M. Gérard Miquel et I-184 de M. Thierry
Foucaud. - MM. Gérard Miquel, Thierry Foucaud, le rapporteur général, le
ministre délégué, Jean Chérioux. - Rejet des deux amendements.
Amendement n° I-185 de M. Thierry Foucaud. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le
rapporteur général, le ministre délégué, Jean Arthuis, président de la
commission des finances. - Rejet.
Article 18 (p. 7 )
MM. le rapporteur général, le ministre délégué.
Adoption de l'article.
Article additionnel après l'article 18 (p. 8 )
Amendement n° I-47 rectifié bis de M. Paul Girod, repris par la commission. - MM. le rapporteur général, le ministre délégué. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 19 (p. 9 )
Amendements n°s I-48 de M. Louis Souvet et I-186 de M. Thierry Foucaud. - M.
Louis Souvet, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le ministre
délégué. - Retrait de l'amendement n° I-48 ; rejet de l'amendement n° I-186.
Adoption de l'article.
Article 20. - Adoption (p.
10
)
Article 21 (p.
11
)
Amendements identiques n°s I-73 de M. Gérard Miquel et I-187 de M. Thierry
Foucaud. - MM. Jean-Pierre Demerliat, Thierry Foucaud, le rapporteur général,
le ministre délégué. - Rejet des deux amendements.
Adoption de l'article.
Article 22 (p. 12 )
Amendements n°s I-28 de M. Gérard César, I-112 rectifié de M. Serge Franchis et
I-221 du Gouvernement. - MM. Gérard César, Serge Franchis, le ministre délégué,
le rapporteur général. - Retrait des amendements n°s I-28 et I-112 rectifié ;
adoption de l'amendement n° I-221.
Amendements identiques n°s I-29 de M. Gérard César et I-110 de M. Serge
Franchis. - MM. Gérard César, Serge Franchis. - Retrait des deux
amendements.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 22 (p. 13 )
Amendements identiques n°s I-30 rectifié de M. Gérard César et I-111 de M. Serge Franchis. - MM. Gérard César, Serge Franchis, le rapporteur général, le ministre délégué. - Retrait des deux amendements.
Article 23 (p. 14 )
Amendements n°s I-16 rectifié de la commission et I-54 de M. Jacques Oudin. - MM. le rapporteur général, Jacques Oudin, le ministre délégué, Ambroise Dupont, Philippe Adnot, Yves Fréville, Alain Vasselle. - Retrait de l'amendement n° I-54 ; adoption de l'amendement n° I-16 rectifié rédigeant l'article.
Suspension et reprise de la séance (p. 15 )
PRÉSIDENCE DE M. BERNARD ANGELS
3.
Communication relative à une commission mixte paritaire
(p.
16
).
4.
Loi de finances pour 2003.
- Suite de la discussion d'un projet de loi (p.
17
).
Article 23 bis (p. 18 )
Amendements identiques n°s I-55 de M. Jacques Oudin et I-90 de M. Gérard
Miquel. - MM. Michel Doublet, Gérard Miquel, Philippe Marini, rapporteur
général de la commission des finances ; Alain Lambert, ministre délégué au
budget et à la réforme budgétaire ; Alain Vasselle, Pierre Hérisson, Paul
Loridant, Jean Arthuis, président de la commission des finances ; Christian
Bergelin. - Retrait de l'amendement n° I-55 ; rejet, par scrutin public, de
l'amendement n° I-90.
Adoption de l'article.
PRÉSIDENCE DE M. CHRISTIAN PONCELET
DÉBAT SUR LES RECETTES
DES COLLECTIVITÉS LOCALES (p.
19
)
MM. le président de la commission, le rapporteur général, Claude Haut, Michel
Mercier, Mme Marie-France Beaufils, MM. André Lardeux, Paul Girod, Alain
Fouché, Jean-Claude Peyronnet.
PRÉSIDENCE DE M. BERNARD ANGELS
MM. Yves Fréville, Thierry Foucaud, Louis de Broissia, Gérard Delfau, Bernard
Murat.
M. le ministre délégué.
Articles additionnels après l'article 2 (p. 20 )
Amendement n° I-26 de M. Jean-Pierre Schosteck. - MM. Bernard Fournier, le
rapporteur général, le ministre délégué. - Retrait.
Amendement n° I-60 de M. Gérard Miquel. - MM. Michel Sergent, le rapporteur
général, le ministre délégué. - Retrait.
Article 12 (p. 21 )
Amendement n° I-220 de la commission. - MM. le rapporteur général, le ministre
délégué. - Retrait.
Amendement n° I-172 de M. Thierry Foucaud. - MM. Thierry Foucaud, le rapporteur
général, le ministre délégué. - Retrait.
Adoption de l'article.
Article 13 (p. 22 )
M. le rapporteur général.
Amendements n°s I-173 de M. Thierry Foucaud et I-85 de M. Gérard Miquel. - Mme
Marie-France Beaufils, MM. Jean-Pierre Demerliat, le rapporteur général, le
ministre délégué. - Rejet des deux amendements.
Adoption de l'article.
Suspension et reprise de la séance (p. 23 )
PRÉSIDENCE DE M. SERGE VINÇON
Articles additionnels après l'article 13 (p.
24
)
Amendement n° I-126 rectifié
bis
de M. Jacques Valade et sous-amendement
n° I-224 de M. Yves Fréville ; amendement n° I-223 du Gouvernement. - MM.
Jean-Marie Vanlerenberghe, Yves Fréville, le ministre délégué, le rapporteur
général. - Retrait du sous-amendement n° I-224 et de l'amendement n° I-126
rectifié
bis
; adoption de l'amendement n° I-223 insérant un article
additionnel.
Amendements n°s I-86 et I-87 de M. Gérard Miquel. - MM. Michel Moreigne, le
rapporteur général, le ministre délégué. - Retrait des deux amendements.
Article 14 (p. 25 )
Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
Amendements n°s I-210, I-211 de M. Michel Mercier, I-119 rectifié de M. Bernard
Saugey, I-205 rectifié
bis,
I-206 rectifié
bis
de M. Jean-Marie
Vanlerenberghe, I-105 à I-107 de M. Yves Fréville et I-174 de M. Thierry
Foucaud. - MM. Michel Mercier, François Trucy, Jean-Marie Vanlerenberghe, Yves
Fréville, Mme Marie-France Beaufils, MM. le rapporteur général, le ministre
délégué, Thierry Foucaud. - Retrait des amendements n°s I-210, I-119 rectifié,
I-205 rectifié
bis
, I-211 et I-206 rectifié
bis
; rejet de
l'amendement n° I-174 ; adoption des amendements n°s I-105 à I-107.
MM. Philippe Adnot, Jean-René Lecerf.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 14 (p. 26 )
Amendement n° I-209 de M. Michel Mercier. - MM. Michel Mercier, le rapporteur
général, le ministre délégué. - Adoption de l'amendement insérant un article
additionnel.
Amendement n° I-118 rectifié de M. Jean-Claude Gaudin. - MM. François Trucy, le
rapporteur général, le ministre délégué, le président de la commission, Gérard
Miquel, Yves Fréville. - Rejet.
Amendement n° I-176 de M. Thierry Foucaud. - MM. Thierry Foucaud, le rapporteur
général, le ministre délégué. - Rejet.
Amendement n° I-177 de M. Thierry Foucaud. - MM. Thierry Foucaud, le rapporteur
général, le ministre délégué. - Rejet.
Amendement n° I-117 rectifié de M. Roland du Luart. - M. François Trucy. -
Retrait.
Amendements n°s I-72 rectifié
bis
de M. Gérard Miquel, I-42 de M. Gérard
Cornu et I-52 de M. Denis Badré. - MM. Gérard Miquel, Gérard Cornu, Louis
Moinard, le rapporteur général, le ministre délégué, le président de la
commission, Thierry Foucaud. - Retrait des amendements n°s I-42 et I-52 ; rejet
de l'amendement n° I-72 rectifié
bis.
Amendements n°s I-14 de la commission, I-88 de M. Gérard Miquel et I-175 de M.
Thierry Foucaud. - MM. le rapporteur général, Claude Haut, Thierry Foucaud, le
ministre délégué. - Retrait des trois amendements.
Amendement n° I-89 de M. Gérard Miquel. - MM. Michel Moreigne, le rapporteur
général, le ministre délégué. - Retrait.
Amendement n° I-179 de M. Thierry Foucaud. - Mme Marie-France Beaufils, MM. le
rapporteur général, le ministre délégué. - Rejet.
Amendement n° I-120 rectifié de M. Bernard Saugey. - MM. François Trucy, le
rapporteur général, le ministre délégué. - Retrait.
Amendement n° I-178 de M. Thierry Foucaud. - MM. Thierry Foucaud, le rapporteur
général, le ministre délégué. - Rejet.
Amendement n° I-15 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur général, le
ministre délégué. - Adoption de l'amendement insérant un article
additionnel.
Article 14 bis. - Adoption (p. 27 )
Renvoi de la suite de la discussion.
5.
Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution
(p.
28
).
6.
Dépôt d'un rapport
(p.
29
).
7.
Ordre du jour
(p.
30
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. ADRIEN GOUTEYRON,
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à dix heures.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
LOI DE FINANCES POUR 2003
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances
pour 2003 (n° 67, 2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale. [Rapport n° 68
(2002-2003).]
Mes chers collègues, je vous rappelle que les articles et les amendements
tendant à insérer des articles additionnels relatifs aux collectivités locales
seront examinés cet après-midi, après le débat sur les recettes des
collectivités locales qui commencera à seize heures.
Par ailleurs, l'article 33 relatif au prélèvement européen sera examiné demain
mercredi 27 novembre, à neuf heures trente, en même temps que le rapport
relatif au ministère des affaires européennes.
Enfin, l'article d'équilibre 34 et l'état A ainsi que l'amendement n° I-11
tendant à insérer un article additionnel après l'article 4
bis
précédemment réservé seront examinés demain, à la fin de la discussion des
articles de la première partie.
Dans la discussion des articles de la première partie, nous en sommes parvenus
à l'examen des amendements tendant à insérer des articles additionnels après
l'article 12.
Articles additionnels après l'article 12
M. le président.
L'amendement n° I-40, présenté par MM. Ostermann, Besse, Bizet, de Broissia,
César, Eckenspieller, Fournier, Leroy, Murat, de Richemont, Rispat et Vasselle,
est ainsi libellé :
« Après l'article 12, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le 2° du I de l'article 403 du code général des impôts, il est
inséré un 3° ainsi rédigé :
« 3° Dans le cadre de la politique d'aménagement de l'espace rural et pour
soutenir et valoriser les vergers familiaux, la production d'alcool de fruits,
par des particuliers propriétaires de ces vergers, est exonérée de toute taxe,
dans la limite de cinq litres d'alcool pur. »
« II. - La perte de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus est
compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Joseph Ostermann.
M. Joseph Ostermann.
Je défends là un amendement emblématique, n'étant pas persuadé qu'il trouve sa
place dans la deuxième partie du projet de loi de finances.
Trop souvent, la défense des bouilleurs de cru est assimilée à un
encouragement à l'excès de consommation d'alcool. Je le regrette car la réalité
est totalement différente. Les whisky, vodka, gin ou autres boissons fortement
alcoolisées sont vendus librement dans les commerces, ce qui paraît normal.
Néanmoins, les alcools se trouvent à la disposition de notre jeunesse sans
aucune contrainte et sans la moindre restriction. Nous connaissons les effets
de la consommation d'alcools forts associée éventuellement à un peu de
drogue.
Les bouilleurs de cru, à la différence de certains producteurs de boissons
fortement alcoolisées, sont par essence les jardiniers de l'espace. En effet,
dans nos zones rurales, l'arboriculture joue un rôle essentiel et contribue à
maintenir l'espace ouvert et entretenu :
Avant de distiller, l'arboriculteur se doit d'entretenir les vergers et les
arbres, de récolter ou ramasser les fruits.
L'adoption par le Sénat du présent amendement constituerait un encouragement
certain pour nos arboriculteurs, un signal fort pour les engager à entretenir
leurs vergers avec encore plus d'enthousiasme, présentant ainsi à nos touristes
et à nos concitoyens une nature impeccable.
La possibilité de distiller une partie de leur production en franchise de
droits, ou avec des droits minorés - à cet égard, je suis prêt à me rallier, à
une petite différence près, au dispositif adopté par l'Assemblée nationale -,
permettrait à nos arboriculteurs de faire goûter à leurs visiteurs un produit
de qualité. Incontestablement, les touristes visitant l'Alsace qui ont eu la
joie de goûter un bon kirsch, une bonne poire Williams, une framboise d'Alsace
ou encore un marc de Gewurztraminer, distillés avec soin et amour par
l'arboriculteur, conservent de ce moment un inoubliable souvenir.
Tel est l'objet du présent amendement.
(Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. Gérard Longuet.
Très bien !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
A de nombreuses reprises, le Sénat a
marqué l'intérêt qu'il porte aux petits producteurs locaux et aux propriétaires
de vergers familiaux. Il est tout à fait clair qu'une vision abstraite,
parisienne, voire punitive de ces sujets est complètement en dehors de la
réalité. Ceux qui se battent pour la décentralisation ne peuvent pas ne pas se
battre aussi pour ces petits producteurs.
La préoccupation de M. Ostermann rencontre nécessairement un écho très
favorable dans cette assemblée qui a déjà, je le rappelle, voté à plusieurs
reprises des amendements identiques. Cette année, j'ai le sentiment que M.
Ostermann sera entendu, et même qu'il l'a déjà été, mais M. le ministre nous le
confirmera, puisque l'amendement n° I-40 paraît satisfait par l'article 59
sexies
que nous examinerons en seconde partie du projet de loi de
finances. Toutefois, avant de lui conseiller le retrait de son amendement, je
demande au Gouvernement confirmation de cette satisfaction.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.
Je pense en effet
que la préoccupation exprimée par M. Ostermann a été satisfaite par le
dispositif équilibré qui a été adopté par l'Assemblée nationale et qui permet à
la fois d'organiser, à échéance de cinq ans, la suppression définitive de
l'allocation en franchise des droits de bouilleurs de cru et de traiter tous
les récoltants sur un pied d'égalité, en leur accordant un taux du droit de
consommation réduit de moitié sur les dix premiers litres d'alcool pur.
Ce dispositif vous sera soumis, monsieur le sénateur, lors de l'examen de la
deuxième partie du projet de loi de finances. Vous pourrez alors confirmer
votre préoccupation et la voir traduite définitivement dans la loi.
M. le président.
M. Ostermann, l'amendement n° I-40 est-il maintenu ?
M. Joseph Ostermann.
Compte tenu de l'information qui vient de m'être donnée, je ne peux que
retirer cet amendement aujourd'hui pour le présenter à nouveau lors de l'examen
de la deuxième partie du projet de loi de finances.
M. le président.
L'amendement n° I-40 est retiré.
L'amendement n° I-21 rectifié, présenté par MM. Bailly, P. André, Bizet,
Braye, César, Cornu, Doublet, Dubrule, Emin, Emorine, Fournier, Gérard, Ginésy,
Gruillot, Guené, Joly, Leclerc, Leroy, Natali, Ostermann, Oudin, Revol, de
Richemont, Rispat, Schosteck, Vasselle et Vial, est ainsi libellé :
« Après l'article 12, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 3332-14 du code de la santé publique est complété par un alinéa
ainsi rédigé :
« Par dérogation au précédent paragraphe, lorsqu'il n'existe pas de repreneur
pour la dernière licence de débit de boissons de quatrième catégorie d'une
commune, et que la municipalité n'a pas manifesté le souhait d'acquérir cette
licence, elle peut être transférée dans une commune membre du même
établissement public de coopération intercommunale, ou faute d'un établissement
public de coopération intercommunale, dans une commune située dans le même
canton ou dans un canton limitrophe. »
La parole est à M. Charles Guené.
M. Charles Guené.
A l'heure actuelle, en application des dispositions de l'article L. 3332-14 du
code de la santé publique, un débit de boissons de quatrième catégorie ne peut
être transféré lorsqu'il est le dernier sur le territoire d'une commune.
Sans revenir sur l'opportunité générale de cette mesure, qui permet d'endiguer
les risques d'appauvrissement des communes en zone rurale, il semble néanmoins
nécessaire d'apporter une dérogation. Ainsi, doit être permis le transfert d'un
débit de boissons hors de la commune, mais au sein d'un même espace
intercommunal. Non seulement cette dérogation donne plus de sens à la volonté
générale de renforcer le rôle de la structure intercommunale, mais elle
permettra également de mettre fin aux effets pervers de la règle actuelle qui
est trop stricte.
En l'absence d'une telle structure, le périmètre de transfert doit être élargi
au canton, voire à un canton limitrophe. En effet, de nombreuses communes
rurales ne s'inscrivant pas dans un établissement public de coopération
intercommunale, un EPCI, ou dans une zone de développement touristique, il est
souhaitable de ne pas les exclure de la possibilité d'acquérir une licence de
quatrième catégorie, afin d'assurer aux zones rurales menacées de
désertification la continuité d'une activité souvent complémentaire d'une autre
activité commerciale.
L'objet de cet amendement est donc de permettre le transfert du dernier débit
de boissons d'une commune lorsque celui-ci intervient dans le ressort d'une
commune membre d'un même EPCI du même canton ou, à défaut, d'un canton
limitrophe.
M. Gérard Longuet.
Très bien !
M. Charles Guené.
Afin d'éviter toute dérive à une telle dérogation, le présent amendement
encadre strictement ce transfert par la constatation des nécessités
touristiques le justifiant. De la sorte, en application des deuxième et
troisième alinéas de l'article L. 3332-11 du code de la santé publique, une
commission présidée par un magistrat du parquet désigné par le procureur
général et composée d'un représentant du préfet du département, du directeur
des contributions indirectes, du directeur des affaires sanitaires et sociales
et du président du comité régional du tourisme, ou de leurs représentants
respectifs, donnera ou non son approbation à ce transfert.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission estime que cette initiative est très
opportune et constitue un assouplissement nécessaire.
M. Gérard Longuet.
Très bien !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
En effet, il est complètement absurde que, au sein
d'une agglomération ou d'une communauté de communes, on ne puisse pas déplacer
une licence de débit de boissons d'une commune à une autre. C'est une
réglementation d'un autre âge qu'il faut faire évoluer.
Le dispositif proposé comporte les garanties nécessaires. Il est opportun,
sans aller trop loin. La commission est prête à émettre un avis favorable sur
cet amendement, mais elle souhaite entendre préalablement l'avis du
Gouvernement.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Le Gouvernement se réjouit de ce genre d'initiative
tendant à moderniser le droit qui régit des matières touchant à la vie
quotidienne et, pourrait-on dire, à la convivialité et à la fraternité au sein
de nos petites communes.
Ce droit est devenu, en effet, d'une obsolescence qui confine parfois au
ridicule. Nous sommes restés arc-boutés sur nos positions, année après année, à
vrai dire sans raison particulière et sans lien direct avec le combat contre
l'alcoolisme qui, il y a un siècle, a été l'honneur de la France.
Les données ont totalement changé : le mode d'accès à l'alcool, par
l'intermédiaire de la grande distribution, est complètement transformé. Or, les
maires de nos provinces continuent d'être confrontés à des difficultés et à des
tracasseries administratives, parfois insurmontables, et comme vous l'imaginez,
mesdames, messieurs les sénateurs, c'est aussi toute une administration qui est
elle-même confrontée à la mise en oeuvre de textes qui sont, je le répète,
frappés d'une obsolescence évidente.
Donc, monsieur le sénateur, à travers cette argumentation - et pardonnez ce
manque de discrétion de ma part, mais j'ai beaucoup fait pour que nous
progressions...
M. Gérard Longuet.
C'est vrai !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
... parce que, précisément, je suis issu de ces régions
rurales - je veux vous dire que le Gouvernement considère que la législation
sur ce point est trop stricte.
Il nous est proposé d'y remédier en autorisant le transfert des débits de
boissons de quatrième catégorie au sein de l'espace de l'établissement public
de coopération intercommunale. Cette initiative va dans le sens d'un
renforcement de l'intercommunalité sans compromettre les efforts engagés dans
la lutte contre la désertification de certaines de nos régions.
Le Gouvernement est donc favorable à l'amendement n° I-21 rectifié. J'ajoute
que j'invite le Sénat à ne jamais hésiter à faire des propositions de cette
nature tendant à simplifier la vie de nos petites communes.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-21 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 12.
Je rappelle que les articles 13 et 14 seront examinés à l'issue du débat sur
les recettes des collectivités locales.
Article additionnel après l'article 14
M. le président.
L'amendement n° I-180, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 1382 du code général des impôts, il est inséré un
article additionnel ainsi rédigé :
«
Art.
... - Les constructions nouvelles, reconstructions et additions
de reconstructions affectées à l'habitation principale située dans une commune
classée dans les deux premiers déciles selon l'indice synthétique défini à
l'article L. 2334-17 du code général des collectivités locales sont exonérées
de la taxe foncière sur les propriétés bâties pendant dix ans qui suivent
l'année de leur achèvement. »
« II. - Les pertes de recettes pour les collectivités locales sont compensées
par un prélèvement sur les recettes de l'Etat.
« III. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée par le relèvement à
due concurrence des deux dernières tranches du tarif de l'impôt de solidarité
sur la fortune. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
Je rappelle que l'article 14
bis
sera examiné à l'issue du débat sur
les recettes des collectivités locales.
Article 15
M. le président.
« Art. 15. - I. - La loi n° 72-657 du 13 juillet 1972 instituant des mesures
en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés est ainsi
modifiée :
« 1° Avant les mots : "assise sur", le début de l'article 3 est ainsi rédigé :
"Il est institué une taxe d'aide au commerce et à l'artisanat," ;
« 1°
bis
Dans le premier alinéa de l'article 4, après les mots : "taxe
visée", les mots : "au 2° de" sont remplacés par le mot : "à" ;
« 2° L'article 5 est ainsi rédigé :
«
Art. 5
. - Le recouvrement de la taxe d'aide au commerce et à
l'artisanat est assuré par la Caisse nationale de l'organisation autonome
d'assurance vieillesse des professions industrielles et commerciales. Les
administrations compétentes sont tenues de communiquer à la caisse, sur demande
de celle-ci, les renseignements nécessaires au recouvrement. » ;
« 3° Les articles 1er, 2 et 8 à 19-1 sont abrogés.
« II. - Les septième et huitième alinéas de l'article 106 de la loi de
finances pour 1982 (n° 81-1160 du 30 décembre 1981) sont remplacés par un
alinéa ainsi rédigé :
« L'Etat confie la gestion de cette aide aux caisses d'assurance vieillesse
des artisans et commerçants. »
« III. - L'article 4 de la loi n° 89-1008 du 31 décembre 1989 relative au
développement des entreprises commerciales et artisanales et à l'amélioration
de leur environnement économique, juridique et social est ainsi rédigé :
«
Art. 4
. - L'Etat confie à l'Organisation autonome nationale de
l'industrie et du commerce la gestion des aides qu'il apporte aux opérations
visant à la sauvegarde et à la modernisation des entreprises artisanales,
commerciales et de services affectées par des mutations économiques, techniques
ou sociales consécutives à l'évolution de ces secteurs ainsi qu'aux opérations
visant à la création ou la reprise de ces entreprises.
« Un décret précise les modalités d'application du présent article. »
« IV. - Le quatrième alinéa de l'article L. 325-1 du code de l'urbanisme et le
septième alinéa de l'article L. 633-9 du code de la sécurité sociale sont
supprimés.
« V. - Le solde disponible sur le compte de l'Organisation autonome nationale
de l'industrie et du commerce ouvert dans les écritures de la Caisse des dépôts
et consignations et constitué à partir du produit de la taxe d'aide au commerce
et à l'artisanat, constaté à la clôture des comptes 2002, est versé à l'Etat.
»
- (Adopté.)
Article 16
M. le président.
« Art. 16. - I. - L'article 302
bis
ZA du code général des impôts est
ainsi modifié :
« 1° Le 1 est ainsi rédigé :
« 1. Les titulaires d'ouvrages hydroélectriques concédés d'une puissance
électrique totale supérieure à 20 000 kilowatts implantés sur les voies non
navigables acquittent une taxe assise sur le nombre de kilowattheures produits.
Le tarif de la taxe est de 2,30 euros pour 1 000 kilowattheures produits. »
;
« 2° Le 2 est abrogé.
« II. - La loi du 27 mai 1921 approuvant le programme des travaux
d'aménagement du Rhône, de la frontière suisse à la mer, au triple point de vue
des forces motrices, de la navigation et des irrigations et autres utilisations
agricoles et créant les ressources financières correspondantes est ainsi
modifiée :
« 1° Les cinquième, sixième et septième alinéas de l'article 3 sont supprimés
;
« 2° Il est inséré un article 3
bis
ainsi rédigé :
«
Art. 3
bis. - La redevance acquittée par le concessionnaire comporte
:
«
a)
Une part fixe ;
«
b)
Une part proportionnelle au nombre de kilowattheures produits ;
«
c)
Une part proportionnelle aux recettes résultant des ventes
d'électricité issues de l'exploitation des ouvrages hydroélectriques
concédés.
« III. - Au tableau du III de l'article 43 de la loi de finances pour 2000 (n°
99-1172 du 30 décembre 1999), le montant de l'imposition forfaitaire relative
aux réacteurs nucléaires de production d'énergie est fixé à 1 180 000 euros.
»
L'amendement n° I-181, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
L'article 16 appelle un certain nombre d'observations dont nous ne pouvons
évidemment manquer de vous faire part.
Si l'on en croit l'exposé des motifs de l'article, il s'agirait de mettre en
oeuvre un allégement de la fiscalité sur la production hydroélectrique, ce qui
pourrait participer d'une conception plus acceptable sur le plan écologique de
la fiscalité relative à l'énergie.
Dans les faits, cependant, on peut s'interroger sur un point assez essentiel
de l'article qui vise, selon les termes mêmes de l'exposé des motifs, à «
adapter » la Compagnie nationale du Rhône, la CNR, dont il est évidemment
question quand on parle de production hydroélectrique, à son « environnement
concurrentiel ».
On constatera que cet allégement fiscal va de pair avec la négociation d'une
nouvelle forme de rémunération de la concession qui est dévolue à la Compagnie,
fondée sur une redevance d'utilisation du domaine public, liée à la production
hydroélectrique réalisée.
Sur un point strictement économique, ainsi que l'a souligné mon ami Jean-Marc
Coppola au nom des élus communistes de la région PACA, ces choix peuvent
paraître bienvenus.
Pour autant, le mouvement qui est en train de se mettre en place porte,
soulignons-le, sur un montant de 176 millions d'euros, ce qui n'est tout de
même pas une petite somme.
Permettez-moi de me demander si la CNR doit être adaptée à son environnement
concurrentiel, lequel résulte fondamentalement de l'ouverture des marchés
énergétiques à la concurrence, ou si elle doit poursuivre ses missions de
service public, à savoir non seulement la production d'hydroélectricité, mais
également des actions diverses en matière d'aménagement du territoire ou
d'irrigation des terrains agricoles du bassin rhodanien et des affluents du
grand fleuve descendu des Alpes.
Cette dimension de service public est pour le moins absente du débat
aujourd'hui, puisque la Compagnie nationale du Rhône fait l'objet d'une
opération de grande envergure visant à privatiser la détention de son capital
social.
En effet, au cours d'une session récente, la majorité de droite du conseil
général du Rhône a autorisé la cession des titres qu'il détenait dans la CNR au
groupe belge Electrabel, filiale bien connue de Suez, moyennant une confortable
plus-value de 61 millions d'euros environ.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Tant mieux pour les contribuables du Rhône !
M. Thierry Foucaud.
La même démarche est menée par la SNCF en direction du même acheteur, qui
pourra ainsi prendre directement pied sur le marché énergétique français.
De là à penser que l'opération liée à la mise en oeuvre des dispositions de
l'article 16 serait en quelque sorte la contrepartie obtenue par Electrabel
pour faire supporter le coût de la plus-value consentie aux cédants, il n'y a
qu'un pas que nous franchissons sans hésitation.
En effet, dans cette affaire, c'est vers EDF, exploitant des installations
nucléaires de base, que le surplus de fiscalité sera imputé. Et tout cela se
déroule dans un contexte où l'on sait pertinemment que l'énergie
hydroélectrique est économiquement peu coûteuse à produire et que l'essentiel
des investissements est aujourd'hui largement amorti.
Nous refusons que la représentation nationale soit amenée à valider ce
véritable cadeau fiscal accordé à Electrabel, et c'est pourquoi nous vous
proposons de rejeter sans ambiguïté cet article 16.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Du point de vue de la commission, l'article 16 va
dans le bon sens. En effet, il allège globalement l'imposition de la Compagnie
nationale du Rhône en supprimant la taxe à laquelle sont soumis les titulaires
d'ouvrages hydroélectriques implantés sur les voies navigables. Il réforme la
redevance de concessionnaire due par la Compagnie, en tenant compte un peu
mieux du caractère aléatoire de ses recettes. Ainsi est facilitée la
transformation de la CNR en producteur indépendant, c'est-à-dire un producteur
susceptible de concurrencer EDF, car telle est bien la réalité du marché de
l'électricité. Nous devons nous conformer à nos obligations européennes, qui
vont dans le sens de l'efficacité économique et de l'ouverture partielle de
notre marché de l'électricité.
On peut estimer que le « préjudice » subi par EDF du fait de l'alourdissement
compensatoire de l'imposition des installations nucléaires de base est très
limité, et qu'il le serait encore plus si ses tarifs pouvaient dans l'avenir
évoluer de manière plus proche de la réalité économique.
Par ailleurs, la Compagnie nationale du Rhône continue d'exercer ses missions
de service public. Franchement, monsieur Foucaud, cet article 16 ne nous paraît
pas devoir susciter d'inquiétude particulière.
La Compagnie nationale du Rhône est une grande entreprise en train de se
redéployer et de faire la preuve de son efficacité dans un nouveau contexte.
L'article 16 va dans le sens de cette évolution, puisqu'il favorise
l'initiative, la responsabilité et le développement de cette société. Il ne
faut donc assurément pas le supprimer.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
La CNR doit effectivement être adaptée à son nouvel
environnement concurrentiel pour la production d'électricité. Naturellement,
les missions de service public sont tout à fait préservées, et aucun cadeau n'a
été fait, puisqu'une redevance contractuelle sera substituée à la taxe sur les
ouvrages qui sont implantés sur les voies navigables.
L'article 16 contribuant à un rééquilibrage de la fiscalité sur l'énergie et à
une rémunération convenable de l'Etat concédant, je ne peux donc que demander
le retrait de l'amendement de suppression. A défaut, j'émettrai un avis
défavorable.
M. le président.
Monsieur Foucaud, l'amendement n° I-181 est-il maintenu ?
M. Thierry Foucaud.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-181.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 16.
(L'article 16 est adopté.)
Article 17
M. le président.
« Art. 17. - I. - Le code des douanes est ainsi modifié :
« 1° Les tarifs de la taxe intérieure de consommation sur les produits
pétroliers, présentés au tableau B du 1 de l'article 265, sont ainsi modifiés :
DÉSIGNATION des produits |
INDICE d'identification |
UNITÉ de perception |
QUOTITÉ (en euros) |
---|---|---|---|
Supercarburant sans plomb | 11 | Hectolitre | 58,92 |
Supercarburant sans plomb contenant un additif spécifique améliorant les caractéristiques antirécession de soupape | 11 bis | Hectolitre | 63,96 |
Carburéacteur sous condition d'emploi | 13 et 17 | Hectolitre | 2,54 |
Gazole sous condition d'emploi | 20 | Hectolitre | 5,66 |
Gazole présentant un point d'éclair inférieur à 120 °C | 22 | Hectolitre | 39,19 |
Propane liquéfié destiné à être utilisé comme carburant sous condition d'emploi | 30 bis | 100 kg net | 4,68 |
Autres propanes liquéfiés destinés à être utilisés comme carburant | 30 ter | 100 kg net | 10,76 |
Gaz naturel comprimé destiné à être utilisé comme carburant | . | . |
« 1°
bis
Dans le même tableau, après la ligne correspondante au produit
identifié à l'indice 23, il est inséré une ligne ainsi rédigée :
NUMÉRO du tarif des douanes |
DÉSIGNATION des produits |
INDICE d'identification |
UNITÉ de perception |
QUOTITÉ (en euros) |
---|---|---|---|---|
. | Fioul lourd | 24 | 100 kg net |
1,85 |
« 2° Les lignes du même tableau correspondant à la désignation des produits :
"fioul", "fioul présentant une viscosité cinématique à 20 °C inférieure ou
égale à 9,5 centistokes", "fiouls lourds" ainsi que les lignes correspondant
aux produits identifiés aux indices 26, 27, 28 et 28
bis
sont supprimées
;
« 3° Au cinquième alinéa de l'article 265
septies
, les mots : "36,77
EUR par hectolitre pour la période du 21 janvier 2002 au 20 janvier 2003" sont
remplacés par les mots : "36,77 EUR par hectolitre pour la période du 21
janvier 2002 au 31 décembre 2002, et 37,06 EUR par hectolitre pour la période
du 1er janvier 2003 au 20 janvier 2003" ;
« 4° A l'article 266
quinquies
, il est rétabli un 5 ainsi rédigé :
« 5. Le tarif de la taxe est fixé à 1,19 EUR par millier de kilowattheures.
« II. - Les dispositions du I entrent en vigueur le 1er janvier 2003. Elles
n'entraînent pas l'application de l'article 266
bis
du code des douanes.
»
L'amendement n° I-182, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
La fiscalité pétrolière constitue toujours un élément déterminant des recettes
fiscales de l'Etat : c'est, en effet, en termes de rendement, le quatrième
impôt derrière la TVA, l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés. A
l'instar de la TVA, c'est un impôt qui est profondément régressif et qui frappe
essentiellement les consommateurs modestes.
Après plusieurs années de quasi-stagnation des droits perçus, l'article 17 du
projet de loi de finances pour 2003 prévoit un accroissement sensible et
relativement indifférencié de ces derniers. Mais ce sont, au final, tous ceux
qui ne peuvent faire prendre en compte leurs frais de transport, à quelque
titre que ce soit, dans leur situation fiscale qui, en final, en
souffriront.
M. le ministre, lorsqu'on examine les différentes mesures prises depuis
l'arrivée du Gouvernement aux affaires, on constate que les dispositions
contenues dans la loi de finances pour 2003 sont susceptibles de dégager 623
millions d'euros de recettes nouvelles, tandis que la suppression cet été du
dispositif de TIPP flottante est à l'origine d'un alourdissement de la TIPP de
634 millions d'euros.
A l'exception évidemment de la prise en compte des moins-values fiscales
enregistrées dans le cadre du collectif budgétaire de fin d'année, c'est donc
plus de 1,2 milliard d'euros - plus de 8 milliards de francs - qui auront ainsi
été « pompés » sur le dos des automobilistes ou des habitants de logements
chauffés au fioul.
Pendant ce temps-là, bien entendu, on nous parle de baisse des impôts... mais
pas souvent, apparemment, de cette fameuse taxe intérieure sur les produits
pétroliers. Il est vrai que certains semblent vouloir l'utiliser à l'avenir
pour financer une partie des transferts de charge liés à la décentralisation, à
l'image de ce qui a pu se faire pour la collectivité territoriale de Corse.
C'est une autre affaire, c'est vrai, mais pas nécessairement très éloignée des
mesures dont nous avons débattu depuis le début de ce débat budgétaire.
Il est quand même étrange de constater que la baisse des impôts ne concerne
aucunement les droits indirects, tandis que l'on tend à alléger l'impôt sur le
revenu des plus riches ou l'impôt de solidarité sur la fortune.
C'est donc aussi au nom d'un nécessaire équilibre entre les mesures fiscales
que nous vous invitons à geler la progression de la TIPP, et donc, mes chers
collègues, à adopter cet amendement de suppression de l'article 17.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
De quoi s'agit-il ? Il est question, d'une part, du
devenir des taxes parafiscales, sujet sur lequel nous aurons sans doute
l'occasion de revenir pour traiter de différents problèmes et, d'autre part, de
l'évolution et de la simplification de la fiscalité des carburants.
Il est bon, monsieur le ministre, que, dès cette année 2003, vous commenciez
avec vos services à aborder l'échéance, rendue inéluctable par la loi organique
sur les lois de finances, de la suppression et du remplacement des taxes
parafiscales. Nous savons tous que la loi organique fixe l'horizon du 31
décembre 2003 pour sortir de ce régime qui a été condamné pour des raisons de «
vertu » budgétaire, dirai-je.
Toutefois, il est important que les organismes qui bénéficient de telles
ressources disposent d'une visibilité car, même si une année est encore
susceptible de se dérouler sous le
statu quo,
le 31 décembre 2003
arrivera vite.
Je profite de cette intervention sur l'IFP pour vous demander si le
Gouvernement a l'intention de prolonger d'une année, du 31 décembre 2003 au 31
décembre 2004, au moins pour tous les centres techniques dont le sort ne serait
pas réglé, la validité de la taxe parafiscale qui les alimente.
Dans le cas contraire, comment comptez-vous compenser la suppression des taxes
parafiscales et par quelles autres ressources ? Sans vouloir plaider - ce qui,
on en conviendra, n'est pas mon habitude - pour le maintien inchangé des
structures et de leurs ressources, il existe néanmoins d'honnêtes gens à la
tête de ces centres qui s'interrogent sur leur devenir et qui ont besoin de
visibilité.
Dans ce contexte, monsieur le ministre, vous oeuvrez utilement avec l'article
17. Le Gouvernement tire en effet les conséquences de la suppression de la taxe
parafiscale, actuellement perçue par l'Institut français du pétrole, qui est la
plus importante, et l'intègre à la taxe intérieure sur les produits pétroliers
et à la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel. Ainsi, le niveau de
la fiscalité de ces produits restera inchangé.
Madame Beaudeau, la suppression de l'article 17 entraînerait une diminution
des recettes de l'Etat de près de 200 millions d'euros qu'il faudrait alors
trouver ailleurs. Chez les riches, me répondrez-vous. La commission, pour qui
cette appréciation est quelque peu subjective, ne peut qu'être défavorable à la
suppression de cet article 17.
En outre, l'instauration de ce nouveau dispositif fiscal s'accompagne - il
faut insister sur cette mesure qui me semble très correcte, pour ne pas dire
généreuse - de l'élaboration d'un avenant à l'actuel contrat pluriannuel
d'objectifs 2001-2005 entre l'IFP et l'Etat prévoyant le maintien en euros
courants de la subvention budgétaire allouée à l'établissement, qui n'a donc
pas lieu de se plaindre. Nous vous en donnons acte, monsieur le ministre, l'IFP
dispose donc d'une visibilité sur ses ressources.
Les dispositions prévues permettront d'anticiper la disparition de la taxe
parafiscale et de simplifier la fiscalité des carburants ; il ne faut pas
supprimer cet article 17, qui est un très bon article.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Le niveau de l'accise globale à laquelle sont soumis
les produits pétroliers comprend la TIPP et la taxe parafiscale qui est perçue
au profit de l'IFP. Comme l'a rappelé M. le rapporteur général, la suppression
de cette taxe à compter du 1er janvier 2003 sera compensée, pour l'IFP, par le
versement d'une subvention budgétaire. Le principe de neutralité budgétaire est
donc respecté, puisque cette mesure ne modifie en rien le niveau de l'accise
globale. De plus, cette mesure n'a aucune incidence sur le prix des carburants
à la pompe, les consommateurs acquittant déjà la taxe perçue au profit de
l'IFP.
Madame Beaudeau, ces précisions, qui me semblent de nature à apaiser vos
inquiétudes, devraient vous permettre de retirer votre amendement. Dans le cas
contraire, je serais contraint d'en demander le rejet.
Monsieur le rapporteur général, vous m'avez interpellé, au sens cordial du
terme, sur l'avenir des taxes parafiscales. Avec une élégance de langage qui
vous est coutumière, vous nous avez dit que vous ne remettiez naturellement pas
en cause le vote auquel vous avez activement participé pour la modernisation de
notre constitution financière, mais vous vous êtes toutefois inquiété de
l'incidence de la suppression des taxes parafiscales sur les missions
qu'exercent les différents organismes qui ont à leur tête des gens que vous
avez qualifiés d'« honnêtes ». Le Sénat, qui a voté la loi organique, n'en a
jamais douté ! Le fait qu'ils soient honnêtes est même une certitude.
Dans notre esprit - je le précise pour ceux qui liront le procès-verbal de nos
débats - du point de vue de la démocratie il n'est pas excessif de considérer
que c'est plutôt la représentation nationale qui est compétente pour autoriser
l'impôt. C'est en tout cas la conviction qui continue de nous habiter et c'est
pourquoi je n'envisage pas, à ce stade, de vous demander la prorogation d'une
année de la mesure.
Nous avons le temps devant nous pour travailler afin de faire en sorte que ces
organismes concernés disposent de moyens conformes aux votes que nous avons
émis ensemble et garantissant l'action de ces organismes.
Aucune ambiguïté ne doit subsister. Rien ne serait pire en effet que de
laisser croire à ces organismes que le vote démocratique du Parlement, visant à
ce que ce soit le Parlement lui-même qui autorise les prélèvements de toute
nature, n'était en quelque sorte dû qu'à une pulsion. Le fait que les
prélèvements soient autorisés par le Parlement relève bien d'un principe
démocratique.
Monsieur le rapporteur général, étant donné le génie qui est le vôtre, et
celui de l'équipe qui travaille à vos côtés, nous devrions trouver des
solutions. Dans le cas contraire, nous prendrions les solutions appropriées
mais, personnellement, compte tenu de mon tempérament, je n'imagine pas que
nous ne serons pas en mesure d'y parvenir. Je suis plutôt enclin à penser que
nous réussirons.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-182.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 17.
(L'article 17 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 17
M. le président.
L'amendement n° I-183, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article 266
sexies
du code de douanes, il est inséré un
article additionnel ainsi rédigé :
«
Art. ...
- I. - Il est institué une taxe additionnelle à la taxe
générale sur les activités polluantes dues par les personnes physiques ou
morales suivantes :
« 1. Tout exploitant d'une installation soumise à autorisation au titre de la
loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la
protection de l'environnement dont la puissance thermique maximale lorsqu'il
s'agit d'installations de combustion, la capacité lorsqu'il s'agit
d'installations d'incinération d'ordures ménagères ou le poids des substances
mentionnées au 2 de l'article 266
septies
émises en une année lorsque
l'installation n'entre pas dans les catégories précédentes, dépassent certains
seuils fixés par décret en Conseil d'Etat.
« 2. Tout exploitant d'un établissement industriel ou commercial ou d'un
établissement public à caractère industriel et commercial dont certaines
installations sont soumises à autorisation au titre de la loi n° 76-663 du 19
juillet 1976 précitée.
« II. -
a)
Son barème est ainsi fixé :
« Substances émises dans l'atmosphère.
« Oxydes de soufre et autres composés soufrés, 125.
« Acide chlorhydrique, 90.
« Protoxyde d'azote, 180.
« Oxydes d'azote et autres composés oxygénés de l'azote, à l'exception du
protoxyde d'azote, 150.
« Hydrocarbures non méthaniques, solvants et autres composés organiques
volatils, 150.
«
b)
Installations classées.
« Délivrance d'autorisation aux entreprises, 7300.
« Exploitation au cours d'une année civile (tarif de base), 1100. »
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
Cet amendement reprend une proposition que nous avons déjà formulée l'an
dernier.
Il s'agit de créer une taxe additionnelle à la taxe générale sur les activités
polluantes destinée à financer des investissements, et notamment ceux qui sont
assumés par les collectivités locales en matière de prévention des risques
industriels.
Comme nous l'avons déjà dit, la question de la prévention des risques
industriels continue de se poser avec une acuité toute particulière.
Les populations, vous le savez, sont extrêmement sensibilisées au problème
posé, d'autant que les effets désastreux de l'accident industriel majeur que
fut l'explosion de l'usine AZF de Toulouse ne sont pas encore totalement
réparés.
Plus d'un an après le 21 septembre, des familles continuent de subir les
conséquences de cette catastrophe majeure.
Et comme le principe de précaution vaut toujours mieux que tous les autres,
c'est dans cette optique que nous proposons à la Haute Assemblée d'adopter cet
amendement.
Pour justifier plus encore notre proposition, on ne peut que souligner quels
sont les investissements spécifiques dont ont besoin les collectivités dans le
cadre de ce principe de précaution, sans compter, évidemment, les contraintes
que les établissements classés posent en termes d'aménagement urbain, tant en
ce qui concerne la construction aux alentours que la voirie d'accès.
Je sais fort bien que nous aurons, dans le cadre de la seconde partie, un
débat sur la question de la constitution du fonds d'équipement des services
départementaux d'incendie et de secours, mais il me semble que tout engagement
de l'Etat en ces domaines doit être gagé sur la sollicitation de ceux-là mêmes
qui sont au coeur de l'application du principe de précaution.
Sans remettre en cause les capacités financières des entreprises directement
concernées, qui sont souvent importantes - Total-Fina-Elf obtient, par exemple,
le record de France des profits - cette mesure, une fois adoptée, serait
l'illustration d'une conception plus éthique et plus équitable de la
fiscalité.
C'est donc sous le bénéfice de ces observations que je vous invite à adopter
l'amendement n° I-183.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Dans le passé, la commission a souvent critiqué la
TGAP. Ce point a été abordé hier, lorsque certains sujets sensibles de
l'industrie automobile ont été évoqués. C'est notre collègue Serge Lepeltier,
me semble-t-il, qui a parlé de la fiscalité écologique et des enjeux du
développement durable en des termes que chacun peut partager.
L'amendement qui nous est soumis tend à créer une taxe additionnelle à la
TGAP. Si l'on voulait aller dans ce sens, il faudrait que la TGAP soit
incontestable. Or, monsieur le ministre, nous l'avons vu dans le passé, cet
impôt n'est pas dimensionné comme il convient : il ne porte pas nécessairement
sur des assiettes taxables qui soient incontestables et il soulève de nouveaux
problèmes. Tant dans sa logique que dans son affectation, il ne peut pas être
considéré, aujourd'hui encore, comme faisant partie d'une fiscalité
véritablement écologique.
En s'appuyant sur cette analyse de fond, la commission estime qu'il n'est pas
raisonnable de vouloir créer une taxe additionnelle à une taxe de cette nature,
dont l'avenir est encore relativement indéterminé.
Par ailleurs, nous avons pu observer que le rendement de la TGAP n'a pas été
tout à fait à la hauteur des ambitions initiales et que son produit devrait
diminuer en 2003.
Pour l'ensemble de ces raisons, et pour ne pas surcharger encore la barque des
entreprises, qui est déjà trop lourde, la commission vous convie, mes chers
collègues, à ne pas suivre le groupe CRC et à rejeter cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
L'instauration d'une taxe additionnelle à la TGAP sur
certaines installations ne répond pas du tout à l'objectif fixé. Il s'agit, en
effet, de faciliter le financement des investissements qui sont liés à la
sécurité industrielle, dès lors, Thierry Foucaud le sait, que cette recette est
affectée aux comptes sociaux.
Outre le fait que cette recette a les défauts que le rapporteur général a
décrits il y a un instant, il faut tenir compte de son affectation. Or cette
affecta tion ne correspond pas à l'objectif que vous vous êtes fixé.
D'ailleurs, les mécanismes de la TGAP n'ont pas pour finalité de prendre en
compte les risques d'accident.
Je vous demande donc, monsieur Foucaud, de bien vouloir retirer votre
amendement. A défaut, je demanderai au Sénat de le rejeter.
M. le président.
Monsieur Foucaud, l'amendement est-il maintenu ?
M. Thierry Foucaud.
Il est tout à fait logique que les entreprises polluantes soient mises à
contribution ; je ne reviendrai pas sur l'exemple que j'ai donné en ce qui
concerne TotalFinaElf. Ce problème sera sûrement de nouveau abordé lors du
débat sur les recettes des collectivités locales.
Je suis d'accord avec M. le ministre pour que l'on trouve une autre solution
si c'est possible. Il n'en reste pas moins que les difficultés rencontrées par
les collectivités sur le territoire desquelles se trouvent des industries à
risque restent insurmontables, tant au niveau des installations classées Seveso
que des moyens à mettre en oeuvre pour assurer la sécurité et l'information de
la population.
Il faut savoir qu'en France de nombreuses infrastructures de zones
industrielles à risque ne sont pas adaptées aux situations difficiles. Il
existe des zones où l'on peut rentrer, mais pas sortir : ce sont de véritables
goulets et, en cas d'incidents, ce serait catastrophique.
Ces questions doivent au plus vite faire l'objet d'une réflexion approfondie.
Elles sont souvent du ressort des collectivités locales.
Par conséquent, monsieur le président, je maintiens mon amendement. En fait,
il s'agit d'un amendement d'appel pour étudier le problème et donner aux
collectivités locales les moyens d'aller dans ce sens.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-183.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-67 est présenté par MM. Miquel, Auban, Demerliat, Haut,
Lise, Marc, Massion, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste.
L'amendement n° I-184 est présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant
et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendement sont ainsi libellés :
« Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 235
ter
ZD du code général des impôts est ainsi modifié
:
« 1 ° le III est ainsi rédigé :
« III. - Le taux de la taxe est fixé à 0,05 % à compter du 1er septembre 2003.
»
« 2° le IV est supprimé. »
La parole est à M. Gérard Miquel, pour défendre l'amendement n° I-67.
M. Gérard Miquel.
Dans le cadre de la loi de finances pour 2002, a été mise en place une taxe
sur les transactions financières de type taxe Tobin, dont le taux devait être
déterminé par référence à une décision du Conseil européen.
Les récentes déclarations du Président de la République au sommet de
Johannesburg, appelant notamment à la mise en place rapide d'une telle taxation
afin de financer le développement des pays les moins avancés, nous incitent
aujourd'hui à proposer le présent amendement. Celui-ci a pour objet de faire en
sorte non seulement que la détermination du Président de la République soit
rapidement suivie d'effet, mais également, et surtout, que soit amorcée la mise
en oeuvre du nouveau système de financement du développement mis en place par
la majorité précédente en faveur des pays qui en ont le plus besoin.
Nous proposons donc la mise en oeuvre avancée du dispositif prévu par la loi
de finances de 2002 en fixant le taux de la taxe en question à 0,05 % à compter
du 1er septembre 2003. Cette mesure serait applicable en France, dans un
premier temps.
M. le président.
La parole est à M. Thierry Foucaud, pour défendre l'amendement n° I-184.
M. Thierry Foucaud.
Nous ne pouvons évidemment manquer de citer, à l'occasion de la présentation
de cet amendement n° I-184, les propos tenus il y a peu, lors du sommet de
Johannesburg, par le Président de la République.
En effet, à la question suivante : « Vous avez annoncé avec une certaine force
l'idée d'une taxation internationale pour financer le développement : c'est une
idée très controversée et je voulais savoir si elle avait reçu un écho
favorable ou au contraire si vous aviez reçu des oppositions aussi fermes et
donc s'il y avait une chance pour qu'elle puisse prendre forme prochainement »,
le Président de la République avait répondu : « Vous savez, cela fait partie
des solutions qui ne peuvent intervenir que lorsque des forces suffisantes ont
été mises en oeuvre. Et c'est vrai que la mondialisation, qui comporte bien des
avantages, mais aussi des inconvénients et des dangers, en tous les cas, est
considérablement créatrice de richesses. »
Il poursuivait ainsi : « Il ne serait pas anormal qu'une partie, modeste, mais
les chiffres sont considérables, de ces richesses soit ponctionnée pour
permettre d'améliorer la solidarité internationale et le développement durable.
Les besoins sont à la fois très importants, mais relativement modestes. Il est
admis par tous les experts que l'ensemble de l'aide publique au développement,
si on la doublait, on pourrait alors éradiquer la pauvreté dans le monde : 50
milliards, c'est beaucoup, mais si l'on compare à l'ampleur de la richesse
créée par les échanges dus à la mondialisation, c'est peu. »
Et il concluait : « D'où la nécessité, à mon avis, d'une forme de taxation.
»
On pourrait presque dire que le Président de la République parle d'or, si vous
me permettez cette expression.
Je ne sais pas s'il a rejoint le camp des doux rêveurs qui pensent qu'une
partie des maux dont souffre la planète peut être résolue en taxant les
transactions sur les instruments monétaires et financiers. En tout cas, cette
prise de position semble confirmer la pertinence de la proposition que fait le
groupe CRC - d'autres l'ont également faite - avec cet amendement n° I-184.
Il reste à savoir si nos collègues de la majorité sénatoriale, alors même
qu'ils s'apprêtent à rejoindre un certain nombre d'idées, auront la sagesse de
suivre l'orientation ainsi fixée.
Notre amendement vise à donner une certaine consistance à la taxation des
opérations monétaires et à dégager, par conséquent, conformément au sens de nos
positions antérieures sur la question, que nous avions matérialisées par le
dépôt d'une proposition de loi, les moyens financiers de soutenir l'action
internationale de la France en matière d'aide publique au développement.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous invite, mes chers collègues, à
adopter cet amendement n° I-184.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La discussion budgétaire obéit à des rites. Et si le
rite n'est pas accompli, le travail n'est pas bien fait. C'est l'aspect
qu'Edgar Faure qualifiait de « liturgique » dans les travaux de nos assemblées.
Aujourd'hui, dans la liturgie - je parle sous le contrôle du président du
groupe d'amitié France-Saint-Siège, naturellement
(Rires),
...
M. Jean Chérioux.
Il apprécie beaucoup !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
... il y a un point de passage obligé : on ne peut
pas discuter du budget sans parler de la taxe Tobin ! C'est un élément
incontournable de ce débat qui nous réunit, si actifs et si pugnaces, à la fin
du mois de novembre.
Hélas ! je voudrais regretter que l'un des grands prêtres de cette liturgie ne
soit plus parmi nous. Vous savez quel plaisir j'avais à échanger, sur ce sujet,
des arguments avec Jean-Luc Mélenchon, lui qui avait qualifié le Sénat de «
cul-de-basse fosse de la réaction »
(M. Jean-Pierre Masseret s'exclame)
,
et qui était le défenseur - il s'exprimait, en votre nom, de façon enflammée,
mais avec toute la force de son argumentaire et de ses convictions - de la taxe
Tobin.
Bien entendu, moi qui suis un affreux libéral...
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Tempéré !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Tempéré par l'expérience des choses !
(Exclamations amusées sur les través du groupe socialiste.)
... - et je ne vais pas me transformer -, eh bien ! c'est très volontiers, mes
chers collègues, que je me prête à cette célébration.
M. Jean-Pierre Masseret.
Amen !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Ainsi soit-il !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission des finances du Sénat ne changera pas
d'avis sur la taxe Tobin !
M. Jean-Pierre Masseret.
C'est dommage !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
C'est vous qui le dites !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cette taxe est contre nature. Elle est complètement
opposée à l'esprit même des marchés et du fonctionnement de l'économie de
marché.
Il est tout à fait clair qu'en dehors de gesticulations aimables elles ne sert
à rien et il est inutile d'en parler, car, pour qu'elle existe, il faudrait
qu'elle soit instituée au sein de chaque Etat souverain de cette planète. Et,
au demeurant, tant les ministres de l'ancien gouvernement Dominique
Strauss-Kahn et Laurent Fabius que la commission des finances du Sénat
partageaient à cet égard exactement le même point de vue.
M. Gérard Miquel.
Ils évoluent !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Comme il s'agit d'une proposition contre nature et
que la nature est ce qu'elle est et qu'elle le demeurera, mon cher collègue, il
n'y a point d'évolution possible.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Ce n'est pas sûr !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il faut que vous vous en convainquiez ! Certes, vous
vous ferez toujours des succès d'audience dans certains milieux avec ce type de
proposition. Il n'en reste pas moins que cela restera du domaine du verbe, du
domaine du symbole que l'on agite en sachant bien que cela ne coûte rien
puisque cela ne sera jamais fait, car c'est contraire à la nature des
choses.
Telles sont, mes chers collègues, les raisons pour lesquelles la commission
des finances, quoi qu'il en soit par ailleurs, est fondamentalement opposée aux
amendements que vous avez présentés comme aux arguments que vous avez
développés pour les défendre.
Cette taxe n'est rien d'autre qu'un objet de gesticulation politique
franco-française. Même James Tobin, dont le nom est en quelque sorte usurpé
dans vos amendements, l'a reconnu avant de disparaître de ce monde.
Après avoir échangé nos arguments, après avoir entendu le ministre, donc après
avoir bien fait notre travail, eh bien ! la liturgie pourra se poursuivre sur
d'autres sujets.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
S'il est une chose dont la France n'est pas dépourvue,
c'est bien de taxes ! Celles-ci sont nombreuses et le génie du Sénat pourrait
être consacré, précisément, à en supprimer.
Si nous pouvions, sans trop diminuer le produit des taxes, dont l'Etat a
besoin pour assumer toutes ses missions, remembrer notre fiscalité et éviter
que l'on ne multiplie les instruments fiscaux, nous rendrions un très grand
service à nos compatriotes.
S'agissant de l'opportunité de créer une taxe, ma réponse est d'une netteté
absolue : il n'en est pas question !
En revanche, dans vos amendements, vous avez soulevé la question de l'utilité
de la régulation et de la transparence des mouvements de capitaux. Il s'agit
d'un débat d'une tout autre dimension. Il est vrai que la France lutte de
toutes ses forces contre la spéculation pour éviter que des crises financières
et monétaires ne mettent certains pays en grande difficulté. Mais appliquer
cette taxe dans un seul pays, comme vient de l'expliquer M. le rapporteur
général à l'instant, est non seulement difficile, mais impossible, vous le
savez, car inefficace.
Pour lutter avec succès contre la spéculation financière déstabilisante,
mesdames, messieurs les sénateurs, il faut, en priorité, donner au système
monétaire et financier international une cohérence et une efficacité accrues.
C'est ce à quoi travaille le Gouvernement, et c'est ce qui me conduit à vous
demander de bien vouloir retirer vos amendements. A défaut, j'en demanderai le
rejet.
M. le président.
Monsieur Miquel, l'amendement n° I-67 est-il maintenu ?
M. Gérard Miquel.
Monsieur le rapporteur général, vous êtes - c'est bien connu dans cette maison
- un chantre du libéralisme. Mais le libéralisme ne peut pas apporter une
réponse au développement des pays pauvres.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La taxe Tobin non plus !
M. Gérard Miquel.
Malheureusement, nous le constatons tous les jours.
De grands sommets sont organisés, tel celui de Johannesburg ou d'autres
encore.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cela coûte cher !
M. Gérard Miquel.
Il nous faudra bien trouver une solution pour apporter une aide à ces pays,
afin qu'ils puissent atteindre un niveau de développement qui leur permette au
moins de nourrir leurs populations. Aujourd'hui, tel n'est pas le cas.
C'est la raison pour laquelle nous maintenons notre amendement. Si cette taxe
était appliquée à l'échelle planétaire - je le sais, nous avons beaucoup de
chemin à parcourir, mais il faudra bien commencer un jour -, le financement du
développement des pays pauvres pourrait être assuré dans de bonnes conditions.
Ce serait une très bonne chose pour l'équilibre de la planète.
M. le président.
Monsieur Foucaud, l'amendement n° I-184 est-il maintenu ?
M. Thierry Foucaud.
Je n'ai rien à ajouter aux propos qui viennent d'être tenus par mon collègue
Gérard Miquel. Comme dirait M. le rapporteur général, je ne reprendrai pas le
rituel ! En la matière, il est sur l'une des trois premières marches du podium.
(Sourires.)
Le problème a été largement exposé, mais il n'a pas été répondu à ma question
relative aux propos du Président de la République, à Johannesburg, en ce qui
concerne la taxe Tobin.
Quoi qu'il en soit, taxer les mouvements financiers permettrait de nourrir une
partie du monde.
M. le président.
La parole est à M. Jean Chérioux, pour explication de vote.
M. Jean Chérioux.
Je constate que, dans ce domaine, le débat confine toujours au dialogue de
sourds ! Cela vient du fait que nos collègues de gauche confèrent un sens
impropre aux termes qu'ils utilisent. Lorsque notre collègue Gérard Miquel dit
de M. le rapporteur général qu'il est un libéral, il a raison, mais le
libéralisme tel qu'il le décrit - le libéralisme « sauvage » - n'est pas celui
du rapporteur général.
Chers collègues, le libéralisme, ce n'est pas le laisser-faire absolu : il ne
peut se concevoir qu'encadré. C'est celui-là que nous défendons, parce qu'il
est le seul à même de régler les problèmes économiques.
Hélas ! On a constaté l'état dans lequel sont sortis les pays qui avaient
connu pendant des années la gestion collectiviste : on a vu le résultat ! Et
ces régimes ne faisaient rien pour aider les pays sous-développés, tout
simplement parce qu'ils n'en avaient pas les moyens. La seule formule qui peut
réellement contribuer à aider les pays sous-développés est celle du libéralisme
encadré et régulé.
Quant à la solution du type de la taxe Tobin, elle ne peut être conçue qu'à
l'échelon international. En effet, tout système d'aide aux pays sous-développés
est conditionné par l'existence d'une convention internationale. C'est ce qui
explique l'attitude du Président de la République qui, désireux de montrer que
la France entend être le champion de l'aide aux pays sous-développés, ce qui
est dans la tradition gaulliste de la France, n'en demeure pas moins conscient
des réalités. Le Président de la République sait parfaitement que la France ne
peut agir seule, pas plus qu'un autre Etat, d'ailleurs. Cela ne peut être
décidé qu'à l'échelon international. C'est pourquoi le Président de la
République a bien fait d'adopter cette attitude lors du sommet de
Johannesbourg.
Que des parlementaires français proposent une solution de ce genre est
absolument en contradiction avec l'esprit qui sous-tend la politique du
Président de la République, politique raisonnable qui tient compte des
réalités. La vôtre, hélas, chers collègues, est utopique !
M. le président.
Je mets aux voix les amendements identiques n°s I-67 et I-184.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président.
L'amendement n° I-185, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 242
bis
du code général des impôts est rétabli dans le
texte suivant :
«
Art. 242 bis
. - Sans préjudice des dispositions des articles 57 et
238 A, les charges de toute nature payées ou dues par une personne physique ou
morale domiciliée ou établie en France à des personnes physiques ou morales qui
sont domiciliées ou établies dans un Etat étranger ou un territoire situé hors
de France et qui y sont soumises à un régime fiscal privilégié ne sont admises
comme charges déductibles pour l'établissement de l'impôt que si elles ont été
mentionnées d'une manière détaillée, précise et exacte dans le cadre d'une
déclaration spécifique remise à l'administration fiscale, en même temps que la
déclaration de leurs résultats et que si celle-ci n'en a pas rejeté le
bien-fondé dans un délai de six mois.
« II. - Les dispositions du I s'appliquent aux exercices ouverts à compter du
1er janvier 2003. »
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Par cet amendement, nous proposons de rétablir l'obligation de déclaration
fiscale détaillée de l'ensemble des transferts de charges des entreprises vers
des pays ou territoires classés à régime fiscal privilégié avant que ces
charges puissent être déduites de l'impôt dans notre pays, et ce uniquement
sous réserve de l'acceptation de leur bien-fondé par l'administration fiscale
dans un délai de six mois.
La préoccupation que traduit cet amendement d'« assainissement » est de
renforcer les dispositifs prévus par le code général des impôts pour lutter
contre l'évasion fiscale, notamment vers les paradis fiscaux.
A ce sujet, mes chers collègues, je voudrais mentionner plus particulièrement
le cas de la société Gemplus, premier fabricant mondial de cartes à puce, qui a
fait beaucoup parler d'elle ces dernières semaines.
A mesure que se démêlent les fils inextricables des montages financiers d'une
entreprise qui, je le rappelle, a déposé un plan social prévoyant la
suppression de 1 200 emplois - notamment un peu plus de 400 à Gémenos, dans les
Bouches-du-Rhône, et à Sarcelles, ma ville -, les salariés et l'opinion
découvrent l'étendue des malversations fiscales auxquelles se sont livrés les
dirigeants.
La direction de Gemplus a notamment utilisé le truchement d'une obscure
filiale nommé Zenzus, basée à Gibraltar, paradis fiscal bien connu, pour
octroyer à plusieurs de ses cadres dirigeants des prêts en vue de l'achat
d'actions de l'entreprise, pour le seul ex-PDG, la somme s'élève à 70 millions
d'euros. Il s'agit évidemment d'une opération totalement illégale en France.
Par ailleurs, à la fin de l'année 1999, sur l'initiative du fonds de pension
américain Texas Pacific Group, qui a pris partiellement le contrôle de
l'entreprise, la direction de Gemplus a déplacé son siège juridique au
Luxembourg et transféré ses brevets vers cette nouvelle entité, ce qui lui a
permis de se soustraire entièrement au paiement de l'impôt sur les sociétés
pour l'année 2000, malgré un bénéfice d'exploitation qui s'élevait alors à 137
millions d'euros. Le versement d'importants droits au titre des brevets à cette
structure implantée dans un pays qui présente également plusieurs
caractéristiques d'un paradis fiscal, a en effet permis à Gemplus de réduire
artificiellement le bénéfice comptable en France, exactement à concurrence des
crédits d'impôt qui lui étaient octroyés pour ses efforts de recherche !
A notre avis, cet exemple démontre la nécessité d'une clarification fiscale
sur la notion de siège de direction effective d'une entreprise, sur les
transferts de brevets vers des filiales - d'autant qu'ils constituent un risque
de pillage technologique - et, plus généralement, de dispositifs plus
appropriés et plus rigoureux de surveillance des relations financières des
entreprises avec des entités implantées dans des paradis fiscaux.
C'est dans ce sens, mes chers collègues, que nous vous invitons à adopter cet
amendement qui complète et renforce les conditions d'application des articles
57 et 238 A du code général des impôts.
A l'occasion de cette discussion, monsieur le ministre, nous souhaiterions
également connaître les intentions du Gouvernement concernant le dossier
Gemplus ainsi que les mesures que vous comptez prendre, notamment pour
sauvegarder l'emploi et prévenir toute évasion fiscale et technologique.
Cela nous semble d'autant plus de la responsabilité du Gouvernement que
Gemplus a bénéficié, depuis sa création, d'aides publiques importantes, sous
forme, notamment, d'exonérations d'impôt sur les bénéfices pendant plusieurs
années en contrepartie de l'installation dans des zones de reconversion
d'emplois, de crédits d'impôts divers ou de mise à disposition de terrains pour
un franc symbolique.
Par conséquent, monsieur le ministre, les salariés et leurs organisations
syndicales attendent un engagement du Gouvernement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La question posée par le groupe CRC est à prendre
très au sérieux.
