SEANCE DU 23 OCTOBRE 2002
SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. DANIEL HOEFFEL
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Salaires, temps de travail et développement de l'emploi.
- Suite de la discussion d'un projet de loi (p.
1
).
Article 2 (suite) (p. 2 )
Amendements n°s 40 de M. Gilbert Chabroux et 83 de M. Roland Muzeau. - MM.
Claude Domeizel, Roland Muzeau, Daniel Hoeffel, rapporteur de la commission des
affaires sociales ; François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail
et de la solidarité ; Henri Weber. - Rejet des deux amendements.
Amendement n° 41 de M. Gilbert Chabroux. - MM. Gilbert Chabroux, le rapporteur,
le ministre. - Rejet.
Amendement n° 82 de M. Roland Muzeau. - MM. Roland Muzeau, le rapporteur, le
ministre, Henri Weber, Guy Fischer, Jean-Pierre Fourcade. - Rejet.
Amendements n°s 84 à 86 de M. Roland Muzeau, 42 à 44 rectifié, 45 de M. Gilbert
Chabroux ; amendements identiques n°s 46 rectifié de M. Gilbert Chabroux et 87
rectifié de M. Roland Muzeau ; amendement n° 88 de M. Roland Muzeau. - MM.
Roland Muzeau, Gilbert Chabroux, le rapporteur, le ministre. - Rejet des dix
amendements.
Amendement n° 48 de M. Gilbert Chabroux. - MM. Gilbert Chabroux, le rapporteur,
le ministre. - Rejet.
Amendement n° 89 de M. Roland Muzeau. - MM. Guy Fischer, le rapporteur, le
ministre. - Rejet.
Amendements n°s 90 de M. Roland Muzeau et 47 de M. Gilbert Chabroux. - MM. Guy
Fischer, Gilbert Chabroux, le rapporteur, le ministre. - Rejet des deux
amendements.
Amendement n° 17 de M. Philippe Adnot. - MM. Philippe Adnot, le rapporteur, le
ministre. - Retrait.
Amendements identiques n°s 49 rectifié de M. Gilbert Chabroux et 91 de M.
Roland Muzeau ; amendements n°s 92, 93 de M. Roland Muzeau et 50 de M. Gilbert
Chabroux. - MM. Gilbert Chabroux, Roland Muzeau, le rapporteur, le ministre,
Henri Weber. - Rejet des cinq amendements.
Amendement n° 126 de M. Philippe Marini. - MM. Philippe Marini, le rapporteur,
le ministre. - Retrait.
Amendements identiques n°s 51 de M. Gilbert Chabroux et 94 de M. Roland Muzeau
; amendement n° 52 de M. Gilbert Chabroux. - MM. Gilbert Chabroux, Roland
Muzeau, le rapporteur, le ministre, Jean Chérioux. - Rejet des trois
amendements.
Amendement n° 127 de M. Philippe Marini. - MM. Philippe Marini, le rapporteur,
le ministre. - Retrait.
Amendements identiques n°s 53 de M. Gilbert Chabroux et 95 de M. Roland Muzeau.
- MM. Gilbert Chabroux, Roland Muzeau, le rapporteur, le ministre. - Rejet des
deux amendements.
Amendement n° 18 de M. Bernard Joly. - MM. Bernard Joly, le rapporteur, le
ministre. - Retrait.
Amendements identiques n°s 54 de M. Gilbert Chabroux et 96 de M. Roland Muzeau.
- MM. Gilbert Chabroux, Guy Fischer, le rapporteur, le ministre. - Rejet des
deux amendements.
Amendements identiques n°s 55 de M. Gilbert Chabroux et 97 de M. Roland Muzeau
; amendements n°s 19 de M. Bernard Joly, 56 de M. Gilbert Chabroux, 3 de la
commission et 128 de M. Philippe Marini. - MM. Gilbert Chabroux, Roland Muzeau,
Bernard Joly, le rapporteur, Philippe Marini, le ministre. - Retrait de
l'amendement n° 19 ; rejet des amendements n°s 55, 97 et 56 ; adoption de
l'amendement n° 3, l'amendement n° 128 devenant sans objet.
Amendement n° 98 de M. Roland Muzeau. - MM. Guy Fischer, le rapporteur, le
ministre. - Rejet.
Amendement n° 57 de M. Gilbert Chabroux. - MM. Gilbert Chabroux, le rapporteur,
le ministre. - Rejet.
Amendement n° 20 de M. Bernard Joly. - Retrait.
Amendement n° 4 de la commission et sous-amendement n° 141 de M. Bernard Joly ;
amendements identiques n°s 21 de M. Bernard Joly et 139 rectifié de M.
Jean-Louis Lorrain ; amendement n° 129 de M. Philippe Marini. - MM. le
rapporteur, Bernard Joly, le ministre, Jean-Louis Lorrain, Philippe Marini. -
Retrait des amendement n°s 129, 4, 21 et 139 rectifié, le sous-amendement n°
141 devenant sans objet.
Amendement n° 58 de M. Gilbert Chabroux. - MM. Gilbert Chabroux, le rapporteur,
le ministre. - Rejet.
Amendements identiques n°s 59 de M. Gilbert Chabroux et 99 de M. Roland Muzeau
; amendements n°s 5, 6 de la commission, 22 rectifié de M. Bernard Joly, 130,
132, 133, 134 de M. Philippe Marini et 60 de M. Gilbert Chabroux. - MM. Gilbert
Chabroux, Roland Muzeau, le rapporteur, Bernard Joly, Philippe Marini, le
ministre, Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. -
Retrait des amendements n°s 130, 132 et 133 ; rejet des amendements n°s 59, 99,
22 rectifié, 134 et 60 ; adoption des amendements n°s 5 et 6.
Amendement n° 131 de M. Philippe Marini. - M. Philippe Marini. - Retrait.
Amendement n° 145 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 2 (p. 3 )
Amendement n° 137 de M. Louis de Broissia. - MM. Louis de Broissia, le
rapporteur, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 23 de M. Bernard Joly. - MM. Bernard Joly, le rapporteur, le
ministre. - Retrait.
Article 2 bis (p. 4 )
M. Jean-Pierre Godefroy.
Amendements identiques n°s 61 de M. Gilbert Chabroux et 100 de M. Roland Muzeau
; amendements n°s 123 de M. Alain Gournac et 34 rectifié de M. André Geoffroy.
- MM. Gilbert Chabroux, Roland Muzeau, Alain Gournac, André Geoffroy, le
rapporteur, le ministre, Guy Fischer, Claude Domeizel, Jean-Pierre Godefroy,
Eric Doligé, le président de la commission. - Rejet, par scrutin public, des
amendements n°s 61 et 100 ; retrait des amendements n°s 123 et 34 rectifié.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l'article 2 bis (p. 5 )
Amendement n° 135 de M. Philippe Marini. - MM. Philippe Marini, le rapporteur,
le ministre. - Retrait.
Amendements n°s 101 et 102 de M. Roland Muzeau. - MM. Roland Muzeau, le
rapporteur, le ministre. - Rejet des deux amendements.
Article 2 ter (p. 6 )
Amendement n° 62 de M. Gilbert Chabroux. - MM. Gilbert Chabroux, le rapporteur,
le ministre. - Rejet.
Adoption de l'article.
Article 3 (p. 7 )
Amendements identiques n°s 63 de M. Gilbert Chabroux et 103 de M. Roland Muzeau
; amendements n°s 7 de la commission et 24 de M. Bernard Joly. - MM. Gilbert
Chabroux, Guy Fischer, le rapporteur, Bernard Joly, le ministre. - Retrait de
l'amendement n° 24 ; rejet des amendements n°s 63 et 103 ; adoption de
l'amendement n° 7.
Adoption de l'article modifié.
Suspension et reprise de la séance (p. 8 )
PRÉSIDENCE DE M. ADRIEN GOUTEYRON
3.
Modification de l'ordre du jour
(p.
9
).
4.
Salaires, temps de travail et développement de l'emploi.
- Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi (p.
10
).
Article additionnel après l'article 3 (p. 11 )
Amendement n° 25 de M. Bernard Joly. - MM. Bernard Joly, Daniel Hoeffel, rapporteur de la commission des affaires sociales ; François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Articles additionnels après l'article 3 ou après l'article 5 (p. 12 )
Amendements n°s 140 rectifié de M. Jean-Louis Lorrain, 26 de M. Bernard Joly et 106 à 109 de M. Roland Muzeau. - MM. Jean-Louis Lorrain, Bernard Joly, Mme Michelle Demessine, MM. le rapporteur, le ministre. - Retrait des amendements n°s 140 rectifié et 26 ; rejet des amendements n°s 106 à 109.
Article 4 (p. 13 )
Amendements identiques n°s 64 de M. Gilbert Chabroux et 104 de M. Roland Muzeau
; amendements n°s 143, 142 du Gouvernement et 8 de la commission. - MM. Gilbert
Chabroux, Roland Muzeau, le ministre, le rapporteur. - Rejet des amendements
n°s 64 et 104 ; adoption des amendements n°s 143, 8 et 142.
Adoption de l'article modifié.
Article 5 (p. 14 )
Amendement n° 105 de M. Roland Muzeau. - MM. Roland Muzeau, le rapporteur, le
ministre, Jean Chérioux. - Rejet.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l'article 5 (p. 15 )
Amendement n° 110 de M. Roland Muzeau. - MM. Roland Muzeau, le rapporteur, le
ministre. - Rejet.
Amendement n° 136 de M. Philippe Adnot. - MM. Philippe Adnot, le rapporteur, le
ministre. - Retrait.
Article 6 (p. 16 )
M. Guy Fischer.
Amendements n°s 65 à 67 de M. Gilbert Chabroux, 111 de M. Roland Muzeau, 124
rectifié de M. Gérard Larcher, 27 de M. Bernard Joly et 9 de la commission. -
MM. Gilbert Chabroux, Roland Muzeau, Gérard Larcher, Bernard Joly, le
rapporteur, le ministre. - Retrait des amendements n°s 124 rectifié et 27 ;
rejet des amendements n°s 65, 111, 66 et 67 ; adoption de l'amendement n° 9.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 6 (p. 17 )
Amendement n° 119 rectifié de M. Alain Vasselle. - MM. Alain Gournac, le
rapporteur, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 120 rectifié de M. Alain Vasselle. - MM. Alain Gournac, le
rapporteur, le ministre. - Retrait.
Article 7 (p. 18 )
Amendements identiques n°s 68 de M. Gilbert Chabroux et 112 de M. Roland Muzeau
; amendements n°s 28 de M. Bernard Joly et 10 à 12 de la commission. - MM.
Gilbert Chabroux, Roland Muzeau, Bernard Joly, le rapporteur, le ministre. -
Retrait de l'amendement n° 28 ; rejet des amendements n°s 68 et 112 ; adoption
des amendements n°s 10 à 12.
Adoption de l'article modifié.
Article 8 (p. 19 )
Amendements identiques n°s 69 de M. Gilbert Chabroux et 113 de M. Roland Muzeau
; amendement n° 144 du Gouvernement. - MM. Gilbert Chabroux, Guy Fischer, le
ministre, le rapporteur. - Rejet des amendements n°s 69 et 113 ; adoption de
l'amendement n° 144.
Adoption de l'article modifié.
Article 9 (p. 20 )
Amendements identiques n°s 70 de M. Gilbert Chabroux et 114 de M. Roland
Muzeau. - MM. Gilbert Chabroux, Guy Fischer, le rapporteur, le ministre. -
Rejet des deux amendements.
Adoption de l'article.
Article 10 (p. 21 )
Amendements identiques n°s 71 de M. Gilbert Chabroux et 115 de M. Roland
Muzeau. - Rejet des deux amendements.
Adoption de l'article.
Article 11 (p. 22 )
Amendements identiques n°s 72 de M. Gilbert Chabroux et 116 de M. Roland Muzeau
; amendement n° 13 de la commission. - Rejet des amendements n°s 72 et 116 ;
adoption de l'amendement n° 13.
Adoption de l'article modifié.
Article 12 (p. 23 )
Amendements identiques n°s 73 de M. Gilbert Chabroux et 117 de M. Roland Muzeau
; amendements n°s 14 de la commission et 74 de M. Gilbert Chabroux. - MM.
Gilbert Chabroux, Guy Fischer, le rapporteur, le ministre. - Rejet des
amendements n°s 73, 117 et 74 ; adoption de l'amendement n° 14.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 12 (p. 24 )
Amendement n° 29 de M. Bernard Joly. - MM. Bernard Joly, le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Article 13 (p. 25 )
Amendements identiques n°s 75 de M. Gilbert Chabroux et 118 de M. Roland Muzeau
; amendements n°s 30 et 31 de M. Bernard Joly. - MM. Gilbert Chabroux, Guy
Fischer, Bernard Joly, le rapporteur, le ministre. - Retrait des amendements
n°s 30 et 31 ; rejet des amendements n°s 75 et 118.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l'article 13 (p. 26 )
Amendements n°s 15 rectifié de M. Gérard César et 16 de M. Philippe Arnaud. -
MM. Hilaire Flandre, Louis Moinard, le rapporteur, le ministre. - Retrait des
deux amendements.
Amendements n°s 32 et 33 de M. Bernard Joly. - MM. Bernard Joly, le rapporteur,
le ministre. - Retrait des deux amendements.
Vote sur l'ensemble
MM. Georges Gruillot, Gilbert Chabroux, Roland Muzeau, Jean-Louis Lorrain,
Nicolas About, président de la commission des affaires sociales.
Adoption du projet de loi.
M. le ministre.
5.
Dépôt d'un projet de loi
(p.
27
).
6.
Dépôt d'une proposition de loi
(p.
28
).
7.
Dépôt d'un rapport
(p.
29
).
8.
Dépôt d'un rapport d'information
(p.
30
).
9.
Ordre du jour
(p.
31
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE DANIEL HOEFFEL
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
SALAIRES, TEMPS DE TRAVAIL
ET DÉVELOPPEMENT DE L'EMPLOI
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par
l'Assemblée nationale, relatif aux salaires, au temps de travail et au
développement de l'emploi (n° 21, 2002-2003) [Rapport n° 26 (2002-2003).]
Article 2 (suite)
M. le président.
Nous poursuivons l'examen de l'article 2, dont je rappelle les termes :
Article 2
« Art. 2. - Le code du travail est ainsi modifié :
« I. - A l'article L. 212-5 :
« 1° Les I et II sont remplacés par un I ainsi rédigé :
« I. - Les heures supplémentaires donnent lieu à une majoration de salaire
dont le taux est fixé par un accord de branche étendu. Ce taux ne peut être
inférieur à 10 %. A défaut d'accord, chacune des huit premières heures
supplémentaires donne lieu à une majoration de 25 % et les heures suivantes à
une majoration de 50 %. »
« 2° Le III devient le II ;
« 3° Au premier alinéa du II, les mots : "au II" sont supprimés.
« II. - A l'article L. 212-5-1 :
« 1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Les heures supplémentaires de travail mentionnées à l'article L. 212-5 et
effectuées à l'intérieur du contingent conventionnel fixé selon les modalités
prévues au deuxième alinéa de l'article L. 212-6 lorsqu'il existe ou, à défaut,
du contingent fixé par le décret prévu au premier alinéa de l'article L. 212-6,
ouvrent droit à un repos compensateur obligatoire dont la durée est égale à 50
% du temps de travail accompli en heures supplémentaires au-delà de quarante et
une heures dans les entreprises de plus de vingt salariés. »
« 2° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :
« Les heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent conventionnel
fixé selon les modalités prévues au deuxième alinéa de l'article L. 212-6
lorsqu'il existe ou, à défaut, du contingent fixé par le décret prévu au
premier alinéa de l'article L. 212-6, ouvrent droit à un repos compensateur
obligatoire dont la durée est égale à 50 % de ces heures supplémentaires, pour
les entreprises de vingt salariés au plus, et à 100 % pour les entreprises de
plus de vingt salariés. »
« III. - Le deuxième alinéa de l'article L. 212-6 est ainsi rédigé :
« Le contingent d'heures supplémentaires pouvant être effectuées après
information de l'inspecteur du travail peut être fixé, par une convention ou un
accord collectif de branche étendu, à un volume supérieur ou inférieur à celui
déterminé par le décret prévu au premier alinéa. »
« IV. - A l'article L. 212-8 :
« 1° Au premier alinéa :
«
a)
Après les mots : "n'excède pas", la fin de la première phrase est
ainsi rédigée : "un plafond de 1 600 heures" ;
«
b)
La deuxième phrase est ainsi rédigée :
« La convention ou l'accord peut fixer un plafond inférieur. »
« 2° Au quatrième alinéa, les mots : "la durée moyenne annuelle calculée sur
la base de la durée légale selon la règle définie au premier alinéa et, en tout
état de cause, de" sont supprimés. Le même alinéa est complété par les mots :
"ou d'un plafond inférieur fixé par la convention ou l'accord".
« V. - Dans la deuxième phrase du premier alinéa du II de l'article L. 212-9,
les mots : "trente-cinq heures en moyenne sur l'année et, en tout état de
cause," sont supprimés.
« V
bis.
- Au premier alinéa de l'article L. 212-10, les mots : "et au
premier alinéa du I de l'article L. 212-5," sont remplacés par le mot : ",
au".
« VI. - A l'article L. 212-15-2, les mots : "occupés selon l'horaire collectif
applicable au sein de l'atelier, du service ou de l'équipe auquel ils sont
intégrés et pour lesquels la durée du travail peut être prédéterminée" sont
remplacés par les mots : "dont la nature des fonctions les conduit à suivre
l'horaire collectif applicable au sein de l'atelier, du service ou de l'équipe
auquel ils sont intégrés".
« VII. - A l'article L. 212-15-3 :
« 1° Au deuxième alinéa du II, le mot : "et" est remplacé par le mot : "ou"
;
« 2° La quatrième phrase du premier alinéa du III est ainsi rédigée :
« La convention ou l'accord définit les catégories de cadres concernés dont la
nature des fonctions implique une réelle autonomie dans l'organisation de leur
emploi du temps. »
« VIII. - A l'article L. 227-1 :
« 1° Au premier alinéa, après les mots : "accord d'entreprise ou
d'établissement", sont insérés les mots : "n'ayant pas fait l'objet de
l'opposition prévue à l'article L. 132-26" ;
« 2° La première phrase du deuxième alinéa est complétée par les mots : "ou de
se constituer une épargne" ;
« 2°
bis
Au sixième alinéa, les mots : "de la bonification prévue aux
premier et deuxième alinéas du I de l'article L. 212-5, du repos compensateur
de remplacement défini au premier alinéa du III du même article" sont remplacés
par les mots : "du repos compensateur de remplacement défini au premier alinéa
du II de l'article L. 212-5" ;
« 3° Au onzième alinéa, les mots : "les modalités de conversion en temps des
primes et indemnités" sont remplacés par les mots : "les modalités de
valorisation en temps ou en argent des éléments affectés au compte". »
Dans la discussion de cet article, nous en sommes parvenus à l'examen de deux
amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 40, présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée, est ainsi libellé :
« Après le I de cet article, insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé
:
« ... - L'article L. 212-5 est complété
in fine
par un paragraphe ainsi
rédigé :
« ... - Le refus par le salarié d'effectuer les heures supplémentaires
proposées par l'employeur au-delà des limites fixées par le contrat de travail
ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement, à l'exception des
heures supplémentaires effectuées en cas de travaux urgents dans les cas
énumérés à l'article L. 221-12. »
L'amendement n° 83, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fisher et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le I de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - L'article L. 212-5 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Le refus du salarié d'effectuer les heures supplémentaires proposées
par l'employeur ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement. »
La parole est à M. Claude Domeizel pour défendre l'amendement n° 40.
M. Claude Domeizel.
Le projet de loi s'inscrit dans une logique de banalisation des heures
supplémentaires, qui vont devenir des heures structurelles.
Notre amendement n° 40 découle de notre conception, bien différente, des
heures supplémentaires.
Le refus par le salarié d'effectuer les heures supplémentaires proposées par
l'employeur au-delà des limites fixées par le contrat de travail ne doit pas
constituer une faute ou un motif de licenciement.
Nous considérons que les heures supplémentaires doivent être effectuées avec
l'accord du salarié concerné, sauf en cas de travaux urgents dont l'exécution
immédiate est nécessaire pour prévenir des accidents imminents ou réparer des
dégâts survenus au matériel, aux installations ou aux bâtiments.
M. le président.
La parole est à M. Roland Muzeau pour présenter l'amendement n° 83.
M. Roland Muzeau.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen attachent une
importance toute particulière au présent amendement, qui pose le principe selon
lequel le refus du salarié d'exécuter des heures supplémentaires ne peut être
considéré comme fautif et justifier un licenciement.
Dans la mesure où l'objet de ce texte, monsieur le ministre, est de permettre
aux salariés qui le veulent de travailler plus, je ne vois pas pourquoi,
logiquement, vous n'accepteriez pas notre proposition.
Bien que la jurisprudence ait quelque peu évolué, les juges retiennent,
traditionnellement, l'idée selon laquelle les heures supplémentaires sont
obligatoires lorsque l'employeur les a décidées.
Si rien n'est ajouté au code du travail, je ne vois pas comment, demain, les
salariés seront libres d'accepter ou non d'exécuter des heures
supplémentaires.
Nous aurions pu également proposer que les salariés donnent leur accord. Si
nous avons fait un autre choix, c'est que nous connaissons bien les limites du
volontariat, s'agissant par exemple du travail de nuit ou du travail le
dimanche, et que nous considérons que, dans les faits, les salariés sont
rarement assez libres pour se permettre de refuser tant les rapports de force
sont déséquilibrés.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur de la commission des affaires sociales.
La commission estime
qu'il n'est pas raisonnable de remettre en cause l'équilibre des rapports entre
salariés et employeurs à l'occasion du présent projet de loi et de revenir sur
une jurisprudence claire et ancienne, dont les arrêts sont restés constants,
que ce soit en 1988, en 1990 ou en 1991, contrairement aux affirmations de M.
Muzeau.
En outre, comme les heures supplémentaires constituent en elles-mêmes le moyen
d'assurer notamment l'adaptation de l'entreprise aux fluctuations de
l'activité, introduire pour le salarié la possibilité de les refuser conduirait
à mettre en péril l'existence même des entreprises.
C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur ces
deux amendements.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
Le
Gouvernement est également défavorable à ces deux amendements.
Le projet de loi qui vous est proposé ne remet pas en cause les grands
équilibres de notre législation du travail, équilibres que, d'ailleurs, la
gauche n'avait pas souhaité remettre en cause non plus lorsque les lois
précédentes ont été votées.
Il serait tout à fait contre-productif de modifier ces équilibres à l'occasion
de ce texte.
Les heures supplémentaires sont avant tout destinées à répondre à des à-coups
dans le plan de charge de l'entreprise. Elles font d'ores et déjà l'objet de
négociations à l'intérieur de nombreuses entreprises et mon souhait est que ce
soit le cas le plus souvent possible.
Je crois donc que le législateur serait mal inspiré de fixer une règle
applicable pour tous qui tendrait à revenir sur la jurisprudence et sur le code
du travail.
M. le président.
La parole est à M. Henri Weber pour explication de vote sur l'amendement n°
40.
M. Henri Weber.
Les avis défavorables de la commission et du Gouvernement sur ces deux
amendements jettent une lumière crue sur les véritables motivations qui
sous-tendent ce projet de loi.
On nous a expliqué qu'il s'agissait d'une loi de liberté, visant à mettre à
bas les contraintes et les mesures autoritaires qui figurent dans les deux lois
Aubry, de manière que ceux qui souhaitent travailler plus pour gagner plus
puissent le faire et que ceux qui souhaitent travailler moins pour jouir de
leurs loisirs puissent le faire également.
Cela, c'est le discours. La réalité est toute différente.
Vous savez bien, en effet, qu'il existe une asymétrie des droits puisque la
décision du chef d'entreprise emporte obligation et que le salarié ne peut pas
s'y soustraire.
Par conséquent, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, votre rejet de
ces deux amendements fait litière de toute votre argumentation en faveur d'une
certaine liberté.
Au demeurant, à l'asymétrie des droits s'ajoute un rapport de force sur le
marché du travail qui est déjà plutôt défavorable aux salariés et qui risque,
hélas ! de se dégrader encore, non seulement du fait de l'application du texte
que vous nous proposez mais aussi en raison de l'évolution de la conjoncture
nationale et internationale.
Pour toutes ces raisons, je considère qu'il est impératif d'adopter l'un de
ces deux amendements.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 40.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 83.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 41, présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée, est ainsi libellé :
« Après le I de cet article, insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé
:
« L'article L. 212-5 est complété
in fine
par un paragraphe ainsi
rédigé :
« Les salariés doivent être prévenus des changements de leurs horaires de
travail dans un délai qui ne peut être inférieur à trois jours ouvrés avant
toute proposition d'heures supplémentaires faite par l'employeur. »
La parole est à M. Gilbert Chabroux.
M. Gilbert Chabroux.
Cet amendement est relatif au délai requis pour prévenir les salariés dans le
cas où l'employeur leur demande d'effectuer des heures supplémentaires.
Nous souhaitons que ce délai ne soit pas inférieur à trois jours ouvrés, comme
c'est le cas pour les heures complémentaires des salariés à temps partiel. Un
salarié ou une salariée doit avoir le temps de s'organiser pour faire face,
notamment, à ses obligations familiales.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
La commission est défavorable à cet amendement au motif qu'il
oblige l'employeur à prévenir le salarié trois jours à l'avance pour chaque
heure supplémentaire.
En effet, par nature, les heures supplémentaires visent avant tout à faire
face à des à-coups de production et à des imrévus, qu'il n'est pas toujours
possible de prévoir trois jours à l'avance.
M. Claude Domeizel.
La plupart du temps, l'employeur le sait longtemps avant !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Le Gouvernement partage l'avis de la commission sur cet
amendement.
M. le président.
La parole est à M. Henri Weber pour explication de vote.
M. Henri Weber.
On nous a demandé pourquoi nous n'avions pas pris nous-mêmes une telle mesure
lorsque nous avions la majorité à l'Assemblée nationale. Nous ne l'avons pas
fait précisément parce que nous avons réduit à 130 heures la possibilité de
recourir aux heures supplémentaires. Lorsque l'on passe de 130 heures à 180
heures, la question se pose tout de même de façon quelque peu différente !
On peut considérer qu'un chef d'entreprise peut prévoir trois jours à l'avance
ses besoins en heures supplémentaires et en avertir le salarié concerné.
Celui-ci a aussi ses obligations familiales et personnelles ! Il ne doit pas
être taillable et corvéable à merci !
M. Jean-Pierre Godefroy.
Très bien !
M. Nicolas About,
président de la commission des affaires sociales.
Cela ne tient pas
debout !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 41.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 82, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le I de cet article, insérer un paragrahe ainsi rédigé :
« L'article L. 212-5 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« La convention ou l'accord collectif soumis à l'extension doit avoir
recueilli les signatures d'organisations syndicales ayant obtenu la majorité
des suffrages exprimés aux élections de comités d'entreprise dans les
entreprises de branche d'activé considérée et s'étant déroulées au cours des
deux années précédant la signature de l'accord ; cette majorité est constatée à
partir des procès-verbaux d'élection qui sont adressés à l'administration
compétente ; chaque année l'administration compétente informe les organisations
syndicales de salariés et d'employeurs sur l'influence chiffrée de chaque
organisation syndicale. L'accord d'entreprise ou d'établissement doit avoir
recueilli la majorité des suffrages exprimés aux dernières élections
professionnelles. Au cas où, ultérieurement à la signature de l'accord, les
syndicats signataires deviennent minoritaires, l'accord ne continue à produire
ses effets qu'autant qu'il est renégocié et remplit à nouveau les conditions
prévues au présent article. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer.
Nous avons déposé des amendements de suppression sur toutes les dispositions
du texte - trop nombreuses à nos yeux - qui font entrer dans le champ de la
négociation des pans entiers de normes législatives ou réglementaires. Il y a
deux raisons principales à cela.
En premier lieu, nous pensons que la loi n'est pas subsidiaire et que les
garanties réglementaires ne sont pas supplétives.
En second lieu, à l'instar du professeur Antoine Lyon-Caen, nous considérons
que « notre dispositif de négociation collective est adapté à un système où la
négociation est complémentaire de la loi » et que, par conséquent, « toute
extension du rôle de la négociation invite à revenir sur les règles actuelles
».
Un article de
La Tribune
du 10 avril 2002 pointait bien ce problème de
droit.
Monsieur le ministre, puisque vous entendez renforcer le rôle des partenaires
sociaux, acceptez au moins, parallèlement, de réunir les conditions d'un
dialogue social de qualité. La règle majoritaire comme condition de validité
des accords sur la réduction du temps de travail était un premier pas. Vous
ignorez pourtant des avancées permises dans les entreprises.
Pour rendre aux négociations toute leur crédibilité, il convient de mettre un
terme au système actuel, qui permet à une organisation minoritaire d'engager
l'ensemble des salariés en signant un accord dérogeant à la loi dans un sens
moins favorable.
Nous proposons d'introduire l'exigence de la règle majoritaire dans la
négociation sociale.
Je ne comprendrais pas que vous me répondiez, monsieur le ministre, qu'il est
trop tôt pour modifier les règles dans un sens plus conforme à la démocratie
sociale. N'avez-vous pas déjà décidé d'avancer sur ce sujet dans un texte
réformant la loi de modernisation sociale ?
Sur ce point, comme sur la question de savoir quelles sont les conditions que
vous posez à l'extension des futurs accords, j'attends des éclaircissements.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Cet amendement, comme un certain nombre d'autres qui
suivront, bouleverse le droit des négociations collectives en prévoyant des
accords de branche majoritaires.
Si vous m'y autorisez, monsieur le président, j'indiquerai dès à présent que
la commission est défavorable à l'ensemble de ces amendements, qui obéissent à
une même logique, et ce pour deux raisons principales.
M. Guy Fischer.
Bravo !
M. Louis Souvet,
rapporteur.
D'abord, en l'état actuel de notre droit du travail, la
notion d'accord majoritaire au niveau de la branche apparaît impraticable. Nous
avons constaté ce matin en commission, monsieur Fischer, quelles difficultés
vous avez dû rencontrer pour rédiger votre amendement. Je crois qu'il faut
vraiment fournir beaucoup d'efforts pour essayer de vous suivre dans vos «
méandres » !
M. Guy Fischer.
Nous avons beaucoup travaillé sur ce point, vous le savez, avec des personnes
très qualifiées !
M. Louis Souvet,
rapporteur.
C'est votre avis, nous avons le droit d'avoir le nôtre.
M. Jean Chérioux.
Ce n'est plus un texte législatif, c'est un véritable roman !
M. Guy Fischer.
Si vous n'êtes pas capable de lire un roman, monsieur Chérioux !...
M. le président.
Mes chers collègues, je vous en prie ! Seul M. le rapporteur a la parole. Ceux
qui souhaitent s'exprimer pourront le faire le moment venu...
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Il est en tout cas très difficile de dégager des critères
fiables de majorité et de représentativité à ce niveau. Le texte même de ces
amendements le souligne d'ailleurs très bien, puisqu'il procède par un amalgame
- à l'évidence un peu hâtif - entre la branche et l'entreprise sur ce point. Or
il s'agit de réalités qui sont évidemment très différentes.