C'est, au demeurant, ce qu'avait fait notre commission des finances, voilà
quelques années, en mettant en place un groupe de travail sur la régulation
financière internationale. M. Alain Lambert, alors président de la commission
des finances, doit très bien s'en souvenir.
(M. le ministre délégué
opine.)
Nous avions, à l'époque, traité des différents aspects des
relations financières internationales et, en particulier, des territoires
offshore
, des paradis fiscaux, affirmant la nécessité d'une meilleure
régulation des flux financiers dans le monde.
La question qui est ici posée, et qu'il faut donc prendre très au sérieux, est
celle du contrôle des transferts de charges à l'étranger. Pour autant, lorsque
je consulte les textes en vigueur, en particulier l'article 238 A du code
général des impôts, je constate que ces charges, versées à une personne
domiciliée ou établie hors de France et qui bénéficie d'un régime fiscal
privilégié, ne sont déductibles « que si le débiteur apporte la preuve que les
dépenses correspondent à des opérations réelles et qu'elles ne présentent pas
un caractère anormal ou exagéré ».
Il semble donc que le texte soit clair et que les services de contrôle aient
toute latitude pour s'assurer du respect et de la lettre et de l'esprit du code
général des impôts. Peut-être pourriez-vous, monsieur le ministre, nous donner
votre sentiment sur le sujet ?
Mes chers collègues, en fonction de l'évolution de ce type de sujet, sans
doute faudra-t-il, le moment venu, au sein de la commission des finances,
envisager d'actualiser les réflexions formulées voilà quelques années déjà pour
aller un peu plus loin au cours de cette année 2003 qui sera marquée par la
réunion du G 8. A cette occasion, tout ce qui a trait à une meilleure
régulation de l'espace financier international sera traité.
C'est donc en considérant que le code général des impôts doit d'ores et déjà
répondre aux préoccupations exprimées par le groupe CRC, et sous le bénéfice
des observations à venir du Gouvernement, que la commission souhaite le retrait
de cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Mme Beaudeau ne m'en voudra pas de ne plus lui donner
des explications précises relatives à l'entreprise qu'elle a citée. Je peux
simplement lui dire que les services sont naturellement très actifs pour
procéder aux vérifications nécessaires.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je profite de l'occasion de cet amendement
pour vous dire combien le Gouvernement mène une lutte sans merci contre les
paradis fiscaux qui rendent possibles l'organisation à grande échelle de la
fraude fiscale, le blanchiment des capitaux douteux ainsi, hélas ! que le
financement du terrorisme aujourd'hui.
Ce n'est toutefois pas par la mesure que vous proposez, madame Beaudeau, que
cette lutte pourrait triompher. En effet, vous n'êtes pas sans savoir que le
droit à déduction des commissions, courtages ou autres rémunérations versés à
des tiers établis ou non dans des paradis fiscaux est déjà subordonné à
l'obligation d'une déclaration spéciale.
De plus, les services de vérification de la direction générale des impôts se
sont depuis longtemps mobilisés sur le contrôle de ces versements à destination
des paradis fiscaux et sont d'ailleurs dotés d'outils nécessaires à l'exercice
de ce contrôle, notamment grâce à l'article 238 A du code général des
impôts.
Enfin, j'observe que le principe de non-déductibilité posé par l'amendement
serait très facilement contourné par le relais d'un établissement financier ou
d'une société qui, situés dans un pays tiers, procéderaient, pour le compte des
entreprises françaises, aux versements litigieux en direction des paradis
fiscaux.
Mesdames, messieurs les sénateurs, soyez assurés de la détermination du
Gouvernement. En effet, tous ces montages ont été des moyens, d'abord, de
dissimulation fiscale, ensuite, de financement de filières de trafic de
stupéfiants, pour venir, aujourd'hui, contribuer au financement du terrorisme.
La guerre qui doit être engagée contre le terrorisme sur l'ensemble de la
planète nous conduit à traiter de ces sujets avec un sens élevé de nos
responsabilités. Si j'émets un avis défavorable sur votre amendement, madame
Beaudeau, c'est que sa rédaction n'est pas appropriée. Mais sachez que c'est un
objectif que nous avons en commun avec les autres Etats de l'Union européenne.
Je souhaite donc le retrait de cet amendement. A défaut, j'en demanderai le
rejet.
M. le président.
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, pour explication de vote.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je me réjouis, monsieur le ministre, que vous preniez cette affaire très au
sérieux, car elle est très importante.
M. le rapporteur général m'a rappelé qu'un groupe de travail avait été mis en
place au Sénat. Je constate que, jusqu'à maintenant, ses conclusions ont été
peu suivies d'effet. J'en veux pour preuve l'affaire Gemplus que j'ai citée en
exemple, la société ayant pu prospérer et prospérant encore.
Je suis étonnée que vous vous opposiez à un amendement d'éthique économique et
fiscal qui tend à lutter contre les paradis fiscaux dans lesquels certains
dirigeants domicilient les sièges sociaux de leur groupe ou, plus précisément,
les têtes de holding, et procèdent à l'évasion fiscale d'une part plus ou moins
importante des bénéfices par le jeu de la facturation de services rendus plus
ou moins fictifs.
Je vous ai cité un exemple, mais cette pratique, très répandue, permet à
certains dirigeants de faire échapper à toute réelle imposition le maximum des
profits cumulés sur l'activité économique normale d'une entreprise.
Dans l'affaire Gemplus, l'évasion fiscale se double d'un véritable pillage de
brevets qui, je le rappelle, ont été déposés en France. On constate également
qu'une part importante des résultats des profits passés a transité par un Etat
de l'Union européenne des plus accueillants en matière financière, en
l'occurrence, le Luxembourg.
Si je me permets d'insister, monsieur le ministre, c'est que j'ai pu lire dans
la presse - car je n'ai obtenu de précisions que par la presse - que deux
professeurs agrégés de droit estiment, sur le fondement d'un référendum en
seize points, que le fonds texan que je vous ai cité n'a pas délivré les bonnes
informations financières à la Commission des opérations de bourse française et
à la SEC, son homologue américaine.
Si je suis intervenue précisément ce matin sur l'affaire Gemplus, monsieur le
ministre, c'est parce que le 8 août 2002, au moment où nous avions connaissance
du plan social, j'avais adressé une assez longue question écrite à M. le
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, et que j'ai obtenu pour
toute réponse les cinq lignes que je vous lis : « Au-delà du cas particulier
évoqué par l'auteur de la question et pour lequel la règle du secret
professionnel s'oppose à ce que la situation fiscale d'une entreprise soit
divulguée, les dispositions de la convention franco-luxembourgeoise n'ont en
aucun cas pour effet de priver les services de la direction générale des impôts
de réprimer les transferts directs ou indirects des bénéfices à l'étranger.
L'article 4, paragraphe II, de la convention fiscale franco-luxembourgeoise du
1er avril 1958 se borne à préciser qu'un Etat ne peut imposer que les revenus
provenant de l'activité des établissements stables situés sur son territoire. »
M. le ministre concluait : « Il ne saurait permettre pas plus qu'aucune autre
convention fiscale de localiser artificiellement à l'étranger des revenus ou
des bénéfices passibles de l'impôt en France. »
Vous comprendrez, monsieur le ministre, que je maintienne mon amendement et
que je demande précisément ce matin qu'une enquêté soit ouverte sur l'affaire
Gemplus.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis,
président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
Madame Beaudeau, vous soulevez un problème d'une
particulière gravité : il ne saurait être question de manifester la moindre
tolérance à l'égard des paradis fiscaux.
J'observe que des progrès considérables ont été accomplis. Puis-je vous
rappeler, chère collègue, qu'au début des années quatre-vingt dix nous
validions en loi de finances rectificative des opérations de défiscalisation
menées par l'Etat actionnaire ! C'était l'époque du « ni-ni » et on «
repackageait » des titres subordonnés à durée indéterminée. C'est l'Etat qui
était responsable de cela !
De telles pratiques sont pernicieuses et sont de nature à détruire le pacte
républicain.
Si nous combattons votre amendement, madame Beaudeau, ce n'est pas parce que
nous ne reconnaissons pas le bien-fondé de votre préoccupation, mais c'est
parce que nous considérons que les dispositions du code général des impôts sont
suffisantes pour combattre les abus. C'est la volonté du Gouvernement qui sera
déterminante.
Je confirme les propos de M. le rapporteur général : la commission des
finances va réactiver les travaux qu'elle a menés sur la traque des mauvaises
pratiques.
Cela étant, madame Beaudeau, si nous parvenons à alléger le poids des
prélèvements qui pèsent sur les entreprises, ici, en France, nous contribuerons
également à lutter contre ces détournements de procédure. Ne doutez pas un seul
instant de notre détermination. La commission des finances oeuvrera en ce sens
et vous participerez à ses travaux, puisque vous êtes l'un de ses membres. Nous
mènerons ensemble, avec le Gouvernement, ce combat, sachant qu'il doit être
assumé pleinement par les membres de l'Union européenne. Il existe en effet des
pratiques au sein de l'Union européenne qui doivent conduire certains Etats à
rendre des comptes à leurs partenaires.
Ne vous méprenez pas, madame Beaudeau : nous avons les instruments nécessaires
à notre disposition, le reste est une question de volonté politique. C'est pour
cette raison que votre amendement est superfétatoire.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-185.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 18
M. le président.
« Art. 18. - Les associés collecteurs de l'Union d'économie sociale du
logement sont autorisés à verser, en 2003, 250 millions d'euros au budget de
l'Etat, à partir des fonds issus de la participation des employeurs à l'effort
de construction. L'union se substitue à ses associés collecteurs pour le
versement de cette contribution.
« Les modalités et la répartition entre les associés collecteurs de ce
versement seront prévues dans une convention entre l'Etat et l'Union d'économie
sociale du logement conclue en application du 2° de l'article L. 313-19 du code
de la construction et de l'habitation. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
L'article 18 prévoit, pour 2003, un versement au
budget de l'Etat à hauteur de 250 millions d'euros des collecteurs de ce que
nous sommes convenus d'appeler le « 1 % logement », bien qu'il ne s'élève plus
en réalité qu'à 0,45 %.
Cet article dispose que les modalités et la répartition entre les associés
collecteurs du versement seront prévues dans une convention entre l'Etat et
l'Union d'économie sociale du logement.
La contribution des employeurs au logement, du moins la part affectée au
budget de l'Etat, est modérée par rapport aux années précédentes ; il faut vous
en donner acte, monsieur le ministre. Elle est, de plus, clairement inscrite
dans le projet de loi de finances. Elle est enfin associée à la signature d'une
convention qui permettra de concrétiser la participation des partenaires
sociaux.
La commission, à la suite de cette analyse, a adopté le présent article sans
modification. Nous souhaiterions cependant, monsieur le ministre, que vous nous
apportiez quelques éléments d'appréciation complémentaires, et nous connaissons
votre science sur le sujet.
A quelle échéance prévoyez-vous la conclusion de la nouvelle convention avec
les partenaires sociaux ? Ceux-ci semblent très attachés à ce que la convention
du 11 décembre 2001 signée avec l'Etat puisse être modifiée pour prévoir
explicitement que la somme versée à l'Etat en 2003 représente le montant de la
sous-consommation de l'enveloppe consacrée au renouvellement urbain. Il
s'agissait notamment d'opérations de démolition-reconstruction de logements
sociaux sur le rythme de consommation des crédits desquelles le précédent
gouvernement avait formulé des hypothèses quelque peu optimistes.
Dans ces conditions, les dispositions figurant à l'article 2 C de la
convention du 11 décembre 2001 pourraient-elles être supprimées ? Monsieur le
ministre, pouvez-vous nous éclairer sur ce point ?
Enfin, les partenaires sociaux souhaitent qu'une réflexion s'engage sur les
modalités de leur participation à certains conseils d'administration des
organismes de ce secteur.
Monsieur le ministre, vous serait-il par ailleurs possible de nous confirmer
que les négociations sont en bonne voie ? Nous soulignons à ce propos une
différence de pratiques significative avec vos prédécesseurs. Il existe une
règle du jeu : le dialogue, la concertation et les prélèvements s'opèrent dans
des conditions claires et lisibles. Nous n'avons pas toujours pu en dire autant
dans la période récente. Nous avons eu l'occasion d'intervenir à plusieurs
reprises sur ces sujets pour déplorer des opérations à la hussarde, le manque
de concertation ou des prélèvements qui nous semblaient arbitraires.
Nous sommes sortis de l'arbitraire pour entrer dans la concertation, il faut
s'en réjouir. Nous serons toutefois très attentifs, monsieur le ministre, à la
réponse que vous serez en mesure de nous apporter.
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Je souhaite rassurer le rapporteur général, s'il en
était besoin, en lui indiquant que je n'ai jamais oublié, lors des discussions
que j'ai eues avec les représentants du « 1 % logement », la politique qu'a
toujours défendue le commission des finances du Sénat.
Je me souviens avoir indiqué au gouvernement auquel participait le président
de la commission des finances nos préoccupations à l'occasion de la création du
premier compte d'affectation spéciale. Par conséquent, je n'ai pas oublié la
longue histoire des versements effectués par ce que nous sommes convenus
d'appeler le « 1 % logement ».
C'est ce qui m'a conduit, vous avez bien voulu le souligner, à rencontrer les
représentants avant même que ce versement soit inscrit dans la loi de finances,
pour un montant que vous avez bien voulu qualifier de modéré, et qu'il puisse
se traduire par une convention librement consentie entre l'Etat et ces
représentants.
Vous vous êtes interrogé sur les délais dans lesquels ladite convention
pourrait être signée. C'est une question de semaines - j'avais même pensé
qu'elle serait signée au moment d'engager nos discussions - puisqu'il ne
subsiste pas de désaccord sur le fond. Nous en sommes à la perfection
rédactionnelle.
Vous m'avez demandé si l'article 2 C de la convention serait supprimé. C'est
probable, car les organismes intéressés en ont exprimé le souhait. A
l'attention de vos collègues qui pourraient s'en inquiéter, je tiens à préciser
que j'ai rencontré les partenaires sociaux représentant tant les employeurs que
les salariés. Nous souhaitons en effet travailler dans la plus grande
transparence.
En 2002 et en 2003, la montée en charge des démolitions, relativement lente, a
créé des disponibilités au sein de l'enveloppe de 457 millions d'euros
consacrée par le « 1% logement » au renouvellement urbain ; il est
vraisemblable, en revanche, qu'à partir de 2004 l'Union d'économie sociale du
logement, l'UESL, pourra consacrer l'intégralité de cette somme aux actions
prévues par la convention.
En ce qui concerne, enfin, les modalités de participation des collecteurs du «
1% logement » au conseil d'administration de certains organismes sociaux, je
suis ouvert à la réflexion, ainsi que mon collègue Jean-Louis Borloo. Une
concertation devrait aboutir dès lors que les différents partenaires sont
animés du même souci de participer au grand enjeu de la vie de nos cités qu'est
le renouvellement urbain.
M. le président.
Je mets aux voix l'article 18.
(L'article 18 est adopté.)
Article additionnel après l'article 18
M. le président.
L'amendement n° I-47, présenté par M. Girod, est ainsi libellé :
« Après l'article 18, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La Caisse de garantie du logement locatif social est autorisée, à titre
exceptionnel, à verser à la Société de garantie des organismes d'habitations à
loyer modéré contre les risques d'opérations immobilières prévue à l'article L.
453-1 du code de la construction et de l'habitation, un concours maximum de
quinze millions d'euros pour chacune des années 2003 et 2004. Les conditions
d'application de cette décision sont définies par une convention à passer entre
les deux organismes.
« II. - Les versements de la Caisse de garantie du logement locatif social à
la Société de garantie des organismes d'habitations à loyer modéré ne donnent
lieu à aucune indemnité ou perception d'impôts, droits ou taxes.
« III. - Au II de l'article 164 de la loi 2000-1208 du 13 décembre 2000
relative à la solidarité et au renouvellement urbains, la date : « 1er janvier
2003 » est remplacée par la date : « 1er juillet 2003 ».
« IV. - La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du II
ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe
additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je le reprends, au nom de la commission, monsieur le
président.
M. le président.
Il s'agit donc de l'amendement n° I-47 rectifié, présenté par M. Marini, au
nom de la commission.
La parole est à M. le rapporteur général, pour le défendre.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Notre collègue M. Paul Girod, dans le cadre d'une
réflexion tout à fait opportune, nous proposait de permettre à la Caisse de
garantie du logement locatif social de verser à la nouvelle société de garantie
créée par la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains une
somme de 15 millions d'euros en 2003 et en 2004, en franchise d'impôt.
La mise en place de cette société de garantie serait, dans le même temps,
repoussée du 1er janvier au 1er juillet 2003. En effet, la création de la
société de garantie des opérations d'accession sociale à la propriété des
organismes d'HLM, prévue par la loi SRU, a été retardée en raison des
difficultés rencontrées pour dégager les fonds nécessaires à la dotation
initiale de l'organisme. Les organismes d'HLM, pour ce qui les concerne,
semblent désormais prêts à verser un concours de 15 millions d'euros en 2003 et
en 2004 pour faire fonctionner la nouvelle société.
L'amendement de notre collègue Paul Girod vise à faciliter cet apport en
franchise d'impôt et à repousser l'entrée en vigueur du nouveau dispositif au
1er juillet 2003, afin qu'il n'y ait pas de rupture de garantie pour les
opérations d'accession à la propriété du fait des retards que j'ai évoqués.
Telles sont, monsieur le ministre, les propositions que souhaitait nous
soumettre Paul Girod. La commission des finances a considéré que l'initiative
était opportune et c'est pourquoi j'ai repris l'amendement en son nom.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Monsieur le président, je vais prolonger le propos de
M. le rapporteur général, afin d'éviter les redondances. Le Gouvernement est
particulièrement attentif à la constitution de la société de garantie des
opérations d'accession sociale, qui a vocation à être gérée et financée par les
professionnels.
Comme vous l'indiquez, monsieur le rapporteur général, un délai supplémentaire
de six mois apparaît techniquement nécessaire pour mettre en place cette
société. Le Gouvernement envisageait d'inscrire ce report dans le projet de loi
portant diverses dispositions relatives à l'urbanisme, à l'habitat et à la
construction, qui sera prochainement présenté au Parlement.
Si la Haute Assemblée souhaite y pourvoir dès à présent, je m'en remets à sa
sagesse et, dans cette hypothèse, je lève le gage.
M. le président.
Il s'agit donc de l'amendement n° I-47 rectifié
bis
.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 18.
Article 19
M. le président.
« Art. 19. - A l'article 5 de la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 portant
diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel, l'année "2002" est
remplacée par l'année "2003". »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° I-48, présenté par MM. Souvet, Vasselle, Gournac, Esneu,
Leclerc, Giraud, P. Blanc, Chérioux et Lardeux et Mme Olin, est ainsi libellé
:
« Rédiger comme suit cet article :
« I. - A la fin de l'article 5 de la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001
portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel, les mots :
"et 1 219 592 137 euros en 2002" sont supprimés.
« II. - Les éventuelles pertes de recettes pour l'Etat susceptibles de
résulter du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une
taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général
des impôts. »
L'amendement n° I-186, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit cet article :
« A la fin de l'article 5 de la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 portant
diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel, les mots : "et 1
219 592 137 euros en 2002" sont supprimés. »
La parole est à M. Louis Souvet, pour présenter l'amendement n° I-48.
M. Louis Souvet.
Cet amendement vise à supprimer le versement de 1,2 milliard d'euros de
l'UNEDIC à l'Etat qui avait été prévu par la loi du 17 juillet 2001 et que le
présent article reporte de 2002 à 2003.
Ce versement apparaît aujourd'hui difficilement soutenable pour notre régime
d'assurance chômage dont la situation financière s'est fortement dégradée.
En juin 2001, à la date d'examen du projet de loi autorisant ce versement, les
perspectives financières de l'UNEDIC apparaissaient encore favorables ;
l'UNEDIC comptait à l'époque sur un résultat net largement excédentaire en
2002.
Depuis, la situation a profondément évolué. Déjà, au mois de juin dernier, le
Gouvernement avait logiquement accepté de reporter le versement prévu en 2002 à
2003, « compte tenu des grandes difficultés observées en 2002 et des efforts
consentis par les partenaires sociaux ».
Il est vrai que les partenaires sociaux gestionnaires du régime d'assurance
chômage avaient alors adopté une série de mesures de sauvegarde, passant
notamment par une hausse de 0,2 point de cotisations, permettant d'améliorer le
résultat net du régime de 800 millions d'euros en 2002. Mais la forte hausse du
nombre de chômeurs indemnisés a déjà absorbé l'impact de ces mesures de
sauvegarde.
L'UNEDIC, qui table désormais sur un déficit d'exploitation de l'ordre de 3,7
milliards d'euros en 2002, doit désormais recourir à l'emprunt pour éviter une
crise de trésorerie.
Dans ce contexte, le versement de 1,2 milliard d'euros en 2003 apparaît
insoutenable pour le régime d'assurance chômage. Déjà, dans leur relevé de
décisions du 19 juin dernier, les partenaires sociaux avaient demandé que «
l'opportunité de ce versement en 2003 soit examinée au regard de la situation
générale du régime. »
Cette opportunité apparaît dorénavant pour le moins douteuse. Les partenaires
sociaux devraient en effet adopter, d'ici à la fin de l'année, de nouvelles
mesures de sauvegarde. Là encore, une hausse significative des cotisations
semble inéluctable.
Dès lors, au moment où le Gouvernement affiche et met en oeuvre une politique
vigoureuse d'allégement des charges sociales, il serait paradoxal d'augmenter
les charges sociales dans le seul but d'accroître les recettes non fiscales de
l'Etat.
Aussi, je crois qu'il serait prudent de supprimer le versement prévu par cet
article ou, à tout le moins, de le reporter
sine die
. Il en va de la
sauvegarde même de notre régime d'assurance chômage.
M. le président.
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, pour défendre l'amendement n°
I-186.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
L'article que nous examinons prévoit le report en 2003 du versement par
l'UNEDIC de la somme de 1,219 milliard d'euros prévu pour le mois de novembre
2002 par l'article 5 de la loi du 17 juillet 2001, qui a en particulier porté
agrément de la nouvelle convention de l'UNEDIC instituant le Plan d'aide au
retour à l'emploi, le PARE.
L'amendement n° I-186 vise à supprimer la totalité de cette créance de l'Etat
sur l'UNEDIC. Cette mesure s'impose selon nous compte tenu à la fois de
l'ampleur des difficultés financières rencontrées cette année par cet organisme
et des mauvaises perspectives pour l'emploi en 2003 et dans les années à
venir.
Au cours de cette année, la situation financière de l'UNEDIC s'est
considérablement dégradée ; son déficit devrait atteindre 3,7 milliards
d'euros.
Cette situation préoccupante est la conséquence directe de la dégradation de
l'emploi, de la multiplication des plans sociaux et des licenciements
économiques comme de la poursuite de l'extension de la précarité. Elle résulte
également de l'application de la nouvelle convention, du coût du PARE et des
diminutions des taux de cotisations, notamment patronales, totalement
inconséquentes décidées sur la base des fragiles excédents des années 2000 et
2001.
Tout porte à croire que cette situation devrait perdurer l'an prochain. Même
en retenant vos prévisions de croissance très optimistes, monsieur le ministre,
le nombre de chômeurs augmenterait de 80 000 d'après l'INSEE et de 200 000
voire 250 000 selon d'autres instituts de prévision. Dans ces conditions, il
serait aussi inopportun l'an prochain qu'aujourd'hui de priver l'UNEDIC de
ressources.
Pour notre part, nous ne saurions accepter, comme le MEDEF le propose, que
l'on abaisse encore le niveau d'indemnisation des chômeurs en revenant, par
exemple, à la dégressivité des allocations, en augmentant les délais de carence
ou en baissant le taux de remplacement.
Je rappelle, comme je l'ai fait à l'occasion d'une question d'actualité
adressée à M. Borloo la semaine dernière, que près de 60 % des chômeurs ne
perçoivent rien des ASSEDIC et que l'indemnité moyenne s'élève seulement à 872
euros par mois.
De même, nous sommes totalement opposés au recours à l'emprunt sur les marchés
financiers, au taux du marché, pour combler les déficits, comme le dernier
conseil d'administration de l'UNEDIC vient de l'autoriser pour un montant de
2,9 milliards d'euros. Ce n'est pas aux chômeurs ni aux cotisants de payer des
intérêts financiers aux banques. L'Etat doit garantir des prêts sans frais
financiers qui pourraient être accordés, par exemple, par des institutions
financières publiques.
En 2003, il ne doit pas creuser le déficit en confirmant sa créance de 1,2
milliard d'euros. L'origine de cette dette de l'UNEDIC est d'ailleurs
contestable. Les versements prévus pour les années 2001 et 2002 par la loi du
17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et
culturel avaient été présentés, entre autres, comme la contribution de
l'organisme au financement de la réduction du temps de travail, ou plutôt aux
exonérations de cotisations sociales patronales inscrites dans les lois
Aubry.
Nous nous étions prononcés contre ce versement en 2001 en refusant que
l'argent de l'assurance chômage puisse servir à financer des cadeaux au
patronat dont la nocivité pour les salaires, l'emploi et le financement de la
sécurité sociale comme de l'UNEDIC est bien connue.
Nous vous invitons donc, dans une optique quelque peu différente de celle de
notre collègue Louis Souvet, à voter la suppression de la créance de l'Etat sur
l'UNEDIC en adoptant notre amendement.
Nous ne changeons rien à notre position de principe selon laquelle le
financement de l'assurance chômage doit avant tout provenir des cotisations. A
ce titre, je m'inquiète que vous n'ayez toujours pas indiqué, monsieur le
ministre, comment vous comptiez compenser auprès de l'UNEDIC le coût des
déductions de cotisations chômage que vous avez accordées - et que nous avions
désapprouvées - dans le cadre de la loi instituant les contrats-jeunes.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Ma réponse sera commune aux amendements n°s I-48 et
I-186, lesquels, si je ne me trompe, sont assez proches.
La loi du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social,
éducatif et culturel avait programmé, à titre exceptionnel, un versement de
l'UNEDIC à l'Etat de 1,067 milliard d'euros en 2001 et de 1,219 milliard
d'euros en 2002. En raison de la dégradation des comptes de l'UNEDIC - son
déficit avoisinerait 3,7 milliards d'euros cette année - l'article 19 du projet
de loi de finances organise le report en 2003 de la partie qui devait être
versée en 2002, ce report constituant une mesure d'attente.
Le régime de l'UNEDIC est en effet susceptible d'aménagements techniques
propres à favoriser, sans doute, son redressement et, tant que nous ne saurons
pas comment la situation évoluera, il serait, de notre point de vue,
dommageable de supprimer le versement de 1,22 milliard d'euros. Cela
équivaudrait à tirer la conséquence d'un débat ou de mises au point qui n'ont
pas encore eu lieu.
Au travers de l'amendement n° I-48, je crois comprendre que la préoccupation
première du vice-président de la commission des affaires sociales, M. Louis
Souvet, est bien le devenir structurel de l'UNEDIC, compte tenu de la situation
économique et de la situation de l'emploi, ainsi que de l'assiette des
contributions qui financent l'UNEDIC et des charges supportées par l'UNEDIC
dans le cadre défini par les partenaires sociaux.
C'est donc, de manière fondamentale, la question de l'équilibre financier
prévisionnel de l'UNEDIC qui est posée.
Or, il ne me semble pas que nous disposions ce matin des éléments nécessaires
- à moins M. le ministre nous apporte des informations complètement nouvelles -
pour traiter la question au fond, sauf à préjuger la réponse, ce à quoi
reviendrait, je l'ai dit, la suppression du versement de 1,22 milliard
d'euros.
Mes chers collègues, considérant que tout se tient dans nos comptes, et que ce
n'est pas, d'un côté, le solde des organismes sociaux et, de l'autre, le solde
de la loi de finances qu'il faut envisager mais bien le tout, c'est-à-dire le
déficit global des administrations publiques, il ne semble pas à la commission
des finances que l'on doive revenir sur les dispositions prévues par la loi du
17 juillet 2001, du moins pas tout de suite, pas dans les conditions
présentes.
En conclusion, la commission partage totalement l'avis exprimé par le
président de la commission des affaires sociales, M. Nicolas About, lors du
débat sur les prélèvements obligatoires et leur évolution qui s'est tenu le 7
novembre dernier.
M. About parlait de ceux qui ne considèrent que la loi de financement de la
sécurité sociale et voudraient la « décharger » en faisant davantage appel à
l'Etat et de ceux qui, à l'inverse, ne considèrent que la loi de finances de
l'Etat et voudraient déplacer les curseurs de manière à réduire optiquement le
déficit de l'Etat par des contributions additionnelles des organismes
sociaux.
Nous nous étions trouvés en total accord pour faire prévaloir une optique
globale consolidée, et c'est celle qui a été retenue à l'issue du débat. C'est
d'ailleurs l'optique qui doit être adoptée afin de respecter pleinement nos
engagements européens, lesquels s'expriment, je le rappelle, en termes de solde
global des administrations publiques.
Mes chers collègues, ces quelques indications ayant été données, la commission
souhaite maintenant entendre le Gouvernement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Je veux commencer par rassurer Mme Beaudeau, qui
s'inquiétait de savoir si les exonérations pour les contrats jeunes en
entreprise seraient compensées. Il n'y a, madame Beaudeau, aucun problème : une
convention permettra la compensation.
Les amendements n°s I-48 et I-186 me donnent l'occasion de rappeler que
lorsque j'ai proposé, lors de l'examen du collectif, de faire crédit, en
quelque sorte, à l'UNEDIC jusqu'au projet de budget pour 2003, le Gouvernement
a été accusé, par le groupe socialiste notamment, d'accroître optiquement le
déficit.
Aujourd'hui, nous constatons que les problèmes de financement étaient réels en
2002.
Conformément à l'article 6 de la convention du 1er janvier 2001, les
partenaires sociaux ont pris des mesures de sauvegarde destinées à rééquilibrer
le régime d'assurance chômage. Dans le cadre des négociations, ils ont décidé
de reporter à 2003 le versement de 1,22 milliard dû à l'Etat.
L'article 19 n'a donc pas d'autre objet que d'autoriser l'UNEDIC à honorer
l'engagement pris dans le cadre de la convention du 1er janvier 2001 telle
qu'elle a été modifiée par l'avenant du 19 juin 2002.
Le vote des amendements proposés serait contraire à l'engagement pris dans
cette convention et à la volonté clairement exprimée par les partenaires
sociaux, qui sont les gestionnaires de l'UNEDIC.
En outre, le non-versement dégraderait la situation du budget de l'Etat, comme
M. le rapporteur général vient de le dire. S'il ne s'agit en aucune façon pour
le Gouvernement de nier les vraies difficultés d'équilibre de l'UNEDIC, je ne
crois pas qu'il soit raisonnable, du point de vue de la bonne gestion de nos
finances publiques, que le budget de l'Etat soit déséquilibré à due
concurrence.
L'Etat a fait un effort en acceptant de reporter l'encaissement de la créance
du budget de 2002 sur le projet de budget pour 2003, mais il n'est pas possible
d'aller au-delà, sauf à connaître des difficultés pour maintenir l'équilibre
budgétaire de l'Etat.
A ce stade, monsieur le rapporteur général, je n'ai pas d'autre élément à
porter à la connaissance du Parlement, mais je ne peux pas, malgré toute la
considération que je porte à mon ancien collègue Louis Souvet, donner un avis
favorable sur son amendement, car celui-ci aurait, comme l'amendement n° I-186,
pour effet de dégrader le solde budgétaire de l'Etat, à concurrence de la somme
prévue.
C'est ce qui me conduit, mesdames, messieurs les sénateurs, à vous engager à
rejeter les deux amendements : à défaut, tout le travail que nous menons
ensemble depuis plusieurs jours serait mis à mal.
M. le président.
Monsieur Souvet, l'amendement n° I-48 est-il maintenu ?
M. Louis Souvet.
Je vous remercie, monsieur le ministre, des explications que vous venez
d'apporter.
Dans le cadre des travaux que je conduis pour le compte du Sénat, j'ai pu
auditionner le directeur général de l'UNEDIC. Comme je l'ai dit dans mon
propos, j'ai constaté que les mesures de sauvegarde qui avaient été prises ne
suffiraient pas à équilibrer la situation financière de cette institution, qui
est donc condamnée à enregistrer de nouveau un déficit considérable.
Vous avez annoncé 3,7 milliards d'euros de déficit : j'avais en tête le
chiffre de 3,8 milliards, et j'espère que nous n'irons pas plus loin.
Par ailleurs, lorsqu'un régime d'allégement de charges est mis en place, il me
semble quelque peu dommageable de ne pas agir à la source, afin d'alléger les
charges là où c'est nécessaire.
Pour autant, monsieur le ministre, j'ai bien compris que cet amendement, s'il
n'est pas inutile, est prématuré.
(M. le ministre délégué opine.)
J'accepte de le retirer, mais j'aimerais tout de même connaître la position de
l'Etat à l'égard de l'UNEDIC, afin de savoir où nous allons.
M. le président.
L'amendement n° I-48 est retiré.
Madame Beaudeau, l'amendement n° I-186 est-il maintenu ?
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-186.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 19.
(L'article 19 est adopté.)
II. - Ressources affectées
Article 20
M. le président.
« Art. 20. - Sous réserve des dispositions de la présente loi, les
affectations résultant de budgets annexes et comptes spéciaux ouverts à la date
de dépôt de la présente loi sont confirmées pour l'année 2003. »
- (Adopté.)
Article 21
M. le président.
« Art. 21. - I. - Le montant de la contribution sociale de solidarité à la
charge des sociétés mentionnée à l'article L. 651-1 du code de la sécurité
sociale, affecté au régime d'assurance vieillesse des professions mentionnées
au 4° de l'article L. 621-3 du même code, est fixé à 650 millions d'euros en
2003.
« II. - Il est institué, pour 2003, au profit du budget annexe des prestations
sociales agricoles, un prélèvement de 31 millions d'euros, selon les modalités
suivantes :
« - 3 millions d'euros sur les allocations de gestion versées aux caisses de
mutualité sociale agricole en vertu de l'article L. 723-11 du code rural,
répartis au prorata du montant de l'assiette des cotisations mentionnées à
l'article L. 731-10 du même code émises au titre de l'année 2002 ;
« - 28 millions d'euros sur les réserves et reports à nouveau des caisses de
mutualité sociale agricole, au prorata de ces réserves et reports à nouveau
disponibles inscrits à leurs comptes financiers au 31 décembre 2002.
« Le recouvrement de ce prélèvement est assuré par la Caisse centrale de la
mutualité sociale agricole, par compensation sur les financements qu'elle
alloue aux caisses de mutualité sociale agricole. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-73 est présenté par MM. Miquel, Angels, Auban, Demerliat,
Haut, Lise, Marc, Massion, Moreigne, Sergent et les membres du groupe
socialiste.
L'amendement n° I-187 est présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant
et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer le II de cet article. »
La parole est à M. Jean-Pierre Demerliat, pour présenter l'amendement n°
I-73.
M. Jean-Pierre Demerliat.
Cet amendement vise à supprimer un nouveau prélèvement sur les caisses de la
Mutualité sociale et agricole.
En effet, outre que ce type de prélèvement autoritaire devient une habitude
dont il conviendrait de se passer, je me permettrai de souligner que la
véritable ponction opérée sur la sécurité sociale agricole pour équilibrer le
BAPSA, le budget annexe des prestations sociales agricoles, constitue une
injustice, et ce à quatre titres.
Injustice, parce que ce nouveau prélèvement ponctionne les caisses qui ont des
réserves. Or, si elles ont des réserves, c'est parce qu'elles sont bien gérées.
Récompensés de leur rigueur de gestion de cette drôle de façon, leurs
gestionnaires seront déresponsabilisés.
Injustice, parce que les caisses moins bien gérées échapperont, elles, en
grande partie à cette ponction.
Injustice, parce que les caisses situées dans les zones défavorisées sont,
elles aussi, touchées.
Injustice, enfin, parce que le prélèvement dont nous discutons dans ce projet
de loi de finances semble devoir se pérenniser. Il ne répondrait donc pas à une
demande urgente et, surtout, conjoncturelle.
C'est pourquoi le groupe socialiste vous demande, mes chers collègues, de
voter cet amendement.
M. le président.
La parole est à M. Thierry Foucaud, pour défendre l'amendement n° I-187.
M. Thierry Foucaud.
L'article 21, à l'image de maintes dispositions discutées ces dernières années
et cet été encore lors de l'examen du collectif budgétaire, institue un
prélèvement plus ou moins autoritaire sur des fonds dont la vocation première
n'est pas de participer à la réduction du déficit de l'Etat.
La première partie de cet article n'est pas nécessairement tout à fait
scandaleuse puisqu'il ne nous semble pas anormal que la C 3 S participe à une
forme de compensation interrégimes avec le régime agricole.
En revanche, la seconde partie est beaucoup plus discutable. Elle intervient
alors que les caisses de la Mutualité sociale agricole ont déjà été mises à
contribution dans le collectif budgétaire de l'été dernier puisque l'article 2
prévoyait un prélèvement de 161 millions d'euros sur les fonds concernés.
En six mois, ce seront donc près de 200 millions d'euros qui auront été
distraits de manière autoritaire des caisses de la MSA, ce qui, évidemment,
amène à s'interroger sur le sens que l'on peut donner à la liberté de gestion
de la sécurité sociale agricole.
Une telle orientation a-t-elle une raison d'être ?
Oui ! Dans un premier temps, elle permet à l'Etat de se désengager de ses
obligations quant à l'équilibre du BAPSA. Rappelons d'ailleurs que la dotation
du budget annexe au titre de l'année 2003 est en recul par rapport à celle de
l'exercice 2002.
Pis, on constate que la mise en place du système de protection sociale
complémentaire obligatoire des agriculteurs se situe, pour ce qui concerne les
engagements de l'Etat, non dans le budget de l'agriculture, mais dans celui des
charges communes.
En clair, la participation de l'Etat à l'effort de solidarité entre les
agriculteurs n'est pas gagée. Elle est donc susceptible de faire l'objet d'un
ajustement à la baisse.
En toute clarté, il conviendrait donc que le paragraphe II de l'article 21
soit supprimé, matérialisant le retour naturel des financements correspondants
dans le cadre des concours budgétaires normaux de l'Etat, offrant par là même
un signe de solidarité avec les agriculteurs de notre pays et les salariés des
exploitations agricoles.
C'est sous le bénéfice de ces observations que nous vous invitons à adopter
cet amendement n° 187.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission n'est pas très enthousiaste, car la
suppression du prélèvement de 31 millions d'euros au profit du BAPSA institué
par le présent projet de loi de finances ne lui semble pas opportune, et ce
pour deux raisons essentielles.
D'une part, le montant de ce prélèvement a été décidé en accord avec les
représentants des caisses de la Mutualité sociale agricole.
MM. Jean-Pierre Godefroyet Jean-Pierre Demerliat.
Ce n'est pas ce qu'ils disent !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
D'autre part, une telle suppression aggraverait la
situation financière du BAPSA.
Si vous le privez de ces 31 millions d'euros de ressources en provenance de la
MSA, il faut nous dire sur quelle ligne les retrouver !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Il faut faire payer les riches !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
D'après ce qui m'a été dit, ce sont les représentants
des caisses de la MSA qui ont accepté,...
M. Gérard César.
Contraints et forcés !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
... peut-être en faisant contre mauvaise fortune bon
coeur, ce prélèvement supplémentaire, afin notamment d'assurer le financement
du nouveau régime de retraite complémentaire obligatoire des agriculteurs.
Cette avancée sociale a bel et bien été mise en perspective, et il faut donc
être objectif dans cette affaire, qui, nous le savons, est très délicate.
Nous avons évoqué ce sujet, vous vous en souvenez fort bien, monsieur le
ministre, lors de la discussion du dernier projet de loi de finances
rectificative. La situation dans laquelle vous aviez trouvé les finances
publiques et les délais très brefs dans lesquels vous aviez dû préparer le
projet de loi de finances rectificatives ne vous avaient peut-être pas permis,
à l'époque, de prendre tout le temps nécessaire pour organiser les
concertations et les consultations avec ce milieu que nous connaissons bien.
Mais, depuis lors, de nombreux contacts ont eu lieu et chacun a désormais
conscience des difficultés structurelles et financières auxquelles est
confronté le BAPSA, en même temps que du fait qu'une retraite complémentaire
obligatoire des agriculteurs est mise en place, ce qui explique les conditions
dans lesquelles les caisses de la Mutualité sociale agricole sont appelées à y
contribuer.
L'équilibre, comme le sujet, est délicat, nous le constatons dans nos
départements, mais, en toute conscience, monsieur le ministre, la commission
estime que vous avez fait de votre mieux : vous vous êtes efforcé d'écouter les
uns et les autres, et le dispositif auquel vous êtes parvenu est, dans
l'ensemble, équilibré.
C'est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur les amendements n°s
I-73 et I-187.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Je rappelle que l'enjeu est le financement de la
protection sociale des agriculteurs, ce que je n'ai pas entendu lors de la
défense des amendements, puisque le prélèvement était présenté comme un
prélèvement sans destination. Eh bien, sa destination est claire : c'est la
protection sociale des agriculteurs.
Si les auteurs des amendements ont quelque chose contre la protection sociale
des agriculteurs qu'ils le disent ; s'ils n'ont rien contre, qu'ils disent qui
doit payer !
Sont-ce les contribuables français ? J'indique que pour les contribuables
français la facture s'élèverait à 523 millions d'euros, à comparer aux 31
millions d'euros du prélèvement dont les amendements prévoient la
suppression... Et encore, ce chiffre de 523 millions n'intégre pas le montant
considérable des impôts affectés au BAPSA.
Mesdames, messieurs les sénateurs, il faut savoir raison garder. Le maintien à
un bon niveau de la protection sociale des agriculteurs justifie leur
participation. Si ce n'est pas votre avis, il faut le dire !
Lors de la préparation du collectif, j'ai trouvé une situation de
non-financement du budget annexe des prestations sociales agricoles qui
dépassait franchement le soutenable, et nous nous efforçons maintenant
d'équilibrer ce budget de manière responsable et durable.
La contribution qui est demandée aux caisses n'a pas été décidée
autoritairement, mais a été négociée avec elles. Ces caisses sont parfaitement
conscientes du fait que les moyens dont elles disposent pour vivre et
travailler proviennent des cotisations des agriculteurs. Ce ne sont donc pas
des organismes qui génèrent leurs propres ressources. Il s'agit d'opérer un
prélèvement qui est tout à fait supportable pour eux, destiné à financer la
protection sociale des agriculteurs.
Dans ces conditions, mesdames, messieurs les sénateurs, je demande aux auteurs
des amendements de bien vouloir les retirer. A défaut, je crois que le Sénat
n'aura pas de scrupule à les rejeter. Je suis à l'entière disposition de ceux
d'entre vous qui éprouveraient quelque curiosité à l'égard du financement de la
protection sociale des agriculteurs et souhaiteraient obtenir des explications
complémentaires. Ils verront qu'il faut faire un choix très clair entre une
augmentation des prélèvements supportés par les contribuables et l'utilisation
des réserves existantes, qui sont issues, je le répète, des cotisations des
agriculteurs.
Si les deux amendements n'étaient pas retirés, j'émettrais un avis
défavorable. Je le dis franchement, sans aucun complexe, en tant qu'ancien
sénateur représentant d'un département rural.
M. le président.
Monsieur Miquel, l'amendement n° I-73 est-il maintenu ?
M. Gérard Miquel.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
Monsieur Foucaud, l'amendement n° I-187 est-il maintenu ?
M. Thierry Foucaud.
Il est maintenu, monsieur le président.
M. le président.
Je mets aux voix les amendements identiques n°s I-73 et I-187.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 21.
(L'article 21 est adopté.)
Article 22
M. le président.
« Art. 22. - I. - L'article L. 731-24 du code rural est ainsi rédigé :
«
Art. L. 731-24
. - Les associés de sociétés de personnes non affiliés
au régime des personnes non salariées des professions agricoles et percevant
des revenus professionnels tels que définis à l'article L. 731-14 ont à leur
charge une cotisation de solidarité calculée en pourcentage de leurs revenus
professionnels afférents à l'année précédant celle au titre de laquelle la
cotisation est due ou, lorsque les revenus professionnels ne sont pas connus,
sur une assiette forfaitaire provisoire déterminée dans des conditions fixées
par décret. Le montant de cette cotisation est régularisé lorsque les revenus
sont connus. Le taux de la cotisation est déterminé par décret.
« Cette cotisation de solidarité est également due par les associés visés à
l'alinéa précédent sur les revenus de capitaux mobiliers qu'ils reçoivent au
titre de leur participation dans des sociétés ayant une activité agricole, tels
que définis à l'article 109 du code général des impôts. Elle est calculée en
pourcentage d'une assiette forfaitaire déterminée dans des conditions fixées
par décret. Le taux de la cotisation est déterminé par décret.
« Les associés des sociétés ne relevant pas de la contribution sociale de
solidarité à la charge des sociétés mentionnée à l'article L. 651-1 du code de
la sécurité sociale et qui sont associées d'une société agricole sont également
redevables de cette cotisation dans les conditions prévues à l'alinéa
précédent.
« Un décret détermine les modalités d'appel, de recouvrement et de contrôle de
ces cotisations de solidarité. »
« I
bis.
- Le troisième alinéa de l'article L. 722-5 du même code est
ainsi rédigé :
« En cas de coexploitation ou d'exploitation sous forme sociétaire, pour que
les membres ou associés participant aux travaux soient considérés comme
non-salariés agricoles, l'importance minimale de l'exploitation ou de
l'entreprise agricole requise est égale à celle fixée au premier alinéa. »
« II. - Le VII de l'article L. 136-4 du code de la sécurité sociale est
complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour les personnes redevables de la cotisation de solidarité définie à
l'article L. 731-24 du code rural, lorsque les revenus professionnels ne sont
pas connus, la contribution est calculée sur une assiette forfaitaire
provisoire égale à 900 fois le montant du salaire minimum de croissance. Le
montant de cette contribution est régularisé lorsque les revenus sont
connus.
« Pour l'application des dispositions du présent VII, le salaire minimum de
croissance et la valeur de la surface minimale d'installation à prendre en
considération sont ceux en vigueur au 1er janvier de l'année au titre de
laquelle la contribution est due. »
« III. - Les dispositions des I, I
bis
et II sont applicables à compter
du 1er janvier 2003. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° I-28, présenté par M. César, Mme Bout, MM. de Broissia,
Doublet, Fournier, Leroy, Mathieu, de Richemont, Rispat, Valade et Vasselle,
est ainsi libellé :
« A. - Rédiger comme suit le I de cet article :
« I. - Les articles L. 731-23 et L. 731-24 du code rural sont abrogés. »
« B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, compléter
cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
«
...
- La perte de recettes résultant pour le budget annexe des
prestations sociales agricoles de la suppression des cotisations de solidarité
est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux
droits prévus à l'article 1609
unvicies
du code général des impôts. »
L'amendement n° I-112 rectifié, présenté par M. Franchis et les membres du
groupe de l'Union centriste, est ainsi libellé :
« A. - Rédiger comme suit le I de cet article :
« I. - Les articles L. 731-23 et L. 731-24 du code rural sont abrogés. »
« B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, compléter
cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
«
...
- La perte de recettes résultant pour le budget annexe des
prestations sociales agricoles de la suppression des cotisations de solidarité
est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux
droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-221, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« I. - Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de
cet article pour l'article L. - 731-24 du code rural, supprimer les mots : "de
personnes".
« II. - Modifier comme suit le deuxième alinéa du même texte :
«
a)
Dans la première phrase, remplacer les mots : "visés à l'alinéa
précédent" par les mots : "non affiliés au régime des personnes non salariées
des professions agricoles" et les mots : "à l'article 109 du code général des
impôts" par les mots : "au 1° du 1 de l'article 109 du code général des
impôts".
«
b)
Dans la deuxième phrase, remplacer les mots : "d'une assiette
forfaitaire" par les mots : "des revenus de capitaux mobiliers afférents à
l'année précédant celle au titre de laquelle la cotisation est due ou, lorsque
ces revenus ne sont pas connus, d'une assiette forfaitaire provisoire".
«
c)
Après la deuxième phrase, insérer une phrase ainsi rédigée :
« Le montant de cette cotisation est régularisé lorsque les revenus sont
connus. »
« III. - Modifier comme suit le troisième alinéa du même texte :
«
a)
Remplacer les mots : "ne relevant pas" par les mots : "ne donnant
pas lieu à perception".
«
b)
Après les mots : "associées d'une société" insérer les mots :
"ayant une activité".
«
c)
A la fin de cet alinéa, remplacer les mots : "dans les conditions
prévues à l'alinéa précédent" par les mots : "calculée en pourcentage d'une
assiette forfaitaire dans des conditions fixées par décret".
«
d)
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
« Le taux de la cotisation est déterminé par décret. »
« IV. - Après le troisième alinéa du même texte, insérer un alinéa ainsi
rédigé :
« Les sociétés ayant une activité agricole et mentionnées à l'alinéa précédent
sont tenues de réaliser annuellement une déclaration à l'organisme chargé du
recouvrement de la cotisation de solidarité comportant notamment le nom ou la
raison sociale et l'adresse de leurs associés personnes morales, et des
personnes physiques non assujetties en raison de leur activité dans lesdites
sociétés aux régimes des salariés ou des non-salariés agricoles. »
« V. - Rédiger comme suit le dernier alinéa du même texte :
« Un décret détermine les modalités d'application du présent article. »
La parole est à M. Gérard César, pour présenter l'amendement n° I-28.
M. Gérard César.
Cet amendement vise les cotisations dites de solidarité pour les
non-exploitants agricoles.
Les articles L. 731-23 et L. 731-24 du code rural instaurent une cotisation
sociale dite de solidarité pour les exploitants de structures d'une taille
inférieure à une demi SMI - surface minimale d'installation -, ainsi que pour
les associés non-exploitants des sociétés de personnes assujetties au régime
des non-salariés agricoles.
Les personnes concernées par ces cotisations dites de solidarité sont en
grande partie des apporteurs de capitaux. Or ces cotisations, qui touchent des
personnes qui apportent des fonds pourtant difficiles à mobiliser en
agriculture, n'ouvent à celles-ci aucun droit en contrepartie, ce qui est
contraire à la jurisprudence européenne.
Par ailleurs, ces cotisants de solidarité sont en outre redevables de la
contribution sociale généralisée, la CSG, et de la cotisation pour le
remboursement de la dette sociale, la CRDS, qui sont également des cotisations
de solidarité. Il paraît ainsi inéquitable de faire supporter à ces personnes
une cotisation de solidarité supplémentaire.
Ces cotisations de solidarité, dont le rendement est très faible pour le BAPSA
- le produit est de 3 millions d'euros s'agissant des associés non exploitants,
montant à mettre en perspective avec le coût de fonctionnement -, ont pour
effet non pas d'alimenter de manière durable les caisses du BAPSA, mais, bien
au contraire, de décourager les investisseurs susceptibles de s'intéresser au
secteur agricole et d'inciter les non-salariés agricoles à se tourner vers le
régime des non-salariés non agricoles.
M. le président.
La parole est à M. Serge Franchis, pour présenter l'amendement I-112
rectifié.
M. Serge Franchis.
Cet amendement a le même objet que celui qui vient d'être défendu par M.
César.
J'observerai tout d'abord qu'il semble inopportun de décourager les
investisseurs de s'intéresser au secteur agricole.
Ensuite, les cotisations qui frappent les exploitants de structures d'une
taille inférieure à une demi SMI ainsi que les associés non exploitants des
sociétés de personnes assujetties au régime des non-salariés agricoles ne leur
ouvrent aucun droit en contrepartie, ce qui est contraire, comme l'a dit M.
César, à la jurisprudence européenne.
Enfin, ces cotisants de solidarité sont par ailleurs redevables de la CSG et
de la CRDS, qui sont également des cotisations de sécurité. Il paraît donc
inéquitable de faire supporter à ces personnes une cotisation de solidarité
supplémentaire.
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué, pour présenter l'amendement n°
I-221.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Cet amendement est rédactionnel.
L'Assemblée nationale a amendé le dispositif initial en introduisant des
mesures visant à élargir l'assiette des cotisations de solidarité. L'objectif
était, d'une part, de limiter l'ampleur du relèvement du taux de ces
cotisations, et, d'autre part, de faire participer l'ensemble des revenus tirés
d'une activité agricole au financement de la protection sociale des
agriculteurs.
Le Gouvernement souhaite apporter quelques aménagements techniques aux
dispositions présentées par M. Yves Censi, rapporteur spécial du BAPSA à
l'Assemblée nationale, afin notamment de faciliter le recouvrement des
cotisations par les caisses de la mutualité sociale agricole. Ces ajustements
de portée rédactionnelle ne modifient pas, sur le fond, les dispositions de
l'article.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les trois amendements ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
S'agissant de l'amendement n° I-28, je voudrais tout
d'abord souligner le caractère étonnant, voire surréaliste, des débats que nous
avons sur le BAPSA.
En effet, voilà seulement quelques jours se tenait la discussion du projet de
loi de financement de la sécurité sociale. Monsieur le ministre, pour quelle
raison faut-il que nous traitions de certains régimes sociaux à l'occasion de
l'examen du projet de loi de finances ? Est-ce le moment le plus adéquat pour
définir les perspectives de financement d'un régime social parmi d'autres, même
s'il est très important ? Ne faudrait-il pas essayer, un jour, de mettre un peu
d'ordre, dans le cadre de la réforme de la gestion de l'Etat, dans le partage
entre sécurité sociale et finances de l'Etat ?
M. Jacques Oudin.
Il a raison !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Depuis qu'une approche consolidée des questions de
finances publiques et de sécurité sociale a été adoptée, existe-t-il
véritablement un obstacle sérieux à ce que les questions relatives au BAPSA
soit traitées à l'occasion de l'élaboration annuelle de la loi de financement
de la sécurité sociale ? Je me permets de poser ce problème de principe, parce
qu'il me semble tomber sous le sens !
M. Jacques Oudin.
Absolument !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Que, au cours de la discussion du projet de loi de
finances, nous débattions avec acharnement de tout ce qui relève de la
fiscalité, de tout ce qui concerne la gestion de l'Etat, des crédits des
différents ministères, c'est notre rôle ! En revanche, que nous en soyons à
essayer de comprendre, parce que ce n'est pas, il faut bien le dire, la matière
habituelle de la commission des finances, quelle que soit la sensibilité rurale
de nombre d'entre nous, le mécanisme de ces cotisations de solidarité me semble
très discutable. En effet, il s'agit de sujets extrêmement difficiles et
techniques, et je suis persuadé qu'ils seraient beaucoup plus efficacement
traités par la commission des affaires sociales.
Cela étant dit, l'amendement présenté par M. César tend à supprimer les
cotisations de solidarité versées au BAPSA par certaines personnes n'ayant pas
le statut d'exploitant agricole, à savoir celles qui dirigent une exploitation
ou une entreprise agricole dont la taille est inférieure à la moitié de la
surface minimale d'installation, laquelle correspond au seuil d'affiliation au
régime des exploitants agricoles, et les associés de sociétés de personnes
ayant une activité agricole et percevant des revenus professionnels provenant
d'activités non salariées agricoles.
Comme leur nom l'indique, ces cotisations de solidarité doivent permettre de
financer en partie le régime de protection sociale des agriculteurs, par
manifestation de la solidarité de personnes n'ayant pas le statut d'exploitant
agricole mais tirant une partie de leurs revenus professionnels d'une activité
agricole.
C'est donc une vision sociale qui a prévalu lors de la mise en place de ces
cotisations de solidarité. En 2002, elles ont rapporté au BAPSA 27,44 millions
d'euros, soit 0,18 % du total des recettes de ce dernier, qui est de près de
15,4 milliards d'euros. Pour 2003, l'élargissement de l'assiette déclarée des
cotisants de solidarité associés de sociétés opéré en vertu de l'article 22 du
projet de loi de finances devrait entraîner une hausse substantielle du
rendement de ces cotisations, dont le produit devrait atteindre 82 millions
d'euros.
Si j'ai bien compris, le système précédemment en vigueur était mal contrôlé et
peu contrôlable. Il s'agit simplement de faire respecter la notion de
solidarité et de faire en sorte que les cotisations de solidarité ne soient pas
vidées de leur substance par défaut de réglementation et de possibilités de
contrôle.
Supprimer les cotisations de solidarité serait bien évidemment dommageable
pour l'équilibre financier du BAPSA, pour lequel chaque euro compte, puisqu'il
est déficitaire, et ne serait pas nécessairement, du point de vue de celles et
de ceux qui sont avant tout des exploitants agricoles, une bonne chose. Il me
semble que, au sein des fédérations de syndicats d'exploitants agricoles de nos
départements, le souci dominant n'est pas de « privilégier », si je puis dire,
des personnes qui ne tirent pas l'essentiel de leurs revenus de leur activité
agricole.
Par conséquent, les choses étant ce qu'elles sont, l'équilibre financier du
BAPSA étant difficile à assurer, j'estime qu'il conviendrait que leurs auteurs
acceptent de retirer les amendements n°s I-28 et I-112 rectifié, même si MM.
César et Franchis ont eu raison de soulever le problème qui nous occupe. Mais
sans doute M. le ministre pourra-t-il nous apporter des précisions utiles à cet
égard.
En ce qui concerne maintenant l'amendement n° I-221 du Gouvernement, il s'agit
de préciser les conditions d'application de l'élargissement de l'assiette des
cotisations de solidarité affectées au BAPSA.
L'article 22 a été modifié à l'Assemblée nationale sur proposition de mon
excellent collègue Gilles Carrez, rapporteur général du budget, et de M. Yves
Censi, rapporteur spécial des crédits du BASPSA, en vue d'un élargissement de
l'assiette des cotisations de solidarité. M. le ministre souhaite l'amender sur
quelques points techniques.
L'amendement du Gouvernement n'a pas été examiné par la commission des
finances du Sénat et, étant peu au fait des finances sociales agricoles, nous
avons eu quelque peine à nous forger une opinion.
Quoi qu'il en soit, l'amendement n° I-221 tend à améliorer la rédaction
adoptée à l'Assemblée nationale, ainsi qu'à faciliter le recouvrement de la
cotisation de solidarité, en spécifiant que les sociétés ayant une activité
agricole seront tenues d'établir chaque année une déclaration concernant leurs
associés redevables de cette cotisation. Ladite déclaration devra être remise à
l'organisme chargé du recouvrement de la cotisation de solidarité.
Tout cela nous a paru très raisonnable. C'est très modestement que nous avons
émis un avis favorable, mais, encore une fois, nous ne sommes nullement
orfèvres en la matière, et je dois confesser, monsieur le ministre,
l'insuffisance de la commission des finances du Sénat dans ce domaine. Il est
certain que nos collègues de la commission des affaires sociales traiteraient
beaucoup mieux que nous ce sujet.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s I-28 et I-112 rectifié
?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Le Gouvernement salue l'humilité de M. le rapporteur
général, mais il le croit néanmoins parfaitement capable d'apprécier la portée
des textes qui lui sont soumis.
En revanche, je souhaite revenir sur la question du devenir du BAPSA, que M.
Marini a abordée voilà un instant.
Monsieur le rapporteur général, vous avez considéré que la loi organique
relative aux lois de finances présentait peut-être l'inconvénient de supprimer
le financement d'un certain nombre d'organismes tout à fait dignes de retenir
votre intérêt. Cependant, cette loi nous engage également à modifier les
dispositions relatives au BAPSA actuellement en vigueur.
Je ne sais pas si les propos que vous avez tenus signifient qu'il serait
envisageable que le budget de l'Etat ne contribue plus au financement de la
protection sociale des agriculteurs. Une telle suggestion irait droit au coeur
du ministre chargé du budget, monsieur le rapporteur général, et je dois dire
que je la soutiendrais avec enthousiasme ! Je ne suis pas persuadé, cependant,
que la commission des affaires sociales du Sénat partagerait cet enthousiasme
!
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est une vision partiale !
(Sourires.)
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
En tout cas, je crois qu'il serait en effet plus
logique que ces questions soient traitées avec l'ensemble des questions
sociales.
Cela étant, j'indiquerai à MM. César et Franchis, pour répondre au souci
qu'ils ont exprimé, qu'il ne s'agit en aucune façon de chercher à restreindre
l'intervention des investisseurs dans le secteur agricole.
Ils sont experts en la matière et savent donc bien que nombre de
professionnels de l'agriculture se constituent en société pour exercer leur
activité.
Toutefois, ils n'ignorent pas non plus que certains de ces professionnels
cherchent à se soustraire au versement des cotisations sociales. Or, cela
revient à refuser de contribuer au financement de la protection sociale des
agriculteurs, et les auteurs des amendements sont si attachés à cette dernière
que je ne peux croire un instant qu'ils puissent être indifférents au fait que
certaines personnes, par le recours à des mécanismes juridiques abusifs,
échappent au paiement des cotisations sociales.
Les dispositions inscrites dans le projet de loi de finances visent donc à
prévenir ce genre de pratiques. Si elles devaient être supprimées, je crains
fort que cela ne mette plus encore en péril l'équilibre déjà précaire du
financement de la protection sociale des agriculteurs.
Le Gouvernement considère qu'il serait anormal de laisser se développer - car
elles se développent ! - des pratiques qui aboutissent à ce que la solidarité
nationale soit sollicitée pour assurer l'équilibre du budget annexe des
prestations sociales agricoles. Renforcer la protection des acteurs du monde
agricole, pérenniser leur régime social en veillant au maintien des solidarités
nous paraît être l'attitude la plus responsable. Cela me conduit à demander à
MM. César et Franchis, tout en comprenant bien quelles sont leurs intentions, à
savoir permettre l'intervention d'apporteurs de capitaux en agriculture, de
bien vouloir retirer leurs amendements. A défaut, je me verrai contraint
d'émettre un avis défavorable sur ceux-ci.
M. le président.
Monsieur César, maintenez-vous l'amendement n° I-28 ?
M. Gérard César.
J'ai parfaitement entendu l'appel de M. le rapporteur général et de M. le
ministre et je retire mon amendement, monsieur le président.
Je souhaiterais cependant poser une question à M. le ministre : où en
sommes-nous au regard de la législation européenne, la jurisprudence voulant
qu'une cotisation soit assortie d'un retour ? Dans le cas qui nous occupe, les
cotisations sont versées à fonds perdus. Pourriez-vous me fournir quelques
éclaircissements sur ce point, monsieur le ministre ?
M. le président.
L'amendement n° I-28 est retiré.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Le Gouvernement doit savoir rester humble : quand il ne
peut apporter une réponse immédiate, il doit le reconnaître. J'indique donc à
M. Gérard César que je lui donnerai ultérieurement les explications que je ne
peux lui fournir à cet instant.
M. le président.
Monsieur Franchis, maintenez-vous l'amendement n° I-112 rectifié ?
M. Serge Franchis.
Non, monsieur le président, je le retire.
Toutefois, il semblerait opportun, et ce sera l'objet du prochain amendement
que je présenterai, de ne pas étendre l'assiette des cotisations, au moins pour
le moment.
M. le président.
L'amendement n° I-112 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° I-221.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-29 est présenté par M. César, Mme Bout, MM. de Broissia,
Doublet, Fournier, Leroy, Mathieu, de Richemont, Rispat, Valade et Vasselle.
L'amendement n° I-110 est présenté par M. Franchis et les membres du groupe de
l'Union centriste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer le I
bis
de cet article. »
La parole est à M. Gérard César, pour présenter l'amendement n° I-29.
M. Gérard César.
Il s'agit de supprimer le I
bis
de l'article 22. En effet, l'Assemblée
nationale a élargi le champ d'application de la cotisation de solidarité. Or
cette cotisation semble injustifiée dans la mesure où elle n'ouvre aucun droit
au cotisant en contrepartie de celle-ci. Cet amendement ressemble fort à ceux
que mon collègue Serge franchis et moi-même avons défendus voilà un instant.
M. le président.
La parole est à M. Serge Franchis, pour présenter l'amendement n° I-110.
M. Serge Franchis.
Il s'agit, en effet, quasiment du même amendement que le précédent. Comme je
l'ai indiqué lorsque j'ai présenté celui-ci, il serait opportun de ne pas
élargir le champ d'application de la cotisation de solidarité.
M. le président.
Monsieur César, l'amendement n° I-29 est-il maintenu ?
M. Gérard César.
Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président.
L'amendement n° I-29 est retiré.
Monsieur Franchis, l'amendement n° I-110 est-il maintenu ?
M. Gérard César.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° I-110 est retiré.
Je mets aux voix l'article 22, modifié.
(L'article 22 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 22
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-30 rectifié est présenté par MM. César, Bailly et Bizet, Mme
Bout, MM. Doublet, Fournier, Leroy, Mathieu, Natali, de Richemont, Rispat,
Valade et Vasselle.
L'amendement n° I-111 est présenté par M. Franchis et les membres du groupe de
l'Union centriste.
Ces deux amendement sont ainsi libellés :
« Après l'article 22, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La dernière phrase de l'article 63 de la loi n° 90-85 du 23 janvier
1990 complémentaire à la loi n° 88-1202 du 30 décembre 1988 relative à
l'adaptation de l'exploitation agricole à son environnement économique et
social est complétée par les mots : "dans la limite de cinq fois le plafond
prévu à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale".
« II. - Ce même article est complété
in fine
par un alinéa ainsi rédigé
:
« Ces dispositions sont applicables à compter du 1er janvier 2003. »
« III. - La perte de recettes pour l'Etat résultant des I et II ci-dessus est
compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits
prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Gérard César, pour défendre l'amendement n° I-30
rectifié.
M. Gérard César.
Les cotisations de solidarité croissant d'année en année, il convient de
plafonner leur montant, sinon elles finiront par dissuader des non-exploitants
agricoles de participer à l'installation d'agriculteurs. Il s'agit, à nos yeux,
d'un réel problème.
M. le président.
La parole est à M. Serge Franchis, pour défendre l'amendement n° I-111.
M. Serge Franchis.
La loi de finances de 2001 a supprimé le plafonnement des cotisations sociales
maladie versées par les non-salariés agricoles. Les exploitants agricoles sont
désormais les seuls travailleurs indépendants à ne pas bénéficier du
plafonnement de cotisations maladie.
Le plafond était pourtant déjà supérieur à celui qui a été retenu pour les
artisans et les commerçants. En effet, il représente six fois le plafond de
sécurité sociale pour les exploitants agricoles, contre cinq fois ledit plafond
pour les artisans et les commerçants.
Le Sénat, lors des discussions sur la loi complémentaire n° 90-85, avait
d'ailleurs suggéré que l'assiette de cotisation AMEXA soit plafonnée à une
somme égale à cinq fois le plafond de sécurité sociale. On ne peut donc parler,
comme cela a été le cas, de recherche d'équité en supprimant ce
plafonnement.
De plus, le maintien de ce déplafonnement induira une fuite des cotisations à
destination de la mutualité sociale agricole, la MSA, car les personnes
touchées par cette réforme préféreront constituer des personnes morales
adaptées et cotiser à un autre régime.
Il convient donc, dans un souci d'équité par rapport aux autres secteurs
d'activité, de rétablir le plafonnement des cotisations maladie, à cinq fois le
plafond de sécurité sociale.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Ces deux amendements tendent à réintroduire le
plafonnement de l'assiette des cotisations d'assurance maladie et de maternité
des exploitants agricoles, qui avait été supprimé - peut-être
malencontreusement - par l'article 39 de la loi de finances pour 2001. Depuis
l'entrée en vigueur de cette disposition, les cotisations d'assurance maladie
et de maternité des non-salariés agricoles sont en effet assises sur la
totalité des revenus professionnels de l'exploitant.
A l'époque, le déplafonnement avait été justifié par le fait que les
dispositions dont les exploitants agricoles bénéficiaient au titre de leurs
cotisations maladie aboutissaient, pour des revenus supérieurs à 150 000 euros,
à une cotisation dégressive, sans justification particulière, nous avait-on
dit.
Le présent amendement vise à revenir au
statu quo ante
2001, en
plafonnant les revenus professionnels des chefs d'exploitation soumis aux
cotisations maladie et maternité à cinq fois le plafond de la sécurité sociale,
fixé pour 2003 à 2 432 euros par mois, soit 29 184 euros pour l'année entière.
Ainsi, l'exploitant ne paierait pas de cotisation maladie sur ses revenus
excédant cinq fois ce plafond annuel, soit un montant de 145 920 euros.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, la commission des finances ne se sent pas
techniquement très compétente pour expertiser des dispositifs de cette
complexité et, peut-être, de cette qualité. C'est pourquoi elle s'en remet à
l'avis du Gouvernement.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Il n'est sûrement pas dans l'intérêt du régime de
protection sociale des agriculteurs de se comparer, quant à son financement,
aux autres régimes. Je veux bien que, s'agissant du plafonnement, une
comparaison soit faite avec les autres régimes, mais je vais vous donner des
chiffres qui vous permettront de comprendre les raisons pour lesquelles ce
plafonnement a été supprimé.
Il convient de préciser que la cotisation minimale des indépendants est fixée
à 40 % du plafond de la sécurité sociale, soit plus du double de celle qui est
exigible dans le régime agricole. Cependant, les situations ne sont pas
comparables. Un seul chiffre illustrera la différence : les cotisations des
artisans et des commerçants couvrent 50 % des dépenses de prestations de leur
régime, alors que, dans le cas des exploitants agricoles, elles n'en couvrent
que 10 %. Le simple fait que le régime agricole bénéficie très largement de la
solidarité nationale est un élément qui, à l'évidence, doit être pris en
considération et qui justifie une différence dans les règles de
contribution.
Comme je vous l'ai dit voilà un instant, à l'occasion de l'examen d'un
amendement précédent, il faut savoir conserver un équilibre. Je ne crois pas
qu'il soit bon, je le répète, pour le régime de protection sociale agricole, de
vouloir se comparer aux autres régimes. C'est ce qui me conduit à vous
recommander le retrait de ces amendements. A défaut, je serais obligé de
demander au Sénat de les rejeter.
M. le président.
Monsieur César, l'amendement n° I-30 rectifié est-il maintenu ?
M. Gérard César.
Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président.
L'amendement n° I-30 rectifié est retiré.
M. le président.
Monsieur Franchis, l'amendement n° I-111 est-il maintenu ?
M. Serge Franchis.
J'ai bien entendu les explications de M. le ministre, mais je voudrais
insister sur plusieurs points.
Nous savons combien les agriculteurs ont contribué, durant les décennies qui
viennent de s'écouler, au développement de notre pays et, compte tenu de la
démographie du monde agricole, nous avons dû accueillir en milieu urbain tous
les fils de paysans que nous avons vu grandir à la campagne. Par ailleurs, la
situation des retraités est relativement difficile.
Nous devons tenir compte de tous ces éléments. J'accepte de retirer cet
amendement, mais je souhaiterais que, avec la profession, s'instaure un
véritable débat sur ces sujets.
M. le président.
L'amendement n° I-111 est retiré.
Article 23
M. le président.
« Art. 23. - Pour 2003, le montant du prélèvement de solidarité pour l'eau,
institué par le II de l'article 58 de la loi de finances pour 2000 (n° 99-1172
du 30 décembre 1999), est ainsi fixé :
Agence de l'eau Adour-Garonne | 3 679 839 EUR |
Agence de l'eau Artois-Picardie | 3 063 920 EUR |
Agence de l'eau Loire-Bretagne | 6 375 775 EUR |
Agence de l'eau Rhin-Meuse | 3 383 884 EUR |
Agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse | 9 216 258 EUR |
Agence de l'eau Seine-Normandie | 14 280 324 EUR |
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-16, présenté par MM. Marini et Adnot, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° I-54, présenté par MM. Oudin et Lepeltier, est ainsi libellé :
« Régiger comme suit cet article :
« Pour 2003, le montant et la répartition du prélèvement de solidarité pour l'eau, institué par le II de l'article 58 de la loi de finances pour 2000 (loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999), sont identiques à ceux fixés par l'article 29 de la loi de finances pour 2002 (n° 2001-1275 du 28 décembre 2001). »
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n° I-16.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement vise à supprimer l'article 23. Je précise d'emblée qu'il s'agit d'un amendement d'appel, monsieur le ministre.
L'article 23 vise à prélever 81,63 millions d'euros sur les agences de l'eau, au bénéfice du Fonds national de solidarité pour l'eau, section B du compte d'affectation spéciale « Fonds national de l'eau ».
L'Assemblée nationale, après un long débat, a ramené le montant de ce prélèvement à 40 millions d'euros, en arguant du très faible niveau de consommation des crédits - il s'est établi à seulement 28 % en 2001 et à 12,5 % des crédits de paiement de l'exercice 2002 à la date du 25 septembre 2002 - et des reports importants constatés chaque année. Voilà, pour l'essentiel, les arguments sur lesquels l'Assemblée nationale s'est appuyée pour prendre sa décision. Elle a considéré que la répartition des dépenses entre le FNSE et le budget de l'Etat manquait de clarté, ce qui ne faisait d'ailleurs que rejoindre les avis développés par la Cour des comptes et par le Sénat.
L'amendement que j'ai donc l'honneur de présenter, avec M. Philippe Adnot, rapporteur spécial des crédits de l'écologie et du développement durable, réaffirme simplement, à ce stade, la position de principe exprimée par la commission des finances les années précédentes et aux termes de laquelle les crédits durablement sans emploi sont probablement peu utiles et le prélèvement sur les agences de l'eau, en attendant une future loi sur l'eau, ne nous semble pas établi dans de parfaites conditions de clarté ; j'oserai dire qu'il ne nous paraît pas d'une limpidité et d'une transparence incontestables. Tel était le credo de la commission des finances ces dernières années.
Par conséquent, mes chers collègues, la commission des finances, qui estime devoir faire preuve de cohérence et maintenir un corpus constant de convictions dans les débats, se doit d'aborder celui-ci avec cet amendement d'appel, qui vise à supprimer l'article 23. En réalité, nous souhaitons que le Gouvernement s'explique et nous voulons contribuer à une clarification du mode de fonctionnement et des critères de gestion du FNSE. Nous espérons que, de l'échange qui va intervenir, surgira une certaine clarté et qu'une source d'arguments significatifs nous permettra d'alimenter notre légitime soif de justice et de réalisations concrètes.
M. le président. Monsieur le rapporteur général, vous avez filé la métaphore avec beaucoup d'élégance !
La parole est à M. Jacques Oudin, pour présenter l'amendement n° I-54.
M. Jacques Oudin. Il s'agit également d'un amendement d'appel, mais d'appel à la raison.
La situation de la politique de l'eau est paradoxale. La politique de l'eau a été déclarée comme étant une priorité nationale et, à cet égard, on peut se référer à des discours bien connus prononcé par le Président de la République, à Orléans, à Avranches ou à Johannesburg. Il s'agit donc d'une politique qui est prioritaire à tous les niveaux. Or, on ne peut le nier, le FNSE fonctionne mal.
Je comprends que M. le rapporteur général veuille s'inscrire dans la cohérence des principes affirmés par la commission des finances. Mon amendement s'inscrit également dans la cohérence des propositions que j'ai développées l'année dernière. J'étais alors seul à défendre le maintien du FNSE, que la commission des finances du Sénat avait supprimé et que l'Assemblée nationale avait finalement rétabli.
Je ne mésestime pas les difficultés, mais ce fonds spécial du Trésor qu'est le FNSE a pour vocation de soutenir les actions transversales interbassins, tel le système d'information sur l'eau, et d'assurer une mission de péréquation. Là encore, vous pourriez me rétorquer que ce dispositif n'a pas suffisamment fonctionné puisque, en 2001, la France a été condamnée à plusieurs reprises par les autorités de Bruxelles. C'est vrai, mais ce n'est pas parce qu'il en a été ainsi qu'il faut pour autant baisser les bras.
Certains bassins connaissent des situations très délicates, notamment en matière de lutte contre les inondations ou contre les pollutions d'origine agricole, et ils ne peuvent compter que sur la solidarité nationale. L'intérêt de disposer de ce fonds est, à mon avis, incontestable.
Les chiffres que vous avez annoncés au titre des deux exercices antérieurs sont exacts monsieur le rapporteur général. Je n'ai rien à redire. Néanmoins, faut-il réduire cette dotation ? L'Assemblée nationale l'a réduite de moitié. Mon amendement vise à rétablir les crédits au niveau proposé par le Gouvernement dans son article initial, et ce pour plusieurs raisons.
D'abord, mais M. le ministre nous le confirmera, les crédits dont le fonds dispose actuellement sont largement gagés et peuvent être mobilisés avec une gestion plus dynamique et plus efficace en 2003. Ensuite, les besoins à satisfaire au titre de la politique de l'eau sont considérables, non seulement en termes de connaissances pour se conformer aux exigences de la directive-cadre, domaine dans lequel la France n'excelle pas, mais également en termes de lutte contre les pollutions diffuses d'origine agricole, car notre pays accuse des retards considérables, notamment eu égard aux prescriptions de la directive « nitrates ». Enfin, des mesures ont été engagées afin d'accélérer la consommation des crédits. Pour ma part, je fais confiance au Gouvernement et au ministre de l'écologie et du développement durable pour avancer dans cette voie.
Doit-on ou non maintenir ce fonds ? A mon avis il faut le maintenir. Doit-on ou non maintenir sa dotation ? Pour ma part, je souhaite le rétablissement de l'article du Gouvernement, mais, bien entendu, j'écouterai avec attention les explications de M. le ministre délégué au budget.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. Les deux amendements qui nous sont soumis expriment deux positions extrêmes. Le premier vise à revenir au texte initial du Gouvernement, c'est-à-dire à rétablir le prélèvement sur les agences de l'eau ; le second tend à supprimer la totalité du prélèvement.
Vous ne reprocherez pas au Gouvernement d'avoir une préférence pour l'amendement qui vise à rétablir le texte qu'il avait proposé. Comme je l'avais indiqué à l'Assemblée nationale, il n'est pas anormal que, sur un compte d'affectation spéciale de création récente, le montant des reports de crédits soit important. Le montant, d'ailleurs très satisfaisant, des engagements de la dotation 2001 prouve que le disponible pour engagement est en fait limité. Supprimer le prélèvement 2003 reviendrait à amputer la capacité du FNSE d'engager de nouvelles actions en 2003.
Dans un premier temps, la commission des finances de l'Assemblée nationale avait, elle aussi, adopté un amendement tendant à supprimer la totalité du prélèvement. Mais, prenant en compte les contraintes que je viens d'indiquer, elle a finalement, contre l'avis du Gouvernement, réduit de plus de moitié le prélèvement pour 2003 par rapport à la proposition initiale. Dans ces conditions, je pense qu'à défaut de rétablir le texte initial du Gouvernement le Sénat pourrait, dans sa sagesse, s'orienter vers un compromis, qui limiterait, par exemple, à 60 millions d'euros le prélèvement sur les agences de l'eau affecté au FNSE. Monsieur le rapporteur général, le Gouvernement pourrait se montrer favorable à un tel compromis, qui prend en compte l'ensemble des données qui ont été évoquées lors de ce débat, si vous vouliez bien aller dans ce sens.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet échange de vues est assurément utile car le Sénat, fidèle à son histoire, a bien entendu la volonté d'aboutir à une solution raisonnable.
Nous n'entendons pas négliger le travail de nos amis et collègues députés. Dans le cadre des bonnes relations qui doivent prévaloir entre les deux chambres du Parlement, en particulier au début de cette nouvelle législature, il serait en effet dommageable de ne pas tenir compte des votes intervenus à l'Assemblée nationale. Dans cet esprit, je suis particulièrement ouvert à la suggestion fort opportune de M. le ministre délégué au budget et je suis en mesure de lui donner une suite en proposant une nouvelle rédaction de l'article 23.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° I-16 rectifié, présenté par MM. Marini et Adnot, au nom de la commission, et qui est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi cet article :
« I. - Pour 2003, le montant et la répartition du prélèvement de solidarité pour l'eau, institué par le II de l'article 58 de la loi de finances pour 2000 (n° 99-1172 du 30 décembre 1999), sont identiques à ceux fixés par l'article 29 de la loi de finances pour 2002 (n° 2001-1275 du 28 décembre 2001).
« II. - Au septième alinéa du I de l'article 58 de la loi de finances pour 2000 précitée, les mots : "dans la limite de soixante millions d'euros," sont insérés avant les mots : "le produit du prélèvement". »
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Le I de cet amendement vise à rétablir le montant prélevé sur les agences de l'eau à 81,63 millions d'euros. Compte tenu de la situation financière, du bilan et de la trésorerie des agences de l'eau, cette somme nous a semblé, après examen, être calibrée de manière tout à fait raisonnable.
Le II du même amendement vise à limiter à 60 millions d'euros le produit du prélèvement de solidarité pour l'eau versé à l'Etat par les agences de l'eau.
Cela revient à dire, mes chers collègues, que nous considérons comme un peu trop rigoureuse la position de nos collègues de l'Assemblée nationale et que, a contrario, nous voulons signifier à Mme le ministre de l'écologie et du développement durable que nous avons bien entendu ses arguments.
Mme Bachelot, à juste titre, a insisté sur les enjeux du plan national de prévention des risques d'inondation, et nous avons mieux compris, à la suite des échanges qui sont intervenus pendant la navette, que, pour tout ce qui est des actions de régulation du régime hydraulique en amont des cours d'eau et des investissements les plus importants nécessaires à cette régulation, c'est bien le FNSE, le Fonds national de solidarité pour l'eau, qui est mis à contribution. Nous avons également compris que les financements destinés aux protections localisées des agglomérations ont vocation à se trouver dans les crédits ordinaires du ministère de l'écologie et du développement durable.
Cette ligne de partage nous a semblé raisonnable. C'est un critère compréhensible, auquel il faudra se tenir dans les années à venir. Vous savez, mes chers collègues, que notre souci était que l'on n'utilise pas le FNSE, ainsi que l'ont fait, hélas ! les précédents ministres, comme « boîte de débudgétisation » commode, et c'est cette volonté qui a motivé nos appréciations, notamment celles qu'a portées à plusieurs reprises notre collègue Philippe Adnot, rapporteur spécial des crédits de l'écologie et du développement durable. Dès lors qu'une ligne de partage claire est tracée sur ce sujet essentiel, à propos de cette cause nationale de défense et de protection contre les inondations, l'une de nos préventions se trouve levée.
Permettez-moi, chers collègues, d'insister sur cet aspect. Mme le ministre de l'écologie et du développement durable a infiniment raison d'engager un plan volontaire de maîtrise et de prévention du risque d'inondation. En bien des lieux, en effet, des phénomènes dramatiques se produisent parce que l'on n'a pas été prévoyant, parce que le droit de l'urbanisme n'a pas été respecté, parce que, tout simplement, on n'a pas respecté les lois de la nature, qui voudraient qu'il existe des zones d'épandage de crue suffisamment vastes. C'est donc de la perte de la sagesse populaire dans ce qu'elle a de plus traditionnel que témoignent les situations souvent très dommageables, très douloureuses et très préjudiciables à la préservation des personnes et des biens qu'ont créées les différents épisodes d'inondation qui ont frappé notre pays.
En déposant cet amendement, nous marquons que nous souhaitons absolument contribuer à l'effort national de méthode et de réalisation de la prévention du risque d'inondation.
Par ailleurs, nous avons compris, grâce aux explications données par les collaborateurs du ministre de l'écologie et du développement durable, que le Conseil supérieur de la pêche est confronté à un problème spécifique. Il s'agit d'un organisme sympathique, certes, mais qui doit assurément faire des efforts de gestion. Des dépenses seront engagées en 2003 - qui n'ont pas vocation à être reconduites, nous a-t-on dit -, grâce à un prélèvement exceptionnel sur le FNSE, afin de permettre au Conseil supérieur de la pêche de mieux s'adapter à ses tâches. Bien entendu, le Sénat ne saurait accepter que les difficultés de gestion ou de restructuration de cette instance se traduisent pour les pêcheurs par un relèvement à due concurrence de la taxe piscicole !
Un certain nombre d'autres dépenses d'intérêt général, que M. Jacques Oudin a évoquées à juste titre, figurent à la charge du FNSE. Je citerai notamment la mise en oeuvre des actions des programmes de maîtrise des pollutions d'origine agricole, les PMPOA, en particulier dans le grand ouest de la France.
Nous comprenons ces mesures, et tous les arguments que je viens de développer nous conduisent à penser qu'il est indispensable de relever le niveau des crédits susceptibles d'être inscrits au FNSE. In medio stat virtus : par conséquent, on ne s'étonnera pas que le Sénat coupe, à peu de chose près, la poire en deux, entre le vote de l'Assemblée nationale et le rétablissement complet des crédits que demandait le Gouvernement.
Tels sont, monsieur le ministre, les arguments que je souhaitais apporter pour étayer votre offre si avisée et aboutir à une solution de consensus.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert, ministre délégué. Le rapporteur général a utilisé le terme de « raisonnable », et je crois en effet que cet amendement peut nous conduire à un équilibre raisonnable.
J'émets donc un avis favorable.
M. le président. La parole est à M. Jacques Oudin, pour explication de vote.
M. Jacques Oudin. J'interviendrai à la fois sur les amendements n°s I-16 rectifié et I-54.
Cela a été dit, il est incontestable que le FNSE n'a pas été bien géré, comme il est incontestable que la trésorerie des agences n'est pas négligeable. Mais, si la politique de l'eau est à l'évidence une priorité, la France n'en est pas moins en retard en la matière. Nous avons toujours l'impression que notre politique de l'eau est excellente, ce qui est exact, et que nous avons rempli tous nos engagements européens. Ce n'est pas vrai ! Nous n'avons jamais fait l'objet d'autant de condamnations ou d'avertissements de la part des autorités de Bruxelles parce que nous ne remplissions pas tous nos engagements qu'au cours de l'année 2001, je tiens à le souligner.
En l'espèce, la solution qui consiste à limiter à 60 millions d'euros la contribution des agences de l'eau permet de respecter à la fois le vote de l'Assemblée nationale, au moins en partie, et les objectifs du ministre de l'écologie et du développement durable. Pourquoi pas ? Mais il faut être conscient de ses conséquences : les agences de l'eau continueront donc de supporter une ponction de 80 millions d'euros, alors que le FNSE n'en recevra que 60. La politique de l'eau perd donc 20 millions d'euros : c'est cela qu'il faut savoir !
Certes, nous pouvons toujours dire que, si la gestion s'améliore, si les besoins sont confirmés, nous reverrons notre position. Pour l'immédiat, le FNSE perd 20 millions d'euros - encore que, selon la perspective adoptée, il soit possible d'affirmer qu'il vient au contraire d'en gagner 20, en passant de 40 à 60 millions d'euros -, et il faut savoir quelles politiques ne pourront pas être mises en oeuvre. J'en ai répertorié un certain nombre : si l'on met en cause la politique en faveur des PMPOA, on économise 20 millions d'euros ; si l'on renonce au système d'information sur l'eau, nécessaire pour la directive-cadre, c'est 27 millions d'euros ; si l'on supprime l'aide aux populations touchés par les inondations, on récupère 17 millions d'euros ; l'annulation du soutien accordé aux territoires connaissant des situations particulièrement préoccupantes - Nord-Pas-de-Calais, secteur minier de Lorraine, Marais poitevin, etc. - rapporterait 12,5 millions d'euros... Vous me rétorquerez que, puisque ces crédits n'étaient pas utilisés, ces politiques n'étaient de toute façon pas mises en oeuvre !
Monsieur le rapporteur général, votre exposé a été parfaitement clair et argumenté, comme toujours. La position du ministre étant favorable à la voie médiane que vous proposez, nous pouvons l'accepter temporairement.
Je retire donc mon amendement au profit de l'amendement n° I-16 rectifié, et je souhaite que le dossier de la gestion des instruments de la politique de l'eau soit mené avec célérité, avec rigueur, comme le préconise la loi organique du 1er août 2001. Il sera nécessaire d'en dresser un nouveau bilan ; et que l'on ne nous objecte pas alors qu'il n'est pas possible de faire évoluer les crédits que nous sommes aujourd'hui en train de voter ! Il faudra au contraire les adapter en fonction des efforts que nous aurons faits pour remplir nos objectifs européens, objectifs auxquels tous les Français souscrivent puisqu'il s'agit d'améliorer la qualité de l'eau, d'améliorer l'environnement.
M. le président. L'amendement n° I-54 est retiré.
La parole est à M. Ambroise Dupont, pour explication de vote sur l'amendement n° I-16 rectifié.
M. Ambroise Dupont. Je me réjouis vivement du débat qui vient d'avoir lieu et qui, me semble-t-il, clarifie grandement la question.
Nous avions déjà entendu avec beaucoup d'intérêt Mme Bachelot nous exposer les inconvénients qu'aurait eus la suppression pure et simple du compte spécial, et M. le rapporteur général les a rappelés avec un talent bien plus grand que celui qui pourrait être le mien. En réalité, il a fait plus que rappeler ces inconvénients : il a évoqué les efforts de rationalisation de l'utilisation de ces crédits, et il a précisé que l'objectif de Mme la ministre était, d'une part, de revenir à la vocation initiale du FNSE en augmentant sa part dans le soutien aux initiatives des collectivités locales et, d'autre part, de mieux consommer les crédits en 2003 en « mettant sous tension » les ordonnateurs secondaires.
Je me serais volontiers rallié à l'amendement de notre collègue M. Jacques Oudin, parce que ces questions de l'eau ont des conséquences tout à fait considérables dans la vie quotidienne de nos concitoyens, qu'il s'agisse des inondations, de l'assainissement ou de la simple alimentation en eau.
Toutefois, nous sommes sur le point de réaliser une avancée par rapport à la position de l'Assemblée nationale, et M. le ministre délégué au budget, pour des raisons de fond, est d'accord avec nous sur l'utilisation de ces crédits. Je me réjouis donc de l'issue de ce débat, et je voterai l'amendement de la commission des finances.
M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot, pour explication de vote.
M. Philippe Adnot. Je rappellerai brièvement, pour compléter les propos par ailleurs très précis de M. le rapporteur général, la genèse de la question qui nous occupe.
Lorsque Mme Voynet a voulu opérer un prélèvement de 500 millions de francs, à l'époque, sur les agences de l'eau, nous avons très bien vu quelle était la manoeuvre : la taxe générale sur les activités polluantes, la TGAP, servant à financer les 35 heures, Mme Voynet, à court d'argent, a taxé les agences pour disposer d'un peu d'argent de poche et assurer ses dépenses ordinaires.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Exactement !
M. Philippe Adnot. A l'époque nous avions dénoncé cette pratique !
L'analyse que nous avons pu conduire à l'occasion de la préparation du rapport que j'aurai l'occasion de vous présenter prochainement nous a montré qu'effectivement les crédits n'avaient pas été entièrement consommés - il reste quelque 110 millions d'euros ! - et que l'affectation des fonds ne correspondait en rien à ce qu'elle aurait dû être : le FNSE a une mission, et ce n'est pas à son accomplissement que les fonds ont été employés. Nous l'avons démontré, et vous trouverez dans le rapport spécial que je suis en train d'élaborer sur les crédits de l'environnement le détail de leur affectation.
Il était donc tout à fait judicieux de vérifier d'abord que les crédits disponibles seront effectivement utilisés et de s'assurer ensuite que le ministère fera un effort pour que les fonds soient correctement affectés. Le ministère s'y est engagé ces derniers jours, et il nous précisera la destination exacte des sommes en question.
Il est clair que la politique en faveur de la maîtrise des inondations, qui mobilisera 70 millions d'euros en quatre ans, montera progressivement en puissance et que les 60 millions d'euros que nous mettons à sa disposition permettront de commencer à la mettre en oeuvre.
Par ailleurs, et c'est très important, je soulignerai que le Sénat a aujourd'hui la possibilité de faire la démonstration qu'il est soucieux de la maîtrise de la dépense publique. Un prélèvement de 80 millions d'euros est habituellement opéré sur les agences de l'eau, qui se sont organisées en fonction de leurs ressources et qui n'en manqueront pas. Nous n'affectons que 60 millions d'euros : le Sénat a donc choisi de consacrer 20 millions d'euros à la réduction du déficit, et je pense que c'est de bonne politique.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Yves Fréville, pour explication de vote.
M. Yves Fréville. M. le rapporteur général a su prendre le bon cap pour éviter deux écueils, pour ne pas tomber de Charybde en Scylla.
Du côté de Charybde, le danger consistait à entériner une gestion laxiste du FNSE. Encore faut-il remarquer que cette gestion n'est peut-être pas aussi laxiste qu'on veut bien le dire, car son bilan recouvre des problèmes juridiques : lorsque l'on dispose d'une ressource affectée, il est indispensable d'inscrire des crédits de paiement d'un montant égal à ces ressources, comme il est logique que, au cours des deux premières années de son fonctionnement, un fonds ne dépense pas tous ses crédits. Mais peu importe !
Du côté de Scylla, on trouve évidemment la position adoptée par M. le ministre délégué au budget, qui ne souhaitait pas que la réduction des crédits empêche l'engagement des sommes indispensables à la protection des eaux. Elu d'une région où la pollution diffuse est extrêmement importante, je sais à quel point il est nécessaire de ne pas entraver le développement des actions du FNSE en la matière.
Le maintien du prélèvement de 80 millions d'euros sur les agences de l'eau est donc une bonne solution ; le contraire aurait signifié une réduction de l'effort en faveur de l'eau, ce qui aurait été un très mauvais signal. Mais il n'est positif que parce qu'il s'accompagne de l'engagement de 60 millions d'euros de crédits de paiement, puisque tout ne pourra pas être dépensé cette année. Cela représente une économie, certes, mais une économie de trésorerie seulement : les 20 millions d'euros ainsi mis de côté devront bien être utilisés un jour ou l'autre.
Mais à chaque jour suffit sa peine. Pour l'instant, suivons le cap fixé par M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Merci, mon cher collègue !
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. J'approuve l'initiative de M. le rapporteur général. En effet, au-delà de la question soulevée par le FNSE, il est souhaitable que les agences de bassin n'aient pas à « pomper », excusez l'expression, dans leurs ressources propres pour faire face aux besoins de la lutte contre les pollutions agricoles, et ce au détriment d'autres actions qui leur incombent également, notamment en matière d'adduction d'eau et d'assainissement, au profit des collectivités territoriales.
J'appelle donc solennellement l'attention du Gouvernement, une fois de plus, sur la situation dans laquelle se trouvent les intercommunalités et les communes, qui sont exsangues, face au problème d'assainissement, alors que nous devons régler celui-ci avant l'échéance de 2005.
M. Yves Fréville. Tout à fait !
M. Alain Vasselle. Je puis vous dire dès aujourd'hui que nombreux sont les collectivités ou les groupements de collectivités qui ne seront pas prêts en temps voulu !
J'aurais donc souhaité que le Gouvernement, sinon maintenant du moins plus tard, nous fasse part de ses intentions en la matière. Il faudra bien que les collectivités, par le biais des agences de bassin, puissent bénéficier de concours suffisants pour que les dépenses plafonnées soient revues à la hausse tout en restant supportables pour les collectivités et pour les consommateurs. Songez, chers collègues, qu'aujourd'hui nos concitoyens, dans certaines collectivités, sont obligés de payer l'eau 70 ou 80 francs le mètre cube, alors que dans d'autres - qui sans doute ont été plus prévoyantes - ils ne le paient que 15 ou 20 francs !
Aujourd'hui, on parle de péréquation à propos de la lutte contre la pollution et des actions interbassins. La réflexion doit être globale et, bien au-delà, prendre en compte la question de l'assainissement, que l'on soulève peu et que, à mon avis, le Parlement n'évoque pas suffisamment souvent.
C'est pourquoi j'aurais aimé entendre le Gouvernement s'exprimer sur ce sujet. Et si j'en fais la demande à propos de cet amendement n° I-16 rectifié, au demeurant fort intéressant, mes préoccupations vont bien au-delà.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-16 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 23 est ainsi rédigé.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heure, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Bernard Angels.)
PRÉSIDENCE DE M. BERNARD ANGELS,
vice-président
M. le président.
La séance est reprise.3
COMMUNICATION RELATIVE
À UNE COMMISSION
MIXTE PARITAIRE
M. le président. J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 est parvenue à l'adoption d'un texte commun.
4
LOI DE FINANCES POUR 2003
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président.
Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2003, adopté
par l'Assemblée nationale.
Dans la discussion des articles de la première partie, nous en sommes parvenus
à l'article 23
bis
.
Article 23 bis
M. le président.
« Art. 23
bis.
- I. - Dans le deuxième alinéa de l'article 51 de la loi
n° 47-520 du 21 mars 1947 relative à diverses dispositions d'ordre financier,
après les mots : "Fonds national pour le développement des adductions d'eau",
sont insérés les mots : "sauf en 2003".
« II. - Pour 2003, la part du prélèvement prévu par l'article 51 de la loi n°
47-520 du 21 mars 1947 précitée, affectée au budget général, est relevée à due
concurrence. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-55, est présenté par MM. Oudin, Bourdin, Détraigne, Doublet,
Frécon, Hérisson et Vasselle.
L'amendement n° I-90 est présenté par MM. Miquel, Massion, Moreigne, Sergent,
Demerliat, Charasse, Lise, Haut, Marc, Angels, Auban et les membres du groupe
socialiste et rattachée.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer cet article. »
La parole est à M. Michel Doublet, pour présenter l'amendement n° I-55.
M. Michel Doublet.
L'article 23
bis
supprime l'affectation d'une partie des recettes du
Pari mutuel urbain au Fonds national de développement des adductions d'eau,
FNDAE. Ce fonds constitue la deuxième section du Fonds national de l'eau,
compte spécial du Trésor, institué par l'article 58 de la loi n° 99-1172 du 30
décembre 1999.
Certes, en vertu de l'article 21 de la loi organique du 1er août 2001, les
recettes du Pari mutuel urbain ne pourront plus abonder les crédits du FNDAE à
compter de 2006. En effet, les comptes d'affectation spéciale devront être
alimentés au moyen de recettes particulières, par nature en relation directe
avec les dépenses concernées.
Toutefois, d'ici à 2006, le FNDAE aura permis de soutenir les efforts
entrepris par les petites communes dans le domaine de l'eau et de
l'assainissement, pour autant que ses recettes ne se trouvent pas réduites de
moitié.
Outil de solidarité unique, le FNDAE, créé en 1954, a pour objet d'aider les
communes rurales à se doter d'une alimentation en eau de qualité, à un prix
comparable à celui qui est pratiqué dans les grandes villes. Son domaine
d'intervention a été élargi à l'assainissement en 1979.
Il est alimenté, d'une part, à concurrence de 53 % par une redevance sur les
consommations d'eau distribuée dans toutes les communes bénéficiant d'une
distribution publique d'eau potable et, d'autre part, à 47 % par un prélèvement
sur les sommes engagées au Pari mutuel urbain.
De plus, il a un rôle de péréquation entre le monde rural et le milieu urbain,
rôle plus que jamais nécessaire.
Si l'écart observé entre le milieu rural et les zones urbaines est aujourd'hui
plus faible que par le passé, le retard des communes rurales risque néanmoins
de s'accroître du fait des nouvelles exigences imposées par les directives
européennes dans le domaine de l'eau.
Il faut noter par ailleurs un détournement de la mission première du fonds
sans augmentation correspondante des crédits.
Depuis la loi de finances de 1997, le FNDAE contribuée annuellement, à
concurrence de 150 millions de francs, au financement du programme de maîtrise
des pollutions d'origine agricole, le PMPOA. La réalisation de ce programme
doit se prolonger jusqu'en 2006. En outre, dès 2003, cette contribution sera
revue à la hausse, voire doublée.
Cette intervention s'opère malheureusement au détriment de l'aide aux communes
dans le domaine de l'eau potable et de l'assainissement.
Or l'efficacité de ce fonds va considérablement s'améliorer.
Conscients de la nécessité d'en parfaire l'efficacité et d'optimiser
l'utilisation des crédits, les pouvoirs publics ont en effet engagé une
réorientation du FNDAE dans trois directions : en généralisant les conventions
entre l'Etat et les départements, en subordonnant le montant des dotations à la
mise en place de schémas directeurs et en privilégiant l'amélioration de la
qualité de l'eau distribuée.
L'objet du présent amendement est de soutenir l'action du FNDAE en maintenant
les recettes dont il doit disposer pour aider efficacement les communes rurales
dans le domaine de l'eau et de l'assainissement.
M. Alain Vasselle.
Très bon amendement !
M. le président.
La parole est à M. Gérard Miquel, pour présenter l'amendement n° I-90.
M. Gérard Miquel.
Cet amendement vise à maintenir en faveur du fonds national pour le
développement des adductions d'eau le prélèvement sur les recettes du Pari
mutuel urbain de 65 millions d'euros. Je rappelle que l'article 23
bis
prévoit d'affecter ce prélèvement au budget de l'Etat.
Cette suppression de ressources est injustifiée compte tenu des charges qui
pèsent sur les collectivités locales en matière d'adduction d'eau, en
augmentation constante sous la pression d'une réglementation de plus en plus
contraignante.
Le rapport général de la commission des finances indique que le fonds dispose
de reports importants, évalués à 212 millions d'euros en 2002. Toutefois, il
précise que cette sous-consommation des crédits provient d'un dysfonctionnement
dans les délégations de crédits aux collectivités locales. Aussi, le fait
d'amoindrir les ressources du fonds national pour le développement des
adductions d'eau en 2003 nous apparaît comme une solution de facilité
défavorable aux collectivités locales, qui ont besoin d'être aidées en matière
d'adduction d'eau.
Nous proposons donc, par l'amendement n° I-90, de maintenir les affectations
de recettes au Fonds en 2003 tout en invitant parallèlement le Gouvernement à
améliorer les procédures de délégation de crédits.
Cela nous semble une bonne méthode, car elle est respectueuse de l'intérêt des
collectivités locales. Or, je sais, monsieur le ministre, que vous êtes, tout
comme nous, soucieux de l'intérêt des collectivités locales.
Sur ces deux amendements qui poursuivront le même objectif et qui proviennent
l'un de l'opposition, l'autre de la majorité, je ne comprendrais pas que vous
n'émettiez pas un avis favorable.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Nous sommes donc saisis de deux
amendements identiques visant à la suppression de l'article 23
bis
.
Cet article 23
bis
prévoit que, pour l'exercice 2003, le prélèvement
non fiscal opéré sur les sommes engagées au titre du PMU ne sera pas attribué
au FNDAE.
Pourquoi l'Assemblée nationale a-t-elle adopté cet article additionnel ?
C'est sur l'initiative de M. Gilles Carrez, rapporteur général du budget à
l'Assemblée nationale, que cette mesure a été prise. M. Carrez a relevé, et on
ne peut franchement pas lui donner tort, la croissance régulière depuis 1999
des reports de crédit sur le FNDAE. Ces reports de crédit sont passés de 148
millions d'euros en 1999 à 214,41 millions d'euros en 2002. Ils progressent de
20 millions à 30 millions d'euros chaque année. Ils résultent en effet, avant
tout, d'une délégation tardive, chaque année, par le FNDAE, des crédits aux
collectivités locales.
J'ai un peu de peine à comprendre la mécanique du système. Qui est responsable
de cette délégation tardive ? Les services de l'Etat ? Si oui, quels services
de l'Etat ? Est-ce un problème comptable, est-ce un problème de maîtrise
d'ouvrage, un problème technique ? Il faudrait pouvoir décortiquer les
procédures pour mieux comprendre ce qui se passe.
Est-ce faute de projet de la part des collectivités territoriales ?
M. Paul Loridant.
Cela, certainement pas !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je pose toutes ces questions, car l'expérience prouve
que la réalité des choses ne correspond pas toujours à l'idée que l'on s'en
fait.
Est-ce faute de projets susceptibles d'être financés, c'est-à-dire
suffisamment étudiés techniquement, évalués financièrement, afin d'être menés à
bien ? Est-ce un problème de maîtrise d'ouvrage ? Est-ce un problème de
concours des services de l'Etat ? En d'autres termes, les directions
départementales de l'agriculture font-elles correctement leur travail, elles
qui sont chargées d'encadrer ces travaux, de conseiller les collectivités et
d'assister les maîtres d'ouvrage ?
Finalement, l'accumulation des reports peut-elle s'expliquer par des
difficultés de cette nature ? Je ne le sais pas, car je ne dispose pas des
éléments d'information qui me permettraient de porter une appréciation vraiment
fondée sur ce sujet.
En revanche, la croissance régulière des reports est incontestable. Aussi,
lorsque je vois le ministre du budget faire la chasse à l'argent non consommé
et aux reports de toute nature, je ne peux pas m'inscrire en faux contre les
affirmations de l'Assemblée nationale et contester l'initiative prise par
Gilles Carrez.
Je rappellerai en outre que le prélèvement sur le produit du PMU, qui
représente 65 millions d'euros, ne constitue pas la seule ressource du FNDAE.
En effet, pour 2003 comme pour 2002, deux lignes d'alimentation sont prévues,
dont l'une comprend le produit de la redevance sur les consommations d'eau,
soit le produit de ce qui figure sur toutes les factures d'eau reçues par les
consommateurs, qui représente un montant de 77 millions d'euros.
En 2002, à cette somme de 77 millions d'euros s'ajoutait le prélèvement sur le
produit du PMU pour 65 millions d'euros.
Tout cela a abouti, semble-t-il, à un montant de crédits non consommés, dont
le report sur 2003 de ses atteindra 214,41 millions d'euros. Aussi, mes chers
collègues, si je calcule bien - je parle sous le contrôle du ministre et de ces
services - en 2003, le FNDAE disposera de 77 millions d'euros, auxquels
s'ajouteront 214 millions d'euros, soit un total de l'ordre de 290 millions
d'euros, alors que ce fonds consomme chaque année beaucoup moins que ce qui lui
est alloué.
Ce montant de 290 millions d'euros est, me semble-t-il, largement suffisant
pour financer les projets susceptibles d'être présentés dans chacun de nos
départements. Je pense, en particulier, à l'un des plus dynamiques d'entre eux,
le beau département de la Charente-Maritime, qui est représenté par Michel
Doublet et qui a, je le sais, des projets importants à financer sur son
territoire.
Je voudrais donc que M. le ministre nous donne son avis et nous rassure, car
le Sénat est traditionnellement très attentif au FNDAE. Il est clair que
l'adduction d'eau en milieu rural représente un enjeu important, et nous y
sommes naturellement très sensibles.
Telles sont, mes chers collègues, les quelques considérations préalables que
je voulais formuler. Après avoir entendu l'avis de M. le ministre, je vous
donnerai celui de la commission.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.
Mesdames,
messieurs les sénateurs, c'est l'Assemblée nationale qui a décidé d'introduire
cette suppression de l'affectation du prélèvement du PMU au FNDAE pour 2003.
Comme M. le rapporteur général l'a dit à l'instant, cette décision est liée au
fait que les montants de reports de crédits résultant de non-consommations tout
à fait récurrentes sont très importants.
La disposition votée par l'Assemblée nationale ne remet absolument pas en
cause les missions qui sont dévolues au FNDAE, compte tenu des reports de
crédits disponibles et du produit de la redevance sur la consommation d'eau
pour 2003, comme en témoignent les chiffres cités à l'instant par M. le
rapporteur général.
Même si cette disposition a été introduite par l'Assemblée nationale, je
voudrais, mesdames, messieurs les sénateurs, vous faire part de mes convictions
profondes sur ce sujet. Il nous faut enfin sortir des budgets en affichage pour
en arriver aux budgets en résultats. Permettez-moi de vous démontrer par deux
chiffres que les pouvoirs de la représentation du peuple français sont
extraordinairement inférieurs à ceux des administrations publiques.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Absolument !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
La marge de manoeuvre dont dispose le nouveau
gouvernement qui a pris ses fonctions voilà six mois est, pour 2003, d'environ
2 milliards d'euros alors que le montant des reports de l'ensemble des
administrations relevant du budget de l'Etat atteint 14 milliards d'euros !
Dès lors, si vous voulez que la discussion budgétaire se limite au vote de
l'impôt, à l'attribution ou à la reconduction de tel ou tel crédit, c'est la
fin de la démocratie parlementaire.
Interrogez-vous plutôt sur les reports qui s'accumulent d'année en année, sans
aucune relation avec l'exécution.
C'est la raison pour laquelle je ne me suis pas opposé à cet amendement,
déposé à l'Assemblée nationale, qui s'inscrit dans cette démarche de vérité
budgétaire que nous avons tant souhaitée dans la Haute Assemblée et qui
consiste à faire en sorte que l'autorisation parlementaire donne lieu à une
véritable exécution mesurable par les parlementaires. En tout cas, je peux
prendre devant vous l'engagement qu'il ne manquera pas un euro pour la
réalisation des travaux que vous souhaitez conduire dans vos départements ; et
le mien n'est pas moins rural que les vôtres. Il faut simplement que tous les
gestionnaires de fonds de notre pays sachent que le Parlement ne vote pas les
yeux fermés des moyens dont l'utilisation n'est jamais vérifiée. Il n'y a donc
pas lieu de s'inquiéter de la situation.
La Cour des comptes elle-même s'était inquiétée du phénomène. Pour mar part,
je n'aurais pas évoqué le cas du FNDAE, si les dotations de ce fonds n'avaient
pas fait l'objet d'un amendement. Mais je suis prêt à reformuler la même
argumentation à propos de n'importe quel autre fonds qui poserait le même
problème.
Lors de l'examen de la seconde partie du présent projet de loi de finances,
certains de mes collègues ministres regretteront peut-être de ne pas se voir
attribuer des crédits plus importants, alors qu'ils disposent de reports non
négligeables, tout simplement parce que leurs services leur auront dit que les
crédits de leur ministère n'ont pas, cette année, été abondés de 1,7 % ou de 2
%. A ce moment-là, je pense qu'il sera de l'honneur du Sénat, assemblée qui
veille sur les prérogatives de la représentation du peuple français, de faire
en sorte que les administrations sachent qu'un euro est un euro et qu'il doit
être employé dans les meilleures conditions.
S'agissant du FNDAE, la Cour des comptes indique qu'il se caractérise par une
situation financière structurellement excédentaire. Depuis le milieu des années
quatre-vingt-dix - et la Cour précise qu'elle le signale en permanence -, le
taux de consommation effective des crédits est faible : 70 % en 1995, 50 % en
2000. Elle ajoute que les crédits qui sont délégués au niveau départemental ne
sont toujours engagés que très tardivement.
Par ailleurs, la répartition à l'échelon central des enveloppes
départementales ne repose pas sur des besoins réels et immédiats au niveau
local. La tâche consiste donc, mesdames, messieurs les sénateurs, à effectuer
un contrôle sur le fonctionnement de la chaîne de décision entre l'échelon
central et l'échelon local, afin de déterminer les causes des problèmes
constatés.
En tout état de cause, je vous le dis avec passion parce que j'ai eu
l'honneur, grâce à votre confiance, de défendre les prérogatives du Parlement
en matière budgétaire, je voudrais que nous cessions d'être, en quelque sorte,
les greffiers purs et simples de nos administrations. Nos administrations, que
je respecte hautement, doivent tout de même savoir qu'il y a des femmes et des
hommes qui se sont soumis au vote de leurs compatriotes pour les représenter et
qui sont l'expression du peuple souverain : nous n'avons pas à être
exclusivement les porte-parole de nos administrations.
(Très bien ! et
applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
C'est ce qui me conduit à demander avec force et conviction le retrait de ces
amendements et, à défaut, leur rejet.
M. le président.
Monsieur Doublet, l'amendement n° I-55 est-il maintenu ?
M. Michel Doublet.
Je comprends parfaitement la position de M. le ministre et de M. le rapporteur
général, mais je suis un peu surpris de ces reliquats importants.
En effet, en Charente-Maritime, nous demandons depuis un certain nombre
d'années des crédits relativement importants, mais ce qui nous est accordé est
limité à 20 millions de francs. Encore obtenons-nous une rallonge de 20 % parce
que nous sommes « bons élèves » et que nous consommons l'intégralité de ce qui
nous est alloué.
Je précise que, en Charente-Maritime, nous n'avons aucun retard : j'ai mis au
point hier la programmation pour 2003. La participation du département est
importante mais, en ce qui concerne le FNDAE, nous ne savons pas encore si
l'enveloppe sera du même ordre que l'année dernière, d'autant qu'un certain
nombre de communes rurales qui étaient éligibles ne figurent plus dans la
programmation : l'enveloppe risque donc d'être réduite de 50 %. J'en ai
évidemment tenu compte dans mes calculs.
Monsieur le ministre, vous venez de dire que tous les projets importants
seraient menés à bien. Dieu sait si, en Charente-Maritime, nous avons des
projets très importants ! Ce sont même des projets vitaux puisqu'il s'agit de
la distribution d'eau potable et que la construction d'une usine est prévue.
Aujourd'hui, avec une aide de l'agence de bassin à hauteur de 10 % et la
contribution du département, le syndicat que je préside n'a pas les moyens de
financer cette usine, dans la mesure où, d'après ce qu'on m'avait dit, le FNDAE
ne participerait pas au financement.
Si vous m'assurez aujourd'hui, monsieur le ministre, que le FNDAE apportera
son concours aux grands projets à un niveau convenable, je reverrai ma
position. Mais je voudrais que vous me confirmiez que nous pourrons recevoir
ces crédits pour des ouvrages structurants qui sont indispensables.
M. le président.
La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle.
J'ai écouté avec beaucoup d'attention ce qui a été dit par M. le rapporteur
général et par M. le ministre. Du point de vue de la bonne gestion, ils ont
indiscutablement raison.
Nous sommes ici un certain nombre à nous trouver à la tête de collectivités
territoriales et nous veillons à ce que les crédits votés soient consommés à 90
ou 95 %, afin d'éviter les reports d'année en année, car les crédits non
consommés représentent autant d'argent qui n'est pas réinjecté dans l'économie
et des besoins qui ne sont pas satisfaits.
M. le rapporteur général a posé les bonnes questions, et j'ai cru comprendre
qu'elles étaient relayées par M. le ministre. Il s'agit effectivement
d'analyser l'ensemble de la chaîne entre les crédits votés et le niveau de
consommation de ces crédits, afin d'essayer de déterminer l'origine des retards
qui sont constatés.
Monsieur le ministre, vous avez été rapporteur général, puis président de la
commission des finances : vous êtes donc bien placé pour savoir que les
remarques qui sont formulées aujourd'hui le sont en fait depuis longtemps.
Certes, nous n'avions pas la responsabilité du pouvoir entre 1997 et 2002,
mais ces reports ne datent pas d'aujourd'hui.
Monsieur le ministre, vous avez sans aucun doute la volonté de sortir de cette
situation. La question reste de savoir si vous en avez les moyens. Pouvez-vous
nous assurer que, lorsque nous examinerons le projet de loi de finances pour
2004, nous ne nous retrouverons pas dans la situation actuelle ? Aurez-vous le
temps et les moyens suffisants pour « détricoter » les difficultés qui sont à
l'origine de cette non-consommation des crédits ?
Pourquoi, en effet, voter des crédits supplémentaires si l'on sait par avance
qu'ils ne seront pas consommés au cours de l'exercice considéré ?
Cela étant, je crois utile d'appeler votre attention sur les difficultés que
nous rencontrons souvent en matière de délégation de crédits. Il n'y a pas que
ceux du FNDAE : je pense aussi, par exemple, à la DGE. Les crédits alloués au
titre de la DGE ne sont parfois notifiés en préfecture qu'au début de l'été et
les subventions ne sont effectivement versées aux communes qu'en septembre ou
octobre. Comment s'étonner, dès lors, que les crédits en question ne soient pas
consommés et reportés sur l'exercice suivant ? Et c'est en vertu de cette
non-consommation des crédits qu'on réduit l'enveloppe de DGE !
Hélas ! cela est vrai pour de nombreux crédits : ils sont inscrits en loi de
finances, mais ils ne peuvent être consommés à la hauteur qui serait
souhaitable.
Je reviens au FNDAE, monsieur le ministre, pour évoquer une particularité que
je vous invite à étudier. Vous qui avez été sénateur d'un département rural et
agricole, vous comprendrez certainement le problème que nous rencontrons, nous
qui sommes maires d'une commune rurale.
Aujourd'hui, même si nous cumulons les concours financiers de nos partenaires
- l'agence de bassin, le département, parfois la région, mais ce n'est pas le
cas de la Picardie -, il ne nous est pas toujours possible de mettre en oeuvre
un projet d'assainissement, par exemple, tout simplement parce que la somme des
diverses contributions n'est pas suffisante.
Ainsi, dans ma propre commune, qui ne compte que 183 habitants, étant donné la
somme des concours financiers que je peux attendre de l'agence de bassin,
éventuellement du conseil général ou du FNDAE, si je veux mettre en oeuvre
l'assainissement collectif - je n'ai pas d'autre choix parce que mon village se
situe sur une terre argileuse -, le prix de l'eau devra être compris entre 90
et 120 francs le mètre cube !
Quel est le maire qui, aujourd'hui, prendra la responsabilité d'engager des
travaux de cette nature pour demander ensuite aux consommateurs d'eau de payer
90 francs le mètre cube ? Sachant que la consommation moyenne est de 120 mètres
cubes par foyer, cela représente une facture annuelle de plus de 10 000 francs,
c'est-à-dire deux à trois fois le montant de la taxe d'habitation : cela
devient insupportable ! On s'achemine vers des impayés considérables ! Et
s'ajoutent à cela le problème des ordures ménagères et bien d'autres encore
!
Certains maires se trouvent ajourd'hui dans une situation impossible, car ils
n'arrivent tout simplement plus à boucler leur budget.
Je dirai pour conclure que, si nous avons au moins l'assurance que les crédits
que nous allons voter seront effectivement consommés à concurrence de 90 % ou
95 %, nous pourrons, l'année prochaine, abonder le FNDAE à nouveau avec les
ressources du PMU, de manière à obtenir un niveau de crédits au moins égal à ce
qu'il aurait été avec la taxe sur l'eau et le prélèvement sur le PMU. Dès lors,
je n'aurai aucune raison de mettre le Gouvernement en difficulté et de
maintenir mon amendement. Je demande seulement pour cela, vous le comprendrez,
monsieur le ministre, que nous recevions un minimum d'assurances.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je voudrais tout d'abord me réjouir que ce débat ait
lieu et remercier à nouveau MM. Michel Doublet et Gérard Miquel d'avoir bien
posé ce problème.
En réalité, ce qui est ici en question, avec cette sorte d'incompréhension
entre le niveau central et le niveau local, c'est une affaire de
décentralisation. Au niveau central, le Parlement vote des crédits, mais on
observe
ex post
que ces crédits ne sont pas dépensés au rythme
souhaité.
Il semble bien qu'il y ait, si j'ose dire, de la « friture sur la ligne » ou
des aspérités qui viennent entraver le flux. Mais je veux être plus précis.
Les services de l'Etat ont, dans chaque département, pour mission d'assister
les maîtres d'ouvrage et, à ce titre, ils jouent à la fois un rôle de
prescripteur et un rôle d'accompagnant.
En tant que prescripteur, ils définissent le type de solution technique à
mettre en oeuvre, le type de matériel à utiliser. Ainsi, dans le département
qui nous est commun, à M. Alain Vasselle et à moi-même, ce sont les services de
l'Etat qui insistent toujours pour que, en matière d'assainissement, des
solutions collectives techniquement lourdes, et particulièrement onéreuses,
soient retenues, alors que, dans certaines petites communes rurales, des
solutions plus souples et moins coûteuses pourraient être mises en oeuvre.
Lorsqu'on suit le cheminement des dossiers, on se rend compte que, en règle
générale, les services techniques de l'Etat ont tendance à privilégier les
solutions les plus lourdes et les plus chères, tout en expliquant sans cesse
aux élus que c'est leur responsabilité qui est en jeu, que, s'ils ne prennent
pas la décision qu'on leur recommande, ils ne se mettront pas en conformité
avec les normes, prenant des risques susceptibles de les conduire on ne sait où
!
Monsieur le ministre, il s'agit bien là d'une question de décentralisation. Le
Parlement, notamment par la voix du Sénat, veut que l'assainissement et
l'adduction d'eau dans les communes rurales soient une vraie priorité. Nous
sommes face à un réel problème de solvabilité des communes rurales, mais,
techniquement, nous ne sommes pas sûrs que l'intendance suive.
Peut-être faudrait-il en tirer les conséquences dans le cadre de l'exercice de
décentralisation auquel nous convie actuellement le Premier ministre. Peut-être
faudrait-il - c'est une suggestion que je formule, une piste que j'essaie
d'ouvrir - que, dans ce domaine, on s'interroge sur une possibilité
d'expérimentation. Ne conviendrait-il pas, en la matière, de regrouper les
compétences et d'appliquer le principe de subsidiarité ?
En vérité, se trouve ici soulevé le problème de la pertinence de la tutelle
technique et financière des services de l'Etat vis-à-vis de certaines
catégories de collectivités territoriales, en l'occurrence les plus faibles
d'entre elles.
Au demeurant, pour qu'on y voie plus clair, la commission des finances, si son
président en est d'accord, pourrait apporter sa contribution. Pourquoi ne
demanderions-nous pas à notre rapporteur spécial du budget de l'agriculture,
Joël Bourdin, d'étudier la dévolution de ces crédits, de chercher, comme l'a
suggéré Alain Vasselle, ce qui fait obstacle à une délégation des crédits à un
rythme et dans des délais acceptables ?
Dans le programme de contrôle de la commission des finances que les
rapporteurs spéciaux sont en mesure de mener, si M. le président Arthuis le
veut bien, nous pourrions recommander que soit effectué un examen de cette
procédure de délégation de crédits, de façon que l'on sache où se situent, en
la matière, les responsabilités.
Mes chers collègues, sous le bénéfice de ces observations, nous devons, me
semble-t-il, nous en tenir à ce qui a été préconisé par le ministre, à savoir
ne pas voter des budgets d'affichage, ne pas voter des crédits qui n'ont pas de
réalité et ne pas être dupes d'un système dans lequel on voudrait nous
enfermer.
(Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président.
La parole est à M. Pierre Hérisson, pour explication de vote.
M. Pierre Hérisson.
Notre collègue Alain Vasselle a bien montré ce qui se passe dans le milieu
rural en matière d'adduction d'eau et d'assainissement.
Cela étant, monsieur le ministre, je suivrai votre proposition, car il est
démontré que les crédits non consommés sont supérieurs aux crédits annuels à
utiliser dans le cadre du FNDAE. Mais cela ne vaut que pour cette année.
Il s'agit, en effet, d'une mesure d'ordre général consistant, en quelque
sorte, à infliger une sanction dès lors qu'il y a sous-consommation des
crédits.
Nous connaissons déjà l'exemple des crédits européens, dont la
sous-utilisation entraîne une sanction. Nous connaissons aussi ce type de
dysfonctionnement et de sous-utilisation des crédits avec l'ADEME, l'Agence de
l'environnement et de la maîtrise de l'énergie : depuis un certain nombre
d'années, on passe d'un fort excédent à l'impossibilité de financer les projets
qui sont proposés.
Je suis élu dans un département qui, depuis plus de dix ans, souffre d'un
ralentissement, voire de restrictions dans la mise en oeuvre de ses projets au
motif que les collectivités souhaitent conserver la totalité du financement
provenant du FNDAE et que, malheureusement, l'enveloppe annuelle proposée pour
le département est insuffisante par rapport à l'ensemble des programmes qui
sont recensés.
Ne serait-il pas possible, en fonction de la dynamique des besoins, variable
selon les départements, ou du retard à rattraper en matière d'assainissement
sur tel ou tel point du territoire, d'introduire de la souplesse dans
l'utilisation des crédits en cours d'exercice, de manière que les crédits non
utilisés dans un département ou dans une région puissent être utilisés dans un
autre département ou dans une autre région ? Ainsi y aurait-il, en quelque
sorte, une prime à ceux qui sont plus efficaces en termes d'aménagement du
territoire.
En effet, aujourd'hui, dans la mesure où les services déconcentrés ne prennent
pas en compte une sorte de
surbooking,
nous n'aboutissons qu'à des taux
compris entre 60 % et 80 % en matière de consommation des crédits, d'autant que
les projets d'utilité publique sont parfois retardés par des recours devant la
juridiction administrative.
Il y a donc une logique à ce que les services de l'Etat dans les départements
acceptent d'inscrire sur un exercice un montant supérieur à ce qui sera
effectivement réalisé en cours d'année.
Par conséquent, il est nécessaire d'assouplir le système ou de donner en début
d'année une délégation pour l'utilisation d'une ligne de crédits. Ce serait une
solution pour sortir du véritable casse-tête auquel nous sommes confrontés
lorsqu'il s'agit, au cours d'un même exercice, d'obtenir l'accord et de
réaliser les travaux de manière à consommer les crédits.
M. le président.
La parole est à M. Paul Loridant, pour explication de vote.
M. Paul Loridant.
Je voudrais m'exprimer ici à titre personnel et rappeler notamment à M. le
rapporteur général que le rapporteur des comptes spéciaux du Trésor que je suis
a déjà pointé ce problème depuis deux ou trois ans. Par conséquent, mes chers
collègues, je crains que vous ne découvriez aujourd'hui, à l'occasion de cet
amendement, l'eau chaude !
Les observations qu'ont faites M. Vasselle et M. le rapporteur général
figuraient dans le rapport des comptes spéciaux du Trésor l'an passé, il y a
deux ans et peut-être même - il faut que je vérifie - voilà trois ans.
Je souscris à vos remarques, monsieur le rapporteur général, monsieur le
ministre et je trouve effectivement anormal que des crédits attribués à des
administrations, qu'il s'agisse des administrations déconcentrées ou des
administrations territoriales, ne soient pas consommés. Au demeurant, comme l'a
dit l'un d'entre nous, en tant que maire ou président d'un conseil général,
nous veillons à ne pas reconduire les crédits lorsqu'ils sont systématiquement
reportés.
Le rapporteur des comptes spéciaux du Trésor est donc tout à fait en capacité
- cela fait partie de ses attributions - de voir comment fonctionne le
FNDAE.
M. Jean-Pierre Masseret.
Tout à fait !
M. Paul Loridant.
M'adressant maintenant à la majorité sénatoriale, je voudrais bien qu'elle
fasse preuve de cohérence.
(Exclamations sur les travées du RPR.)
En
effet, vous ne pouvez pas dénoncer cette pratique à l'occasion du FNDAE et ne
rien dire sur le budget de la recherche ou sur d'autres budgets.
M. Alain Vasselle.
A chaque jour suffit sa peine !
M. Paul Loridant.
Je peux certes partager avec vous le souci d'une meilleure gestion des crédits
de l'Etat et veiller à limiter les reports de crédit systématiques ; encore
faut-il, lorsque l'on fait des remarques, qu'elles s'appliquent dans tous les
domaines et qu'elles ne soient pas à géométrie variable, selon les budgets et
selon ce qui vous arrange.
M. Alain Vasselle.
C'est un procès d'intention !
M. Jean-Pierre Masseret.
Tout à fait !
M. Paul Loridant.
Etant moi-même vice-président du syndicat intercommunal pour l'aménagement
hydraulique de la vallée de l'Yvette - cela vaut bien les eaux de l'Oise,
monsieur Vasselle, monsieur le rapporteur général ! -, je connais le problème,
à savoir que les collectivités locales membres des syndicats demandent une
multitude de crédits pour exécuter des travaux qu'il faut étaler faute de
recevoir à temps les crédits demandés du FNDEA.
Face à ce léger dysfonctionnement des services de l'Etat ou d'autres services,
peut-être le Parlement pourrait-il exercer ses fonctions de contrôle.
Je souscris à la suggestion de M. le rapporteur général qu'un certain nombre
d'entre nous se rendent dans l'Oise - et je veux bien y accompagner M. le
rapporteur spécial du budget de l'agriculture - pour y effectuer, dans le cadre
d'une mission commune, un contrôle sur pièces et sur place. Je ne doute pas que
les sénateurs de l'Oise accueilleront avec bonheur leurs collègues rapporteurs
spéciaux !
M. Alain Vasselle.
Avec plaisir !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je suis prêt à vous accueillir dans l'Oise ! Ce sera
très convivial !
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis,
président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
La priorité pour 2003, que nous sommes invités
par M. le ministre délégué au budget à soutenir, sera le contrôle de
l'exécution budgétaire.
Je veillerai à ce que les moyens soient donnés aux rapporteurs spéciaux des
crédits de l'agriculture et des comptes spéciaux du Trésor pour « traquer » les
crédits et observer ce qui s'accomplit entre leur inscription au budget, leur
vote par le Parlement et leur mise en oeuvre sur le terrain.
Nous verrons alors s'il y a de la « viscosité dans les canalisations »
(Sourires)
et nous tâcherons de comprendre les raisons de ce décalage
entre l'inscription des crédits, leur vote et leur consommation.
Nous devrons également chercher à savoir si, dans toutes les communes de
France, y compris celles qui ne comptent que quelques dizaines d'habitants, il
est opportun d'installer des assainissements collectifs dont le coût est
absolument exorbitant.
M. Bruno Sido.
Absolument !
M. Jean Arthuis,
président de la commission.
Peut-être pourrait-on, dans ces cas-là,
expérimenter des solutions appropriées infiniment moins coûteuses sans pour
autant écarter les subventions publiques au motif qu'il ne s'agirait pas
d'assainissement collectif.
C'est sur ce point, sans doute, que le politique doit s'impliquer et assumer
pleinement sa responsabilité. J'ai la conviction que d'importantes économies
seront réalisées si nous admettons le principe du subventionnement des
assainissements individuels en remplacement du subventionnement de
l'assainissement collectif.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. Gérard Miquel, pour explication de vote.
M. Gérard Miquel.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il s'agit là
d'un débat de fond très important.
L'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques
m'a chargé d'effectuer un travail sur la qualité de l'eau et de
l'assainissement en France dont je présenterai les conclusions à la fin du mois
de janvier.
Depuis un an, j'ai parcouru notre pays et j'ai auditionné un grand nombre
d'experts ainsi que d'élus. J'en suis parvenu à la conclusion que la situation,
dans notre pays, était critique. Nous allons devoir mettre aux normes nos
installations, notamment dans le domaine de l'assainissement, mais sans aller
jusqu'aux petites communes. Ainsi, les 340 communes que compte mon département
ne relèvent pas toutes, bien entendu, d'un assainissement collectif et je
partage, à cet égard, l'analyse de M. Arthuis.
Mais nous devons aujourd'hui nous mettre aux normes en matière d'eau potable.
Les problèmes de nitrates, de pesticides nécessitent des installations très
coûteuses.
Les collectivités doivent réaliser des investissements très lourds qui vont
provoquer une augmentation du prix de l'eau. Dans chacun de nos départements,
nous sommes obligés d'étaler sur plusieurs années nos programmes de
financement, car les crédits dont nous disposons sont insuffisants pour nous
permettre de faire face à de tels investissements. Où est le blocage ?
Quand j'interroge la direction départementale de l'agriculture, elle reconnaît
disposer d'une enveloppe qui lui permet de ne financer qu'une petite partie des
projets que j'envisage d'effectuer...
Monsieur le ministre, je suis tenté de vous faire une suggestion. Il est
proposé de ponctionner 65 millions d'euros, mais on connaît les habitudes :
cette ponction opérée cette année peut facilement devenir définitive. Je
préférerais donc que nous gardions ces 65 millions d'euros, que nous les
affections au FNDAE et que vous vous inspiriez un peu de la méthode Sarkozy.
(Approbations sur les travées du RPR.)
M. Alain Vasselle.
Quelle référence !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Ce n'est pas insultant !
M. Gérard Miquel.
Laissez-moi aller jusqu'au bout de mon explication.
Au sein de l'administration centrale, un haut responsable gère ce dossier.
Donnez-lui une promotion. Affectez-le ailleurs et nommez quelqu'un qui aura
une obligation de résultat.
Si l'on double l'enveloppe de mon département, je vous assure, monsieur le
ministre, que je la consommerai dans l'année, sans aucune difficulté.
M. Alain Vasselle.
C'est partout pareil !
M. Gérard Miquel.
Laissons ces 65 millions d'euros au FNDAE et soumettons-nous à une obligation
de résultat quant à la distribution qui sera faite de ces crédits dans les
différents départements français. Les projets ne manquent pas, ils sont à
l'étude. Ne manquent que les financements.
Un grand chantier nous attend.
Nous devons régler les problèmes d'environnement relatifs à l'eau, à
l'assainissement, aux déchets.
Je suis très inquiet quant aux financements que nous pouvons mettre en place.
Si nous voulons mener à bien ces actions, nous serons obligés d'imposer
davantage nos concitoyens en augmentant le prix de l'eau, de l'assainissement,
en majorant la taxe d'enlèvement des ordures ménagères ou la redevance sur les
consommations d'eau. Cette ponction n'est pas bienvenue. Si nous avons des
crédits importants en réserve, distribuons-les dans les divers départements.
Nous sommes prêts à les utiliser.
(Applaudissements sur les travées du
groupe socialiste.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Je souhaite répondre à deux questions qui ont été
posées et donner une explication.
La question posée par M. Vasselle est claire : la mesure proposée
concerne-t-elle seulement l'exercice 2003 ?
Oui, il s'agit exclusivement d'une mesure pour 2003 non reconductible, j'en
prends l'engagement devant vous.