Ensuite, un tel bouleversement du droit de la négociation collective à
l'occasion de l'examen du présent texte me semble prématuré. Le Gouvernement a
en effet annoncé qu'il allait ouvrir, dès janvier, une large consultation sur
une réforme de notre droit de la négociation collective, sur la base de la
position commune arrêtée par les partenaires sociaux le 16 juillet 2001. Il est
donc infiniment souhaitable, avant de légiférer en la matière, d'attendre les
résultats de ces négociations.
Notre opposition à ces amendements n'est donc pas une opposition de fond, mais
une simple question d'opportunité immédiate.
M. Guy Fischer.
Alors là ! Je vais vous répondre, monsieur le rapporteur !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Nous sommes là en présence d'une question importante qui mérite
que l'on s'y arrête un instant.
Comme vient de le faire remarquer M. le rapporteur, M. Fischer a fait - en le
sachant, d'ailleurs - un amalgame entre deux réalités très différentes :
l'accord d'entreprise, pour lequel les lois Aubry avaient effectivement prévu
l'application du principe majoritaire, et l'accord de branche. Or, à ma
connaissance, il n'est pas possible de mesurer convenablement aujourd'hui la
représentativité des organisations syndicales au sein des branches en l'absence
d'élection fondée sur ce principe. C'est la raison pour laquelle l'accord
majoritaire n'y a jamais été utilisé.
S'agissant du contingent d'heures supplémentaires, de leur financement et de
la gestion du compte épargne-temps, il est nécessaire - vous en conviendrez
avec moi, monsieur le sénateur - de recourir non pas à de simples accords
d'entreprise, mais à des accords de branche étendus pour organiser le dialogue
social.
Aujourd'hui, s'il n'est pas possible d'imaginer de manière satisfaisante un
accord majoritaire au niveau de la branche, cela ne signifie pas pour autant
que le Gouvernement ne souhaite pas faire évoluer les règles de la démocratie
sociale et les conditions de validation des accords.
Si nous souhaitons aller vers une répartititon quelque peu différente des
rôles entre les partenaires sociaux et le législateur, entre les partenaires
sociaux et l'Etat, il conviendra alors de moderniser le dialogue social, et
notamment d'asseoir la légitimité des organisations syndicales pour que les
modes de validation des accords soient plus démocratiques, et donc moins
discutables.
Cette question, monsieur Fischer, est, vous en conviendrez, très sensible.
M. Guy Fischer.
Elle est majeure ! Sinon, je ne l'aurais pas soulevée !
M. François Fillon,
ministre.
Elle concerne évidemment au premier chef les organisations
syndicales, et vous comprendrez que le Gouvernement ne souhaite pas, au détour
de l'examen d'un amendement, bouleverser tout à coup le mode de fonctionnement
de notre dialogue social. Je souhaite engager un dialogue avec les
organisations syndicales parce que, s'il est un sujet sur lequel un large
consensus doit être dégagé, c'est bien celui-là. Comme je l'ai indiqué, je vais
m'y employer au début de l'année 2003.
Le point de départ de cette réfexion sera, vous le savez, la position commune
qui a été retenue par presque toutes les organisations syndicales, à
l'exception d'une, la CGT
(MM. Jean Chérioux et Alain Gournac s'exclament),
à savoir l'idée de l'accord majoritaire à partir de l'idée de la
représentativité. Je ne dis pas que cette position sera demain parfaitement
transposable dans la législation, mais elle peut servir de point de départ au
débat que nous ouvrirons au début de 2003.
En attendant, il me semble raisonnable de repousser cet amendement.
(Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président.
La parole est à M. Henri Weber pour explication de vote.
M. Henri Weber.
La Haute Assemblée s'honorerait en prenant les devants et en adoptant
l'amendement proposé. Il lui est déjà arrivé d'anticiper ! Point n'est besoin,
à notre avis, d'attendre que le Gouvernement légifère.
Cette clause, l'une des plus pernicieuses de notre droit de la négociation
collective, produit deux effets pervers.
Notre collègue M. Guy Fischer en a signalé un : il suffit qu'une seule
confédération, qu'un seul syndicat, aussi minoritaire soit-il, signe pour que
la mesure puisse être étendue à l'ensemble de la branche.
M. Nicolas About,
président de la commission.
Cette clause, vous l'avez utilisée pour
mettre en oeuvre les 35 heures !
M. Henri Weber.
C'est en tout cas le premier effet pervers.
M. Jacques Peyrat.
Oui, c'était pervers !
M. Henri Weber.
Elle en entraîne cependant un second, qui s'oppose au développement de la
négociation collective et des relations contractuelles dans notre pays,
puisqu'il suffit qu'une seule confédération, aussi minoritaire soit-elle,
signe, pour que toutes les autres se trouvent déresponsabilisées : pourquoi
signeraient-elles à leur tour ?
M. Nicolas About,
président de la commission.
Ça les arrange parfois de ne pas signer !
M. Henri Weber.
Certes, mais cela se fait au détriment du développement des relations
contractuelles dans notre pays.
M. Nicolas About,
président de la commission,
Ah, ça oui !
M. Henri Weber.
Or nos syndicats sont en pleine évolution : le syndicalisme de lutte de
classe, fortement affirmé entre les années quarante et soixante, voire
soixante-dix, est devenu un syndicalisme de proposition, qui entend prendre
toutes ses responsabilités.
Une opportunité nous est désormais offerte désormais de développer réellement
des relations conventionnelles et contractuelles en France, à l'instar de ce
qui se passe dans la plupart des grands pays industriels développés, à
condition cependant que chacun prenne ses responsabilités, soit tenu par sa
signature et ne puisse pas s'en remettre à celle d'autrui.
Telles sont les deux raisons pour lesquelles cette réforme nous paraît
absolument essentielle.
Quant à la représentativité, on peut la mesurer au travers des élections
prud'homales ou professionnelles : les syndicats se soumettent au suffrage
universel des salariés à échéances régulières !
En conclusion, pourquoi notre assemblée, qui se prévaut souvent de sa sagesse
et de sa capacité de travailler sur le long terme et d'anticiper, ne
marquerait-elle pas ici sa volonté de voir évoluer dans un sens positif les
relations professionnelles dans notre pays ?
M. le président.
La parole est à M. Guy Fischer pour explication de vote.
M. Guy Fischer.
Vous comprendrez l'immense déception de Roland Muzeau ainsi que la mienne. En
déposant cet amendement, nous proposions à notre Haute assemblée de faire un
pas véritable vers la démocratie sociale.
M. Henri Weber.
Très juste !
M. Guy Fischer.
M. le ministre a annoncé qu'un texte nous serait soumis au début de l'année
prochaine. Mais nous considérons qu'en votant aujourd'hui notre amendement le
Sénat aurait pu, comme il l'a souvent fait, anticiper sur des textes ou des
décisions gouvernementales. Je vous croyais plus avant-gardiste, monsieur le
président de la commission !
M. Nicolas About,
président de la commission.
Il faut laisser mûrir le dossier !
M. Guy Fischer.
Permettez-moi de citer un exemple puisé aujourd'hui dans
Le Figaro
Economie.
M. Nicolas About,
président de la commission.
Excellente lecture !
M. Alain Gournac.
Très bonne lecture, en effet !
M. Guy Fischer.
Oui, excellente lecture s'il en est, et lecture quotidienne !
M. Roland Muzeau.
Ecoutez bien, monsieur Gournac !
M. Guy Fischer.
Voyez où nous en sommes rendus aujourd'hui !
M. Jacques Blanc.
Oui, quel chemin parcouru !
M. Guy Fischer.
Dans le secteur de la pharmacie, secteur industriel très important - j'en
reviens à mon exemple du
Figaro
-, cinq organisations syndicales
s'opposent à l'annualisation des salaires : la CFDT, la CGC, la CFTC, la CGT et
l'UNSA dénoncent l'attitude du syndicat national de l'industrie pharmaceutique,
le SNIP - ce syndicat qui nous inonde tous très régulièrement de ses
publications -, car ce dernier veut imposer par anticipation l'annualisation
des salaires dans la branche, qui emploie 96 000 salariés, et contourner
l'évolution du SMIC, qui doit selon nous s'apprécier mois par mois.
Le SNIP demande le retour à l'esprit de l'accord de branche sur les salaires
signé en octobre 2000, première étape qui tendait à aligner la grille des 35
heures sur celle des 39 heures.
Nous sommes au coeur du débat, qui me semble important, en matière de
légitimation des accords majoritaires ! C'est en ce sens que nous avons plaidé
et que nous plaidons encore pour rectifier la loi.
M. le président.
La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Fourcade.
Nos collègues du groupe communiste républicain et citoyen ont mis le doigt sur
un vrai problème, à savoir la légitimité de la signature des accords de
branche.
M. Guy Fischer.
Merci, monsieur Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade.
Ce problème, nous le connaissons depuis un certain temps, car il est
récurrent.
Cela étant, je trouve étonnant que les mêmes qui ont voté les 35 heures,...
M. Alain Gournac.
Ah, ça !
M. Jean-Pierre Fourcade.
... disposition qui supposait une annualisation absolue, faute de quoi nos
entreprises n'auraient pas survécu, soutiennent aujourd'hui qu'il faut mettre
en place un mécanisme rigide d'extension subordonné à la signature
d'organisations syndicales ayant obtenu la majorité des suffrages exprimés non
dans les entreprises, mais aux élections aux comités d'entreprise.
M. Alain Gournac.
Incroyable !
M. Jean-Pierre Fourcade.
M. le ministre nous a parfaitement rassurés en disant qu'il allait ouvrir le
débat avec les organisations syndicales.
Selon moi, les négociations doivent s'engager au plus près des conventions
conclues au niveau non des branches mais des entreprises. En effet, la notion
de branche date de 1945, les branches sont de plus en plus nombreuses, et les
organisations syndicales sont disparates en leur sein. Et c'est bien au niveau
de l'entreprise que sont prises les décisions relatives au temps de travail et
à la modification d'un certain nombre de modalités, notamment l'annualisation
!
A partir du moment où le Gouvernement va engager le débat avec les
organisations syndicales sur ce point - et il s'agit d'un vrai sujet : le fait
d'étendre un accord lorsqu'un syndicat représente 3 % ou 4 % des salariés d'une
entreprise n'est pas une bonne chose -, je crois que nous devons laisser à ces
interlocuteurs le soin de régler la question.
Je remercie en tout cas M. Fischer d'avoir proposé au Sénat d'être à
l'avant-garde, mais je ne voudrais pas qu'il soit à l'avant-garde du
durcissement du fonctionnement de nos entreprises.
(Très bien ! et
applaudissements sur les travées de l'Union centriste et du RPR.)
M. Guy Fischer.
Je n'ai pas été entendu !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 82.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je suis saisi de dix amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 84, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le II de cet article. »
L'amendement n° 42, présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée, est ainsi libellé :
« Supprimer le 1° du II de cet article. »
L'amendement n° 85, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le texte proposé par le 1° du II de cet article pour le
premier alinéa de l'article L. 212-5-1 du code du travail :
« Les heures supplémentaires de travail mentionnées à l'article L. 212-5 et
effectuées à l'intérieur du contingent fixé à 130 heures ouvrent droit à un
repos compensateur obligatoire, dont la durée est égale à 50 % du temps de
travail accompli en heures supplémentaires au-delà de la trente-neuvième heure
dans les entreprises de plus de vingt salariés. »
L'amendement n° 43, présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée, est ainsi libellé :
« A la fin du texte proposé par le 1° du II de cet article pour le premier
alinéa de l'article L. 212-5-1 du code du travail, remplacer les mots : "vingt
salariés" par les mots : "dix salariés". »
L'amendement n° 44 rectifié, présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et
Domeizel, Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste,
apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Compléter le texte proposé par le 1° du II de cet article pour le premier
alinéa de l'article L. 212-5-1 du code du travail par une phrase ainsi rédigée
:
« Le dépassement du contingent fixé par le décret prévu au premier alinéa de
l'article L. 212-6 est subordonné à la conclusion d'une convention ou d'un
accord d'entreprise signé par une ou des organisations syndicales
représentatives dans l'entreprise ayant recueilli la majorité des suffrages
exprimés lors des dernières élections au comité d'entreprise ou, à défaut, aux
délégués du personnel. »
L'amendement n° 45, présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée, est ainsi libellé :
« Supprimer le 2° du II de cet article. »
L'amendement n° 86, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par le (2°) du II de cet article pour le troisième
alinéa de l'article L. 212-5-1 du code du travail, remplacer les mots :
"conventionnel fixé selon les modalités prévues au deuxième alinéa de l'article
L. 212-6 lorsqu'il existe, ou à défaut du contingent fixé par le décret prévu
au premier alinéa de l'article L. 212-6" par les mots : "fixé à 130 heures".
»
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 46 rectifié est présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et
Domeizel, Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste,
apparenté et rattachée.
L'amendement n° 87 rectifié est présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M.
Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Dans le texte proposé par le 2° du II de cet article pour le troisième
alinéa de l'article L. 212-5-1 du code du travail, remplacer deux fois les mots
: "vingt salariés" par les mots : "dix salariés". »
L'amendement n° 88, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Compléter
in fine
le texte proposé par le II de cet article pour
l'article L. 212-5-1 du code du travail par deux alinéas ainsi rédigés :
« ...° - Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La convention ou l'accord collectif soumis à l'extension doit avoir
recueilli les signatures d'organisations syndicales ayant obtenu la majorité
des suffrages exprimés aux élections des comités d'entreprise dans les
entreprises de la branche d'activité considérée et s'étant déroulées au cours
des deux années précédant la signature de l'accord ; cette majorité est
constatée à partir des procès-verbaux d'élection qui sont adressés à
l'administration compétente ; chaque année l'administration compétente informe
les organisations syndicales de salariés et d'employeurs sur l'influence
chiffrée de chaque organisation syndicale. L'accord d'entreprise ou
d'établissement doit avoir recueilli la majorité des suffrages exprimés aux
dernières élections professionnelles. Au cas où ultérieurement à la signature
de l'accord les syndicats signataires deviennent minoritaires, l'accord ne
continue à produire ses effets qu'autant qu'il est renégocié et remplit à
nouveau les conditions prévues au présent article. »
La parole est à M. Roland Muzeau pour défendre les amendements n° 84, 85, 86,
87 rectifié et 88.
M. Roland Muzeau.
Monsieur le ministre, les modifications prévues par le projet de loi en ce qui
concerne le contingent annuel d'heures sont substantielles.
Elles mettent fin à l'existence juridique de deux types de contingents : le
contingent réglementaire actuellement fixé à 130 heures par an et par salarié
ouvrant droit à repos compensateur, et le contingent conventionnel fixant le
seuil à partir duquel une autorisation de l'inspection du travail est
obligatoire.
Elles renvoient aux partenaires sociaux la définition du niveau du contingent
unifié.
Les règles applicables en matière de déclenchement du repos compensateur se
trouvent bouleversées, le contingent conventionnel ayant désormais une
incidence sur le calcul du repos compensateur obligatoire et les seuils
déterminant les entreprises visées passant de dix à vingt salariés.
Concrètement, cela se traduit par un rétrécissement du champ du repos
compensateur, dont l'objet est de limiter les excès en matière d'heures
supplémentaires et, par ricochet, d'être un facteur de création d'emplois, mais
également de compenser la pénibilité du travail.
Pour les salariés des entreprises de dix à vingt salariés, c'est une perte
nette de leur droit au repos.
Pour l'ensemble des salariés, notamment ceux qui relèvent de branches où ont
été négociés des contingents supérieurs à 130 heures - 180 heures dans la
métallurgie, 190 heures dans les entreprises de propreté - sachant que le repos
se déclenchait à 130 heures, c'est la perte d'une garantie importante que le
repos serait dû au-delà de 130 heures. C'est aussi beaucoup d'incertitudes
quant aux règles applicables.
Pour les entreprises en revanche, le résultat est extrêmement positif : le
volume des heures travaillées dans l'année sera plus important alors que les
contreparties seront moindres !
A plus long terme, je suis persuadé que ces mesures régressives auront des
incidences négatives sur la santé des salariés, sur leur vie personnelle et
familiale.
Pour toutes ces raisons, nous proposons de supprimer le paragraphe II de
l'article 2.
L'amendement n° 85 vient en complément de l'amendement précédent, qui vise à
supprimer l'ensemble du régime applicable au repos compensateur. Nous aurions
pu nous en tenir à défendre le maintien des règles actuelles en matière de
repos compensateur obligatoire dont la durée est égale à 50 % du temps de
travail accompli en heures supplémentaires effectuées au-delà de 41 heures dans
le cadre du contingent annuel.
Le problème, c'est que ces règles sont mouvantes. A l'avenir, il n'y aura plus
qu'un seul contingent. Dans l'immédiat, le contingent provisoire a été relevé à
180 heures.
A ce propos, monsieur le ministre, il est fort dommage que le décret
augmentant le plafond du contingent annuel ait été publié durant le débat
parlementaire. Je comprends la déception de Gilbert Fournier de la CFDT, qui,
auditionné par la commission des affaires sociales, a dit « regretter la
méthode du Gouvernement (...) qui faussait la négociation collective ».
Nous n'acceptons pas de voir étendre la compétence des partenaires sociaux en
matière de définition du niveau du contingent d'heures supplémentaires dans la
mesure où le seuil à partir duquel le repos compensateur se déclenche fait
partie des avantages minimaux devant être garantis par la loi.
Nous refusons de cautionner l'introduction de règles qui auraient pour effet
d'accentuer les inégalités de traitement entre salariés en fonction de la
taille de l'entreprise.
Prenant acte de certaines insuffisances de la législation actuelle qui permet,
avec un contingent à 130 heures, de pouvoir effectuer jusqu'à 39 heures par
semaine, nous envisageons de fixer législativement le niveau du contingent qui
doit servir de référence pour le calcul du repos compensateur obligatoire et
d'abaisser le seuil de déclenchement du repos de la 41e heure à la 39e
heure.
Les amendements n°s 86 et 87 rectifié transposent les propositions que nous
avons faites précédemment concernant le régime du repos compensateur
obligatoire à l'intérieur du contingent annuel d'heures supplémentaires aux
heures supplémentaires effectuées au-delà de ce contingent.
Nous proposons que le contingent de 130 heures reste la référence pour le
déclenchement du repos compensateur et que le seuil déterminant le taux du
repos compensateur obligatoire ne soit pas modifié.
Sur ce dernier point, je trouve que la justification avancée pour l'élévation
du seuil - le souci de cohérence, dans la mesure où il s'agit du seuil
habituellement retenu par le code du travail - est un peu légère, d'autant que
l'effet des modifications proposées n'est pas sans importance pour les salariés
qui voient leur droit au repos diminuer et sur les accords actuellement en
vigueur.
Monsieur le ministre, si vous êtes aussi soucieux que cela de simplifier,
d'harmoniser afin de rendre plus lisibles les dispositions du code du travail,
pourquoi ne pas abaisser le seuil de 50 salariés à 10 salariés pour l'élection
des délégués du personnel et des délégués syndicaux ?
Cela s'avère d'autant plus nécessaire que votre projet de loi prévoit
l'élargissement du champ de la négociation alors que, bien souvent, sur le
terrain, les représentants du personnel ne sont pas présents.
Plus d'un établissement sur deux n'a aucun représentant. Dans les petites
structures, la situation est pire.
M. Dominique Leclerc.
On n'est plus au xixe siècle !
M. Roland Muzeau.
Allez-vous vous atteler à cette question, monsieur le ministre ?
Monsieur le président, conformément à votre souhait, je vais également
défendre l'amendement n° 88, mais je ne suis pas persuadé qu'une présentation
commune de tous les amendements du groupe communiste républicain et citoyen
soit la meilleure méthode de discussion. Après avoir écouté les avis de M. le
rapporteur et de M. le ministre, je jugerai s'il est souhaitable de continuer à
procéder ainsi.
M. Louis Moinard.
Il faut diminuer le temps de travail !
M. Roland Muzeau.
Mon cher collègue, je comprends bien que laisser les mains libres au MEDEF
soit une de vos priorités. Ce n'est pas la mienne, alors peut-être pouvez-vous
m'écouter !
M. Jacques Peyrat.
Votre priorité, c'est la CGT !
M. Roland Muzeau.
S'agissant de l'amendement n° 88, nous avons déjà eu l'occasion, notamment par
la voix de M. Fischer voilà quelques instants, de nous exprimer sur la
nécessité d'introduire le principe de la règle majoritaire dans la négociation
collective.
Désormais, la nécessaire démocratisation des règles de la négociation
collective se posera avec acuité.
Comment, en effet, se satisfaire du fait que des syndicats qui n'ont qu'un
poids minoritaire puissent engager l'ensemble des salariés sur un accord qui
déroge aux dispositions législatives dans un sens moins favorable aux salariés
? Il est choquant que des aspects tels que ceux de la validité des accords ou
de l'équilibre des négociations n'aient pas d'emblée été pris en compte,
d'autant que votre projet de loi, monsieur le ministre, touche à la hiérarchie
des normes et affaiblit le principe de faveur. Je ne vois qu'une seule
explication : je crains que, comme le MEDEF, vous ne souhaitiez confisquer les
règles de la négociation au profit des chefs d'entreprise, contractualiser au
maximum les relations sociales.
Les négociations collectives auront désormais pour objet, non plus de parfaire
les droits des salariés en matière de conditions de travail ou d'emploi, mais
de suppléer au socle de garanties communes que donne la loi, dans la mesure où
ces négociations « démarrent sur la base de garanties légales affaiblies »,
comme l'ont souligné à juste titre les représentants de la CGT que nous avons
auditionnés.
M. le président.
La parole est à M. Gilbert Chabroux pour présenter les amendements n°s 42, 43,
44 rectifié, 45 et 46 rectifié.
M. Gilbert Chabroux.
Le paragraphe II de l'article 2 prévoit que le repos compensateur de 50 % pour
les heures supplémentaires effectuées au-delà de 41 heures à l'intérieur du
contingent réglementaire de 130 heures soit appliqué non plus par référence à
ce contingent, donc selon une même règle pour les salariés quels que soient les
secteurs, mais en fonction du contingent conventionnel fixé par accord de
branche.
Ce contingent conventionnel varie selon le secteur professionnel. Il est par
exemple de 180 heures dans la métallurgie, ainsi que dans le bâtiment et les
travaux publics, de 182 heures dans l'automobile, de 175 heures à 205 heures
pour certains personnels du textile, de 175 heures dans l'habillement, de 190
heures dans les entreprises de propreté.
Appliquer le régime du repos compensateur selon le contingent conventionnel et
non plus le contingent réglementaire est une manière de réduire l'application
du repos compensateur à 100 % pour les heures supplémentaires effectuées
au-delà du contingent réglementaire - c'est-à-dire jusqu'à 130 heures - dans
les entreprises de dix salariés ou plus et non de vingt salariés comme le
prévoit le texte du projet de loi.
Ce repos compensateur avait été instauré en 1990 pour limiter le recours
abusif aux heures supplémentaires, qui est contraire à l'embauche et à
l'amélioration des conditions de travail et de sécurité.
Ainsi, les salariés des entreprises de d ix à vingt salariés verront-ils leur
repos compensateur purement et simplement supprimé pour les heures
supplémentaires effectuées au-delà de 41 heures dans le cadre du contingent
!
Ces dispositions correspondent à une régression sociale...
M. Guy Fischer.
Très bien !
M. Gilbert Chabroux.
... qui réduit le temps de repos minimal légal des salariés qui connaissent
les conditions de travail les plus difficiles et étend le champ des disparités
des règles de droit social pour les salariés des petites entreprises, soit, au
total, 5 300 000 salariés du secteur marchand.
C'est pour toutes ces raisons que nous demandons la suppression du 1° du
paragraphe II de l'article 42.
Pour les mêmes raisons que celles que je viens de développer, avec
l'amendement n° 43, nous proposons de remplacer le nombre « vingt » par le
nombre « dix » dans le 1° du paragraphe II de l'article 2.
Sinon, les salariés des entreprises de dix à vingt salariés verront leurs
repos compensateurs purement et simplement supprimés pour les heures
supplémentaires effectuées au-delà de quarante et une heures par semaine, dans
le cadre du contingent annuel d'heures supplémentaires.
L'amendement n° 44 rectifié vise à compléter le texte proposé par le 1° du II
de l'article 2, qui est relatif à l'accord de branche.
Compte tenu de l'importance des décisions prises pour les salariés concernés
par ce projet de loi - nos collègues du groupe communiste républicain et
citoyen l'ont d'ailleurs fait observer - qui permet à un accord de branche de
fixer un contingent conventionnel d'heures supplémentaires supérieur au
contingent réglementaire, avec toutes les conséquences qui en découlent pour la
rémunération des heures supplémentaires et le repos compensateur, il est
nécessaire que l'accord de branche soit signé par une ou des organisations
syndicales ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés lors des
dernières élections au comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du
personnel.
Je me permets d'insister sur ce point : c'est la négation de la démocratie que
de considérer qu'un accord de branche peut être signé par une organisation
syndicale minoritaire, voire ultraminoritaire, et étendu ultérieurement. Il est
tout à fait regrettable que le projet de loi revienne sur le début - ce n'était
sans doute qu'un début, mais c'était un premier pas significatif - de la
réforme qui avait été engagée sur ce point par Martine Aubry. La priorité au
dialogue social ne peut faire l'économie d'une telle réforme. Il en va de
l'efficacité et de la pérennité des accords qui seront conclus.
L'amendement n° 45 tend à supprimer le 2° du paragraphe II de l'article 2.
Je ne vais pas reprendre ce que j'ai dit pour demander la suppression du 1° de
ce paragraphe. L'argumentation est la même, mais il s'agit ici des heures
supplémentaires effectuées hors contingent.
Le contingent conventionnel va se substituer au contingent réglementaire pour
le déclenchement du repos compensateur à 100 %.
Le contingent réglementaire était fixé à 130 heures depuis 1982. Pour les
branches professionnelles qui ont un contingent d'heures supplémentaires
supérieur à 130 heures - j'en ai citées un certain nombre - les salariés de ces
secteurs verront leur repos compensateur réduit.
A contrario,
les branches professionnelles qui ont négocié un
contingent conventionnel inférieur à 130 heures, comme l'industrie de
l'agroalimentaire, seront incitées à revoir leur niveau de contingent
conventionnel, surtout si un nouveau décret fixe le contingent réglementaire à
180 heures.
Quant aux salariés des petites entreprises qui ne bénéficient que d'un repos
compensateur à 50 % pour les heures supplémentaires effectuées au-delà du
contingent, leur champ est étendu aux salariés des entreprises de 10 à 20
salariés. Au total, je le répète, ce seront donc 5,3 millions de salariés du
secteur marchand qui seront exclus de ce repos à 100 %. C'est très grave !
Cette disposition correspond à une mesure de régression sociale qui réduit le
temps de repos minimal légal des salariés connaissant les conditions de travail
les plus difficiles et, étend le champ des disparités des règles de droit
social pour les salariés des petites entreprises.
L'amendement n° 46 rectifié s'inscrit dans la même logique.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Avant de donner l'avis de la commission sur les dix
amendements, je voudrais faire une petite déclaration liminaire.
J'ai écouté avec l'attention qui doit être celle d'un rapporteur les propos de
notre collègue M. Chabroux. Je le sais beaucoup trop intelligent, intuitif et
attentif pour penser qu'il ignore - il ne peut que faire semblant -
l'amendement déposé par la commission ! Les propos qu'il a tenus sur le
déclenchement du repos compensateur sont totalement inexacts, il le sait bien,
car ils n'ont pas d'assise véritable au sein de notre commission. Nous en avons
parlé il y a à peine deux ou trois heures ; il ne peut l'avoir oublié !
J'en viens aux amendements.
La commission est défavorable à l'amendement n° 84, qui va à l'encontre du
souci d'accorder plus de latitude aux partenaires sociaux pour la fixation du
contingent conventionnel et de ses conséquences juridiques.
Elle est également défavorable à l'amendement n° 42. Les dispositions qu'il
vise à supprimer sont l'un des apports majeurs du projet, à savoir autoriser
les partenaires sociaux à négocier plus librement le contingent conventionnel
d'heures supplémentaires.
Quant à la différence de traitement selon la taille de l'entreprise, elle
répond à un souci de cohérence, même si je considère que les petites
entreprises seront sans doute appelées, dans les prochaines années, à
rapprocher leurs pratiques de celles des plus grandes.
La commission est défavorable à l'amendement n° 85, car il n'est pas
souhaitable de ramener le contingent à 130 heures, alors qu'un décret vient de
le porter à 180 heures, ni de ramener de la 43e à la 39e heure le seuil à
partir duquel les heures supplémentaires sont majorées de 50 %.
La commission est défavorable à l'amendement n° 43, car l'unification des
seuils est de cohérence et découle logiquement des dispositions de la loi du 19
janvier 2000.
La commission est défavorable à l'amendement n° 44 rectifié, car l'objet du
texte n'est pas de réformer le droit de la négociation collective. Je vois mal
comment un accord d'entreprise pourrait revenir sur les stipulations d'un
accord de branche.
Les règles relatives au contingent conventionnel doivent rester du seul
ressort de la branche.
La commission est défavorable à l'amendement n° 45, car, là encore, il
s'attaque à une disposition centrale du projet de loi, à savoir l'élargissement
de la négociation de branche.
Elle est également défavorable à l'amendement n° 86, par coordination avec sa
position sur l'amendement n° 85, et à l'amendement n° 46 rectifié, par
coordination avec sa position sur l'amendement n° 43.
Elle est encore défavorable à l'amendement n° 87 rectifié, qui était un
amendement de conséquence ; or la conséquence s'applique dans les deux sens.
Elle est aussi défavorable à l'amendement n° 88.
Là encore, les amendements proposent une réforme totale du droit de la
négociation collective, en introduisant des accords de branche « majoritaire »,
ce qui, je le répète, n'est pas l'objet du présent texte.
En l'état actuel, j'estime que seul peut fonctionner l'accord majoritaire
d'entreprise, faute de moyens pour apprécier les conditions de « majorité » au
niveau de la branche. Nous l'avons encore constaté en examinant l'amendement
qui nous a été présenté ce matin en commission. Pourquoi s'arrêter aux
résultats des élections au comité d'entreprise et ne pas, ensuite, prendre en
considération celles des délégués du personnel, etc. ? Nous avions là beaucoup
de sujets à traiter !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 84, qui, à
l'évidence, remet en cause le coeur même du dispositif proposé pour assouplir
les 35 heures et rendre possible la négociation. Car, j'y insiste - ce n'est
pas suffisamment souvent rappelé lors de la présentation des amendements -,
toutes les dispositions dont vous êtes en train de débattre renvoient à une
négociation entre les partenaires sociaux.
Le Gouvernement est également défavorable à l'amendement n° 42, puisqu'il a le
même objectif.
L'amendement n° 43 vise à rétablir le seuil de dix salariés. Or il me semble
plus cohérent de reprendre le seuil de vingt salariés, qui non seulement figure
à de nombreuses reprises dans le code du travail, mais avait été utilisé par la
majorité précédente pour mettre en place des dérogations à la loi sur les 35
heures.