La seconde question, qui faisait d'ailleurs l'objet d'un dialogue entre deux
éminents sénateurs de l'Oise, était : faut-il aller vers plus de
décentralisation ? Bien sûr.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous savez l'affection que je vous porte.
(Sourires.)
M. Gérard Miquel.
Nous aussi !
M. Gérard César.
Aïe, Aïe, Aïe !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Permettez-moi d'utiliser une métaphore liée à l'art de
la plomberie.
Vous avez reçu des Français, comme vos collègues de l'Assemblée nationale, la
belle, noble, unique et souveraine mission d'autoriser les crédits nécessaires
au fonctionnement de notre pays. Vous pouvez - je file toujours la métaphore de
la plomberie -, dans la canalisation qui part de l'échelon central, engager
tous les crédits que vous voudrez, mais si vous gardez cette cohorte de
plombiers tout au long des canalisations, et ce jusqu'au hameau le plus
retranché de vos villages, il ne restera à la fin qu'un mince filet d'eau.
Donc, je vous en supplie, repartez du filet d'eau, remontez les canalisations
et enlevez les bouchons là où ils se trouvent : alors, vous aurez fait
progresser le pays. Telle est ma conviction profonde. En tout cas, le
Gouvernement et l'inspection générale des finances sont à votre disposition.
Paul Loridant et le président de la commission des finances, Jean Arthuis, ont
raison : c'est aussi le rôle du Parlement, c'est pour cela qu'il a été
institué, c'est en cela qu'il est irremplaçable. Contrairement à un ministre,
de surcroît un simple ministre délégué au budget, vous détenez le pouvoir
souverain. Alors, mesdames, messieurs les sénateurs, faites un petit travail de
plomberie : vous ferez progresser le pays.
En tout cas, cela me conduit à ne pas accueillir de manière favorable la
proposition de Gérard Miquel, car elle vise à maintenir un flux qui part de
l'échelon central, sans que cela ne change rien au niveau local. Je vous invite
donc, mesdames, messieurs les sénateurs, à rejeter, sans aucun complexe, cet
amendement.
(Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union
centriste.)
M. le président.
Monsieur Doublet, après les explications de M. le ministre, maintenez-vous
votre l'amendement n° I-55 ?
M. Michel Doublet.
Après avoir écouté le « plombier en chef », j'espère qu'il y aura les crédits
pour faire la soudure !
(Sourires.)
J'ai bien entendu, monsieur le ministre, l'engagement que vous avez pris de
mettre de l'ordre dans la maison et votre incitation à faire remonter et à
faire financer les projets. Monsieur le ministre, vous vous êtes engagé dans ce
domaine, je retire donc mon amendement.
(Très bien ! sur les travées du RPR,
des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président.
L'amendement n° I-55 est retiré.
Monsieur Miquel, l'amendement n° I-90 est-il maintenu ?
M. Gérard Miquel.
Compte tenu des explications que j'ai données, vous comprendrez, monsieur le
ministre, que je ne retire pas cet amendement.
(M. le rapporteur général
s'exclame.)
Par rapport à l'Assemblée nationale, le Sénat a un rôle particulier à jouer,
en direction des collectivités locales.
(M. Bruno Sido opine.)
Or, avec
de telles méthodes, je crains que notre décision ne soit mal comprise par les
élus, notamment les maires, qui comptent sur nous pour régler ce problème
particulièrement important. C'est la raison pour laquelle je souhaite maintenir
cet amendement.
Il est prévu cette année de prélever - indûment - 65 millions d'euros sur le
FNDAE pour les affecter au budget général. Or, dans les années à venir, nous
aurons à faire face à des investissements très importants, et nous disposerons
d'une enveloppe diminuée. En outre, même si nous nous efforçons de distribuer
cette enveloppe dans les meilleures conditions, je ne suis pas persuadé qu'une
décentralisation accrue aboutisse à de meilleurs résultats.
Je crois, au contraire, qu'il nous faut utiliser la totalité de ces crédits.
Encore une fois, aucun problème technique ne se pose. Les dossiers sont dans
les tiroirs et nous différons les investissements par manque de crédits.
Sur cet amendement, monsieur le président, je demande un scrutin public.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
Monsieur Vasselle, je regrette, mais vous avez déjà eu la parole pour
expliquer votre vote.
M. Alain Vasselle.
Monsieur le président, j'ai expliqué mon vote sur l'amendement n° I-55, mais
non sur l'amendement n° I-90.
M. le président.
Ces amendements étant identiques, votre explication de vote vaut pour les deux
amendements.
M. Alain Vasselle.
Dans ces conditions, je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président.
La parole est à M. Alain Vasselle, pour un rappel au règlement.
M. Alain Vasselle.
Monsieur le président, vous connaissez certainement mieux le règlement que
moi, je n'insisterai donc pas sur le fait que, ayant expliqué mon vote sur
l'amendement de M. Doublet, qu'il a ensuite retiré, je pensais pouvoir
également m'exprimer sur l'amendement de M. Miquel.
M. Miquel a avancé comme argument essentiel pour justifier le maintien de son
amendement sa crainte, si les 65 millions d'euros devaient disparaître au titre
de l'exercice 2003, de ne pas les retrouver en 2004 et dans les années
futures.
Si mes amis politiques et moi-même ne votons pas l'amendement de M. Miquel,
c'est parce que M. Lambert, en sa qualité de ministre délégué du budget, a
répondu positivement à la question que j'avais posée moi-même en ces termes : «
Monsieur le ministre, pouvez-vous prendre l'engagement devant la représentation
nationale que cette mesure ne vaudra que pour l'exercice 2003 et ne
s'appliquera pas pour l'exercice 2004 et les exercices futurs ? » Dès lors que
M. Lambert nous a donné cette assurance au nom du Gouvernement, nous n'avons
aucune raison de mettre en doute sa parole.
C'est la raison pour laquelle, m'appuyant sur l'engagement solennel du
Gouvernement, selon lequel les crédits seront rétablis l'année prochaine, nous
ne voterons pas l'amendement de M. Miquel.
(Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Christian Bergelin.
Je demande la parole, pour un rappel au règlement.
M. le président.
La parole est à M. Christian Bergelin.
M. Christian Bergelin.
Ce débat est très important tant les besoins sont incommensurables en milieu
rural. Chacun des décideurs ici présents le sait.
Monsieur le ministre, je n'aurai pas l'outrecuidance de vous donner un
conseil, mais je voudrais apporter un témoignage.
Lorsque j'étais en charge du ministère de la jeunesse et des sports, en 1986,
les crédits alloués au FNDS, le Fonds national pour le développement du sport,
n'étaient pas entièrement consommés à la fin de chaque année. Les importants
reports de crédits suscitaient la colère de tous ceux qui attendaient, dans
chacune de nos régions, de pouvoir mettre en place les équipements nécessaires
à la jeunesse de ce pays. J'avais alors indiqué aux préfets de chaque région,
dès le début du mois de janvier de chaque année, le montant approximatif de
l'enveloppe destinée à financer les projets. Constatant ensuite que les choses
ne progressaient pas assez vite, j'ai demandé que tous les projets soient
prêts, notamment en termes de maîtrise d'ouvrage, de descriptifs techniques et
de financement, avant le 30 juin de chaque année. A partir de là, à la fin de
chaque année, tous les crédits étaient consommés jusqu'au dernier centime.
C'est pourquoi il faut modifier les procédures.
Nous avons pris acte de vos engagements, monsieur le ministre, et nous
comprenons votre démarche. Nous souhaitons que 2003 voie l'émergence de
pratiques nouvelles.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Avant la tenue du scrutin public demandé par M. Gérard
Miquel, je souhaite apporter quelques précisions pour éclairer le Sénat.
Permettez-moi d'abord de vous rappeler que celui qui vous parle est le
président de l'Association des maires des cinq cent cinq communes d'un
département qui compte moins de 300 000 habitants. Si vous connaissez un
département plus rural, dites-le moi !
S'il demeure des difficultés sur le plan local, attaquons-nous aux vrais
problèmes !
M. Alain Vasselle.
Voilà !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Attaquons-nous aux procédures qui régissent
l'utilisation des crédits !
M. Jean-Pierre Schosteck.
Absolument !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Ce qui est en cause, à ce jour, c'est non pas une
l'insuffisance du volume des moyens qui vous sont alloués et dont vous avez
besoin pour réaliser les missions qui vous ont été confiées, mais tout
simplement le fait que les modalités d'utilisation des crédits ne sont pas au
point.
En rejetant l'amendement n° I-90, vous contribuerez à faire évoluer la
situation puisque vous vous attaquerez à l'essentiel, c'est-à-dire à la
révision des mécanismes d'utilisation des crédits. Je vous invite donc sans
aucun complexe à rejeter cet amendement inopportun.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Très bien !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-90.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du
règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Nombre de votants | 319 |
Nombre de suffrages exprimés | 315 |
Majorité absolue des suffrages | 158 |
Pour l'adoption | 108 |
Contre | 207 |
Je mets aux voix l'article 23 bis.
(L'article 23 bis est adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre le cours normal de l'examen des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2003 pour aborder, comme il en a été décidé en conférence des présidents, le débat sur les recettes des collectivités locales.
C'est M. le président du Sénat qui va mener ce débat.
(M. Christian Poncelet remplace M. Bernard Angels au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. CHRISTIAN PONCELET
Débat sur les recettes des collectivités locales
M. le président.
Mes chers collègues, ce débat sur les recettes des collectivités locales est
extrêmement important, surtout pour nous, sénateurs, qui avons pour vocation de
veiller aux légitimes intérêts des collectivités territoriales.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis,
président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le ministre,
mes chers collègues, ce débat sur les recettes des collectivités locales dans
le cadre de la discussion de la première partie du projet de loi de finances a
lieu conformément au souhait exprimé voilà cinq ans déjà par M. le président
Christian Poncelet.
M. le président.
Je vous remercie, monsieur le président de la commission des finances, de le
rappeler ; j'y suis sensible.
M. Jean Arthuis,
président de la commission.
Rendons à César ce qui est à César !
(Sourires.)
Tenir ce débat apporte beaucoup à la lisibilité de nos travaux, et ce pour
deux raisons principales.
D'abord, à l'image du prélèvement européen, les concours financiers de l'Etat
aux collectivités locales sont pour les deux tiers des prélèvements sur les
recettes de l'Etat.
Ensuite, c'est dans le cadre de la première partie du projet de loi de
finances que sont discutées les dispositions affectant la part « déterminante »
des recettes des collectivités locales, les recettes fiscales.
Concours financiers de l'Etat, recettes fiscales : le débat d'aujourd'hui est
l'occasion d'évoquer de manière globale les relations financières entre l'Etat
et les collectivités locales ainsi que le système de financement des
collectivités locales.
S'agissant des concours financiers de l'Etat aux collectivités locales,
lorsque, le 3 décembre prochain, le Sénat examinera en séance publique les
crédits de la décentralisation inscrits au budget du ministère de l'intérieur,
le vote qu'il exprimera alors ne portera que sur environ 15 % du total des
concours de l'Etat aux collectivités inscrits dans le projet de loi de
finances, soit 1,8 milliard d'euros.
Nous l'oublions trop souvent, le fascicule budgétaire sur lequel est inscrit
le montant le plus élevé de concours financiers aux collectivités locales n'est
pas celui du ministère de l'intérieur, mais celui des charges communes, qui
comprend les crédits destinés à la prise en charge des dégrèvements d'impôts
locaux, soit environ 10 milliards d'euros, ainsi que, sans raison apparente, la
dotation de l'Etat au Fonds national de péréquation.
Mais on trouve aussi des concours de l'Etat aux collectivités locales au sein
du budget du budget du ministère de la culture et de la communication, et
d'autres au sein du ministère des affaires sociales, du travail et de la
solidarité.
Bien que ce point relève plutôt de la deuxième partie du projet de loi de
finances, je profite de l'occasion, monsieur le ministre, pour vous indiquer
qu'il serait souhaitable qu'à l'avenir les crédits de la DGD « culture » et de
la DGD « formation professionnelle » soient regroupés au sein de la DGD de
droit commun du ministère de l'intérieur, afin de donner une vue globale des
sommes consacrées par l'Etat au financement des compétences transférées aux
collectivités locales.
La singularité de notre système de concours financiers aux collectivités
locales, c'est qu'en passant en revue les fascicules budgétaires les uns après
les autres, mes chers collègues, vous ne trouverez qu'environ le tiers des
sommes en cause. Nous nous prononçons sur le montant des deux autres tiers
souvent sans le savoir, lorsque nous adoptons l'article d'équilibre, qui fixe
le montant des prélèvements sur les recettes de l'Etat en faveur des
collectivités locales : 36,3 milliards d'euros dans le projet de loi de
finances pour 2003.
Dans ces 36,3 milliards d'euros, se trouve le principal concours de l'Etat aux
collectivités locales, la dotation globale de fonctionnement, pour environ 18
milliards d'euros. Les principales compensations d'exonérations d'impôts locaux
y figurent également, en particulier la compensation de la suppression de la
part « salaires » de la taxe professionnelle qui jouera pleinement en 2003, et
ce pour 9 milliards d'euros.
La technique des prélèvements sur les recettes de l'Etat, souvent contestée
par le passé, car considérée comme une affectation de recettes contraire au
principe d'universalité budgétaire, a été consacrée par l'article 6 de la loi
organique du 1er août 2001, qui a par ailleurs précisé quel type de concours
financiers de l'Etat aux collectivités locales devait être inscrit en
prélèvements sur recettes.
La loi distingue deux grands types de concours : les compensations
d'exonérations fiscales, d'une part, et les concours destinés à couvrir des
charges incombant aux collectivités locales, d'autre part.
Si l'on examine la répartition actuelle des concours de l'Etat aux
collectivités locales entre dotations budgétaires et prélèvements sur recettes,
monsieur le ministre, on constate qu'il y a encore du chemin à faire avant que
la réalité ne soit conforme à la voie tracée par la loi organique.
Dès l'année prochaine, nous commencerons à décliner les nouvelles dispositions
constitutionnelles en lois organiques et en lois ordinaires. Je souhaiterais
qu'à cette occasion nous n'omettions pas de remettre à plat la structure des
concours financiers aux collectivités locales.
Je souhaiterais aussi, pour l'avenir, que nous examinions notre système de
relations financières entre l'Etat et les collectivités locales, non seulement
en nous demandant si les crédits sont en hausse ou en baisse, mais aussi en
nous interrogeant sur les critères qui pourraient nous permettre de juger de
l'efficacité de cette dépense publique et de ces relations qui portent sur 58
milliards d'euros dans le projet de loi de finances pour 2003, soit le deuxième
poste de dépense après l'éducation nationale.
Lorsqu'il nous a présenté les crédits des collectivités locales en commission,
notre rapporteur spécial M. Michel Mercier a procédé ainsi, en examinant notre
système de relations financières à la lumière de trois objectifs identifiés par
la Cour des comptes en réponse à une question de notre rapporteur général :
premièrement, un objectif de visibilité par la programmation pluriannuelle de
l'évolution des dotations ; deuxièmement, un objectif de compensation - je cite
la Cour des comptes - « des mesures législatives affectant les ressources et
les charges des collectivités territoriales » ; troisièmement, un objectif de
péréquation entre collectivités territoriales.
Sur ces trois points, et malgré les quelques avancées qui pourraient résulter
de la révision de la Constitution, le système actuel reste pour le moins - nous
en conviendrons - perfectible.
Avant de conclure, et en quelque sorte en guise de préambule, je voudrais
m'arrêter un instant sur les articles et les amendements que nous aurons à
examiner tout à l'heure.
Que constatons-nous, tant dans les dispositions résultant du projet initial
que dans les apports adoptés par l'Assemblée nationale ou, à l'heure où nous
parlons, ceux qui sont suggérés par le Sénat ? Hormis la réforme de la
fiscalité locale de France Télécom, qui est une grande réforme de fond -
attendue -, la plupart des dispositions sont destinées, soit à corriger les
conséquences imprévues des précédentes réformes, soit à colmater les brèches
d'un système qui ne cesse de prendre l'eau et qu'il est de plus en plus
difficile de réparer, compte tenu de sa complexité croissante.
Au passage, je voudrais indiquer que, contrairement à une idée reçue, cette
complexité n'est due que pour une petite partie aux initiatives parlementaires.
Elle résulte pour la partie principale de la volonté des gouvernements
successifs de procéder à des aménagements à la marge, plutôt que de se lancer
dans des réformes de fond. Voilà comment nous avons généré une complexité
inextricable.
Au-delà du fait que nous ne pourrons plus tenir longtemps avec un système qui
fonctionne par addition de bricolages, nous nous heurtons, en matière de
fiscalité locale et de concours financiers, à un véritable problème de
lisibilité et d'intelligibilité de la norme juridique. Une part croissante des
budgets locaux sert à rémunérer des cabinets de consultants, qui sont
quelquefois constitués par de hauts fonctionnaires heureusement reconvertis,
car les collectivités locales seules n'arrivent plus à s'y retrouver.
Au fil des années, les services de l'Etat dans les départements, qu'il
s'agisse des services préfectoraux ou des trésoreries générales, ont cessé
d'être en mesure d'expliquer et de conseiller. Autrement dit, l'Etat, par ses
représentants, ne comprend plus les règles qu'il édicte et se condamne à s'en
remettre à des tiers.
Cette situation est étrange, inquiétante, ubuesque. La loi organique du 1er
août 2001 sur les lois de finances constitue, monsieur le ministre, un
magnifique outil de clarification. A cet égard, les travaux que conduit le
comité de normalisation comptable, présidé par M. Michel Prada, a notamment
pour mission de formaliser les états financiers de l'Etat, états de synthèse
qui seront lisibles et compréhensibles, au-delà de la représentation nationale,
pour tous les Français. J'ai bon espoir que M. Michel Prada et son comité de
normalisation nous aideront à y voir clair.
Je ne doute pas que les préconisations que le comité formulera répondront
pleinement à notre impatience.
Tout à l'heure, lors de la discussion des articles, je doute, en revanche, que
nous parvenions à tenir des débats totalement limpides pour les non-initiés,
mais nous ferons de notre mieux. Geageons que, sur ce point également, la
réforme des finances locales permettra de faire des progrès.
Monsieur le ministre, le chantier qui nous attend est gigantesque. Vous pouvez
compter sur le Sénat et sur sa commission des finances pour donner à la
démocratie de proximité les moyens de ses ambitions, la transparence et la
lisibilité, afin que les acteurs locaux puissent rendre compte de leur gestion.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR, des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
ministre, mes chers collègues, ce débat sur la partie « collectivités locales »
du projet de loi de finances intervient pour 2003 dans un contexte bien
particulier, compte tenu de notre récent vote du projet de loi
constitutionnelle relatif à l'organisation décentralisée de la République. Nous
devons donc nous projeter intellectuellement dans le nouveau système.
S'il est vrai que la réforme de la fiscalité locale et des dotations de l'Etat
aux collectivités locales ne peut pas être le préalable de la décentralisation,
il n'en demeure pas moins vrai que les deux vont de pair et que la plupart des
élus locaux que nous sommes ne pourront assimiler que très difficilement les
nouvelles notions issues de la décentralisation si nous ne connaissons pas les
nouveaux concepts de financement et les nouvelles règles du jeu, car, quel que
soit le niveau de nos responsabilités, il est inconcevable de dissocier
l'attribution de compétences supplémentaires et les ressources
correspondantes.
C'est bien ce que nous avons voulu dire en mettant en avant la notion
d'autonomie fiscale, le caractère prédominant des ressources fiscales dans les
ressources totales des collectivités territoriales et la compensation des
charges nouvelles par des ressources nouvelles.
Comme l'a rappelé très opportunément M. le président de la commission des
finances, les concours financiers de l'Etat aux collectivités locales
connaissent, en 2003, une hausse substantielle de 3,7 % à structure constante
par rapport à 2002, puisqu'ils s'élèvent à 58 milliards d'euros dans le présent
projet de loi de finances.
Toutefois, il convient de distinguer, au sein de cette masse considérable, ce
qui est imputable aux compensations d'exonérations fiscales et ce qui est lié
aux autres concours financiers de l'Etat.
Depuis 1999, la part liée à l'évolution des compensations d'exonérations
fiscales aura représenté 11 milliards d'euros sur les 12,5 milliards d'euros
supplémentaires pour les concours financiers de l'Etat.
Du point de vue de l'Etat, il convient, bien évidemment, d'appréhender ces
sommes sous l'angle de leur progression globale mais, du point de vue d'une
collectivité locale, pour un budget communal, intercommunal, départemental ou
régional, ce qui compte c'est l'équilibre entre les dépenses et les ressources.
Si l'évolution des dépenses est toujours préoccupante, celle des dépenses
obligatoires l'est encore davantage. Nous qui pouvons faire le lien entre
considérations locales et considérations nationales sommes bien placés pour
savoir que la clé de l'équilibre, c'est d'abord la maîtrise de la dépense.
Nous acceptons bien entendu - c'est toute la noblesse de notre rôle - d'être
tenus pour responsables de ce que nous maîtrisons, mais, lorsque des
composantes importantes de nos dépenses nous sont imposées et que nous n'avons
pas de marge de manoeuvre pour modifier le rythme d'évolution d'une grande
partie de nos budgets, nous ne pouvons en tant qu'élus locaux que manifester
des insatisfactions.
Or en 2002, plus encore qu'en 2001, les dépenses des collectivités
territoriales - il faut en avoir conscience - ont globalement progressé plus
vite que leurs recettes. Cela vaut plus particulièrement pour les départements.
Chacun sait que l'allocation personnalisée d'autonomie, les dépenses liées à la
prise en charge des services départementaux d'incendie et de secours, les SDIS,
sont des éléments de discontinuité des budgets départementaux. Pour l'ensemble
des collectivités territoriales, le passage aux 35 heures, les revalorisations
du point « fonction publique » et les conditions dans lesquelles il est
nécessaire de préparer la fin du dispositif des emplois-jeunes grèvent le
rythme des dépenses et posent de réels problèmes aux gestionnaires locaux.
Les réflexions actuellement en cours à la suite du vote par le Sénat du projet
de loi constitutionnelle relatif à l'organisation décentralisée de la
République nous conduisent à mettre en avant un certain nombre de
considérations.
Mes chers collègues, si nous voulons progresser dans le sens de l'autonomie
fiscale, rester dans la ligne définie il n'y a pas si longtemps dans la
proposition de loi constitutionnelle du président, Christian Poncelet, et
véritablement assumer une telle orientation, il nous faut renforcer la
fiscalité locale par de nouvelles ressources fiscales.
M. le président.
Très bien !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il faudra non seulement moderniser la fiscalité
locale existante, mais aussi trouver d'autres supports fiscaux, et c'est bien
là que réside la difficulté de l'exercice !
Le renforcement de la part des nouvelles recettes fiscales dans les ressources
des collectivités locales est la résultante tout à fait normale et naturelle de
la révision constitutionnelle en cours. C'est un échange gagnant-gagnant que
celui qui consiste à substituer des ressources fiscales aux dotations de
l'Etat, puisqu'il permet aux collectivités d'être plus autonomes et à l'Etat de
gagner en souplesse dans son budget. Plus les dotations sont élevées, plus le
budget de l'Etat est rigide et plus l'autonomie des collectivités locales est
faible. Là est le noeud de la réforme et ce sera en quelque sorte l'épreuve de
vérité.
Quelles ressources fiscales nouvelles sont concevables ? Nous avons, les uns
et les autres, pris connaissance des idées qui ont commencé à naître soit au
cours des assises des libertés locales, soit dans nos régions.
Qu'il s'agisse de la taxe intérieure sur les produits pétroliers ou de la taxe
générale sur les activités polluantes, cherchons, s'il est possible, notamment
au regard du droit communautaire, de moduler les taux - je pense en particulier
à la TIPP - et de faire en sorte qu'ils puissent être définis par chaque
collectivité attributaire dans les conditions fixées par la loi afin que ces
ressources fiscales deviennent autonomes. C'est une question absolument vitale
pour concrétiser cette nouvelle phase de la décentralisation, en tout cas sur
les plans financier, budgétaire et fiscal. Ce sera l'occasion, assurément, d'un
grand débat, notamment au sein de cette assemblée.
Les impôts existants devront également être rénovés. Chacun se souvient des
discussions que nous avons eues à l'occasion de la révision des bases des
impôts directs locaux. Pourquoi ne pas envisager une révision qui serait, en
quelque sorte, modulable et dont les conditions de mise en oeuvre seraient,
dans une large mesure, laissées à l'appréciation des autorités locales ?
Pourquoi ne pas accorder aux maires, qui sont sans conteste les mieux à même
d'évaluer les transferts de matière imposable, de réviser les bases des impôts
locaux ? Toutes les réponses à ces questions sont encore en devenir.
Dans le schéma auquel nous réfléchissons, il est concevable que le produit des
quatre taxes directes locales soit exclusivement affecté aux communes et que
les ressources des départements et des régions soient issues d'autres
ressources fiscales, telles la TIPP, la TGAP, ou éventuellement abondées à
partir de l'assiette d'imposition nationale.
Ces pistes ne peuvent prétendre à l'exhaustivité ni surtout à l'unicité. Mais
n'est-ce pas l'essentiel du débat sur la réforme des finances locales qui devra
bien avoir lieu, notamment au sein de notre assemblée ?
Bien entendu, les dotations de l'Etat continueront à représenter une part
importante des ressources, même si l'on peut souhaiter que cette part diminue
progressivement sur le moyen et le long terme. Il faudra, en tout état de
cause, rendre le système des dotations plus lisible, plus juste et surtout plus
prévisible pour les collectivités locales. Cela impliquera une réforme de la
DGF, d'autant plus nécessaire que la compensation de la suppression de la part
« salaires » de la taxe professionnelle sera intégrée dans la DGF dès l'année
2004.
M. Arthuis le rappelait, il faut vraiment maîtriser le sujet pour décrypter
les différents éléments de ce complexe réseau, pour comprendre les conditions
de calcul et d'affectation des dotations dans les différents budgets locaux.
Nous ne pourrons parvenir à un système plus lisible et plus clair qu'à
condition d'être raisonnables et de ne pas rechercher une solution à la carte
en fonction des problèmes rencontrés par chaque collectivité !
Conclusion, plus de lisibilité pour le montant des concours financiers de
l'Etat et les dépenses obligatoires des collectivités locales, plus d'autonomie
fiscale, voilà ce que demandent les élus locaux pour l'avenir. L'Etat ne s'en
portera que mieux, en disposant de plus de marges de manoeuvre pour ajuster ses
dépenses à la conjoncture et pour faire face aux priorités qui sont les siennes
dans le cadre de la politique voulue par les Françaises et les Français.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, de
l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 25 minutes ;
Groupe socialiste, 23 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 18 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 16 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 14 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 13 minutes.
Dans la suite du débat, la parole est à M. Claude Haut.
M. Claude Haut.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collèges, depuis
quelques semaines, le Gouvernement a lancé une vaste opération de communication
sur la décentralisation, exercice qu'il affectionne particulièrement.
Toutefois, ce discours sur les collectivités locales ne s'accompagne pas
d'actions concrètes en leur faveur.
La révision constitutionnelle en cours n'est pour l'instant qu'une coquille
vide qui ne rencontre aucun écho parmi les Français, tant elle est peu claire
et sans contenu.
En revanche, le budget pour 2003 est quant à lui parfaitement clair : il est
très défavorable aux collectivités locales.
Je souhaite vous en donner quelques exemples.
Tout d'abord, le contrat de croissance et de solidarité est reconduit en 2003
dans les conditions prévues en 2002, soit une indexation des principales
dotations de l'Etat sur l'inflation et 33 % de la croissance. Alors que l'année
dernière vous jugiez, monsieur le rapporteur général, et vous-même, monsieur le
ministre, lorsque vous étiez président de la commission des finances, que ce
pourcentage de la croissance était très insuffisant - il me semble même me
rappeler que vous aviez soutenu un amendement pour le porter à 50 % -,
permettez-moi d'être surpris qu'aujourd'hui vous n'acceptiez pas de reprendre
vos propositions d'hier !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il n'y a plus d'argent !
M. Claude Haut.
A partir de ce constat, à quoi peut-on s'attendre pour les années futures ?
S'agit-il des prémices d'un retour au fameux pacte de stabilité de 1995-1997
?
Par ailleurs, en ce qui concerne les dotations de l'Etat, nous constatons, là
comme ailleurs, que ce qui est donné d'une main est immédiatement repris de
l'autre. Cela se constate en particulier pour les dotations de solidarité
urbaine et rurale : 73 % de diminution des abondements par rapport à 2002.
De même, la dotation globale de fonctionnement ne progressera que de 1,8 % en
2003 alors qu'elle avait connu une augmentation de 3,9 % en 2002. Une partie de
cet écart considérable, singulièrement pénalisant pour les collectivités
locales, est la conséquence directe de l'amputation des abondements de la DSU
et de la DSR. Or ces deux dotations sont essentielles aux collectivités
défavorisées, puisqu'elles constituent le fondement de la péréquation entre
communes.
Les choix budgétaires du Gouvernement sont d'autant plus regrettables qu'en
2003 la dotation forfaitaire des communes baissera en volume, sa progression
étant inférieure à l'inflation. Le danger est grand pour les nombreuses
communes dont la ressource principale est la dotation forfaitaire.
Dans le projet de loi de finances pour 2003, il est aussi prévu que la
régularisation de la DGF de l'année 2001 ne sera pas versée aux communes qui
devaient en bénéficier en application des dispositions du code général des
collectivités territoriales. En effet, le Gouvernement affecte ces 100 millions
d'euros à la DSU et à la DSR pour compenser les ressources que l'Etat ne leur
accordera pas en 2003. Concrètement, l'Etat demande aux communes de suppléer
ses propres carences.
De plus, le bénéfice de la régularisation de la DGF de l'année 2001 n'est
maintenu aux collectivités locales qu'en apparence, car l'Etat réduit d'autant
les majorations qu'il attribue aux dotations de solidarité communales.
Le projet de loi de finances pour 2003 remet aussi en cause la péréquation par
l'abandon de la modulation des baisses de la dotation de compensation de la
taxe professionnelle, la DCTP, en faveur des collectivités locales
défavorisées. Or la DCTP diminuera de 3 % en 2003. En effet, elle constitue
toujours la variable d'ajustement du contrat de croissance et de solidarité. La
reconduction en 2003 du mécanisme de modulation aurait pourtant permis aux
communes, aux départements et aux régions les plus pauvres de ne supporter
qu'une baisse de 1,5 % et non de 3 % de leur DCTP.
Mais, manifestement, et contrairement à ce que l'on entend, la péréquation ne
constitue plus une priorité pour ce gouvernement. La chute de 18 % des
ressources du Fonds national de péréquation inscrites dans le projet de loi de
finances en est une preuve supplémentaire. Le Gouvernement n'a pas jugé utile
de reconduire l'abondement traditionnel de l'Etat à ce fonds, soit 22,3
millions d'euros en 2002. Heureusement, un amendement voté par l'Assemblée
nationale a remédié de justesse à cette lacune. Pour autant, cela ne sera pas
suffisant pour faire face à l'accroissement des inégalités qui résultera
inévitablement des projets décentralisateurs du Gouvernement.
Enfin, le Gouvernement supprime en 2003 les droits sur les licences des débits
de boissons, sans compenser cette perte de recettes aux communes qui
percevaient ces droits. Monsieur le ministre, vous critiquiez hier la réduction
de l'autonomie fiscale des collectivités locales. Aujourd'hui aux
responsabilités, vous supprimez certaines recettes fiscales des collectivités
locales, et cela, sans même les compenser financièrement.
Ce budget n'est pas favorable aux collectivités locales en 2003 ; il ne le
sera certainement pas non plus dans les prochaines années.
Par ailleurs, monsieur le ministre, quelle est votre vision de la
décentralisation ?
L'opération de réduction des personnels de l'éducation nationale sur le budget
2003 n'anticipe-t-elle pas un transfert à moindre coût de cette compétence en
2004 : emplois de personnel ATOS, aides éducateurs, etc ? Une opération
identique peut d'ailleurs être soulignée au niveau du ministère de
l'équipement.
Ainsi, l'Etat transférerait aux collectivités locales la gestion des
établissements scolaires, mais pas les emplois suffisants à l'exercice de ces
compétences, puisqu'ils auront été supprimés par avance.
M. Gérard Delfau.
Eh oui !
M. Claude Haut.
Confrontés aux syndicats d'enseignants, aux parents d'élèves et même au
ministère de l'éducation nationale lui-même, les présidents de conseils
généraux et de conseils régionaux n'auront d'autre choix que de recruter des
fonctionnaires territoriaux supplémentaires pour exercer ces missions. Pour les
rémunérer, ils devront inévitablement augmenter les impôts locaux.
A l'évidence le Gouvernement cherche à transférer le déficit de l'Etat aux
collectivités locales, ainsi que l'impopularité liée à l'impôt.
La décentralisation sera-t-elle le moyen pour le Gouvernement de tenir ses
promesses en matière de baisses d'impôts ? Les spécialistes des finances
locales anticipent tous avec lucidité une explosion de la pression fiscale
locale, parallèlement à la baisse des impôts de l'Etat.
Nous avions proposé une mesure de solidarité en faveur du financement de
l'allocation personnalisée d'autonomie, l'APA, en déposant l'amendement n° I-93
visant à supprimer la baisse de 1 % de l'impôt sur le revenu en 2003 pour que
l'Etat puisse financièrement respecter ses engagements en partageant, à parité
avec les départements, le surcoût de l'allocation personnalisée d'autonomie.
Cela a été refusé. La solidarité en faveur de nos anciens n'est pas une
priorité gouvernementale : vous avez fait le choix de la laisser à la charge
des départements, avec toutes les difficultés financières que cela
représente.
Dans ces conditions, le danger est grand que les départements et les personnes
âgées subissent les conséquences de vos cadeaux fiscaux accordés à ceux qui
n'en ont pas le plus besoin.
(Très bien ! sur les travées du groupe
socialiste.)
En réalité, les collectivités locales n'ont rien à espérer d'une
décentralisation libérale dont l'objectif est moins de renforcer les
collectivités locales que d'affaiblir l'Etat, qui peut encore réguler et être
un frein au marché. De plus, cette décentralisation portera nécessairement
atteinte à l'unité nationale en exacerbant la concurrence entre les
territoires.
Le Gouvernement paraît ainsi accorder un faux intérêt aux collectivités
locales. A l'aube d'un nouveau transfert de charges qui paraît inévitable,
aucune réforme des finances locales n'a été prévue, alors qu'elle était
prioritaire avant tout nouveau transfert.
Au cours des cinq dernières années, les collectivités locales ont connu un
assainissement important de leurs finances grâce à la bienveillance du
gouvernement de Lionel Jospin.
(Rires sur les travées de l'Union centriste
et des Républicains et Indépendants.)
Le dernier rapport de l'Observatoire
des finances locales soulignait d'ailleurs qu'elles s'étaient encore
désendettées de 1,3 milliard d'euros en 2001. Mais cet embellissement ne
résistera pas longtemps à un transfert massif de charges.
Les dotations de l'Etat doivent toutes gagner en simplicité et en lisibilité.
Leur évolution doit aussi être rendue plus prévisible grâce à une programmation
pluriannuelle, inspirée de celle qui a été mise en place de 1999 à 2001, dans
le cadre du contrat de croissance et de solidarité. Les abondements
exceptionnels devraient être intégrés dans les dotations auxquelles ils se
rapportent et plus aucune dotation ne devrait constituer le solde d'une autre
dotation.
Actuellement, cette mécanique infernale implique que la péréquation soit
traitée comme la dernière des priorités. Or, au contraire, la péréquation
devrait plus que jamais être un impératif. Les Français commencent à s'émouvoir
des différences qui existent d'un département à l'autre, par exemple, dans les
établissements scolaires.
M. Gérard Delfau.
Très bien !
M. Claude Haut.
En outre, les inégalités de richesses entre collectivités locales ne sont que
plus durement ressenties par les Français.
La fiscalité locale doit également être réformée, afin d'être socialement plus
juste et économiquement plus efficace. Dans le cas contraire, l'Etat
poursuivrait logiquement la substitution du contribuable national au
contribuable local au détriment de l'autonomie fiscale des collectivités
locales.
Ces chantiers sont colossaux. Ils nécessiteront une volonté sans faille pour
aboutir. Or le groupe socialiste ne peut accorder sa confiance au Gouvernement
pour mener une réforme des finances locales qui soit socialement juste pour les
Français, économiquement efficace et soucieuse de la vie locale.
(Très bien
! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur celles du
groupe CRC. - M. Gérard Delfau applaudit également.)
M. le président.
La parole est à M. Michel Mercier.
M. Michel Mercier.
Monsieur le président, monsieur le minstre, mes chers collègues. M. le
président de la commission des finances et M. le rapporteur général ont décrit,
mieux que je ne saurais le faire, la situation des finances locales de notre
pays et les relations qui unissent l'Etat et les collectivités locales. Je
n'entrerai donc pas dans le détail ; je limiterai mon propos à quelques
principes et quelques règles.
En nous soumettant, en première lecture, le projet de loi constitutionnelle
relatif à l'organisation décentralisée de la République, vous aurez engagé la
réforme de l'Etat, conformément à la mission que vous a confiée le peuple
français voilà quelques mois. C'est dans ce cadre que je placerai mon
intervention.
Il est probable que l'exercice auquel nous nous livrons soit le dernier d'un
cycle long, puisque l'année 2003 devrait être consacrée à la mise en oeuvre des
conséquences de la réforme constitutionnelle. Comme l'a rappelé excellemment M.
le rapporteur général, pour mettre en application cette réforme, il faudra
transférer aux collectivités locales des ressources fiscales nouvelles.
Au moment où le Gouvernement s'apprête à se lancer dans cet exercice, je dirai
deux ou trois choses simples pour essayer d'y voir plus clair, car la situation
s'est beaucoup compliquée ces dernières années. Il faut bien reconnaître que
nous-mêmes avons participé à cette complication puisque, chaque année, notre
assemblée a essayé d'apporter des améliorations, en allant plus dans le détail
et, par là même, elle a rendu le système un peu plus complexe ; en tout cas, il
est réservé aux seuls spécialistes.
Si vous voulez réformer l'Etat au travers de la décentralisation, il faut
avant tout qu'une grande confiance s'établisse entre l'Etat, les collectivités
locales et les élus locaux. C'est cette confiance que votre gouvernement doit
s'attacher à restaurer en 2003 pour pouvoir, dès 2004, mettre en oeuvre cet
acte II de la décentralisation, que nous attendons.
La situation est d'une grande complexité, on l'a souligné. Seuls quelques
spécialistes finissent par comprendre quelque chose aux relations entre l'Etat
et les collectivités locales, et ces spécialistes ne parlant qu'entre eux, cela
ne simplifie rien, bien au contraire !
Aujourd'hui, les sommes très importantes que l'Etat consacre au concours
financier qu'il accorde aux collectivités locales dépassent de loin le déficit
des finances publiques. Un tel système représente un réel danger. Mais ce
concours financier est lui-même extrêmement complexe.
Les dotations ne représentent que la moitié de ce concours, le reste étant
composé du remboursement d'impôts supprimés, atténués ou de dégrèvements.
Pour les élus locaux, cette complexité se double d'appréhension. Je citerai
trois domaines dans lesquels ces craintes sont justifiées et ne relèvent pas
d'une bonne qualité de relations entre l'Etat et les collectivités locales :
l'allocation personnalisée d'autonomie, les services départementaux d'incendie
et de secours, les SDIS, et les problèmes de personnels.
Aujourd'hui, les décisions relatives aux personnels échappent très largement
aux collectivités locales. La moitié de l'augmentation de la DGF est, en
quelque sorte, consommée par les décisions que l'Etat prend pour améliorer la
situation des fonctionnaires locaux.
S'agissant des services départementaux d'incendie et de secours, depuis 1996,
les dépenses qui leur sont consacrées ont augmenté de 1,7 milliard. Chaque
fois, nous l'avions souligné ici, l'Etat prend les décisions et ce sont les
collectivités locales qui doivent payer. Depuis 1996, une centaine de textes
régissent les services départementaux d'incendie et de sécurité.
Enfin, en ce qui concerne l'APA, je dirai simplement à notre collègue Claude
Haut qu'un minimum de modestie s'impose lorsqu'on a voté un texte qui nous
conduit à une telle impasse financière ! Ce n'est pas le moment, aujourd'hui,
de crier au loup ! La loi a, en effet, été votée de telle façon qu'elle
organise la dépense et ne prévoit pas la recette correspondante. La situation
que nous connaissons est normale : elle est la conséquence inéluctable d'un
texte qui annonce aux gens qu'on va leur distribuer de l'argent sans
conditions. On ne voit pas pourquoi ils refuseraient !
Monsieur le ministre, si vous voulez que la réforme relative à la
décentralisation, que vous présentez au pays comme le signe d'une volonté
profonde de changement, soit une réussite, il appartient au Gouvernement
d'ouvrir des voies dès aujourd'hui.
Je ne vous demanderai pas d'augmenter les dotations : l'Etat se trouve dans
une situation budgétaire que nous connaissons tous. D'ailleurs, les lois sont
strictement appliquées, les dotations ont été calculées, et le Gouvernement a
même maintenu l'indexation sur la croissance, alors que rien ne l'y obligeait.
Un signe a été donné pour les services départementaux d'incendie et de secours,
puisqu'un crédit nouveau de 45 millions d'euros a été mis en place afin d'aider
à leur financement.
Mais au-delà de ces problèmes de ressources, aujourd'hui, l'Etat a de plus en
plus tendance à décider des dépenses des collectivités locales. Sur ce point,
monsieur le ministre, le Gouvernement peut progresser. Nous comprenons que,
s'agissant des recettes, vous ne puissiez pas allouer des fonds dont vous ne
disposez pas. Mais il n'est plus possible que le Gouvernement impose aux
collectivités des dépenses qui risquent d'obérer la grande réforme de la
décentralisation. Je souhaite avancer quelques idées.
En ce qui concerne les problèmes de personnels, il serait normal que le
ministre chargé de la fonction publique, avant d'engager une négociation avec
des organisations représentatives des fonctionnaires, consulte les
représentants des collectivités locales et les associe à cette négociation.
Nous sommes les derniers employeurs à savoir quelles seront les conditions
d'emploi et nous en avons connaissance en lisant le journal le lendemain des
réunions entre le ministre et ces organisations. Cela ne coûterait rien à
l'Etat et ce serait une meilleure méthode de gestion ! En outre, cela
renforcerait probablement la position du ministre, qui représenterait alors
l'ensemble des parties lors de ces négociations.
Le Gouvernement ne doit pas continuer à prescrire un certain nombre de
dépenses aux collectivités locales. La confiance, c'est le respect, et le
respect implique l'autonomie. On peut penser que les collectivités locales
feront mieux que l'Etat, parce qu'elles seront plus proches des demandes et des
solutions à trouver. Il est un certain nombre de mesures que vous pouvez
prendre. Par exemple, le projet de loi constitutionnelle relatif à
l'organisation décentralisée de la République prévoit de donner aux maires de
nouvelles compétences très importantes en matière de base des impôts. On
imagine mal qu'en reconnaissant aux collectivités locales les compétences pour
modifier les bases, on ne les laisse pas libres de fixer les taux des
impôts.
Nous souhaitons que, sur ce point, vous puissiez aller plus loin que les
dispositions qui sont contenues dans le projet de budget et que vous
reconnaissiez véritablement la compétence des collectivités locales dans ce
domaine. C'est un problème de confiance !
Monsieur le ministre, l'année prochaine, la décentralisation fera l'objet
d'une loi organique relative au transfert d'un certain nombre de compétences.
Si vous voulez réformer l'Etat, vous pouvez transférer des compétences sans
aucun problème. Mais, de grâce, n'imposez pas aux collectivités locales les
modes de gestion de l'Etat ! Sinon, le résultat sera le même et vous ne
réformerez rien du tout !
Par conséquent, que l'Etat transfère des compétences aux collectivités
locales, mais qu'il laisse celles-ci libres de déterminer les modes de gestion
de ces compétences transférées ! Tel est, me semble-t-il, le signe essentiel de
la confiance qui liera la République et ses collectivités. C'est également le
seul moyen d'entamer dans ce pays les réformes profondes dont nous avons
besoin, que nous attendons, et pour lesquelles, monsieur le ministre, vous êtes
au Gouvernement.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union
centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines
travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les
dispositions contenues dans le présent projet de loi de finances nous apportent
un éclairage opportun sur les intentions du Gouvernement quant à la réforme des
finances locales qu'il envisage. Nous avons bien besoin d'un tel éclairage, car
le seul débat autour du projet de loi de réforme constitutionnelle n'a pu y
suffire.
Ce texte est flou, vague, plein de formules d'apparence généreuses, mais en
réalité bien creuses.
Votre majorité elle-même ne s'y retrouve pas, monsieur le ministre : elle
s'interroge sur vos intentions, comme elle nous l'a montré plusieurs fois tant
au Sénat qu'à l'Assemblée nationale.
A l'article 6 de ce projet de loi de réforme constitutionnelle, dans lequel il
est question de finances locales, vous nous parlez d'autonomie et de
péréquation. Regardons, pour y voir un peu plus clair, de quoi il s'agit dans
cette loi de finances.
Vous dites que l'artice 14 constitue une avancée importante en matière
d'autonomie. Or de quoi est-il question, sinon d'un léger assouplissement dans
la fixation des taux des impôts locaux, un simple assouplissement, alors que,
même avec une déliaison totale des taux - et nous vous la proposerons, bien sûr
-, force est de constater qu'on serait encore loin de l'autonomie financière,
pourtant indispensable, des collectivités territoriales ? J'ai bien dit
autonomie « financière » et pas seulement autonomie « fiscale ».
En effet, cette liberté laissée aux élus locaux est toute théorique, dans la
mesure où la richesse fiscale est très mal répartie, comme l'est d'ailleurs la
mixité sociale ; nous en avons déjà discuté.
Cela c'est d'autant plus vrai avec l'effet conjugué de l'émiettement des bases
de la taxe professionnelle et la montée en puissance de la taxe professionnelle
au taux unique, la TPU.
Les bases de la taxe professionnelle ont, en effet, été entamées de plus de 30
%, si bien que, aujourd'hui, c'est l'avenir même de cet impôt qui est en
jeu.
Ce recul de la contribution des entreprises dans les budgets locaux pose la
question de la justice fiscale et de l'efficacité économique. Il faut donc
revitaliser la taxe professionnelle, mais surtout procéder à une grande réforme
de la fiscalité, afin de rééquilibrer la contribution de chacun et la mettre en
rapport avec la vie économique d'aujourd'hui.
Dans ce sens, nous vous proposerons de nouveau la mise en place d'une taxe sur
les activités économiques. Il s'agira de taxer les actifs financiers des
entreprises pour les inciter à orienter leur argent vers les investissements
productifs et vers l'emploi. Selon notre dernier calcul, cette taxe permettrait
de dégager une ressource équivalant au triplement de la part « péréquée » de la
DGF, soit 12 milliards d'euros par an, avec un taux de seulement 0,3 % !
A cette meilleure prise en compte de la richesse des entreprises dans la
fiscalité locale doivent correspondre des allégements de la fiscalité qui pèse
sur les ménages modestes. Nous présenterons donc un certain nombre de mesures
qui peuvent être appliquées immédiatement.
D'autres dispositions auront leur place dans une réforme d'envergure de la
fiscalité, comme la révision des valeurs locatives qui servent au calcul des
impôts des ménages, mais aussi la réforme de la taxe d'enlèvement des ordures
ménagères. Ces mesures sont urgentes pour nos concitoyens.
Quant à la TPU, elle est loin d'être la panacée pour mutualiser les ressources
fiscales : la péréquation horizontale entre collectivités atteint vite ses
limites. Il ne peut s'agir que d'une péréquation à la marge.
En effet, certaines communes pauvres sont regroupées au sein d'EPCI pauvres,
qui ne perçoivent pas de TPU. Sur les 26 800 communes ainsi regroupées, moins
de 10 000 d'entre elles perçoivent la TPU. Il n'y a pas - ou peu - de recettes
de taxe professionnelle sur ces territoires. Ces EPCI ont donc besoin d'autres
moyens et c'est à l'Etat de prendre ses responsabilités pour les trouver. Or
confier au comité des finances locales le soin de partager la misère ne va pas
dans ce sens-là. C'est bien l'insuffisance globale des recettes qui doit faire
l'objet d'un examen efficace.
Il y a aussi des communes pauvres dans des EPCI riches, où la solidarité ne
s'exerce pas.
Les collectivités dont le territoire comporte les bases suffisantes pour tirer
les ressources indispensables à la satisfaction des besoins des populations
sont marginales.
Surtout, les territoires où ces besoins sont importants - les communes dont la
population est pauvre, les départements où la moyenne d'âge est élevée - sont,
pour la plupart, les moins bien lotis pour ce qui est de la richesse
fiscale.
Il faut donc renforcer la péréquation de l'Etat. Or, dans cette loi de
finances, on est loin du compte !
Certaines mesures annoncent un repli des crédits destinés à la péréquation ;
les collectivités défavorisées bénéficiaires de la dotation de solidarité
urbaine ou de la dotation de solidarité rurale vont voir doubler le taux de
leur perte de dotation de compensation de la taxe professionnelle, la DCTP, si
la loi de finances est adoptée dans les termes actuels.
Quant aux abondements exceptionnels en faveur des dotations de solidarité, non
seulement ils sont insuffisants, mais encore ils s'effectuent au détriment des
autres collectivités. Le précédent gouvernement avait dégagé des moyens sur ses
propres crédits.
Vous souhaitez, vous, affecter le produit de la régularisation positive de la
DGF de 2001 aux dotations de solidarité, ce qui correspond à une perte de 0,7 %
de DGF pour l'ensemble des collectivités.
Permettez-moi de vous dire que privilégier la péréquation, ce n'est pas
prendre aux uns pour donner aux autres, quand les moyens sont insuffisants pour
tous !
C'est d'ailleurs ce que vous disent les élus locaux, notamment les maires qui,
dans un récent sondage, se déclaraient, à près de 60 %, peu optimistes quant
aux perspectives financières de leurs collectivités. Elus de proximité, ils
connaissent les besoins et les attentes des populations, et ils s'efforcent d'y
répondre. Or la voie dans laquelle vous voulez nous entraîner leur rendra la
tâche de plus en plus difficile.
Vous voulez une société encore plus libérale dans laquelle les besoins et les
attentes tant des populations que des élus ne seraient plus pris en compte,
dans laquelle les habitants seraient seuls sollicités : ce n'est pas la vision
que j'ai du rôle des collectivités territoriales !
(Applaudissements sur les
travées du groupe CRC.)
M. le président.
La parole est à M. André Lardeux.
M. André Lardeux.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je
n'entonnerai pas le couplet facile de ceux qui affirment que les dotations de
l'Etat aux collectivités locales sont insuffisantes. Il est évident que les
élus, si on les consulte, répondront tous qu'ils n'en ont pas assez. Je crois
cependant que le problème des finances locales n'est pas tant celui des
recettes que celui des dépenses.
Je suis convaincu que les collectivités locales sont astreintes aux mêmes
efforts que celui qui est demandé à l'Etat, à savoir la maîtrise, voire la
réduction des dépenses publiques. Encore faut-il que l'on cesse d'imposer des
dépenses sans compensation. A ce jour, les régions et plus encore les
départements ont été mis à contribution, un peu moins les communes et les EPCI.
A cet égard, on peut citer, entre autres exemples bien connus, l'ARTT, les
dépenses des SDIS, l'APA, les transports scolaires.
Le système des dotations est devenu trop complexe. J'ai compté - mais mon
calcul est certainement approximatif - dix-sept lignes différentes avec, pour
ce qui est des compensations de pertes de recettes, au moins neuf lignes et,
pour la compensation concernant la part « salaires » de la taxe
professionnelle, sauf erreur de ma part, neuf lignes ! Un tel système est
forcément illisible et frôle le seuil de l'ubuesque.
Certaines compensations sont, d'ailleurs, des marchés de dupes. La suppression
de la vignette, que les départements ont apprise, à l'époque, par la presse,
entraîne, à taux constant, une perte de recettes pour eux. Dans le département
de Maine-et-Loire, dont je préside le conseil général, la perte est, au
minimum, de 1 million d'euros, encore une fois, à taux constant. Le manque à
gagner généré par la réforme de la taxe professionnelle est du même ordre. Les
régions et les communes peuvent dresser le même constat.
D'autres compensations sont encore plus contestables. La dotation d'équipement
des collèges, qui est ancienne, n'a plus aucun rapport avec la réalité. Pour le
Maine-et-Loire, elle ne représente que 10 % des sommes effectivement investies
dans les collèges. Les autres départements et les régions pourraient faire
l'objet de la même remarque.
Le retour à la raison en matière de transfert de charges s'impose comme le
premier impératif. Les transferts doivent être compensés à l'euro. Il en est
ainsi pour les SDIS. Dans un premier temps, ce sont les communes et les EPCI
qui ont assumé l'essentiel de la charge ; aujourd'hui, ce sont les
départements. Il est indispensable que l'on mette fin à la folie normative. Par
exemple, en quoi est-il nécessaire que les ambulances soient capables de
résister à des pressions de 9 G ? S'agit-il de les envoyer sur la lune ? J'en
doute !
(Sourires.)
Si la sécurité n'a pas de prix, elle a un coût, et
nos concitoyens doivent en prendre conscience. Pour ce faire, il me semble
qu'il serait judicieux, à tout le moins, d'y consacrer une ligne spécifique sur
les feuilles d'impôts locaux. Nos concitoyens comprendraient peut-être alors
que, avec une augmentation de 163 % en cinq ans, ils ont de la chance que les
impôts n'augmentent pas davantage.
Le même raisonnement peut s'appliquer à l'ARTT ou à l'APA. Cette dernière,
d'ailleurs, ne pourra fonctionner que si l'on fait des économies sur son coût
actuel.
Cela a été rappelé par le président de la commission et par le rapporteur
général, l'instauration d'une relation de confiance entre l'Etat et les
collectivités locales est le deuxième impératif. Force est de constater que,
depuis vingt ans, cette relation s'est altérée par manque de visibilité et de
sincérité.
L'Etat a un rôle péréquateur. Cependant, la péréquation est encore
insuffisante, puisqu'elle ne concerne qu'un septième des dotations en cause.
Des rééquilibrages sont nécessaires, notamment au bénéfice des communes et des
EPCI. Les écarts entre communes urbaines et rurales sont encore trop élevés.
M. Yves Fréville.
Eh oui !
M. André Lardeux.
Troisième impératif, la réforme de la fiscalité locale, vieux serpent de mer
dont on parle depuis trente ans. J'ai le souvenir d'avoir participé aux
commissions pour la révision des valeurs locatives : le travail est resté sans
suite. On conçoit aisément que, devant l'ampleur de la tâche et les réactions
prévisibles, aucun gouvernement ne se soit résolu à passer à l'acte.
La conclusion qui s'impose est que, dans son cadre actuel, la fiscalité locale
est impossible à réformer. En effet, une répartition différente ne serait pas
forcément plus juste et n'entraînerait pas l'adhésion de ceux qui auraient
moins à payer, tandis que ceux qui auraient plus à payer seraient, à juste
titre, fort mécontents.
Nous devons donc, à mon sens, explorer parallèlement deux pistes.
Premièrement, il s'agit de maintenir des impôts locaux simplifiés et allégés,
payés par tous ou presque - il y va du sentiment d'appartenance civique. Tous
les contribuables attendent, en effet, d'une éventuelle réforme de la fiscalité
locale un allégement de leur imposition. Toute autre solution me paraît vouée à
l'échec.
Deuxièmement, il s'agit, en compensation, d'attribuer aux collectivités
locales une part de fiscalité nationale, ce que la décentralisation doit
permettre, mais avec une réelle péréquation, pour éviter les distorsions entre
collectivités pauvres et collectivités plus riches.
Donc, globalement, ce volet du budget pour 2003 est une étape transitoire, en
attendant de profondes réformes que le Gouvernement a, je le sais, la volonté
de mener et qu'il est capable de réussir.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, de
l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne
joindrai pas ma voix à ceux qui constatent - malheureusement, c'est l'évidence
et ce n'est pas la peine d'y revenir sans cesse - les difficultés financières
actuelles des collectivités territoriales, même si, comme d'autres, je n'ai pas
le sentiment que les années qui viennent de s'écouler les aient spécialement
amoindries ; j'ai même plutôt le sentiment inverse, et je pense que ces
difficultés ont été aggravées depuis quelques années, au fil des décisions
prises à l'échelon national.
M. Jean Arthuis,
président de la commission.
Depuis cinq ans !
M. Paul Girod.
Ce n'est pas un hasard !
Il est vrai que les dépenses locales explosent. Il est vrai que nous avons des
difficultés au niveau des recettes locales. Cependant, la réflexion que nous
avons à mener collectivement en cet instant et pour les années qui viennent
réside dans le mot « locales » qu'il s'agit de décliner au mieux.
On ne peut, en effet, retrouver de gestion convenable que dans la mesure où, à
une dépense vraiment locale, on peut rattacher un système de financement dans
lequel les références locales soient majoritaires. Sinon, on aboutit à
l'allocation personnalisée d'autonomie, c'est-à-dire à un risque lié à la
démographie, au vieillissement de la population, soit une réalité qui n'est pas
du tout localisée, mais dont on fait supporter le poids à l'impôt local, comble
de l'aberration !
Quelles sont les ressources locales censées financer les dépenses locales ?
Imaginons, par hypothèse, que ne sont laissées à la charge des collectivités
territoriales que les dépenses effectivement localisables sur le territoire
qu'elles ont à administrer. Ce n'est qu'une hypothèse, mais peut-être y
arriverons-nous un jour !
Actuellement, les collectivités ont deux types de ressources : la dotation et
la fiscalité. J'ai un peu de scrupule à parler de ces domaines devant le
président du Comité des finances locales qui, d'année en année, essaie de faire
entrer un peu de bon sens dans l'application des décisions, et avec,
quelquefois, plus de difficultés qu'il n'y siérait !
(Sourires.)
La grande réforme, celle sur laquelle nous avons planché dans cette enceinte
voilà plus de vingt ans, concernait la mise en place de la DGF. Il s'agissait
d'affecter une part du produit d'un impôt national, en l'occurrence la TVA, aux
collectivités locales pour permettre d'assurer librement leur fonctionnement.
C'est d'ailleurs ce que j'entends réclamer de nouveau aujourd'hui. Quelle
constance ! Mais le résultat, à l'époque, a été spectaculaire : de décisions
autoritaires en oukases, de petits coups de pouce à la DSU en coups de ciseaux
à la DCTP, sans parler de l'intercommunalité, la complexité est aujourd'hui
telle et l'opacité si intense que personne ne comprend plus rien, personne
n'est capable de trouver une logique dans le résultat signifié chaque année à
telle collectivité territoriale.
A cet égard, monsieur le ministre, permettez-moi une suggestion : j'aimerais
qu'une étude soit menée à partir de quelques critères simples tels que la
population, la richesse fiscale moyenne, la surface, les charges, afin que l'on
sache comment est
in fine
répartie la DGF. Je suis persuadé que, compte
tenu de la complexification croissante des dispositifs arrêtés à l'échelon
national, on pourrait arriver au même résultat, mais de manière plus simple et
plus lisible. Cette étude n'a jamais été faite, mais ne manquerait pas
d'intérêt.
M. le président.
En tenant compte de la fiscalité, mon cher collègue !
M. Paul Girod.
Bien sûr, monsieur le président, le tout est que l'on sache, à partir de
critères simples, quel est le résultat actuel de la répartition de la DGF. Je
suis persuadé que l'on devrait pouvoir trouver des formules de simplification
fort pertinentes.
La fiscalité, par définition, doit avoir une attache locale. Or j'entends
parler, à juste titre, d'ailleurs, de l'obsolescence de nos « quatre vieilles
». Pourquoi cette obsolescence ? Elle vient d'abord du fait que les bases n'ont
jamais été revues de manière moderne et que tout le monde a « calé » devant la
tâche. C'est vrai pour le foncier bâti ; bizarrement, c'est également vrai pour
le foncier non bâti, où l'on travaille sur des données qui sont parfaitement
fictives dans 80 % des cas, ou, en tout cas, fort anciennes et radicalement
détachées de la réalité de ce qu'a été l'évolution de l'activité agricole.
Ne parlons pas des exonérations, dégrèvements et autres interventions de
l'Etat dans le calcul des bases et dans le calcul de la contribution : personne
n'y comprend rien non plus !
Nous aurions bien besoin d'un tableau simplifié permettant à chacun de s'y
retrouver. Car, en définitive, c'est souvent celui qui demande le plus à la
collectivité locale qui est le moins concerné, sinon sur le plan du résultat
financier, du moins par la perception qu'il peut avoir de l'impôt local.
Quant à la taxe professionnelle, c'est devenu l'horreur. Pardonnez-moi,
monsieur le président, je suis ravi pour nos activités économiques que l'on ait
supprimé la part « salaires », mais où est passé le coté local, dans cette
affaire ?
Non seulement cette part « salaires » a été remplacée par une dotation, fort
difficile à calculer et même à interpréter - neuf lignes - mais, par-dessus le
marché, la dotation n'est absolument pas adaptée à l'évolution des
implantations d'industries : les nuisances se créent là où la ressource
n'existe plus et n'existera jamais, puisqu'il n'y a pas de référence avant la
suppression de la part « salaires » ; en revanche, la ressource continue à
exister, mal indexée et mal calculée, là où il y avait quelque chose avant la
réforme. Résultat ? L'activité économique ne peut plus être localisée sur le
plan fiscal par les collectivités qui la supportent !
Là aussi, nous avons besoin de reprendre conscience de la réalité des choses.
Et si la solution au problème doit être recherchée dans l'octroi d'une part de
fiscalité nationale, encore faut-il bien comprendre que, comme cette fiscalité
n'est, par définition, pas localisable, elle ne peut se faire que par une
distribution à l'échelon de collectivités d'assez grande dimension, voire de
très grande dimension. Autrement dit, on voit mal comment choisir un autre
échelon que l'échelon régional, ce qui aboutit inévitablement au déclassement
vers le bas de toute une série de taxes dites de « proximité » qui, elles, sont
effectivement adaptées à la réalité locale.
Tout cela exige un effort de réflexion qui, monsieur le ministre, me semble
être la base des travaux qui devront permettre un jour à la décentralisation de
réussir sans provoquer d'explosion fiscale.
Il ne faut pas se leurrer : dès qu'il y aura dépense publique, il y aura
ressource publique. D'où la nécessité d'une rationalisation de la méthode de la
dépense, et ce aussi bien pour l'Etat que pour certaines collectivités
territoriales. Il faut, en même temps, qu'il y ait adaptation de la nature de
la recette à la réalité du terrain. Monsieur le ministre, si l'on veut réussir
la décentralisation sans pour autant brouiller les esprits, c'est à cet effort
de clarification qu'il faut s'attacher le plus vite possible.
(Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Alain Fouché.
M. Alain Fouché.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de
loi de finances s'inscrit dans la perspective de la relance de la
décentralisation portée par le Président de la République et par le Premier
ministre, dont le Sénat a examiné la première étape constitutionnelle.
Plusieurs mesures favorables aux collectivités locales nous sont soumises, par
exemple, la mise en conformité de France Télécom avec le droit commun de la
fiscalité locale, prévue à l'article 13.
Cette mesure permettra aux collectivités de recouvrer un montant important de
taxe professionnelle et de bénéficier intégralement de la taxe foncière, tout
en étant neutre pour l'entreprise. Elle était souhaitée depuis longtemps par le
Sénat mais s'est fait longtemps attendre, faute d'une véritable volonté
politique. Il faut donc saluer l'initiative prise par le Gouvernement.
Mais c'est surtout l'assouplissement des règles de liens entre les taux des
impôts locaux qui retient l'attention. Il traduit, sans aucun doute, l'état
d'esprit du nouveau gouvernement.
De 1997 à 2002, les collectivités locales ont dû faire face à une
recentralisation rampante. Les atteintes à leur autonomie locale se sont
multipliées, particulièrement en matière financière. La suppression de la
vignette - sans concertation, sans tenir compte des efforts faits par les
départements qui avaient pourtant réduit son taux -, la suppression de la part
régionale de la taxe d'habitation, et leur remplacement par des dotations
budgétaires ont considérablement réduit les marges de manoeuvre des
collectivités locales.
Les lois sur l'aménagement du territoire et sur la solidarité et le
renouvellement urbains ont eu pour résultat de resserrer encore le carcan
administratif et réglementaire, au point d'entraver les initiatives. Des élus
de tous horizons en témoignent aujourd'hui.
A cela s'ajoute la multiplication des transferts de charges, qui ont mis à mal
l'équilibre des finances locales. Je pense, en particulier, à l'application des
35 heures dans la fonction publique territoriale, sans aide de l'Etat, au
financement des services départementaux d'incendie et de secours et à l'APA.
Pendant cinq ans, les élus locaux n'ont pas été associés à la politique de
l'Etat. Ils n'ont fait que la subir.
M. Roland du Luart.
Très bien !
M. Alain Fouché.
Le gouvernement de Jean-PierreRaffarin propose une tout autre démarche, un
nouveau contrat de confiance fondé sur la liberté et la responsabilité
locales.
En adoptant le projet de loi constitutionnelle relatif à l'organisation
décentralisée de la République, le Sénat a consacré l'autonomie financière des
collectivités territoriales.
La déliaison des taux inscrite à l'article 14 traduit ce principe de manière
concrète. Elle met fin au climat de suspicion à l'égard des élus locaux. Elle
les place devant leurs responsabilités, en augmentant leurs marges de manoeuvre
et en renforçant leur pouvoir de décision.
Mais il ne s'agit que d'une première étape. La réforme des finances locales
reste à faire.
L'enjeu est fondamental pour l'avenir de la décentralisation : il n'y aura pas
de transfert de compétences réussi sans ressources adaptées.
Plusieurs pistes de rénovation du système fiscal local sont généralement
évoquées : augmenter les marges de manoeuvre des collectivités locales en
matière de taux au-delà de ce que prévoit le projet de loi de finances pour
2003 ; offrir aux collectivités locales la possibilité de procéder à des
révisions locales des bases d'imposition dans un cadre fixé par la loi ;
envisager la création de fiscalités locales nouvelles, ou encore partager les
recettes d'un impôt national, tel que la taxe intérieure sur les produits
pétroliers, les collectivités locales pouvant être autorisées à voter un taux
additionnel.
Monsieur le ministre, nous devons examiner ces pistes avec soin, sans
a
priori,
mais avec prudence, c'est-à-dire en veillant à bien mesurer leur
impact sur le terrain.
L'expérience montre en effet que certaines réformes ont eu, ou peuvent avoir,
des effets pervers.
C'est, par exemple, le cas de la suppression de la part salariale de la taxe
professionnelle qui a entraîné des changements dans les politiques fiscales et
foncières des collectivités locales.
C'est aussi le cas de la révision des valeurs locatives que chacun appelle de
ses voeux, tout en redoutant ses effets.
Nous devrons enfin veiller à ce que plus de liberté n'entraîne pas plus
d'inégalité territoriale.
(Oui ! sur les travées du groupe socialiste.)
C'est tout l'enjeu de l'avenir de la péréquation à laquelle nous venons de
donner une valeur constitutionnelle.
M. Gérard Delfau.
A peine !
M. Alain Fouché.
Plus d'autonomie, plus de responsabilité, mais aussi plus de solidarité, tels
sont les objectifs de la relance de la décentralisation !
Les débats au Sénat sur la réforme constitutionnelle montrent que ces
objectifs ne seront pas facilement conciliables.
Les tensions existant parfois entre l'Etat et les collectivités locales et
entre échelons territoriaux ne disparaîtront pas en un jour, tant sont ancrées
les attitudes et tant sont anciens les contentieux.
Le processus de réforme engagé par le Gouvernement a le mérite de faire bouger
les choses, d'insuffler de l'air dans des finances locales devenues
étouffantes.
En ouvrant le chantier de la décentralisation, le Gouvernement ouvre une ère
nouvelle. A nous de faire en sorte qu'elle se traduise par des résultats
concrets, dans l'intérêts de nos concitoyens.
(Applaudissements sur les
travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi
que sur certaines travées du RDSE.)
M. Roland du Luart.
Il faut faire comprendre cela à M. Debré !
M. le président.
La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet.
Mon propos, très bref, portera sur un point singulier qui a déjà été évoqué,
mais qui est majeur et quasi obsessionnel pour nombre de présidents de conseils
généraux.
Il n'est pas trop tard, monsieur le ministre, pour trouver une solution au
financement de l'APA. C'est une urgence, voire une question de survie pour
nombre de départements. Il ne faudrait pas qu'après nous avoir assurés de sa
volonté de maintenir les différents niveaux de collectivités territoriales le
Gouvernement, par inaction calculée, provoque la mort de l'une d'elles,
littéralement asphyxiée par la montée en charge extraordinaire des
bénéficiaires. Il ne faudrait pas que, faisant fi de la continuité républicaine
de l'Etat, le Gouvernement se désintéresse du financement de ce qui est, à
l'évidence, une grande cause nationale, celle des personnes âgées
dépendantes.
On dit tellement de choses inexactes que je voudrais recaler le discours.
Premièrement, l'APA est une grande réforme. Nous la revendiquons dans la
plénitude de ses objectifs et dans l'essentiel de ses modalités. Si elle monte
si vite en puissance, si elle dépasse les prévisions les plus extrêmes, c'est
bien qu'elle répond à une nécessité. Nous sommes fiers d'avoir mis sur pied
cette grande nouveauté d'un droit universel, ouvert à tous, sans conditions de
ressources. C'est une grande mesure de justice sociale et de solidarité.
M. Paul Girod.
Ce n'est pas une dépense locale ! Il fallait la financer !
M. Jean-Claude Peyronnet.
Attendez !
Deuxièmement, il faut cesser de se lancer des slogans sur ce sujet d'un camp à
l'autre, car le gouvernement de Lionel Jospin n'a pas été isolé dans cette
affaire. Tout le monde a sa part de responsabilité.
Souvenons-nous : à l'origine, se trouve une promesse de Jacques Chirac en
1995, celle de l'allocation d'autonomie, qui prévoyait un financement d'Etat.
Devant l'incapacité du gouvernement de l'époque à la financer, certains
sénateurs, présidents de conseils généraux, ont inventé la PSD, dont le but
avoué était d'afficher la satisfaction du besoin tout en ménageant les finances
de l'Etat et des départements ! Résultat : on a compté 150 000 bénéficiaires au
lieu des quelque 600 000 attendus.
Troisièmement, souvenons-nous encore, tout le monde ou presque a été d'accord
pour confier aux départements, qui d'ailleurs la réclamaient, la gestion du
dispositif...
M. Paul Girod.
Eh oui !
M. Jean-Claude Peyronnet.
... et, en partie, son financement. Dans les débats sur le « cinquième risque
», la qualité des réseaux gérontologiques déjà mis en place dans beaucoup de
départements est apparu comme une garantie d'efficacité. Et puis, disons-le
clairement, la sécurité sociale n'était pas plus hier qu'elle ne l'est
aujourd'hui capable de financer seule un tel dispositif.
Quatrièmement, souvenons-nous des débats sur la récupération sur succession.
On sait bien que le noeud du problème est là que c'est cette suppression qui
fait filer la dépense autant que l'élévation du niveau des seuils et des
allocations. Or cette disposition a été votée par les deux assemblées.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est exact !
M. Jean-Claude Peyronnet.
Le Sénat l'a adoptée, à une très faible majorité, certes, mais comme la gauche
n'était pas majoritaire - cela se saurait, et ce n'est pas encore pour
aujourd'hui - il a bien fallu un apport important de voix de droite. Quant à
l'Assemblée nationale, elle l'a votée à l'unanimité, et la gauche n'était pas
hégémonique au point d'être seule à voter. Les responsabilités sont donc
partagées ! Au demeurant, le Gouvernement, qui dispose au Parlement d'une
majorité des deux tiers dans chaque assemblée, peut revenir quand il le veut
sur cette disposition. Bref, on connaît l'ampleur du succès qui a suivi.
Monsieur le ministre, je sais, pour avoir participé avec l'Assemblée des
départements de France à une première réunion autour de MM. Fillon et Falco,
que le Gouvernement se préoccupe de trouver des solutions de maîtrise de la
dépense. Mais tout ce qui est envisagé sur le plan des modalités aura un effet
retard important et ne réglera pas les difficultés immédiates.
Le problème financier reste entier pour 2003. Il manque 1,2 milliard d'euros
et, si on en reste à l'esprit du dispositif, il manque 600 millions d'euros en
provenance de l'Etat. Si le Gouvernement ne fait pas un geste significatif, les
départements vont augmenter leur fiscalité de façon très lourde et, pour
certains - et paradoxalement les plus pauvres -, de façon insupportable.
Vous me direz que ces 600 millions d'euros viendront de toute façon des
contribuables.
Certes, mais que l'impôt soit local ou national n'est pas indifférent.
D'abord, cette façon désinvolte de refuser toute participation est inquiétante
pour les expérimentations et les transferts à venir, justifiant ainsi nos
craintes ! Ensuite, obliger à augmenter d'une façon considérable le poids de la
fiscalité locale en annonçant pourtant sa réforme prochaine est assez
incohérent. Et puis, ce n'est pas la même chose d'augmenter la CSG, qui pèse
sur tous les revenus, et la taxe d'habitation, qui pèse massivement sur les
salariés, malgré les exonérations sociales.
Les départements vont être amenés à augmenter les taux de taxe professionnelle
parce que, grâce au mécanisme d'écrêtement par la valeur ajoutée, ils feront
payer tout de même l'Etat, mais au détriment des petites entreprises. C'est
franchement anti-économique.
Monsieur le ministre, il faut aider les départements. C'est d'ailleurs une
promesse du président Chirac qui écrivait, dans un courrier du 25 avril 2002 :
« L'Etat ne saurait reporter sur d'autres que lui le financement de sa
politique sociale. L'urgence sera donc d'adosser l'aide aux personnes âgées à
des financements stables ». A cette date, nous sommes entre les deux tours de
l'élection présidentielle. J'ai voté pour le Président alors candidat, mais
j'avoue que ce n'était pas essentillement pour cette déclaration.
(Murmures sur plusieurs travées.)
Or 600 millions d'euros, ce n'est pas si élevé. Si vous ne voulez pas
augmenter les prélèvements nationaux, évitez au moins de réduire les recettes
les plus justes, évitez donc de baisser d'un point l'impôt sur le revenu, cela
fait à peu près le compte. Il est vrai qu'il s'agit d'une autre promesse du
Président, mais si vous lui expliquez bien les choses, entre l'accroissement
des charges sur les ménages, et surtout sur les entreprises, et la baisse de
l'impôt sur le revenu, il comprendra ce qui est le plus juste et, de surcroît,
ce qui est efficace sur le plan économique ; ce n'est pas, à coup sûr, la
baisse de l'impôt sur le revenu.
Monsieur le ministre, je sais que je vous ai convaincu, je suis certain que
vous allez être convaincant.
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste ainsi que sur certaines
travées du RDSE.)
(M. Bernard Angels remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la
présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. BERNARD ANGELS
vice-président
M. le président.
La parole est à M. Yves Fréville.
M. Yves Fréville.
Quel contraste ! Hier, nous adoptions de grands principes constitutionnels sur
l'autonomie fiscale locale, sur la péréquation ; aujourd'hui, nous entérinons
une politique ancienne : étatisation et fragilisation de la taxe
professionnelle, impuissance de la péréquation. Il nous faut, monsieur le
ministre, une nouvelle donne.
Je me bornerai à vous poser deux questions, en faisant référence aux dépenses
cachées, aux subventions implicites aux collectivités locales qui se
dissimulent dans le budget des charges communes sous forme de dégrèvements
d'impôts locaux : existe-t-il un avenir pour la taxe professionnelle rabougrie
d'aujourd'hui ? Quel est l'avenir d'une péréquation aujourd'hui exsangue ?
M. Gérard Delfau.
Très bien !
M. Yves Fréville.
Quel est l'avenir de la taxe professionnelle après la suppression quadriennale
de la part « salaires » des bases que nous avons connue ?
La taxe professionnelle marchait sur deux jambes : l'imposition du facteur de
production travail - c'est-à-dire les hommes - et l'imposition du facteur de
production capital - c'est-à-dire les machines. On lui a coupé la première
jambe. Le coût pour les finances de l'Etat a été de 10 milliards d'euros et la
perte un peu supérieure pour les collectivités locales dont les ressources ne
sont pas compensées totalement. Cette situation me paraît très grave puisque
nous coupons le lien qui existait entre l'impôt local et les hommes qui
profitent de l'impôt.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Absolument !
M. Yves Fréville.
En outre, il ne faut pas oublier qu'à l'heure actuelle ce sont les hommes, et
non pas les outillages, qui sont localisés dans les villes. Et nous allons
priver les villes, dont on connaît les besoins, d'une ressource dynamique.
Mais je voulais essentiellement insister sur le devenir d'un impôt assis
seulement sur le second facteur, le capital. Aujourd'hui, ce qui reste de la
taxe professionnelle est gangrené.
L'impôt que nous croyons voter et qui figure dans les budgets des
collectivités locales ne correspond pas à ce que payent les entreprises. Le
montant des dégrèvements de taxe professionnelle s'élève aujoud'hui à 7
milliards d'euros. Voilà la vérité !
Je me demande ce que signifie un impôt local qui n'est pas payé par les
entreprises au niveau que fixent les collectivités locales. Actuellement, 16
000 entreprises - les plus grandes - paient la taxe professionnelle en fonction
d'une assiette qui est nationale - la valeur ajoutée - et en fonction d'un taux
national qui est fixé par l'Etat, c'est-à-dire finalement par le Parlement.
Mes chers collègues, un pareil impôt peut-il continuer à fonctionner ? C'est
la question que je me permets de poser à M. le ministre délégué au budget.
Cette question est d'autant plus grave que nous avons réalisé une bonne
réforme au cours de la dernière législature, celle de l'intercommunalité. Nous
l'avons fondée sur un impôt, la taxe professionnelle unique, qui a au moins le
mérite de réduire les disparités de taux à l'intérieur des intercommunalités.
Dans mon département, couvert en quasi-totalité, par la taxe professionnelle
unique, le taux varie désormais entre 9 % et 15 %. Telle est la vérité.
Or nous avons fragilisé la taxe professionnelle en supprimant la part «
salaires » et je ne vois pas bien comment nous pourrons conduire une politique
efficace en matière d'intercommunalité si elle repose sur un impôt
fragilisé.
M. Adrien Gouteyron.
Très bien !
M. Yves Fréville.
Monsieur le ministre, je dis cela parce que j'ai eu l'impression, au cours de
la dernière législature, que les finances locales relevaient de deux
ministères. Il y avait, d'une part, le ministère des impôts, Bercy, qui
cherchait uniquement à réduire les impôts locaux. Il y avait, d'autre part, le
ministère de l'intérieur, le ministère des dotations, avec la direction
générale des collectivités locales, qui s'évertuait, en bricolant, à réparer
les conséquences des erreurs commises par Bercy.
Je souhaite avant tout que vous définissiez une politique cohérente entre la
fiscalité et les dotations. Vous ne pourrez la mettre en place que si vous
déterminez précisément la réforme de la taxe professionnelle. C'est ma première
question.
Ma seconde question concerne l'avenir de la péréquation que je qualifie
d'exsangue.
Je n'évoquerai ni la DSU ni la DSR, nous savons tous ce qu'il en est. Au sein
de la dotation d'aménagement, le gonflement de la dotation d'intercommunalité a
« ratatiné » la part de la DSU et de la DSR, c'est-à-dire la partie vivante de
la péréquation. Nous savons bien que la croissance de la dotation d'aménagement
est assurée chaque année - nous en verrons tout à l'heure des exemples - par
quantité d'expédients. On abonde, on ajoute par exemple 23 millions d'euros
récupérés sur la suppression de la taxe sur les boissons. Le Sénat y
contribuera parce qu'il faut le faire.
Mais le problème n'est pas là. Il s'agit plutôt de définir les mécanismes
d'une réforme de la dotation forfaitaire, qui représente 90 % des recettes des
communes. Il faut également s'interroger sur le caractère pernicieux de la
contrepéréquation induite par les dégrèvements de taxe d'habitation.
En ce qui concerne la dotation forfaitaire, la réforme qu'il faudra faire
devra d'abord tenir compte, comme l'évoquait Paul Girod, de critères
simples.
Pour moi, la population reste le critère le plus simple. Or nous avons inventé
un système extraordinaire ! Nous n'avons pas su réformer la dotation
forfaitaire lors du dernier recensement puisque nous n'avons fait bénéficier
les communes que de la moitié de l'accroissement de population auquel elles
avaient droit.
Dans mon département, la population de la commune de Bruz est passée de 8 000
à 13 000 habitants, soit une augmentation de 60 % en neuf ans. Royalement, sa
DGF a été majorée de 30 % ! Etudiez, comme le souhaite Paul Girod, la variation
de la dotation forfaitaire en fonction d'autres critères et vous verrez que,
plus la commune croît - et donc ses besoins - et moins elle perçoit de dotation
forfaitaire.
M. Gérard Delfau.
Eh oui !
M. Yves Fréville.
Il faut rétablir ce genre de principes simples. Il faut calculer la dotation
forfaitaire à partir de critères clairs : le revenu par habitant - parce qu'il
ne dépend pas des modes de calcul des assiettes fiscales -, la population, le
taux de croissance de cette dernière.
Si nous allons dans cette direction, nous irons dans le bon sens. Mais nous
irons certainement dans le mauvais sens si nous procédons au contraire de façon
non transparente, c'est-à-dire par la procédure des dégrèvements de taxe
d'habitation.
Permettez-moi, mes chers collègues, en tant que rapporteur du budget des
charges communes, d'insister sur ces dégrèvements de taxe d'habitation qui sont
plus importants que la totalité des dotations de solidarité urbaine, rurale et
d'intercommunalité. Pourtant, personne ne s'en occupe et personne ne connaît
leur répartition !
L'étude au niveau communal fait apparaître des résultats extraordinairement
décapants ! Le montant des dégrèvements varie en moyenne de un à sept selon les
départements : un dans la Lozère, sept dans l'Hérault.
Pour ce qui est des communes, les résultats sont encore plus étonnants. Le
mécanisme avantage en effet non pas les communes les plus pauvres mais les
communes les plus dépensières. Cela n'a rien d'étonnant, me direz-vous, dans la
mesure où le dégrèvement de taxe d'habitation est accordé aux habitants dont la
cotisation est supérieure à 4,3 % de leurs revenus ; ce sont donc les communes
qui imposent le plus qui font bénéficier leur population de ces dégrèvements.
Par ailleurs, ce sont naturellement les villes, notamment les plus grandes
d'entre elles, qui profitent le plus de ce genre de subvention implicite.
M. Gérard Delfau.
Comme d'habitude !
M. Yves Fréville.
Je n'ai pas d'idée préconçue sur ce sujet. Je veux bien que les villes et les
grandes villes qui ont des charges de centralité évidentes soient
subventionnées, mais il faut que nous le fassions de manière parfaitement
claire, devant le Parlement. Si les villes ont besoin de ressources
importantes, donnons-leur les dotations correspondantes.
Je suis simplement opposé aux systèmes qui déresponsabilisent les élus locaux
en les incitant à engager des dépenses importantes et à augmenter leurs taux
d'imposition au motif que leurs concitoyens feront l'objet de dégrèvements
issus de mécanismes incertains.
Ayons, mes chers collègues, une politique lisible en matière de subvention aux
villes. J'habite une ville, je suis conscient des dépenses des villes, mais ne
recourons pas à des mécanismes qui aboutissent à déresponsabiliser les élus,
avec pour résultat, dans certains départements, une prise en charge à 60 % de
la taxe d'habitation par l'Etat !
Monsieur le ministre, nous sommes confrontés à des problèmes d'ensemble qui
exigent une réforme de structure. Il faut une nouvelle donne et je suis certain
qu'après ce budget de transition c'est cette nouvelle donne que vous nous
présenterez.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR,
des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
M. Adrien Gouteyron.
Très bien !
M. Gérard Delfau.
J'espère que vous serez écouté !
M. le président.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, Mme Beaufils
a déjà rappelé, au nom de notre groupe, quelques éléments importants du débat
sur les recettes des collectivités locales. Il faut comprendre que nous sommes
face à un choix de société. C'est en ces termes que doit être appréhendée la
réforme de la décentralisation.
L'enjeu devrait être la démocratie, mais nous en sommes loin, puisque vous
refusez d'ouvrir les débats aujourd'hui nécessaires. Nous participerons
néanmoins à tous les débats sur le sujet, nous le ferons malgré les idées
préconçues et, bien sûr, nous formulerons des propositions.
L'enjeu devrait être l'amélioration des services publics ; or le libéralisme
que vous mettez en oeuvre ne peut que les détériorer et mettre fin à toute
mutualisation des coûts. C'est déjà le cas dans le domaine de l'eau, ou encore
dans celui du traitement des ordures ménagères, et pour quels résultats ?
Aujourd'hui, on ne parle plus d'usagers, mais uniquement de clients, et leurs
factures se sont alourdies dans des proportions insupportables. Je pense, par
exemple, à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, la TEOM, dont le produit
a augmenté de 120 % en dix ans. Ces tarifs sont par ailleurs marqués par des
disparités énormes entre collectivités.
En outre, les citoyens font parfois les frais d'une réduction du service
rendu.
L'enjeu ne peut donc être cette « proximité » que votre
marketing
met à
toutes les sauces, et j'y reviendrai.
Au contraire, la perspective que vous proposez, c'est celle d'une société qui
s'avance encore plus vers le libéralisme. Or la société libérale considère
qu'il faut, coûte que coûte, diminuer les dépenses publiques.
C'est le choix que vous avez toujours fait et qui vous inspire encore, et il
se traduit de différentes manières : un cantonnement de l'effort en faveur des
collectivités, des baisses drastiques de certains crédits, un désengagement de
l'Etat, qui contraint les échelons locaux à prendre le relais, mais sans moyens
suffisants.
Vous ne faites aucune proposition allant dans un autre sens, et ce n'est pas
l'enveloppe normée, cette invention du gouvernement Juppé, qui illustre de
façon très parlante votre politique, qui nous rassurera.
M. Jean Arthuis,
président de la commission.
Ce n'était pas si mal quand même !
M. Thierry Foucaud.
Certes, cette année, dans les termes plus favorables du contrat de croissance
et de solidarité, la croissance est prise en compte. Heureusement, mais pour
combien de temps ?
Réformer d'accord, mais pas au détriment des collectivités. Or, si nous avons
bien compris, le but est d'imposer aux collectivités l'abaissement des dépenses
publiques. M. Marini nous l'a assez répété l'année dernière, le pacte de
stabilité mis en place en 1996 a en effet été conçu pour limiter les concours
de l'Etat aux collectivités locales, et je dois reconnaître qu'il y est parvenu
! Au titre de la seule DCTP, ce sont 13 milliards de francs que les
collectivités ont perdus sous le pacte de stabilité. On l'a donc déjà vu à
l'oeuvre, monsieur le rapporteur général.
Ni le bon sens, ni la justice, ni même les besoins des populations ne
justifient ces dispositifs. C'est encore moins la logique, car, avec
l'enveloppe normée, il s'agit de regrouper les crédits les plus divers : des
crédits destinés à compenser des charges transférées, d'autres à soutenir les
dépenses d'investissement, d'autres encore à compenser la TVA, voire à
compenser des suppressions d'impôts, et que sais-je encore...
Cette enveloppe hétéroclite a été instituée au nom de l'idéologie libérale,
idéologie selon laquelle, je le répète, il faut abaisser les dépenses
publiques.
Nous vous demanderons au contraire de sortir de ce cadre en vous proposant des
amendements visant à permettre aux différentes dotations de connaître des
évolutions en rapport avec leur raison d'être.
On pourrait s'entendre sur une indexation de l'enveloppe normée à 50 % de la
croissance. Vous l'aviez, mes chers collègues, demandée au précédent
gouvernement...
Aujourd'hui comme hier, il est juste que les collectivités bénéficient d'une
part plus importante de la croissance. Elles réalisent, en effet, les trois
quarts des investissements publics. Elles créent de la croissance, mais,
malheureusement, elles commencent à s'essouffler. Ne pas augmenter les moyens
des collectivités, c'est freiner la croissance.
Aujourd'hui plus qu'hier, les charges des collectivités sont sans commune
mesure avec les besoins.
Les mesures que vous annoncez, ainsi que certaines dispositions déjà votées,
les contraindront à aller encore plus loin, car le désengagement de l'Etat
s'accélère. J'en veux pour preuve la politique relative au parc immobilier de
la justice, de la police et de la gendarmerie menée depuis le vote de la loi de
programmation cet été : aux collectivités locales de payer si elles veulent ces
services sur leur territoire !
Dans le même sens, la réforme de la décentralisation donnerait lieu à des
transferts de ressources d'un montant équivalent au montant que l'Etat
consacrait à ces mêmes compétences. C'est tout à fait dérisoire et inadapté.
Le bon sens recommande plutôt de procéder à un état des lieux, d'évaluer avec
précision les besoins en tenant compte de leurs évolutions possibles.
C'est ce que les nombreux élus locaux qui font procéder à des audits veulent
vous faire entendre. Forts de l'expérience de ces vingt dernières années, ils
savent pertinemment que des transferts de compétences opérés dans ces
conditions auront pour effet d'enserrer un peu plus leurs budgets, de générer à
la fois à une baisse des services et une augmentation des impôts.
Cette réforme fait donc craindre une explosion de la fiscalité locale. Quoi
d'étonnant à cela, puisque les transferts de compétences que vous envisagez
visent précisément à pallier le désengagement de l'Etat !
Cela concernerait les routes, les hôpitaux, mais aussi le fonctionnement de
certains services. Je pense, par exemple, à la suppression de postes de
personnels de l'éducation nationale.
Est également évoquée la politique du logement, qui sort déjà très affaiblie
de votre court bilan. Dans le projet de loi de finances, on constate encore des
baisses de crédits dans ce ministère, et il en va de même en matière de
politique de la ville.
Votre politique du logement, c'est aussi l'abandon du principe de mixité
sociale et de solidarité que prônait la loi SRU.
Routes, hôpitaux, éducation, logement, avec ces seuls exemples, on mesure
l'ampleur du désengagement de l'Etat. Quel est notre avenir si aucun progrès
n'est fait dans ces secteurs ?
Là est bien le risque, dans la mesure où, en l'état actuel de leurs finances,
les collectivités ne sont pas capables d'assumer les nouvelles charges
correspondantes.
Il faut prendre la pleine mesure des charges qui pèsent déjà sur leurs
budgets.
A l'échelon des départements, il y a l'APA, à propos de laquelle vous avez,
par deux fois, refusé nos solutions. Dans le cadre du projet de loi de
financement de la sécurité sociale, nous vous avons ainsi proposé la création
d'un cinquième risque pour prendre en charge cette prestation, et, dans le
cadre du présent débat budgétaire, nous vous avons soumis une mesure de repli
visant à sauver cette prestation, tout en redonnant des marges de manoeuvre aux
départements, à savoir l'affectation d'un impôt d'Etat au fonds de financement
de l'APA. Vous avez refusé, car vous voulez faire reculer la solidarité dans la
mise en oeuvre de l'APA.
Il y a encore le financement des SDIS, pour lequel nous proposerons une
solution durable : une ressource destinée à la lutte contre les risques.
Il y a aussi toutes ces dépenses imprévues que les échelons de proximité
assument trop souvent seuls. Les collectivités l'ont encore montré dans le sud
de la France face aux intempéries qui se sont abattues sur leurs territoires :
écoles et infrastructures à reconstruire, logements d'urgence à assurer,
soutien aux populations...
Une vraie solidarité, dans laquelle l'Etat prendrait sa part au lieu de
compter ses « sous », manque quand de tels dommages atteignent les
populations.
Il y aussi toutes ces situations particulières : les communes accueillant des
entreprises classées Seveso, dont le développement est gelé ; les communes qui,
chaque année, subissent des inondations ; les communes dont la population est
en grande détresse, qui doivent, plus que les autres, développer des services
de proximité.
Les collectivités ont également la charge de tels services, et c'est
précisément pour cela que le modèle auquel tend votre projet est abusivement
qualifié de « république des proximités ».
Les services publics de proximité, en péril pour cause d'étranglement
financier des collectivités, sont ceux qui répondent aux besoins de tous les
jours : c'est l'accueil périscolaire, pour faire avancer l'égalité des chances,
ce sont les centres de loisirs et les crèches, pour aider les familles... Alors
que cette loi de finances tend à fournir une aide supplémentaire à ceux qui
peuvent employer du personnel à domicile, rien n'est prévu pour soutenir les
structures collectives financées par les collectivités !
Ces services, c'est aussi tout ce qui anime la vie locale, cette part de
bonheur et de solidarité qui crée du lien, le soutien aux associations, les
bibliothèques, les équipements sportifs. A cet égard, la faiblesse des crédits
destinés aux dépenses de fonctionnement de la politique de la ville est
également de mauvais augure.
Avec le dispositif emploi-jeune, le précédent gouvernement a aidé les
collectivités à développer la mise en place de ces services, tout en facilitant
l'insertion professionnelle des jeunes. La question de leur avenir, en même
temps que celle de la pérennité des services qu'ils rendent, car il sera
impossible pour les collectivités d'en assumer seules le coût, est donc
posée.
C'est une réalité qu'il faut prendre en compte, car, si nous assurions la
pérennisation des emplois-jeunes, ce serait pour les collectivités un début de
réforme, une réforme allant dans le sens de la modernité comme dans le sens de
l'emploi et de la satisfaction des besoins.
Vous l'aurez compris, la question, au-delà des pouvoirs des collectivités, est
avant tout celle des moyens nécessaires pour satisfaire les besoins.
(Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président.
La parole est M. Louis de Broissia.
M. Louis de Broissia.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général,
mes chers collègues, qu'il me soit permis, d'abord, de remercier mon groupe de
me donner l'occasion d'exprimer le sentiment d'un sénateur de la République,
également président d'une collectivité départementale, un sentiment, monsieur
le ministre, de grande inquiétude devant les difficultés qui attendent les
collectivités locales.
A cette inquiétude répond, pour partie, votre gouvernement, gouvernement que
l'opinion, tout comme moi, soutient et qui a pris la mesure de la nécessité
d'instaurer un climat de confiance entre les collectivités locales et
l'Etat.
Nous l'avons dit au Premier ministre lors des assises des conseillers généraux
qui se sont tenues à Strasbourg le 3 septembre, nous l'avons répété la semaine
dernière à l'occasion du congrès des maires de France.
Le projet de budget démontre l'intérêt fort qui est porté aux collectivités
locales, l'augmentation de 3,7 % des concours financiers de l'Etat traduisant,
et je m'en félicite, un soutien accru à ces collectivités qui assument
l'essentiel de la République sur le plan local.
Mais, monsieur le ministre, vous le savez mieux que quiconque, dans le cadre
de la réforme de la décentralisation et de la refonte de la fiscalité, le
Président de la République et le Gouvernement ont décidé, avec raison, de
baisser la fiscalité pesant sur les ménages et sur les entreprises.
Les impôts baisseront donc, c'est un engagement.
Les communes elles-mêmes resteront impliquées par les facilités qui leur ont
été accordées par diverses lois, comme je l'ai dit lors du congrès des maires
de France.
Un effort important a été réalisé, y compris par les gouvernements précédents,
pour comprimer le contingent social, pour le supprimer au bénéfice des
départements et faire en sorte que le contingent « incendie » soit de plus en
plus affecté à ces derniers. Pour les collèges, il n'y a plus d'affectation des
ressources communales au département. Il est vrai que la DGF a « plafonné »,
mais, dans le même temps, ces contingents ont fortement explosé.
Les régions disent régulièrement qu'elles veulent rester des collectivités de
mission dans le cadre de la réforme de la décentralisation, laissant aux
communes et aux départements le rôle de collectivités de gestion.
Cependant, les 102 collectivités à statut départemental, collectivités de base
que je connais bien et qui ont, bien sûr, voix au chapitre, ont confirmé leur
rôle incontournable aux côtés des intercommunalités, et, monsieur le ministre,
qu'il me soit permis de dire, même si je le répète après d'autres, que les
départements supportent en ce moment le plein choc de mesures qui ont été
prises par les gouvernements précédents - c'est la continuité de la République
-, à commencer par le choc de la réduction du temps de travail.
L'aménagement, nous savions faire, mais la réduction, imposée à des
collectivités qui emploient des personnels nombreux, a été extrêmement
coûteuse. De même, la réforme des SDIS, qui n'a pas été financée, pèsera
lourdement sur les départements jusqu'en 2006. Enfin, l'imprévision en matière
de dépenses qui a caractérisé la mise en place de l'allocation personnalisée
d'autonomie a été telle que les budgets des départements explosent
littéralement, sans qu'aucune compensation ne soit prévue.
Je fais partie de ceux, monsieur le ministre, qui regrettent que nous
laissions les collectivités départementales s'enfoncer inexorablement sous le
poids de la fiscalité, alors même que le Gouvernement veut comprimer l'impôt
local.
Pour les intercommunalités, il n'en va pas tout à fait de même, mais elles
n'en assument pas moins, aux côtés des départements, des régions et des
communes, les charges nouvelles qu'a évoquées l'orateur précédent, notre
collègue Thierry Foucaud : le périscolaire, la petite enfance,
l'assainissement, l'eau, les déchets, etc. Toutes ces charges extrêmement
lourdes, qui pèseront très fortement sur la fiscalité locale, ont une influence
sur la répartition territoriale de l'impôt.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, est-il nécessaire d'attirer votre
attention sur le fait que la décentralisation ne sera pas une réussite pour ces
deux échelons qui sont au plus près des réalités locales et jouent un rôle
essentiel dans la cohésion territoriale si, d'une part, moins d'impôts sont
demandés à nos concitoyens par l'Etat ou par la région, laquelle aura davantage
de moyens, et si, d'autre part, il y a d'importantes hausses des impôts perçus
par les départements et les nouvelles intercommunalités ?
Monsieur le ministre, nous sommes aujourd'hui la majorité nationale et nous
l'avions dit lorsque nous étions encore dans l'opposition, le précédent
gouvernement a laissé des bombes à retardement dans tous les domaines : bombe à
retardement des retraites, bombe à retardement des 35 heures, bombe à
retardement de l'insécurité, bombe à retardement de l'opposition entre
territoires urbains et territoires ruraux, bombe à retardement du
vieillissement, qui est une bombe à retardement d'ordre démographique.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
On ne peut tout de même pas imputer le vieillissement
au précédent gouvernement...
M. Louis de Broissia.
Le Gouvernement aidera-t-il, dans le projet de loi de finances pour 2003, les
collectivités qui sont menacées d'être montrées du doigt parce qu'elles devront
augmenter les impôts locaux pour assumer des missions qui ne sont pas financées
et qui n'ont d'ailleurs jamais été transférées ?
Vous le savez bien, c'est la clef d'une décentralisation réussie et c'est un
mouvement que le Sénat appuie : des tâches séparées, certes, mais aussi des
ressources affectées !
Je termine, parce que je sais qu'il nous écoute, par un appel au Gouvernement.
Nous avons soutenu le projet de loi constitutionnelle relatif à l'organisation
décentralisée de la République, qui assure aux départements, aux régions, aux
communes une reconnaissance constitutionnelle tout en leur affectant des
ressources propres.
Nous demandons simplement que le pacte de confiance qui lie la majorité
parlementaire et le Gouvernement soit conforté par un pacte de confiance que le
Gouvernement conclura avec les collectivités territoriales, notamment avec les
départements, pour lesquels 2003 sera une année particulièrement difficile.
Ainsi, un débat d'orientation budgétaire s'est tenu hier au sein du conseil
général que je préside : pour la deuxième année consécutive, je me vois
contraint et forcé d'augmenter les impôts locaux de plus de 10 %, pour des
raisons indépendantes de la volonté des élus locaux, tenant au fait que
certains transferts de charges n'ont pas été compensés. Je ne veux pas,
monsieur le ministre, être seul à porter la responsabilité de cette décision
devant nos concitoyens. Le Gouvernement, à qui je fais confiance, doit, en
retour, aider les élus locaux à expliquer la situation.
Certains présidents de conseil général, et non des moindres, ont d'ailleurs
imaginé de présenter un budget hors contraintes nationales, sans prévoir le
financement de l'APA, du SDIS, de l'application de la RTT, en laissant au
préfet le soin d'équilibrer ensuite le budget départemental. Il s'agit pour eux
de montrer que ce dernier comporte une part de dépenses décidées localement,
qu'ils assument, et une part de dépenses relevant d'une volonté nationale, sur
laquelle ils n'ont pas de prise.
Je ne suis pas de leur nombre ; je ne suis pas non plus, mes chers collègues,
de ceux qui pratiquent l'amnésie. Certains d'entre nous qui ont voté, voilà
quelque temps, des lois dont la mise en oeuvre n'était pas financée viennent en
effet aujourd'hui se plaindre de cette absence de financement et demandent au
gouvernement actuel de supporter l'impopularité qui en résulte.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Très juste !
M. Louis de Broissia.
Cependant, monsieur le ministre, l'excuse de l'amnésie ne nous suffira pas.
Soyez à nos côtés, en 2003, soit pour trouver des accents de sincérité afin
d'expliquer aux contribuables locaux qu'ils paieront la facture des erreurs
passées, soit pour dégager des ressources nouvelles. Je vous fais confiance !
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants
et de l'Union centriste.)
M. Gérard Braun.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. Gérard Delfau.
M. Gérard Delfau.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans le
cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2003, nous abordons l'étude
du chapitre relatif aux recettes fiscales des communes. Je veux préciser
d'emblée que je traiterai le sujet pris au sens le plus large : les ressources
financières des collectivités pour faire face aux besoins de la population, en
incluant les dotations d'Etat et le revenu de l'impôt local, seront incluses
dans sa définition. J'évoquerai en outre une fois de plus devant le Sénat le
sort des villages, des bourgs et des petites villes, qui sont les grands
perdants de la redistribution de la richesse nationale depuis une quinzaine
d'années.
A l'heure où le gouvernement auquel vous appartenez, monsieur le ministre, a
fait de la décentralisation un axe majeur de sa politique, je veux décrire sans
fard et très concrètement la grande misère financière de ces communes, pour peu
qu'elles n'aient pas la chance d'avoir accueilli sur leur territoire une grande
surface, une centrale nucléaire, un poste d'EDF ou de France Télécom. Le récent
congrès de l'Association des maires de France, consacré à l'« égalité
territoriale », a montré les craintes instinctives que suscitent les
orientations retenues par le Gouvernement.
En effet, les maires redoutent qu'un nouveau transfert de compétences de
l'Etat vers les régions et les départements ne se traduise, en bout de chaîne,
par un prélèvement fiscal aggravé pour leurs administrés, ainsi que par une
baisse des subventions destinées à financer leurs dépenses d'investissement ou
de fonctionnement. Ils veulent bien un approfondissement de la
décentralisation, mais à condition que cette réforme s'accompagne de l'octroi
de moyens financiers supplémentaires, et non, à l'inverse, d'un nouvel
affaiblissement de leurs maigres ressources. Fondamentalement, quelle que soit
leur origine ou leur étiquette politique, ils voudraient que le Gouvernement
s'attache, en priorité, à réduire l'inégalité choquante des richesses entre
collectivités, caractéristique qui distingue malheureusement la France au sein
de l'Union européenne.
Cette situation ancienne a été aggravée par une série de décisions récentes
prises à l'échelon national. Elle entraîne des conséquences, que je vais
décrire, pour le mode de vie des citoyens, à une époque où la mobilité et
l'information uniformisent la demande et les besoins, quel que soit le lieu
d'habitation. Or, suivant que l'on réside dans une grande ville ou dans un
autre type de commune, suivant que l'on vit en Ile-de-France, en Rhône-Alpes,
en Limousin ou dans le Languedoc-Roussillon - ce ne sont que des exemples -, la
gamme des services publics, au sens large de l'expression, s'étend ou se
restreint, parfois, dans ce dernier cas, jusqu'au minimum de prestations. En
zone rurale, il faut même parfois payer pour un service qui est offert aux
citadins.
A cet égard, La Poste constitue l'exemple caractéristique et caricatural. Le
petit village sans ressources qui veut conserver son bureau ou son agence devra
financer le local et prendre en charge une partie du salaire - une partie
seulement pour l'instant ! - du guichetier. Au même moment, les établissements
bancaires, privés ou mutualistes, se retirent et se concentrent dans les zones
de chalandise ou dans les centres-villes, délaissant une clientèle âgée et peu
mobile, pour laquelle l'accès aux services financiers de base passe désormais
presque exclusivement par l'entreprise publique. Pour combien de temps celle-ci
est-elle encore présente, d'ailleurs ? En tout cas, est-ce cela, l'égalité des
territoires ?
Mais élargissons le constat à partir d'autres services perçus comme
indispensables. Ainsi, la crèche halte-garderie est devenue le complément
naturel de l'école maternelle et primaire pour toute une population mobile sur
le plan professionnel, pour des familles où les deux parents exercent un
métier. Financer un tel investissement exige un budget communal important,
compte tenu de la nécessité de respecter les normes et exigences imposées par
les autorités de tutelle. En assumer le coût de fonctionnement demeure un
exercice difficile, même pour une petite ville de 4 000 à 5 000 habitants.
Est-ce normal ?
La même réflexion s'applique à la construction d'une médiathèque. Pourtant,
l'accès aux livres, à l'audiovisuel ou à l'Internet est-il plus ou moins
important pour les enfants et pour les adolescents selon qu'ils vivent dans une
zone rurale ou péri-urbaine ou dans une grande ville ? Une telle
discrimination, dans une nation aussi riche que la nôtre, est inacceptable !
Entrons plus avant encore dans le quotidien. Chaque commune est désormais
sollicitée pour créer, puis pour étoffer, un centre communal d'action sanitaire
et sociale, en vue d'en faire un lieu d'accueil permanent, complémentaire du
service assuré par les assistantes sociales au titre du conseil général. Il
arrive même que l'agent municipal doive compenser les défaillances du service
départemental. De plus, il incombe désormais à chaque collectivité locale
d'encadrer et de former les très nombreux RMistes qui s'acquittent d'une tâche
au sein de ses services ou auprès des petites associations. Ainsi se développe
naturellement, nécessairement, un service social de proximité que les bourgs et
les petites villes, à partir de 3 000 habitants, assurent pour leur propre
population et pour celle des villages environnants, remplissant une fonction de
« centralité » qui ne donne lieu à aucune compensation.
Pour peu que les élus d'une commune aient conscience qu'ils ont le devoir
d'offrir aux adolescents des structures d'information, d'intégration ou de
prévention, les voilà confrontés à une tâche délicate et peu populaire, qui
suppose un grand professionnalisme des personnels qui y seront affectés. Or
seuls les quatre cents à cinq cents quartiers urbains dits « sensibles »
peuvent bénéficier d'une intervention financière de l'Etat dans le cadre de la
politique de la ville. Cette dernière exclut depuis toujours les zones
périurbaines et rurales, où se développent pourtant les mêmes symptômes de
désocialisation des jeunes qu'en ville. La commune qui veut faire vivre un club
d'adolescents ou un contrat local de sécurité, après avoir tenu à bout de bras
un conseil intercommunal de prévention de la délinquance, est livrée à ses
seules forces : ni l'Etat ni, généralement, le conseil général ou le conseil
régional ne lui viennent en aide. En 2003, le budget de la nation consacrera
des moyens considérables au renforcement des mesures de répression ; rien n'est
prévu pour soutenir les actions de prévention là où apparaissent les attitudes
de rupture. Quel contresens !
Que dire, précisément, de l'aspiration de nos concitoyens à la sécurité
publique ? Dans ces mêmes communes, la gendarmerie est aujourd'hui, mes chers
collègues, en sous-effectif chronique, en raison des décisions prises, à juste
titre, à l'automne de 2001, afin d'améliorer le sort des personnels. En outre,
si la commune est située en zone de croissance démographique, le déficit en
moyens humains se creuse encore. Désormais, obtenir, la nuit, l'intervention
d'une brigade de gendarmerie est aléatoire. En cas d'intervention, celle-ci est
tellement décalée dans le temps qu'elle perd de son efficacité. Devant cette
situation, la population se tourne vers la municipalité et demande avec
insistance la création de postes de gardien de police municipale. Cela est
impossible, au vu du budget, sauf à sacrifier le personnel administratif et
technique qui assume les missions de base. La frustration est immense, avivée
depuis peu, il faut bien le dire, par le zèle médiatique du ministre de
l'intérieur. Il va falloir, sur ce sujet, que l'Etat abatte ses cartes, cesse
d'étendre, projet de loi après projet de loi, les compétences de la police
municipale et dise clairement quel rôle il souhaite lui voir jouer et quel
financement lui est attribué. Sinon, les villes riches continueront à se doter
de contingents nombreux de gardiens municipaux, tandis que le reste du
territoire se sentira abandonné par la puissance publique. C'est le maire qui,
à chaque coup dur, subira les reproches et, parfois, le discrédit.
Tel est le constat. Il est loin d'être exhaustif. Je prendrai un dernier
exemple, celui d'un maire d'une commune des hauts cantons de l'Hérault, qui me
disait récemment : « Ma commune subit une forte spéculation foncière. Il me
faudrait engager une réflexion collective en vue d'établir un plan local
d'urbanisme. Mais j'hésite, compte tenu du coût que représentent les études. »
Est-ce acceptable du point de vue de l'égalité territoriale ? Est-ce rationnel
eu égard à la fragilité de cette zone de montagne que fréquentent de plus en
plus de touristes ?
C'est cette situation qui explique la tiédeur - et souvent la méfiance - des
maires vis-à-vis du grand chantier de la décentralisation. Ils attendent du
Gouvernement que cette orientation soit accompagnée de son corollaire
indispensable : une politique volontariste de péréquation des ressources, et
pas seulement à l'échelon local ou régional ; sinon, dans les bassins d'emploi
pauvres, on ne fait que répartir la pénurie. Je reviendrai, à une autre
occasion, sur la nécessité d'une telle péréquation, ardemment souhaitée par nos
contitoyens, qui est pratiquée en Allemagne et qui a été décidée ici-même en
1995, par le biais de l'adoption de l'article 20 de la loi d'orientation pour
l'aménagement et le développement du territoire. Souvenez-vous de notre
enthousiasme d'alors, mes chers collègues ! Depuis, trois gouvernements se sont
succédé, et les décrets d'application n'ont jamais été pris...
Je conclurai mon intervention en indiquant que, s'agissant de ce projet de loi
de finances, je soutiendrai quelques amendements dont l'adoption atténuerait,
fût-ce à la marge, l'inégalité entre les communes. J'espère qu'ils recevront un
accueil positif de la part du Gouvernement et de la majorité du Sénat. Ce
serait un signe encourageant pour ceux qui, comme moi, sont favorables à une
nouvelle étape de la décentralisation, à condition qu'elle s'accompagne d'une
progression vers l'égalité des territoires.
(Applaudissements sur certaines
travées de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Bernard Murat.
M. Bernard Murat.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, me faisant
l'écho de l'inquiétude grandissante des élus au regard de la situation
financière des collectivités territoriales, j'ai souvent réclamé, notamment
l'an dernier à cette tribune, comme l'avait fait Louis de Brossia, une réforme
complète de la fiscalité locale, laquelle transforme les élus locaux en simples
agents répartiteurs.
Devenue aujourd'hui opaque, injuste et inefficace, la fiscalité locale met en
péril l'esprit même de la décentralisation et doit, nous le savons tous, être
réformée.
La décentralisation annoncée par le Président de la République et proposée par
le Premier ministre et son gouvernement est le début de la réponse à
l'obligation de la réforme de l'Etat. La réussite de cette décentralisation
dépendra de la capacité à transformer, à l'euro près, les moyens appropriés en
investissements et en fonctionnement.
Il me semble, ce soir, que le projet de loi de finances pour 2003 présenté par
le Gouvernement, bien qu'il ne soit pas encore celui de la décentralisation,
tend à amplifier la liberté fiscale des collectivités locales et de leurs élus.
Il va dans le bon sens, celui du travail engagé pour donner un plus grand rôle
aux collectivités locales dans la vie du pays.
Il me semble même, et j'espère ne pas pécher par excès d'optimisme, que ce
projet de loi offre les prémices de cette grande réforme de la fiscalité locale
tant attendue.
Nous pouvons en remercier le Gouvernement, en particulier notre ancien
collègue Alain Lambert, qui n'a eu de cesse, avec notre excellent rapporteur
général, au cours de la précédente législature, de réclamer cette réforme et de
dénoncer les mesures de démantèlement progressif de la fiscalité locale prises
par le précédent gouvernement.
En effet, les finances locales font, depuis plusieurs années, l'objet de
nombreuses réformes intervenues à travers des lois de finances ou des lois
spécifiques qui ont eu pour conséquences majeures de recentrer les ressources
locales et, de fait, de réduire l'autonomie financière des collectivités.
Les suppressions, notamment, de la fraction de l'assiette de la taxe
professionnelle assise sur les salaires, de la part régionale de la taxe
d'habitation et de la vignette, ainsi que la réforme des droits de mutation,
ont conduit à une réduction de la part de la fiscalité locale dans les
ressources globales hors emprunts, qui s'établit à moins de 37 % pour les
régions, à 43 % pour les départements et à 48 % pour les communes.
Le poids des compensations versées aux collectivités par l'Etat a été, quant à
lui, multiplié par treize depuis 1983. En trois ans, l'autonomie fiscale des
collectivités locales a été vidée de 20 % de sa substance.
Plus concrètement, si l'on prend l'exemple de la communauté d'agglomération de
Brive, 32 % des recettes de fonctionnement de celle-ci proviennent des aides de
l'Etat.
Cette situation, monsieur le ministre, n'est pas acceptable, et nous, élus
locaux, ne l'acceptons plus. En réalité, c'est notre capacité de gouvernance
qui est réduite. La précédente législature, en accélérant le dépérissement de
la fiscalité locale, cherchait à nous transformer en simples distributeurs de
dotations octroyées par l'Etat et à distendre les liens entre collectivités
territoriales et administrés.
J'ajoute que certaines options partisanes, comme la mise en oeuvre des 35
heures dans nos collectivités, nous ont été imposées sans que des moyens soient
transférés, avec toutes les conséquences désastreuses que cet état de fait a
eues pour le service fourni au public.
L'apport essentiel de la gestion de proximité, en termes d'efficience de
l'action publique, réside justement dans la recherche, par les élus locaux, de
la meilleure allocation possible des recettes issues de l'impôt local.
Le projet de loi constitutionnelle adopté voilà quelques semaines au Sénat a
posé le principe de l'autonomie financière des collectivités territoriales, en
particulier des communes, mettant en exergue l'idée de l'existence d'une
responsabilité fiscale des élus, corollaire de leur responsabilité
démocratique. Aujourd'hui, la France est trop administrée et pas assez
gouvernée ; il faut inverser la tendance.
Afin de construire de manière substantielle une nouvelle étape de la
décentralisation, une réforme fiscale est nécessaire. Je crois pouvoir
affirmer, mais M. Alain Lambert nous le confirmera, que le Gouvernement nous a
écoutés et entendus, car il a pris l'engagement de nous présenter dès le début
de l'année 2003 des textes comportant des dispositions visant à modifier la
fiscalité.
Nous pouvons d'ailleurs constater dès à présent que nous sommes sur la bonne
voie.
Contrairement aux années précédentes, le projet de loi de finances pour 2003
présente quelques dispositions participant des objectifs de décentralisation et
rompt avec la politique du « toujours plus de grignotage » de l'autonomie
fiscale des collectivités locales.
Ainsi, le Gouvernement a accordé davantage de liberté fiscale aux élus, par la
« déliaison » des impôts locaux, c'est-à-dire la possibilité de majorer le taux
de la taxe professionnelle dans une proportion supérieure à l'augmentation de
la taxe d'habitation. Il s'agit là d'une avancée déterminante en direction
d'une plus grande liberté et d'une plus grande responsabilité des élus. Cet
assouplissement est certes encadré, mais il va permettre de sortir en douceur
d'un système contraignant et de mieux tenir compte de la diversité des
territoires. Disons le clairement, les citoyens demandent plus de proximité et
plus de lisibilité dans la politique des collectivités locales, mais ils ne
sont pas prêts à accepter un alourdissement de la fiscalité correspondante.
Le Gouvernement a trouvé là un juste équilibre entre la rigidité passée et les
excès que pourrait engendrer une liberté trop soudaine, en attendant la «
déliaison » totale, qui pourrait intervenir, pourquoi pas ? dès le début de
l'année 2003.
En ce qui concerne le renforcement de la libre administration des
collectivités locales, le projet de budget prévoit aussi d'assujettir France
Télécom aux impôts directs locaux dans les conditions du droit commun.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Enfin !
M. Bernard Murat.
Les collectivités locales bénéficieront donc d'une nouvelle assiette fiscale
et seront libres de voter les taux qui seront appliqués.
Il s'agit là, pour les finances locales, d'une avancée qui était demandée
depuis des années par la commission des finances du Sénat.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Absolument ! Nous avons enfin été entendus !
M. Bernard Murat.
Autre point positif pour les finances locales : malgré l'élaboration de ce
budget dans un contexte tendu, le Gouvernement s'est abstenu de rogner sur la
masse financière des collectivités locales. Comme nous l'a si bien démontré
dans son exposé notre excellent rapporteur général,...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Merci !
M. Bernard Murat.
... il était indispensable, dans l'attente d'une réforme globale de la
fiscalité locale et des dotations de l'Etat aux collectivités locales, de
reconduire le système existant des concours de l'Etat aux collectivités
territoriales. Nous souhaitons seulement que ce soit pour la dernière fois,
avec l'avènement d'une véritable autonomie locale, dans un rapport «
gagnant-gagnant » entre l'Etat et les collectivités territoriales, ainsi que
l'a demandé M. Philippe Marini.
En conclusion, il est donc urgent de mettre un terme à une transformation des
ressources fiscales en dotations budgétaires et d'assurer la prééminence des
recettes fiscales dans les budgets locaux. Il est urgent de simplifier les
règles et de mieux cibler les bénéficiaires des dotations de l'Etat, en
particulier de la dotation globale de fonctionnement. Il est urgent de se
pencher sur le problème de la péréquation des ressources entre les
collectivités territoriales, en rappelant encore une fois, que nos concitoyens
ne comprendraient pas que la décentralisation génère une augmentation des
impôts locaux. En bref, il est urgent de réformer la fiscalité locale, et vous
pouvez compter sur nous, monsieur le ministre, pour soutenir toute démarche
allant dans ce sens.
(Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union
centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert,
ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.
Monsieur le
président, mesdames, messieurs les sénateurs, je constate, une fois encore,
combien on s'instruit en écoutant le Sénat sur les relations financières entre
l'Etat et les collectivités locales.
Nous avons essayé, avec Patrick Devedjian, dont je vous prie de bien vouloir
excuser l'absence puisqu'il est retenu à l'Assemblée nationale en cet instant,
de concilier à la fois notre souci de vous présenter un dispositif favorable
aux collectivités locales et aussi d'être respectueux de la contrainte
budgétaire forte, que votre commission des finances a su vous présenter mieux
que personne. Le contexte est en effet celui de la réforme en profondeur des
finances locales. Je vais essayer de vous donner un certain nombre
d'indications sur l'état actuel de ma pensée.
Le président de la commission des finances et le rapporteur général n'ont pas
marqué une impatience - la délicatesse de leur verbe est en effet bien connue
-, ils ont exprimé le souhait que nous progressions dans ce domaine. J'indique
à la Haute Assemblée que le budget est élaboré en juillet, que les élections
législatives se sont tenues en juin et que nous n'avons donc eu que quelques
semaines pour vous proposer le budget dont nous discutons actuellement. Vous
comprendrez qu'en quelques semaines il était difficile de vous préparer une
vraie révolution des relations financières entre l'Etat et les collectivités
locales.
M. Jean Arthuis,
président de la commission.
Nous le comprenons !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Vous êtes arrivé trop tard dans un monde trop vieux
!
(Sourires.)
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Mais nous allons rattraper le retard, monsieur le
rapporteur général !
M. le président.
Monsieur le rapporteur général, je vous en prie, M. le ministre a seul la
parole.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Merci de me protéger, monsieur le président !
Je vais essayer, dans la transparence et en toute sincérité, de vous livrer
l'état de nos réflexions, tout en reconnaissant qu'elles ne sont pas abouties
et qu'elles méritent d'être approfondies avec vous.
Le Gouvernement s'est engagé à proposer, lors de l'année 2003, une réforme des
finances locales et il tiendra son engagement. Cette réforme aura trois
composantes principales : l'autonomie financière, la péréquation et la
contrepartie financière des transferts de compétence. Je limiterai mon propos à
la question de l'autonomie financière et à celle du financement des transferts
de compétence. En effet, la question de la péréquation relève plus directement
de mon collègue Patrick Devedjian, et vous aurez l'occasion de l'aborder lors
du débat sur les crédits du ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure
et des libertés locales.
M. Gérard Delfau.
Cela ne nous rassure pas !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il faut faire confiance.
M. Gérard Delfau.
Absolument pas !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Je le précise pour la bonne organisation des débats.
Comment améliorer l'autonomie financière des collectivités territoriales ? Le
rapporteur général a longuement évoqué ce point, de même que le président
Arthuis, M. Michel Mercier, en sa qualité de rapporteur spécial, M. Bernard
Murat et beaucoup d'autres orateurs. Il convient d'accroître la part des
ressources propres au sein du total des ressources des collectivités
territoriales. Plus précisément, il convient d'accroître la part des ressources
fiscales relativement à la part des dotations reçues de l'Etat. Comment faire
?
M. Jean Arthuis,
président de la commission.
Augmenter les impôts !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Comme je le disais, la réflexion du Gouvernement n'est
pas achevée sur ce point, et je ne suis donc pas en mesure de vous livrer des
solutions définitives. Néanmoins, je souhaite profiter de ce débat pour
suggérer quelques principes sur lesquels le Gouvernement réfléchit et pour
tester auprès de vous, mesdames, messieurs les sénateurs, quelques pistes que
nous pourrions défricher ensemble.
S'agissant des principes, pour pouvoir être transféré aux collectivités
territoriales, un impôt devrait, selon moi, avoir dans l'idéal trois
caractéristiques principales.
Première caractéristique : ses bases devraient être réparties de manière
relativement harmonieuse sur le territoire national. Les impôts dont les bases
sont mal réparties se prêtent, à l'évidence, moins bien à un transfert, même si
la péréquation peut permettre de corriger des inégalités.
Deuxième caractéristique : le transfert doit être total. Certes, cela n'est
évidemment pas indispensable, l'assiette pouvant techniquement être partagée,
c'est d'ailleurs le cas pour les impôts locaux actuels. Il n'en demeure pas
moins que, dans l'idéal, il est préférable que l'impôt local le soit totalement
et que l'impôt national le soit aussi. Ce principe ne concerne d'ailleurs pas
seulement l'Etat et les collectivités territoriales ; j'ai appris, au Sénat,
qu'il devrait également concerner les relations avec la sécurité sociale.
M. Jean Arthuis,
président de la commission.
Oui !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Enfin, troisième et dernière caractéristique : les taux
de l'impôt transféré doivent pouvoir être modulés par les collectivités qui en
bénéficieront. A défaut, l'autonomie fiscale serait, certes améliorée, mais
dans des proportions insuffisantes.
Puisque nous sommes sur le plan des principes, je voudrais souligner que le
processus de réforme que nous allons engager devra être conçu de manière
neutre. Là encore, je vais être tout à fait franc et loyal avec vous.
En premier lieu, il devra être neutre pour le contribuable. En aucun cas il ne
devra se traduire par une aggravation des charges qu'il supporte. Nous sommes
d'ailleurs profondément convaincus que la décentralisation doit, au terme du
processus, être source d'amélioration de la situation des contribuables et des
citoyens, car, normalement, la gestion de proximité doit se traduire soit par
des prestations supplémentaires, soit par des économies.
En second lieu, ce processus de réforme devra être neutre pour l'Etat et pour
les collectivités territoriales. Il n'est pas question que la réforme se fasse
au détriment de ces dernières. D'ailleurs, la Constitution, en cours de
révision, l'interdit. Il n'est pas envisageable non plus, et je sais que vous
ne reprocherez pas à un ministre du budget de le dire, qu'elle s'opère au
détriment des finances de l'Etat. La situation budgétaire de l'Etat ne le
permet pas, vous le savez mieux que personne.
Il faudra donc que les transferts d'impôt s'accompagnent, pour l'Etat, d'une
économie équivalente, soit sur les charges en cas de transfert de compétence
accompagné d'un transfert de ressources fiscales, soit sur les dotations, soit
sur les dégrèvements actuels d'impôts locaux pris en charge par le budget de
l'Etat.
M. Michel Mercier.
Très bien !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
J'en viens aux pistes que nous pourrions explorer
ensemble. Au regard des principes que je viens d'évoquer, quels sont les
défauts et les qualités des différents impôts ? Vous le constatez, j'ai essayé
de réfléchir aux questions que vous m'avez posées.
J'indique d'emblée que les deux impôts synthétiques que sont l'impôt sur le
revenu et l'impôt sur les sociétés ne constituent pas, selon les premières
appréciations que nous avons pu porter, des pistes satisfaisantes. Ces impôts
ne sont pas localisables, puisqu'ils prennent en compte l'ensemble des revenus
ou des éléments de patrimoine du contribuable. De surcroît, leurs bases
d'imposition sont mal réparties sur le territoire national. Enfin, notons que
l'impôt sur les sociétés est très volatile
(Marques d'approbation sur le
banc des commissions)
- le budget de l'Etat en est la première victime - et
que la sensibilité des contribuables à des taux d'impôt sur le revenu
différenciés localement serait particulièrement forte. Ce que nous constatons
déjà au niveau de l'Etat, nous le constaterions à l'échelon des communes, des
départements et des régions. Personne, je l'imagine, ne l'envisage.
La piste d'un transfert de CSG serait plus intéressante, dans la mesure où cet
impôt est dynamique. Mais les problèmes de localisation des bases semblent
également difficiles, même s'ils le sont moins que pour l'impôt sur le revenu
ou l'impôt sur les sociétés.
On peut toutefois noter que les bases de la CSG sont assez mal réparties. En
effet, le produit par habitant varie, pour les revenus d'activité, entre 917
euros dans la région la plus favorisée et 240 euros dans la région la moins
favorisée, soit un rapport d'environ un à quatre. Le rapport est à peu près
similaire pour les revenus du patrimoine.
Par ailleurs, la CSG est à l'heure actuelle intégralement affectée à la
sécurité sociale. Si les collectivités territoriales acquièrent la possibilité
de la percevoir, le lien entre sécurité sociale et CSG, qui existe
actuellement, s'en trouverait en quelque sorte affaibli, ou d'une lecture
beaucoup plus brouillée.
A fortiori
, un transfert des droits sur le
tabac ne paraît pas opportun. L'affectation de ces droits à la sécurité sociale
relève d'une logique forte, qui, à mon avis, ne doit pas être rompue.
J'en arrive à la TIPP.
(Exclamations sur plusieurs travées.)
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Ah !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Elle rapporte actuellement environ 25 milliards
d'euros. Les bases de cet impôt sont correctement localisées, puisque le
produit par habitant est compris dans un rapport de un à moins de deux. Je
donne les chiffres : 545 euros par habitant dans la région la plus avantagée et
291 euros par habitant dans la région la moins avantagée. Notons - cela fera
plaisir sinon à tout le monde, en tout cas au plus grand nombre - que, en
l'occurrence, la région d'Ile-de-France n'est absolument pas avantagée : le
produit par habitant compte parmi les plus faibles.
M. Gérard Delfau.
Forcément !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Cet impôt est donc, de toute évidence, celui qui se
prête le mieux à un transfert. Certes, la perception de l'impôt posera quelques
problèmes techniques dès lors que les taux seraient différenciés localement. Il
ne serait alors plus possible de procéder à cette perception en sortie de
raffinerie, comme c'est le cas actuellement. Pour autant, ces difficultés
techniques ne doivent pas être surestimées. Je veux le dire clairement : même
si le ministère dont j'ai partiellement la charge a la réputation d'être contre
ce transfert - ce qui n'est d'ailleurs pas tout à fait le cas -, nous sommes
prêts à l'examiner avec vous, et ce en toute loyauté.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Très bien !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Cet impôt est celui qui se prête le mieux à un
transfert. Le seul obstacle est, en réalité, pour l'instant d'ordre
communautaire - mais j'imagine qu'il pourra être surmonté. Nous sommes en train
d'étudier de très près la compatibilité d'un transfert de pouvoir fiscal sur
cet impôt à nos territoires avec les différentes directives qui régissent les
accises.
Pour être tout à fait complet, il faut noter que d'autres impôts sont aussi à
l'étude. Je pense notamment à la TGAP. Mais, depuis ce matin, je n'en entends
pas suffisamment de bien pour vous l'offrir comme étant une très bonne idée.
(Sourires.)
Si je le faisais, vous n'apprécieriez sans doute pas.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
En cas de besoin, on prendrait toujours !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Voilà donc, s'agissant des pistes de transfert de
fiscalité, ce que je voulais vous dire. J'espère vous avoir montré, en la
circonstance, que je ne cherchais pas à esquiver ce débat. J'ai souhaité
profiter de cette occasion pour qu'il puisse être ouvert en toute sincérité
entre nous.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union
centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
J'en viens à la
problématique des transferts de compétences. Vous l'avez quasiment tous
évoquée, en raison des transferts effectués qui ont été mal compensés. M.
Michel Mercier - c'est sa responsabilité - y a insisté, de même que MM. André
Lardeux et Louis de Broissia, ainsi que M. Jean-Claude Peyronnet sur un
registre différent. Ce qui est revenu en permanence, c'est, bien sûr, la
question de l'APA,...
M. Roland du Luart.
Effectivement !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
... dont le coût est très élevé. J'observe, tout
d'abord, sans chercher à renvoyer la balle, que le présent Gouvernement n'a pas
à encourir de reproche du fait de cette prestation et du calibrage de la
compensation allouée aux départements.
Rappelons à nos collègues de l'opposition, qui sont parfois si prompts à
dénoncer d'hypothétiques futurs transferts mal compensés, que l'APA a été
conçue par le précédent gouvernement.
(M. Roland du Luart s'exclame.)
J'ai relu, monsieur du Luart - car j'aime beaucoup la lecture des travaux
parlementaires - le compte rendu des débats concernant les finances locales qui
se sont tenus au Sénat l'an passé. J'y ai relevé des mises en garde insistantes
émanant de plusieurs orateurs de l'opposition d'alors, et donc de la majorité
aujourd'hui. Le débat sur l'APA a, en réalité, déjà eu lieu la semaine dernière
lorsque vous avez examiné le projet de loi de financement de la sécurité
sociale. A cet égard, M. de Raincourt a, lors de cette séance, particulièrement
bien résumé la situation dans laquelle nous nous trouvons. Il a dit : « l'Etat
dispose-t-il des ressources nécessaires pour financer les surcoûts de cette
prestation ? Je réponds très sincèrement du haut de cette tribune : hélas !
non. Faut-il, pour autant, augmenter les impôts locaux ? Je réponds : non,
évidemment ! »
M. Roland du Luart.
C'est la quadrature du cercle !
M. Alain Fouché.
Comment fait-on, alors ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Seule reste donc, mesdames, messieurs les sénateurs, la
voie de la maîtrise de la dépense.
(M. le rapporteur général opine.)
Permettez au ministre du budget de
s'exprimer sur ces questions car il n'a pas souvent l'occasion de pouvoir le
faire. Si nous ne veillons pas à calibrer toutes les prestations qu'il est jugé
utile, parfois nécessaire, de proposer à nos compatriotes en fonction de leurs
capacités contributives, cela signifie soit que nous en renvoyons le paiement
aux générations futures, sans savoir où l'on va, soit que nous manquons de sens
des responsabilités.
M. Roland du Luart.
Quel courage !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Si je considère qu'il n'y a pas d'autre voie que la
maîtrise de la dépense, c'est parce que choisir une autre voie revient à opter
en faveur de l'augmentation inexorable des impôts. Si tel est le choix qui est
fait, il doit être non pas tacite mais explicite.
(MM. Louis de Broissia et Bernard Fournier applaudissent.)
Quelles sont les voies de la maîtrise des dépenses ? Bien que n'étant pas
spécialiste du sujet, je considère qu'il ne faut pas se priver des leviers qui
sont susceptibles d'y contribuer. Je pense au seuil de ressources, au niveau de
participation avec l'instauration d'un nouveau barème tenant mieux compte de la
capacité contributive des bénéficiaires de l'APA à domicile, ou au contrôle de
l'effectivité. Je pense également au recours sur succession.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Absolument ! Et, bien sûr, avec une franchise
raisonnable !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Des années d'expérience me conduisent à penser qu'il ne
s'agit en rien d'une atteinte à la dignité des personnes et des familles. Je
pense également à des précisions sur les critères d'éligibilité, qui
concernent, par exemple, le GIR 4.
A cet égard, le Gouvernement est attaché à ce que la concertation qui s'est
engagée avec l'Assemblée des départements de France soit très approfondie, afin
qu'elle puisse déboucher sur un accord entre cette instance et le
Gouvernement.