J'ai bien entendu la question posée tout à l'heure par M. Muzeau sur la
modification du seuil de déclenchement des élections professionnelles. C'est un
vrai sujet dont on pourra parler un jour, mais pas à l'occasion de ce texte. En
effet, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, il n'est pas question ici de
récrire le code du travail dans son entier. Ce texte vise uniquement à
assouplir la loi sur les 35 heures et à permettre aux salariés modestes de voir
le SMIC augmenter dans les conditions plus rapides que par le passé.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 44 rectifié, qui porte sur
la question du principe majoritaire ; je me suis déjà longuement expliqué sur
ce point.
Il est défavorable à l'amendement n° 45, qui tend à remettre en cause
l'assouplissement que nous proposons.
Il est évidemment totalement défavorable à l'amendement n° 85, qui vise à
inscrire dans la loi le niveau du contingent d'heures supplémentaires. Même la
majorité précédente n'avait pas estimé nécessaire de le faire. Je profite
d'ailleurs de l'occasion qui m'est offerte pour revenir sur les raisons pour
lesquelles le Gouvernement a souhaité fixer maintenant par décret le niveau du
contingent d'heures supplémentaires.
D'abord, nous ne pouvons pas attendre indéfiniment que les partenaires sociaux
négocient dans les branches sur ces sujets, si nous voulons, sur le plan
économique, retrouver la souplesse qui est attendue et que tous les
observateurs du fonctionnement de nos économies modernes estiment nécessaire,
et respecter l'engagement que nous avions pris à ce sujet.
Ensuite, ce décret est pour le Gouvernement le moyen d'inciter les partenaires
sociaux à négocier. En effet, si sa parution n'était pas subordonnée à un
rendez-vous ultérieur, on pourrait naturellement accuser le Gouvernement
d'imposer un contingent d'heures supplémentaires, alors qu'il renvoyait, par
son projet de loi, à la négociation. En revanche, sans décret, il y a tout lieu
de penser que la négociation ne s'engagerait pas spontanément entre les
partenaires sociaux sur ce sujet difficile.
Avec la formule que nous avons retenue, les partenaires sociaux ont intérêt à
négocier, parce que rendez-vous est pris dans dix-huit mois pour faire le point
sur les accords, qu'ils soient ou non signés, et sur les pratiques dans les
branches et dans les entreprises. Le Conseil économique et social - ce qui est
une nouveauté sur un sujet comme celui-là - sera consulté. Le Gouvernement
pourra alors prendre sa décision définitive.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 86, ainsi qu'à l'amendement
n° 46, qui est un amendement de cohérence.
Il est enfin défavorable à l'amendement n° 96 - je m'en suis déjà expliqué -,
qui porte sur le seuil, ainsi qu'à l'amendement n° 88, qui vise à introduire le
principe majoritaire dont je vous ai dit tout à l'heure qu'il ne me paraissait
pas aujourd'hui opérationnel dans le cadre des accords de branche.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 84.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 42.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix successivement les amendements n°s 85, 43, 44 rectifié, 45,
86, 46 rectifié, 87 rectifié et 88.
(Les amendements ne sont pas adoptés.).
M. le président.
L'amendement n° 48, présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée, est ainsi libellé :
« Après le II de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - La deuxième phrase du premier alinéa de l'article L. 212-6 du code du
travail est ainsi rédigée :
« Ce contingent est réduit à 90 heures par an et par salarié lorsque la durée
hebdomadaire de travail varie dans le cadre d'une convention ou d'un accord
collectif de modulation conclu en application de l'article L. 212-8. »
La parole est à M. Gilbert Chabroux.
M. Gilbert Chabroux.
Cet amendement a pour objet de préciser dans la loi le volume du contingent
annuel réduit et fixé à 90 heures par an et par salarié dans le cadre d'un
accord de modulation des horaires, laquelle facilite déjà l'ajustement du temps
de travail aux besoins de la production.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
La commission est défavorable à l'amendement n° 48, car le
niveau du contingent réglementaire est, par définition, fixé par décret et non
dans la loi. Le décret actuel fixe d'ailleurs un contingent annuel de 90 heures
en cas de modulation.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
L'amendement n° 48 me semble inutile, puisque le décret ne
remet pas en cause les dispositions qui s'appliquaient en cas de recours à la
modulation du temps de travail. Je ne vois donc pas en quoi il pourrait avoir
le moindre intérêt, sauf à être cohérent avec le désir de l'opposition
d'inscrire le contingent d'heures supplémentaires dans la loi. J'ai déjà
expliqué la raison pour laquelle le Gouvernement y était défavorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 48.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 89, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le II de cet article, insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé
:
« ... - Dans les branches d'activité où existe déjà, à la date de la
promulgation de la présente loi, un accord prévoyant un contingent d'heures
supplémentaires supérieur à 130 heures, les règles actuellement en vigueur en
matière de déclenchement du repos compensateur obligatoire continuent de
s'appliquer aux heures supplémentaires effectuées au-delà de 130 heures. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer.
Cet amendement vise à sécuriser la situation des salariés qui travaillent dans
une branche où le contingent d'heures supplémentaires est supérieur au
contingent réglementaire actuel, en posant le principe du maintien des règles
actuelles relatives au déclenchement du repos compensateur.
Dans votre rapport, vous vous interrogez à de nombreuses reprises, monsieur le
rapporteur, sur l'impact des dispositifs proposés sur l'équilibre général des
accords en vigueur.
Vous considérez, à juste titre d'ailleurs - pour une fois, nous sommes
d'accord ! -, « qu'en prévoyant que ce soit désormais le franchissement du
contingent conventionnel qui déclenche le repos compensateur obligatoire, le
projet n'est pas neutre » pour ces accords.
Si certaines branches ont des contingents supérieurs à 130 heures, c'est en
contrepartie de la garantie que le repos compensateur légal se déclenche à 130
heures.
L'unification du contingent légal et conventionnel complexifie la situation
alors que l'objectif était de la simplifier.
Plus grave encore, l'équilibre général des accords est rompu.
Pour régler ce problème de sécurisation des accords actuels conclus en
application des lois « Aubry I et II » - problème qui n'est absolument pas
abordé dans l'article 13 de ce projet de loi dont c'est pourtant l'objet - je
vous propose d'adopter cet amendement, qui pose le principe du maintien des
règles en vigueur lors de la signature de l'accord en matière de déclenchement
du repos compensateur.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Monsieur Fischer, à un détail près - 130 heures contre 180
heures -, votre amendement est le même que celui de la commission.
(Sourires.)
M. Alain Gournac.
Qu'il s'y rallie !
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Il est toutefois incompatible avec la position de la
commission. Je vous ferai donc la même réponse qu'à M. Chabroux : l'amendement
de la commission viendra régler, du moins en partie, cette question.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Le Gouvernement partage l'avis qui vient d'être émis par M. le
rapporteur. Il s'agit des accords qui ont été passés antérieurement au présent
projet de loi. Un amendement a été déposé sur ce sujet, afin de respecter la
volonté des partenaires sociaux et de donner aux accords signés leur plein
effet au vu des dispositions de la nouvelle loi.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 89.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 90, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le III de cet article. »
L'amendement n° 47, présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vincente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée, est ainsi libellé :
« Compléter le texte proposé par le III de cet article pour le deuxième alinéa
de l'article L. 212-6 du code du travail par une phrase ainsi rédigée : "Cet
accord doit être signé par une ou des organisations syndicales représentatives
et majoritaires dans la branche dans des conditions fixées par un accord
national interprofessionnel et reprises par décret". »
La parole est à M. Guy Fischer pour défendre l'amendement n° 90.
M. Guy Fischer.
Considérant que les règles relatives au déclenchement du repos compensateur
obligatoire relèvent de l'ordre public social, nous nous sommes opposés à
l'unification des contingents réglementaire et conventionnel.
Cette unification comporte une conséquence fâcheuse : la primauté du
contingent conventionnel sur le contingent légal en matière de calcul du repos
compensateur.
Le présent amendement tend à supprimer les dispositions du texte qui
permettent justement au contingent conventionnel de jouer un rôle moteur pour
les droits au repos.
M. le président.
La parole est à M. Gilbert Chabroux pour défendre l'amendement n° 47.
M. Gilbert Chabroux.
Il s'agit d'un amendement de cohérence.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Au nom de la même cohérence, la commission est évidemment
défavorable à ces deux amendements.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
En fait, il s'agit de la déclinaison par l'opposition des mêmes
amendements paragraphe par paragraphe. L'avis du Gouvernement est donc le même.
Il ne souhaite pas que l'on rigidifie un texte qui vise, au contraire, à donner
beaucoup de souplesse, à ouvrir la négociation, tout en ayant recours aux
règles actuelles de validation des accords.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 90.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 47.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 17, présenté par M. Adnot, est ainsi libellé :
« Après le III de cet article, insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé
:
« ... - Après l'article L. 212-6, il est inséré un article additionnel ainsi
rédigé :
«
Art. L. ... -
Le contingent fixé au premier alinéa de l'article L.
212-6 est majoré de 20 % pendant les 3 premières années suivant la date de la
création de l'entreprise. »
La parole est à M. Philippe Adnot.
M. Philippe Adnot.
Chacun sait le souci de M. le président du Sénat de favoriser le développement
de la nouvelle économie. Pour ce faire, il a créé un club qui s'appelle «
Club-Sénat.fr ». Cela nous a permis de rassembler un certain nombre de chefs
d'entreprises, de fiscalistes, de financiers notamment, et de prendre en compte
les problèmes de la nouvelle économie, des entreprises jeunes, des entreprises
en fort développement. Or il va de soi que les 35 heures et les heures
supplémentaires telles qu'elles sont calculées à l'heure actuelle ne leur
permettent pas d'assumer pleinement leur mission. L'objet de cet amendement est
donc de favoriser leur développement pendant les trois premières années suivant
la date de leur création en les exonérant de ces contraintes.
Je suis persuadé que la commission et le ministre, qui lui-même est un
spécialiste de ces questions, devraient nous aider à mettre en oeuvre cette
disposition.
Par ailleurs, je sais que la commission a émis un avis favorable sur le
forfait-jours. Si d'aventure le Gouvernement et la commission étaient d'accord
pour favoriser le développement de celui-ci, peut-être mon amendement
n'aurait-il plus de raison d'être.
M. Guy Fischer.
Il n'en a déjà pas !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Cet amendement vise à majorer de 20 % le contingent
réglementaire d'heures supplémentaires pendant les trois premières années
suivant la date de création de l'entreprise. Il est vrai que ces trois années
constituent la phase critique pour une entreprise et nécessitent sans doute des
aménagements spécifiques en matière de temps de travail.
Pour autant, la majoration de 20 % porterait le contingent actuel à 216
heures, soit 36 heures supplémentaires, c'est-à-dire l'équivalent d'une semaine
de travail supplémentaire sur l'année. Cette majoration apparaît dès lors très
élevée.
En outre, le projet de loi renforce l'autonomie des partenaires sociaux en la
matière.
Dans ces conditions, je suis habilité par la commission à demander à notre
collègue M. Adnot de retirer son amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Je suis évidemment très sensible aux arguments de M. Adnot,
dont je connais l'engagement en matière de création d'entreprise.
Tout d'abord, monsieur le sénateur, vous le savez bien, ce projet de loi a
déjà prévu des souplesses en termes d'heures supplémentaires et de contingents,
puisqu'il permet aux partenaires sociaux de négocier des contingents d'heures
supplémentaires conventionnels, qui vaudront à la fois pour l'autorisation de
l'inspecteur du travail et le déclenchement des droits à repos compensateur.
Par conséquent, tout est possible dans ce domaine si les partenaires sociaux le
souhaitent.
Dans l'attente de ces négociations, le Gouvernement a décidé, par décret, de
porter à 180 heures le contingent d'heures supplémentaires.
Par ailleurs, pour les entreprises de moins de vingt salariés, qui sont plutôt
celles que vous visez par votre amendement, il existe, à titre transitoire, un
régime particulier jusqu'à la fin de l'année 2005.
En outre, je ne suis pas sûr qu'il soit vraiment de l'intérêt de ces
entreprises de se mettre, dès leur création, dans une situation de rupture
d'égalité des salariés par rapport aux autres entreprises d'une même
branche.
J'ai déjà fait la même réponse, hier, à M. Marini, lorsqu'il souhaitait que la
négociation sur le contingent puisse avoir lieu au sein des entreprises plutôt
que dans les branches. En effet, il me paraît important que les conditions de
concurrence dans les branches soient à peu près similaires.
C'est la raison pour laquelle je souhaiterais vivement que M. Adnot suive le
conseil de sagesse qui lui a été donné par M. le rapporteur et qu'il retire son
amendement.
M. le président.
Monsieur Adnot, l'amendement est-il maintenu ?
M. Philippe Adnot.
Si nous parvenons à progresser sur le forfait-jours, et sur l'élargissement de
la liste des personnes qui sont concernées par ce forfait-jours, ces
dispositions n'ont pas nécessairement leur raison d'être dans la mesure où l'on
va considérer que les personnes qui travaillent dans les entreprises à forte
croissance et qui sont également relativement autonomes, peuvent bénéficier de
ces mesures. A ce moment-là, nous aurons satisfaction. J'espère que, tout à
l'heure, sur ce sujet, tel sera le cas.
Je retire donc mon amendement.
M. le président.
L'amendement n° 17 est retiré.
Je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 49 rectifié est présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et
Domeizel, Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste,
apparenté et rattachée.
L'amendement n° 91 est présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer le IV de cet article. »
L'amendement n° 92, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le IV de cet article :
« IV. - A l'article L. 212-8 :
« 1° Au premier alinéa :
« Les mots : "trente-cinq heures" sont remplacés par les mots : "trente-deux
heures" ;
« Le nombre : "1 600" est remplacé par le nombre : "1 459" ;
« 2° Après le premier alinéa est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Seules les entreprises appartenant à une branche d'activité fortement
saisonnière, définie par décret, peuvent recourir à la modulation du temps de
travail ; »
« 3° Au troisième alinéa, le nombre : "1 600" est remplacé par le nombre : "1
459" ;
« 4° Après le cinquième alinéa est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les accords de modulation ne peuvent prévoir une limite basse hebdomadaire
inférieure à 30 heures et une limite haute supérieure à 40 heures. Le nombre de
semaines modulables ne peut être supérieur à dix par an. »
« 5° Au septième alinéa, les deuxième et troisième phrases sont supprimées.
»
L'amendement n° 50, présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée, est ainsi libellé :
« Compléter le IV de cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
« ...° Cet article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les accords ou conventions étendus ou convention ou accord d'entreprise ou
d'établissement prévus au présent article doivent être signés par une ou des
organisations syndicales représentatives et majoritaires dans la branche ou
dans l'entreprise ou l'établissement dans des conditions fixées par un accord
national interprofessionnel et reprises par décret. »
L'amendement n° 93, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Compléter
in fine
le IV de cet article par deux alinéas ainsi rédigés
:
« ...° L'article L. 212-8 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La convention ou l'accord collectif soumis à l'extension doit avoir
recueilli les signatures d'organisations syndicales ayant obtenu la majorité
des suffrages exprimés aux élections de comités d'entreprise dans les
entreprises de branche d'activité considérée et s'étant déroulées au cours des
deux années précédant la signature de l'accord ; cette majorité est constatée à
partir des procès verbaux d'élection qui sont adressés à l'administration
compétente ; chaque année l'administration compétente informe les organisations
syndicales de salariés et d'employeurs sur l'influence chiffrée de chaque
organisation syndicale. L'accord d'entreprise ou d'établissement doit avoir
recueilli la majorité des suffrages exprimés aux dernières élections
professionnelles. Au cas où ultérieurement à la signature de l'accord les
syndicats signataires deviennent minoritaires, l'accord ne continue à produire
ses effets qu'autant qu'il est renégocié et remplit à nouveau les conditions
prévues au présent article. »
La parole est à M. Gilbert Chabroux pour présenter les amendements n°s 49
rectifié et 50.
M. Gilbert Chabroux.
L'amendement n° 49 rectifié tend à supprimer le paragraphe IV de l'article 2,
qui remet en cause le principe selon lequel, par semaine travaillée, la durée
hebdomadaire du travail ne doit pas excéder en moyenne trente-cinq heures. En
effet, ce texte fait uniquement référence à la durée annuelle du travail, qui
ne doit pas dépasser un plafond de 1 600 heures.
De même, la suppression de la mention des jours fériés pose problème. En
effet, on peut craindre que l'organisation annuelle de la durée du travail
telle qu'elle est prévue par le projet de loi ne permette plus d'assurer le
paiement des jours fériés.
En fixant un nombre d'heures sur l'année comme seule référence de la durée du
travail, le Gouvernement répond essentiellement à une exigence du Medef, lequel
demande, contrairement aux attentes des salariés, une flexibilité accrue du
temps de travail.
L'amendement n° 50 est relatif à la règle de l'accord majoritaire, sur
laquelle je suis déjà intervenu.
M. le président.
La parole est à M. Roland Muzeau pour défendre les amendements n°s 91, 92 et
93.
M. Roland Muzeau.
Lors de son audition par la commission des affaires sociales, le
vice-président du Medef, M. Gautier-Sauvagnac, après avoir fustigé une nouvelle
fois les 35 heures, s'est félicité de ce que les lois « Aubry I et II » aient «
au moins eu un impact positif facilitant la vie des entreprises (...) en
introduisant plus de flexibilité, notamment en matière d'annualisation du temps
de travail ». C'est le Medef !
M. Nicolas About,
président de la commission.
Chacun ses références !
M. Roland Muzeau.
Je rejoins, une fois n'est pas coutume, le constat qui a été dressé quant à
l'accroissement de la flexibilité, la dégradation des conditions de travail des
salariés, suite à la mise en place de l'annualisation du temps de travail.
En revanche, je ne considère pas que ce soit un point positif, bien au
contraire, dans la mesure où l'employeur échappe ainsi au paiement des heures
travaillées au-delà de la durée légale en compensant avec des semaines où cette
dernière ne sera pas atteinte. En outre, pour les salariés, l'intensification
du travail s'accompagne d'un cortège de désagréments pour la santé, pour la vie
personnelle et familiale.
Sous couvert de simplification du calcul de la durée annuelle du travail en
cas de modulation, le projet de loi supprime la limite de 35 heures en moyenne
par semaine travaillée pour ne retenir que le plafond de 1 600 heures sur
l'année.
En faisant disparaître toute référence à la durée légale hebdomadaire du
travail, fixée à 35 heures, vous donnez satisfaction à une ancienne
revendication du Medef, qui cherche sans cesse à contourner la loi relative au
temps de travail.
En cas d'annualisation, le décompte annuel sur 1 600 heures, sans référence à
un calcul par semaine, fait perdre l'équivalent de deux à trois jours de congé
aux salariés concernés. Cette modification, qui est loin d'être anodine pour
les salariés ne saurait nous convenir.
Par conséquent, je vous propose, par l'amendement n° 91, de supprimer ce
décompte inéquitable pour le salarié.
J'en viens aux amendements n°s 92 et 93.
Le bilan récent dressé par le Gouvernement sur la réduction du temps de
travail, la RTT, confirme ce que nous craignions en 1999, au moment de la
discussion de la loi « Aubry II ». La modulation représente l'une des
principales modalités de la RTT, et ce même dans des secteurs où les
contraintes de l'activité ne le justifient pas.
Engagé en 1995 par la loi quinquennale pour l'emploi, ce type de souplesse est
responsable de la flexibilisation et de la précarisation des conditions de
travail d'un grand nombre de salariés, qui n'ont plus, en conséquence, ni
horaires réguliers ni deux jours de repos consécutifs.
C'est parce que nous ne pensions pas, contrairement au Medef, que « la
formulation d'un horaire sur l'année est un progrès considérable » que nous
étions plus que réservés à l'égard du projet du gouvernement précédent, même si
ce dernier avait pour ambition de lier une modulation du temps de travail mieux
maîtrisée, justifiée, encadrée, à une vraie réduction du temps de travail.
Nous avions alors tenté, par nos amendements, d'avancer le principe
selon lequel tout aménagement du temps de travail doit se faire sur des heures
inférieures à la durée légale, de poser des plafonds et planchers
hebdomadaires, de fixer un nombre de semaines travaillées, d'introduire le
principe de l'accord majoritaire, de limiter le recours à ce type
d'organisation du temps de travail en le circonscrivant aux branches où
l'activité est fortement saisonnière par nature, enfin, de supprimer la
possibilité de déroger par convention au délai de prévenance en cas de
changement dans les horaires de travail.
Aujourd'hui, nous reformulons ces propositions avec d'autant plus de force que
nous savons que les négociations nécessaires à la mise en place d'un accord de
modulation ne sont pas équilibrées et que les contreparties ou garanties
accordées ne sont pas à hauteur des contraintes, tant personnelles que
familiales, supportées par le salarié.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Sur les amendements identiques n°s 49 rectifié et 91, la
commission a donné un avis défavorable : elle ne saurait approuver la
suppression de tout ou partie de l'article 2. En l'espèce, le paragraphe IV de
l'article 2 est une utile simplification du décompte horaire sur l'année,
celui-ci pouvant varier d'une année à l'autre.
Sur l'amendement n° 92, la commission a également émis un avis défavorable. Le
projet de loi ne revient pas sur le régime de modulation unique issu de la loi
du 19 janvier 2000.
La commission a encore émis un avis défavorable sur les amendements n°s 50 et
93. Le droit de la négociation collective a déjà été abordé lors des débats.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Le débat qui s'est engagé à l'occasion de la discussion de ces
amendements ne correspond pas à la réalité du texte qui vous est présenté. En
effet, le Gouvernement ne vous propose pas de revenir sur la durée légale
hebdomadaire du travail : l'article L. 212-1 du code du travail n'est pas
abrogé par ce projet de loi.
La seule référence aux 1 600 heures annuelles a pour unique objet de supprimer
un élément de complexité qui résulte de l'application du mode actuel de
décompte de la durée annuelle du travail. En effet, dans l'état actuel du
droit, ce plafond est susceptible de varier à la marge d'une année sur l'autre,
en fonction du nombre de jours fériés correspondant ou non à un jour de repos
hebdomadaire. Encore une fois, l'article 2 ne vise en rien à remettre en cause
la durée hebdomadaire du travail. Par conséquent, je demande au Sénat de
repousser les amendements identiques n°s 49 rectifié et 91.
J'en viens à l'amendement n° 92, relatif à la modification du dispositif de la
modulation. Le Gouvernement a souhaité laisser toute sa place à la négociation
collective pour la conclusion d'accords de modulation et ne compte pas remettre
en cause le rôle des partenaires sociaux dans ce domaine. C'est à ces derniers,
en effet, qu'il revient de déterminer librement le contenu des accords sur ce
sujet, dans le respect des dispositions légales qui encadrent les accords de
modulation.
Je voudrais rappeler, à ce titre, que, parmi les clauses obligatoires de ces
accords, figurent les données économiques et sociales justifiant le recours à
la modulation. Ces clauses me paraissent constituer une garantie suffisante en
raison des justifications nécessaires pour recourir à de tels accords.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 92.
Quant aux amendements n°s 50 et 93, qui reviennent sur la question de l'accord
majoritaire, le Gouvernement souhaite voir le Sénat les repousser.
M. le président.
La parole est à M. Roland Muzeau pour explication de vote sur les amendements
identiques n°s 49 rectifié et 91.
M. Roland Muzeau.
Monsieur le ministre, je n'ai pas bien compris votre réponse. Vous nous
expliquez tout à la fois que vous ne touchez en rien au décompte de la durée
hebdomadaire du travail, mais que le nouveau dispositif proposé peut avoir des
conséquences, uniquement sur les jours de congé, précisez-vous.
Or nous avons beaucoup travaillé sur ce dispositif et cherché à comprendre le
sens d'un certain nombre des mesures nouvelles qu'il contient et, au terme
d'une lecture non pas partisane, mais bien technique des textes - quelles que
soient les convictions, une analyse technique est possible - nous arrivons à
cette conclusion que les salariés risquent de perdre deux ou trois jours de
congé par an. Que pensez-vous du résultat de ce calcul, monsieur le ministre ?
Pouvez-vous le démentir ? A défaut, s'il y a effectivement perte de jours de
congé, il y a bien recul des droits des travailleurs !
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon,
ministre.
Je ne confirme ni n'infirme, monsieur Muzeau, pour la bonne
raison que cela dépend des années ! En fonction du nombre de jours fériés dans
l'année, les salariés gagneront ou perdront des jours de congé supplémentaires
suivant les années, mais nous aurons une référence qui sera la même pour chaque
année, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Je vous rappelle, en effet, que,
selon le nombre de jours fériés, le plafond varie entre 1 590 et 1 600 heures
environ. Nous avons pour seul objectif d'obtenir une durée égale sur l'année,
quel que soit le nombre de jours fériés, et uniquement dans le cadre des
accords d'annualisation.
M. le président.
La parole est à M. Henri Weber pour explication de vote.
M. Henri Weber.
Monsieur le ministre, nous avons été alertés par la disparition de la
référence aux 35 heures, qui contraste avec le maintien de la seule référence
aux 1 600 heures annuelles. Mais s'il ne s'agit que de régler un problème
d'incidence des jours fériés sur les 1 600 heures et si la durée légale des 35
heures hebdomadaires est clairement réaffirmée, nous pouvons tomber d'accord
très facilement. Car si réellement votre interprétation est la bonne, en quoi
êtes-vous gêné de réintroduire cette référence aux 35 heures hebdomadaires ?
Toute ambiguïté serait alors levée, et l'inquiétude dissipée.
Et n'allez pas invoquer je ne sais quel souci de légèreté rédactionnelle, car
l'ensemble est, de toute façon, assez pesant.
Monsieur le ministre, cette précision utile et nécessaire clarifierait la
situation sans gêner qui que ce soit, du moins si votre interprétation est
juste. En revanche, refuser de réintroduire la référence aux 35 heures, c'est
admettre qu'il y a, dans cette affaire, un peu plus que ce que vous nous en
avez dit !
M. Guy Fischer.
Il y a anguille sous roche !
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Guy Fischer.
Qui est bien embarrassé !
M. François Fillon,
ministre.
Monsieur Weber, je vous répète ce que j'ai dit tout à l'heure à
M. Muzeau : le texte ne vise pas à supprimer l'article L. 212-1 du code du
travail.
M. Henri Weber.
Alors, maintenez cette référence dans le texte !
M. François Fillon,
ministre.
Permettez-moi de rappeler les termes de cet article : « Dans
les établissements ou professions mentionnés à l'article L. 200-1, ainsi que
dans les établissements artisanaux et coopératifs et leurs dépendances, la
durée légale du travail effectif des salariés est fixée à trente-cinq heures
par semaine. »
Cet article demeure, il n'est pas abrogé par notre texte. Donc, ce que vous
nous demandez, monsieur le sénateur, aurait pour seul effet d'insérer deux fois
dans le code du travail le même article. Je ne crois pas que cela soit
nécessaire.
M. Henri Weber.
Cela va mieux en l'écrivant !
M. Alain Gournac.
C'est redondant !
M. Jean Chérioux,
Bis repetita non placent ! (Sourires.)
M. le président.
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 49 rectifié et 91.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président.
Je mets aux voix successivement les amendements n°s 92, 50 et 93.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président.
L'amendement n° 126, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
« Avant le V de cet article, insérer deux paragraphes additionnels ainsi
rédigés :
« ... - La première phrase du I de l'article L. 212-9 du code du travail est
ainsi rédigée :
« La durée hebdomadaire de travail peut varier, dans la limite maximum de 39
heures, par l'attribution sur une période de 4 semaines, selon un calendrier
préalablement établi, d'une ou plusieurs journées ou demi-journées de repos
équivalant au nombre d'heures effectuées au-delà de la durée hebdomadaire de
travail fixée par l'article L. 212-1 ou de la durée conventionnelle si elle est
inférieure. »
« ... - La première phrase du II du même article est ainsi rédigée :
« Une convention ou un accord étendu ou une convention ou un accord
d'entreprise ou d'établissement peut prévoir que la durée hebdomadaire de
travail peut varier sur tout ou partie de l'année, dans la limite maximum de 39
heures, par l'attribution de journées ou demi-journées de repos. »
La parole est à M. Philippe Marini.
M. Philippe Marini.
Cet amendement, essentiellement rédactionnel, part de l'idée suivante : dès
lors que la réduction de la durée légale du travail sera, à court terme,
généralisée, mieux vaut considérer ce dispositif comme étant relatif aux modes
d'organisation du travail et non pas aux modes de réduction de la durée du
travail.
Il s'agit d'inciter à s'organiser au mieux au sein des entreprises, compte
tenu des obligations légales en matière de décompte de la durée du travail.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Cet amendement concerne la réduction du temps de travail par
l'attribution de journées ou de demi-journées de repos. Dans la mesure où le
projet de loi ne remet pas en cause la durée légale du travail et où 13 %
seulement des entreprises sont effectivement passées aux 35 heures, la
rédaction actuelle de l'article L. 212-9 du code du travail ne me paraît pas
inopportune.
Par ailleurs, la référence faite aux 39 heures dans cet amendement pourrait
prêter à confusion.
Pour toutes ces raisons, la commission m'a mandaté pour vous demander de
retirer cet amendement, mon cher collègue.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
La rédaction actuelle de cet article n'est pas parfaite, j'en
conviens. S'il ne s'était agi que du passage aux 35 heures, nous aurions pu
l'améliorer, mais nous ne sommes plus dans une logique de réduction du temps de
travail.
Par cet article, nous entendons dire que la durée globale effective du travail
est réduite par rapport à la durée pratiquée compte tenu de jours ou
demi-journées de repos accordés en contrepartie. De nombreux accords collectifs
ayant été négociés sur ce principe, il n'a pas semblé opportun au Gouvernement
de redéfinir ce dispositif pour des considérations d'ordre rédactionnel. Je
rejoins donc, sur ce point, l'avis de la commission.
M. le président.
L'amendement n° 126 est-il maintenu, monsieur Marini ?
M. Philippe Marini.
Je le retire, monsieur le président.
M. Alain Gournac.
Merci, mon cher collègue.
M. le président.
L'amendement n° 126 est retiré.
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 51 est présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée.
L'amendement n° 94 est déposé par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Tous deux sont ainsi libellés :
« Supprimer le V de cet article. »
L'amendement n° 52, présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée, est ainsi libellé :
« I. - Compléter le V de cet article par les deux aliénas suivants :
« ...° Cet article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les accords ou conventions étendus ou convention ou accord d'entreprise ou
d'établissement prévus au présent article doivent être signés par une ou des
organisations syndicales représentatives et majoritaires dans la branche ou
dans l'entreprise ou l'établissement dans des conditions fixées par un accord
national interprofessionnel et reprises par décret. »
« II. - En conséquence, faire précéder le premier alinéa du V de cet article
de la mention : "1°". »
La parole est à M. Gilbert Chabroux pour présenter les amendements n°s 51 et
52.
M. Gilbert Chabroux.
Monsieur le ministre, malgré les explications que vous avez données, qui
figureront au
Journal officiel
, ce qui est déjà positif, nous nous
interrogeons sur le paragraphe V de l'article 2.