D'une manière plus générale, mesdames, messieurs les sénateurs, comment
devons-nous aborder les transferts de compétences à venir ? En ayant
constamment présents à l'esprit deux principes très simples : les frontières
des compétences doivent être clairement définies, de manière à éviter la
confusion des rôles ; l'autonomie des collectivités doit être la plus
importante possible, dans la sphère de leurs compétences. Un principe de nos
campagnes - pardonnez-moi cette rusticité - résume cette position : « qui
commande paie, qui paie commande ».
C'est dans cet esprit que nous envisagerons les transferts à venir. Pour ma
part, j'ai donné une instruction très ferme aux responsables de mon ministère :
simplifions les normes qui encadrent l'action des collectivités territoriales,
supprimons leurs contraintes inutiles. Et je sais que, de son côté, M.
Devedjian fait de même.
N'hésitez pas à nous faire remonter des idées en matière de réforme et de
simplification, à partir de l'expérience de gestion locale, de l'expérience du
terrain qui est la vôtre. Nous les examinerons, j'en prends l'engagement devant
vous. Notre but, en effet, est d'alléger au maximum les contraintes qui sont
les vôtres dans votre tâche de gestionnaires locaux.
M. Jean Arthuis,
président de la commission.
Très bien !
M. Roland du Luart.
C'est marqué au coin du bon sens !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Enfin, il faut relever l'apport essentiel du projet de
loi constitutionnelle, actuellement en cours de discussion devant l'Assemblée
nationale, que vous avez adopté. Les transferts de compétences ou les créations
de compétences, désormais, devront être impérativement compensés : c'est l'un
des apports du Sénat à la révision constitutionnelle.
En réponse à la question de M. Michel Mercier - ce n'est pas la première fois
que je le cite, mais chacun sait ici qu'il est rapporteur spécial pour la
décentralisation -, je prends solennellement devant vous, mesdames, messieurs
les sénateurs, l'engagement, tant en mon nom qu'au nom de M. Patrick Devedjian,
de vous associer à nos réflexions, à nos simulations et à nos propositions.
Monsieur Mercier, je trouve pour ma part tout à fait logique et naturel,
lorsque le ministère de la fonction publique négocie avec les partenaires
sociaux des augmentations ayant un impact sur les rémunérations au sein de la
fonction publique territoriale, que les représentants des gestionnaires locaux,
c'est-à-dire des collectivités territoriales, soient consultés, je le dis sans
ambiguïté.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et
des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
J'ai voulu jusqu'à présent donner une certaine solennité aux réponses que j'ai
apportées à vos différentes questions. Je vais maintenant être plus rapide et
essayer de rebondir, si j'ose dire, sur un certain nombre de points que vous
avez abordés.
J'évoquerai d'abord la liberté des collectivités territoriales en matière de
choix des taux. Nous avons déjà fait une avancée substantielle en accordant une
plus grande liberté aux collectivités locales, pour la première fois depuis
vingt-deux ans, par le biais de la déliaison du taux de la taxe professionnelle
et des impôts-ménages.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
On l'a fait l'an dernier pour les départements !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Bien sûr, nombreux sont ceux parmi vous qui auraient
souhaité aller plus loin, et je sais que M. Michel Mercier a déposé des
amendements en ce sens. Ils seront examinés.
Les entreprises, vous le savez, ont manifesté leur inquiétude devant la
possibilité d'une libération totale et immédiate des taux. Il est nécessaire,
sans doute, d'avancer par étapes, et les collectivités sauront certainement
démontrer qu'elles sont capables de ne pas abuser du nouveau pouvoir qui leur
est confié. Nous pourrons ainsi progresser vers une plus grande liberté et,
disons-le tout net, vers une liberté totale.
La banalisation de la fiscalité de France Télécom avait souvent été promise
par le précédent gouvernement. Le présent gouvernement, dès son entrée en
fonction, a souhaité la mettre en place.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Très bien !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Par ailleurs, les collectivités territoriales
bénéficieront d'une majoration de leur base de taxe professionnelle, la
neutralité de l'opération étant bien entendu garantie.
Cette opération est triplement intéressante pour les collectivités
territoriales. D'abord, elles recouvreront un pouvoir fiscal sur 814 millions
d'euros de taxe professionnelle. Ensuite, elles bénéficieront intégralement de
la taxe foncière, sans prélèvement corrélatif, ce qui représente pour elles un
gain net d'environ 18 millions d'euros. Enfin, l'Etat assumera la charge
financière relative au maintien des ressources du Fonds national de péréquation
de la taxe professionnelle, dont le montant sera égal en 2003 à celui de 2002,
malgré la perte de la contribution de France Télécom.
S'agissant de la suppression de la part « salaires » de la taxe
professionnelle, reconnaissons que, au point où nous en étions, il fallait
aller jusqu'au bout. Trois mesures d'allégement de la taxe professionnelle sont
ainsi proposées, pour un coût total avoisinant les 2 milliards d'euros.
Il n'était pas envisageable non plus de ne pas étendre le bénéfice de cet
allégement aux professionnels libéraux titulaires de bénéfices non commerciaux
et employant moins de cinq salariés. La dernière mesure d'allégement qui a été
prévue concerne les investissements de recherche éligibles au crédit
d'impôt-recherche, qui seront désormais exclus de la base taxable.
Je voudrais maintenant m'efforcer - mais mes propos seront naturellement très
insuffisants - sinon de répondre, du moins de faire écho aux deux questions
d'Yves Fréville. La première touche à la péréquation et concerne directement
Patrick Devedjian. Avec la seconde, M. Fréville se demandait s'il y avait un
avenir pour la taxe professionnelle. Reconnaissez, monsieur le sénateur, qu'en
posant cette question vous ne m'avez pas fait un cadeau !
(M. Yves Fréville
opine.)
En effet, puisqu'elle est désormais « démembrée », du fait de la suppression
de la part « salaires », la taxe professionnelle a-t-elle un avenir ? Mais
comment vous répondre sinon en vous posant moi-même une question : peut-on
renoncer à un impôt local sur les entreprises ? Quelles seraient les
conséquences d'un tel renoncement, sinon peut-être le désintérêt des
collectivités locales pour les entreprises et pour l'emploi ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Tout à fait ! Ce n'est pas concevable !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Monsieur le rapporteur général, j'avais précisément
griffonné sur mon papier : « Inenvisageable » ! Je ne sais pas si c'est
concevable ou non, mais, aujourd'hui, il n'est pas envisageable de supprimer
cet impôt.
(Mme Marie-Claude Beaudeau s'exclame.)
Doit-on lui « greffer une seconde jambe », pour reprendre l'expression d'Yves
Fréville ? Ce serait sans doute le mieux. Mais à ce jour, le modeste «
chirurgien » fiscal que je suis n'a pas de proposition de greffe à vous faire
!
(Sourires.)
M. Jean Arthuis,
président de la commission.
Il faut supprimer les exonérations !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
J'en viens à la suppression du droit de licence sur les
débits de boissons, qui a été critiquée. Sachez, mesdames, messieurs les
sénateurs, qu'il s'agit avant tout d'une mesure de simplification
administrative et que le coût du recouvrement de cet impôt est totalement
disproportionné au regard de son rendement : on compte 284 000 assujettis pour
23 millions d'euros de produit fiscal ! Je voudrais d'ailleurs que ceux d'entre
vous qui sont maires, et ils sont nombreux, me disent de mémoire quelle est la
ressource correspondant à ce droit de licence. Alors que je m'occupe de très
près des finances de ma commune, j'avoue que j'en ai été tout à fait incapable
au moment où cette idée m'a été suggérée.
Pour compenser la perte de ce droit, plutôt que de faire une nouvelle fois un
calcul compliqué, il a été choisi, si vous en êtes d'accord, d'abonder la DSU
et la DSR de manière plus efficace. En effet, il nous semblait peu efficient de
verser une compensation de quelques dizaines d'euros aux milliers de communes
concernées !
Un point a naturellement fait l'objet d'un débat : l'effort financier de
l'Etat en faveur des collectivités territoriales tel qu'il ressort du projet de
loi de finances.
S'agissant du contrat de croissance et de solidarité, je signalerai, en
particulier aux sénateurs de l'opposition, que l'effort consenti est tout à
fait substantiel dans le contexte budgétaire qui est le nôtre. Mesdames,
messieurs les sénateurs, vous considérez qu'il est identique à celui de 2002,
mais telle n'est pas, pour le ministre délégué au budget, la manière de
percevoir les choses ! L'effort n'est pas le même quand le déficit budgétaire
est majoré de 50 % par rapport à l'année précédente ! Parvenir à tenir les
engagements sur les relations financières entre l'Etat et les collectivités
territoriales alors que la situation est à ce point dégradée est donc méritoire
de la part du présent gouvernement.
M. Jean Arthuis,
président de la commission.
Tout à fait !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Très bien !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
La concentration de la régularisation de la DGF au
titre de l'année 2001 sur les communes les moins favorisées est pour le
Gouvernement la manière de montrer qu'il est attentif à cette péréquation. Si
nous en avions répandu le montant en pluie fine, je ne suis pas persuadé que
chacune des 36 000 communes de France en aurait véritablement ressenti les
effets. En revanche, en concentrant ces sommes sur les communes éligibles à la
DSU et à la DSR, c'est-à-dire sur celles qui sont les plus éprouvées, nous
allons pouvoir leur distribuer globalement un montant de 100 millions d'euros,
ce qui me semble de nature à leur donner satisfaction.
En outre, la commission des finances du Sénat a déposé des amendements visant
à majorer fortement les dotations de péréquation. Sans anticiper sur le débat à
venir, j'indique d'emblée que le Gouvernement leur réservera un accueil
favorable.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie d'excuser la longueur de mon
propos : j'ai souhaité ne pas esquiver les questions de fond que vous avez
voulu soulever. Vous pouvez ne pas être en accord avec les réponses que je vous
ai apportées, mais j'ai tenu à marquer la volonté du Gouvernement d'engager un
dialogue sincère avec le Parlement. Tous ces matériaux que j'ai tenté de réunir
pour vous les soumettre valent invitation à terminer ensemble cet immense
chantier, à renouer des relations que Michel Mercier a souhaitées de confiance.
Il est capital, en effet, de rétablir la confiance entre l'Etat et les
collectivités locales. Dans « confiance », il y a le mot « foi » : foi dans les
engagements pris par le Gouvernement ; foi dans la volonté respective des
parties, c'est-à-dire des collectivités territoriales et de l'exécutif, de
respecter ces engagements ; foi dans la possibilité, grâce à la
décentralisation, de mieux servir la France et les Français en répondant à
leurs attentes au niveau territorial le plus approprié.
Si, dans notre République, chaque collectivité fait bien ce pour quoi elle a
été instituée, la France sera mieux administrée. Plus prospère, elle sera plus
apte à offrir à chacun de ses enfants l'avenir le plus fécond.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
Nous passons à l'examen des articles 12 à 14, 14
bis
, 29 à 31, 31
bis
, 32 et des amendements tendant à insérer des articles additionnels
relatifs aux recettes des collectivités locales.
Articles additionnels après l'article 2
M. le président.
L'amendement n° I-26, présenté par MM. Schosteck, P. André et Bizet, Mme Bout,
MM. Calmejane, César, Cornu, Doublet, Fournier, Ginésy, Karoutchi, Leroy,
Murat, Natali, Ostermann, Rispat, Valade et Vasselle, est ainsi libellé :
« Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 204-0
bis
du code général des impôts est complété
in fine
par un paragraphe ainsi rédigé :
« IV. - Les recettes fiscales de l'Etat perçues au titre du présent article
sont affectées à la dotation générale de fonctionnement. »
« II. - La perte de recettes résultant du I ci-dessus est compensé à due
concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Bernard Fournier.
M. Bernard Fournier.
Il paraît paradoxal que l'Etat bénéficie d'une imposition assise sur une
dépense importante supportée par les collectivités territoriales. L'objet de
l'amendement est donc de permettre la rétrocession à ces collectivités du
produit de l'imposition des indemnités de fonction.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission comprend bien les intentions de nos
collègues, mais elle craint que le dispositif proposé ne constitue une
affectation de recettes peu compatible avec les prescriptions de la loi
organique relative aux lois de finances.
La commission souhaiterait savoir si son appréciation est partagée par le
Gouvernement. Si tel était le cas, elle serait contrainte de demander à nos
collègues, pour des raisons de procédure budgétaire, de bien vouloir retirer
cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Chacun comprend l'intention des auteurs de
l'amendement, mais celui-ci ne peut être admis ni dans sa forme ni même dans
son principe. En effet, le raisonnement qui le sous-tend conduit à affecter aux
collectivités locales l'impôt sur le revenu de toutes les rémunérations versées
par lesdites collectivités, y compris celles des élus ayant opté pour le barème
et celles des employés municipaux. Vous mesurez donc les conséquences d'une
telle disposition !
Je pense que les auteurs de l'amendement, sur le fondement de ces
explications, voudront bien le retirer ; à défaut, je serai obligé d'en
demander le rejet.
M. le président.
Monsieur Fournier, l'amendement est-il maintenu ?
M. Bernard Fournier.
Compte tenu des explications de M. le rapporteur général et de M. le ministre,
nous retirons cet amendement.
M. le président.
L'amendement n° I-26 est retiré.
L'amendement n° I-60, présenté par MM. Miquel, Angels, Auban, Charasse,
Demerliat, Haut, Lise, Marc, Massion, Moreigne, Sergent et les membres du
groupe socialiste, est ainsi libellé :
« Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« A. - Les aides d'urgence attribuées, sur fonds publics ou privés, aux
particuliers ou aux personnes morales, à la suite d'une catastrophe naturelle
dûment constatée dans les conditions prévues par la loi n° 82-600 du 13 juillet
1982, relative à l'indemnisation des victimes de catastrophes naturelles sont
exclues de la base imposable des impôts directs.
« Ces dispositions sont applicables aux aides allouées à la suite de
l'explosion de l'usine AZF de Toulouse survenue en septembre 2001.
« B. - La perte de recettes pour l'Etat résultant du paragraphe A est
compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits
prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Michel Sergent.
M. Michel Sergent.
Cet amendement concerne un sujet douloureux et de circonstance, celui des
catastrophes naturelles ou industrielles telles que les inondations tristement
célèbres que nous avons vécues aux mois de septembre et d'octobre, qui
reviennent au premier plan de l'actualité en ce moment même, ou que l'explosion
de l'usine AZF à Toulouse.
Dans des situations aussi particulières, des dégrèvements peuvent toujours
être accordés, mais nous souhaitons que soit clairement déclaré, dans la loi si
besoin est, que les victimes des catastrophes naturelles ou industrielles ne
risquent pas de voir leurs charges fiscales augmenter parce qu'elles auront
bénéficié d'aides d'urgence en provenance de fonds soit publics, soit privés.
Ces aides ne doivent pas conduire à une augmentation de leur imposition sur le
revenu, sur les bénéfices industriels et commerciaux, ou sur les bénéfices non
commerciaux.
La perte de recettes pour l'Etat est bien sûr gagée.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il s'agit - on peut tout à fait le comprendre et
partager cette intention - de permettre aux victimes, particuliers ou personnes
morales, de catastrophes naturelles ou industrielles, en particulier de
l'explosion de l'usine AZF à Toulouse, de déduire les aides reçues d'urgence et
provenant de fonds publics ou privés de l'assiette des cotisations dues au
titre des différents impôts directs.
Naturellement, la commission ne peut que s'associer à cet élan de solidarité.
Elle a donc examiné cette proposition et s'est interrogée sur le dispositif
technique.
Les aides apportées en contrepartie ou en réparation des dommages, nous
semble-t-il, sont déjà non-imposables dans le droit actuel. Il faudrait bien
entendu en obtenir confirmation du Gouvernement, qui, croyons-nous savoir a
envisagé de faire figurer dans le collectif budgétaire des mesures de cet
ordre. Peut-être pourrions-nous aussi être éclairés sur ce dernier aspect.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Je confirme les propos de M. le rapporteur général : le
Gouvernement prépare actuellement un dispositif qui, dans le même esprit que
l'amendement n° I-60, permettra d'atteindre l'objectif qui vient d'être exposé.
Cette mesure pourrait être adoptée à l'occasion de l'examen du collectif
budgétaire, dans les prochaines semaines.
Les dispositions prévues par l'amendement ne sont pas satisfaisantes, alors
que son esprit et son objet le sont. J'invite donc ses auteurs à bien vouloir
prendre acte de l'engagement que je prends devant eux. Lors de l'examen du
collectif, et en concertation avec eux s'ils le souhaitent, nous serons en
mesure d'introduire dans la norme, avec toute la sécurité fiscale requise, un
dispositif répondant de manière satisfaisante à leur préoccupation, que tous
ici nous partageons.
M. le président.
L'amendement est-il maintenu, monsieur Sergent ?
M. Michel Sergent.
Monsieur le président, je prends acte de la déclaration de M. le ministre.
Puisque nous aurons l'occasion d'examiner un dispositif similaire lors de la
discussion du prochain collectif, je retire cet amendement, persuadé qu'une
solution faisant l'unanimité sera trouvée.
M. le président.
L'amendement n° I-60 est retiré.
Article 12
M. le président.
« Art. 12. - I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Les articles 1568, 1569, 1569
bis,
1570, 1571 et 1572 sont abrogés
;
« 2° L'article 1699 est ainsi rédigé :
«
Art. 1699. -
La taxe sur les spectacles est recouvrée et les
infractions réprimées selon les modalités et sous le bénéfice des sûretés
prévues pour les impôts visés au titre III de la première partie du livre
Ier.
« Cette taxe est obligatoirement perçue par les services de l'Etat. »
« II. - Le 1° de l'article L. 1613-1 du code général des collectivités
territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« A compter de 2004, pour le calcul du montant de la dotation globale de
fonctionnement, le montant de la dotation globale de fonctionnement de 2003
calculé dans les conditions prévues ci-dessus est majoré d'un montant de 23
millions d'euros ; »
« III. - En 2003, le solde de la dotation d'aménagement tel qu'il résulte de
l'application des quatre premiers alinéas de l'article L. 2334-13 du code
général des collectivités territoriales est majoré de 23 millions d'euros.
« Cette majoration n'est pas prise en compte dans le montant de la dotation
globale de fonctionnement pour l'application du I et du II de l'article 57 de
la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998). »
L'amendement n° I-220, présenté par M. Marini, au nom de la commission des
finances, est ainsi libellé :
« A. - Après le deuxième alinéa (1°) du I de cet article, insérer un alinéa
ainsi rédigé :
« 1°
bis
En 2003, la perte de recettes résultant pour les communes de
l'abrogation des articles mentionnés au 1° ci-dessus est compensée sur la base
du produit perçu en 2002, revalorisé du taux d'évolution de la dotation globale
de fonctionnement. A compter de 2004, la compensation versée aux communes
évolue comme la dotation globale de fonctionnement ; »
« B. - Pour compenser la perte de recettes résultant des dispositions du I
ci-dessus, compléter
in fine
cet article par un paragraphe ainsi rédigé
:
« IV. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de la compensation de la
suppression du droit de licence sur les débits de boissons prévue au 1°
bis
du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une
taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général
des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission a souhaité appeler l'attention sur les
modalités de compensation de la suppression de la licence sur les débits de
boissons.
Certes, nous nous réjouissons de la suppression d'un impôt local archaïque
dont, souvent, les maires, dont nous sommes, ne connaissent effectivement pas
le rendement exact. Cependant, sur le plan des principes, monsieur le ministre,
quelques-uns d'entre nous, notamment au sein de la commission des finances, ont
été choqués que soient prélevées sur les finances de collectivités bien
désignées des ressources existantes, sur lesquelles elles comptaient, pour
réintroduire en contrepartie la même somme globale dans un système centralisé
de dotations.
Ce n'est pas une question de montant, ce n'est pas le problème de la licence
accordée aux débits de boissons : c'est une réaction de principe. En effet,
monsieur le ministre, nous voulons progresser dans le sens de l'autonomie
fiscale et financière, nous voulons rapprocher les ressources des collectivités
de nos concitoyens. Tout ce qui tend à éloigner une ressource existante de la
réalité économique pour l'inclure dans un système centralisé et complexe de
dotations nous paraît donc aller dans le mauvais sens.
Ne nous en veuillez pas, la réaction qu'exprime cet amendement se place, je le
répète, sur le plan des principes. Nous souscrivons à l'objectif de
renforcement de la DSU et de la DSR. Mais faut-il pour autant reproduire les
errements si critiqués du précédent gouvernement, qui, pour des sommes certes
infiniment plus importantes, ont abouti à renforcer considérablement le bloc
des dotations ?
A travers cet amendement, monsieur le ministre, la commission des finances,
gardienne vigilante des principes en lesquels elle croit, a souhaité vous faire
part de sa préoccupation.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Il est bon d'avoir des principes et ceux-ci deviennent
pérennes dès lors qu'on les applique avec discernement.
Monsieur le rapporteur général, je ferai appel à votre agilité d'esprit, que
je connais bien, en vous disant qu'il ne faut pas trop contrarier la bonne
volonté du Gouvernement lorsqu'il cherche à réformer. Si vous saviez la somme
d'efforts qu'il faut déployer pour supprimer une taxe stupide ! Il faut
parvenir à convaincre des dizaines - je n'ose dire des centaines - de
personnes. Si, de surcroît, il faut accorder une compensation euro pour euro
aux 36 000 communes, comme vous le souhaitez en l'occurrence, l'application du
sacro-saint principe que vous venez de rappeler risque d'aboutir à l'inverse de
ce que vous souhaitez, c'est-à-dire à des coûts supplémentaires.
J'ai beaucoup cherché, essayant d'exercer ma mission avec responsabilité, à ne
pas reproduire ce que nous dénonçons depuis tant d'années, c'est-à-dire
supprimer des impôts locaux sans compensation véritable. Cependant, compte tenu
du caractère symbolique de ladite recette, que vous connaissez comme moi, j'ai
pensé qu'il n'était pas raisonnable, d'un point de vue pratique, de procéder à
une compensation commune par commune.
Je vous prie de considérer que cela ne porte pas atteinte aux principes :
cette solution pratique était la seule possible. A défaut, nous n'aurions pas
été en mesure de réaliser cette réforme.
Le vote du Sénat en la circonstance sera lourd de symbole pour le
Gouvernement.
En effet, s'il nous est impossible de continuer à supprimer des dispositions
qui n'on plus aucun sens, qui sont frappées d'une obsolescence totale et alors
que nous effectuons ces suppressions conformément à des principes, voire à des
préoccupations que nous n'avons pas forcément appliqués à d'autres ressources
bien plus importantes, c'est tout l'esprit de réforme qui s'en trouvera
paralysé.
Au demeurant, je vous demande de bien vouloir prendre en considération,
monsieur le rapporteur général, que le Gouvernement n'a pas essayé de
s'approprier cette ressource, puisqu'il l'a compensée intégralement, d'une
manière pratique, commode et peu coûteuse en termes de travaux administratifs.
Je souhaite donc que vous retiriez cet amendement. A défaut, je ne pourrai que
vous opposer ma grande déception !
M. le président.
Monsieur le rapporteur général, accédez-vous à la demande de M. le ministre
?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Compte tenu de la modicité des sommes concernées, il
n'y a effectivement pas matière à discuter longuement. L'amendement de la
commission est, je le répète, l'expression d'un principe ; il constitue un
signal. Il vise à mettre en garde non pas vous, monsieur le ministre, mais
éventuellement d'autres ministres ou, qui sait, ceux qui, un jour lointain,
pourraient vous succéder
(sourires.)
contre le franchissement d'une certaine ligne jaune, laquelle
en l'occurrence, il est vrai, n'est pas dépassée.
Il faut par ailleurs, mes chers collègues, prendre en considération le fait
que la suppression du droit de licence sur les débits de boissons permet de
supprimer les articles 1568, 1569, 1569
bis,
1570, 1571 et 1572 du code
général des impôts, c'est-à-dire six articles qui ne rapportent pas beaucoup
d'argent et qui génèrent beaucoup de complications ; oui, mes chers collègues,
il faut les supprimer ! Dans ces conditions, je retire l'amendement.
M. le président.
L'amendement n° I-220 est retiré.
L'amendement n° I-172, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« I. - Dans le texte proposé par le II de cet article pour compléter le 1° de
l'article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales, remplacer
les mots : "A compter de 2004" par les mots : "A compter de 2003," et les mots
: "de la dotation globale de fonctionnement de 2003" par les mots : "de la
dotation globale de fonctionnement de 2002".
« II. - Supprimer le III de cet article. »
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
Cet amendement concerne la compensation de la suppression des droits de
licence sur les débits de boisson. Si 23 millions de crédits de compensation
sont effectivement prévus, ils ne correspondent nullement à la perte subie par
les collectivités puisqu'ils sont directement inscrits dans la DGF. En outre,
ce n'est qu'à partir de 2004 que ces 23 millions seront affectés de cette
façon. En effet, en 2003, le Gouvernement souhaite que cet argent alimente la
dotation d'aménagement. Dans ces conditions, des crédits destinés à compenser
une perte de ressources seront réellement détournés par l'Etat, qui ne veut pas
dégager de moyens suffisants en faveur des dotations de solidarité.
Je tiens à vous dire, mes chers collègues, que l'Association des maires de
France n'approuve pas cette mesure. Elle a fait savoir, par le biais d'une
motion qu'elle a rédigée au sujet de la loi de finances, qu'elle regrette
qu'aient été utilisés, pour assurer le financement des dotations de solidarité
rurale et urbaine pour 2003, « les crédits provenant de la compensation de la
suppression des droits de licence sur les débits de boisson ».
Il est encore temps, mes chers collègues, de procéder autrement. C'est la
raison pour laquelle je vous invite à voter cet amendement ainsi que ceux qui
sont relatifs à l'abandon des dotations de solidarité.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission a le sentiment que cet amendement sera
largement satisfait par l'adoption de son propre amendement n° I-17, qui sera
examiné ultérieurement.
De plus, la rédaction de l'amendement n° I-172 emporte une conséquence qui, à
mon avis, est un peu perverse, car elle reviendrait à minorer la DCTP. Par
conséquent, sur un plan technique, le dispositif ne paraît pas adéquat.
J'invite donc les auteurs de cet amendement à le retirer.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Le Gouvernement souhaite également le retrait de cet
amendement.
M. le président.
Votre amendement est-il maintenu, monsieur Foucaud ?
M. Thierry Foucaud.
Puisqu'il va être satisfait, aux dires de M. le rapporteur général, nous
aurons au moins une satisfaction ce soir ! Je le retire donc.
M. le président.
L'amendement n° I-172 est retiré.
Je mets aux voix l'article 12.
(L'article 12 est adopté.)
Article 13
M. le président.
« Art. 13. - I. - 1. A compter des impositions dues au titre de 2003, France
Télécom est assujettie, dans les conditions de droit commun, aux impôts directs
locaux et taxes additionnelles perçus au profit des collectivités
territoriales, des établissements publics de coopération intercommunale ainsi
que des autres établissements et organismes habilités à percevoir ces impôts et
taxes.
« Pour l'application du premier alinéa :
«
a)
Les dispositions des articles 1465, 1465 A, 1466 B ainsi que des I
et I
ter
de l'article 1466 A du code général des impôts sont applicables
aux opérations qui peuvent être exonérées, pour la première année, à compter de
2004 ;
«
b)
Par dérogation à l'article 1477 du code général des impôts, France
Télécom déclare, avant le 1er décembre 2002, les éléments nécessaires à
l'établissement des bases de taxe professionnelle à retenir pour l'imposition
de 2003. Toutefois, les dispositions des articles 1725 à 1729 du code général
des impôts ne s'appliquent que si la déclaration est postérieure au 15 janvier
2003.
« 2. L'article 1635
sexies
du code général des impôts est ainsi modifié
:
«
a)
Au I, les mots : "La Poste et France Télécom sont assujettis" sont
remplacés par les mots : "La Poste est assujettie" et les mots : "au lieu de
leur principal établissement" sont remplacés par les mots : "au lieu de son
principal établissement" ;
«
b)
Dans la deuxième phrase du 5° du II, les mots : "et France
Télécom" sont supprimés et, dans le troisième alinéa du 6° du II, les mots :
"et de France Télécom" sont supprimés.»
« I
bis.
- Dans le premier alinéa du 7° du I de l'article 21 de la loi
n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la
poste et des télécommunications, les mots : "et à France Télécom" sont
supprimés.
« II. - 1. Le montant de la compensation prévue au D de l'article 44 de la loi
de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998) est diminué, en 2003,
d'un montant égal, pour chaque collectivité territoriale, établissement public
de coopération intercommunale à fiscalité propre ou fonds départemental de
péréquation de la taxe professionnelle, au produit obtenu en multipliant la
base imposable de taxe professionnelle de France Télécom au titre de 2003, pour
cette collectivité territoriale, cet établissement public de coopération
intercommunale ou ce fonds, par le taux de taxe professionnelle, applicable en
2002, à la collectivité, à l'établissement public de coopération intercommunale
ou au fonds. Pour la région d'Ile-de-France, ce montant est égal au produit
obtenu en multipliant la base imposable de la taxe spéciale d'équipement
additionnelle à la taxe professionnelle de France Télécom au titre de 2003 par
le taux de cette taxe, applicable en 2002, à cette région.
« Toutefois :
a)
Pour les communes qui, en 2002, appartiennent à un établissement
public de coopération intercommunale sans fiscalité propre, le taux voté par la
commune est majoré du taux appliqué au profit du groupement en 2002 ;
b)
Pour les établissements publics de coopération intercommunale
soumis, en 2002, au régime fiscal de l'article 1609
nonies
C ou du II de
l'article 1609
quinquies
C du code général des impôts et qui font
application de la procédure de réduction des écarts de taux, le taux de taxe
professionnelle à retenir est celui applicable, en 2002, dans chaque commune
d'implantation d'un établissement de France Télécom imposé au profit du
groupement :
«
c)
Pour les établissements publics de coopération intercommunale
soumis, pour la première fois en 2003, au régime fiscal de l'article 1609
nonies
C ou du II de l'article 1609
quinquies
C du code général
des impôts, le taux de taxe professionnelle à retenir est celui, en 2002, de
chaque commune d'implantation d'un établissement de France Télécom imposé au
profit du groupement majoré, le cas échéant, du taux de l'établissement public
de coopération intercommunale auquel appartenait la commune en 2002 ;
«
d)
Pour les communes qui font application en 2002 ou pour la première
fois en 2003 des dispositions de l'article 1638 du code général des impôts, le
taux de taxe professionnelle à retenir est celui applicable en 2002, dans
chaque commune d'implantation d'un établissement de France Télécom imposé au
profit de la nouvelle commune ;
«
e)
Pour les communes qui font application en 2002 ou pour la première
fois en 2003 des dispositions de l'article 1638
quater
du code général
des impôts, le taux de taxe professionnelle à retenir est celui applicable, en
2002, dans chaque commune d'implantation d'un établissement de France Télécom
imposé au profit du groupement.
« Pour les années suivantes, le montant de la compensation prévue au D de
l'article 44 de la loi de finances pour 1999 précitée est calculé sur la base
de celle attribuée en 2003 après déduction du montant de la diminution prévue
au premier alinéa.
« 2. Pour les communes et les établissements publics de coopération
intercommunale, lorsque le montant de la compensation prévue au D de l'article
44 de la loi de finances pour 1999 précitée est, en 2003, inférieur au montant
de la diminution à opérer en application du 1, le solde est prélevé, au profit
du budget général de l'Etat, sur le produit de la taxe foncière sur les
propriétés bâties, de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, de la
taxe d'habitation et de la taxe professionnelle perçu au profit de ces communes
et établissements.
« Pour les années suivantes, ce solde est actualisé chaque année du taux
d'évolution de la dotation globale de fonctionnement.
« 3. En cas d'impositions supplémentaires ou de dégrèvements consécutifs à une
rectification des bases imposables de la taxe professionnelle ou de la spéciale
d'équipement additionnelle à la taxe professionnelle de France Télécom au titre
de 2003, il est procédé à la régularisation du prélèvement opéré en application
des 1 et 2.
« III. - Il est effectué en 2003 un prélèvement au profit de l'Etat sur le
produit de la taxe additionnelle à la taxe professionnelle prévue par l'article
1600 du code général des impôts. Ce prélèvement est égal, pour chaque chambre
de commerce et d'industrie, au produit obtenu en multipliant la base imposable
de France Télécom au titre de 2003 dans le ressort de chaque chambre de
commerce et d'industrie par le taux de cette taxe applicable en 2002. Ce
prélèvement est imputé sur les attributions mentionnées à l'article 139 de la
loi du 16 avril 1930 portant fixation du budget général de l'exercice
1930-1931.
« IV. - Le IV
bis
de l'article 1636 B
octies
du code général des
impôts est ainsi modifié :
« 1° Le premier alinéa est complété par les mots : "et diminuées du
prélèvement effectué en application du 1 du II de l'article 13 de la loi de
finances pour 2003(n° du ) ;
« 2° Le deuxième alinéa est complété par les mots : "et majoré du prélèvement
effectué en application du 1 du II de l'article 13 de la loi de finances pour
2003 précitée". »
« V. - 1. Le II de l'article 1648 A
bis
du code général des impôts est
complété par un 6° ainsi rédigé :
« 6° Une dotation annuelle versée par l'Etat à raison de la réforme du régime
d'assujettissement de France Télécom aux impôts directs locaux. Cette dotation
est fixée à 271 millions d'euros pour 2003. »
« 2. Pour le calcul de la différence mentionnée au deuxième alinéa du 6° du II
de l'article 1635
sexies
du code général des impôts au titre des
impositions 2002, le produit des impositions visées au I du même article ne
prend en compte que les impositions au titre de La Poste.
« 3. Par dérogation au 1° du II de l'article 1648 A
bis
du même code,
le produit des rôles supplémentaires émis jusqu'au 31 décembre 2002 de la
cotisation nationale de péréquation prévue à l'article 1648 D dudit code est
versé au profit du budget général de l'Etat. »
La parole est à M. le rapporteur général, sur l'article.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il y a longtemps que j'attendais ce moment, comme
beaucoup d'entre nous d'ailleurs ; je veux parler du retour des bases fiscales
de France Télécom dans le droit commun.
Depuis des années, à l'occasion de chaque loi de finances, de chaque loi de
finances rectificative, la commission des finances proposait un amendement
visant cet objectif et, chaque fois, dans les années passées, nous l'adoptions.
Il nous est arrivé de le faire à l'unanimité mais, chaque fois, l'ancien
gouvernement nous demandait de retirer cet amendement après nous avoir adressé
quelques paroles, souvent agréables, toujours courtoises, sur sa détermination
à faire évoluer les choses.
Cela s'achevait par un rapport de plus et, bien entendu, par un vote de
l'Assemblée nationale repoussant la mesure.
La réforme de la fiscalité de France Télécom est enfin lancée ! Mais elle
l'est dans le contexte budgétaire tendu que nous connaissons bien. C'est donc
un dispositif moins favorable aux finances publiques locales que celui que
proposait la commission des finances ces dernières années : il faut bien
respecter la règle impérative de non-aggravation du déficit budgétaire de
l'Etat. Quoi qu'il en soit, saluons l'avancée tout à fait positive qui vient
d'être réalisée !
A compter de 2003, les collectivités locales percevront l'intégralité du
produit de la fiscalité locale de France Télécom, qui sera donc totalement
normalisée. Désormais, la taxe foncière est une recette de droit commun
correspondant à chacune des implantations de France Télécom et pour chacune des
collectivités-siège.
Il y a cependant une contrepartie. A compter de 2003, la compensation versée à
chaque collectivité locale au titre de la suppression de la part « salaires »
de la taxe professionnelle sera minorée d'un montant correspondant à ce qu'elle
aurait perçu en 2002 en appliquant son taux de taxe professionnelle aux bases
de France Télécom situées sur son territoire. En d'autres termes, le gain net
pour les collectivités locales résultera de l'évolution des bases et des taux à
compter de 2003.
Certains pourraient dire : l'Etat reprend d'une main ce qu'il donne de
l'autre. La commission ne partage pas cette vision pessimiste. Pour ma part, je
répondrai que ce n'est pas exact et que, du point de vue des relations
financières entre l'Etat et les collectivités locales, la démarche retenue par
le Gouvernement est un exemple de ce qu'il faut faire.
Je m'explique en un mot. En 2003, la réforme sera financièrement neutre pour
l'Etat et les collectivités locales, mais la structure des recettes des
collectivités locales sera modifiée : la part des compensations reçues de
l'Etat dans les recettes totales des collectivités sera réduite, tandis que la
part des recettes fiscales « vivantes » sera accrue.
Cela, monsieur le ministre, respecte bien les principes auxquels nous croyons.
Nous progressons un peu, mais nous progressons dans le sens de l'autonomie
financière et fiscale des collectivités locales. C'est la raison pour laquelle
je dis que cette réforme est un exemple de ce qu'il faut faire.
Pour l'Etat, la diminution des recettes fiscales s'accompagnera d'une
diminution de même montant des dépenses de transfert qui contribuent à rendre
nos finances publiques trop rigides.
Ce jeu de vases communiquants entre compensations budgétaires et fiscalité
vivante, c'est l'esprit du projet de loi constitutionnelle que nous avons
adopté ici même il y a quelques jours, et je compte sur le Gouvernement pour
nous proposer, dans l'avenir, d'autres mesures de ce type et d'une ampleur plus
grande.
Reste une incertitude, monsieur le ministre : je veux parler du devenir des
ressources du Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle, le
FNPTP.
Le dispositif proposé compense au franc le franc la perte pour le FNPTP, mais
cette compensation n'est prévue que pour 2003. Comment cela s'explique-t-il ?
Pourquoi ne pas avoir indexé le montant de la compensation afin d'en garantir
la pérennité ? Nous vous serions reconnaissants de nous rassurer sur les
intentions du Gouvernement en matière de financement de la péréquation, qui est
en passe d'être érigée en principe de valeur constitutionnelle.
Je termine brièvement par une remarque sur le financement par l'Etat du
FNPTP.
Lorsque l'année prochaine, je l'espère, nous engagerons la réforme des
finances locales, il est un point auquel nous serons particulièrement
attentifs, je veux parler de la suppression des indexations sur les recettes
fiscales nettes de l'Etat telles qu'elles sont définies par les articles du
code général des impôts consacrés au FNPTP. Cette définition est en effet
rédigée de telle façon qu'elle est mécaniquement de plus en plus défavorable
aux collectivités locales.
Mais j'anticipe sur nos débats de l'année prochaine ! Pour l'heure, je
résumerai ainsi mon propos : la réforme de la fiscalité locale de France
Télécom va dans le bon sens en redonnant du pouvoir fiscal aux collectivités et
en réduisant la part des transferts dans le budget de l'Etat, mais il serait
utile que le ministre accepte de préciser quelles sont les intentions du
Gouvernement s'agissant de la pérennité de la compensation versée au FNPTP.
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° I-173, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« A. - Supprimer le II et le III de cet article.
« B. - Compléter la seconde phrase du texte proposé par le 1 du V de cet
article pour compléter le II de l'article 1648 A
bis
du code général des
impôts par les mots : "et évolue chaque année comme l'indice de variation des
recettes fiscales de l'Etat".
« C. - Pour compenser la perte de recettes résultant du B ci-dessus, compléter
cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes résultant de la fixation d'un taux d'évolution
pour la dotation annuelle versée par l'Etat au FNPTP est compensée par le
relèvement à due concurrence de l'impôt sur les sociétés. »
L'amendement n° I-85, présenté par MM. Miquel, Massion, Moreigne, Sergent,
Demerliat, Charasse, Lise, Haut, Marc, Angels, Auban et les membres du groupe
socialiste et rattachée, est ainsi libellé :
« I. - Compléter le texte proposé par le V de cet article pour le 6 du II de
l'article 1648 A
bis
du code général des impôts par un alinéa ainsi
rédigé :
« Au titre des années 2004 et suivantes cette dotation évolue comme la
dotation globale de fonctionnement. »
« II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus,
compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les pertes de recettes résultant de la pérennisation de la dotation
versée par l'Etat au fonds national de péréquation de la taxe professionnelle -
FNPTP - sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe
additionnelle au droit de consommation sur les tabacs visé à l'article 575 A du
code général des impôts. »
La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour présenter l'amendement n°
I-173.
Mme Marie-France Beaufils.
Nous réclamons en effet depuis de nombreuses années, comme vient de le
rappeler M. le rapporteur général, l'assujettissement de France Télécom au
droit commun de la fiscalité locale.
Aujourd'hui, le Gouvernement prétend nous apporter satisfaction, avec le
dispositif mis en place à l'article 13.
Or il n'en est rien.
Aux termes de cet article, certes France Télécom sera imposée selon le droit
commun - les bases sont « restituées » aux collectivités, nous dit-on - mais
aucune ressource supplémentaire n'est à espérer de ces nouvelles bases, mis à
part l'effet de leur croissance.
Le Gouvernement prévoit de reprendre d'une main ce qu'il accorde d'une
autre.
En effet, si nous votons l'article 13 tel qu'il est proposé, les collectivités
seront ponctionnées non seulement sur les dotations de compensation de taxe
professionnelle mais aussi, si cela ne fait pas le compte, sur leurs ressources
fiscales à hauteur de ce que l'établissement France Télécom leur rapporte.
C'est tout simplement inadmissible ; les élus locaux sont d'accord, dans leur
grande majorité, sur ce point.
Voilà pourquoi nous proposons de ne pas procéder à ces ponctions sur les
ressources des collectivités concernées.
Par ailleurs, nous suggérons d'indexer la dotation que l'Etat attribue au
Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle afin de rendre
celle-ci constante.
M. le président.
La parole est à M. Jean-Pierre Demerliat, pour présenter l'amendement n°
I-85.
M. Jean-Pierre Demerliat.
Cet amendement a pour objet d'indexer l'évolution de la dotation de l'Etat au
Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle, le FNPTP, sur celle
de la dotation globale de fonctionnement.
Les dispositions de l'article 13 prévoient le transfert de la fiscalité locale
de France Télécom aux collectivités locales. Or une partie de son produit était
affecté au FNPTP. L'Etat compense donc cette perte de recettes pour le fonds
par l'instauration d'un prélèvement sur recettes de 271 millions d'euros en
2003.
Toutefois, le Gouvernement n'a pas prévu l'évolution de ce montant pour les
années 2004 et suivantes. Les dispositions de l'article 13 ne garantissent même
pas que ce prélèvement sur recettes sera reconduit en 2004. Ainsi, la
prévisibilité qui devrait prévaloir en matière de dotations aux collectivités
locales est inexistante.
Les dotations compensant des suppressions de recettes fiscales sont pour la
plupart indexées sur l'évolution de la DGF. C'est par exemple encore le cas de
la dotation compensant aux collectivités locales l'allégement de la taxe
professionnelle prévu par les dispositions de l'article 11 du présent projet de
loi de finances. Il est donc logique de proposer, ce à quoi tend l'amendement
n° I-85, que la dotation de l'Etat au FNPTP évoluera à partir de 2004 comme la
DGF.
En l'absence d'une telle disposition, un risque important pèserait sur la
pérennité des moyens financiers du FNPTP.
Or la péréquation doit être plus que jamais la priorité de tout gouvernement.
Les inégalités de richesses entre collectivités locales seront plus durement
ressenties par les Français dans un pays plus décentralisé. Ces inégalités
pourraient même susciter un sentiment de rejet de la décentralisation et la
mettre en péril.
Il nous faut donc une péréquation forte, dotée de moyens financiers importants
pour lutter contre les grandes inégalités de potentiel fiscal en matière de
taxe professionnelle.
Le groupe socialiste propose au Sénat d'adopter l'amendement n° I-85, car il
vise à défendre raisonnablement les moyens financiers des collectivités locales
et de la péréquation.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Ces deux amendements posent la question de la
pérennité des recettes du FNPTP, et, disant cela, je ne crois pas être infidèle
aux intentions de leurs auteurs. Je me suis moi-même exprimé sur ce sujet lors
de ma prise de parole sur l'article 13. Le Gouvernement va sans doute nous
apporter les assurances nécessaires et nous éclairer sur le devenir des
ressources de ce fonds. Je suis persuadé que cela devrait permettre à nos
collègues de se considérer comme satisfaits et de retirer leurs amendements.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Monsieur le rapporteur général, la ressource que nous
compensons évoluait plutôt dans le mauvais sens puisque, France Télécom étant
filialisé, le montant encaissé par l'Etat allait plutôt en se réduisant. Si la
conséquence de l'indexation demandée est de réduire le versement compensatoire,
c'est préoccupant.
Si vous voulons bien réfléchir au contenu du FNPTP - je parle sous le contrôle
des éminents spécialistes ici présents - nous trouvons d'abord la cotisation de
péréquation de la taxe professionnelle, puis un premier versement de l'Etat
qui, lui, est indexé sur les recettes réelles de l'Etat, et, enfin, le
versement compensatoire, si j'ose dire, de la banalisation de la fiscalité de
France Télécom.
A ce stade, monsieur le rapporteur général, je pense qu'une indexation sur la
DGF n'est peut-être pas la meilleure garantie pour l'avenir du FNPTP.
Nous veillerons à ce que les ressources du FNPTP puissent évoluer afin qu'il
ne soit pas en difficulté : cela est plus sûr que toute forme d'indexation
approximative.
Encore une fois - nous nous sommes interrogés à ce sujet -, il s'agit là de la
compensation d'une ressource qui était en déclin.
Sous le bénéfice de ces observations formulées en réponse, d'une part, au
rapporteur général, et, d'autre part, aux auteurs des amendements, je demande
le retrait et, à défaut, le rejet de ces amendements.
M. le président.
Madame Beaufils, l'amendement n° I-173 est-il maintenu ?
Mme Marie-France Beaufils.
Nous maintenons notre amendement, car nous pensons que les collectivités ont
besoin de signes, notamment à propos du Fonds national de péréquation de la
taxe professionnelle.
M. le président.
Monsieur Demerliat, l'amendement n° I-85 est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Demerliat.
Nous le maintenons.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-173.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-185.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 13.
(L'article 13 est adopté.)
M. le président.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les
reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt-cinq, est reprise à vingt et une
heures trente, sous la présidence de M. Serge Vinçon.)
PRÉSIDENCE DE M. SERGE VINÇON
vice-président
M. le président.
La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2003, adopté
par l'Assemblée nationale.
Dans le débat sur les recettes des collectivités locales, nous en sommes
parvenus à l'examen des amendements tendant à insérer des articles additionnels
après l'article 13.
Articles additionnels après l'article 13
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° I-126 rectifié
bis,
présenté par MM. Valade,
Jean-Claude Gaudin, Souvet et Vanlerenberghe, est ainsi libellé :
« Après l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« A. 1. - A la fin du quatrième alinéa du 2° du b du 2 du I
ter
de
l'article 1648 A du code général des impôts, les mots : "dans la même
proportion" sont remplacés par les mots : "du montant de la diminution du
produit de taxe professionnelle correspondant à l'établissement constatée par
rapport à l'année précédente".
« 2. En 2003, pour l'application des dispositions du quatrième alinéa du 2° du
b du 2 du I
ter
de l'article 1648 A du code général des impôts, il n'est
pas tenu compte de l'évolution du produit résultant de l'imposition des bases
mentionnées au b de l'article 1467 du code général des impôts.
« B. 1. - Le début du premier alinéa du 1° du IV
bis
dudit article est
ainsi rédigé :
« Sur la partie du fonds alimentée, d'une part, par le prélèvement prévu au b
du 2 du I
ter
ou l'écrêtement des bases des établissements publics de
coopération intercommunale soumis, de plein droit ou après option, aux
dispositions fiscales de l'article 1609
nonies
C et, d'autre part, par
la compensation mentionnée au II du D de l'article 44 de la loi de finances
pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998), le conseil général... (le reste
sans changement) ».
« 2. Le début du premier alinéa du 2° du IV
bis
dudit article est ainsi
rédigé :
« Sur la partie du fonds alimentée, d'une part, par le prélèvement prévu au b
du 2 du I
ter
ou l'écrêtement des bases des établissements publics de
coopération intercommunale à fiscalité additionnelle et, d'autre part, par la
compensation mentionnée au II du D de l'article 44 de la loi de finances pour
1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998), le conseil général... (le reste sans
changement) ».
« C. Après le II du D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999 (n°
98-1266 du 30 décembre 1998), il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« II
bis. -
A compter de 2003, les établissements publics de
coopération intercommunale soumis aux prélèvements mentionnés au b du 2 du I
ter
de l'article 1648 A du code général des impôts perçoivent la
compensation résultant de la réduction de la fraction imposable des salaires et
rémunérations versés par un établissement exceptionnel situé sur leur
territoire, à l'exception de la fraction de cette compensation correspondant au
montant versé à un fonds départemental de péréquation de la taxe
professionnelle l'année précédant l'option pour le régime fiscal prévu au 1° du
I de l'article 1609
nonies
C du code général des impôts ou, pour les
établissements publics de coopération intercommunale ayant adopté ce régime
fiscal avant le 1er janvier 1999, en 1999. Cette fraction est conservée par le
fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle. »
« D. La perte de recettes pour les fonds départementaux de péréquation de la
taxe professionnelle résultant des A, B et C ci-dessus est compensée à due
concurrence par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
« E. La perte de recettes pour l'Etat résultant du D ci-dessus est compensée à
due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Le sous-amendement n° I-224, présenté par M. Fréville, est ainsi libellé :
« Supprimer le A du texte proposé par l'amendement n° I-126 rectifié
bis.
»
L'amendement n° I-223, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Après l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - 1. Après la première phrase du sixième alinéa du b du 2 du I
ter
de l'article 1648 A du code général des impôts sont insérées les deux
phrases suivantes : "Pour 2003, le prélèvement est diminué d'une fraction de la
compensation prévue au D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999 (n°
98-1266 du 30 décembre 1998), calculée pour chaque établissement exceptionnel.
Cette fraction est égale à la différence entre le montant de la compensation
versé au fonds en 2003 et celui qu'il a reçu l'année précédant la première
année de mise en oeuvre du prélèvement."
« 2. Le dernier alinéa du b du 2 du I
ter
de l'article 1648 A du code
général des impôts est complété par la phrase suivante : "Pour les
établissements publics de coopération intercommunale soumis aux dispositions du
présent b au plus tard en 2003, les produits de taxe professionnelle utilisés
pour la détermination de la variation à la baisse du prélèvement sont majorés
de la compensation prévue au D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999
(n° 98-1266 du 30 décembre 1998) perçue au titre de ces années par le fonds
départemental de péréquation de la taxe professionnelle."
« II. - Le premier alinéa du 1° du IV
bis
de l'article 1648 A du code
général des impôts est complété par les mots suivants : ", majoré le cas
échéant du montant des compensations prévues au IV de l'article 6 de la loi de
finances pour 1987 (n° 86-1317 du 30 décembre 1986) et au D de l'article 44 de
la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998)."
« III. - La première phrase du premier alinéa du 2° du IV
bis
de
l'article 1648 A du code général des impôts est complétée par les mots suivants
: "ou du prélèvement, majoré le cas échéant du montant des compensations
prévues au IV de l'article 6 de la loi de finances pour 1987 (n° 86-1317 du 30
décembre 1986) et au D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999 (n°
98-1266 du 30 décembre 1998) 99". »
La parole est à M. Vanlerenberghe, pour défendre l'amendement n° I-126
rectifié
bis.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
Je défends cet amendement au nom de mes collègues, notamment de M. Valade, qui
en est l'auteur principal.
La loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de
la coopération intercommunale a omis de mettre en adéquation les règles
d'alimentation du fonds départemental de la taxe professionnelle, le FDTP, avec
les dispositions de l'article 44 de la loi de finances pour 1999, portant
réforme de cette taxe.
Il s'ensuit une série d'anomalies qui affectent la prise en compte de la
compensation de la suppression de la part salariale de taxe professionnelle.
Celle-ci est intégralement versée par l'Etat au FDTP, alors que le produit
représentatif de cette compensation lui est déjà reversé pour la part que le
produit des bases « salaires » représente dans le montant du prélèvement versé
auparavant par l'EPCI.
Une autre anomalie se concrétise par le mode de calcul du prélèvement en cas
de diminution de produit de la taxe professionnelle puisque, en matière de taxe
professionnelle unique, la TPU, ledit prélèvement ne diminue pas d'un montant
similaire à celui de la diminution du produit payé par l'établissement
exceptionnel, comme c'est logiquement le cas en fiscalité additionnelle. La
neutralisation du passage en TPU exige une harmonisation du mode de calcul du
prélèvement.
Je pense que M. le ministre a compris ce dont il s'agissait et je me
dispenserai de donner lecture de tous les amendements prévus pour modifier cet
état de fait.
M. Michel Mercier.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. Yves Fréville, pour défendre le sous-amendement n°
I-224.
M. Yves Fréville.
Je regrette très vivement que des amendements aussi importants que ceux de M.
Valade et du Gouvernement n'aient pas été examinés par la commission des
finances, dans leur version définitive.
L'amendement n° I-126 rectifié
bis,
défendu par M. le maire d'Arras,
qui n'est pas en cause...
M. Michel Mercier.
Il n'est pas à Bordeaux !
M. Yves Fréville.
En effet, il n'est ni à Bordeaux ni à Rennes !
Cet amendement, donc, envisage les conséquences d'une diminution des bases de
la taxe professionnelle d'un établissement exceptionnel localisé dans un EPCI
ayant opté pour la TPU. Jusqu'à présent, les pertes de recettes consécutives à
une diminution des bases de la taxe professionnelle étaient partagées entre,
d'une part, le fonds départemental de taxe professionnelle, destiné à
redistribuer les ressources d'établissements exceptionnels entre de nombreuses
communes - elles sont au nombre de quatre cents dans mon département - et,
d'autre part, la communauté d'agglomération ou la communauté urbaine ayant opté
pour le système fiscal de la taxe professionnelle unique.
Je rappelle, mes chers collègues, que lors du vote de la « loi Chevènement »
relative au renforcement et à la simplification de la coopération
intercommunale, il avait été décidé que la communauté urbaine ou la communauté
d'agglomération recevrait la totalité des ressources de l'établissement
anciennement exceptionnel, quitte à ce qu'elle reverse sous forme de
prélèvement un montant correspondant à ce que recevait le fonds départemental
de taxe professionnelle en 1999.
Vous voyez comme c'est simple !
Que se passe-t-il si les bases de la taxe professionnelle diminuent ? Dans
l'ancien système, le coût inhérent à la diminution des bases était partagé à
due proportion entre le fonds départemental de taxe professionnelle et la
communauté urbaine ou la communauté d'agglomération.
Pour ma part, je regrette vivement que cette disposition ait été abandonnée
dans le premier alinéa de l'amendement n° I-126 rectifié
bis
qui prévoit
que le fonds départemental de taxe professionnelle supporterait à lui seul la
perte de recettes due à la diminution des bases.
Mon sous-amendement n° I-124 vise donc à rétablir la situation antérieure. Si
les bases diminuent, chacun doit supporter une partie de la perte qui en
découle.
M. Michel Mercier.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué, pour défendre l'amendement n°
I-223.
Monsieur le ministre, je suis très heureux de saluer votre présence.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Monsieur le président, je veux vous remercier de votre
salut amical et personnel et vous dire le plaisir que j'ai à m'exprimer au nom
du Gouvernement sous votre présidence.
Je commencerai par un amendement, qui est naturellement d'une très grande
simplicité, pour peu qu'on y prête un peu d'attention !
(Sourires.).
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Oui !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe a d'ailleurs bien préparé
la Haute Assemblée à « accueillir » en quelque sorte ce sujet encore une fois
d'une très grande simplicité !
(Nouveaux sourires.)
L'amendement n° I-126 rectifié
bis
vise en effet à modifier les règles
d'ajustement du prélèvement effectué sur les établissements publics de
coopération intercommunale à taxe professionnelle unique, au profit des fonds
départementaux de péréquation de la taxe professionnelle, et à permettre aux
même EPCI- je les appelle ainsi pour simplifier l'explication - de bénéficier
de la compensation de la suppression de la part « salaires » de la taxe
professionnelle afférente aux établissements dits « exceptionnels ».
Votre explication, que j'ai écoutée avec beaucoup d'attention, a failli me
convaincre car la mesure que vous proposez est justifiée du point de vue de
l'équité. Cependant, les solutions que vous retenez ne me semblent pas, à ce
stade, pouvoir être reprises complètement en l'état. On peut les améliorer et,
connaissant votre souci du dialogue, je suis sûr que nous allons pouvoir
progresser.
Plus particulièrement, la modification des règles relatives à la compensation
de la suppression de la part « salaires » conduirait à une diminution brutale
des ressources des fonds départementaux dont l'ampleur financière n'a pas
encore pu être estimée à ce jour, puisque ces sujets sont très compliqués. Or,
je vous rappelle que les fonds départementaux représentent un dispositif
important de péréquation horizontale décentralisée au sein du département.
Je souhaite souligner que les dispositions actuelles permettent d'ores et déjà
de tenir compte, dans une certaine mesure, de la diminution du produit de la
taxe professionnelle de l'établissement qualifié d'exceptionnel. Un
rapprochement des dispositifs d'écrêtement et de prélèvement nécessiterait une
remise à plat de l'ensemble des mécanismes de répartition du produit de la taxe
professionnelle en provenance de cet établissement exceptionnel.
Chacun aura compris qu'il s'agit d'une entreprise très importante qui produit
des recettes de taxe professionnelle très élevées.
Pour ces raisons, j'ai demandé à mes services et à ceux du ministère de
l'intérieur, dont je salue l'expertise, de mettre au point un dispositif qui
permettra de satisfaire votre demande sans déstabiliser, ce qui n'était
naturellement pas votre intention, les ressources des fonds départementaux de
péréquation de la taxe professionnelle.
Je vous demanderai donc, monsieur le sénateur, de bien vouloir, après avoir
entendu mes explications, retirer votre amendement.
Je vous propose un amendement n° I-223 qui prévoit, tout d'abord, de diminuer
le prélèvement au profit du fonds départemental à due concurrence du montant de
la baisse du produit de la taxe professionnelle supportée par le groupement
ayant opté pour la taxe professionnelle unique, et consécutive à la réforme de
la part « salaires ».
Dès lors, il n'est pas nécessaire de modifier le régime actuel de versement de
compensation de la suppression de la part « salaires » de taxe professionnelle,
dont bénéficient actuellement les fonds départementaux.
Par ailleurs, le dispositif actuel de baisse proportionnelle du prélèvement en
cas de diminution du produit de taxe professionnelle est maintenu, quand cette
diminution est consécutive à une réduction d'effectivité économique.
Je vous remercie de l'attention que vous prêtez à mes propos. Je perçois dans
vos yeux toute la luminosité de la présentation que je vous fais !
(Sourires.)
Enfin, ainsi que vous le souhaitez, les montants de compensations reçues par
les fonds seront désormais inclus dans l'assiette du reversement prioritaire
dont les EPCI bénéficient, dès lors qu'ils font l'objet d'un écrêtement ou d'un
prélèvement.
Monsieur le président, j'ai fait ce que j'ai pu, mais vraiment je ne saurais
faire davantage !
(Sourires.)
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est lumineux !
M. Michel Mercier.
Ce n'est pas mal !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je vais m'efforcer de schématiser un peu les
choses.
M. Adrien Gouteyron.
Bravo !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Dans un premier temps, nous sommes saisis d'un
amendement n° I-126 rectifié
bis
. C'est un amendement important,...
M. Michel Mercier.
Absolument !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
... qui a été présenté avec beaucoup de conviction
par notre collègue Jean-Marie Vanlerenberghe. Il tend à tirer les conséquences
du mode de compensation de la suppression de la part « salaires » de la taxe
professionnelle sur les modalités de prélèvement sur les bases des EPCI à taxe
professionnelle unique par les fonds départementaux de péréquation de la taxe
professionnelle.
(Sourires.)
Le texte en cause comporte trois paragraphes : A, B et C.
(Rires.)
M. Adrien Gouteyron.
Ça, c'est clair !
(Nouveaux rires.)
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Le paragraphe A relève, selon nous, d'une volonté
politique de privilégier la péréquation dans le cadre intercommunal, au
détriment de la péréquation dans le cadre départemental. C'est le choix qui est
fait par les auteurs de cet amendement.
M. Michel Mercier.
C'est exact ! C'est le choix de l'agglomération !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est ce qu'il faut retenir et qui est important dans
le débat.
Le paragraphe B est un aménagement technique et le paragraphe C corrige, de
manière satisfaisante, une conséquence imprévue de la réforme de 1999 et va
dans le sens de l'équité.
Voilà l'analyse, très brièvement résumée, de ce que nous avons compris de cet
amendement.
Nous sommes saisis, par ailleurs, d'un sous-amendement de notre collègue Yves
Fréville, qui tend à supprimer le A du dispositif. Par conséquent, M. Fréville
ne souhaite pas que l'on fasse prévaloir la logique de péréquation
intercommunale sur la logique de péréquation départementale.
Pour sa part, le Gouvernement, qui a placé sur le sujet ses meilleurs experts,
nous propose de substituer à l'amendement, et éventuellement au
sous-amendement, une autre rédaction, qui a été complètement remaniée.
Cet amendement tend, premièrement, à supprimer, comme le sous-amendement de M.
Fréville, les dispositions du paragraphe A, faisant ainsi le choix de la
péréquation départementale.
Il vise, deuxièmement, à modifier, en les complétant, les dispositions
techniques proposées au paragraphe B, dans le sens, d'ailleurs, souhaité par
les auteurs de l'amendement ; c'est donc une rectification de nature
technique.
Enfin, troisièmement, il a pour objet de résoudre, de manière différente, le
problème de fond soulevé par les auteurs de l'amendement n° I-126 rectifié
bis
en matière de compensation aux communautés d'agglomération et aux
communautés urbaines de la suppression des bases « salaires » des
établissements exceptionnels.
Il faut rappeler que, dans la situation actuelle, les fonds départementaux de
péréquation perçoivent deux fois la compensation, alors que les communautés
urbaines et les communautés d'agglomération ne la perçoivent pas.
Les auteurs de l'amendement n° I-126 rectifié
bis
, présenté notamment
par MM. Gaudin et Valade, proposent, pour remédier à cette difficulté, de
majorer la compensation versée aux EPCI et de minorer celle qui est versée aux
fonds départementaux. De cette manière, c'est un montant plus élevé de
compensation qui serait intégré à la dotation globale de fonctionnement en
2004.
Le Gouvernement suggère à mon sens prudemment, de ne pas toucher à la
compensation, mais de minorer le montant prélevé par le fonds départemental sur
le produit de la taxe professionnelle perçue par les communautés
d'agglomération ou les communautés urbaines.
Les deux solutions ont leur logique, celle de MM. Gaudin et Valade comme celle
du Gouvernement. Elles sont toutes deux sans effet sur le solde du budget de
l'Etat. Par conséquent, du simple point de vue des finances publiques, la
commission est neutre dans le débat. Il semble toutefois que la solution
proposée par le Gouvernement soit de nature plus consensuelle que celle
qu'apporte l'amendement n° I-126 rectifié
bis
.
Voilà, mes chers collègues, ce que je peux vous dire en termes vraiment très
schématiques.
La commission des finances a examiné l'amendement de MM. Valade et Gaudin et
elle était convenue de se conformer à l'avis du Gouvernement.
Elle n'a pu examiner, en revanche, ni le sous-amendement de M. Fréville ni
l'amendement du Gouvernement. Elle s'en remet donc à la sagesse de notre Haute
Assemblée. J'insiste sur la rédaction sans doute techniquement plus achevée de
l'amendement du Gouvernement et souligne son caractère volontairement
consensuel. Il s'agit donc, monsieur le ministre, si je puis dire, d'une
sagesse tout à fait positive.
M. le président.
Monsieur Fréville, le sous-amendement est-il maintenu ?
M. Yves Fréville.
Vous avez tous compris, mes chers collègues, qu'il fallait connaître la carte
de l'industrie automobile en France, avec des usines qui comptent parfois une
dizaine de milliers d'ouvriers, pour saisir qu'il existe un problème de
répartition de la taxe professionnelle entre, d'une part, les communes où
habitent une grande partie des salariés de ces usines et, d'autre part, les
communautés d'agglomération où sont implantés ces établissements
exceptionnels.
L'enjeu est
a priori
important. Ce qui fausse toute la discussion -
c'est d'ailleurs la raison pour laquelle, finalement, sous les réserves que je
vais émettre, je comprends parfaitement que de tels amendements aient été
déposés, en particulier celui du Gouvernement - c'est, il faut le reconnaître
une erreur législative qui a été commise en 1999 : la part « salaires » a été
supprimée de la taxe professionnelle. Et, très logiquement, on a dit que les
compensations de l'exonération étaient versées au fonds départemental de la
taxe professionnelle.
C'est bien ce qui s'est produit en 1999 et, à tort, les années suivantes. En
2000, la loi Chevènement survient. Celle-ci prévoit que, dans les communautés
d'agglomération et les communautés urbaines qui perçoivent la TPU, la totalité
du produit fiscal est versée à la communauté et le fonds départemental reçoit
uniquement ce qu'il percevait en 1999. Mais on oublie la compensation de la
suppression des bases « salaires » ! On va donc continuer à verser au fonds
départemental une compensation qui n'a plus de raison d'être. Personne n'est
gêné par cette opération, car, à l'évidence, ce sont de petites compensations
qui sont versées. Puis, en 2003 - c'est la dernière étape de la suppression de
la part « salaires » - c'est le gros paquet ! Dans le cas de Rennes, c'est 9
millions d'euros qui s'ajoutent au prélèvement qui avait été institué en
1999.
Je reconnais, la mort dans l'âme, car je plaide contre les intérêts des
communes rurales de mon département en disant cela, qu'il y a là une erreur
juridique. Par conséquent, il est logique qu'elle soit corrigée.
Je ne vais donc pas m'opposer à l'amendement du Gouvernement, qui est
infiniment plus satisfaisant, pour différentes raisons que je ne vais pas
exposer, que celui qu'ont déposé - qu'ils veuillent bien m'excuser - mes
collègues Jacques Valade et Jean-Claude Gaudin.
Je formulerai toutefois une remarque. Le « contrat » de 1999, si je peux
m'exprimer ainsi en parlant d'une loi, prévoyait une possibilité d'accord :
lorsque des augmentations de base se produisaient - et Dieu sait que des
augmentations de base ont lieu dans les grandes usines d'automobiles
actuellement ! - le produit de ces augmentations de base pouvait faire l'objet
de négociations contractuelles entre, d'une part, le conseil général qui gère
les fonds départementaux et, d'autre part, la communauté d'agglomération ou la
communauté urbaine.
Cette affaire a empoisonné les négociations durant quatre ans. J'espère que si
l'on remet les compteurs à zéro, c'est-à-dire si l'on reconnaît l'erreur
juridique, on en tiendra compte. Je souhaite très vivement - je ne sais pas
sous quelle forme - qu'apparaisse à l'avenir un partage équitable des
accroissements de base très importants entre le fonds départemental et la
communauté considérée.
Sous cette réserve, qui est d'ordre politique et qui ne remet pas en cause le
fonctionnement juridique que nous propose le Gouvernement, finalement, la mort
dans l'âme, je le répète, je me rallierai à l'amendement du Gouvernement.
Bien entendu, je retire mon sous-amendement, monsieur le président, puisqu'il
est satisfait par le I de l'amendement du Gouvernement.
M. le président.
Le sous-amendement n° I-224 est retiré.
Monsieur Vanlerenberghe, l'amendement n° I-126 rectifié
bis
est-il
maintenu ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
Après les brillantes explications de M. le ministre et de M. le rapporteur
général et à la faveur de l'excellente démonstration de notre collègue Yves
Fréville, qui accepte que tout rentre finalement dans le cadre juridique prévu,
je crois que je ne peux que retirer cet amendement. Je m'en remets, en effet, à
la proposition qui a été formulée par le ministre approuvée par le rapporteur
général. Elle devrait donner satisfaction à l'agglomération, ce qui était le
but de cet amendement. J'espère que cela ne desservira pas trop le souci de
solidarité manifesté par le département d'Ille-et-Vilaine.
M. le président.
L'amendement n° I-126 rectifié
bis
est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° I-223.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 13.
Les deux amendements suivants sont présentés par MM. Miquel, Massion,
Moreigne, Sergent, Demerliat, Charasse, Lise, Haut, Marc, Angels, Auban et les
membres du groupe socialiste et rattachée.
L'amendement n° I-86 est ainsi libellé :
« Après l'article 13 insérer un article additionnel rédigé ainsi :
« I. - Après la troisième phrase du 2° du II de l'article 1648 A
bis
du
code général des impôts est insérée une phrase rédigée comme suit :
« A compter de 2003 cette dotation évolue chaque année comme la dotation
globale de fonctionnement.
« II. - Les pertes de recettes résultant du I ci-dessus sont compensées à due
concurrence par la création d'une taxe additionnelle au droit de consommation
sur les tabacs visé à l'article 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-87 est ainsi libellé :
« Après l'article 13, insérer un article additionnel rédigé ainsi :
« I. - Le 2° du I de l'article 1648 B
bis
du code général des impôts
est complété
in fine
par les phrases suivantes :
« A compter de 2003 ce montant évolue chaque année comme la dotation globale
de fonctionnement. »
« II. - Les pertes de recettes résultant du I ci-dessus sont compensées à due
concurrence par la création d'une taxe additionnelle au droit de consommation
sur les tabacs visé à l'article 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Michel Moreigne.
M. Michel Moreigne.
Ces deux amendements tendent, respectivement, à indexer l'évolution des
dotations de l'Etat au Fonds national de péréquation de la taxe
professionnelle, le FNPTP, et au Fonds national de péréquation, le FNP, sur
celle de la DGF. Ces dotations sont, en effet, actuellement indexées sur
l'évolution des recettes fiscales de l'Etat nettes des prélèvements en faveur
des collectivités locales. Or cette indexation est presque systématiquement
moins favorable que celle de la DGF.
Ainsi, les ressources du FNPTP inscrites dans le projet de loi de finances
pour 2003 diminuent par rapport à l'année précédente. Cette évolution résulte
de l'indexation sur les recettes fiscales de l'Etat qui conduit à retenir, en
2003, un taux d'évolution de moins 0,66 % contre 2,29 % pour la DGF.
En outre, cette situation ne peut que s'aggraver à l'avenir compte tenu du
transfert envisagé par le Gouvernement d'une partie de la fiscalité de l'Etat
aux collectivités locales. Ainsi, l'attribution de tout ou partie du produit de
la taxe intérieure sur les produits pétroliers, la TIPP, aux collectivités
locales aurait des conséquences défavorables sur les recettes fiscales de
l'Etat, donc sur les ressources du FNPTP.
Etant d'un naturel optimiste, vous me permettrez d'être persuadé que nous
sommes tous ici conscients de l'importance de la péréquation à l'aube d'un
accroissement des compétences des collectivités locales et que l'évocation de
la péréquation ne tient pas uniquement aux discours : elle touche également aux
réalités.
En outre, l'indexation sur la DGF harmoniserait et simplifierait les
dispositions applicables en matière d'évolution des dotations en les alignant
sur la règle de droit commun. Cette indexation permettrait aussi d'améliorer la
visibilité des élus locaux sur l'évolution de leurs dotations.
Nous proposons donc au Sénat d'adopter ces amendements, qui semblent défendre
raisonnablement les intérêts des collectivités locales et la péréquation, dont
on a beaucoup parlé ici et dont on continuera sans doute de parler.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Nos collègues du groupe socialiste souhaitent indexer
sur la DGF la dotation versée par l'Etat au fonds national de péréquation de la
taxe professionnelle et au Fonds national de péréquation. C'est assurément une
bonne question !
Depuis plusieurs années, la commission des finances conteste le mode
d'indexation actuellement retenu des dotations de l'Etat au FNPTP et au FNP. Il
faut savoir que cette indexation se fait sur les recettes fiscales de l'Etat
nettes des dégrèvements et des prélèvements sur recettes.
Je me permets de vous renvoyer à la page 138 du rapport écrit de la commission
où figure la comparaison, année par année, depuis 1998, du taux d'évolution des
recettes fiscales brutes et du taux d'évolution des recettes fiscales nettes
corrigées des transferts. On voit que, systématiquement, le jeu de la formule,
compte tenu de la dynamique des prélèvements sur recettes, qui est plus rapide
que celle des recettes fiscales de l'Etat, est mécaniquement défavorable au
FNPTP et au FNP.
Ainsi, en 1998 - une belle année pour les recettes, notamment les recettes
fiscales brutes, qui augmentent de 5,3 %, de quoi faire rêver le ministre
délégué au budget, n'est-ce-pas ? - les recettes fiscales nettes corrigées des
transferts étaient en augmentation de 4,43 %.
A l'exception de la seule année 2000, le rapport a toujours été défavorable.
Pour 2002 - loi de finances initiale - les recettes fiscales brutes étaient
prévues en augmentation de 2,70 % et les recettes fiscales nettes corrigées des
transferts en diminution de 1,22 %. Heureusement, pour 2002, s'agissant de la
péréquation, on ne se livre pas à une régularisation. Je crois savoir que l'on
ne modifie pas les conditions initiales du calcul, on en reste au prévisionnel.
Sinon, ce serait peut-être encore pire...
Pour l'année 2003, on prévoit des recettes fiscales brutes en diminution de
0,44 % - chacun le sait, c'est le malheur des temps - et des recettes fiscales
nettes corrigées des transferts en diminution de 0,56 %.
En termes schématiques, plus la DGF et les compensations d'exonération
d'impôts locaux augmentent vite et plus l'indexation des dotations au FNPTP et
au FNP est réduite. Parmi les exonérations d'impôts locaux figure tout
particulièrement la compensation de la suppression de la part « salaires ».
Nos collègues du groupe socialiste proposent une indexation sur la DGF.
Peut-être serait-ce logique, la question peut se poser. Le taux d'évolution de
la DGF n'est-il pas devenu, en effet, une sorte de taux directeur qui
s'applique à l'évolution de nombreux concours de l'Etat aux collectivités
locales ? C'est ainsi qu'il s'applique à la dotation générale de
décentralisation, à la dotation destinée à compenser les charges de logement
des instituteurs, à la dotation élu local ainsi qu'aux compensations
d'exonération d'impôts et à plusieurs autres choses encore.
La question, monsieur le ministre, nous paraît donc avoir été opportunément
soulevée. Peut-être sera-t-elle traitée dans le cadre plus global de la réforme
des finances locales, à l'occasion de laquelle on cherchera à imaginer une
architecture plus rationnelle et plus compréhensible de l'ensemble des
dotations de l'Etat.
Notre commission, qui reste, bien entendu, attachée à la pérennité des
ressources affectées aux deux fonds nationaux de péréquation a cependant
décidé, sur cette question importante mais technique, de s'en remettre à l'avis
du Gouvernement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert
ministre délégué.
M. le rapporteur général vient, en toute simplicité, de
nous expliquer - qui d'autre que lui pourrait le faire ? - que l'Etat a
finalement davantage doté les collectivités territoriales que ses recettes
fiscales nettes n'ont évolué.
(Sourires.)
Cela rend ma situation de
ministre délégué au budget extraordinairement délicate !
Les autres des amendements doivent bien comprendre que la DGF est
l'arrière-petite-fille du VRTS, le versement représentatif de la taxe sur les
salaires, et qu'elle est représentative des charges de fonctionnement des
collectivités locales. En revanche, pour la péréquation de taxe
professionnelle, il s'agit de cotisations de taxe professionnelle qui sont
versées par des entreprises. Il ne faut pas mélanger les deux.
Je me tourne vers M. Michel Moreigne, dont je comprends et les objectifs et
les préoccupations, lui qui est soucieux d'assurer une certaine péréquation en
fonction des territoires et de leur richesse fiscale potentielle : mon cher
collègue, on ne peut pas demander en permanence à l'Etat d'être la variable
d'ajustement de ces différences entre les territoires. Et je ne peux pas vous
suivre dans le raisonnement qui viserait à indexer la dotation de l'Etat au
fonds national de péréquation de la taxe professionnelle sur le taux
d'évolution de la dotation globale de fonctionnement.
Cela étant, pour vous rassurer dès aujourd'hui et pour vous inciter à la
patience, je rappelle que nous sommes à la veille de revoir l'ensemble des
relations financières entre l'Etat et les collectivités locales ; l'année qui
précède cette réforme, il ne me paraît pas souhaitable de modifier de nouveau
les règles dont vous avez la gentillesse de ne pas vous lasser, mais dont je
sais l'aridité.
Donc, les amendements n°s I-86 et I-87 posent de vrais problèmes qui
trouveront naturellement leur solution avec l'aboutissement de la réforme
précitée.
Sous le bénéfice de ces explications, je propose à M. Michel Moreigne de
retirer ses amendements, assuré qu'il est maintenant que tout sera bientôt
remanié. A défaut, je serais contraint de demander au Sénat de les rejeter.
Monsieur le rapporteur général, vous avez souhaité entendre l'avis du
Gouvernement : vous avez bien compris que, s'agissant de péréquation de taxe
professionnelle, il n'est pas logique, du point de vue économique - or la
logique économique vous est familière ! - de prévoir une indexation sur la DGF.
Il me paraît préférable de choisir les recettes nettes de l'Etat.
M. le président.
Monsieur Moreigne, les amendements n°s I-86 et I-87 sont-ils maintenus ?
M. Michel Moreigne.
J'ai bien entendu M. le rapporteur général et M. le ministre. Il m'a semblé
que M. le rapporteur général faisait montre d'un esprit un plus ouvert, si je
puis dire, que M. le ministre.
Si toutefois M. le ministre m'affirme que ses propos valent engagement de
revoir la situation dans le sens que j'ai indiqué, et s'il veut bien admettre,
avec moi, que l'Etat est le plus grand et le meilleur péréquateur possible, je
pourrai envisager de retirer mes amendements.
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Je me fais un devoir moral de répondre très précisément
à la question de M. Michel Moreigne.
A l'occasion du débat sur les relations financières de l'Etat avec les
collectivités locales, j'ai évoqué l'éventualité du transfert de la TIPP comme
ressource, ce qui suppose un travail assez long.
Vous et moi entretenons des relations de confiance suffisamment anciennes,
même si nous ne partageons pas les mêmes idées, pour que je tienne à être le
plus loyal et le plus précis dans ma réponse. Franchement, cela ne serait pas
un bon signal de vous faire battre sur ces amendements, car cela reviendrait à
faire repousser par le Sénat un dispositif auquel il n'est pas hostile dans le
principe, mais dont les modalités ne sont pas appropriées.
M. le président.
Monsieur Moreigne, qu'en est-il des deux amendements ?
M. Michel Moreigne.
Si l'idée que nous avons semée peut croître et embellir, même sans avoir
obtenu d'engagement formel, je retire les amendements.
M. le président.
Les amendements n°s I-86 et I-87 sont retirés.
Article 14
M. le président.
« Art. 14. - I. - 1. Le 4 du I de l'article 1636 B
sexies
du code
général des impôts est ainsi rédigé :
«
4
. A compter de 2003 et par exception aux dispositions du
b
du
1, les communes, les départements et les organismes de coopération
intercommunale dotés d'une fiscalité propre peuvent augmenter leur taux de taxe
professionnelle, par rapport à l'année précédente, dans la limite d'une fois et
demie l'augmentation de leur taux de taxe d'habitation ou, si elle est moins
élevée, de leur taux moyen pondéré de la taxe d'habitation et des taxes
foncières.
« Les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables lorsqu'il est
fait application des dispositions du quatrième alinéa du 2.
« La majoration prévue au 3 n'est pas applicable s'il est fait application des
dispositions du premier alinéa. »
« 2. L'article 1636 B
sexies
A du même code est complété par un III
ainsi rédigé :
«
III
. - A compter de 2003 et par exception aux dispositions du I, les
régions peuvent augmenter leur taux de taxe professionnelle, par rapport à
l'année précédente, dans la limite d'une fois et demie l'augmentation de leur
taux de taxe foncière sur les propriétés bâties.
« Les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables s'il est fait
application des dispositions du deuxième alinéa du II. »
« 3. L'article 1636 B
decies
du même code est ainsi modifié :
« 1° Aux premier et troisième alinéas du II, les mots : "et 3" sont remplacés
par les mots : ", 3 et premier alinéa du 4" ;
« 2° La dernière phrase du deuxième alinéa du II est supprimée.
« II. - Un rapport établissant un bilan de l'évolution comparée des bases et
des taux de la taxe professionnelle, d'une part, de la taxe d'habitation et des
taxes foncières, d'autre part, sera adressé annuellement au Parlement. »
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, sur l'article.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Nous allons, avec l'article 14, revenir sur la question de la liaison des taux
des taxes dont nous estimons qu'elle a porté, hier, un coup d'arrêt brutal à la
liberté des communes. Aujourd'hui, la déliaison peut-elle apparaître comme un
retour vers des libertés plus grandes accordées aux collectivités locales, qui
seraient libres de s'inscrire dans une décentralisation des décisions et de
leurs recours ? Malheureusement non, car les temps ont bien changé.
Premièrement, bien des communes sont entrées dans l'intercommunalité et, si
elles y ont trouvé un peu de solidarité sur certains dossiers importants
qu'elles ne pouvaient affronter seules, elles se sont également trouvées
confrontées à des situations qu'elles ont dû bien souvent subir, parfois sans
en tirer un quelconque intérêt.
Aujourd'hui, votre gouvernement, monsieur le ministre, ne semble plus accorder
beaucoup d'importance à la question de l'apport d'une contribution financière
renforcée. Des communes vont rester dans l'attente de certains projets devenus
lointains faute de moyens. L'intercommunauté aurait-elle vécu ?
Deuxièmement, la part prise en charge par l'Etat du fait de compensations
d'allégements fiscaux est passée de 22 % au milieu des années quatre-vingt-dix
à 33,5 % en 2002, pour être évaluée à près de 40 % pour 2003.
En 1999, la compensation représentait 1,8 milliard d'euros pour la baisse de
la part « salaires » des bases de taxe professionnelle. En 2002, le coût de la
compensation a été de 7,8 milliards d'euros, soit quatre fois plus.
Mais prenons la taxe professionnelle de 2001. Si l'on ajoute la compensation à
la taxe professionnelle payée, on aboutit à une hausse de 4,9 % par rapport à
2000. Mais si l'on retire la compensation, on aboutit à une baisse de 2 % de la
taxe professionnelle.
Ces allégements fiscaux ont servi beaucoup plus le patronat que les communes,
et celles-ci ont beaucoup plus subi les évolutions de la taxe qu'elles ne les
ont maîtrisées, tout en y perdant des ressources.
La déliaison limitée prévue à cet article ne corrigera pas cette situation.
Troisièmement, bien d'autres contraintes ne laissent en fait que peu de
liberté de choix, car ces contraintes poussent à la hausse des dépenses. Je ne
prendrai que quelques exemples les plus significatifs : l'allocation
personnalisée d'autonomie, les 35 heures non compensées, la loi du 3 mai 1996
relative aux services d'incendie et de secours, sans compter les contraintes de
Bruxelles. Quel est donc le champ réel sur lequel la commune peut librement
exercer son choix ?
Pour certaines communes, le champ d'intervention possible s'est réduit comme
peau de chagrin, pour faire place à un choix budgétaire qui n'est plus qu'une
simple addition des dépenses à caractère obligatoire. Pour ces communes, et
elles sont, à mon avis, beaucoup plus nombreuses qu'il n'y paraît, le libre
choix par décentralisation des responsabilités n'existera pas sans
l'accompagnement financier.
Quatrièmement, avec votre proposition, monsieur le ministre, vous ne corrigez
pas cette absence de liberté de choix. Je m'explique : prenons une commune ne
percevant pas beaucoup de taxe professionnelle et se trouvant dans une
situation déjà difficile. Pour que la mesure ait une quelconque efficacité, la
taxe professionnelle devra être augmentée de 3 %, mais, pour cela, il faut que
la taxe d'habitation le soit de 2 %.
Les moins riches paieront encore beaucoup trop. Les assujettis à la taxe
professionnelle verront un simple ajustement par rapport au coût de la vie. La
commune n'aura pas d'autre choix que le maintien des services rendus, sans
aller plus loin pour tenir compte de l'augmentation du coût de la vie.
Donc, vous le voyez, monsieur le ministre, votre proposition ne tient pas. Je
me demande même s'il ne s'agit pas d'une mesure machiavélique destinée à
pousser les communes hésitantes à augmenter la taxe d'habitation pour récupérer
quelques miettes de taxe professionnelle.
Monsieur le ministre, la véritable liberté des collectivités, aujourd'hui,
c'est la décentralisation, mais avec les moyens financiers nécessaires, c'est
la déliaison absolue des taux et c'est une politique nouvelle de taxation des
actifs financiers sur une base réelle, efficace et, par conséquent,
crédible.
M. le président.
La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
Monsieur le ministre, j'ai bien écouté ce que vous avez dit tout à l'heure sur
la déliaison des taux. Je me réjouis que le Gouvernement propose une mesure
d'assouplissement du lien entre les taux des taxes locales. Cette disposition
s'inscrit, me semble-t-il, avec bonheur dans le courant de la décentralisation
que le Gouvernement conduit actuellement.
En effet, tout ce qui assouplit les contraintes des collectivités locales
contribue à renforcer l'autonomie de celles-ci. Je salue donc cette mesure,
mais je voudrais que nous allions plus loin : si l'on croit à la
décentralisation et à l'intercommunalité - je sais, monsieur le ministre, que
vous en êtes un farouche partisan -, il faut délier totalement les taux.
En effet, la création des intercommunalités à taxe professionnelle unique - ce
n'est qu'un exemple - oblige celles-ci à prévoir des financements pour réaliser
les investissements inscrits dans les contrats de plan. Or l'augmentation de
cette ressource dépend des décisions fiscales sur les taux des ménages prises
par les communes.
J'admets tout à fait qu'il faille associer les particuliers, les ménages et
les entreprises à la collecte des ressources fiscales nécessaires au
développement de nos collectivités. Le potentiel fiscal ou les intérêts des uns
ne sont cependant pas toujours ceux des autres, d'où la nécessité renforcée, me
semble-t-il, de délier ces taux.
Pour tenir compte des craintes qu'un usage abusif de ce dispositif pourrait
susciter chez les professionnels, je présente deux amendements à l'article 14.
L'un vise à étendre le champ de la déliaison en doublant le coefficient de
majoration du taux de taxe professionnelle par rapport au taux de taxe
d'habitation. L'autre tend à assouplir la « majoration spéciale » en majorant
le taux de taxe professionnelle moyen national servant de référence par un
coefficient multiplicateur qui permettrait à un plus grand nombre de
collectivités d'appliquer cette mesure, particulièrement aux EPCI dont le taux
se situe en dessous de la moyenne de leur catégorie.
En conclusion, monsieur le ministre, vous l'avez compris, je suis favorable à
la suppression totale des règles de liaison entre les taux. Je regrette que
vous n'ayez pas retenu cette mesure, mais je constate avec plaisir que le
dispositif proposé par le Gouvernement marque un début d'inversion de tendance.
Je souhaite que le Gouvernement aille plus loin, car son avancée me paraît
insuffisante et je compte sur votre compréhension et sur votre expérience de
président d'une communauté urbaine pour étendre cette déliaison et franchir
ainsi un pas supplémentaire sur le chemin de l'autonomie des collectivités
locales.
M. le président.
Je suis saisi de neuf amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune, mais, pour la clarté du débat, je les appellerai successivement.
L'amendement n° I-210, présenté par M. Mercier, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi cet article :
« I. - L'article 1636 B
sexies
du code général des impôts est ainsi
rédigé :
«
Art. 1636 B
sexies. - Sous réserve des dispositions des articles 1636
B
septies
et 1636 B
decies
les conseils généraux, les conseils
régionaux, les conseils municipaux et les organes délibérants des
établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre votent
chaque année les taux des taxes foncières, de la taxe d'habitation et, à
l'exception des conseils régionaux, de la taxe professionnelle. »
« II. - L'article 1636 B
sexies
A du code général des impôts est
abrogé.
« III. - 1. Les deuxième, troisième, quatrième, cinquième, sixième et septième
alinéas du II de l'article 1636 B
decies
sont supprimés.
« 2. Le premier alinéa du II dudit article est complété par les mots suivants
: "dans les limites définies à l'article 1636 B
septies
".
« IV. - Un rapport établissant un bilan de l'évolution comparée des bases et
des taux de taxe professionnelle, d'une part, de la taxe d'habitation et des
taxes foncières, d'autre part, sera adressé annuellement au Parlement. »
La parole est à M. Michel Mercier.
M. Michel Mercier.
Monsieur le ministre, vous avez, cet après-midi, lors du débat sur les
recettes des collectivités locales, conclu votre intervention en évoquant la
nécessité de rétablir la confiance entre l'Etat et les collectivités locales.
L'amendement n° I-210 vise, dans cet esprit, à supprimer la liaison qui existe
à l'heure actuelle entre les taux. Plusieurs arguments plaident en ce sens.
Tout d'abord, le projet de loi constitutionnelle relatif à l'organisation
décentralisée de la République, que le Sénat vient d'adopter, prévoit, dans son
article 6, que les collectivités locales pourront non seulement voter librement
les taux des impôts, mais aussi déterminer, au moins partiellement, leur
assiette. Si une collectivité peut établir les règles relatives à la
détermination de l'assiette d'un impôt, elle doit
a fortiori
pouvoir
fixer son taux.
Le Gouvernement, si j'ai bien compris, s'apprête à faire confiance aux
collectivités locales pour gérer les routes nationales, les personnels des
collèges, les hôpitaux et divers autres grands services publics auxquels nous
sommes tous attachés. Si nous, élus locaux, sommes capables de tout cela au
niveau local, il faut que nous soyons reconnus capables également de voter les
taux des impôts.
On pourrait nous objecter que les élus risquent d'être tentés de faire
supporter par l'entreprise le poids de l'impôt local plutôt que de le répartir
équitablement entre tous les contribuables.
Je voudrais faire justice de ce genre d'arguments.
Quant on connaît les moyens que déploient les élus locaux pour convaincre des
entreprises de s'implanter sur le territoire de leur commune et pour développer
l'emploi, on comprendrait mal que ces mêmes élus soient d'emblée enclins à
taxer les entreprises...
C'est un mauvais procès que l'on fait aux élus locaux et je terminerai,
monsieur le ministre, en disant que la confiance est la base de tout : faites
confiance aux élus locaux, personne ne sera déçu.
Les élus sont pleinement responsables, et la mesure que vous nous proposez
dans le projet de loi de finances pour 2003 est une bonne mesure ; c'est un
premier pas, mais, monsieur le ministre, pour réformer, il faut de l'audace.
Ayez l'audace d'accepter mon amendement !
M. le président.
L'amendement n° I-119 rectifié, présenté par MM. Saugey, du Luart, Bourdin,
Clouet, Lachenaud et Trucy, est ainsi libellé :
« Au début du I de cet article, ajouter deux alinéas ainsi rédigés :
« Le 1 du I de l'article 1636 B
sexies
du code général des impôts est
complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, dans les communes membres d'un établissement public de
coopération intercommunale faisant application pour la première année des
dispositions de l'article 1609
nonies
C et issu de la transformation
d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité
additionnelle, le taux de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, cette
année-là, peut être fixé dans la limite du taux voté l'année précédente par la
commune, majoré du taux voté également l'année précédente par l'établissement
public de coopération intercommunale. »
La parole est à M. François Trucy.
M. François Trucy.
J'ai la vague inquiétude, mes chers collègues, de ne pas allumer dans vos yeux
la même lumière que celle qui avait jailli tout à l'heure à l'écoute des propos
de M. le ministre et de M. le rapporteur général sur l'article 13, mais je vais
faire de mon mieux !
Un assouplissement des règles de lien s'appliquant à l'évolution des taux des
impôts communaux apparaît nécessaire lorsque les communes passent à la taxe
professionnelle unique dans le cadre de la coopération intercommunale.
Nombre d'élus locaux souhaitent en effet pouvoir augmenter la part communale
de la taxe d'habitation et des taxes foncières en parallèle à la suppression de
leur part communautaire.
Concrètement, ils souhaitent pouvoir augmenter les taux communaux d'une
fraction correspondant aux taux précédemment prélevés par l'établissement
public de coopération intercommunale à fiscalité additionnelle avant sa
transformation en communauté de communes à taxe professionnelle unique.
Cette opération, lorsqu'elle est réalisée, n'a aucune conséquence fiscale pour
les contribuables, car ceux-ci s'acquitteraient du même montant d'impôt. Elle
se heurte néanmoins parfois à la rigidité des règles de lien relatives à
l'évolution des taux des impôts communaux.
C'est ainsi que le dernier alinéa du 1 du paragraphe I de l'article 1636 B
sexies
du code général des impôts précise que « jusqu'à la date de la
prochaine révision, le taux de la taxe foncière sur les propriétés non bâties
ne peut augmenter plus ou diminuer moins que le taux de la taxe d'habitation
».
Or, la récupération par la commune du produit auparavant perçu par l'EPCI
implique parfois une augmentation du taux de la taxe foncière sur les
propriétés non bâties supérieure à celle du taux de la taxed'habitation.
Dans ces conditions, il est proposé d'introduire une dérogation à la règle de
lien fixée au dernier alinéa du 1 du paragraphe I de l'article 1636 B
sexies
du code général des impôts.
Cette dérogation serait réservée aux communes membres d'un EPCI se substituant
pour la première année aux communes pour l'application des dispositions
relatives à la taxe professionnelle et issu de la transformation d'un
établissement public de coopération intercommunale à fiscalité
additionnelle.
Elle serait en outre accordée à la condition que le taux de la taxe foncière
sur les propriétés non bâties soit, cette année-là, fixé dans la limite du taux
voté l'année précédente par la commune, majoré du taux voté également l'année
précédente par l'établissement public de coopération intercommunale.
Cette dérogation strictement encadrée ne remettrait pas fondamentalement en
cause les règles de lien s'appliquant à l'évolution des taux des impôts
communaux. Elle permettrait simplement de faciliter le passage à la taxe
professionnelle unique, en accordant une certaine souplesse d'action aux
communes concernées, tout en garantissant une neutralité fiscale aux
contribuables.
M. le président.
L'amendement n° I-205 rectifié
bis,
présenté par MM. Vanlerenberghe et
Mercier, Mme Létard et M. Valade, est ainsi libellé :
« I. - Dans le premier alinéa du texte proposé par le 1 du I de cet article
pour le 4 du I de l'article 1636 B
sexies
du code général des impôts,
remplacer les mots : "d'une fois et demie" par les mots : "de trois fois".
« II. - Compléter le premier alinéa dudit texte par la phrase suivante :
« Toutefois, si le taux d'augmentation ainsi obtenu est inférieur à 1 %, le
taux de taxe professionnelle peut augmenter au maximum de 1 %.
« III. - Supprimer le deuxième alinéa dudit texte. »
La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
Sans revenir sur les explications que j'ai données tout à l'heure, j'indique
que cet amendement, qui est une extension des mesures proposées par le
Gouvernement, vise à sortir du simple symbolisme en portant le coefficient de
majoration maximum à 3 au lieu de 1,5.
Dans tous les cas, il serait ainsi possible d'augmenter le taux de la taxe
professionnelle dans la limite de trois fois l'augmentation du taux de taxe
d'habitation, un autre de nos amendements prévoyant la possibilité d'augmenter
le taux de taxe professionnelle de 1 %, même en cas de stabilité des impôts des
ménages.
Le coefficient de majoration doit aussi s'appliquer les années qui suivent
l'application de la diminution sans lien des taux des ménages, avec toujours
une réfaction de 50 % sur le taux d'augmentation maximum.
Monsieur le ministre, cette proposition, qui ne délie pas aussi totalement les
taux que M. Mercier et moi-même l'aurions souhaité pour aller dans le sens de
la décentralisation voulue par le Gouvernement, me paraît mesurée et je compte
sur votre compréhension pour faire un geste en faveur des communautés, qu'il
s'agisse des communautés de communes, des communautés d'agglomération ou des
communautés urbaines à taxe professionnelle unique.
M. le président.
L'amendement n° I-211, présenté par M. Mercier, est ainsi libellé :
« I. - Dans le premier alinéa du texte proposé par le 1 du I de cet article
pour le 4 de l'article 1636 B
sexies
du code général des impôts,
remplacer les mots : "d'une fois et demie" par les mots : "de deux fois".
« II. - Dans le texte proposé par le 2 du I de cet article pour le III de
l'article 1636 B
sexies
A du même code, remplacer les mots : "d'une fois
et demie" par les mots : "de deux fois". »
La parole est à M. Michel Mercier.
M. Michel Mercier.
Dans le projet de loi de finances, vous faites, monsieur le ministre, un pas
et demi vers la liberté des collectivités territoriales. Je vous ai demandé de
faire tout le chemin, mais, si vous ne pouvez pas le parcourir en une seule
fois, je vous propose de faire deux pas plutôt que un et demi, ce qui est
vraiment peu.
Deux, c'est déjà mieux, et ce serait marquer une volonté ferme de se diriger
vers la totale liberté.
M. le président.
L'amendement n° I-105, présenté par M. Fréville, est ainsi libellé :
« Compléter le premier alinéa du texte proposé par le 1 du I de cet article
pour le 4 de l'article 1636 B
sexies
du code général des impôts par les
mots : « et peuvent faire varier librement leur taux de taxe professionnelle
lorsque leur taux global de taxe professionnelle est inférieur au taux global
moyen constaté l'année précédente au niveau national et ce, dans la limite
d'une augmentation maximale de 10 %. »
La parole est à M. Yves Fréville.
M. Yves Fréville.
J'ai entendu M. le ministre dire tout à l'heure qu'il fallait d'abord
simplifier la réglementation. Or, si un article du code général des impôts est
complexe, c'est bien celui qui expose les règles de liaison des taux !
J'ai entendu également notre collègue Michel Mercier dire que l'on pouvait
faire confiance aux collectivités locales pour avoir une politique raisonnable
en ce domaine.
Cependant, et M. le ministre le rappelait d'ailleurs cet après-midi, les
entreprises qui ont bénéficié de la réduction de la part « salaires » de la
taxe professionnelle craignent que cette réduction, qui a été faite en faveur
de l'emploi, ne soit compensée par une hausse des taux, et, pour ma part, je
crois que, si l'on peut faire confiance aux collectivités locales, il faut
malgré tout prévoir un garde-fou pour limiter l'augmentation des taux de taxe
professionnelle.
L'idée simple qui vient alors à l'esprit, c'est de considérer que lorsque le «
bloc » que constituent les communes, le département et la région a été
vertueux, c'est-à-dire lorsque la somme des taux qu'appliquent ces
collectivités est inférieure à la moyenne nationale, les collectivités locales
membres de cet ensemble vertueux peuvent librement fixer leur taux de taxe
professionnelle, dans la limite toutefois d'un seuil, que je propose de fixer à
10 %, mais cela peut être discuté.
De cette façon, on arriverait, me semble-t-il, à un équilibre entre les
collectivités locales, qui souhaitent pouvoir définir une politique fiscale
cohérente, et les entreprises, qui craignent une hausse des taux.
Nous ne ferons pas n'importe quoi, puisque le dispositif ne jouera que lorsque
le taux global sera inférieur à la moyenne, c'est-à-dire seulement pour les
collectivités « vertueuses ».
On arriverait ainsi à un équilibre entre la volonté de protéger les
entreprises et la nécessité de faire confiance aux collectivités locales.
M. le président.
L'amendement n° I-174, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Compléter le texte proposé par le 1 du I de cet article pour le 4 du I de
l'article 1636 B
sexies
du code général des impôts par un alinéa ainsi
rédigé :
« Toutefois, en l'absence d'augmentation du taux d'imposition de la taxe
d'habitation et des taxes foncières, les communes, les départements et les
organismes de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre peuvent
augmenter le taux d'imposition de la taxe professionnelle dans les limites
fixées par l'évolution de la formation brute de capital fixe, telle que définie
par la loi de finances. »
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils.
L'article 14 du projet de loi de finances porte sur la hausse modulée des taux
d'imposition locale.
Cette mesure est depuis de longues années au coeur du débat parlementaire,
puisque les parlementaires communistes des deux assemblées demandent
expressément qu'elle soit appliquée lors de la discussion de chaque loi de
finances, et je crois que de nombreux élus locaux sollicitent cette liberté en
même temps que cette responsabilité, car nous assumons nos responsabilités dans
ce domaine.
Le système fiscal local a connu ces derniers temps maints bouleversements,
qu'il s'agisse des dispositions correctrices des impositions, en matière de
taxe professionnelle comme de taxe d'habitation ou de foncier bâti, jusqu'à la
modification de l'assiette de l'impôt, la situation la plus significative de ce
point de vue étant celle qu'a créée la suppression de la part taxable des
salaires de la taxe professionnelle, dont les dernières conséquences se
manifesteront cette année.
Ce dispositif constitue d'ailleurs, comme nous l'avons souligné dans la
discussion générale, la principale source de réduction des impôts dans le
projet de loi de finances dont nous débattons depuis jeudi.
On peut s'interroger au demeurant sur sa portée réelle sur l'emploi, pourtant
sa motivation première, quand on prend connaissance de la longue liste des
plans sociaux qui affectent les entreprises de notre pays, y compris celles qui
réalisent d'importants bénéfices. Mais c'est sans doute là un autre débat qui
nous éloigne quelque peu de l'objet de cet amendement, encore que...
M. Gérard Braun.
Oui, c'est hors sujet !
Mme Marie-France Beaufils.
L'une des faiblesses, ou des limites si l'on préfère, de cet article 14 est en
effet de lier la hausse modulée de la taxe professionnelle - impôt au demeurant
assez largement pris en charge par le budget général - à l'augmentation des
autres impôts directs locaux.
Je rappelle d'ailleurs que les bases de la taxe d'habitation, de la taxe sur
le foncier bâti et de la taxe sur le foncier non bâti ont été augmentées dans
chaque loi de finances depuis plusieurs années, mais que la base de la taxe
professionnelle n'a pas évolué.
Il s'agit donc de demander aux ménages, auxquels s'appliquent pourtant des
dispositifs de correction de l'imposition sans commune mesure avec ceux dont
bénéficient les entreprises, un effort complémentaire dont ils subiront les
effets plus sûrement encore que les assujettis à la taxe professionnelle.
Or, l'expérience des dernières années l'a largement montré, l'économie
générale de la taxe professionnelle a profondément évolué, et la démarche n'est
donc pas parfaitement équilibrée. Que l'on sache, la valeur locative des
logements soumis tant à la taxe d'habitation qu'à la taxe foncière n'a pas
décru de 35 % en quatre ans !
Nous estimons nécessaire, dès lors, de prévoir la faculté d'augmenter la taxe
professionnelle, en tout cas son taux, en dehors de toute augmentation des
impôts auxquels sont assujettis les ménages.
Un point de plus sur la taxe foncière est plus difficilement supporté par le
contribuable qu'un point et demi de plus sur la taxe professionnelle ne l'est
par une entreprise dont la cotisation est plafonnée à la valeur ajoutée.
Comme la taxe professionnelle est devenue un impôt pesant presque
exclusivement sur le capital - il est d'ailleurs regrettable, mais nous y
reviendrons, qu'elle n'intègre pas le capital financier -, il nous a paru
logique de permettre, dans les limites de l'augmentation de l'investissement
des entreprises prévue par la loi de finances, aux collectivités locales de
faire varier leurs taux d'imposition, et ce librement.
Cette orientation permettra, au demeurant, d'asseoir et de stabiliser les
ressources des collectivités territoriales, qui sont appelées, dans le cadre
des futurs transferts de compétence liés à la décentralisation, à jouer un rôle
plus important encore dans la vie économique de la nation.
Elle permettera, en tenant compte de l'évolution autonome de la taxe
professionnelle au regard des autres impôts, de dégager des moyens bien utiles
pour les collectivités territoriales.
M. le président.
Les deux amendements suivants sont présentés par M. Fréville.
L'amendement n° I-106 est ainsi libellé :
« Après le 1 du I de cet article, insérer un 1
bis
ainsi rédigé :
« 1
bis
. - Après le 4 du I de l'article 1636 B
sexies
du code
général des impôts, il est inséré un alinéa 5 ainsi rédigé :
«
5.
En 2003, l'instance délibérante d'un établissement public de
coopération intercommunale faisant application des dispositions de l'article
1609
nonies
C du présent code fixe librement le taux de la taxe
professionnelle à condition que le produit attendu de cette taxe, majoré de la
compensation prévue au D de l'article 44 de la loi de finances n° 98-1266 du 30
décembre 1998 et de l'attribution de la première part du fonds national de
péréquation de la taxe professionnelle prévue au II de l'article 1648 B du
présent code, ne soit pas supérieur au produit voté de cette taxe en 2002,
majoré des mêmes compensation et attribution pour 2002.
« Les dispositions ci-dessus ne font pas obstacle à l'application des autres
dispositions du présent code, si elles permettent le vote d'un taux de taxe
professionnelle plus élevé. »
L'amendement n° I-107 est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le 1° du 3 du I de cet article :
« 1° Aux premier et troisième alinéas du II, les mots : "ainsi qu'aux 2 et 3
du I" sont remplacés par les mots : "ainsi qu'aux 2, 3, premier alinéa du 4 et
5". »
La parole est à M. Yves Fréville.
M. Yves Fréville.
L'amendement n° I-106 n'offre pas une solution générale au problème de la
liaison entre les taux, mais vise exclusivement les communautés à TPU qui ne
peuvent voter une augmentation du taux de la taxe professionnelle que si les
communes membres ont, l'année précédente - il y a donc un décalage d'un an -,
augmenté le taux de leur taxe d'habitation.
Il faut savoir qu'une bombe est en cours de fabrication.
Nous supprimons en effet la part « salaires » de la taxe professionnelle des
grandes entreprises, mais la compensation qui sera accordée sera non pas
fonction de ce que rapporte aujourd'hui la taxe professionnelle, mais fonction
de ce qu'elle rapportait il y a quatre années ! On « gomme » donc les
augmentations de salaires, les créations d'emplois, voire d'entreprises,
intervenues pendant quatre ans.
Les communautés concernées devront donc gérer des ressources en diminution,
car comment pourraient-elles obtenir ne serait-ce que les mêmes ressources que
l'année passée ? Et le problème se pose partout.
Les règles de déliaison que nous propose le Gouvernement permettront-elles de
résoudre ce problème ? J'ai appris à l'école primaire que zéro multiplié par
1,5 faisait zéro et que, multiplié par trois comme le propose M. Mercier, zéro
fait encore zéro.
Que va-t-il arriver ? Il n'est pas question d'augmenter les taux de taxe
professionnelle ou les autres taux pour équilibrer le budget puisque, l'année
précédente, les communes n'ont pas eu recours à cette solution.
J'en tire une conclusion très simple.
Soit les communautés urbaines et autres, notamment les EPCI, monsieur le
ministre, passent à la fiscalité mixte et décident d'équilibrer leur budget en
augmentant la taxe d'habitation, auquel cas je vous promets que la
décentralisation deviendra très impopulaire.
Soit on déclare qu'à condition que les recettes ne changent pas et qu'il n'y
ait pas d'augmentation du produit de la taxe professionnelle majorée de la
compensation des salaires il est possible de délier les taux.
Tel est l'objet de cet amendement, et, personnellement, je ne vois pas d'autre
solution que de déclarer que la liberté ne peut être accordée qu'à produit
total constant.
Quant à l'amendement n° I-107, il est la conséquence logique de l'amendement
n° I-106 et n'appelle pas d'autres explications.
M. le président.
L'amendement n° I-206 rectifié
bis,
présenté par MM. Vanlerenberghe et
Mercier, Mme Létard et M. Valade, est ainsi libellé :
« Après le 3 du I de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« 4. Dans la première phrase du premier alinéa du 3 du I de l'article 1636 B
sexies
du code général des impôts, les mots : "est inférieur à la
moyenne constatée pour cette taxe l'année précédente" sont remplacés par les
mots : "est inférieur à 120 % de la moyenne constatée pour cette taxe l'année
précédente". »
La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
Il s'agit de permettre l'application à un plus grand nombre de collectivités
locales et d'EPCI de la majoration spéciale en multipliant le taux moyen de
taxe professionnelle national servant de référence par un coefficient
multiplicateur le faisant passer à 120 % de la moyenne.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je voudrais tout d'abord rappeler l'orientation
adoptée par la commission à propos de cet article 14, auquel elle est
naturellement favorable.
Nous estimons qu'une certaine déliaison des taux est opportune et qu'elle va
dans le bon sens. A différentes reprises déjà, nous avons constaté que des
dispositifs trop encadrés étaient antinomiques de la prise en compte des
évolutions économiques et financières nécessaires, et, surtout, reposaient sur
un principe de suspicion à l'égard des gestionnaires de budgets locaux.
Cette suspicion n'est pas compatible, comme l'a dit très justement Michel
Mercier, avec le renforcement de la décentralisation programmée pour un avenir
proche.
La commission des finances aborde donc dans un esprit positif l'article 14
qui, pour nous, représente un jalon vers un système plus souple.
Il convient de rappeler que nous avons déjà oeuvré pour un tel
assouplissement.
M. Michel Mercier.
En effet !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cela n'a pas encore été dit dans le débat, mais, en
vérité, l'article 14 ne fait que transposer à toutes les collectivités un
amendement voté par le Sénat l'an dernier...
M. Michel Mercier.
Absolument !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
... sur l'initiative de Michel Mercier, amendement
qui visait à desserrer le système en faveur des seuls départements. Nous avions
en effet particulièrement évoqué les dépenses prévisionnelles liées à l'APA, et
cela correspondait à une nécessité manifeste au sein de certains conseils
généraux.
C'est donc bien au Sénat, sur proposition de la commission des finances, que
l'on a commencé à desserrer le système, et le Gouvernement, par esprit de
continuité - cela est d'ailleurs bien compréhensible -, se borne ici, par le
biais de l'article 14, à transposer à toutes les collectivités territoriales ce
que l'on a permis l'an dernier pour les seuls départements.
Je voudrais à présent aborder les questions d'opportunité et de calendrier :
c'est là que, peut-être, certains chemins pourraient se séparer.
Le Gouvernement propose de poser un nouveau jalon, après celui de l'année
dernière. Il sait, comme nous, que la conjoncture économique qui prévaudra au
cours de l'année 2003 est difficilement prévisible et que les décisions
d'investissement sont bloquées au sein de certaines entreprises.
Dès lors, faut-il aller dans le sens d'une déliaison encore plus large que
celle qui est prévue par l'article 14 ? Est-ce un bon signal à adresser aux
entreprises ? C'est une question que l'on peut très légitimement se poser,
compte tenu des incertitudes qui pèsent sur la croissance, compte tenu de
l'étroitesse des marges de manoeuvre pour 2003, qui n'ont probablement pas
permis au Gouvernement d'adopter, en matière de politique fiscale, toutes les
mesures qui auraient normalement été nécessaires pour prendre en compte
certaines demandes justifiées des entreprises, compte tenu du fait que les
marges de manoeuvre présentées par les finances publiques n'ont pas permis, en
particulier, d'alléger l'imposition des sociétés, compte tenu de ce que la
seule véritable mesure de réduction de la fiscalité pesant sur les entreprises
- et elle est loin d'être négligeable - consiste en la dernière étape de la
suppression de la part salaires de la taxe professionnelle.
A cet égard, reconnaissons, mes chers collègues, que la politique fiscale qui
sera mise en oeuvre en 2003 ne comportera pas d'autre mesure favorable aux
entreprises, mais en présentera au contraire une qui leur sera quelque peu
préjudiciable, à savoir la réduction du taux de l'avoir fiscal applicable aux
personnes morales.
Compte tenu de tous ces éléments, la commission des finances s'est demandé si
accepter une déliaison plus large des taux constituait vraiment un signal
positif pour les entreprises. Faut-il aller au-delà de la transposition à
l'ensemble des collectivités du « système Mercier » départemental de 2001 ?
Faut-il aller plus loin que ce que prévoit l'article 14 ? Faut-il faire plus
que poser ce jalon ? Peut-être la commission des finances est-elle timide,
peut-être est-elle simplement raisonnable, mais en tout cas la majorité de ses
membres a estimé, après délibération, que les dispositions de l'article 14
représentaient déjà un bon acquis en termes d'accroissement de la liberté de
gestion et qu'aller plus loin reviendrait à s'exposer à un certain nombre de
reproches de la part des milieux économiques, au moment même où l'on prêche
pour une reprise de l'activité et où l'on escompte un taux de croissance de 2,5
%, qui ne pourra être atteint que grâce à de nombreuses décisions optimistes
des investisseurs et de ceux qui déterminent la conjoncture au sein des
différentes branches de l'économie.
Cela étant dit, l'amendement n° I-210 de M. Michel Mercier pousse la logique
jusqu'à son terme, puisqu'il tend à supprimer totalement l'encadrement des taux
et le mécanisme de liaison de ces derniers. C'est assurément la proposition la
plus claire qui ait été présentée sur cet article. Il conviendra sans doute de
mettre en oeuvre un jour cette mesure, mais peut-être dans une conjoncture «
psychologiquement » plus favorable.
Telle est l'analyse de la commission sur cet amendement, monsieur Mercier. Il
désigne l'objectif vers lequel il faut tendre, mais nous ne pensons pas que la
situation soit suffisamment favorable pour que l'on puisse mettre en place
cette mesure en 2003. Je ne peux vous en dire plus : ce n'est que notre
sentiment, peut-être est-il irrationnel, mais il a été partagé par la majorité
des membres de la commission des finances lorsque celle-ci a délibéré de votre
amendement.
L'amendement n° I-119 rectifié, présenté par M. François Trucy, ne concerne
pas la taxe professionnelle. Il prévoit une déliaison encadrée des taux de la
taxe d'habitation et de la taxe foncière sur les propriétés non bâties dans les
communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale à taxe
professionnelle unique. La commission, sur cet amendement, s'en remet à l'avis
du Gouvernement.
L'amendement n° I-205 rectifié
bis,
qui a été exposé par notre collègue
Jean-Marie Vanlerenberghe, est une version...
M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
Majorée !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
... majorée, en effet, de l'article 14, même s'il
demeure néanmoins plus en retrait que l'amendement n° I-210 de M. Michel
Mercier dans toute sa pureté, si je puis dire. Il prévoit une déliaison des
taux, avec une mesure d'assouplissement supplémentaire du lien entre ceux-ci.
Je ne peux que renvoyer, à son propos, au commentaire général que j'ai
formulé.
Il en va de même pour l'amendement n° I-211.
Quant à l'amendement n° I-105 de notre collègue Yves Fréville, il tend à
autoriser une variation libre du taux de taxe professionnelle pour les
collectivités locales dont le taux de taxe professionnelle est faible,
c'est-à-dire inférieur au taux global moyen constaté l'année précédente au
niveau national. Le taux de taxe professionnelle, dans cette conception, ne
pourrait cependant augmenter de plus de 10 %.
Cette proposition est assurément intéressante si l'on cherche à mettre en
place un dispositif de nature à régler des problèmes particuliers sans assumer
complètement une déliaison globale. La commission a considéré qu'une telle
mesure pourrait sans doute permettre de faciliter les choses pour certaines
collectivités dont le taux de taxe professionnelle se trouve bloqué à un niveau
extrêmement faible. Le procédé peut se révéler tout à fait intéressant pour
régler certaines situations particulières. L'effet n'en serait pas aussi global
et important que celui qu'entraînerait l'application du dispositif présenté par
les amendements de M. Mercier, mais peut-être cette solution mérite-t-elle
d'être étudiée. Nous entendrons avec intérêt l'avis du Gouvernement sur
l'amendement n° I-105.
S'agissant de l'amendement n° I-174 du groupe CRC, la commission lui oppose un
avis tout à fait défavorable, car il vise à taxer les entreprises à raison de
leurs investissements, ce qui serait bien sûr antiéconomique.
M. Gérard Braun.
Bien sûr !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
En ce qui concerne l'amendement n° I-106 de M.
Fréville, il a pour objet de permettre aux établissements publics de
coopération intercommunale à taxe professionnelle unique de compenser les
pertes de recettes découlant de la dernière étape de la suppression de la part
« salaires » de la taxe professionnelle. En effet, cette compensation est
établie à partir des bases de 1999, alors que la réalité économique a beaucoup
évolué depuis cette date.
Par conséquent, il est ici proposé, pour l'année 2003, qui marque la dernière
phase, comme on le sait, de suppression de la part « salaires » de la taxe
professionnelle, de permettre à ces EPCI d'ajuster librement leur taux de taxe
professionnelle, à condition que cela n'entraîne pas d'augmentation des
recettes tirées de cette dernière par rapport à l'année 2002. Cet amendement
met en évidence un véritable problème, qui touche de manière particulièrement
aiguë les communes disposant d'importantes recettes de taxe professionnelle,
problème que l'assouplissement prévu par l'article 14 ne permet pas de
résoudre. En effet, les dispositions de cet article ne pourraient s'appliquer,
en 2003, que pour les communes qui auraient relevé préventivement le montant de
la taxe d'habitation en 2002.
La commission sera donc particulièrement attentive à l'avis du Gouvernement
sur cet amendement de M. Yves Fréville.
L'amendement n° I-107 est de pure coordination avec le précédent.
Enfin, l'amendement n° I-206 rectifié
bis
de MM. Vanlerenberghe et
Mercier tend à assouplir les conditions de recours au dispositif de majoration
spéciale de la taxe professionnelle. Les départements, communes et EPCI à taxe
professionnelle unique peuvent majorer leur taux de taxe professionnelle à
hauteur de 5 %, au plus, de la moyenne constatée pour cette taxe, l'année
précédente, dans les collectivités de même nature. Il est pour cela
actuellement requis, en particulier, que le taux de la taxe professionnelle
soit inférieur à cette même moyenne. Nos collègues proposent d'assouplir cette
limitation en prévoyant que le taux de taxe professionnelle reste inférieur à
120 % de la moyenne constatée l'année précédente dans les collectivités de même
nature.
Le commentaire que je ferai à ce sujet sera bien sûr identique à celui que
j'ai formulé sur l'ensemble des dispositifs de déliaison des taux.
Telles sont donc les analyses de la commission. Nous sommes, dans l'immédiat,
très curieux de connaître l'avis du Gouvernement. Celui-ci, au regard de son
approche de la politique économique et des relations avec les entreprises en
2003, est-il prêt à aller un peu au-delà du dispositif de l'article 14 ? Des
éléments nouveaux sont-ils apparus depuis la préparation du projet de loi de
finances, monsieur le ministre, dans votre réflexion sur ces différents sujets
?
M. Gérard Braun.
Très bien !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Le Gouvernement a fait le choix de soutenir l'économie
et l'emploi, et il compte précisément sur les entreprises pour être à la pointe
de ce combat. Il lui semble que la liberté est sans doute le meilleur vecteur
pour atteindre les objectifs qu'il a fixés : liberté de l'économie ; liberté
pour les entreprises, afin qu'elles puissent se développer et répondre à ce qui
est la préoccupation essentielle des Français aujourd'hui, à savoir l'emploi ;
liberté aussi pour les collectivités locales, dans le cadre de
l'approfondissement de la décentralisation qui est engagé et qui est l'une des
orientations principales arrêtées par le Gouvernement.
Je me tournerai tout d'abord vers Mme Beaudeau, pour lui dire qu'il est
paradoxal de voir les membres du groupe CRC se plaindre de la liberté qui est
offerte aux collectivités locales en matière de fixation des taux. C'est là une
surprise pour le Gouvernement.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Nous trouvons que cette liberté est insuffisante !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Dans ce cas, les choses sont plus claires ! Le compte
rendu intégral de nos débats gardera la trace de votre déclaration !
Quoi qu'il en soit, madame Beaudeau, il n'y a aucun machiavélisme de la part
du Gouvernement. Ce serait, en somme, lui prêter des qualités qu'il n'a pas !
Le Gouvernement est sincère, et il n'entend pas, par le biais de la liberté
offerte en matière de fixation des taux, faire accepter des transferts de
charges non compensés en laissant aux collectivités le soin de relever les
taux. Tel n'est pas son objectif, et je réponds par là même à la préoccupation
exprimée tout à l'heure par M. Mercier.
M. Jean-François Le Grand.
Très bien !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Mesdames, messieurs les sénateurs, une telle approche
est absolument à l'opposé des intentions du Gouvernement.
(Applaudissements
sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Il ne s'agit
en aucune façon de donner aux collectivités locales une liberté qui les
amènerait à assurer la compensation de charges dont l'Etat souhaiterait se
délester de manière rampante.
M. Jean-François Le Grand.
Subrepticement !
M. Jacques Legendre.
Cela va mieux en le disant !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Il faut que toute ambiguïté soit levée à cet égard.
M. Jean-François Le Grand.
Très bien ! C'est parfait !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Par ailleurs, M. Mercier, qui devient la référence sur
ce sujet, puisqu'il en traitera au nom de la commission des finances lors de
l'examen de la deuxième partie du projet de budget, a insisté sur la nécessité
d'établir une relation de confiance entre l'Etat et les collectivités
locales.
La conviction profonde du Gouvernement est que l'on ne peut affirmer que les
collectivités locales sont mieux placées que l'Etat pour assumer un certain
nombre de missions publiques, parce qu'elles sont plus proches de nos
concitoyens et qu'elles leur rendent un meilleur service, avec un rapport «
coût sur efficacité » plus favorable, en raison même de cette proximité, tout
en les tenant pour incapables de fixer de manière responsable le taux des
impôts qu'elles lèvent. Le Gouvernement refuse de s'inscrire dans une telle
démarche.
J'ai sur ce sujet des convictions personnelles très fortes. Il y a des
logiques contre lesquelles il ne faut pas aller. La réforme constitutionnelle a
pour objet de transférer aux collectivités territoriales des responsabilités
nouvelles, ou de leur proposer d'en accepter, ainsi que de leur conférer de
véritables ressources, dont elles auront la maîtrise et qu'elles devront lever.
Elles devront donc pleinement assumer leurs responsabilités devant les
Français. Si les mécanismes qui régissent l'exercice des responsabilités
territoriales sont tellement complexes que cela amène le dépôt de très nombreux
amendements, au point que l'on ne s'y retrouve plus, il ne s'agit pas d'une
vraie liberté.
Cela étant, on ne peut peut-être pas, et je vais sans doute décevoir M.
Mercier en disant ceci, passer d'un système totalement administré et régi par
la loi à un système de complète liberté.
En effet, le régime totalement administré et « verrouillé » qui a prévalu
jusqu'à présent a empêché les ajustements de s'opérer au long des années. Par
conséquent, la tentation des collectivités territoriales bénéficiant d'une
liberté toute neuve sera de procéder à ces ajustements en l'espace d'une seule
année, de manière brutale. Le risque sera alors que le cumul de ces ajustements
ne provoque un emballement fiscal. En tout cas, telle est la crainte exprimée
par les entreprises, sur laquelle M. le rapporteur général a voulu attirer
l'attention du Sénat.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Compte tenu de la conjoncture, monsieur le ministre
!
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
La conjoncture est un facteur supplémentaire, en
effet.
Je conclurai cette sorte de propos introductif en revenant sur l'invitation à
l'audace de M. Mercier. Je lui répondrai qu'il en fallait un peu pour
introduire la déliaison dans ce projet de loi de finances, puisque, depuis
vingt-deux ans, nous nous étions interdit d'évoquer l'idée de liberté.
MM. Gérard Cornu et Francis Giraud.
C'est vrai !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Au bout de vingt-deux ans, nous ouvrons la porte qui
donne sur la liberté, la question étant de savoir si nous l'ouvrons
complètement ou partiellement. Le Gouvernement propose une ouverture partielle,
afin que la transition se fasse dans des conditions raisonnables.
Ma présentation du point de vue du Gouvernement aura été un peu longue, mais
il me paraissait nécessaire d'éviter toute ambiguïté. J'en viens maintenant aux
amendements.
Les amendements de M. Mercier présentent une gradation. Le service de la
séance ayant le génie de les classer par ordre de portée décroissante, le
premier d'entre eux prévoit d'octroyer une liberté totale.
J'indiquerai, à la suite de M. le rapporteur général, qu'il serait peut-être
trop audacieux, pour le coup, de passer d'un régime totalement organisé par la
loi à un régime de complète liberté, eu égard au risque, que j'ai évoqué à
l'instant, de voir certaines collectivités locales procéder à des corrections
brutales et immédiates.
Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° I-210. Je regrette de
devoir m'exprimer en ce sens, parce que je sais que M. Mercier est de ceux qui
appellent les collectivités territoriales à la sagesse fiscale.
M. Mercier m'a d'ailleurs fait observer, à l'occasion d'une discussion
informelle, que les élus locaux que nous sommes, pour nombre d'entre nous,
s'épuisent à proposer des exonérations de taxe professionnelle aux entreprises
qu'ils veulent accueillir sur le territoire de leurs collectivités.
(Tout à
fait ! sur les travées du RPR.)
Les entreprises ne les refusent pas, en
tout cas dans mon département. Alors que, comme je viens de le dire, nous nous
épuisons à procéder à des exonérations de taxe professionnelle, pour cinq
années dans certains cas, il est assez extraordinaire que nous en venions
corrélativement à craindre une majoration disproportionnée des taux. Cela
révèle une forme de contradiction, voire de schizophrénie.
L'amendement n° I-119 rectifié est d'une autre essence car il vise à faciliter
le passage au régime de la taxe professionnelle unique. Ceux qui s'y sont
essayés ont pu mesurer que, parfois, ce passage était quasiment impossible du
fait de la complexité des règles qui régissent la matière. L'amendement
présenté par M. Trucy tend à lever ces difficultés, mais je crains que sa
rédaction ne soit trop large. Cela me conduit, à ce stade du débat, à demander
le retrait de cet amendement. A défaut, je demanderais au Sénat de le rejeter.
Cela étant dit, je suis prêt à écouter M. Trucy s'il souhaite m'apporter des
précisions supplémentaires.
J'en viens à l'amendement n° I-205 rectifié
bis
, qui est en quelque
sorte l'amendement Mercier dans une version atténuée et qui a été présenté par
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. En dépit de l'effort de réduction de la limite
d'augmentation, nous sommes au-delà de ce qui a constitué l'équilibre dans la
rédaction initiale du Gouvernement. Aussi, je demande à M. Vanlerenberghe de
bien vouloir retirer cet amendement, sinon le Gouvernement émettra un avis
défavorable.
S'agissant de l'amendement n° I-211, je ferai la même réponse.
En ce qui concerne l'amendement n° I-105, j'ai compris, après que M. le
rapporteur général l'a dit, que cet amendement vise à régler non pas tous les
problèmes, mais des situations tout à fait particulières. Aussi, je m'en
remettrai à la sagesse du Sénat.
Par ailleurs, j'émets un avis défavorable sur l'amendement n° I-174.
L'amendement n° I-106 a pour objet, lui aussi, de résoudre des problèmes
spécifiques et il n'emporte pas une orientation générale s'agissant du
dispositif que nous examinons. Aussi je m'en remets à la sagesse du Sénat.
Quant à l'amendement n° I-107, c'est un amendement de conséquence. Donc, je
recommanderai au Sénat d'avoir une attitude identique sur les amendements n°s
I-106 et I-107.
S'agissant de l'amendement n° I-206 rectifié
bis
, je demande à M.
Jean-Marie Vanlerenberghe de bien vouloir le retirer. A défaut, je demanderai
au Sénat de le rejeter.
Monsieur le président, j'ai été long, ce qui montre que je suis embarrassé. En
effet, je souhaiterais concilier deux objectifs. Le premier consiste à marquer
la confiance du Gouvernement à l'endroit des collectivités territoriales.
(M. Thierry Foucaud sourit.)
Ne souriez pas, monsieur Foucaud, c'est
très important. Nous ne pourrons réussir la décentralisation sans confiance
entre les collectivités territoriales et l'Etat. Le second objectif consiste à
ne pas nous engager dans un relèvement de nos prélèvements obligatoires.
Nous devons donc concilier ces deux objectifs. C'est ce qui a conduit le
Gouvernement à procéder en deux étapes. Il s'agit, dans un premier temps,
d'étudier en détail la situation. Il s'agit, dans un second temps, de passer à
la liberté complète pour les collectivités locales.
Voilà, à ce point de la discussion, ce que je voulais vous dire, mesdames,
messieurs les sénateurs. Il faudrait que vous reteniez que la porte de la
liberté a été entrouverte. C'est déjà un premier combat réussi pour la liberté
des gestionnaires locaux.
M. Philippe Marini,
rapporteur général,
et M. Gérard Braun.
Très bien !
M. le président.
Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission émet un avis défavorable sur les
amendements n°s I-210, I-119 rectifié, I-205 rectifié
bis
et I-211.
S'agissant de l'amendement n° I-105, elle émet un avis de sagesse positive.
Par ailleurs, elle est défavorable à l'amendement n° I-174.
S'agissant de l'amendement n° I-106, elle émet un avis de sagesse, avec une
nuance positive. Elle émet le même avis sur l'amendement n° I-107, puisqu'il
s'agit d'un amendement de coordination.
Enfin, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° I-206
rectifié
bis
.
M. le président.
Monsieur Michel Mercier, l'amendement n° I-210 est-il maintenu ?
M. Michel Mercier.
M. le ministre et M. le rapporteur général viennent, de façon excellente et
d'une manière particulièrement brillante, de me rappeler qu'il ne sert à rien
d'avoir raison trop tôt. C'est une vieille règle !
Avant de vous faire part de ma décision, monsieur le président, je souhaite
m'adresser à M. le rapporteur général. J'ai toujours compris, monsieur Marini,
que, par philosophie, vous étiez, à l'instar de M. le ministre, opposé au
régime de l'administration des prix.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Certes !
M. Michel Mercier.
Pour ma part, je pense que seule la liberté responsabilise. Ouvrir la liberté
jusqu'à une fois et demie signifie que l'on peut aller à une fois et demie. Si
vous laissez les gens libres, ils n'iront peut-être pas jusque-là ! En
l'occurrence, vous donnez une indication forte en précisant que l'on peut aller
sans problème jusqu'à une fois et demie sans gêner les entreprises. C'est votre
choix.
Je pense, au contraire, que la liberté est responsabilisante, que fixer des
règles administratives est déresponsabilisant et conduit la collectivité
locale, comme l'entreprise, à atteindre le prix limite autorisé. Je suis
libéral. Je considère que la liberté permet à chacun de trouver ses propres
limites. Je conçois la cohérence de votre proposition, puisque vous émettez un
avis défavorable sur tous nos amendements.
Monsieur le ministre, j'appartiens à un groupe, l'Union centriste, qui se veut
l'allié le plus loyal du Gouvernement.
M. Jean Arthuis,
président de la commission.
Très bien !
M. Michel Mercier.
Je ne voudrais pas que l'on puisse penser, de quelque façon que ce soit, que
nous voulons gêner l'action que l'Etat veut mener pour maintenir l'emploi et
réduire le chômage. L'idée selon laquelle les collectivités locales
augmenteraient les impôts des entreprises est une idée archaïque. Aujourd'hui,
elles ont trop envie d'avoir des emplois sur leur territoire pour augmenter
l'impôt uniquement afin d'avoir des ressources.
Ma loyauté politique à l'égard du Gouvernement me conduit tout naturellement à
retirer mon amendement.
(Applaudissements sur plusieurs travées de l'Union
centriste et du RPR.)
M. le président.
L'amendement n° I-210 est retiré.
Monsieur Vanlerenberghe, l'amendement n° I-205 rectifié
bis
est-il
maintenu ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
Un peu plus d'audace n'aurait desservi ni les entreprises ni les collectivités
locales. Une légère augmentation de la taxe professionnelle - et on peut faire
confiance aux responsables des collectivités pour en mesurer les effets car ils
sont les mieux placés pour ce faire - peut avoir un formidable effet de levier.
Je constate dans mon département que l'effet de levier représente cinq à six
fois l'investissement. Aussi, une faible augmentation de la taxe
professionnelle peut conduire à des investissements considérables dans les cinq
ans à venir. Or, nous le savons bien, c'est d'un manque d'investissement dont
la France est malade. Il faut de l'investissement pour relancer l'économie et
développer l'emploi.
Je ne comprends donc pas cette prudence, même si je mesure le premier pas
accompli et note que, comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, la porte est
entrouverte. Je souhaiterais que vous nous disiez, si c'est possible, quand la
porte s'ouvrira complètement sur la déliaison totale. Vous avez fait une
promesse. Il serait peut-être bon de nous donner un rendez-vous pour que nous
puissions savoir quand elle sera appliquée.
Cela étant dit, pour reprendre ce qu'a dit notre ami Michel Mercier tout à
l'heure, j'apporte un soutien fidèle au Gouvernement et, tout en souhaitant que
ce que je viens de dire soit entendu, je retire, par loyauté envers lui, cet
amendement.
MM. Gérard Braun et Jacques Legendre.
Très bien !
M. le président.
L'amendement n° I-205 rectifié
bis
est retiré.
Monsieur Trucy, l'amendement n° I-119 rectifié est-il maintenu ?
M. François Trucy.
J'ai entendu, de la part de M. le ministre et de M. le rapporteur général,
deux choses : d'abord, qu'il ne fallait pas avoir raison trop tôt ; ensuite,
qu'un amendement ne devait pas être trop large. Aussi, je retire cet
amendement.
(M. Joël Bourdin applaudit.)