Dans l'état actuel des choses, a disparu la référence à la durée moyenne
hebdomadaire de 35 heures dans les accords qui organisent sur l'année la
réduction du temps de travail en deçà de 39 heures par l'attribution de
journées ou de demi-journées de repos, pour ramener la durée moyenne du travail
à 35 heures par semaine. Nous considérons que maintenir uniquement la référence
à la durée annuelle de 1 600 heures revient à ignorer désormais toute durée
moyenne du temps de travail hebdomadaire.
Nous voudrions faire la lumière sur ce point, qui est déterminant. La loi «
Aubry II » du 19 janvier 2000, qui a introduit cette référence annuelle,
n'était pas destinée à supprimer pour autant la référence à la durée moyenne
hebdomadaire de 35 heures. Elle visait à mettre un terme aux trois systèmes de
modulation annuelle inventés à l'époque de M. Balladur, et à simplifier et à
encadrer la modulation. De plus, cette modulation liée à la réduction du temps
de travail devait être accompagnée d'un contingent spécifique d'heures
supplémentaires inférieur au droit commun et ne pouvait exister que par la
signature d'un accord majoritaire.
Cet équilibre est désormais détruit au seul profit de la flexibilité,
l'exigence d'accord majoritaire étant supprimée. Nous attendons donc, je le
répète, des précisions qui nous semblent absolument indispensables.
Quant à l'amendement n° 52, relatif à la règle de l'accord majoritaire, c'est
un amendement de cohérence.
M. le président.
La parole est à M. Roland Muzeau pour défendre l'amendement n° 94.
M. Roland Muzeau.
Monsieur le président, j'ai déjà défendu cet amendement à l'occasion de la
présentation de l'amendement n° 91, qui procédait de la même inspiration.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
S'agissant des amendements identiques n°s 51 et 94, la
commission, fidèle à sa logique, a émis un avis défavorable.
Quant à l'amendement n° 52, il rejoint ce que j'ai dit sur les accords
majoritaires : la commission a émis également un avis défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Je voudrais d'abord rectifier une erreur que vient de commettre
M. Chabroux en indiquant qu'il y aurait eu une exigence d'accord majoritaire
dans les accords de modulation : ce n'est pas le cas.
Je reviens sur l'explication que j'ai donnée tout à l'heure. Il y a une
confusion dans l'esprit des orateurs de l'opposition sur la portée du
paragraphe V de l'article 2.
Ce paragraphe V, dont la rédaction est claire, ne s'applique pas à l'article
du code du travail relatif à la durée hebdomadaire du travail ; il s'applique
uniquement aux dispositions relatives aux accords de modulation annuelle. Ces
accords étaient régis par un double plafond : un plafond de 35 heures
hebdomadaires et un plafond de 1 600 heures annuelles. Nous supprimons la
référence aux 35 heures hebdomadaires pour la mise en oeuvre des accords de
modulation annuelle de manière à éviter les inégalités d'une année sur l'autre
en fonction du nombre de jours de congé, mais l'article concernant le respect
de la durée hebdomadaire du travail reste inscrit dans le code du travail. Il
n'y a donc pas de raison de vouloir modifier, sur ce point, la rédaction du
projet de loi.
Quant aux accords majoritaires, je vous renvoie aux réponses que j'ai faites
tout à l'heure sur ce sujet.
M. le président.
La parole est à M. Jean Chérioux pour explication de vote sur les amendements
identiques n°s 51 et 94.
M. Jean Chérioux.
Je voterai, bien sûr, contre cet amendement, mais, si je prends la parole,
c'est surtout parce que je suis étonné de l'acharnement de notre collègue
Gilbert Chabroux contre tout ce qui touche de près ou de loin à la flexibilité.
Je trouve cela extravagant !
Si vous voulez que les entreprises puissent être compétitives et qu'elles
puissent vivre, il faut qu'elles aient des possibilités d'adaptation. Plus vous
serez rigide, plus vous les condamnerez, plus vous supprimerez des emplois ! Et
je ne pense pas que ce soit ce que vous cherchez, monsieur Chabroux !
(Protestations sur les travées socialistes.)
M. Philippe Labeyrie.
Et les travailleurs ?
M. Guy Fischer.
Il y a suffisamment de casse !
M. le président.
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 51 et 94.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 52.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 127, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
« Après le V de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« ... Le II de l'article L. 212-9 du code du travail est complété par un
alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque la réduction de la durée du travail s'est opérée dans l'entreprise
ou l'établissement par l'octroi de journées ou demi-journées de repos, ces
dispositions sont applicables aux salariés à temps partiel au prorata de leur
durée contractuelle de travail, sans que la durée hebdomadaire de travail
puisse être portée au niveau de la durée légale du travail ou de la durée fixée
conventionnellement. La prise des journées ou demi-journées de repos ne saurait
être considérée comme une modification de la répartition de la durée du travail
au sens de l'article L. 212-4-3, 1er alinéa. »
La parole est à M. Philippe Marini.
M. Philippe Marini.
Il s'agit ici d'étendre l'application du II de l'article L. 212-9 du code du
travail aux salariés à temps partiel au prorata de leur durée contractuelle du
travail.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Cet amendement prévoit la possibilité pour les salariés à
temps partiel de bénéficier de journées ou de demi-journées de repos dans le
cadre de l'article L. 212-9 du code du travail.
J'avoue ne pas avoir bien saisi, monsieur Marini, pas plus d'ailleurs que la
commission, le sens de cet amendement, puisqu'il s'agit ici d'une des modalités
de passage aux 35 heures et que, par définition, les salariés à temps partiel
ne sont pas concernés par ces modalités.
M. Guy Fischer.
Nous, nous n'avons rien compris !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon
ministre.
Le Gouvernement n'a pas souhaité remettre en cause l'équilibre
d'ensemble de la législation relative au travail à temps partiel sur la base
duquel, vous le savez, de très nombreux accords collectifs ont été conclus.
En outre, il me semble que cet amendement revêt l'inconvénient d'imposer la
réduction du temps de travail sous forme de jours de repos aux salariés à temps
partiel dès lors qu'elle est appliquée dans l'établissement. Cette application
devrait résulter d'un choix des partenaires sociaux et d'une décision prise
contractuellement entre l'employeur et le salarié à temps partiel. En effet, M.
Marini le sait bien, la situation et les aspirations des salariés à temps
partiel sont distinctes de celles des salariés à temps plein. Mieux vaut
laisser aux accords collectifs le soin de décider en la matière.
M. le président.
L'amendement n° 127 est-il maintenu, monsieur Marini ?
M. Philippe Marini.
Je m'en remets aux appréciations qui viennent d'être données. Pardonnez-moi,
monsieur le rapporteur, si je fais preuve de quelque naïveté n'étant pas comme
vous aussi connaisseur du droit du travail.
(Sourires.)
Mais j'ai tenté
l'exercice et essayé de comprendre.
J'ai déposé un certain nombre d'amendements de précision, en suivant, bien
entendu, la ligne générale de la commission. Ne m'en veuillez pas trop si,
faute d'avoir participé aux travaux de la commission, mon information est
évidemment beaucoup moins bonne que celle des membres de cette dernière.
Sous bénéfice de ces quelques propos, je retire bien volontiers cet
amendement.
M. Guy Fischer.
Modestie surprenante de la part de M. Marini !
M. le président.
L'amendement n° 127 est retiré.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Nous ne saurions vous en vouloir, monsieur Marini, d'autant
que ni la commission ni son rapporteur ne savent tout ! Nous avons dû beaucoup
travailler.
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 53 est présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe Socialiste, apparenté et
rattachée.
L'amendement n° 95 est présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer le VI de cet article. »
La parole est à M. Gilbert Chabroux pour présenter l'amendement n° 53.
M. Gilbert Chabroux.
Nous voici à l'important problème des cadres. A la fin du mois de juin 2002,
la proportion de salariés dits « cadres autonomes » dont le temps est décompté
en forfait-jours sur l'année était de 6,3 %, ce qui est faible.
Le Gouvernement veut permettre une forte extension du forfait-jours, tout en
essayant de limiter les contentieux. En effet, il convient de rappeler que le
régime spécifique des cadres autonomes a fait l'objet d'un avis négatif du
Comité des droits sociaux du Conseil de l'Europe le 11 décembre dernier, à la
requête de la CGC, qui a déposé un recours devant la Cour européenne des droits
de l'homme. Le Comité a estimé que la loi ne protège pas assez les cadres
contre les employeurs qui veulent compenser les jours de congé supplémentaires
par un allongement de la durée quotidienne du travail.
Dans le cas où existe un forfait-jours, le nombre maximal de jours travaillés,
si l'on applique la seule réglementation européenne, s'élève à 217, soit un
repos quotidien de onze heures - ce qui signifie un travail quotidien de treize
heures - et un repos hebdomadaire de trente-cinq heures d'affilée, c'est-à-dire
à peine un jour et demi. Rien n'interdit d'aboutir à une durée du travail de
soixante-dix-huit heures par semaine !
Or le Gouvernement veut élargir sensiblement le champ de ce dispositif,
d'abord, avec le paragraphe VI de l'article 2 modifiant la définition des
cadres intégrés. Ceux-ci doivent normalement réunir trois critères : être
intégrés à un travail d'équipe ; être occupés suivant l'horaire collectif ;
avoir des horaires prédéterminés. Désormais, la condition de prédétermination
des horaires disparaît, à la demande des représentants du patronat qui doit
faire face à de nombreux contentieux sur ce point, en raison des horaires
excessifs imposés aux salariés cadres. La définition des cadres intégrés
deviendrait donc très restrictive.
Nous nous opposons à une telle disposition, très mal ressentie par les cadres,
et présentons donc un amendement de suppression du paragraphe VI de l'article
2.
M. le président.
La parole est à M. Roland Muzeau, pour présenter l'amendement n° 95.
M. Roland Muzeau.
La définition des « cadres intégrés » est capitale, car le fait d'appartenir à
cette catégorie entraîne la soumission des personnels concernés au droit commun
de la durée du travail.
Initialement, si je me réfère à l'intitulé du rapport de Pierre Morange, le
projet de loi visait à élargir la catégorie de ces cadres : les critères
législatifs servant à les définir étaient modifiés ; la référence à «
l'indétermination de la durée du travail » était abandonnée ; l'autre critère,
celui du « suivi de l'horaire collectif », était, lui aussi, complété dans un
sens qui,
a priori
, nous semblait positif.
Les députés ont jugé utile de supprimer une définition que nous jugions très
importante pour augmenter effectivement le nombre de cadres susceptibles de
répondre aux critères posés pour bénéficier des mêmes modalités de RTT que les
autres salariés.
Résultat : alors que l'objectif visé était de clarifier cette définition,
aujourd'hui, les modifications introduites conduisent à restreindre davantage
cette catégorie de cadres et, par ricochet, à élargir une autre catégorie de
cadres, dits « cadres intermédiaires », qui, eux, échappent, en matière de
durée du travail, au droit commun.
L'embarras de M. le rapporteur, qui note que « le champ ainsi déterminé pour
la catégorie des cadres intégrés est, au final, sans doute moins large que ne
le prévoyait le projet de loi, mais aussi, sans doute, plus étendu que ne le
prévoit le code du travail », est pour nous lourd de sens.
L'amendement de notre collègue M. Bernard Joly, qui tend à laisser aux seuls
partenaires sociaux le soin de déterminer par accords collectifs les cadres
susceptibles de bénéficier de convention de forfait en jours notamment,
retranscrit mot pour mot une proposition du MEDEF, - vous auriez pu faire
l'effort de changer quelques mots ! - nous conforte dans l'idée que l'ensemble
des dispositions de votre projet de loi concernant les cadres sont
permissives.
L'amendement que nous proposons, comme les suivants d'ailleurs, vise à parer
ces tentatives de remise en cause d'un certain nombre de garanties dont les
cadres doivent bénéficier au même titre que les autres salariés.
Vous ne pourrez pas, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers
collègues, ignorer la protestation extrêmement forte de tous les syndicats de
cadres la CGC, bien sûr, mais aussi la CFDT cadres, la CGT cadres, FO cadres et
CFTC cadres sur ces questions essentielles. Elles méritent, je crois, que nous
y consacrions quelques minutes de nos débats afin de revenir sur une
disposition réellement mauvaise.
M. Gilbert Chabroux.
Absolument !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
La commission, je l'ai déjà dit, n'a rien voulu supprimer du
projet de loi présenté par le Gouvernement. Cela n'est pas dans sa logique !
La nouvelle définition du « cadre intégré » apparaît plus claire, puisqu'elle
s'articule autour de la notion de la nature des fonctions. J'observe, en outre,
qu'elle devrait sans doute être plus large que celle que nous connaissons
actuellement. La commission émet évidemment un avis défavorable sur ces deux
amendements.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements. Il a
souhaité, en effet, par la rédaction qui vous est proposée, simplifier et
clarifier la définition des cadres dits intégrés en mettant l'accent sur le
fait que leurs fonctions les amènent à suivre l'horaire collectif.
Tel est bien le critère essentiel : il est cohérent avec celui de l'autonomie
pour les forfaits annuels. Il n'y a pas d'autre objectif derrière la rédaction
de ces textes que celui de clarifier une définition qui s'appuyait sur un
faisceau de critères, d'ambiguïté, et source de contentieux.
M. le président.
La parole est à M. Roland Muzeau pour explication de vote.
M. Roland Muzeau.
Monsieur le ministre, vous ne m'avez pas répondu, pas plus qu'à M. Chabroux,
sur l'opposition de la totalité des partenaires sociaux que sont les
organisations syndicales, si l'on veut bien admettre que la CGC, qui n'a pas le
monopole de la représentation de ces personnels, est malgré tout intéressante
dans ce qu'elle dit sur ses mandants.
M. Alain Gournac.
Ah, c'est nouveau !
M. Roger Karoutchi.
C'est un comble !
M. Roland Muzeau.
Il serait utile que M. le rapporteur et vous-même, monsieur le ministre,
puissiez - à moins que M. Gournac n'ait un avis sur la question - nous
expliquer pourquoi vous ne prenez pas en compte la « levée de boucliers » de
toutes les organisations syndicales sur une question qui n'est pas anodine, à
savoir la modification d'une définition qui va bouleverser la situation de
dizaines de milliers de cadres et de salariés dans notre pays. J'aimerais bien
avoir une réponse sur ce point.
(M. le ministre fait un signe de
dénégation.)
M. le président.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 53 et 95.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président.
L'amendement n° 18, présenté par M. Joly, est ainsi libellé :
« Avant le deuxième alinéa (1°) du VII de cet article, insérer deux alinéas
ainsi rédigés :
« ... ° Le I est ainsi rédigé :
« I. - Une convention ou un accord collectif étendu ou une convention ou un
accord d'entreprise ou d'établissement peut décider que les salariés ayant la
qualité de cadre au sens des conventions collectives de branche ou du premier
alinéa de l'article 4 de la convention nationale de retraite et de prévoyance
des cadres du 14 mars 1947 ne relèvent pas des dispositions des articles L.
212-15-1 et L. 212-15-2. Ils doivent bénéficier d'une réduction effective de
leur durée de travail. Leur durée de travail peut être fixée par des forfaits
en jours ou en heures établis sur une base annuelle. La mise en place des
forfaits doit être prévue par une convention ou un accord collectif étendu ou
par une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement. A défaut de
convention ou d'accord collectif étendu ou de convention ou d'accord
d'entreprise ou d'établissement, des conventions individuelles de forfait en
heures peuvent être établies sur une base hebdomadaire ou mensuelle pour ces
salariés. »
La parole est à M. Bernard Joly.
M. Bernard Joly.
Cet amendement, comme les amendements n°s 19 et 20, concerne la sécurisation,
au moins par un accord de branche, ou, si possible, par un accord d'entreprise
ou d'établissement, de la classification des cadres en cadres « forfaités » ou
« autonomes » et cadres « horaires » ou « intégrés ».
Bien que le projet de loi apporte une première sécurisation en ne retenant que
le critère d'une réelle autonomie, cette réalité reste à apprécier, ce qui
conduira à de nombreux contentieux.
Il serait plus normal, branche par branche, de faire confiance à un accord des
partenaires sociaux, bien au fait des réalités du terrain et des postes de
travail considérés.
Je voudrais ajouter qu'à l'avenir je demanderai l'avis de M. Muzeau pour la
rédaction de mes amendements.
(Sourires.)
M. Guy Fischer.
Et nous, nous demanderons au MEDEF !
(Nouveaux sourires.)
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
L'amendement n° 18 vise à faire du forfait annuel la norme
pour le calcul de la durée du travail des cadres qui ne sont pas des cadres
dits intégrés.
La rédaction actuelle du code du travail semble préférable. Elle apporte une
garantie en prévoyant que l'accord d'entreprise instituant le forfait annuel ne
doit pas avoir fait l'objet d'une opposition.
Dans ces conditions, la commission m'a mandaté pour demander à notre collègue
Bernard Joly de retirer son amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Le Gouvernement partage l'avis de la commission.
L'appartenance à l'une ou l'autre des catégories de cadres dépend avant tout
de la nature des fonctions et de l'autonomie. Le présent projet de loi vise
d'ailleurs - c'était l'objet de notre précédent débat - à élargir les
possibilités de négociation pour les différentes catégories de cadres, tout en
respectant les principes posés par la directive européenne du 23 novembre
1993.
S'agissant des cadres susceptibles de conclure des conventions de forfait -
jours, je souhaite, je le rappelle, maintenir le critère de l'autonomie du
cadre pour l'organisation de son emploi du temps.
M. Philippe Marini.
Très bien !
M. François Fillon,
ministre.
Ce critère est d'ailleurs nécessaire en droit pour respecter la
charte sociale européenne, les directives communautaires et notre propre
Constitution. Si le soin de décider du classement des cadres dans les
différentes catégories était laissé à la négociation branche par branche, il y
aurait, en effet, un risque d'inconstitutionnalité au titre de l'incompétence
négative, le législateur devant aller jusqu'au bout de sa compétence.
M. le président.
L'amendement n° 18 est-il maintenu, monsieur Joly ?
M. Bernard Joly.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 18 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 54 est présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée.
L'amendement n° 96 est présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer le 1° du VII de cet article. »
La parole est à M. Gilbert Chabroux pour défendre l'amendement n° 54.
M. Gilbert Chabroux.
Il s'agit ici des salariés itinérants non cadres susceptibles d'être soumis au
régime du forfait annuel en heures. La disposition dont nous demandons cette
fois la suppression pourrait concerner, par exemple, des réparateurs
d'ordinateurs ou de photocopieurs et des dépanneurs d'ascenseurs.
Actuellement, deux conditions cumulatives sont nécessaires pour ce type de
forfait : la durée de travail ne peut être prédéterminée et les salariés
disposent d'une réelle autonomie dans leur emploi du temps pour l'exercice des
responsabilités qui leur sont confiées. La substitution du mot : « ou » au mot
: « et » au 1° du paragraphe VII de l'article 2 a pour effet de transformer ces
deux conditions en conditions alternatives et non plus cumulatives.
Le projet de loi méconnaît ainsi gravement les dispositions de la directive
93/104 du 23 novembre 1993 concernant certains aspects de l'aménagement du
temps de travail.
En effet, l'article 17 de cette directive n'ouvre aux Etats membres la faculté
de prévoir la dérogation à la durée maximale hebdomadaire que « lorsque la
durée du travail, en raison des caractéristiques particulières de l'activité,
n'est pas mesurée et/ou prédéterminée ». Le critère de la prédétermination de
la durée du travail repris par la loi « Aubry II » est donc essentiel.
Si la directive cite à titre d'exemple les personnes ayant un pouvoir de
décision autonome, il ne s'ensuit pas que pour toute personne autonome la
dérogation à la durée maximale du travail soit possible si la durée du travail
peut être prédéterminée.
M. le président.
La parole est à M. Guy Fischer pour défendre l'amendement n° 96.
M. Guy Fischer.
Les critères servant à justifier l'application du forfait horaire annuel aux
salariés itinérants non cadres doivent en effet rester cumulatifs.
Monsieur le ministre, nous sommes très loin de partager les ambitions que
traduit votre texte quant à la possibilité de faciliter les conditions d'accès
des salariés itinérants non cadres aux conventions de forfait en heures sur
l'année, dans la mesure où la convention nécessaire à la mise en place de tels
forfaits peut substituer aux règles légales relatives aux durées maximales
journalières et hebdomadaires de travail des limites plus élevées, dérogatoires
au droit commun.
Jusqu'à présent, cette possibilité demeurait limitée - elle ne l'était
d'ailleurs pas assez selon nous - aux seuls salariés itinérants non cadres dont
la durée du travail ne peut être prédéterminée et qui disposent d'une autonomie
dans l'organisation de leur emploi du temps.
Nous entendons que ces deux conditions restent cumulatives afin d'éviter
d'élargir un peu plus encore le public concerné, car les techniciens itinérants
visés ne bénéficient d'aucune contrepartie, en termes de temps de repos comme
de salaire.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Ces amendements visent à une suppression et, comme sur tous
les autres amendements de ce type, la commission a émis un avis défavorable.
La commission est cependant favorable à l'extension des possibilités laissées
à la négociation d'autoriser plus largement les salariés itinérants non cadres
à bénéficier, pour le moins, du forfait annuel en heures. Il ne vous a pas
échappé que la commission a déposé un amendement visant à ouvrir la possibilité
de passer au forfait-jour compte tenu de la complexité de la gestion des heures
des itinérants non cadres.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Le Gouvernement est défavorable à ces amendements identiques,
qui tendent à revenir sur les conditions d'application des conventions de
forfait en heures sur l'année aux salariés itinérants non cadres.
Le projet de loi qui vous est soumis renvoie à une définition conventionnelle,
parce qu'il appartient, selon nous, aux partenaires sociaux de définir les
catégories de salariés susceptibles de se voir appliquer telle ou telle
disposition. En visant à donner au critère de la durée prédéterminable ou non
du travail un caractère alternatif par rapport à celui de l'autonomie dans la
détermination de l'emploi du temps, il continue à donner une définition de ceux
qui parmi les salariés itinérants non cadres peuvent être soumis à un forfait
annuel en heures tout en l'assouplissant.
M. le président.
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 54 et 96.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président.
Je suis saisi de six amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 55 est présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté
et rattachée.
L'amendement n° 97 est présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer le 2° du VII de cet article. »
L'amendement n° 19, présenté par M. Joly, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le 2° du VII de cet article :
« 2° Le premier alinéa du III est ainsi rédigé :
« La convention ou l'accord collectif prévoyant la mise en place de forfaits
en jours ne doit pas avoir fait l'objet d'une opposition en application de
l'article L. 132-26. Cette convention ou cet accord doit fixer le nombre de
jours travaillés. Ce nombre ne peut dépasser le plafond de deux cent dix-sept
jours. La convention ou l'accord précise en outre les modalités de décompte des
journées et des demi-journées travaillées et de prise des journées ou
demi-journées de repos. Il détermine les conditions de contrôle de son
application et prévoit des modalités de suivi de l'organisation du travail des
salariés concernés, de l'amplitude de leurs journées d'activité et de la charge
de travail qui en résulte. L'accord peut en outre prévoir que des jours de
repos peuvent être affectés sur un compte épargne-temps dans les conditions
définies par l'article L. 227-1 ou, d'un commun accord avec l'employeur,
donnent lieu, au terme de l'exercice au titre duquel ils sont acquis, au
versement d'une indemnité compensatrice. »
L'amendement n° 56, présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le 2° du VII de cet article :
« 2° La première phrase du premier alinéa du III est remplacée par deux
phrases ainsi rédigées :
« Lorsque la convention ou l'accord collectif prévoit la conclusion de
conventions de forfait en jours, seuls sont concernés les cadres qui perçoivent
une rémunération au moins égale à celle prévue au premier paragraphe de
l'article 6 de la convention nationale de retraite et de prévoyance des cadres
du 14 mars 1947, et dont la nature des fonctions implique une réelle autonomie
dans l'organisation de leur emploi du temps. La convention ne doit pas avoir
fait l'objet d'une opposition en application de l'article L. 132-26. »
L'amendement n° 3, présenté par M. Souvet, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« Rédiger comme suit le texte proposé par le 2° du VII de cet article pour la
quatrième phrase du premier alinéa du III de l'article L. 212-15-3 du code du
travail :
« La convention ou l'accord définit, au regard de leur autonomie dans
l'organisation de leur emploi du temps, les catégories de cadres concernés.
»
L'amendement n° 128, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le texte proposé par le 2° du VII de cet article pour la
quatrième phrase du premier alinéa du III de l'article L. 212-15-3 du code du
travail :
« La convention ou l'accord définit les catégories de cadres concernées. »
La parole est à M. Gilbert Chabroux, pour présenter les amendements n°s 55 et
56.
M. Gilbert Chabroux.
Le 2° du paragraphe VII de l'article 2 vise à étendre le champ d'application
du forfait en jours aux cadres en restreignant de trois à un seul le nombre des
critères actuellement exigés.
Actuellement, pour être au forfait - jours, les cadres doivent exercer
certains types de fonctions, avoir des responsabilités et disposer d'une réelle
autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps. Le projet de loi vise à
opérer une sorte de fusion entre la nature des fonctions et la réelle autonomie
dans l'emploi du temps que ces fonctions impliquent. Il en résulte concrètement
que le seul critère de la réelle autonomie dans l'emploi du temps sera
suffisant pour faire passer les cadres sous le régime du forfait - jours.
Lors de leur audition devant la commission des affaires sociales, les
représentants de la CFE-CGC ont ainsi fait observer que l'adjectif « réel »
avait pour synonyme « certain » et qu'il suffirait que les salariés aient une
certaine autonomie pour entrer dans le champ d'application du forfait-jours.
C'est de mauvais augure pour nombre de salariés qui, sans pour autant
bénéficier d'un bon salaire ni exercer d'importantes responsabilités au sein de
l'entreprise, accomplissent leur tâche d'une manière autonome. On peut citer à
titre d'exemple les gérants salariés de magasin qui sont à la fois sous la
menace d'un licenciement pour résultats insuffisants et contraints d'effectuer
au moins soixante heures par semaine.
Se pose également le problème de l'application de la directive européenne
93-104 du 23 novembre 1993, sur laquelle je ne reviens pas.
Quant à l'amendement n° 56, j'ai déjà dit lors de la discussion générale qu'un
emploi abusif du mot « cadre » avait conduit à qualifier des salariés gagnant
le SMIC de « cadres », à l'exemple des gérants de magasin dont je viens de
parler.
M. Philippe Marini.
Ils ne sont pas tous au SMIC !
M. Gilbert Chabroux.
L'objectif suivant est évidemment de les déclarer « autonomes » pour leur
appliquer le forfait en jours.
Un quart des cotisants à l'AGIRC ont des revenus inférieurs au plafond de la
sécurité sociale, qui est actuellement fixé à 2 352 euros brut par mois. Nous
demandons que seuls les cadres dont la rémunération est au moins égale à ce
plafond puissent être concernés par une convention de forfait - jours.
M. le président.
La parole est à M. Roland Muzeau pour défendre l'amendement n° 97.
M. Roland Muzeau.
Comme M. Chabroux et comme toutes les organisations syndicales confondues,
nous considérons que le critère de l'autonomie est trop subjectif pour servir à
définir la catégorie de cadres soumis au forfait en jours. Retenir ce critère
risque d'entraîner un usage abusif de ce type de forfait dérogatoire au droit
commun en matière de durée maximale du travail. Nous sommes en outre persuadés
que ce risque se concrétisera rapidement dans les faits et qu'il y aura un
bouleversement des usages et du droit dans les entreprises.
Cet amendement vise donc à maintenir le droit actuellement applicable.
M. le président.
La parole est à M. Bernard Joly pour défendre l'amendement n° 19.
M. Bernard Joly.
J'ai présenté cet amendement en même temps que l'amendement n° 18, auquel il
est lié. Je le retire donc également.
M. le président.
L'amendement n° 19 est retiré.
La parole est à M. le rapporteur pour présenter l'amendement n° 3.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Cet amendement est relatif aux cadres au forfait en jours.
La loi du 19 janvier 2000 a retenu une définition stricte mais ambiguë des
cadres au forfait en jours. Trois critères cumulatifs définissent actuellement
cette catégorie de cadres pour lesquels le temps de travail ne peut être
prédéterminé : la nature de la fonction, les responsabilités qu'ils exercent,
le degré d'autonomie dont ils bénéficient dans l'organisation de leur emploi du
temps.
La jurisprudence ayant une conception très restrictive de cette catégorie de
cadres, le projet de loi modifie cette définition en ne retenant plus que le
critère de réelle autonomie inhérente à la nature des fonctions.
Sur ce point, il paraît souhaitable de renvoyer plus largement à la
négociation collective le soin de déterminer les cadres au forfait en jours en
ne retenant plus que la notion d'autonomie, conformément à la directive
européenne du 23 novembre 1993. Une telle solution, respectueuse du dialogue
social, permettrait notamment de sécuriser les accords actuels.
M. le président.
La parole est à M. Philippe Marini pour défendre l'amendement n° 128.
M. Philippe Marini.
Cet amendement très proche de celui que vient de défendre la commission répond
à un souci de sécurité juridique et vise à affirmer la responsabilité des
partenaires sociaux.
Je profite de la présentation de cet amendement pour redire - notamment à
l'intention de nos collègues de l'opposition sénatoriale - que les
responsabilités d'un cadre disposant d'autonomie au sein d'une entreprise
doivent être attentivement considérées. A force de répéter aux cadres qu'ils
sont des salariés comme les autres, quelles que soient leurs fonctions et leurs
responsabilités, on prend le risque d'affaiblir leur statut, leurs garanties et
leur régime de retraite.
C'est une considération qu'il faut avoir présente à l'esprit, surtout lorsque
l'on observe le suivisme dont font parfois preuve certaines organisations
s'adressant prioritairement aux cadres. Il me semble nécessaire de tenir un
langage responsable à l'égard de cette catégorie indispensable au
fonctionnement de nos entreprises. La ligne de partage choisie, fondée sur la
notion d'autonomie, permet non seulement de répondre aux exigences de l'équité,
mais aussi de tenir compte de la réalité économique telle qu'elle est au sein
de nos entreprises.
M. Raymond Courrière.
Diviser pour régner !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Les amendements identiques n°s 55 et 97 visent à opérer des
suppressions, ce que, comme je l'ai déjà indiqué, la commission ne peut
approuver.
Les amendements n°s 56 et 55 ont également reçu un avis défavorable de la part
de la commission.
Quant à l'amendement n° 128, il me semble satisfait par l'amendement n° 3 de
la commission, qui offre autant, sinon plus, de sécurité juridique.
M. Philippe Marini.
Tout à fait !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements
n°s 55, 97 et 56. Encore une fois, il s'agit non pas de bouleverser le partage
entre les diverses catégories de cadres, mais d'apporter une simple
clarification. L'objectif du Gouvernement est non pas d'étendre de manière
inconsidérée le champ du régime forfait en jours, mais de tenir compte des
réalités dans l'organisation du travail des cadres.
Le critère essentiel, en pratique comme en droit, pour accorder des
dérogations aux règles générales relatives à la durée du travail hebdomadaire
est celui de l'autonomie, que le Gouvernement propose de retenir et que la
commission a repris par le biais de l'amendement n° 3.
L'autonomie doit être suffisamment affirmée pour que le recours au forfait
annuel en jours puisse être envisagé. Je rappelle, par ailleurs, qu'un accord
collectif doit exister pour que ce critère puisse être mis en oeuvre : c'est
donc là une garantie supplémentaire pour le salarié cadre, qui devrait apaiser
bien des craintes exprimées dans cet hémicycle.
S'agissant de l'amendement n° 3 de la commission, le Gouvernement y est
favorable.
Cet amendement tient compte tout à la fois de la nécessité de maintenir dans
la loi un critère d'accès au régime des forfaits en jours pour les cadres et de
l'esprit du projet de loi, qui tend à ouvrir le champ le plus large possible à
la négociation.
Il retient le critère opérationnel prévu par la directive du 23 novembre 1993,
que le Gouvernement avait, dès le début, souhaité maintenir en écartant les
autres critères, qui ne font que compliquer la mise en oeuvre de la loi en
prêtant à des interprétations diverses.
Je suis donc favorable à l'amendement n° 3, étant précisé, monsieur le
rapporteur, que la disparition des termes « réelle autonomie » revêt à mes yeux
une portée principalement rédactionnelle, le recours au forfait en jours devant
intervenir, comme vous le prévoyez, au regard d'une autonomie du cadre
justifiant la mise en oeuvre de cette formule.
Enfin, en ce qui concerne l'amendement n° 128 de M. Marini, je renouvelle la
réponse que j'ai faite tout à l'heure. L'amendement n° 3 suffit sans doute à
apporter à M. Marini les garanties qu'il souhaitait.
(M. Philippe Marini acquiesce.)
M. le président.
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 55 et 97.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 56.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
La parole est à M. Gilbert Chabroux pour explication de vote sur l'amendement
n° 3.
M. Gilbert Chabroux.
Nous voterons contre l'amendement n° 3.
Il faut tout d'abord rappeler que c'est à partir des accords signés sur le
fondement de la loi « Aubry I » du 13 juin 1998 que la législation a évolué
pour aboutir à la loi « Aubry II » du 20 janvier 2000, qui a distingué trois
catégories de cadres : les cadres dirigeants, qui ne sont soumis à aucune durée
légale du travail, les cadres intégrés à une équipe dont ils suivent l'horaire
collectif et les cadres autonomes.
Pour définir cette autonomie, plusieurs critères avaient été retenus, que je
rappellerai brièvement ici : une durée du travail qui ne peut être
prédéterminée du fait de la nature des fonctions, la nature des responsabilités
exercées et le degré d'autonomie dans l'organisation de l'emploi du temps.
L'amendement qui a été présenté par M. Souvet ne consiste pas, à l'évidence,
en une simple réécriture. Il vise à faire disparaître l'un des critères, celui
de la nature des fonctions exercées. Ce n'est pas un hasard, puisque ce critère
est en lien direct avec les classifications professionnelles, ainsi qu'avec le
niveau des rémunérations pratiquées dans les branches.
Nous aboutissons donc à une forme de tautologie dans la définition des cadres
autonomes, qui pourrait se résumer ainsi : les cadres autonomes sont autonomes
parce qu'ils organisent leur emploi du temps de façon autonome ! On ne peut
être plus direct et plus efficace pour faire passer au forfait en jours un
maximum de cadres.
Si l'on combine cette disposition avec la restriction drastique prévue par le
texte pour la définition des cadres intégrés, on aboutit à une extension
prometteuse de la notion de cadres autonomes... Il est clair que la norme, dans
l'esprit du patronat, doit maintenant être l'autonomie. Il s'agit en quelque
sorte de faire payer aux cadres le régime social plus favorable dont ils
bénéficient, ainsi que le caractère unique, en Europe, de leur catégorie, en
permettant un allongement indéfini de leur temps de travail.
En termes sociaux, cette disposition est inacceptable. En effet, les cadres
sont des salariés comme les autres. Dans le passé, leur niveau de
responsabilités a conduit à leur permettre, si l'on peut dire, de cotiser
davantage pour bénéficier d'avantages sociaux supplémentaires.
Aujourd'hui, l'organisation taylorienne du travail étant obsolète, le
patronat, ce n'est pas un mystère, souhaite la déliquescence de ce statut et la
fin des avantages spécifiques qui y sont liés. Mais il entend également, et
vous le suivez sur ce point, monsieur le rapporteur, profiter des
particularités de ce statut, s'agissant de la durée du travail, pour étendre au
maximum la portée des dispositions qui seront à son avantage. Il en est ainsi
de l'imprécision inhérente au forfait annuel en jours, qui fait que ces
salariés sont aujourd'hui moins protégés que les autres et peuvent se voir
contraints de travailler treize heures par jour et six jours par semaine.
(M. Jean-Pierre Godefroy acquiesce.)
Un cadre peut ainsi terminer sa semaine le samedi à vingt et une heures et
reprendre le lundi matin à huit heures.
M. Paul Blanc.
Comme les élus !
M. Gilbert Chabroux.
Il va de soi que cela constitue un réel danger pour la santé et la sécurité de
ces salariés.
Les conclusions des études menées sur ce point sont maintenant assez claires
et concordantes : le stress auquel sont soumis les cadres du fait de charges de
travail excessives amène le développement de pathologies, de comportements de
dépendance, y compris psychologique. Il est donc de la responsabilité du
législateur de se préoccuper de cette situation, et non de risquer de
l'aggraver par une législation complaisante pour déboucher à terme sur un
véritable problème de santé publique.
(Murmures sur les travées du RPR.)
M. Jacques Peyrat.
C'est Zola !
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Les arguments que nos collègues de l'opposition viennent de
présenter contre cet amendement ne me semblent pas fondés.
En premier lieu, ils ont affirmé que les cadres sont opposés au dispositif
proposé. Or, sur le terrain, on constate que ce sont avant tout, pour ne pas
dire exclusivement, les cadres qui jugent que la réduction du temps de travail
a amélioré leur vie quotidienne.
(Mais oui ! sur les travées socialistes.)
Cela ressort clairement d'une enquête de la Direction de l'animation de la
recherche, des études et des statistiques, la DARES, que je tiens à votre
disposition, mes chers collègues.
M. Gilbert Chabroux.
Ce n'est pas une honte !
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Aujourd'hui, ce sont environ 50 % des cadres qui ont opté
pour le régime du forfait annuel en jours.
En second lieu, nos collègues de l'opposition ont soutenu que le dispositif
prévu par l'amendement n'apporte aucune garantie aux salariés. Or le passage au
forfait annuel en jours ne peut être imposé ; cela exige un accord collectif
avec des garanties fortes : soit un accord de branche étendu, soit un accord
d'entreprise n'ayant pas fait l'objet d'une opposition. L'application du
forfait en jours est donc liée à la conclusion d'un accord entre les
partenaires sociaux.
J'observe d'ailleurs que cela permettrait de renforcer la capacité de
négociation des syndicats de salariés, qui ont souvent obtenu un nombre de
jours de travail inférieur au seuil légal de 217 jours. Il y a donc matière
pour des accords « gagnant-gagnant », et les conditions d'emploi des cadres
soumis au régime du forfait annuel en jours déjà posées par la loi ne sont pas
modifiées.
MM. Paul Blanc et Roger Karoutchi.
Très bien !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 3.
(L'amendement est adopté.)
En conséquence, l'amendement n° 128 n'a plus d'objet.
M. le président.
L'amendement n° 98, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après le troisième alinéa (2°) du VII de cet article, insérer un alinéa
ainsi rédigé :
«
...°
Dans la première phrase du deuxième alinéa du III, les mots :
"ne sont pas soumis", sont remplacés par les mots : "sont soumis". »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer.
Cet amendement vise, afin d'éviter des durées de travail manifestement trop
longues, à appliquer aux cadres soumis au régime du forfait annuel en jours les
maxima de droit commun.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Il n'est pas utile de revenir sur le régime du forfait en
jours instauré par la loi du 19 janvier 2000. La commission est donc
défavorable à cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Le Gouvernement partage l'avis de la commission.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 98.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 57, présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée, est ainsi libellé :
« Compléter le VII de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
«
...°
La cinquième phrase du premier alinéa du III est complétée par
les mots : ", ainsi que les temps de repos hebdomadaire garantissant une durée
raisonnable de travail compatible avec la protection de la santé physique et
morale des salariés concernés et le respect d'un équilibre entre la vie
professionnelle et la vie personnelle". »
La parole est à M. Gilbert Chabroux.
M. Gilbert Chabroux.
Il nous faut, j'y reviens, garantir aux cadres une durée raisonnable du
travail, compatible avec la protection de leur santé physique et morale et le
respect d'un équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Elle partage le souci de ses auteurs de la santé des salariés, s'agissant
notamment des cadres soumis au régime du forfait annuel en jours, mais
l'amendement présenté relève plus de la déclaration de principe que de la
disposition normative.
En outre, j'indiquerai à nos collègues que si la santé des cadres leur tient
tellement à coeur, je ne comprends pas pourquoi ils n'ont pas proposé d'inclure
une précision de cette nature dans la loi du 19 janvier 2000.
M. Gilbert Chabroux.
On n'allait pas aussi loin à l'époque ! Tout est changé maintenant !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Le Gouvernement partage l'avis de la commission sur ce sujet.
La législation prévoit déjà que les cadres en question se voient notamment
appliquer les règles relatives aux repos quotidien et hebdomadaire.
Je ne suis donc pas favorable à l'adoption de l'amendement n° 57.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 57.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 20, présenté par M. Joly, est ainsi libellé :
« Compléter le VII de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
«
...°
Dans la première phrase du troisième alinéa du III, les mots :
"conventions de forfait", sont remplacés par le mot : "forfaits". »
La parole est à M. Bernard Joly.
M. Bernard Joly.
Par coordination, je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 20 est retiré.
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 4, présenté par M. Souvet, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« Compléter le VII de cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
«
3 °
Le III est complété
in fine
par un alinéa ainsi rédigé
:
« La convention ou l'accord collectif mentionné au premier alinéa du présent
paragraphe peut également préciser que les conventions de forfait en jours sur
l'année sont applicables aux salariés itinérants non-cadres dont la durée du
temps de travail ne peut être prédéterminée et qui disposent d'une réelle
autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps pour l'exercice des
responsabilités qui leur sont confiées. »
Le sous-amendement n° 141, présenté par M. Joly, est ainsi libellé :
« I. Dans le texte proposé par l'amendement n° 4, après les mots : "itinérants
non-cadres", insérer les mots : "et aux salariés assurant le montage sur
chantier".
« II. Dans le même texte, après le mot : "prédéterminé", remplacer le mot :
"et" par le mot : "ou". »
Les amendements identiques n°s 21, présenté par M. Joly, et n° 139 rectifié,
présenté par MM. Lorrain et Arnaud, sont ainsi libellés :
« Compléter le VII de cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
«
...
: Le III est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L'accord peut également préciser que les conventions de forfait en jours
sont applicables aux salariés itinérants non-cadres et aux salariés assurant le
montage sur chantier dont la durée du temps de travail ne peut être
prédéterminée ou qui organisent eux-mêmes leur emploi du temps, en fonction des
seules contraintes imposées par les clients, pour l'exercice des
responsabilités qui leur sont confiées. »
L'amendement n° 129, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
« Compléter
in fine
le VII de cet article par deux alinéas ainsi
rédigés :
«
...° -
Après la quatrième phrase du premier alinéa du III sont
insérées deux phrases ainsi rédigées :
« Peuvent être concernés les salariés itinérants non-cadres dont la nature des
fonctions implique une réelle autonomie dans l'organisation de leur emploi du
temps. La convention ou l'accord définit ces salariés non-cadres itinérants.
»
La parole est à M. le rapporteur pour défendre l'amendement n° 4.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Cet amendement vise à permettre à des salariés itinérants
non-cadres de relever du régime du forfait annuel en jours.
Actuellement, le code du travail les autorise à relever du forfait annuel en
heures. Cette possibilité demeure insuffisante, selon nous, compte tenu de la
nature particulière de leur activité, pour laquelle le décompte du temps de
travail en heures se révèle souvent très difficile, pour ne pas dire
impossible, à effectuer. Aussi paraît-il souhaitable de leur ouvrir, comme aux
cadres, le bénéfice du régime du forfait annuel en jours, même si, bien
entendu, cette solution exige la conclusion d'un accord collectif n'ayant pas
fait l'objet d'une opposition.
M. le président.
La parole est à M. Bernard Joly pour présenter le sous-amendement n° 141.
M. Bernard Joly.
Il faut pouvoir gérer en jours les salariés itinérants non-cadres et monteurs
sur chantiers, sous peine de laisser le plus souvent dans l'illégalité la
gestion des salariés qui, par hypothèse, ne peuvent faire l'objet d'un horaire
prédéterminé, sauf à abandonner le chantier en milieu de semaine ou la
réparation en cours.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Ce sous-amendement vise à étendre largement la proposition de
la commission, ce qui est sans doute un peu excessif. Je crois nécessaire de
nous en tenir à la position médiane qui a été fixée initialement. Cela étant
dit, la commission souhaite entendre M. le ministre.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Il s'agit d'un sujet très important, sur lequel il convient de
ne pas se tromper.
D'abord, en droit, la directive européenne du 23 novembre 1993 n'autorise des
dérogations aux durées du travail que pour les cadres dirigeants ou pour des
personnes ayant un pouvoir de décision autonome, ce qui n'est évidemment pas le
cas des itinérants non-cadres.
Ensuite, je ne peux oublier ce que m'ont dit les partenaires sociaux.
M. Guy Fischer.
Ah !
M. François Fillon,
ministre.
L'opposition nous a souvent reproché de ne pas avoir obtenu
l'accord des partenaires sociaux sur toutes les dispositions que nous
présentons, et je m'en suis expliqué. Mais, comme je l'ai dit, une concertation
a eu lieu sur ce texte et un certain nombre de limites ont été fixées. Vous le
savez peut-être, la question du régime des itinérants non-cadres a été l'un des
points évoqués avec eux lors de la concertation du mois d'août dernier. Ce qui
m'a alors été dit a convaincu le Gouvernement et le Premier ministre, et je
souhaite vous le faire partager.
Les organisations syndicales soulignent unanimement les risques, pour des
salariés non-cadres, du recours au forfait en jours, c'est-à-dire d'une absence
de limite horaire à la durée du travail. Ces salariés, vous le savez, n'ont pas
les contreparties offertes aux cadres, notamment en matière de rémunération.
Enfin, monsieur le rapporteur, une prise en compte des contraintes pratiques
des itinérants non-cadres vient d'intervenir, sur ma proposition, grâce au
décret qui porte sur les contingents, puisqu'un accord collectif peut prévoir
un forfait horaire annuel pour les itinérants non-cadres. Je crois que cela
répond, pour l'essentiel en tout cas, à votre préoccupation.
Compte tenu de l'importance de cette question dans la négociation qui a eu
lieu entre le Gouvernement et les partenaires sociaux, je demande à M. le
rapporteur de bien vouloir retirer cet amendement.
M. le président.
La parole est à M. Joly pour présenter l'amendement n° 21.
M. Bernard Joly.
Les explications que j'ai données pour présenter le sous-amendement n° 141
valent également pour l'amendement n° 21.
M. le président.
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain pour présenter l'amendement n° 139
rectifié.
M. Jean-Louis Lorrain.
J'ai été sensible aux propos de M. le ministre. Néanmoins, je me range à
l'avis de la commission.
M. le président.
La parole est à M. Marini pour présenter l'amendement n° 129.
M. Philippe Marini.
Je retire cet amendement car il me semble satisfait par l'amendement n° 4 de
la commission.
M. le président.
L'amendement n° 129 est retiré.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 21 et 139 rectifié
?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
J'avais prévu de demander le retrait de ces amendements au
profit de l'amendement n° 4. Mais, compte tenu des propos de M. le ministre,
mes collègues savent à quoi s'en tenir.
M. le président.
Monsieur le rapporteur, l'amendement n° 4 est-il maintenu.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Je suis sensible aux arguments développés par M. le ministre.
En aucun cas, la commission ne saurait créer des difficultés dans les
négociations entre les partenaires sociaux et le Gouvernement.
M. Guy Fischer.
Oh ! là ! là !
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Elle retire donc cet amendement, mais elle le fait à regret,
car elle avait songé à y arrimer aussi les monteurs sur chantier, catégorie
tout à fait semblable à celle qui était visée.
M. le président.
L'amendement n° 4 est retiré.
En conséquence, le sous-amendement n° 141 n'a plus d'objet.
Monsieur Joly, l'amendement n° 21 est-il maintenu ?
M. Bernard Joly.
J'ai cru comprendre, à travers les propos de M. le ministre, que cet
amendement était satisfait. Aussi, je le retire.
(Exclamations sur les
travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
L'amendement n° 21 est retiré.
Monsieur Jean-Louis Lorrain, l'amendement n° 139 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Louis Lorrain.
Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président.
L'amendement n° 139 rectifié est retiré.
L'amendement n° 58, présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée, est ainsi libellé :
« Compléter le VII de cet article par les deux alinéas ainsi rédigés :
« ... Cet article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les accords ou conventions étendus ou convention ou accord d'entreprise ou
d'établissement prévus au présent article qui prévoient des conventions
individuelles de forfait qui peuvent être établies sur une base hebdomadaire,
mensuelle ou annuelle, doivent être signés par une ou des organisations
syndicales représentatives et majoritaires dans la branche ou dans l'entreprise
ou l'établissement dans des conditions fixées par un accord national
interprofessionnel et reprises par décret. »
La parole est à M. Gilbert Chabroux.
M. Gilbert Chabroux.
Il s'agit, là encore, de la règle de l'accord majoritaire. Je me suis
largement exprimé sur ce point.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Il s'agit de la réforme du droit de la négociation
collective, dont nous avons déjà parlé. La commission maintient sa position.
Elle émet donc un avis défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Même avis : défavorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 58.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je suis saisi de dix amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 59 est présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée.
L'amendement n° 99 est présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer le VIII de cet article. »
L'amendement n° 5, présenté par M. Souvet, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« Après le 2° du VIII de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« 2°
bis
A Au quatrième alinéa, les mots : "la conversion de" et les
mots : "en jours de congé supplémentaires" sont supprimés. »
L'amendement n° 22 rectifié, présenté par M. Joly, est ainsi libellé :
« Après le 2°
bis
du VIII de cet article, insérer un alinéa ainsi
rédigé :
« ...° A la seconde phrase du huitième alinéa, après les mots : "peuvent être
utilisées" sont ajoutés les mots : "; par anticipation ou
a posteriori
;". »
L'amendement n° 130, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
« Après le 2°
bis
du VIII de cet article, insérer trois alinéas ainsi
rédigés :
« ...° Après le huitième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Une fraction de l'épargne constituée au sein du compte épargne-temps peut,
sur décision de chaque salarié, être transférée sur un plan d'épargne mis en
place au sein de l'entreprise en application des articles L. 443-1, L. 443-1-1
ou L. 443-1-2. La fraction de l'épargne susceptible d'être transférée ne peut
excéder annuellement 10 % de la rémunération annuelle. »
« ...° Au onzième alinéa, après les mots : "filiale du même groupe", sont
insérés les mots : "les conditions de transferts de l'épargne constituée dans
un plan d'épargne". »
L'amendement n° 132, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
« Après le 2°
bis
du VIII de cet article, insérer un alinéa ainsi
rédigé :
« ...° Dans la première phrase du neuvième alinéa les mots : "deux mois" sont
remplacés par les mots : "six mois". Dans la deuxième phrase du même alinéa, le
mot : "modifiée" est remplacé par les mots "augmentée ou réduite". »
L'amendement n° 6, présenté par M. Souvet, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« Compléter le VIII de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« 4° Le même alinéa est complété par une phrase ainsi rédigé :
« Les droits à congés payés affectés au compte épargne-temps peuvent être
valorisés en argent dans la limite de cinq jours par an. »
L'amendement n° 133, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
« Compléter
in fine
le VIII de cet article par deux alinéas ainsi
rédigés :
« ...° Le onzième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « la
valorisation en temps ou en argent des éléments affectés au compte
épargne-temps ne peut entraîner l'application des dispositions de la section
III du chapitre II du présent titre. »
L'amendement n° 134, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
« Compléter
in fine
le VIII de cet article par trois alinéas ainsi
rédigés :
« ...° Le onzième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : "La
convention ou l'accord collectif détermine également les mesures prises afin de
sécuriser l'engagement de l'entreprise, notamment par la souscription d'un
contrat d'assurance auprès de l'un des organismes visés à l'article 1 de la loi
n° 89-1009 du 31 décembre 1989."
« ...° Il est ajouté
in fine
un alinéa ainsi rédigé :
« Les provisions constatées au bilan des sociétés ainsi que les primes versées
aux organismes visés au onzième alinéa ne sont pas des rémunérations au sens de
l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale. Les primes versées auxdits
organismes sont des dépenses de personnel au sens du 1° du 1 de l'article 39 du
code général des impôts. »
L'amendement n° 60, présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe Socialiste, apparenté et
rattachée, est ainsi libellé :
« Compléter le VIII de cet article par deux aliénas ainsi rédigés :
« ... ° Cet article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les accords ou conventions étendus ou convention ou accord d'entreprise ou
d'établissement visés au présent article qui prévoient la création d'un compte
épargne-temps doivent être signés par une ou des organisations syndicales
représentatives et majoritaires dans la branche ou dans l'entreprise ou
l'établissement dans des conditions fixées par un accord national
interprofessionnel et reprises par décret. »
La parole est à M. Gilbert Chabroux pour présenter les amendements n°s 59 et
60.
M. Gilbert Chabroux.
Le paragraphe VIII prévoit de monétariser le compte épargne-temps. Or ce
compte vise à permettre aux salariés de capitaliser des jours de congé, en
nombre limité, et des éléments de rémunération, primes, intéressement. Les
congés doivent être pris dans un délai de cinq ans, dix ans si le salarié a un
enfant de moins de seize ans ou un parent dépendant ou âgé de plus de
soixante-quinze ans.
Le projet de loi dispose que le salarié pourra désormais utiliser le compte
épargne-temps non seulement pour y placer des jours de congé récupérables, mais
aussi pour se constituer une épargne. L'objectif qui consiste à promouvoir des
dispositifs d'épargne est clair, mais il se heurte à plusieurs objections.
La capitalisation des jours de congé et la comptabilisation de sommes d'argent
sont des modes différents. En effet, la valeur monétaire risque d'être rongée
par l'inflation, alors que les jours ont une valeur immuable. Pourquoi les
salariés capitaliseraient-ils des sommes qui ne leur rapporteront pas
d'intérêts et ne bénéficieront d'aucune défiscalisation à l'entrée ou à la
sortie ?
Cela constitue également un réel problème pour l'entreprise, qui doit
constituer des provisions.
Enfin, la récupération en argent ne répond pas à la même philosophie que la
récupération en jours, puisqu'elle conduit
de facto
le salarié à se
priver de congés.
C'est pourquoi nous souhaitons, par l'amendement n° 59, supprimer le
paragraphe VIII de l'article 2.
Quant à l'amendement n° 60, il concerne la règle de l'accord majoritaire, que
nous souhaiterions voir appliquée.
M. le président.
La parole est à M. Roland Muzeau pour défendre l'amendement n° 99.
M. Roland Muzeau.
Nous présentons un amendement visant à supprimer la disposition relative au
compte épargne-temps. Pour la majorité, la monétarisation du compte
épargne-temps est essentielle et offre des garanties suffisantes. Pour notre
part, nous considérons que la conversion en argent d'un crédit de temps est
contraire à l'objet du compte épargne-temps.
Lors de son audition par la commission, Mme Michelle Biaggi de CGT-Force
ouvrière a estimé très justement que cette « monétarisation risquait
d'entraîner une série de dérives : substitution à des augmentations de salaire,
tentative de capitalisation dans le cadre de la retraite ». Ces craintes sont
largement partagées par la CGT.
Les jours de RTT affectés au compte épargne-temps ne seront pas des jours de
congé effectifs, ce qui, vous en conviendrez, joue non seulement contre
l'emploi, mais aussi contre la protection de la santé au travail. De surcroît,
leur paiement sera différé. Cela revient à faire des heures supplémentaires non
majorées et à crédit !
Sur le fond, nous sommes opposés à cet article.
Par ailleurs, votre texte ne semble pas abouti, comme en témoignent les
amendements de la commission des affaires sociales. Aucun mécanisme de
provision n'est prévu pour garantir aux salariés le versement des droits
acquis. Rien n'est dit concernant le régime fiscal.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour présenter les amendements n°s 5 et 6.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
L'amendement n° 5 est un simple amendement de
coordination.
L'amendement n° 6 vise à préciser les conditions de valorisation en argent des
droits à congés payés affectés au compte épargne-temps.
A l'heure actuelle, le compte peut être alimenté chaque année par le report de
dix jours de congés payés et, le cas échéant, par le report de la cinquième
semaine de congés payés pour les salariés qui souhaitent prendre un congé
sabbatique ou un congé pour création d'entreprise.
Dès lors, il paraît nécessaire de n'autoriser la monétarisation de ces congés
payés que dans la limite d'une semaine, afin de garantir au salarié le bénéfice
d'un congé payé annuel d'au moins quatre semaines, conformément à la directive
européenne du 23 novembre 1993.
M. le président.
La parole est à M. Bernard Joly pour présenter l'amendement n° 22 rectifié.
M. Bernard Joly.
Cet amendement concerne le décompte du temps de travail sur une période plus
large que l'année pour les entreprises dont l'activité est soumise à des
variations pluriannuelles.
Le temps de travail peut être décompté sur l'année dans les entreprises qui
ont à faire face à des variations de leur charge de travail. Cependant, le
cycle de ces variations est, pour certaines d'entre elles, plus large que
l'année et peut s'étaler sur deux ou trois ans.
Pour prendre en compte cette contrainte, la loi autorise aujourd'hui les
entreprises à affecter à un compte épargne-temps les heures effectuées au-delà
de l'horaire annuel, dans la limite de cinq jours par an, pour ensuite affecter
ces heures à une baisse d'activité postérieure à l'affectation des heures au
compte. Le dispositif ne peut fonctionner que si les baisses d'activité d'une
année sont postérieures à une hausse d'activité.
Toutefois, les baisses d'activité sont parfois antérieures aux hausses. Dans
ce cas, le recours aux heures excédentaires de l'année à venir n'est pas
possible et les salariés sont mis en chômage partiel. Pour donner plus de
souplesse aux entreprises et pour éviter le recours au chômage partiel, il
conviendrait de prévoir que les heures qui excèdent l'horaire annuel d'une
année donnée puissent être affectées à une baisse d'activité antérieure à cette
année.
M. le président.
La parole est à M. Philippe Marini pour présenter les amendements n°s 130,
132, 133 et 134.
M. Philippe Marini.
Nous abordons un domaine financier, et je suis donc un peu plus à l'aise que
quand il s'agit de la législation du travail au sens strict, monsieur le
rapporteur. En l'occurrence, il s'agit du compte épargne-temps.
Ce compte a pour objet, si j'ai bien compris votre texte, monsieur le
ministre, de constituer non seulement des droits à congé rémunéré, mais
également une épargne.
Je propose, par l'amendement n° 130, de lier ce dispositif à celui de
l'épargne salariale. Il existe de nombreux textes législatifs régissant
l'épargne salariale et, en particulier, les plans d'épargne.
Cet amendement vise à permettre le transfert de droits sur un plan d'épargne
de manière à faire bénéficier les détenteurs de cette épargne des avantages
attachés à ces plans. Il s'agit d'instaurer un lien entre deux dispositifs qui
peuvent être de portée voisine et je vois là, monsieur le ministre, une
opportunité d'élargir sur ces sujets la négociation sociale dans
l'entreprise.
L'amendement n° 132 tend à permettre aux salariés de se constituer une épargne
à long terme pour éviter qu'ils ne soient contraints de liquider leurs congés
au titre du compte épargne-temps en cours de carrière et pour leur permettre de
bénéficier sur le long terme des sommes ainsi accumulées, le cas échéant, de
les transformer en dispositif de préparation de la retraite.
Quant à l'amendement n° 133, il vise à améliorer la sécurité juridique. Il me
paraît concevable que des actions judiciaires aient lieu pour faire reconnaître
que les jours placés sur le compte épargne-temps donnent lieu à l'application
des règles relatives, notamment, aux heures supplémentaires. Un risque existait
déjà, mais il m'a paru accru par le fait que le texte qui nous est soumis donne
la possibilité au salarié de sortir du compte épargne-temps par le prélèvement
des sommes figurant sur son compte.
Enfin, l'amendement n° 134 a une portée essentiellement comptable et
fiscale.
La convention ou l'accord collectif détermine les mesures prises afin de
sécuriser l'engagement de l'entreprise. Celle-ci peut, en particulier, à ce
titre, souscrire un contrat d'assurance. Il me paraît utile de le préciser dans
le texte.
Il me paraît également utile d'indiquer que les provisions constatées au bilan
des sociétés ainsi que les primes versées aux organismes d'assurance ne sont
pas des rémunérations, lesquelles sont assujetties aux cotisations sociales, et
que les primes versées aux organismes d'assurance sont des dépenses de
personnel au sens du 1° de l'article 39 du code général des impôts.
Je conclurai en disant que le compte épargne-temps est un excellent
dispositif. C'est un dispositif de souplesse qui va pouvoir être utilisé à bon
escient par les salariés, par les partenaires sociaux. C'est en quelque sorte
un espace de liberté supplémentaire que l'on offre à la négociation sociale et
cela me paraît être l'une des innovations les plus significatives de ce projet
de loi.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Les amendements n°s 59 et 99, qui tendent à supprimer le VIII
de l'article 2, sont incompatibles avec les amendements n°s 5 et 6. La
commission y est donc défavorable.
S'agissant de l'amendement n° 22 rectifié, la commission ne pense pas
souhaitable d'autoriser l'utilisation du compte épargne-temps par anticipation
et
a fortiori
dans le cadre de sa gestion collective sur l'initiative de
l'employeur. Elle a donc émis un avis défavorable.
Sur l'amendement n° 130, la commission a également émis un avis défavorable au
motif que ce texte introduit une liaison entre les plans d'épargne salariale et
le compte épargne-temps. Il n'apparaît pas souhaitable d'alimenter les plans
d'épargne salariale par du temps, car cela modifierait substantiellement non
seulement leur nature mais aussi et surtout leur philosophie par une
fragilisation de l'idée participative.
En ce qui concerne l'amendement n° 132, la commission craint que, en limitant
les conditions d'utilisation du compte épargne-temps, on n'apporte une nouvelle
contrainte inutile pour son utilisation. La commission souhaite donc que M.
Marini retire cet amendement.
A propos de l'amendement n° 133, la commission aimerait connaître l'avis du
Gouvernement.
Cet amendement pose un problème d'intelligibilité immédiate. La référence à la
section III du chapitre II du présent titre paraît en effet erronée. Sans doute
vise-t-il en fait le titre I du livre II du code du travail. Il y a donc un
problème de référence, sur lequel nous aimerions obtenir des
éclaircissements.