M. le président.
L'amendement n° I-119 rectifié est retiré.
Monsieur Michel Mercier, l'amendement n° I-211 est-il maintenu ?
M. Michel Mercier.
Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président.
L'amendement n° I-211 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° I-105.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote sur l'amendement
n° I-174.
M. Thierry Foucaud.
Monsieur le ministre, si je souriais tout à l'heure, c'était non pas pour me
moquer, car je vous respecte, mais simplement pour marquer mon désaccord.
Cela étant dit, compte tenu de ce que nous venons d'entendre, j'ai envie de
dire : « Circulez, il n'y a rien à voir ! » Depuis le début du débat, en effet,
les amendements, notamment ceux que présente la majorité sénatoriale, sont tous
retirés. Tout à l'heure, j'entendais parler de liberté. On peut s'interroger à
cet égard.
Pour sa part, le groupe communiste républicain et citoyen pose tous les ans la
question de la déliaison des taux. Si j'ai bien suivi, dans la discussion que
nous avons eue sur les collectivités locales, il a été question de l'enjeu de
la décentralisation que sont la démocratie et l'amélioration des services
publics. Or si l'on veut améliorer les services publics, il faut quelques
moyens. Et si l'on veut quelques moyens, je crois qu'il faut - à l'instar de la
majorité ici présente, mais elle ne votera pas en ce sens, étant donné cette «
liberté » limitée - des moyens supplémentaires, et pour cela la déliaison
s'impose.
Je constate que, depuis le début de nos travaux, lorsque nous posons des
questions, la réponse est toujours la même : il ne faut pas toucher à l'ISF ;
il ne faut pas non plus toucher à la baisse de l'impôt sur le revenu pour les
tranches les plus élevées du barème ; il ne faut pas toucher à la réduction
d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile. Or il faudrait accorder aux
collectivités des moyens supplémentaires pour assurer la gestion des
crèches.
Je crois que le fond - je le répète -, c'est une idée de classe, c'est la
protection des possédants. En ce sens, la politique qui nous est présentée est
totalement libérale, notamment à l'égard des collectivités locales.
S'agissant de la loi sur les EPCI, rappelez-vous quelle avait été la position
de notre groupe. Nous avions dit : qu'en sera-t-il du financement dans les
années 2002, 2003 et 2004 ? Or nous nous trouvons aujourd'hui devant cette
situation. Monsieur le rapporteur général, il faut aussi écouter les
propositions que font les uns et les autres en ce qui concerne les moyens de
fonctionnement de nos collectivités aujourd'hui.
La question de la déliaison des taux est fondamentale. Ainsi, lorsque ma
commune n'était pas soumise au régime de la TPU, elle touchait 550 000 francs
quand elle levait 1 % d'impôt. Aujourd'hui, alors qu'elle est soumise à ce
régime, elle perçoit 220 000 francs lorsqu'elle lève 1 % d'impôt. Mais d'où
proviennent ces 220 000 francs ? Ce sont 220 000 francs d'impôts sur les
ménages !
M. Gérard Delfau.
Bien sûr !
M. Thierry Foucaud.
Les communes ne peuvent plus toucher à la taxe professionnelle. Or l'impôt qui
a le plus baissé en France au cours des dernières années, c'est bien la taxe
professionnelle. Si nous continuons ainsi, seuls les ménages paieront la note.
Voilà le problème tel qu'il faut l'exposer.
Il convient de revenir sur les déviances comme celle que je citais tout à
l'heure dans mon intervention sur les collectivités locales et qui a consisté,
dans le cadre du pacte de stabilité, à faire 13 milliards d'économies sur les
collectivités locales. Aujourd'hui, les collectivités ne veulent pas de cette
politique-là. Majoritairement, dans cette assemblée, sur les travées de la
gauche comme sur celles de la droite, nous n'en voulons pas non plus. Nous
souhaitons pouvoir agir librement, délier nos taux et taxer les entreprises qui
sont implantées sur le territoire de nos collectivités.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-174.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-106.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-107.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Monsieur Vanlerenberghe, l'amendement n° I-206 rectifié
bis
est-il
maintenu ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président.
L'amendement n° I-206 rectifié
bis
est retiré.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Tout à l'heure, M. Jean-Marie Vanlerenberghe m'a posé
une question. Aussi, je lui dois une réponse. En octobre prochain, monsieur le
sénateur, je vous proposerai, comme le texte le prévoit, le rapport qui vous
décrira les évolutions de la taxe professionnelle sur l'ensemble des
collectivités territoriales. Le prochain projet de loi de finances sera
l'occasion d'examiner ce rapport et, pour le Parlement, d'en tirer toutes les
conséquences, y compris d'aller plus loin s'agissant de l'ouverture de la
porte, si le rapport en question le permet.
M. le président.
La parole est à M. Philippe Adnot, pour explication de vote sur l'article.
M. Philippe Adnot.
Je voudrais apporter mon soutien à M. le ministre.
La déliaison des taux est absolument indispensable. Il existe en effet des
situations tellement sclérosées que le seul moyen de s'en sortir est de
repasser par le taux zéro. Il est évident que, dans certaines collectivités,
c'est tout à fait impossible, de sorte que l'on reste dans des situations
figées qui sont intenables.
Au demeurant, il est clair que la déliaison des taux ne peut se concevoir que
si l'on prévoit un encadrement de la liberté.
Si les gouvernements précédents ont été obligés de baisser la taxe
professionnelle, c'est parce qu'un certain nombre de collectivités,
philosophiquement et idéologiquement, avaient chargé la barque à tel point que,
dans certains cas, le taux de la taxe professionnelle dépassait les 30 %.
La situation était devenue telle qu'il a fallu transférer sur le contribuable
national ce que les excès de certaines collectivités avaient engendré au niveau
local. Voilà la vérité.
On pourrait d'ailleurs dessiner la carte politique des collectivités qui, par
idéologie, avaient tellement chargé la barque contre les entreprises qu'il a
fallu rectifier le tir.
(Protestations sur les travées du groupe
CRC.)
Cela étant, une chose est claire : si demain on doit donner de la liberté, il
faut que ce soit dans un cadre. On ne peut pas jouer s'il n'y a pas de règles
du jeu. On ne peut pas demander la liberté sans s'assurer que ceux qui sont
très riches n'auront pas un minimum d'impôt à payer. Qu'est-ce que cela veut
dire la liberté totale ? Que ceux qui sont très riches ne lèvent pas l'impôt,
touchent quand même des dotations d'Etat - c'est la situation actuelle - et
font du dumping fiscal. Et ceux qui ne peuvent pas faire autrement sont obligés
de fixer des impôts extrêmement élevés.
Je suis donc pour la déliaison des taux, mais dans un cadre fixant un minimum
et un maximum à payer, entre lesquels joue la liberté. Dans ces conditions, on
peut respecter tout le monde.
Je soutiens donc la position de M. le ministre, qui est courageuse, et
j'espère qu'on va aller dans la direction que j'ai tracée.
M. Gérard Braun.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. Jean-René Lecerf, pour explication de vote.
M. Jean-René Lecerf.
Je me sentais un peu frustré, parce que j'aurais souhaité intervenir contre
les amendements de nos collègues MM. Vanlerenberghe et Mercier ; or ils les ont
retirés, je ne pouvais donc plus prendre la parole. Je souhaitais en effet
faire entendre, moi aussi, une musique un peu différente en me fondant sur mon
expérience d'élu d'un département frontalier.
Dans ce département frontalier, les fiscalités et les taxes pesant sur les
entreprises sont beaucoup plus lourdes qu'elles ne le sont de l'autre côté de
la frontière. Nous sommes donc confrontés à des risques de délocalisation
d'entreprises ou à l'implantation d'entreprises sur le territoire du pays ami
voisin mais néanmoins concurrent. En outre, dans la mesure où le département du
Nord est confronté, comme les autres départements, je le sais bien,...
M. Gérard Braun.
Aux 35 heures !
M. Jean-René Lecerf.
... au problème de l'APA, dans des conditions aggravées par le coefficient
multiplicateur de sa population de 2,5 millions d'habitants, je vois bien que,
s'il y avait une déliaison totale des taux en 2003, à une année du
renouvellement par moitié des conseils généraux, le conseil général déciderait
une augmentation pure et simple de la seule taxe professionnelle, ce qui serait
pénalisant pour l'emploi.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
On peut en effet considérer la question !
M. Jean-René Lecerf.
C'est la raison pour laquelle je félicite le Gouvernement de n'être pas allé
au-delà de ce premier effort qui nous montre la voie. Je pense qu'il faut
sérieusement baliser le reste du chemin.
M. le président.
Je mets aux voix l'article 14, modifié.
(L'article 14 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 14
M. le président.
L'amendement n° I-209, présenté par M. Mercier, est ainsi libellé :
« Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Le 3° du II de l'article 1636 B
decies
du code général des impôts est
complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque les taux définis aux 1° et 2° n'ont pas varié l'année précédant
celle au titre de laquelle l'établissement public de coopération intercommunale
vote son taux de taxe professionnelle ou celui applicable dans la zone
d'activité économique, la variation prise en compte est celle constatée au
titre de l'antépénultième année. »
La parole est à M. Michel Mercier.
M. Michel Mercier.
Il s'agit d'un amendement technique, sans valeur philosophique, qui se situe
dans le prolongement des amendements précédents de M. Fréville, visant à
résoudre les problèmes des établissements publics de coopération
intercommunale, les EPCI.
Cet amendement, comme l'amendement n° I-107, illustre la raison pour laquelle
on ne pouvait pas inscrire dans la loi constitutionnelle les EPCI au titre des
collectivités territoriales. Il apporte la preuve que ces EPCI ne
s'administrent pas librement - ce qui est l'un des critères de définition des
collectivités territoriales - puisqu'ils dépendent, pour leur taux d'impôt, des
décisions prises par les communes membres.
L'amendement que je défends a simplement pour objet non pas de changer la
règle, mais de l'aménager : un EPCI pourra retrouver une petite liberté pour
augmenter son taux d'impôt si les communes membres l'ont augmenté, non pas
l'année qui précède, mais l'année
n
-2 et que l'EPCI n'a pas, à ce
moment-là, utilisé la faculté qui lui était ouverte d'augmenter ses taux. Il
s'agit donc de donner quelque souplesse au régime.
J'indique tout de suite que, si cet amendement n'avait l'agrément ni du
rapporteur général, ni du ministre, je le retirerais pour faire gagner du
temps.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il s'agit d'une adaptation technique sans doute
opportune, sur laquelle nous souhaitons recueillir l'avis du Gouvernement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Comme pour les amendements présentés par M. Fréville,
je m'en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Quel est, dans ces conditions, l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Favorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-209.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 14.
L'amendement n° I-118 rectifié, présenté par MM. J.-C. Gaudin, Valade,
Vanlerenberghe, du Luart, Bourdin, Clouet, Lachenaud et Trucy, est ainsi rédigé
:
« Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 1636 B
decies
du code général des impôts est complété par
un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Les variations du taux pondéré de la taxe d'habitation, dans le cas
des établissements publics de coopération intercommunale soumis aux
dispositions de l'article 1609
nonies
C du présent code, et du taux
moyen pondéré du taux de la taxe d'habitation et des taxes foncières, dans tous
les cas, s'apprécient en retenant, pour les deux années de la comparaison, les
bases d'imposition de l'année la plus ancienne. »
La parole est à M. François Trucy.
M. François Trucy.
Des taux moyens pondérés sont utilisés pour déterminer les marges de manoeuvre
offertes aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics de
coopération intercommunale en matière d'évolution des taux de taxe
professionnelle.
Ces taux portent soit sur la taxe d'habitation seule, soit sur l'ensemble des
impôts sur les ménages perçus par les communes.
L'évolution des taux d'une année à l'autre est censée mettre en évidence
d'éventuelles modifications de pression fiscale décidées, à travers le vote des
taux, par les conseils municipaux. Or il s'avère que, dans de très nombreux
cas, des effets bases parasites font ressortir des évolutions plus faibles
qu'elles ne le sont en réalité.
L'effet bases apparaît, notamment, lorsque les bases d'une taxe augmentent
plus vite dans une commune où le taux est faible : le taux moyen pondéré,
mesuré sur l'ensemble des communes, baisse alors, même si les taux votés sont
restés inchangés.
Il a été montré que, dans les cent quatre-vingt-deux EPCI à taxe
professionnelle unique, tous ceux qui existaient dès 2000 et qui ne
pratiquaient pas de fiscalité mixte, l'évolution des taux moyens pondérés des
impôts sur les ménages des communes était sous-évaluée dans les deux tiers des
cas du fait même de ces effets bases parasites, allant jusqu'à mettre en
évidence des baisses de taux moyens là où les communes ont au contraire
augmenté leur pression fiscale.
L'amendement proposé consiste à corriger le mode de calcul de l'évolution des
taux moyens pondérés en retenant, pour les deux années prises en compte dans la
comparaison, les mêmes bases d'imposition, celles de la plus ancienne des deux
années. On applique ainsi pour l'année
n
-2, les bases et les taux de
n
-2 et pour l'année
n
-1, les bases de
n
-2 et les taux de
n
-1, ce qui permet ainsi de ne prendre en compte que le seul effet des
taux.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement tend à prendre en compte, pour le
calcul de la variation du taux moyen pondéré de la taxe d'habitation et des
taxes foncières entre l'année
n
-1 et l'année
n
, les bases
d'imposition de l'année
n
-1, de manière à neutraliser l'effet base.
Les auteurs de l'amendement ont relevé que l'évolution des bases, d'une année
sur l'autre, pouvait fausser l'évolution réelle du taux moyen pondéré.
Ainsi, si les bases d'un impôt augmentent plus vite que son taux,
l'augmentation du taux moyen pondéré est inférieur à l'augmentation des seuls
taux. Il en résulte une réduction des marges de manoeuvre de l'EPCI en matière
de taxe professionnelle.
La modification proposée revient donc, pour les établissements à taxe
professionnelle unique dans lesquels les bases des impôts sur les ménages
augmentent beaucoup, à accroître les possibilités d'augmenter le taux de la
taxe professionnelle.
A l'inverse, dans les EPCI sur le territoire desquelles les bases
diminueraient, les marges de manoeuvre seraient réduites.
Cette proposition illustre les difficultés que pose le système actuel de la
TPU, dans lequel sont liés des taux votés par deux entités distinctes, à
savoir, d'un côté, les conseils municipaux et, de l'autre, l'organe délibérant
de l'EPCI. La difficulté dans laquelle nous nous trouvons est inhérente à la
nature même des structures intercommunales.
La proposition plaide en faveur d'un assouplissement des liens entre les taux
dans les établissements publics à taxe professionnelle unique.
C'est une réforme substantielle qui nous attend peut-être à terme, et la
mesure présentée par M. François Trucy est sans doute un dispositif transitoire
acceptable, permettant de gérer certaines situations.
Toutefois, la commission des finances ne disposant pas de la capacité d'opérer
des simulations qui lui permettraient de mieux se rendre compte des
conséquences d'une telle mesure, elle s'en remettra à l'avis du Gouvernement,
qui, lui, a dû faire procéder à ces simulations.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
L'honnêteté me conduit à dire que, si simulations il y
a eu, elles sont restées assez légères, monsieur le rapporteur général. Je ne
dirai pas que nous entrons dans le domaine de la micro-chirurgie, surtout à
propos d'un dispositif proposé par M. François Trucy
(Sourires)
, mais il
s'agit en tout cas d'une matière extraordinairement complexe.
Pour tout dire, je m'interroge, depuis quelques minutes, sur la compatibilité
entre l'amendement présenté par M. Mercier, que le Sénat vient d'adopter, et
celui-ci. Ne sont-ils pas contradictoires ? Il faudrait le vérifier. D'un autre
côté, cet amendement-ci n'a-t-il pas satisfaction avec l'amendement de M.
Mercier ? En fait, il s'agit de mécanismes légèrement différents.
Ne voulant pas contredire M. le rapporteur général, dont l'explication a
autant de valeur que la mienne, je vais à nouveau m'en remettre à la sagesse du
Sénat, mais à une sagesse plutôt négative, avec un doute profond, si vous
voulez le fond de ma pensée.
Je ne voudrais pas tuer une idée allant dans le sens du passage à la taxe
professionnelle unique, puisque c'est la direction générale que nous suivons.
Nous savons que certains établissements publics ont des difficultés à y passer
ou regrettent d'y être passés parce que les mécanismes qui régissent cette
matière sont extrêmement complexes.
Cela étant, je crains vraiment des difficultés de mise en oeuvre.
M. le président.
Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission travaille, il faut bien le reconnaître,
un peu dans le brouillard. J'ai tâché d'expliquer la finalité de la disposition
proposée telle que nous l'avons comprise ; elle nous semble tout à fait digne
d'estime.
Il est toutefois assez délicat, en partant de cas particuliers, de définir une
législation qui peut atteindre d'autres objectifs que celui qui est désiré.
Alors, de deux choses l'une : soit, par considération pour les auteurs de
l'amendement, le Sénat adopte celui-ci, et d'ici à la commission mixte
paritaire une expertise pourra avoir lieu - nos collègues de l'Assemblée
nationale, les services du ministère des finances pourront s'associer à
l'exercice et nous confronterons les jugements des uns et des autres -, soit,
dans le doute, nous préférons en l'instant nous abstenir.
Quant à la commission, n'ayant pas été éclairée par des simulations, elle ne
peut qu'émettre un avis de grande prudence.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis,
président de la commission.
Je crois vraiment que nous passons par des
sommets de complexité. Les cabinets de consultants ont de beaux jours devant
eux, à moins que des réformes n'interviennent dans des délais rapprochés. On
irait presque jusqu'à imaginer que certains cabinets de consultants ont rédigé
eux-mêmes ces amendements, confrontés un jour à une difficulté particulière ou
désireux d'optimiser la performance fiscale.
Demain matin, nous serons devant nos électeurs. Qu'allons-nous pouvoir leur
expliquer ? Quand on écrit la loi de cette façon, c'est que le père Ubu est en
embuscade.
M. le rapporteur général nous invite à beaucoup de prudence ; je partage
pleinement son sentiment !
M. le président.
La parole est à M. Gérard Miquel, contre l'amendement.
M. Gérard Miquel.
Ce débat est quelque peu surréaliste. Comme vient de le dire M. le président
de la commission des finances, si nos administrés nous écoutaient, ils ne nous
comprendraient sans doute pas.
Nous voulons délier les taux et par là donner plus de responsabilité aux élus.
Ils sont capables d'assumer cette responsabilité supplémentaire. Pour autant,
un problème majeur n'a pas été évoqué : les taux sont actuellement appliqués
sur des bases qui sont complètement dépassées, ce qui est un facteur
d'inégalités extraordinaires entre les contribuables.
Ainsi, dans mon département, lorsque nous augmentons les impôts de 10 % - ce
que nous allons faire -, nous pénalisons les contribuables de la ville
chef-lieu, qui seront trois fois plus imposés que les contribuables de la
commune voisine. Nous avons, sur ce point, une responsabilité collective. La
révision des bases sur laquelle nous avons travaillé au début des années
quatre-vingt-dix n'a jamais été appliquée. Nous nous trouvons donc dans une
situation telle qu'une augmentation des impôts des collectivités, départements,
régions et intercommunalités, peut être sur le terrain un facteur d'inégalités
insupportables pour les contribuables.
M. le président.
La parole est à M. Yves Fréville, pour explication de vote.
M. Yves Fréville.
Je suis très favorable à l'amendement n° I-118 rectifié. Je n'entrerai pas
dans la théorie de la fiscalité locale car, en la matière, M. le président de
la commission des finances a parfaitement raison, nous atteignons le comble de
la complexité.
Je m'en tiendrai au problème posé par cet amendement, qui est simple. Il
s'agit de la théorie des indices. En effet, lorsque l'on veut faire des
comparaisons dans le temps entre deux situations, il ne faut pas changer le
système de pondération.
Par exemple, si l'on estime que la taxe d'habitation représente 10 % de la
pondération une année, il faut que ce soit la même chose l'année suivante.
C'est le principe de base de toute théorie des indices. Permettez-moi de dire
qu'il serait ridicule que nous ne respections pas ce principe que l'on appelle,
si l'on veut être pédant, l'indice de Laspeyres.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-118 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° I-176, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 1391 B du code général des impôts est complété par un alinéa
ainsi rédigé :
« Le bénéfice de ces dispositions est également accordé aux bénéficiaires du
revenu minimum prévu à l'article 2 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988
relative au revenu minimum d'insertion, et aux bénéficiaires de l'allocation de
solidarité mentionnée à l'article L. 351-10 du code du travail.
« II. - La perte de ressources pour l'Etat résultant du I ci-dessus est
compensée par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
Voici un amendement que la majorité sénatoriale a régulièrement adopté,
lorsque, par le passé, nous l'avons présenté : il vise à accorder un
dégrèvement d'office au titre de la taxe foncière sur les propriétés bâties,
pour les contribuables RMIstes ou bénéficiaires de l'allocation spécifique de
solidarité.
« Cette mesure va dans le sens de la justice sociale », disait M. Marini voilà
deux ans, vous invitant à la voter, ce que vous avez d'ailleurs fait.
En effet, les redevables concernés qui ont pu avoir les ressources suffisantes
pour accéder à la propriété éprouvent de grandes difficultés à régler cet
impôt. Ils bénéficient fort heureusement d'allégements au titre de la taxe
d'habitation, mais rien n'est prévu pour la taxe foncière. C'est assez
incohérent.
Nous vous invitons donc à adopter cet amendement, comme par le passé.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Malheureusement, avec les années, ma mémoire n'est
plus ce qu'elle était !
(Sourires.)
Thierry Foucaud nous rappelle un
épisode qui n'y a pas laissé de grandes traces, je dois en convenir. Peut-être,
à l'époque, avais-je émis un avis de prudence, mais je ne saurais vous le
certifier.
En tout cas, dans l'immédiat, la commission, qui a délibéré sur cet
amendement, a bel et bien émis un avis défavorable, en considérant que, s'il
s'agissait là d'intentions certes très louables, le risque de dépenses était
difficilement acceptable. En effet, ce dégrèvement d'office devrait être
compensé par l'Etat, bien entendu.
J'ajoute que, en quelques années la situation a évolué de façon très
préoccupante, puisque l'on constate une progression inexorable des dotations
visant à compenser un grand nombre d'exonérations et de dégrèvements. C'est
exactement ce contre quoi nous voulons lutter : la part de plus en plus grande
consacrée par l'Etat à compenser des exonérations et des dégrèvements, avec des
effets pervers qui ont été décrits, tant sur les finances de l'Etat que sur
celles des collectivités locales. Si le doute était permis voilà quelques
années, l'expérience, dont il ne faut jamais rejeter les leçons, conduit ce
soir la commission à émettre un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Tout au long de la journée, nous sommes ensemble
convenus qu'il ne fallait pas multiplier les dispositions conduisant à
accroître la part de l'Etat dans le produit total de la fiscalité directe
locale. Cela m'amène à émettre un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-176.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° I-177, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le premier alinéa du I de l'article 1414 A du code général des
impôts, le taux : "4,3 %" est remplacé par le taux : "2 %".
« II. - Les taux applicables aux deux dernières tranches du tarif de l'impôt
de solidarité sur la fortune sont augmentés à due concurrence. »
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
Par cet amendement, nous vous proposons une mesure en faveur des redevables de
condition moyenne et modeste, non concernés - ou si peu - par les baisses
d'impôts prévues aux articles précédents.
Cet amendement vise à réduire le poids de la taxe d'habitation en fonction du
revenu. Cette mesure est urgente, car, aujourd'hui, nous assistons à une
augmentation de la fiscalité locale pesant sur les ménages, parallèle, sinon
consécutive, à l'allégement de la fiscalité d'Etat et de la fiscalité locale
pesant sur les entreprises. Et les différentes mesures qui sont annoncées dans
le cadre de la relance de la décentralisation ne sont pas de nature à améliorer
la situation.
L'augmentation touche durement les foyers modestes, tandis que les allégements
profitent aux plus nantis.
Cette mesure vise donc à instaurer une plus grande justice fiscale. Elle
permettrait à près de 300 000 ménages ayant des revenus modestes et moyens de
bénéficier d'une réduction de leur taxe d'habitation.
Son coût, certes important, est toutefois à relativiser. Cette mesure est en
effet dix fois moins coûteuse que la baisse de l'impôt sur le revenu adoptée
dans le collectif budgétaire de juillet dernier.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
En vertu des mêmes arguments que ceux que j'ai
évoqués à propos de l'amendement précédent, la commission a émis un avis
défavorable. Le coût de cette mesure serait très important, le gage proposé est
inacceptable et l'autonomie financière et fiscale des collectivités locales
régresserait. De plus, le poids déjà trop considérable des dégrèvements de taxe
d'habitation se renforcerait encore au sein de la rubrique des charges communes
du budget de l'Etat. Tout cela représente des obstacles qui ne peuvent être
surmontés.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Défavorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-177.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° I-117 rectifié, présenté par MM. du Luart, Bourdin, Clouet,
Lachenaud et Trucy, est ainsi libellé :
« Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 1472 A
ter
du code général des impôts, il est
inséré une division ainsi rédigée :
« 5° Réduction des bases pour investissement
« Article 1472 A
quater.
Les investissements réalisés au cours d'une
année ouvrent droit à hauteur de 50 % de leur montant à une réduction de la
base d'imposition d'un établissement.
« Pour les investissements réalisés en 2002, la réduction de 50 % est limitée
aux biens acquis ou créés entre le 25 novembre et le 31 décembre 2002.
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de dispositions du I
ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe
additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts ».
La parole est à M. François Trucy.
M. François Trucy.
Ayant relu attentivement le texte de mon amendement, je me suis rendu compte
qu'il comportait certains défauts. Par conséquent, je le retire.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Bonne décision !
M. Jean Arthuis,
président de la commission.
Bravo !
M. le président.
L'amendement n° I-117 rectifié est retiré.
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° I-41, présenté par MM. Ostermann, Bailly, Besse, de Broissia,
Dubrule, Eckenspieller, Fournier, Leroy, Natali, Oudin, Peyrat, de Richemont et
Vasselle, est ainsi libellé :
« Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - A compter de la période d'imposition s'ouvrant le 1er décembre 2002,
les articles 1599 C à 1599 J du code général des impôts sont abrogés.
« II. - La perte de recettes pour les collectivités territoriales résultant du
I ci-dessus est compensée par une majoration à due concurrence de la dotation
globale de fonctionnement.
« III. - La perte de recettes pour l'Etat résultant du II ci-dessus est
compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle des droits
prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-72 rectifié
bis,
présenté par MM. Miquel, Angels,
Auban, Charasse, Demerliat, Haut, Lise, Marc, Massion, Moreigne, Sergent et les
membres du groupe socialiste, est ainsi libellé :
« Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - A compter de la période d'imposition s'ouvrant le 1er décembre 2002 et
pour les périodes d'imposition suivantes les articles 1599 C à J du code
général des impôts sont abrogés. Il est créé un prélèvement sur les recettes de
l'Etat affecté aux départements pour compenser la perte de recettes résultant
pour ceux-ci de cette abrogation. Cette compensation est calculée sur la base
du montant des recettes encaissées par chacun des départements concernés au
titre de la période d'imposition du 1er décembre 2001 au 30 novembre 2002
affecté d'un coefficient fixé par arrêté. Elle évolue chaque année comme la
dotation globale de fonctionnement. Le montant mensuel est reversé aux
départements sur la base d'un douzième de la prévision d'encaissement total de
recettes de l'année 2003 répartie entre les départements proportionnellement au
produit qu'ils ont perçu entre le 1er décembre 2001 et le 30 novembre 2002.
« II. - La perte de recettes résultant des dispositions du I est compensée à
due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus
par les article 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-42, présenté par MM. Cornu, Bailly et Bizet, Mme Bout, MM.
de Broissia, Del Picchia, Doublet, Dubrule, Fournier, Gaillard, Gérard, Ginésy,
Murat, Natali, Oudin, de Richemont, Rispat et Vasselle, est ainsi libellé :
« Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le sixième alinéa (
d
) de l'article 1599 F du code général
des impôts, les mots : ", par période d'imposition, de trois" sont
supprimés.
« II. - La perte de recettes pour les collectivités territoriales résultant du
I ci-dessus est compensée par une majoration à due concurrence de la dotation
globale de fonctionnement.
« III. - La perte de recettes pour l'Etat résultant du II ci-dessus est
compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits
prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-52, présenté par M. Badré et les membres du groupe de
l'Union centriste, est ainsi libellé :
« Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le sixième alinéa (
d
) de l'article 1599 F du code général
des impôts, les mots : ", par période d'imposition, de trois" sont
supprimés.
« II. - La perte de recettes pour les collectivités territoriales résultant du
I ci-dessus est compensée à due concurrence, par la création au profit des
collectivités concernées, d'une majoration de la dotation globale de
fonctionnement.
« III. - La perte de recettes pour l'Etat résultant du II ci-dessus est
compensée, à due concurrence, par la création, à son profit, d'une taxe
additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
L'amendement n° I-41 n'est pas soutenu.
La parole est à M. Gérard Miquel, pour défendre l'amendement n° I-72 rectifié
bis
.
M. Gérard Miquel.
L'amendement n° 72 rectifié
bis
a pour objet de supprimer totalement la
vignette automobile à compter du 1er décembre 2002.
Le gouvernement de Lionel Jospin avait largement accru les cas d'exonérations.
En conséquence, cette taxe ne concerne plus qu'une minorité de contribuables
aujourd'hui : essentiellement les propriétaires de véhicules de plus de 3,5
tonnes et les personnes morales disposant de plus de trois véhicules. La
logique initiée en 2000 devait conduire, à terme, à l'extinction définitive de
cette taxe.
La suppression totale de la vignette est justifiée pour plusieurs raisons.
Il s'agit tout d'abord d'une mesure d'équité fiscale.
De plus, aujourd'hui, le coût de recouvrement de la vignette automobile est
disproportionné par rapport à son rendement.
En outre, la fraude est facilitée pour les personnes morales en raison des
dispositions exonérant leurs trois premiers véhicules. En effet, il est
difficile, dans ces conditions, pour les services chargés des contrôles, de
constater les infractions puisqu'ils ne peuvent pas savoir si l'absence de
vignette provient d'un cas d'exonération ou d'une fraude.
Ainsi, la suppression complète de la vignette automobile serait une mesure de
simplification administrative, qui permettrait à l'Etat d'effectuer des
économies de gestion.
Le Parlement, qui se montre souvent critique à l'égard de la complexité
administrative et des coûts qu'elle entraîne, est fréquemment à l'origine de
cette complexité. L'amendement n° I-72 rectifié
bis
donne l'opportunité
au Sénat de faire la preuve de sa volonté d'alléger les contraintes qui pèsent
sur les services de l'Etat et
in fine
sur le contribuable.
M. le président.
La parole est à M. Gérard Cornu, pour présenter l'amendement n° I-42.
M. Gérard Cornu.
Cet amendement est à la fois une mesure de simplification et d'équité.
Si je ne propose pas la suppression totale de la vignette, je pense cependant
qu'il est important de prévoir une égalité de traitement entre les
propriétaires de véhicules de moins de 3,5 tonnes, qu'il s'agisse de personnes
physiques ou de personnes morales. Vous savez en effet que, s'agissant des
véhicules de moins de 3,5 tonnes, les propriétaires personnes physiques
bénéficient d'une exonération de la vignette, alors que les propriétaires
personnes morales ne sont exonérés que dans la limite de trois véhicules.
Vous imaginez la difficulté du contrôle ! Il s'agit d'un amendement
d'exonération active : il coûtera en effet beaucoup moins cher d'exonérer les
personnes morales pour la totalité de leur parc automobile plutôt que d'exercer
des contrôles, qui sont pratiquement irréalisables, pour vérifier que ces
personnes morales possèdent ou non plus de trois véhicules.
J'appelle donc vivement à l'instauration d'une égalité de traitement entre les
personnes physiques et les personnes morales. Il s'agit d'un amendement de
simplification.
M. le président.
La parole est à M. Louis Moinard, pour présenter l'amendement n° I-52.
M. Louis Moinard.
Cet amendement étant analogue à celui que vient de présenter Gérard Cornu, je
me rallie à son argumentation.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je voudrais tout d'abord m'adresser à mes collègues
du groupe socialiste. Si ma mémoire est bonne, il n'y a pas très longtemps, le
gouvernement de M. Jospin a préconisé, et obtenu, une suppression partielle de
la vignette. Je rappelle au passage qu'il en est résulté un réel problème de
compensation pour les finances départementales, et que la manière dont ce
problème a été traité - Gérard Miquel, qui a des responsabilités
départementales éminentes, le sait bien - n'est pas exempte de tout
reproche.
Simultanément, la commission des finances du Sénat avait estimé, dans le souci
d'une simplification fiscale et des pratiques, qu'il fallait aller beaucoup
plus loin, et supprimer totalement la vignette.
Le Sénat avait voté cette suppression totale, sur ma proposition. Je ne sais
plus très bien quelle avait été l'attitude de votre groupe à ce moment-là, mais
sans doute aviez-vous suivi le Gouvernement, qui était à l'époque représenté
par Mme Florence Parly.
M. Marc Massion.
Elle était sympathique.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Vous aviez effectivement accepté de vous laisser
séduire par son argumentation.
Aujourd'hui, eu égard à la situation des finances publiques, qui s'est, hélas
! beaucoup dégradée, et que nous appréhendons avec lucidité, ainsi qu'aux
perspectives de l'activité économique, qui ne sont pas très bonnes, et à tout
le moins incertaines pour l'année 2003, nous sommes tenus à une très grande
prudence. C'est la seule raison pour laquelle ce qui nous semblait possible
voilà un an ou deux ne l'est plus nécessairement à l'instant présent - il faut
savoir s'adapter aux circonstances.
Au demeurant, permettez-moi de vous citer la réponse du ministre de
l'économie, des finances et de l'industrie à une question écrite d'un député
parue au
Journal officiel
daté du 11 novembre 2002 : « La taxe
différentielle sur les véhicules à moteur demeure, en outre, une charge
déductible du bénéfice imposable ». Il ajoute : « Son produit reste largement
supérieur au coût qu'assume l'Etat pour sa gestion. Le Gouvernement est
conscient que la suppression définitive de cette taxe serait une réelle mesure
de simplification, mais ses marges de manoeuvre budgétaires pour l'année 2003
ne lui permettent pas d'envisager une telle disposition. »
Nous n'avons pas encore entendu le Gouvernement, mais il s'est exprimé par
écrit, comme en fait foi le
Journal officiel
. Peut-être monsieur le
ministre délégué au budget aura-t-il des éléments complémentaires à nous
apporter.
La commission demande donc à notre collègue Gérard Miquel de bien vouloir
retirer l'amendement n° I-72 rectifié
bis
. Le moment n'est peut-être pas
encore venu de supprimer totalement la vignette automobile.
Les amendements n°s I-42 et I-52, qui sont pratiquement identiques, sont des
amendements de repli. M. Gérard Cornu a très justement énuméré l'ensemble de
ces dispositions qui sont d'une complexité invraisemblable et qui ne sont
certainement pas faites pour faciliter le contrôle fiscal ! Cela entraîne une
insécurité fiscale et une difficulté certaine à faire appliquer la
réglementation. De nombreux fonctionnaires pourraient sans doute utiliser leur
énergie autrement qu'en essayant de faire respecter des textes dont les
contours sont d'un style assez contestable.
Monsieur le ministre, nous serions heureux que vous puissiez nous tracer
quelques perspectives. Si les contraintes des finances publiques ne vous
permettent pas d'accepter cette mesure, nous souhaiterions néanmoins - puisque
la simplification est l'un des combats qui vous tiennent à coeur - que vous
puissiez prendre, autant qu'il est possible, l'engagement de progresser sur ce
sujet. En effet, pour de nombreux professionnels, cette vignette résiduelle
n'est pas compréhensible : elle peut produire des effets discriminatoires et
elle engendre des dépenses administratives liées au contrôle qui pourraient
tout à fait être supprimées.
La commission des finances, bien entendu, ne veut pas dégrader le solde de la
loi de finances, chacun le comprendra : notre attitude sera constante tout au
long du débat et nous ne pouvons y déroger. Par conséquent, sauf bonne surprise
de la part du Gouvernement, nous demandons le retrait des amendements n°s I-42
et I-52.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
M. le rapporteur général a tout dit : il a même très
bien parlé au nom du Gouvernement en citant la réponse du ministre de
l'économie à une question écrite. Je n'ai naturellement aucun élément
complémentaire à apporter. Il m'a demandé quelles étaient les perspectives que
je pouvais ouvrir. J'indique que, lorsque nous aurons dégagé les marges de
manoeuvre nécessaires, nous pourrons nous lancer dans cette suppression qui a
tout son sens économique et qui aurait dû être réalisée au moment où la
vignette a été pour la plus grande partie supprimée.
A ce stade, je ne peux que m'associer à l'invitation de M. le rapporteur
général et souhaiter le retrait des amendements.
A défaut, j'émettrai un avis défavorable.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis,
président de la commission.
Je souhaite attirer l'attention du
Gouvernement sur le fait que les contrôles semblent de plus en plus s'espacer
et que, en définitive, au moment où le Gouvernement disposera enfin des moyens
nécessaires pour supprimer totalement la vignette automobile et compenser au
profit des collectivités locales le produit de cette vignette, il n'y aura plus
grand-chose à compenser. Donc, ce pacte de confiance qui unit les collectivités
territoriales, en l'occurrence les départements, au Gouvernement ne doit pas
être altéré par une présomption de contrôle distendu.
M. le président.
Monsieur Miquel, maintenez-vous l'amendement n° I-72 rectifié
bis
?
M. Gérard Miquel.
L'argumentation de M. le président de la commission des finances me conforte
dans ma position. Je maintiens donc mon amendement.
M. le président.
Monsieur Gérard Cornu, l'amendement n° I-42 est-il maintenu ?
M. Gérard Cornu.
Les explications de M. le ministre se rapportaient surtout à l'amendement n°
I-72 rectifié
bis
et à la suppression totale de la vignette automobile.
J'aimerais entendre M. le ministre sur l'exonération des personnes morales pour
les véhicules inférieurs à 3,5 tonnes. Si je me réfère aux explications données
par M. le rapporteur général, le contrôle est absolument inopérant. De plus, il
me semble que le coût des contrôles sera plus élevé que le montant des
recettes.
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Le Gouvernement se tient à la disposition du Parlement
et en particulier de M. Cornu.
Chaque euro compte au regard du solde budgétaire. Nous y avons travaillé avec
beaucoup d'application, notamment avec la commission des finances du Sénat. Le
coût de la mesure, dont je ne veux pas contester l'intelligence, monsieur le
sénateur, dégrade à l'évidence le solde budgétaire que nous nous efforçons de
maintenir au meilleur niveau possible. C'est la raison pour laquelle je vous
invite à retirer votre amendement.
Mon propos n'est pas de vous dire que votre proposition est inopportune : elle
est opportune ! Simplement, elle a un coût et nous sommes convaincus que la
bonne manière de procéder est de dégager au plus vite des marges de manoeuvre
pour l'introduire. Cette année, je vous prie de croire que nous n'en avons pas
les moyens.
M. le président.
Monsieur Cornu, vous venez d'entendre les explications données par M. le
ministre. L'amendement n° I-42 est-il toujours maintenu ?
M. Gérard Cornu.
Les explications de M. le ministre sont claires. Le Gouvernement n'ayant pas
les moyens de mettre en oeuvre cette mesure, je retire mon amendement.
M. le président.
L'amendement n° I-42 est retiré.
L'amendement n° I-52 est-il maintenu, monsieur Moinard ?
M. Louis Moinard.
Puisque le Gouvernement veut aider les entreprises, je pense qu'il aurait pu
faire un geste en direction des commerçants et des artisans. Je maintiens donc
mon amendement.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Je veux dire à M. Louis Moinard, qui est la raison
incarnée, que le fait de maintenir son amendement me conduit à inviter avec
insistance le Sénat à le rejeter.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est ennuyeux pour une aussi bonne idée !
M. le président.
Monsieur Moinard, l'amendement n° I-52 est-il toujours maintenu ?
M. Louis Moinard.
Compte tenu de la position du ministre, qui se montre attentif au problème
soulevé, et dans l'espoir que ce dernier sera réglé l'année prochaine si la
situation est meilleure, je retire mon amendement.
M. le président.
L'amendement n° I-52 est retiré.
La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote sur l'amendement
n° I-72 rectifié
bis
.
M. Thierry Foucaud.
Nous soutenons cet amendement car nous avons déjà présenté une série
d'amendements allant dans ce sens. Nous le voterons donc.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-72 rectifié
bis
.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° I-14, présenté par M. Marini, au nom de la commission des
finances, est ainsi libellé :
« Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Par dérogation au premier alinéa du II de l'article L. 1615-6 du code
général des collectivités territoriales, les dépenses réelles d'investissement
réalisées par les bénéficiaires du Fonds de compensation pour la taxe sur la
valeur ajoutée en 2002, 2003 ou 2004 afin de réparer des dommages directement
causés par les intempéries survenues les 6 et 7 juin 2002 dans le département
de l'Isère et les 8 et 9 septembre 2002 dans les départements de l'Ardèche, des
Bouches-du-Rhône, de la Drôme, du Gard, de l'Hérault et de Vaucluse ouvrent
droit à des attributions du fonds l'année au cours de laquelle les crédits
correspondants ont été payés.
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du I
ci-dessus est compensée par la création à due concurrence d'une taxe
additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts.
L'amendement n° I-88, présenté par MM. Miquel, Massion, Moreigne, Sergent,
Demerliat, Charasse, Lise, Haut, Marc, Angels, Auban et les membres du groupe
socialiste et rattachée, est ainsi libellé :
« Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Par dérogation au premier alinéa du II de l'article L. 1615-6 du code
général des collectivités territoriales, les dépenses réelles d'investissement
réalisées en 2002, 2003 ou 2004 par les bénéficiaires du fonds de compensation
pour la taxe sur la valeur ajoutée afin de réparer les dommages directement
causés par les intempéries survenues en 2002 et reconnues catastrophes
naturelles ouvrent droit à des attributions du fonds l'année au cours de
laquelle les crédits correspondants ont été payés.
« II. - Les pertes de recettes résultant du I ci-dessus sont compensées à due
concurrence par la création d'une taxe additionnelle au droit de consommation
sur les tabacs visé à l'article 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-175, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Par dérogation au premier alinéa du II de l'article L. 1615-6 du code
général des collectivités territoriales, les dépenses réelles d'investissement
réalisées par les bénéficiaires du Fonds de compensation pour la taxe sur la
valeur ajoutée afin de réparer des dommages causés par les intempéries
survenues les 6 et 7 juin 2002 dans le département de l'Isère et les 8 et 9
septembre 2002 dans les départements de l'Ardèche, des Bouches-du-Rhône, de la
Drôme, du Gard, de l'Hérault et de Vaucluse, et les 16 et 17 novembre 2002,
dans les départements de Vaucluse, de l'Isère et de la Drôme, ouvrent droit à
des attributions du fonds l'année au cours de laquelle les crédits
correspondants ont été payés.
« II. - Par dérogation au I du même article, le taux de compensation pour ces
dépenses est fixé à 16,388 %.
« III. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application des
disposition du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création
d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code
général des impôts. »
La parole est M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° I-14.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet article additionnel a pour objet de permettre un
versement anticipé des attributions du fonds de compensation pour la TVA, le
FCTVA, lorsqu'elles sont liées à des dépenses d'investissement engagées en vue
de réparer les dommages causés par diverses intempéries intervenues en 2002.
Il s'agit plus particulièrement des dommages constatés au mois de juin dans
l'Isère, au mois de septembre dans l'Ardèche, les Bouches-du-Rhône, la Drôme,
le Gard, l'Hérault et le Vaucluse.
Je rappelle qu'après les tempêtes de décembre 1999 le président de la
commission des finances et moi-même avions préconisé un certain nombre de
mesures d'urgence destinées à atténuer les conséquences financières des
intempéries pour les collectivités locales et les entreprises. A l'époque, nous
avions imaginé le versement anticipé des attributions du FCTVA aux communes et
aux autres bénéficiaires de ce fonds pour lesquels le droit commun dispose que
les versements interviennent la deuxième année suivant celle au cours de
laquelle les dépenses d'investissement sont intervenues.
Nous avions obtenu, avec le concours efficace de notre collègue Michel
Mercier, le vote de cette mesure par le Sénat en mars 2000 dans le cadre d'un
texte de politique forestière. L'Assemblée nationale n'avait pas délibéré sur
ce texte, celui-ci n'ayant pas été inscrit à son ordre du jour. Malgré tout,
dans la loi de finances rectificative du printemps 2001 nous avions eu gain de
cause.
Ce rappel vise à expliquer que nous nous appuyons sur ce précédent, monsieur
le ministre, pour préconiser aujourd'hui une mesure analogue. D'ailleurs, si je
ne me trompe, l'article 13 de la loi de finances rectificative de juillet 2002
comportait également une telle disposition. Nous souhaiterions donc que la
sollicitude de l'Etat à l'égard des collectivités où résident les sinistrés
puisse se manifester par cette attribution anticipée de FCTVA.
M. le président.
La parole est à M. Claude Haut, pour présenter l'amendement n° I-88.
M. Claude Haut.
Cet amendement est similaire à celui que vient de proposer M. le rapporteur
général. Nous proposons également que le fonds de compensation pour la TVA
intervienne la première année des travaux.
J'ajoute simplement que j'étais présent lorsque M. le Premier ministre est
venu dans le Vaucluse annoncer cette mesure. J'espère que le Gouvernement
donnera suite à cette annonce en émettant un avis favorable sur notre
amendement.
M. le président.
La parole est à M. Thierry Foucaud, pour défendre l'amendement n° I-175.
M. Thierry Foucaud.
Cet amendement vise à financer des dépenses importantes pour réparer des
dommages causés par les intempéries.
Une délégation de notre groupe, composée de Annie David, Marie-France Beaufils
et Yves Coquelle, s'est rendue dans le Gard en octobre dernier. Elle a constaté
que les dommages sont bien sûr immenses et que les mesures annoncées ne sont
pas à la hauteur de l'ampleur des dégâts. Certes, le Gouvernement a prévu un
plan de soutien destiné à subventionner des travaux plus importants, mais à
quel taux ? Il faut faire un effort plus grand. Un meilleur remboursement de la
TVA, plus rapide et plus généreux, va dans ce sens.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Ces amendements, qui sont dans le même esprit que
celui de la commission, seraient donc satisfaits par ce dernier. Donc, l'avis
est défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
S'agissant de l'amendement n° I-14, le Gouvernement
partage naturellement les objectifs qui ont été évoqués par M. le rapporteur
général. Il les partage tellement que ce dispositif est prévu dans le collectif
budgétaire, comme M. Marini vient d'ailleurs de l'indiquer.
J'ai bien noté que M. le rapporteur général souhaite qu'il lui soit donné acte
qu'il s'agit non pas d'une préoccupation nouvelle, mais d'une préoccupation
ancienne de la commission des finances.
Je lui demande de bien vouloir faire confiance au Gouvernement pour intégrer
cette mesure au sein du collectif qui sera bientôt soumis à l'examen du Sénat
et je lui serais reconnaissant de bien vouloir retirer son amendement.
J'indique aux auteurs des deux autres amendements que c'est sans doute la
rédaction de la commission des finances qu'il faudra à terme choisir, car elle
est plus proche de ce qui semble être la solution la plus appropriée pour le
Gouvernement.
Donc, monsieur le rapporteur général, je suggère d'en rester à la méthode que
je vous propose et que la disposition soit adoptée à l'occasion du collectif
budgétaire.
M. le président.
Monsieur le rapporteur général, maintenez-vous l'amendement n° I-14 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Dès lors que notre objectif est atteint et que le
Gouvernement partage notre sentiment sur le bien-fondé de la mesure, nous
pouvons accepter d'attendre, en effet, jusqu'au collectif budgétaire et nous
retirons cet amendement.
M. le président.
L'amendement n° I-14 est retiré.
Monsieur Haut, l'amendement n° I-88 est-il maintenu ?
M. Claude Haut.
Je le retire, monsieur le président, l'essentiel étant que nous puissions
obtenir satisfaction
a fortiori
si c'est l'affaire de quelques jours.
M. le président.
L'amendement n° I-88 est retiré.
Monsieur Thierry Foucaud, l'amendement n° I-175 est-il maintenu ?
M. Thierry Foucaud.
Je le retire, monsieur le président. Nous souhaitons nous aussi que ce ne soit
l'affaire que de quelques jours, car c'est un problème extrêmement
important.
M. le président.
L'amendement n° I-175 est retiré.
L'amendement n° I-89, présenté par MM. Miquel, Massion, Moreigne, Sergent,
Demerliat, Charasse, Lise, Haut, Marc, Angels, Auban et les membres du groupe
socialiste et rattachée, est ainsi libellé :
« Après l'article 14, insérer un article additionnel rédigé ainsi :
« I. - Sont éligibles au fonds de compensation pour la taxe sur la valeur
ajoutée les dépenses correspondant à des travaux réalisés à compter du 1er
janvier 2002 sur les monuments historiques inscrits ou classés appartenant à
des collectivités territoriales quels que soient l'affectation finale et
éventuellement le mode de location ou de mise à disposition de ces édifices.
« II. - Les pertes de recettes résultant du I ci-dessus sont compensées à due
concurrence par la création d'une taxe additionnelle au droit de consommation
sur les tabacs visé à l'article 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Michel Moreigne.
M. Michel Moreigne.
Cet amendement n° I-89 tend à rendre éligibles au fonds de compensation pour
la taxe sur la valeur ajoutée, le FCTVA, les dépenses d'investissement
réalisées par les collectivités locales sur les monuments historiques, quelle
que soit l'affectation finale de ces monuments.
En effet, actuellement, la récupération n'est possible que si le bien est
directement géré par la collectivité locale. Or cela est impossible s'il est
mis à disposition d'un tiers pour être exploité, à moins que le loyer
ne représente une certaine proportion du coût de l'investissement.
Une grande partie du patrimoine français se dégrade, faute de bonnes volontés
pour le restaurer et l'entretenir. Les collectivités locales ne pouvant faire
l'effort nécessaire seules, il nous paraîtrait opportun que l'Etat les aide en
assouplissant les règles d'éligibilité au fonds de compensation pour la TVA.
C'est la raison pour laquelle nous vous proposons d'adopter cet amendement qui
encourage la restauration de nos monuments historiques.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission des finances est, évidemment, très
sensible à tout ce qui concerne le patrimoine historique.
M. Gérard Braun.
Absolument !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Nous avons d'ailleurs eu l'occasion d'évoquer ce
sujet à propos de l'amendement de notre collègue Yann Gaillard.
Cependant, je rappelle que, dès maintenant, dans le droit existant, les
collectivités locales peuvent bénéficier du FCTVA pour les travaux réalisés sur
des monuments historiques, qu'ils soient loués ou mis à disposition
d'associations ou de personnes privées, dès lors qu'ils restent ouverts au plus
grand nombre, c'est-à-dire qu'ils peuvent être visités. Nous comprenons donc
mal la nécessité d'aller au-delà de ce que prévoit déjà la législation
actuelle.
Si le monument n'est pas ouvert au plus grand nombre, s'il est loué à un
tiers, la collectivité doit répercuter le coût des travaux dans le calcul du
loyer ; si ce bien est cédé à un tiers, il faut évidemment tenir compte du coût
des travaux pour définir le prix de cession de ce bien.
Ne voyant donc pas exactement à quel type de situation se rapporte cette
demande d'éligibilité au FCTVA, la commission émet un avis défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Même avis défavorable, monsieur le président.
M. le président.
Monsieur Michel Moreigne, l'amendement n° I-89 est-il maintenu ?
M. Michel Moreigne.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° I-89 est retiré.
L'amendement n° I-179, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Au I de l'article L. 1615-6 du code général des collectivités
territoriales, le pourcentage : "15,482 %" est remplacé par le pourcentage :
"16,388 %".
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application des
dispositions du I est compensée par le relèvement, à due concurrence, du taux
de l'impôt sur les sociétés. »
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils.
Notre demande est ancienne : cette question du taux de remboursement de la TVA
fâche depuis longtemps les collectivités territoriales. Vous le savez,
celles-ci réalisent un pourcentage important, bien souvent les trois quarts,
des investissements publics qui sont réalisés. C'est pourquoi nous proposons
cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il est tout à fait défavorable, car cette mesure
n'est pas compatible avec la situation budgétaire actuelle.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Défavorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-179.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° I-120 rectifié, présenté par MM. Saugey, du Luart, Bourdin,
Clouet, Lachenaud et Trucy, est ainsi libellé :
« Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 1638
quater
du code général des impôts est complété par le
paragraphe :
« ... - A la suite du rattachement volontaire d'une ou plusieurs communes à un
établissement public de coopération intercommunale soumis aux dispositions de
l'article 1609
nonies
C, le produit de taxe professionnelle versé à
l'établissement est égal à celui versé sur l'intégralité de son territoire
après rattachement des nouvelles communes membres. »
La parole est à M. François Trucy.
M. François Trucy.
Cet amendement concerne le produit de taxe professionnelle versé à un
établissement quand plusieurs communes ont rejoint un établissement public de
coopération intercommunale.
Afin d'éviter la perception d'un produit fiscal fictif, le présent amendement
précise que, à la suite du rattachement d'une ou de plusieurs communes à un
EPCI à TPU, le produit de taxe professionnelle versé à l'établissement est égal
à celui qui est versé sur l'intégralité de son territoire après rattachement
des nouvelles communes membres.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement prévoit que, lorsque de nouvelles
communes adhèrent à un EPCI à taxe professionnelle unique, le produit de la
taxe professionnelle perçu par cet établissement est égal à celui qui est perçu
sur l'intégralité de son territoire, y compris sur le territoire des nouvelles
communes membres.
L'objet de l'amendement paraît justifié. L'analyse que nous avons faite montre
que lorsque des communes entrent dans un tel établissement public, leur taux de
taxe professionnelle est progressivement rapproché de celui de l'établissement
public. Par ailleurs, l'établissement public verse aux communes membres une
attribution de compensation égale au produit de taxe professionnelle perçu
l'année précédant l'institution de la taxe professionnelle unique, diminué du
coût net des charges transférées à l'établissement public.
Deux cas de figure se présentent : soit le taux des communes est supérieur à
celui de l'établissement public et ce dernier ne perçoit pas la totalité du
produit fiscal, soit le taux des communes est inférieur à celui de
l'établissement public et celui-ci perçoit davantage de taxe professionnelle
qu'il en a été prélevée sur les contribuables. Le présent amendement tend à
supprimer de telles situations.
Je le répète, il semble légitime dans sa démarche, mais compte tenu de la
technicité du sujet, la commission souhaite entendre le Gouvernement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Quel dommage !
M. le président.
Dans ces conditions, quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
A cette heure-ci et compte tenu de la technicité du
sujet, la commission suit l'avis défavorable du Gouvernement.
M. le président.
L'amendement n° I-120 rectifié est-il maintenu, monsieur Trucy ?
M. François Trucy.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° I-120 rectifié est retiré.
L'amendement n° I-178, présenté par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans la seconde phrase du II de l'article 1641 du code général des
impôts, le taux : "4,4 %", est remplacé par le taux : "4 %".
« II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, les taux
des prélèvements prévus au 3 de l'article 1641 du code général des impôts sont
relevés forfaitairement à due concurrence. »
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
Un amendement semblable a été adopté par la majorité sénatoriale les années
passées.
Le présent amendement vise à supprimer le prélèvement opéré depuis 1990 au
titre d'une révision des valeurs locatives qui n'a pas eu lieu, alors que
l'Etat a dégagé des moyens suffisants pour la mener. Le prélèvement de 0,4 %
est donc sans objet.
A l'Etat, maintenant, de faire avancer cette révision, en concertation avec
les élus locaux, qui craignent un transfert de charges trop important entre les
contribuables : des hausses très fortes dans les centres villes rénovés et des
baisses drastiques dans le parc locatif social.
Voilà un problème que la réforme des finances locales doit résoudre, et ce
n'est pas en préconisant la responsabilité des élus locaux que nous
avancerons.
Cette fausse solution est d'autant plus inacceptable que l'Etat a procédé,
depuis plus de dix ans, à ce prélèvement de 0,4 %.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement aurait pu être voté dans de meilleures
époques. Malheureusement, le contexte budgétaire ne s'y prête pas
actuellement.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Défavorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-178.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° I-15, présenté par M. Marini, au nom de la commission des
finances, est ainsi libellé :
« Après l'article 14 insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article L. 2333-67 du code général des collectivités territoriales
est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions de l'alinéa précédent s'appliquent aux communes
nouvellement incluses dans un périmètre de transports urbains à la suite du
transfert à l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité
propre dont elles sont membres de la compétence en matière de transports
publics urbains.
« II. - La perte de recettes résultant pour les établissements publics de
coopération intercommunale des dispositions du I ci-dessus est compensée à due
concurrence par une majoration des attributions reçues au titre de la dotation
globale de fonctionnement.
« III. - La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du II
ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe
additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement a pour objet de préciser une
disposition qui est issue de l'article 55 de la loi du 27 février 2002 relative
à la démocratie de proximité.
Cet article prévoit, en effet, que lorsque des communes sont incluses dans un
périmètre de transport urbain du fait de leur adhésion à un établissement
public de coopération intercommunale, un EPCI, le taux du versement transport
applicable sur leur territoire peut être modulé pendant cinq ans sur décision
de l'organe délibérant de l'EPCI.
Le présent amendement vise à étendre cette possibilité de modulation aux
communes qui sont incluses dans un périmètre de transport urbain à la suite du
transfert, par ces communes, de la compétence en matière de transport urbain à
l'EPCI auquel elles appartiennent.
C'est une mesure de lissage qui doit faciliter la dévolution de la compétence
en matière de transport à certains établissements publics de coopération
intercommunale.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Le Gouvernement est favorable à cet amendement, sous
réserve que les II et III soient supprimés,...
M. Michel Charasse.
Il s'agit de lever le gage !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
... ce qui lui semble tout à fait possible.
En fait, je lève le gage !
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° I-15 rectifié, qui est ainsi libellé
:
« Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 2333-67 du code général des collectivités territoriales est
complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions de l'alinéa précédent s'appliquent aux communes
nouvellement incluses dans un périmètre de transports urbains à la suite du
transfert à l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité
propre dont elles sont membres de la compétence en matière de transports
publics urbains. »
Je mets aux voix l'amendement n° I-15 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 14.
Article 14 bis
M. le président.
« Art. 14
bis
. - A la fin du VI de l'article 1648 B
bis
du code
général des impôts, la somme : "305 euros" est remplacée par la somme : "300
euros". » -
(Adopté.)
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
5
TEXTES SOUMIS AU SÉNAT EN APPLICATION
DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de décision du Conseil relative à la signature et à
l'application provisoire de l'accord sur le commerce des produits textiles
entre la Communauté européenne et le Royaume du Népal paraphé à Bruxelles le 23
octobre 2002.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-2139 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de décision du Conseil relative à la signature et à
l'application provisoire de l'accord sur le commerce des produits textiles
entre la Communauté européenne et le Royaume du Cambodge paraphé à Phnom Penh
le 18 octobre 2002.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-2140.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Accord complémentaire entre les Etats-Unis d'Amérique et l'Office européen
de police relatif à l'échange de données à caractère personnel et d'information
y afférentes.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-2141 et distribué.
6
DÉPÔT D'UN RAPPORT
M. le président.
J'ai reçu de M. Alain Vasselle,rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au
nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les
dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 2003.
Le rapport sera imprimé sous le n° 78 et distribué.
7
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée à aujourd'hui, mercredi 27 novembre 2002, à neuf heures trente, quinze
heures et le soir :
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2003, adopté par
l'Assemblée nationale (n°s 67 et 68, 2002-2003) (M. Philippe Marini, rapporteur
général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation).
Première partie (suite). - Conditions générales de l'équilibre financier :
- Article 33 (évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l'Etat au
titre de la participation de la France au budget des Communautés
européennes).
M. Denis Badré, rapporteur spécial (rapport n° 68, tome II, fascicule 2 :
affaires européennes et article 33).
- Suite de l'examen des articles 29 à 32 relatifs aux finances locales et
articles additionnels :
- après l'article 29 (amendements n°s I-94, I-95, I-191, I-192 et I-193) ;
- après l'article 30 (amendement n° I-79 rectifié) ;
- après l'article 32 (amendements n°s I-18, I-98, I-197, I-199 et I-198).
- Suite de l'examen des articles de la première partie : amendement n° I-202
tendant à insérer un article additionnel après l'article 23
bis
jusqu'à
l'article 34 et état A (à l'exception de l'article 33 et des articles relatifs
aux finances locales).
Aucun amendement aux articles de la première partie de ce projet de loi de
finances n'est plus recevable.
- Eventuellement, seconde délibération.
- Explications de vote.
- Vote sur l'ensemble de la première partie.
En application de l'article 59, premier alinéa, du règlement, il sera procédé
à un scrutin public ordinaire.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans les discussions précédant
l'examen des crédits de chaque ministère
Le délai limite pour les inscriptions de parole dans les discussions précédant
l'examen des crédits de chaque ministère est fixé à la veille du jour prévu
pour la discussion, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements aux crédits
budgétaires pour le projet de loi de finances pour 2003
Le délai limite pour le dépôt des amendements aux divers crédits budgétaires
et articles rattachés du projet de loi de finances pour 2003 est fixé à la
veille du jour prévu pour la discussion, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée le mercredi 27 novembre 2002, à zéro heure vingt.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD
QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Mise en oeuvre de l'accord-cadre
« Plan bois construction environnement »
108.
- 25 novembre 2002. -
M. Philippe Leroy
attire l'attention de
M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de
la mer
sur la mise en oeuvre de l'accord-cadre « Plan, bois construction
environnement ». Ce dernier, signé en mars 2001, par neuf ministères et neuf
organisations professionnelles, vise à accroître par mesures incitatives la
consommation de bois de 25 % en dix ans dans la construction. Il permettrait en
outre de stocker 7 millions de tonnes de carbone supplémentaires par an, soit
14 % des engagements de réduction des effets de serre pris par la France à
Kyoto. Par ailleurs, la profession est toujours dans l'attente du décret
d'application de l'article 21-5 de la loi n° 96-1236 du 30 décembre 1996 sur
l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie qui doit indiquer les quantités
minimales de bois à intégrer dans toute construction nouvelle. Il le prie de
bien vouloir lui préciser les initiatives qu'il entend prendre afin de relancer
l'application de ces décisions.
ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du mardi 26 novembre 2002
SCRUTIN (n° 55)
sur l'amendement n° I-90 présenté par M. Gérard Miquel et les membres du groupe
socialiste et rattachée, tendant à supprimer l'article 23
bis
du projet
de loi de finances pour 2003, adopté par l'Assemblée nationale.
Nombre de votants : | 319 |
Nombre de suffrages exprimés : | 315 |
Pour : | 108 |
Contre : | 207 |
Le Sénat n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (23) :
Pour :
19.
Abstentions :
4. _ MM. François Autain, Jean-Yves Autexier, Pierre
Biarnès et Paul Loridant.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (21) :
Pour :
8. _ MM. Nicolas Alfonsi, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon
Collin, Gérard Delfau, Rodolphe Désiré, François Fortassin et Dominique
Larifla.
Contre :
13.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (94) :
Contre :
93.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Christian Poncelet, président du
Sénat.
GROUPE SOCIALISTE (82) :
Pour :
81.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Bernard Angels, qui présidait la
séance.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (54) :
Contre :
54.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (41) :
Contre :
41.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (6) :
Contre :
6.
Ont voté pour
Nicolas Alfonsi
Michèle André
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Marie-France Beaufils
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Danielle Bidard-Reydet
Marie-Christine Blandin
Nicole Borvo
Didier Boulaud
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Claire-Lise Campion
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Yvon Collin
Gérard Collomb
Yves Coquelle
Raymond Courrière
Roland Courteau
Yves Dauge
Annie David
Marcel Debarge
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Evelyne Didier
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Guy Fischer
François Fortassin
Thierry Foucaud
Jean-Claude Frécon
Bernard Frimat
Charles Gautier
Jean-Pierre Godefroy
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Odette Herviaux
Alain Journet
André Labarrère
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
André Lejeune
Louis Le Pensec
Claude Lise
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Josiane Mathon
Pierre Mauroy
Louis Mermaz
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Roland Muzeau
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Daniel Raoul
Paul Raoult
Daniel Reiner
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Michèle San Vicente
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Jean-Pierre Sueur
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Jean-Marc Todeschini
Pierre-Yvon Tremel
André Vantomme
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Ont voté contre
Nicolas About
Philippe Adnot
Jean-Paul Alduy
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
Gérard Bailly
José Balarello
Gilbert Barbier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Christian Bergelin
Daniel Bernardet
Roger Besse
Laurent Béteille
Joël Billard
Claude Biwer
Jean Bizet
Jacques Blanc
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
Didier Borotra
Joël Bourdin
Brigitte Bout
Jean Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Christian Cointat
Gérard Cornu
Jean-Patrick Courtois
Philippe Darniche
Robert Del Picchia
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Dériot
Sylvie Desmarescaux
Yves Detraigne
Eric Doligé
Jacques Dominati
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Louis Duvernois
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Jean-Claude Etienne
Pierre Fauchon
Jean Faure
Françoise Férat
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Alain Fouché
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean-François Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Christian Gaudin
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Gisèle Gautier
Patrice Gélard
André Geoffroy
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Jacqueline Gourault
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Charles Guené
Michel Guerry
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Françoise Henneron
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Daniel Hoeffel
Jean-François Humbert
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Bernard Joly
Jean-Marc Juilhard
Roger Karoutchi
Joseph Kergueris
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
André Lardeux
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
René-Georges Laurin
Jean-René Lecerf
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Jean-François Le Grand
Serge Lepeltier
Philippe Leroy
Marcel Lesbros
Valérie Létard
Gérard Longuet
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Brigitte Luypaert
Max Marest
Philippe Marini
Pierre Martin
Jean-Louis Masson
Serge Mathieu
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Dominique Mortemousque
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Monique Papon
Anne-Marie Payet
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Josselin de Rohan
Roger Romani
Janine Rozier
Bernard Saugey
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Bruno Sido
Daniel Soulage
Louis Souvet
Michel Thiollière
Henri Torre
René Trégouët
André Trillard
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Jean-Marie Vanlerenberghe
Alain Vasselle
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Jean-Paul Virapoullé
François Zocchetto
Abstentions
François Autain, Jean-Yves Autexier, Pierre Biarnès et Paul Loridant.
N'ont pas pris part au vote
MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Bernard Angels, qui présidait
la séance.
Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification, conformes
à la liste de scrutin ci-dessus.