De même, la commission souhaiterait entendre l'avis du Gouvernement sur
l'amendement n° 134, dont le caractère très financier dépasse les compétences
de la commission, celles de son rapporteur notamment.
Enfin, l'amendement n° 60 a reçu un avis défavorable. Il s'agit toujours de la
négociation collective dont on a déjà beaucoup parlé.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Sur les amendements n°s 59 et 99, qui visent à supprimer la
faculté d'utiliser le compte épargne-temps comme une épargne, le Gouvernement a
évidemment émis un avis défavorable. Le projet de loi présente en effet des
garanties tout à fait suffisantes de nature à éviter tout usage abusif de la
monétarisation du compte épargne-temps.
Permettez-moi de rappeler ces garanties.
D'abord, le compte épargne-temps n'est pas un dispositif susceptible d'être
mis en place unilatéralement par l'employeur. Il doit résulter d'un accord de
branche étendu ou d'un accord d'entreprise ou d'établissement. Le projet de loi
renforce les exigences quant à cet accord collectif puisqu'il précise que les
accords d'entreprise peuvent faire l'objet d'une opposition par les syndicats
majoritaires.
Ensuite, la monétarisation du compte épargne-temps ne constitue qu'une faculté
ouverte à la négociation collective et les partenaires sociaux peuvent encadrer
les conditions et les modalités suivant lesquelles cette faculté s'exerce.
Enfin, le compte épargne-temps reste un dispositif facultatif pour le salarié.
Celui-ci décide de l'utiliser ou non et choisit les éléments qu'il souhaite
affecter dans son compte.
Il me semble donc que les craintes exprimées par les auteurs des amendements
n°s 59 et 99 ne sont pas fondées.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 5.
En revanche il est défavorable à l'amendement n° 22 rectifié. En effet,
l'article L. 227-1 relatif au compte épargne-temps laisse déjà aux entreprises
la faculté de se ménager une gestion pluriannuelle des heures supplémentaires.
Il appartient à l'accord collectif de préciser les modalités selon lesquelles
les jours affectés sur le compte épargne-temps peuvent être utilisés à titre
individuel ou collectif.
La logique d'anticipation qui prévaut dans cet amendement ne me paraît pas
suffisamment précisée. Une certaine anticipation est d'ores et déjà possible
puisque, dans le cas où une option collective est prévue par l'accord,
l'employeur peut, en cas de baisse d'activité, planifier des jours de repos
indemnisés par le biais du compte épargne-temps.
Cependant, si l'objectif est d'autoriser la prise de jours de repos avant même
que ne soit constituée l'épargne-temps correspondante, on entre alors dans une
logique de prêt qui ne m'apparaît pas souhaitable.
L'idée émise par M. Marini dans l'amendement n° 130 est évidemment
intéressante : il s'agit de lier plus étroitement le dispositif du compte
épargne-temps aux dispositifs d'épargne salariale, plans d'épargne entreprise
et plans d'épargne inter-entreprise, afin que les salariés puissent bénéficier
des droits attachés à ces plans.
Toutefois, monsieur Marini - vous allez trouver le Gouvernement trop prudent -
cette idée me paraît un peu prématurée. En effet, elle vient compléter les
dispositions établies par la loi du 19 février 2001 relative à l'épargne
salariale, loi très récente, dont le bilan n'est pas encore disponible. Or
l'application de cet amendement aurait un certain nombre d'incidences fiscales
et sociales qui nécessitent, me semble-t-il, une évaluation préalable.
Au demeurant, monsieur Marini, je suis tout à fait disposé à approfondir ce
débat, en particulier avec l'appui du Conseil supérieur de la participation,
qui a été trop peu souvent réuni ces derniers temps ; ce n'est pas M. Chérioux
qui en est membre depuis l'origine, en 1994, qui me démentira. Je vais donc
réunir les membres de cet organisme, puisque c'est de ma responsabilité, pour
proposer la mise à l'étude de dispositions allant dans le sens souhaité par M.
Marini. En attendant, je pense que celui-ci voudra bien retirer son
amendement.
Le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n° 132. En l'état actuel du
droit, il est déjà possible, par accord collectif, de modifier à la hausse ou à
la baisse la durée minimale de congé nécessaire pour utiliser le compte et
au-delà de laquelle se calcule le délai maximum d'épargne avant l'utilisation
du compte.
En outre, en cas d'utilisation d'une partie du crédit accumulé, le délai
d'utilisation maximum ne recommence à courir, pour le solde, qu'à compter du
moment où le nombre de jours restant sur le compte correspond à nouveau à la
durée minimale prévue.
Compte tenu de ces éléments, l'enjeu que constitue la définition de la durée
minimale d'épargne valant à défaut de clause conventionnelle contraire
n'apparaît pas suffisamment important pour modifier une donnée qui a déjà fait
l'objet d'une modification avec la loi du 19 janvier 2000.
En effet, la durée minimale, qui était initialement de six mois, a été réduite
à deux mois par cette loi. Il convient, me semble-t-il, de limiter ces
mouvements de va-et-vient qui donnent un sentiment d'insécurité juridique.
Quant à l'amendement n° 6 visant à permettre la monétarisation des congés
payés versés dans le compte épargne-temps dans la limite d'une semaine, le
Gouvernement y est favorable.
En revanche, le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n° 133, qui
tend à exclure l'application du régime des heures supplémentaires aux jours de
repos affectés dans le compte épargne-temps.
En effet, la décision d'abonder le compte épargne-temps de jours de repos
procède d'une démarche individuelle et volontaire du salarié. En conséquence,
l'affectation des jours de repos sur le compte épargne-temps est neutre au
niveau du décompte des heures supplémentaires. La durée annuelle au-delà de
laquelle s'applique le régime des heures supplémentaires est, dans ce cas,
réévaluée à la hausse, afin de tenir compte des repos non pris et affectés au
compte épargne-temps.
En outre, la rédaction proposée par l'amendement, qui fait référence à
l'ensemble de la section III du chapitre II, me paraît trop large puisqu'elle
englobe notamment les articles relatifs à la modulation et à la réduction du
temps de travail sous forme de jours de repos.
Le Gouvernement n'est pas favorable non plus à l'amendement n° 134 visant à
sécuriser le passif social de l'entreprise ainsi que sa situation sociale et
fiscale par rapport à la gestion du compte épargne-temps. Permettez-moi,
mesdames, messieurs les sénateurs, de vous exposer un peu longuement les
raisons de mon opposition car il s'agit d'une question technique importante.
Cet amendement tend en effet à prévoir une clause dans les accords relatifs au
compte épargne-temps visant à déterminer les mesures prises afin de garantir
l'engagement de l'entreprise, notamment par la souscription d'un contrat
d'assurance. Or la loi prévoit déjà, vous le savez, des garanties par le biais
du système de l'AGS. De plus, des accords ont déjà prévu des clauses visant à
répondre à cet objectif. Il m'a donc semblé inutile de créer une nouvelle
clause obligatoire qui serait contraignante pour les négociateurs.
L'amendement n° 134 vise également à prévoir le non-assujettissement aux
cotisations de sécurité sociale des sommes provisionnées dans le cadre des
actions de formation.
Selon moi, il n'y a pas lieu de prévoir cette mesure, car le fait générateur
de l'assujettissement à cotisations est constitué par le versement d'une
rémunération, quelle que soit sa nature, en l'espèce une indemnité
compensatrice. Celle-ci devra être soumise à cotisations et à contributions
sociales lors du versement effectif des indemnités compensatrices aux
salariés.
S'agissant des primes de formation versées dans le cadre du compte
épargne-temps, il ne serait pas équitable, me semble-t-il, de prévoir pour
elles un dispositif dérogatoire. Ces sommes se substituant à un congé qui
aurait été payé au salarié, elles constituent une contrepartie du travail. Les
indemnités compensatrices, quelles qu'en soit l'utilisation, restent des sommes
épargnées en contrepartie du travail et, au fond, peu importent les modalités
d'utilisation du compte épargne-temps.
En ce qui concerne l'amendement n° 60, relatif à l'accord majoritaire, le
Gouvernement émet un avis défavorable pour les raisons déjà exposées.
M. le président.
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 59 et 99.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 5.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 22 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Monsieur Marini, les amendements n°s 130 et 132 sont-ils maintenus ?
M. Philippe Marini.
En ce qui concerne l'amendement n° 130, je remercie M. le ministre d'avoir
envisagé la réunion prochaine du Conseil supérieur de la participation. Le
problème doit effectivement pouvoir lui être soumis. Dans ces conditions, je
retire cet amendement n° 130, en attendant de connaître le contenu des
discussions qui se seront déroulées alors au sein du Conseil.
Je retire également l'amendement n° 132, qui ne semble pas, au regard du droit
existant, strictement nécessaire.
J'indique tout de suite, monsieur le président, que je ne crois pas non plus
devoir maintenir l'amendement n° 133, compte tenu des explications du
Gouvernement.
En revanche, j'avoue ne pas avoir bien intégré tous les éléments de la réponse
que j'ai reçue à propos de l'amendement n° 134. Considérant que demeure un
risque pour le statut fiscal des sommes en cause, à ce stade, je le
maintiens.
M. le président.
Les amendements n°s 130, 132 et 133 sont retirés.
La parole est à M. Gilbert Chabroux pour explication de vote sur l'amendement
n° 6.
M. Gilbert Chabroux.
Selon la législation, dix jours de congés payés peuvent être placés sur un
compte épargne-temps. Le rapporteur propose que seuls cinq jours puissent être
monétarisés. Pour nous, c'est encore trop.
Je répète que le compte épargne-temps a pour objectif la constitution d'une
épargne en jours, dans une perspective d'amélioration de la vie du salarié et
de sa famille, pour faciliter la prise de congés et, éventuellement, pour
suivre une formation.
La législation a d'ailleurs érigé des barrières afin que les salariés ne
puissent être eux-mêmes tentés de placer un nombre excessif de jours de congés
ou de repos compensateur sur le compte épargne-temps, ou fermement invités à le
faire. De même, des délais de récupération de ces jours ont été fixés.
Nous sommes donc résolument opposés à la monétarisation qui non seulement
implique que l'entreprise fasse des provisions mais encore n'est pas réalisée
au profit du salarié, comme le prévoit l'article L. 227-1 du code du travail.
En effet, la transformation des jours en argent récupérable à terme et sans
intérêts constitue en réalité une perte pour le salarié puisque l'inflation,
même faible, viendra grignoter son épargne.
Par ailleurs, une épargne en argent ne peut alimenter des jours de formation,
sauf à considérer que le salarié devra co-investir dans sa formation non
seulement en épargnant du temps, mais aussi en la finançant en partie avec
l'argent du compte épargne-temps.
Nous voterons donc contre cet amendement.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 6.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission sur l'amendement n° 134.
M. Nicolas About,
président de la commission.
Je voudrais demander à mon tour à notre
collègue Philippe Marini d'envisager le retrait de son amendement n° 134, car
le dispositif qu'il propose revient tout de même à soustraire un certain nombre
d'équivalents du travail aux cotisations sociales, ce qui n'est certainement
pas conforme à sa volonté.
Il ne faudrait pas que ce mécanisme apparaisse comme un moyen détourné
d'échapper à la règle qui s'applique pour le fruit du travail.
M. le président.
Monsieur Marini, vous qui connaissez mieux que quiconque, en tant que
rapporteur général, ce que peut signifier l'appel émanant d'une commission,
quelle est votre réponse ?
(Sourires.)
M. Philippe Marini.
Monsieur le président, c'est comme sénateur de base que je vais répondre.
(Nouveaux sourires.)
J'ai quelque peine à admettre qu'une prime d'assurance puisse être assujettie
aux cotisations sociales, car c'est bien de cela qu'il s'agit. Il serait en
effet inédit qu'une prime d'assurance soit assimilée au fruit du travail, comme
dit excellemment M. le président de la commission des affaires sociales.
Peut-être la navette permettra-t-elle de préciser ce point.
S'agissant de ce qui est contrepartie du travail, substitut d'une
rémunération, je suis entièrement d'accord avec M. About.
En revanche, s'agissant d'une prime d'assurance, qu'il me pardonne, je ne peux
pas aller aussi loin que lui.
C'est la seule raison, purement technique, pour laquelle je vais maintenir cet
amendement, espérant que, quel que soit son sort, on voudra bien examiner ce
problème ultérieurement afin d'y apporter la solution qu'il mérite.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About,
président de la commission.
Je souhaite que la navette nous apporte
effectivement de la clarté, mais je demande simplement à M. Marini de ne pas en
vouloir à la commission si elle appelle à voter contre son amendement.
M. Philippe Marini.
Je le comprends parfaitement !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 134.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 60.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 131, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
« Compléter
in fine
cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
« ... - Au huitième alinéa de l'article L. 443-1-1, après les mots : "champ de
l'accord", sont insérés les mots : "les sommes transférées d'un compte
épargne-temps".
« ... - Au premier alinéa de l'article L. 443-2 après les mots : "auxquels il
participe", sont insérés les mots : ", transferts des sommes d'un compte
d'épargne-temps inclus,". »
La parole est à M. Philippe Marini.
M. Philippe Marini.
Il s'agit du lien éventuel à envisager entre le compte épargne-temps et divers
dispositifs de l'épargne salariale. Compte tenu de la réponse qui m'a été
apportée tout à l'heure par M. le ministre, je retire cet amendement.
M. le président.
L'amendement n° 131 est retiré.
L'amendement n° 145, présenté par M. Souvet, au nom de la commission est ainsi
libellé :
« I. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« B. - Les contingents conventionnels d'heures supplémentaires négociés, en
application du deuxième alinéa de l'article L. 212-6 du code du travail,
antérieurement à la date de publication de la présente loi reçoivent plein
effet en matière d'ouverture du droit à repos compensateur obligatoire, dans la
limite du contingent réglementaire prévue au premier alinéa du même article.
»
« II. - En conséquence, faire précéder le début de cet article de la mention :
"A. -". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Cet amendement vise à préciser l'impact de la future loi sur
l'équilibre général des accords actuellement applicables s'agissant du
déclenchement du repos compensateur obligatoire.
Le projet de loi prévoit, en effet, que ce sera désormais le franchissement du
contingent conventionnel, et non plus du contingent réglementaire, qui
déclenchera le repos compensateur obligatoire.
Dès lors, se pose nécessairement la question du sort des accords qui avaient
fixé des contingents sur la base d'une législation antérieure, question qui
n'est pas abordée à l'article 13, relatif à la sécurisation. Il est vrai que
les accords restent le plus souvent muets sur ce point, n'évoquant pas le repos
compensateur obligatoire et ne faisant pas ressortir clairement l'intention des
partenaires sociaux sur ce sujet.
Le nouveau seuil de déclenchement leur est-il automatiquement applicable ?
Mais, dans ce cas, n'y aurait-il pas bouleversement de l'équilibre général de
l'accord susceptible d'en entraîner la dénonciation et, par conséquent, la
renégociation ? Ce n'est pas forcément souhaitable, car les accords ont souvent
trouvé des équilibres délicats, que le législateur se doit de respecter,
A l'inverse, peut-on raisonnablement imaginer que les nouvelles dispositions
du projet de loi ne s'appliquent pas aux accords déjà conclus ? Ce serait alors
restreindre, sans doute à l'excès, la portée de la loi.
Cet amendement vise à dissiper cette insécurité juridique en proposant une
réponse équilibrée à ces questions. Il prévoit de limiter la portée des
contingents conventionnels actuels en matière de déclenchement du repos
compensateur au niveau du contingent supplémentaire, soit 180 heures.
En clair, si le contingent conventionnel est inférieur à 180 heures, le repos
compensateur se déclenchera dès le franchissement du contingent conventionnel.
Si le contingent conventionnel est supérieur à 180 heures, le repos se
déclenchera à partir de 180 heures. La commission a estimé que cette solution
était la seule à même de concilier, au nom de l'intérêt général, l'exigence de
sécurité juridique et le respect de l'équilibre des accords déjà conclus.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Le Gouvernement est favorable à cet amendement, qui tend lever
la difficulté que posent les contingents coventionnels négociés avant l'entrée
en vigueur du présent texte.
Il s'agit non seulement d'éclaircir un point juridique, mais aussi de répondre
à une question que se posent légitimement tant les entreprises que les
organisations syndicales de salariés, celle du sort des accords qui avaient
fixé des contingents sur la base de la législation antérieure.
Force est de constater que, devant les dispositions qui distinguaient
différentes catégories de contingents, les accords signés par les partenaires
sociaux ont souvent été ambigus. Ils évoquent ainsi soit le contingent
conventionnel valant pour l'autorisation de l'inspecteur du travail, soit le
contingent conventionnel sans autre précision. Ainsi, la lecture des accords ne
fait pas apparaître clairement l'intention des partenaires sociaux.
Autrement dit, la situation actuelle est source d'insécurité juridique. Elle
se caractérise par des accords au contenu ambigu, qui ont pu faire l'objet de
réserves et d'exclusions dont la portée exacte est incertaine.
L'amendement prévoit de limiter la portée des contingents conventionnels
passés s'agissant des droits à repos compensateur obligatoire au niveau du
contigent réglementaire, soit 180 heures désormais.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 145.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté).
Articles additionnels après l'article 2
M. le président.
L'amendement n° 137, présenté par MM. de Broissia et Gournac, est ainsi
libellé :
« Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article L. 213-1-1 du code du travail est complété par un alinéa
ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa ci-dessus, pour les activités de production
rédactionnelle et industrielle et de distribution de presse, de radio, de
télévision, de production et d'exploitation cinématographiques, de spectacles
vivants, de discothèque, la période de nuit est fixée entre 24 heures et 7
heures. Une autre période de travail de nuit peut être fixée par une convention
ou un accord collectif de branche étendu, un accord d'entreprise ou
d'établissement. Cette période de substitution devra comprendre en tout cas
l'intervalle compris entre 24 heures et 5 heures. »
« II. - Après le deuxième alinéa de l'article L. 213-4 du même code, il est
inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les activités visées au troisième alinéa de l'article L. 213-1-1,
lorsque la durée effective du travail de nuit est inférieure à la durée légale,
les contreparties visées aux deux alinéas ci-dessus ne sont pas obligatoirement
données sous forme de repos compensateur. »
La parole est à M. Louis de Broissia.
M. Louis de Broissia.
J'ai déposé cet amendement avec mon collègue Alain Gournac...
M. Guy Fischer.
Pourquoi ne le défend-il pas lui-même ?
M. Louis de Broissia.
... afin d'évoquer, à propos de ce texte visant le temps de travail, la
rémunération et les conditions de travail, un certains nombre d'activités
exercées uniquement la nuit : je veux parler des industries culturelles, de
celles qui sont liées à la production rédactionnelle, à la distribution de
presse, à la radio, à la télévision, à la production cinématographique et au
spectacle vivant.
Nous considérons, pour en avoir parlé avec les intéressés, qu'il est
nécessaire de prévoir des dispositions spécifiques à cet égard. Si des mesures
particulières existent déjà en matière sociale ou fiscale - pour les porteurs
de presse, par exemple - et si, juridiquement, aux termes de l'article L. 213-1
du code du travail, le recours au travail de nuit doit être exceptionnel, «
doit prendre en compte les impératifs de protection de la sécurité et de la
santé des travailleurs » et « doit être justifié par la nécessité d'assurer la
continuité de l'activité économique ou des services d'utilité sociale », il
n'en reste pas moins que certaines activités ne peuvent être pratiquées que la
nuit. Comme le disait M. de La Palice, une activité nocturne ne se déroule que
la nuit !
Je sais que la commission n'a été que pour partie sensible à cette
organisation, mais je tiens à rassurer M. le rapporteur : le dialogue social
devra être poursuivi sur ces questions.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
La commission est bien embarrassée face à cet amendement qui
vise à adapter le nouveau régime légal du travail de nuit pour les entreprises
de spectacle et d'information.
Il est vrai que la spécificité desdites entreprises mériterait peut-être
d'être mieux prise en compte, mais cela doit se faire dans le cadre d'une étude
plus approfondie et non au détour de l'examen d'un tel amendement.
En tout état de cause, la commission m'a chargé d'invoquer la sagesse du
Sénat.
M. Guy Fischer,
Ah bon ? Elle n'est pas défavorable, cette fois-ci ?
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon
ministre.
Le Gouvernement souhaite effectivement que le Sénat fasse
preuve de sagesse sur cette question, qui est grave puisque, comme celle que
nous avons traitée tout à l'heure, elle a des conséquences sur la négociation
entre le Gouvernement et les partenaires sociaux.
Ce n'est un secret pour personne, nous avions prévu, dans le texte qui a été
soumis à l'origine aux partenaires sociaux, des dispositions sur ce sujet. Mais
la concertation nous a conduits à les retirer.
Même si je suis conscient que la loi sur le travail de nuit suscite des
difficultés d'application dans un certain nombre de secteurs - c'est le cas du
spectacle, de l'audiovisuel, du cinéma, mais aussi des hôtels, des cafés et des
restaurants - ces secteurs ont commencé à négocier et je les encourage à
trouver entre partenaires sociaux toutes solutions susceptibles de lever ces
difficultés.
Permettez-moi, en outre, de souligner qu'il n'y a aucune raison de traiter de
manière distincte les secteurs visés par l'amendement de M. de Broissia.
J'ajoute que les partenaires sociaux sont extrêmement attachés à la
législation actuelle. A l'évidence, celle-ci présente en effet des avantages,
notamment pécuniaires, pour les salariés qualifiés travailleurs de nuit.
Sur ce sujet comme sur d'autres, j'examinerai tout accord entre les
partenaires sociaux dès lors que ces derniers sont animés par le souci de
respecter le dialogue social. Revenir, à l'occasion de l'examen de ce texte et
sous la forme de cet amendement, sur la définition du travail de nuit
reviendrait à remettre en cause les avantages que je viens d'évoquer.
M. Gilbert Chabroux.
C'est gravissime !
M. François Fillon,
ministre.
Je préfère, pour ma part, que ce type de débat soit d'abord
engagé par le biais de la négociation, afin de garantir l'équilibre entre les
parties.
M. Gilbert Chabroux.
Bien sûr !
M. François Fillon,
ministre.
La loi prévoit ainsi, pour certaines branches visées dans un
décret, la possibilité d'aller, par voie d'accord, au-delà de la durée maximale
de huit heures pour le travail de nuit. Cette possibilité est d'ailleurs prévue
par une directive européenne de 1993.
Si des accords venaient à être conclus dans des branches qui, aujourd'hui, ne
figurent pas dans ce décret - c'est le cas du spectacle, du cinéma et d'autres
secteurs que M. de Broissia a cités tout à l'heure - le Gouvernement pourrait
alors en tirer les conséquences. Mais imposer aujourd'hui, dans le cadre de ce
texte, la perte des avantages financiers que représentent aujourd'hui les
accords qui ont été signés pour les salariés en question me paraîtrait
dangereux, même si, comme le disait M. de Broissia, certains métiers ne peuvent
s'exercer que la nuit.
Quoi qu'il en soit, le travail de nuit n'est pas le travail de jour, et le
Sénat doit bien prendre en compte l'importance et la gravité qu'il y aurait à
modifier de manière unilatérale, sans concertation avec les partenaires
sociaux, sans chercher à trouver des équilibres à travers une négociation,
cette question, au demeurant très importante.
Le Gouvernement souhaite donc le retrait de cet amendement.
M. le président.
La parole est à M. Louis de Broissia pour explication de vote.
M. Louis de Broissia.
Monsieur le ministre, la sagesse qu'a invoquée M. le rapporteur pourrait
éventuellement me permettre - avec mon ami Alain Gournac je l'espère - de
convaincre nos collègues qu'il y a lieu de légiférer sur un sujet de cet
importance.
Il est en effet nécessaire et opportun de mener un dialogue social ouvert dans
les industries de la culture, du spectacle, de la presse, de la
distribution,...
M. Guy Fischer.
Sans oublier les intermittents du spectacle !
M. Louis de Broissia.
... pour tous ces intéressés qui travaillent la nuit et auxquels je
m'intéresse en tant que rapporteur spécial sur les budgets de la communication
et de l'audiovisuel, secteurs extrêmement fragiles.
Comparaison n'étant pas raison, je sais bien que d'autres travaillent la nuit
: les policiers, les gendarmes, les hôteliers, les restaurateurs...
M. Hilaire Flandre.
Les sénateurs !
M. Louis de Broissia.
Pour eux, c'est normal ! Et je n'oublie pas tous ceux qui travaillent avec
nous.
Cela étant, même si d'autres travaillent la nuit, je rappelle que le
Gouvernement a toujours défendu ce bien spécifique qu'est le bien culturel.
Ainsi, dans les négociations internationales, la France est en tête du combat
pour la diversité culturelle et contre le produit culturel unique.
M. Guy Fischer.
Et nous serons en tête pour la régression sociale si cet amendement est adopté
!
M. Louis de Broissia.
Cependant, au-delà de cet argument, monsieur le ministre, et parce que je
souhaite que la négociation puisse s'ouvrir dans les meilleures conditions, je
vous demande de créer une mission non pas sur le travail de nuit en général,
mais sur le travail nocturne dans les industries culturelles, dans les
industries du spectacle.
Je ne souhaite pas ouvrir ici le dossier des restaurateurs, par exemple, pour
qui le travail de nuit est réglementé par le code du travail ! Je veux
simplement savoir si, oui ou non, le Gouvernement fait preuve d'ouverture sur
ce sujet qui, je le maintiens, est d'une grande actualité.
Si j'obtiens une réponse favorable, j'aviserai !...
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon,
ministre.
Le Gouvernement est tout à fait favorable à la mise en oeuvre
d'une mission sur le travail de nuit, si elle est limitée aux professions que
vous venez d'évoquer. Cela permettra de mettre à plat certains des problèmes
qui se posent dans ces secteurs, et surtout d'entendre les partenaires sociaux
et de mettre en place avec eux les conditions d'une négociation qui pourrait
déboucher sur un accord équilibré.
A la question de M. de Broissia, je réponds donc oui : une mission travaillera
sur ce sujet, et tout de suite.
M. le président.
Monsieur de Broissia, l'amendement est-il maintenu ?
M. Louis de Broissia.
J'attends du Gouvernement une réponse avant la fin de 2002. En attendant,
monsieur le président, l'amendement est retiré.
M. le président.
L'amendement n° 137 est retiré.
L'amendement n° 23, présenté par M. Joly, est ainsi libellé :
« Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« A l'article L. 932-2 du code du travail :
« 1. La seconde phrase du premier alinéa de l'article L. 932-2 est
supprimée.
« 2. Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Un accord de branche ou d'entreprise peut prévoir les conditions dans
lesquelles les actions de formation peuvent être organisées, en accord avec le
salarié, pour partie hors du temps de travail effectif. »
La parole est à M. Bernard Joly.
M. Bernard Joly.
Cet amendement a pour objet de sécuriser, au moins par un accord de branche
ou, si possible, par un accord d'entreprise ou d'établissement, la définition
des formations susceptibles d'être, en accord avec le salarié, effectuées pour
partie hors du temps de travail effectif. A défaut, on en resterait à la loi «
Aubry II », et c'est encore le juge qui devrait dire si telle formation est
dite « d'adaptation à l'emploi », et donc obligatoirement réalisée sur le temps
de travail, ou si elle est dite « de développement des compétences », et donc
susceptible d'être effectuée pour partie en dehors du temps de travail
effectif. C'est un nid à contentieux qu'il faut éliminer.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
La commission considère que le présent projet de loi n'a
évidemment pas à revenir sur l'articulation entre le temps de travail et le
temps de formation au moment même où les négociations des partenaires sociaux
sur la formation professionnelle devraient reprendre.
Elle souhaite donc que notre collègue retire son amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
J'ai un bon argument, monsieur le sénateur, pour vous
convaincre de retirer votre amendement : la négociation interprofessionnelle
sur la formation professionnelle, que j'ai souhaitée, est sur le point de
s'engager.
Vous savez que la négociation conduite en 2001 avait échoué, alors qu'elle
était sur le point d'aboutir. J'ai envoyé au début de la semaine une lettre à
tous les partenaires sociaux en leur demandant de reprendre cette négociation,
notamment avec l'idée de mettre au point l'assurance-emploi, c'est-à-dire ce
compte individuel de formation professionnelle permanente tout au long de la
vie que le Président de la République s'était engagé à mettre en oeuvre au
cours de la campagne électorale.
Adopter aujourd'hui un amendement qui modifie de manière sensible la question
de la qualification du temps de formation professionnelle par rapport au temps
de travail reviendrait à envoyer un signal négatif aux partenaires sociaux et
les conduirait sans doute à ne pas engager cette négociation très
importante.
Je suis convaincu que M. Bernard Joly acceptera de retirer son amendement : il
montrera ainsi aux partenaires sociaux qu'il leur laisse la liberté de
s'engager dans une négociation pour obtenir satisfaction.
M. le président.
Monsieur Joly, l'amendement est-il maintenu ?
M. Bernard Joly.
Monsieur le président, j'ai cru, pendant un moment, que certains voulaient
faire le bonheur des gens malgré eux. Devant le ton convaincant de M. le
ministre, et pour l'aider dans sa négociation, je ne peux que retirer mon
amendement.
M. le président.
L'amendement n° 23 est retiré.
Article 2 bis
M. le président.
« Art. 2
bis. -
Le premier alinéa de l'article L. 212-4
bis
du
code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Exception faite de la durée d'intervention, la période d'astreinte est
décomptée dans les durées minimales visées aux articles L. 220-1 et L. 221-4.
»
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy sur l'article.
M. Jean-Pierre Godefroy.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, puisque la
question de l'astreinte est arrivée inopinément dans notre débat sur le temps
de travail, le groupe socialiste tient à rappeler sur ce point sa position, qui
n'a pas varié.
Aux termes de l'article L. 212-4
bis
du code du travail, « la période
d'astreinte s'entend comme une période pendant laquelle le salarié, sans être à
la disposition permanente et immédiate de l'employeur, a l'obligation de
demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure d'intervenir pour
effectuer un travail au service de l'entreprise, la durée de cette intervention
étant considérée comme un temps de travail effectif ».
Ainsi définie, l'astreinte ne couvre pas les périodes de permanence effectuées
dans les locaux de l'entreprise, lesquelles constituent du temps de travail
effectif.
Dans ce cas - et je pense notamment aux professions de santé - des durées
d'équivalence ont été prévues par la législation, par la réglementation et par
des conventions collectives. Ainsi, les périodes de surveillance nocturne en
chambre de veille comptent-elles comme trois heures de travail pour neuf heures
de présence. Au-delà, une demi-heure de travail est décomptée pour chaque heure
de présence, dans la limite de douze heures.
Il existe toute une série de dispositions concernant diverses professions
qu'il semble superflu d'énumérer ici. Je crois que nous sommes au clair sur ce
point, pour le moment tout au moins.
La question se pose donc pour les astreintes hors de l'entreprise.
Monsieur le ministre, vous avez fait remarquer avec pertinence lors du débat à
l'Assemblée nationale que l'astreinte est aujourd'hui facilitée par l'usage de
téléphones portables. C'est exact, mais les progrès n'empêchent pas que
l'astreinte demeure.
Le salarié sous astreinte doit être joignable à tout moment et, s'il peut
s'éloigner d'un téléphone fixe ou de son domicile, il doit toujours rester à
une distance de l'entreprie et des lieux d'intervention lui permettant de s'y
rendre rapidement. Il ne peut donc pas trop s'éloigner de son domicile. Il ne
peut pas pratiquer des activités sportives ou culturelles. Il ne peut pas non
plus, si son conjoint travaille, garder ses enfants à la maison.
Ces observations de simple bon sens nous font mesurer la portée pratique de
l'astreinte, tant pour l'employeur que pour le salarié.
Au demeurant, l'organisation des astreintes dans une entreprise doit faire
l'objet d'une programmation par voie d'accord qui fixera également les
modalités de compensation, sous forme financière ou de temps de repos. Tout
salarié ayant effectué des astreintes doit disposer, en fin de mois, d'un
récapitulatif mentionnant les compensations.
Ce document doit être tenu à la disposition de l'inspection du travail pendant
un an. Je rappelle que l'article R. 261-3 du code du travail prévoit même des
peines d'amende pouvant aller jusqu'à 3 750 euros pour l'employeur, personne
morale, qui faillirait à ces obligations.
On voit donc bien que si, jusqu'à présent, nul ne s'est riqué à donner une
définition juridiquement esthétique de l'astreinte, nous disposons d'un arsenal
complet pour en régler l'exercice.
Il n'existe pas de définition positive et brièvement exprimée de l'astreinte.
Vouloir en introduire une est tout à fait périlleux et risque, très vite, de se
révéler source de conflits.
L'astreinte hors intervention n'est évidemment pas un temps de travail
effectif. Cela se constate. De plus, les finances des entreprises, des
établissements publics et des collectivités en souffriraient gravement.
Prétendre que l'astreinte est un temps de repos est tout aussi inexact,
puisque le salarié n'est pas totalement libre de ses mouvements comme lorsqu'il
est en repos.
Ce qui caractérise l'astreinte, c'est que le lien de subordination qui lie le
salarié à son employeur n'est pas interrompu. Il est représenté par un élément
matériel - au moins un téléphone - et par un élément juridique : l'obligation
pour le salarié d'accomplir un acte professionnel si l'on fait appel à lui.
A l'évidence, l'astreinte est pour le salarié une contrainte, et c'est pour
raison cette qu'elle donne lieu à compensation.
Il n'est donc pas envisageable que la loi profère une contre-vérité, d'autant
plus que ses conséquences pratiques risquent de s'avérer particulièrement
néfastes, tant pour les salariés que pour les entreprises.
C'est pourquoi, monsieur le ministre, nous demandons la suppression de
l'article 2
bis
.
M. le président.
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendements n° 61 est présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et
Domeizel, Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste,
apparenté et rattachée.
L'amendement n° 100 est présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer l'article 2
bis
. »
L'amendement n° 123, présenté par M. Gournac, est ainsi libellé :
« Compléter le texte proposé par cet article pour compléter le premier alinéa
de l'article L. 212-4
bis
du code du travail par des dispositions
suivantes :
« Cette période ne peut être supérieure à sept jours consécutifs. »
L'amendement n° 34, présenté par M. Geoffroy, est ainsi libellé :
« A. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« II. - Le deuxième alinéa du même article est complété par une phrase ainsi
rédigé :
« Un décret détermine les garanties minimales en matière d'organisation des
astreintes et de leur compensation.»
« B. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« III. - Les astreintes effectuées par des fonctionnaires ou des agents non
titulaires de droit public ouvrent droit à compensation dans des conditions
fixées par décret.
« C. - En conséquences, faire précéder le début de cet article de la mention :
"I. - ". »
La parole est à M. Gilbert Chabroux pour présenter l'amendement n° 61.
M. Philippe Marini.
Il vient d'être défendu !
M. Guy Fischer.
Vous n'allez pas continuer !
M. Gilbert Chabroux.
Monsieur le président, à la suite des propos de M. Jean-Pierre Godefroy, nous
demandons la suppression de l'article 2
bis
, dont le premier objet est
de contrecarrer une jurisprudence de la Cour de cassation et qui n'apporte donc
aucune sécurité juridique nouvelle.
Cet article aurait pour conséquence de porter gravement atteinte aux
conditions de vie des salariés et de remettre en cause les accords collectifs
signés en la matière, créant ainsi de nouveaux contentieux et une grande
confusion.
Le mode d'exercice de l'astreinte doit être laissé à l'appréciation des
partenaires sociaux dans les branches et dans les entreprises.
M. le président.
La parole est à M. Roland Muzeau pour défendre l'amendement n° 100.
M. Roland Muzeau.
Monsieur le ministre, comme je l'ai déjà indiqué dans mon intervention
générale, l'ajout de la disposition modifiant le régime des astreintes me
paraît particulièrement grave et je suis surpris que vous l'ayez accepté car il
déséquilibre gravement votre texte.
Désormais, les choses sont claires : ce projet de loi aggrave la subordination
du salarié à l'employeur.
Les syndicats sont unanimes pour dénoncer ce qu'il est juste de nommer une
atteinte à la vie sociale de millions de salariés car il ne s'agit pas de
quelques dizaines de salariés.
Il ressort clairement des débats qui ont précédé le vote de cet article
additionnel à l'Assemblée nationale que ce texte a pour unique objet de faire
échec à l'arrêt rendu par la chambre sociale de la Cour de cassation le 10
juillet 2002, dans une affaire concernant la société Dalkia.
Au terme de ce jugement, il est écrit que « les périodes d'astreinte, si elles
ne constituent pas un temps de travail effectif durant les périodes où le
salarié n'est pas tenu d'intervenir au service de l'employeur, ne peuvent être
considérées comme un temps de repos, lequel suppose que le salarié soit
totalement dispensé, directement ou indirectement, sauf cas exceptionnels,
d'accomplir pour son employeur une prestation de travail, même si elle n'est
qu'éventuelle ou occasionnelle ».
Il en résulte qu'un salarié ne bénéficie pas de son repos hebdomadaire
lorsqu'il est d'astreinte.
L'amendement adopté par l'Assemblée nationale a pour conséquence d'opérer une
totale assimilation entre temps de repos et temps d'astreinte et, par là même,
de mettre en cause le repos quotidien de onze heures consécutives et le repos
hebdomadaire de vingt-quatre heures.
Une telle assimilation ne me paraît pas fondée. Ces deux notions sont
totalement inconciliables.
S'agissant en premier lieu d'astreinte, il convient de rappeler que
l'astreinte telle qu'elle est définie par le premier alinéa de l'article L.
212-4
bis
du code du travail est « une période pendant laquelle le
salarié, sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, a
l'obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure
d'intervenir pour effectuer un tarvail au service de l'entreprise ».
Dès lors, par le fait même de se trouver en astreinte, le salarié est toujours
en situation de subordination juridique par rapport à son employeur puisqu'il a
l'obligation de demeurer à son domicile ou à proximité, de se tenir constamment
prêt à intervenir immédiatement dans la mesure où les périodes d'astreinte
sont, par définition, prévues pour pallier la survenue d'incidents soudains
nécessitant des travaux urgents pour garantir la sécurité des biens et des
personnes qui ne pourraient être réalisés dans le cadre de travaux
planifiés.
Le salarié d'astreinte doit donc toujours effectuer un travail pour le compte
de son employeur.
Monsieur le ministre, le seul fait de se tenir toujours prêt à intervenir dans
l'attente d'une directive de son patron et, au surplus, de demeurer dans un
lieu ou à proximité d'un lieu imposé, constitue à l'évidence une prestation du
salarié pour le compte de son employeur.
L'astreinte est effectuée en exécution du contrat de travail. Elle donne lieu
à une compensation soit financière, soit sous forme de repos, selon l'article
L. 212-4
bis
, alinéa 2, du code du travail. C'est une période pendant
laquelle l'employeur conserve son pouvoir disciplinaire dans toute son
étendue.
Vous ne pouvez ignorer qu'il ne fait aucun doute que le repos, au sens des
autres articles, par exemple les articles L. 220-1 et L. 221-4 du code du
travail, doit s'entendre de toute période pendant laquelle le salarié
n'effectue aucun travail, le salarié ne pouvant et ne devant recevoir pendant
cette période aucune directive de son employeur.
Enfin, la directive européenne du 23 novembre 1993 et les articles 3 et 5
imposent aux Etats membres de prendre les mesures nécessaires pour que tout
travailleur bénéficie d'une période de repos quotidien minimal de onze heures
consécutives et d'une période de repos hebdomadaire de vingt-quatre heures sans
interruption. Tout cela conduit à la définition suivante : la période de
repos, c'est toute période qui n'est pas du temps de travail.
Dès lors, il est certain que l'amendement que vous avez laissé voter par
l'Assemblée nationale le 15 octobre 2002, monsieur le ministre, est contraire à
la directive du Conseil.
Il ne fait guère de doute que, dans l'hypothèse où cet amendement serait
maintenu - je souhaite, bien évidemment, qu'il soit supprimé par notre
assemblée -, les juridictions judiciaires, immanquablement saisies par les
salariés ou par les organisations syndicales, seraient fondées à l'écarter par
voie d'exception.
Je demande à l'ensemble de nos collègues de prendre la mesure de la gravité de
cet amendement voté pour faire plaisir à une composante de la majorité
présidentielle et qui met en danger la vie de millions de salariés.
(Très
bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Alain Gournac pour présenter l'amendement n° 123.
M. Alain Gournac.
Il ne s'agit pas de revenir sur l'interdiction de faire travailler un salarié
plus de six jours par semaine, le repos hebdomadaire étant obligatoire. Je
propose plutôt d'appréhender d'une façon intelligente la question de
l'astreinte.
Il existe une grande différence entre une astreinte de six jours et une
astreinte de sept jours.
Si le salarié est d'astreinte pendant six jours, son week-end est déjà entamé.
Et si les astreintes sont régulières, notamment dans les services des eaux, de
La Poste, de dépannage, et bien d'autres, le passage à sept jours permettrait,
comme c'est le cas dans nos collectivités territoriales, de libérer davantage
de week-ends pour les intéressés.
Passer à sept jours correspondrait aux souhaits des salariés, je l'ai dit, je
le répète, de bénéficier de week-ends entiers et non pas de repos hebdomadaires
qui ne débutent que le dimanche.
Il s'agit donc d'organiser les astreintes de façon plus rationnelle et plus
proche de la pratique.
M. le président.
La parole est à M. André Geoffroy pour présenter l'amendement n° 34.
M. André Geoffroy.
Pour ma part, je me situerai sur un plan pragmatique et non dogmatique.
L'amendement n° 34 concerne essentiellement l'astreinte dite « de sécurité
».
Compte tenu des implications de l'article 2
bis,
qui modifie le régime
des astreintes, il serait souhaitable de fixer dans la loi le principe d'une
nécessaire compensation, la loi se devant en effet de déterminer les garanties
minimales applicables en la matière. Celles-ci pourraient alors être renvoyées
à un décret.
Cet amendement vise donc à poser ce principe de compensation minimale non
seulement pour les salariés relevant du code du travail, mais aussi pour les
agents publics.
Chacun connaît en effet les difficultés liées aux astreintes, notamment dans
le secteur hospitalier, dans les services départementaux d'incendie et de
secours, ainsi que dans les entreprises liées à la maintenance dans les
immeubles du chauffage et des ascenseurs.
Je prendrai un exemple non corporatiste pour conclure : dans les services
départementaux d'incendie et de secours, modifier les astreintes concerne en
priorité les sapeurs-pompiers volontaires, c'est-à-dire des personnes
passionnées et motivées par leur engagement, puisqu'elles exercent ce métier en
sus de leur activité professionnelle.
Cette mesure pénaliserait les communes rurales moins riches qui emploient plus
de volontaires que de professionnels.
Enfin, en pleine période de crise du volontariat, notamment à cause de
problèmes de manque de disponibilité, il apparaît négatif de supprimer les
astreintes.
Le système de secours en France repose essentiellement sur l'équilibre entre
les professionnels et les volontaires, cette originalité nous permettant de
disposer d'effectifs variables en fonction des besoins.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
L'article 2
bis
répond à une jurisprudence qui aurait
conduit les entreprises à remettre en cause l'ensemble de leur organisation. Il
n'est pas souhaitable de le supprimer, totalement ou en partie.
Cependant, je veux dire quelques mots sur la question des astreintes.
Après consultations et analyses, il m'est apparu que les difficultés liées aux
astreintes ne tenaient pas à l'amendement adopté à l'Assemblée nationale,
celui-ci se contentant de rétablir le droit antérieur à la jurisprudence de
juillet dernier.
Ces difficultés sont avant tout liées aux failles du régime légal telles
qu'elles sont posées par la loi du 19 janvier 2000.
Que constate-t-on en effet ?
Quand un accord collectif est conclu, l'astreinte ainsi négociée ne pose pas
de problème.
En revanche, quand il n'y a pas d'accord et que l'astreinte est mise en place
sur la seule initiative de l'employeur, j'observe qu'aucune garantie minimale
pour le salarié n'est actuellement prévue dans le code du travail, notamment en
matière de compensation.
Je me suis donc demandé comment il serait possible d'assurer de telles
garanties minimales - ma réponse vaut pour l'amendement n° 34 de M. Geoffroy -,
mais les deux solutions que j'ai examinées, à savoir la négociation nationale
interprofessionnelle et le décret se sont en l'état révélées impossibles à
mettre en oeuvre.
Dans ces conditions, j'estime qu'il n'est pas raisonnable de mettre en place,
à la va-vite, un nouveau cadre législatif pour ces garanties minimales.
Je crois que ce problème doit en priorité être négocié par les branches. A
défaut, et sur les bases d'un solide état des lieux, le législateur pourrait,
en son temps, être conduit à se saisir à nouveau de cette question. Mais je
souhaite vivement que vous encouragiez déjà, dans un premier temps, les
partenaires sociaux à se mettre au travail sur ce sujet.
S'agissant de l'amendement n° 123, qui vise à limiter les périodes d'astreinte
à sept jours consécutifs, j'aurais personnellement tendance - et M. Gournac le
sait, car nous en avons parlé ce matin - à y être favorable, mais je souhaite
connaître l'avis du Gouvernement à ce sujet.
Enfin, l'amendement n° 34 renvoie à un décret le soin de fixer les garanties
minimales, notamment en matière d'organisation des astreintes et de
compensation. Je partage, je l'ai déjà dit, largement l'analyse de notre
collègue André Geoffroy. Toutefois, je le répète, ce n'est pas le dispositif
qui a été adopté à l'Assemblée nationale qui pose problème, ce sont les
imperfections du régime. En effet, dès lors qu'il n'y a pas d'accord, le code
du travail ne prévoit aucune garantie minimale.
Comme M. Geoffroy, j'avais aussi cherché à explorer la voie du décret. Il m'a
cependant semblé, après consultations et analyses, que cette voie était
difficile à mettre en oeuvre eu égard non seulement à la place respective de la
loi et du règlement, mais aussi à la diversité bien compréhensible des besoins
qui se font jour selon les branches. Sur cet amendement également, je souhaite
connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Pour que nos débats soient fructueux, il faut que, à un moment
donné, les faits soient admis par tout le monde. On ne peut pas, pendant des
semaines, continuer à dire des choses qui sont inexactes, qui reposent sur des
analyses fausses, qui peuvent avoir été inspirées par telle ou telle
déclaration entendues ici ou là, mais qui ne résistent pas à l'examen des faits
!
Nous ne sommes nullement en train de modifier le régime des astreintes. Nous
revenons à l'application de la législation, qui bénéficiait d'ailleurs du
soutien de ceux qui sont aujourd'hui tout à coup si critiques sur les
astreintes !
(Protestations sur les travées socialistes et sur celles du
groupe communiste républicain et citoyen.)
Comme je l'ai indiqué à plusieurs reprises, il faut que les choses soient
claires. L'amendement qui a été adopté par l'Assemblée nationale - c'est la
raison pour laquelle le Gouvernement l'a soutenu - reprend mot pour mot une
circulaire de Mme Aubry. Mais des problèmes d'interprétation juridique se
posaient.
M. Guy Fischer.
Nous ne l'avons jamais vue !
M. François Fillon,
ministre.
Je vais même vous la lire !
Mme Michelle Demessine.
Cela ne résoudra pas le problème !
M. François Fillon,
ministre.
« Le salarié placé en position d'astreinte »...
Mme Michelle Demessine.
Ce n'est la question !
M. François Fillon
ministre.
Depuis quand êtes-vous spécialiste du droit du travail ?
(Protestations sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen
ainsi que sur les travées socialistes.)
Madame, je n'ai pas l'impression que vous aviez participé à nos débats. Je
suis très intéressé par ce que vous allez nous dire, mais j'aimerais bien que
vous m'écoutiez d'abord !
Cette circulaire du 3 mars 2000 précise que « le salarié placé en position
d'astreinte sans réaliser d'intervention ne se trouve pas placé dans une
position permettant d'analyser le temps de l'astreinte comme un temps de
travail effectif. Il en résulte que la position d'astreinte sans intervention
durant une période de repos ne constitue pas en tant que telle une infraction
aux règles relatives au repos quotidien ou au repos hebdomadaire. Il convient
cependant de souligner que cette situation ne doit pas conduire à ce qu'un même
salarié soit systématiquement placé en situation d'astreinte durant les
périodes de repos quotidien ou hebdomadaire. Si le développement de telles
pratiques venait à être constaté, il appartiendra aux services de le signaler
aux services de l'administration centrale. »
Cela signifie que nous ne sommes pas en train de modifier le régime des
astreintes. Ce ne sont pas des temps de repos. D'ailleurs, comme vous l'avez
vous-même reconnu, elles donnent droit à un certain nombre de contreparties,
financières ou sous forme de repos, qui sont fixées par des conventions.
La seule chose que nous voulons obtenir avec cet amendement, c'est une
clarification de l'application des textes précédents. Nous voulons, notamment,
qu'une astreinte qui n'a pas fait l'objet d'intervention n'affecte pas - c'est
le seul objet de cet amendement - le décompte des temps de repos fixés par les
articles L. 220 et L. 221-4 du code du travail.
J'ajoute que - comme il est indiqué dans la circulaire que je viens de lire -
en cas abus, par l'employeur, dans les conditions de l'astreinte, il peut y
avoir requalification, par l'inspection du travail, du temps d'astreinte en
temps de travail. Pour toutes ces raisons, je souhaite, évidemment, le rejet
des amendements n°s 61 et 100.
S'agissant de l'amendement n° 123, il me paraît préférable - monsieur Gournac,
comme le demandait M. le rapporteur sur un autre sujet - de laisser aux
partenaires sociaux qui mettent en place des périodes d'astreintes dans des
conditions définies à l'article L. 212-4
bis
du code du travail d'en
fixer les modes d'organisation, notamment la durée et le nombre, ainsi que les
contreparties en repos et en rémunération. Je ne suis donc pas favorable à cet
amendement qui limite la période d'astreinte à sept jours consécutifs.
Le Gouvernement n'est pas non plus favorable à l'amendement n° 34, parce que
le principe même des compensations financières ou sous forme de repos est déjà
fixé par la loi. Les modalités de mise en oeuvre des astreintes font l'objet de
négociations collectives ou d'une décision de l'employeur après consultation
des institutions représentatives du personnel. Encadrer par la voie d'un décret
le recours aux astreintes ne me semble pas utile.
Par ailleurs, ce projet de loi n'a pas vocation à s'appliquer aux agents de la
fonction publique, qui restent soumis au statut de la fonction publique pour
les dispositions concernant leurs conditions de travail.
M. le président.
La parole est à M. Gilbert Chabroux pour explication de vote sur les
amendements identiques n°s 61 et 100.
M. Gilbert Chabroux.
Monsieur le ministre, j'ai l'impression que nous ne parlons pas de la même
chose !
M. François Fillon
ministre.
C'est sûr !
M. Gilbert Chabroux.
Nous avons de la peine à comprendre ce dont vous parlez, compte tenu de ce qui
s'est passé à l'Assemblée nationale. C'est un amendement de M. Hervé Morin qui
est à l'origine de l'article 2
bis
dont je vous donne lecture : «
Exception faite de la durée d'intervention, la période d'astreinte est
décomptée dans les durées minimales visées aux articles L. 220-1 et L. 221-4.
»
Cela signifie - à moins que nous ne comprenions rien - que l'astreinte est
considérée comme du temps de repos, sauf s'il y a intervention. Je voudrais que
toute la lumière soit faite sur ce point, en prenant en compte l'intérêt des
salariés.
Si le décret reprend, comme vous le dites, la circulaire de Mme Aubry,
permettez que l'on supprime l'article 2
bis,
et ne changez pas la
circulaire, qui règle le problème dans le sens que vous souhaitez. De plus, la
Cour de cassation a tranché en se fondant sur cette circulaire et son jugement
est d'ordre juridique et non politique. Alors ne faites pas de faux procès !
Je demande l'application de la circulaire Aubry, ce qui clarifie les choses et
nous permettra d'aller dans le sens que nous souhaitons, et que nous devrions
tous souhaiter si nous prenons bien en compte l'intérêt des salariés !
M. le président.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer.
Monsieur le ministre, je ne vous comprends pas.
M. François Fillon,
ministre.
C'est bien ce que je regrette !
M. Guy Fischer.
Tout à l'heure, vous avez fait preuve de bon sens. Lorsque M. de Broissia nous
a présenté son amendement n° 137, qui visait à redéfinir le travail de nuit en
abrogeant deux dispositions, amendement qui était une véritable provocation en
termes de régression sociale, vous avez indiqué qu'il n'était pas possible, au
détour d'un tel amendement, de faire perdre aux salariés des avantages
financiers inhérents aux conditions de travail de nuit.
Nous sommes dans la même situation qu'à l'Assemblée nationale le 15 octobre,
lorsque M. Morin, du groupe de de l'UDF, a présenté un amendement visant - et
je partage à cet égard tout à fait l'analyse de mon ami Gilbert Chabroux - à
établir une définition de l'astreinte contraire à celle que la Cour de
cassation a posée dans son jugement du 10 juillet 2002. Nous sommes en octobre
: nous voilà au coeur de l'actualité !
En considérant que les périodes d'astreinte peuvent s'assimiler à du repos en
dehors des temps réels d'intervention, M. Morin a de toute évidence cherché à
atténuer le caractère contraignant de l'astreinte et à octroyer ainsi aux
employeurs des moyens de cumuler les temps de travail normal et l'exercice de
l'astreinte. Ce n'est pas moi qui l'affirme, c'est le secrétaire général de la
CGT de l'industrie électrique et gazière.
(Murmures sur les travées du RPR
et des Républicains et Indépendants.)
M. Philippe Marini.
Je nevvois pas la différence. Vous restez en famille !
M. Guy Fischer.
Je n'ai pas honte de mes amis ! Chacun les siens, d'ailleurs ! Vous, le baron
Seillière, et moi, les gaziers !
(Applaudissements sur les travées du groupe
communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées
socialistes.)
M. Roland Muzeau.
C'est toute la différence !
M. le président.
Continuez, monsieur Fischer. Ne vous laissez pas détourner de votre propos.
M. Guy Fischer.
Les salariés de la branche des industries électriques et gazières ont été
particulièrement sollicités ces dernières années. En 1999, ce fut la « tempête
», véritable catastrophe nationale. Puis ce furent les récentes inondations -
25 morts au total -, qui ont touché les départements du Sud-Est, notamment le
Gard, dont le territoire a été inondé à plus de 85 %.
Actuellement, l'astreinte constitue une véritable contrainte dans la vie
quotidienne, des agents et elle ne peut pas se réduire - contrairement à ce qui
a été dit pour justifier une modification de la loi - à de simples relations à
distance, par le câble notamment. Les agents qui y sont confrontés en ont fait
l'expérience lors des intempéries que je viens de rappeler.
Chacun peut comprendre que le respect du principe de continuité du service
public - assurer l'alimentation en énergie, par exemple - est une exigence très
forte ; par conséquent, il n'est pas concevable que les agents puissent vaquer
à leurs occupations personnelles pendant les périodes d'astreinte. Leur vie
familiale est ainsi particulièrement compliquée, par toutes ces astreintes
contraignantes...
M. Hilaire Flandre.
Seulement lorsqu'ils interviennent !
M. Guy Fischer.
... qui suivent le rythme régulier d'une semaine par mois en moyenne et de
deux semaines pendant les périodes de vacances.
Au demeurant, l'obligation de résider dans une zone géographique précise, qui
soit compatible avec les contraintes de l'astreinte, montre également
l'importance de cette exigence de disponibilité.
Pour conclure, la rédaction de l'article 2
bis
introduit par un
amendement de l'Assemblée nationale ne nous satisfait absolument pas. C'est la
raison pour laquelle nous demandons sa suppression.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste
républicain et citoyen.)
Mme Michelle Demessine.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. Claude Domeizel pour explication de vote.
M. Claude Domeizel.
Je ne reprendrai pas les démonstrations brillantes de MM. Chabroux et Fischer,
mais, ce matin même, en commission, la majorité sénatoriale a été troublée par
cette question et elle s'est interrogée sur cet amendement.
Je ne reviendrai pas sur les arguments qui ont été fournis, mais je
rappellerai que, pour ce qui nous concerne, si nous avons une lecture de ce
texte identique à celle du groupe communiste républicain et citoyen, nous ne
sommes pas les seuls !
Monsieur le ministre, nous avons auditionné plusieurs syndicats la semaine
dernière, et ce n'est pas le fait que ceux-ci aient la même lecture du texte
que nous qui justifie notre opposition. Nous avons, nous, une autre conception
de la concertation et nous avons bien entendu ce qu'ils nous ont dit : tous, en
commission, nous ont démontré que cet amendement devait être supprimé.
J'ai l'impression qu'il y a une incompréhension quant à la portée de cette
mesure. Je demande à nos collègues de la majorité, en particulier, de bien
réfléchir, car cet amendement aura des effets redoutables pour les salariés.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du
groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Godefroy.
Monsieur le ministre, je suis très surpris de votre obstination sur cette
disposition. Depuis le début du débat, vous avez passé votre temps à nous dire
- et cela peut tout à fait se comprendre - qu'il fallait laisser « respirer »
le dialogue social, qu'il ne fallait pas être normatif, qu'il fallait que
chacun puisse discuter et qu'il y ait un échange entre le patronat et les
salariés. C'est le cas actuellement, même si une circulaire n'est pas une
loi.
Or, dans ce texte, du fait que l'astreinte est maintenant considérée comme un
temps de repos, cela signifie qu'on annule l'arrêt de la Cour de cassation et
qu'on libère les entreprises de cet arrêt. En conséquence, les employeurs sont
fondés à considérer qu'en dehors de toute intervention le temps d'astreinte est
un temps de repos, alors que chacun ici s'accorde à reconnaître qu'il
représente quand même une contrainte pour l'employé. Il dépendra donc de la
bonne volonté de l'entrepreneur ou du patron de payer, le cas échéant, le
salarié, voire peut-être de le rémunérer d'une façon peu licite, parce qu'il
s'agira de compensations qui seront négociées en douce.
Je crois véritablement que cette disposition n'est pas satisfaisante et je
m'étonne vraiment que vous vous obstiniez dans cette démarche.
M. le président.
La parole est à M. Eric Doligé pour explication de vote.
M. Eric Doligé.
Tout à l'heure, et je le regrette, le Gouvernement ne nous a pas beaucoup
soutenus dans notre volonté d'assouplir, d'une part, le dispositif relatif au
théâtre vivant, notamment en ce qui concerne le travail de nuit et, d'autre
part, les mesures relatives aux heures supplémentaires pour les entreprises
nouvelles, ce qui aurait permis à celles-ci de « respirer » un peu. Toutefois,
comme l'a souligné M. le ministre, nous aurons l'occasion de revenir sur ces
questions ultérieurement.
En revanche, nous devons apporter un soutien sans faille au Gouvernement sur
cet article.
Mes chers collègues, je comprends que vous noircissiez le tableau, que vous
preniez les exemples les plus excessifs possibles.
M. Claude Domeizel.
Non !
M. Eric Doligé.
Mais vous ne pouvez pas nier la réalité ! Connaissez-vous le poids de
l'astreinte dans le budget d'une maison de retraite ?
M. Gilbert Chabroux.
Ce n'est pas du repos !
M. Jean-François Picheral.
Il y a un minimum !
M. Eric Doligé.
Dans certains cas, l'obligation de payer les heures d'astreinte à des coûts
exorbitants conduit à une augmentation du prix de journée, alors qu'en réalité
les personnels restent chez eux. N'oublions pas que le téléphone portable
permet aux personnes qui sont d'astreinte de demeurer plus loin qu'autrefois de
leur lieu de travail.
Alors, apportons quelque souplesse, et n'essayez pas de nous faire croire que
nous vivons dans une société coercitive ! Des possibilités existent maintenant
en matière d'astreinte dès lors que les personnes concernées ne sont pas
appelées à travailler. Or vous voulez ôter toute souplesse !
Pour une fois qu'un texte de Mme Aubry nous donne satisfaction, il serait
judicieux de faire figurer ce décret dans la loi et de confirmer ainsi ce que
vous avez toujours soutenu.
M. le président.
La parole est à M. Roland Muzeau pour explication de vote.
M. Roland Muzeau.
Monsieur le ministre, vous ne pouvez pas dire que ce débat résulte d'une
incompréhension technique de notre part...
M. François Fillon
ministre.
Si !
M. Roland Muzeau.
... voire d'une « manipulation », vous avez lâché le mot tout à l'heure. S'il
y a manipulation, dites-nous de qui elle émane ! Cela nous permettra, comme on
dit, de ne pas mourir idiots.
Nous nous sommes forgé une opinion en travaillant beaucoup sur le texte, en
consultant l'ensemble des organisations syndicales, en lisant ce qu'elles
éditaient sur le sujet, en interrogeant des juristes spécialisés sur les
questions du droit du travail. Vous ne pouvez pas balayer tout cela d'un revers
de main en laissant entendre que nous agirions au nom de je ne sais quoi ! Ce
texte ne fait l'objet d'aucun malentendu !
L'amendement déposé par l'Assemblée nationale est extrêmement grave et ce ne
sont pas les propos que vient de tenir Eric Doligé qui changeront quoi que ce
soit !
Le téléphone portable ne modifiera pas la situation de millions de personnes
qui, lorsqu'elles sont d'astreinte, ont une responsabilité. Et elles le savent
! Je n'ai pas parlé d'esclavage, mon cher collègue ! Je dis qu'elles ont une
responsabilité, qui figure souvent dans leur contrat de travail et elles
l'assument avec beaucoup de compétence.
M. Guy Fischer a fait allusion tout à l'heure aux agents de la Direction
départementale de l'équipement, la DDE, qui interviennent en cas de coup dur
dans notre pays ; nous en avons connu quelques-uns. On parle des techniciens
qui réparent les ascenseurs, des agents de EDF... Il ne suffit pas, au
lendemain de catastrophes où l'on a apprécié le dévouement de ces salariés, de
les féliciter par un communiqué officiel et, quelques jours après, de laisser
passer un amendement qui les « fusille » sur place !
Il est temps de revenir à l'objet même du débat qui nous occupe depuis
quelques instants - fort heureusement, cette partie de la discussion n'a pas
été bâclée, comme d'autres questions - et de nous poser la question de savoir
s'il y a ou non modification de la notion d'astreinte, avec les conséquences
qui en découlent.
Oui, il y a une modification importante de la notion d'astreinte !
Si vous confirmez en l'état l'amendement de l'Assemblée nationale, vous
pourrez dire ce que vous voulez, vous aurez pris la responsabilité de changer
la vie de millions de salariés et, bien évidemment, de la dégrader.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Très bien !
M. Roland Muzeau.
Vous ne pouvez pas dire le contraire !
(Applaudissements sur les travées du
groupe communiste républicain et sur les travées socialistes.)
M. le président.
On ne pourra pas dire qu'il n'y a pas eu de débat !
La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon
ministre.
Je veux une dernière fois tenter de convaincre l'oppositon
sénatoriale qu'elle a juridiquement tort. Il n'y a pas de modification du
régime des astreintes !
Le texte qui vous est présenté vise simplement à revenir à la loi du 19
janvier 2000, en application de laquelle l'astreinte doit faire l'objet de
contreparties en temps ou en argent : c'est donc bien la preuve que ce n'est
pas du temps de repos ! Il s'agit simplement, comme je l'ai dit tout à l'heure,
de faire en sorte que les astreintes sans interventions ne soient pas
décomptées.
L'argument qui a été utilisé tout à l'heure par le groupe socialiste, selon
lequel, si la circulaire Aubry est une bonne circulaire, il faut la laisser
s'appliquer, laisse à penser que le Gouvernement ignorerait qu'une circulaire
n'a aucun effet législatif.
(Exclamations sur les travées socialistes.)
C'est justement parce que cette circulaire n'a pas d'effet législatif que des
décisions de jurisprudence vont à l'encontre de l'interprétation de la loi.
C'est la raison pour laquelle il est nécessaire, aujourd'hui, de traduire dans
la loi l'esprit de la circulaire de Mme Aubry.
M. Gilbert Chabroux.
Retirez ce texte !
M. Claude Domeizel.
Vous avez le droit de vous tromper, pas de persévérer dans l'erreur !
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About,
président de la commission.
Il faut comprendre l'émotion de l'opposition
sénatoriale, qui s'apparente à une forme de culpabilité. Après tout,
l'opposition avait la possibilité, durant cinq années, de parfaire les
dispositions relatives à l'astreinte. Manifestement, comme le disait tout à
l'heure notre collègue Guy Fischer, elle a dû beaucoup travailler, puisque, au
bout de ces cinq années, elle a enfin une solution à nous proposer !
M. Alain Gournac.
Elle n'a rien fait pour cela !
M. Jean-Pierre Godefroy.
Cela vous est également arrivé !
M. Guy Fischer.
On en reparlera !
M. Nicolas About,
président de la commission.
Je voudrais aller au-delà de ce constat. Je
vous ai écoutés avec une patience angélique et avec admiration, mes chers
collègues, car je me suis dit que vous atteigniez enfin votre but : parvenir à
préciser la notion d'astreinte. Mais le ministre vous a répondu qu'il ne
s'agissait pas véritablement de cela ce soir : il fallait simplement éviter
qu'une astreinte n'ayant pas entraîné un travail ne provoque le déclenchement
du repos légal.
Cela dit, nous avons tous clairement conscience que l'absence d'accords ou de
conventions peut entraîner des abus en matière d'astreinte. Dès lors, je serais
tenté de dire que l'amendement de M. Geoffroy apporte certainement, dans sa
première partie, une réponse. Modifié, il pourrait éventuellement être adopté,
en retenant l'idée qu'à défaut d'accords ou de conventions un décret pourrait
fixer une sorte de minimum en la matière.
Il revient au Gouvernement d'étudier cette possibilité et de nous apporter une
réponse soit ce soir, soit ultérieurement. Pour l'avoir vécu lorsque j'étais un
jeune étudiant en médecine, je peux vous dire que les abus d'astreintes
existent partout. Cela étant, si l'astreinte n'est pas un repos au sens strict
du terme, elle n'est pas non plus une période de travail au sens strict : c'est
une période de disponibilité, de responsabilité - c'est vrai - et de capacité
d'intervention avec efficacité.
Le principe d'une compensation est déjà prévu par la loi « Aubry ». Mais à
nous créer une sorte de correspondance minimale, de temps de travail qui
permettrait, à défaut d'accord ou de convention, de déterminer les limites dans
lesquelles s'exercerait l'obligation de déclencher le repos légal.
Pour éviter tout abus, M. le ministre a indiqué qu'il demanderait aux
partenaires sociaux de travailler sur ce sujet. J'aimerais qu'il nous indique
s'il accepterait l'amendement de M. Geoffroy, modifié.
M. Philippe Marini.
Très bien !
M. Guy Fischer.
Il nous « roule » !
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon,
ministre.
Je ne voudrais pas allonger les débats, mais je souhaite
répondre au président de la commission. A l'évidence, je suis très sensible à
l'argumentation qu'il a développée. J'ai deux propositions à lui soumettre.
Tout d'abord - et cela figure d'ailleurs déjà dans la circulaire « Aubry » -
il faudrait rappeler aux services qui sont chargés du contrôle des entreprises
dans ce domaine qu'ils doivent vérifier qu'il n'y a pas d'abus d'astreinte.
Dans le cas contraire, ces astreintes seraient requalifiées en temps de
travail.
Ensuite, je propose au président de la commission d'engager les partenaires
sociaux à négocier sur ce sujet.
Je suis très réservé en ce qui concerne le décret dans la mesure où celui-ci
fixera, naturellement, comme vous le proposiez vous-même, des conditions
minimales en matière d'astreinte. Or vous savez que, très souvent, c'est
précisément sur ces conditions minimales fixées par décret que les négociations
aboutissent. Tel n'est pas l'objectif que nous nous sommes fixé : nous ne
souhaitons pas diminuer la qualité des accords ou des conventions qui ont été
signés, qui encadrent les astreintes et qui permettent, par exemple, de les
rémunérer.
L'argumentation qui a été développée tout au long de cette discussion n'est
pas exacte, car si ces atreintes sont rémunérées, c'est, à l'évidence, qu'elles
ont un statut particulier et qu'elles ne peuvent être assimilées à du temps de
repos.
Le décret risque donc d'aboutir à une moindre protection des salariés, parce
qu'il fixera des normes minimales sur lesquelles, naturellement, les
partenaires sociaux auront tendance à se fonder dans la négociation de leurs
accords. Le fait de leur confier une réflexion sur ce sujet pourrait permettre
d'engager la discussion que souhaite M. le président de la commission.
M. le président.
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 61 et 100.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du
règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Nombre de votants | 313 |
Nombre de suffrages exprimés | 313 |
Majorité absolue des suffrages | 157 |
Pour l'adoption | 113 |
Contre | 200 |
Monsieur Gournac, l'amendement n° 123 est-il maintenu ?
M. Alain Gournac. Monsieur le président, permettez-moi, avant de vous répondre, d'une part, de remercier M. le rapporteur, qui a reconnu qu'il trouvait ma proposition plutôt positive, d'autre part, de dire à M. le ministre combien je regrette qu'une proposition aussi pleine de bon sens, qui n'engage pas et qui n'enferme pas, ne puisse être retenue, d'autant qu'elle correspond au souhait des salariés.
Monsieur le ministre, tous les salariés sont favorables au dispositif que j'ai proposé, tous, quelles que soient leurs convictions syndicales.
Mais je veux respecter la règle, et retire mon amendement en conséquence.
M. le président. L'amendement n° 123 est retiré.
Je suis saisi d'un amendement n° 34 rectifié, présenté par M. Geoffroy et ainsi libellé :
« A. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« II. - Le deuxième alinéa du même article est complété par une phrase ainsi rédigée :
« A défaut de convention ou d'accord collectif, un décret détermine les garanties minimales en matière d'organisation des astreintes et de leur compensation. »
« B. - En conséquence, faire précéder le début de cet article de la mention : "I. -". »
La parole est à M. André Geoffroy.
M. André Geoffroy. Monsieur le ministre, permettez à un nouveau sénateur un trait d'humour : j'ai cru comprendre que nos collègues de l'Assemblée nationale avaient déposé un amendement reprenant une circulaire de Mme Aubry. Je suis personnellement contre la loi Aubry ; donc mon amendement rectifié est parfait. Voilà pour l'humour !
Pour ce qui est de ma rectification, elle se comprend d'elle-même après les propos de M. le président de la commission, que je remercie.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Monsieur le président, la commission n'a pas été consultée sur l'amendement n° 34 ainsi rectifié. Cela étant, je crois savoir que son président en appelle à la sagesse du Sénat. (M. le président de la commission opine.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Malgré mon désir d'être agréable à M. Geoffroy, je ne peux répondre à son invitation. Je souhaite vraiment attirer l'attention du Sénat sur les risques que ferait courir l'adoption de l'amendement n° 34 rectifié. En effet, il conduirait naturellement le Gouvernement à fixer par décret des conditions minimales en matière d'astreinte, et les accords entre les partenaires sociaux ne manqueraient pas d'être fortement influencés par le caractère minimal de ces conditions.
Je préférerais de beaucoup que l'on fasse confiance aux partenaires sociaux, dans les branches, pour fixer, bien entendu dans le cadre de la loi, les conditions de l'astreinte.
Je comprends bien votre souci, monsieur Geoffroy, et celui du président de la commission, qui a souffert dans sa jeunesse d'un régime d'astreinte, semble-t-il, abusif...
M. Nicolas About, président de la commission. J'ai survécu ! (Sourires.)
M. François Fillon, ministre. J'ai peur, cependant, que la solution du décret ne se retourne contre les salariés, contrairement au souhait des auteurs de l'amendement.
M. Eric Doligé. Absolument !
M. Hilaire Flandre. Tout à fait !
M. François Fillon, ministre. C'est la raison pour laquelle je suis défavorable à l'amendement n° 34 même rectifié.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission. J'avais cru pouvoir fléchir le ministre.
M. Alain Gournac. Ce n'est pas facile, ce soir !
M. Nicolas About, président de la commission. Je ne voudrais pas que les efforts conjugués de M. Geoffroy, de la commission et de moi-même aboutissent à une solution minimale, alors qu'il existe déjà de multiples conventions et accords qui profitent aux travailleurs.
Je souhaite que la navette soit l'occasion de trouver une solution satisfaisante et demande en conséquence à M. Geoffroy de retirer son amendement, même rectifié.
M. le président. Monsieur Geoffroy, l'amendement est-il maintenu ?
M. André Geoffroy. Monsieur le président, je comprends et j'approuve M. le président de la commission. Par conséquent, je retire l'amendement n° 34 rectifié.
M. le président. L'amendement n° 34 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'article 2 bis.
(L'article 2 bis est adopté.)
Articles additionnels après l'article 2 bis
M. le président.
L'amendement n° 135, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
« Après l'article 2
bis,
insérer un article additionnel ainsi rédigé
:
« I. - Dans le troisième alinéa de l'article L. 212-4 du code du travail, les
mots : "par le contrat de travail" sont remplacés par les mots : "par
l'employeur après consultation du comité d'entreprise ou, en l'absence de
comité d'entreprise, des délégués du personnel s'il en existe". »
« II. - L'article L. 212-4
bis
du code du travail est complété
in
fine
par un alinéa ainsi rédigé : « Une convention ou un accord collectif
de branche étendu peut déroger aux dispositions des articles L. 220-1, premier
alinéa, L. 221-2, L. 221-4, deuxième alinéa, et L. 225-5. La convention ou
l'accord fixe le nombre maximum de ces dérogations par an et par salarié
concerné ainsi que la contrepartie spécifique à cette dérogation, en repos ou
financière. La convention ou l'accord de branche étendu peut renvoyer à
l'accord d'entreprise la fixation de la contrepartie spécifique. »
La parole est M. Philippe Marini.
M. Philippe Marini.
Un souci de cohérence et de sécurité juridique me conduit à présenter cet
amendement.
Nous avons traité des astreintes ; il convient de traiter symétriquement des
temps d'habillage et de déshabillage.
(Protestations sur les travées du
groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées
socialistes.)
Il y a des contreparties aux astreintes, chers collègues ; il
y en a aux temps d'habillage et de déshabillage.
En ce qui concerne les astreintes, nous avons décidé de renvoyer à la
négociation. Pour ce qui est des temps d'habillage et de déshabillage, c'est le
contrat de travail qui règle les contreparties.
Ayant été favorable aux dispositions qui viennent d'être votées concernant les
astreintes, je souhaiterais - c'est la suggestion que je hasarde dans notre
discussion - que la contrepartie aux temps d'habillage et de déshabillage soit
de même nature.
Il s'agit d'éviter, chers collègues de l'opposition, des applications trop
différenciées et pas toujours justifiées selon les entreprises. On m'a dit tout
à l'heure, à juste titre, que, s'agissant des garanties sociales, il fallait
prendre garde à ne pas créer des situations trop différentes. Or, dans ce
domaine, le régime sera plus homogène pour les astreintes que pour les temps
d'habillage et de déshabillage, ce qui peut être critiqué.
M. Gilbert Chabroux.
Et pour les Folies-Bergère ?
M. Philippe Marini.
Par ailleurs, il s'agit, par cette proposition, que je me hasarde à faire
devant des collègues qui ont une connaissance très précise de ces sujets, de
remédier au fait que la disposition adoptée en première lecture par l'Assemblée
nationale ne règle ni la question de la durée continue du temps de repos
quotidien ou hebdomadaire, ni celle des astreintes sans intervention. Nous
venons d'en débattre longuement. Il semblerait plus opportun de traiter cette
question en termes de dérogation, en renvoyant à la négociation, donc aux
partenaires sociaux.
C'est donc un complément que je présente, par souci de cohérence, à la suite
de l'adoption de l'amendement Morin par l'Assemblée nationale.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Le paragraphe I de cet amendement aborde la question du temps
de travail effectif, notamment du temps d'habillage. La commission n'a pas
souhaité en traiter dans le cadre de ce projet de loi. Au surplus, le
dispositif semble redondant par rapport aux dispositions législatives
actuelles.
La paragraphe II concerne les astreintes. Le dispositif proposé est
intéressant. Il permet d'apporter d'utiles précisions sur le régime des
astreintes en renvoyant largement à la négociation de branche. En cela, il
pourrait constituer une alternative à l'article 2
bis
, voire une
première piste de réflexion. Cependant, en l'état, il prévoit un dispositif qui
est incompatible précisément avec l'article 2
bis
. C'est pourquoi, au
nom de la commission, je demande à notre collègue Philippe Marini de retirer
son amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Le Gouvernement partage l'avis de la commission sur ce
sujet.
En effet, dans la situation actuelle, les temps d'habillage sont prévus par
des conventions ou, à défaut, par le contrat de travail. Extraire les
contreparties liées aux temps d'habillage du contrat de travail constituerait
une évolution qui n'est pas souhaitée par le Gouvernement. Le dispositif
proposé ne me paraît pas trouver sa place dans le présent projet de loi ni
répondre à l'esprit qui a présidé à sa rédaction.
Quant au second point, relatif à l'astreinte, nous nous en sommes suffisamment
expliqués lors du débat qui vient d'avoir lieu.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement souhaite aussi que M. Marini
retire son amendement.
M. le président.
L'amendement est-il maintenu, monsieur Marini ?
M. Philippe Marini.
Etant très peu spécialiste de la législation du travail, et compte tenu des
remarques qui m'ont été faites notamment par M. le rapporteur, que j'ai entendu
avec plaisir, je retire cet amendement : ainsi, je ne complique pas le débat
!
M. le président.
L'amendement n° 135 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements présentés par M. Muzeau, Mme Demessine, M.
Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 101 est ainsi libellé :
« Après l'article 2
bis,
insérer un article additionnel ainsi rédigé
:
« Le premier alinéa de l'article L. 220-1 du code du travail est complété par
une phrase ainsi rédigée : "Ce repos est exclusif de tout travail, notamment
qu'il s'agisse de travail effectif au sens du premier alinéa de l'article L.
212-4 ou de l'obligation prévue à l'article L. 212-4
bis
consistant pour
le salarié de demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure
d'intervenir pour effectuer un travail au service de l'entreprise". »
L'amendement n° 102 est ainsi libellé :
« Après l'article 2
bis,
insérer un article additionnel ainsi rédigé
:
« Le premier alinéa de l'article L. 221-4 du code du travail est complété par
une phrase ainsi rédigée : "Ce repos est exclusif de tout travail, notamment
qu'il s'agisse de travail effectif au sens du premier alinéa de l'article L.
212-4 ou de l'obligation prévue à l'article L. 212-4
bis
consistant pour
le salarié de demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure
d'intervenir pour effectuer un travail au service de l'entreprise". »
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau.
Les articles L. 220-1 et L. 221-4 du code du travail déterminent les durées
minimales, l'un du repos quotidien - onze heures consécutives -, l'autre du
repos hebdomadaire - vingt-quatre heures - dont doit bénéficier tout salarié.
Pour autant, aucune définition précise du repos n'est donnée.
Cela étant dit, il ne fait aucun doute qu'au sens de ces articles le repos
s'entend de toute période pendant laquelle le salarié n'effectue aucun travail
et ne peut recevoir aucune directive de son employeur.
La directive européenne 93/104, déjà souvent évoquée - mais je n'en invite pas
moins ceux qui ne l'ont pas encore fait à la lire -, définit quant à elle la
période de repos comme « n'étant pas du temps de travail ». Quelle que soit la
généralité de cette formulation, il ne fait guère de doute qu'une période
d'astreinte qui exige une disponibilité immédiate ne saurait être décomptée
comme du temps de repos.
Pour lever toute incertitude préjudiciable aux salariés découlant de l'absence
dans le code de définition du temps de repos, nous proposons, par ces deux
amendements, de remédier à cette lacune.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Ces deux amendements sont incompatibles avec les dispositions
de l'article 2
bis.
En conséquence, la commission y est défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Même avis, monsieur le président.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 101.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 102.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 2 ter
M. le président.
« Art. 2
ter
. - A l'article 26 de la loi du 13 décembre 1926 portant
code du travail maritime, les mots : "des I, II" sont remplacés par les mots :
"du I" et les mots : "du III" sont remplacés par les mots : "du II". »
L'amendement n° 62, présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
La parole est à M. Gilbert Chabroux.
M. Gilbert Chabroux.
C'est un amendement de cohérence visant à la suppression de l'article 2
ter.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Défavorable par cohérence, monsieur le président.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Même avis.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 62.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 2
ter.
(L'article 2
ter
est adopté.)
Article 3
M. le président.
« Art. 3. - Le V de l'article 5 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000
précitée est complété par un 2° ainsi rédigé :
« 2° Dans l'attente de l'accord de branche étendu mentionné au I de l'article
L. 212-5 du code du travail ou au I de l'article L. 713-6 du code rural, le
taux de majoration des quatre premières heures supplémentaires applicables aux
entreprises de vingt salariés au plus reste fixé à 10 % au plus tard jusqu'au
31 décembre 2005. »
Je suis saisi de six amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 63 est présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée.
L'amendement n° 103 est présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° 7, présenté par M. Souvet, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« Au début du texte proposé par cet article pour compléter le V de l'article 5
de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000, après les mots : "l'attente de",
insérer les mots : "la convention ou de". »
L'amendement n° 122, présenté par M. Gournac, est ainsi libellé :
« Compléter le texte proposé par cet article pour le 2 du V de l'article 5 de
la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 par un alinéa ainsi rédigé :
« Les voyageurs, représentants ou placiers relevant des articles L. 751-1 et
suivants du titre V du livre VII du code du travail ne sont pas pris en compte
pour la détermination de l'effectif de vingt salariés visé ci-dessus. »
L'amendement n° 121, présenté par M. Gournac, est ainsi libellé :
« A. - Compléter,
in fine
, cet article par un paragraphe ainsi rédigé
:
« ... - Le VIII du même article est ainsi rédigé :
« VIII. - Pour les entreprises pour lesquelles la durée légale du travail est
de 35 heures à compter du 1er janvier 2002, le seuil défini au troisième alinéa
de l'article L. 212-6 du code du travail est fixé à 37 heures en 2002, et à 36
heures en 2003 et 2004.
« B. - En conséquence, faire précéder le début de cet article par la mention :
"I. - ". »
L'amendement n° 24, présenté par M. Joly, est ainsi libellé :
« I. Compléter
in fine
cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« I...Dans la troisième phrase du VIII dudit article, les mots :
"respectivement en 2002 et en 2003" sont remplacés par les mots :
"respectivement en 2002, 2003, 2004 et en 2005". »
« II. - En conséquence, faire précéder le début de cet article de la mention :
". - " .»
La parole est à M. Gilbert Chabroux pour défendre l'amendement n° 63.
M. Gilbert Chabroux.
Il s'agit aussi d'un amendement de suppression.
L'article 3 prévoit de prolonger la durée d'application des dispositions
spécifiques aux entreprises de vingt salariés au plus jusqu'au 31 décembre
2005.
La loi du 19 janvier 2000 a prévu une période d'adaptation d'un an pour les
petites entreprises. Ce délai est vite apparu insuffisant. C'est pourquoi, sans
remanier le texte de loi, le gouvernement précédent a décidé, par décret du 15
octobre 2001 et par circulaire du 17 octobre 2001, de mettre en place un
dispositif d'accompagnement renforcé en direction de ces entreprises.
Pour l'essentiel, ce dispositif a consisté à fixer un contingent transitoire
de 180 heures supplémentaires, majorées de 10 % en 2002, et à renforcer l'appui
conseil aux entreprises.
L'article 3 du projet de loi que nous examinons prévoit une prolongation de la
majoration des heures supplémentaires de 10 % jusqu'au 31 décembre 2005 pour
les entreprise de vingt salariés ou plus. Ce faisant, il crée une inégalité
durable entre les salariés selon la taille de leur entreprise, mais aussi entre
les entreprises, qui n'auront pas la même attractivité pour les salariés.
Cela risque de poser problème dans les secteurs artisanaux où sont déjà
apparues des difficultés de recrutement en raison des horaires démentiels
imposés par les employeurs. Cet effet pervers du texte est d'ailleurs souligné
par les représentants de l'Union professionnelle artisanale, l'UPA, et de la
Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment, la CAPEB,
dans leurs publications professionnelles.
C'est une forme de distorsion de concurrence, puisque ces entreprises risquent
de voir leur échapper certains marchés ou de ne pas parvenir à assurer des
commandes en raison d'une pénurie aggravée de personnel.
Nous demandons donc la suppression de l'article 3.
M. le président.
La parole est à M. Guy Fischer pour présenter l'amendement n° 103.
M. Guy Fischer.
Nous sommes opposés au maintien jusqu'au 31 décembre 2005 du taux transitoire
de majoration des heures supplémentaires de 10 % pour les entreprises de vingt
salariés et moins. Il existe deux raisons à cela : la perte nette de pouvoir
d'achat pour ceux qui font des heures supplémentaires dans les PME, d'une part,
et l'accentuation des différences de traitement entre salariés de petites
structures et salariés de grandes entreprises, d'autre part.
M. le Premier ministre a lui-même expliqué que c'était un moyen pour les PME
de ne pas passer aux 35 heures. Je l'ai dit hier, c'est une façon d'enterrer
les 35 heures, puisque la majoration de 10 % des quatre premières heures
supplémentaires conduit en définitive à revenir aux 39 heures, et la
combinaison des dispositions de l'article 3 avec celles de l'article 6, qui
vise à déconnecter les allégements de cotisations des négociations sur la
réduction du temps de travail, le confirme.
Ces dispositions révèlent aussi qu'il ne s'agit pas de prolonger la période
d'adaptation, puisqu'il n'y a plus d'incitation à la réduction du temps de
travail, mais bel et bien d'institutionnaliser un système dérogatoire en
matière de rémunération des heures supplémentaires.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour présenter l'amendement n° 7.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
C'est un amendement de coordination.
M. le président.
Les amendements n°s 122 et 121 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Bernard Joly pour présenter l'amendement n° 24.
M. Bernard Joly.
Cet amendement a pour objet de maintenir la capacité productive des
entreprises de vingt salariés et moins. Celles-ci bénéficient d'une période
transitoire de deux ans pour appliquer strictement la durée légale de 35 heures
hebdomadaires : les heures supplémentaires ne s'imputent sur le contingent
qu'au-delà de 37 heures par semaine en 2002 et, en 2003, qu'au-delà de 36
heures par semaine.
Cette période transitoire est trop courte pour ces entreprises. Elle devrait
être prolongée de deux ans, comme cela est d'ores et déjà prévu par le projet
de loi pour ce qui concerne la majoration de 10 % des quatre premières heures
supplémentaires.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
La commission a émis un avis défavorable sur les amendements
identiques n°s 63 et 103.
S'agissant de l'amendement n° 24, le projet de loi prévoit une prolongation de
la période de transition pour la majoration des heures supplémentaires.
L'amendement proposé tend à maintenir le seuil de déclenchement du contingent
d'heures supplémentaires à 37 heures en 2003 et en 2004, à 36 heures en 2005.
La commission craint que ce seuil ne soit un peu trop élevé et elle demande
donc le retrait de l'amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Le Gouvernement n'est pas favorable aux amendements identiques
n°s 63 et 103.
Il souhaite, en effet, que la période transitoire ménagée pour les entreprises
de moins de vingt salariés soit prolongée.
J'attire l'attention du Sénat, en particulier celle des auteurs de ces
amendements, sur deux points.
Premièrement, cette mesure ne s'applique, évidemment, qu'en l'absence
d'accords de branche étendus ; les partenaires sociaux ont donc la possibilité
de conclure des accords plus favorables avant le 31 décembre 2005.
Deuxièmement, rien n'empêche les responsables des petites et moyennes
entreprises éventuellement menacées par une pénurie de personnel de rémunérer
les heures supplémentaires à un taux plus élevé que celui qui est fixé par le
présent texte.
M. Guy Fischer.
C'est bien sûr ce qu'ils vont faire !
M. François Fillon,
ministre.
Si, dans quelques mois ou dans quelques années, l'évolution du
marché du travail rendait le recrutement difficile pour des petites
entreprises, elles seraient naturellement conduites à mettre en oeuvre des
conditions de rémunération et d'organisation du travail plus favorables. Le
projet de loi n'empêche évidemment pas les chefs d'entreprise de pratiquer des
conditions plus avantageuses que les conditions légales !
Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 7.
Il n'est en revanche pas favorable à l'amendement n° 24 parce qu'il considère
que les dérogations dont la durée d'application est prolongée de trois ans qui
sont accordées aux entreprises de moins de vingt salariés sont déjà très
importantes. De plus, le contingent d'heures supplémentaires ne leur sera
intégralement imputé qu'à compter du 1er janvier 2004, ce qui leur donne en
réalité la possibilité d'obtenir une franchise de deux heures hebdomadaires
pour l'année 2002 et d'une heure pour l'année 2003.
Il est bien entendu nécessaire de tenir compte des spécificités des petites et
moyennes entreprises et de la difficulté qu'elles rencontrent à mettre en
oeuvre la réduction du temps de travail, mais il ne faut pas non plus creuser
entre elles et les grandes entreprises un écart qui rendrait ensuite
particulièrement difficile leur rapprochement.
M. le président.
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 63 et 103.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 7.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Monsieur Joly, l'amendement n° 24 est-il maintenu ?
M. Bernard Joly.
Cet amendement vise à faciliter la vie des petites et moyennes entreprises,
dont le taux de « mortalité » est très élevé. Cependant, j'accepte, après les
explications de la commission et du Gouvernement, de le retirer.
M. le président.
L'amendement n° 24 est retiré.
Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)
M. le président.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les
reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une
heures trente, sous la présidence de M. Adrien Gouteyron.)
PRÉSIDENCE DE M. ADRIEN GOUTEYRON
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
3
MODIFICATION DE L'ORDRE DU JOUR
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu de M. le secrétaire d'Etat aux relations avec
le Parlement une lettre en date de ce jour par laquelle le Gouvernement demande
que la suite éventuelle de la discussion du projet de loi relatif aux salaires,
au temps de travail et au développement de l'emploi soit inscrite à l'ordre du
jour de la séance de demain, jeudi 24 octobre, le soir, après l'ordre du jour
réservé.
Il n'y a pas d'opposition ?...
Il en est ainsi décidé.
L'ordre du jour de la séance de demain est modifié en conséquence.
4
SALAIRES, TEMPS DE TRAVAIL
ET DÉVELOPPEMENT DE L'EMPLOI
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président.
Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée
nationale, relatif aux salaires, au temps de travail et au développement de
l'emploi.
Dans la suite de la discussion des articles, nous en sommes parvenus à
l'amendement n° 25, tendant à insérer un article additionnel après l'article
3.
Article additionnel après l'article 3
M. le président.
L'amendement n° 25, présenté par M. Joly, est ainsi libellé :
« Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Au dernier alinéa de l'article L. 212-4-2 du code du travail :
« 1° Après les mots : "durée légale du travail" sont insérés les mots : ",
soit 1 600 heures,".
« 2° Les mots : ", diminuée des heures correspondant aux jours de congés
légaux et aux jours fériés mentionnés à l'article L. 222-1" sont supprimés.
»
La parole est à M. Bernard Joly.
M. Bernard Joly.
Il s'agit d'un amendement de cohérence.
Le projet de loi modifie la définition de la durée annuelle du travail
équivalente à la durée légale hebdomadaire prévue aux articles L. 212-8 et L.
212-9, II, du code du travail, en fixant cette durée annuelle à 1 600 heures.
L'article L. 212-4-2 du code du travail fait également référence à cette notion
de durée légale annuelle. Dès lors que les articles L. 212-8 et L. 212-9 du
code du travail sont modifiés, la référence à la durée annuelle retenue à
l'article L. 212-4-2 du même code doit également être modifiée en
conséquence.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
La commission s'en remet à la sagesse de la Haute
Assemblée.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Le Gouvernement est favorable à cet amendement de cohérence,
qui permet d'améliorer la rédaction du texte.
M. Guy Fischer.
Cela commence bien !
(Sourires.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 25.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 3.
Articles additionnels après l'article 3 ou après l'article 5
M. le président.
Je suis saisi de six amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 140 rectifié, présenté par MM. Lorrain et Arnaud, est ainsi
libellé :
« Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article L. 212-4-3 du code du travail est ainsi rédigé :
«
Art. L. 212-4-3.
- Le contrat de travail des salariés à temps partiel
est un contrat écrit.
« Il mentionne la qualification du salarié et les éléments de la rémunération.
Par dérogation aux dispositions des articles L. 143-2 et L. 144-2, le contrat
de travail peut prévoir que la rémunération versée mensuellement au salarié est
indépendante de l'horaire réel et est calculée dans les conditions prévues par
le contrat.
« Le contrat de travail mentionne la durée du travail hebdomadaire ou, le cas
échéant, mensuelle ou annuelle et, sauf pour les salariés des associations
d'aide à domicile, la répartition des horaires de travail.
« Si le contrat de travail comporte un horaire hebdomadaire, il mentionne la
répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine.
« Si le contrat de travail comporte un horaire mensuel, il mentionne les
semaines du mois au cours desquelles le salarié travaille et la répartition de
la durée du travail à l'intérieur de ces semaines.
« Si le contrat de travail comporte un horaire annuel, il mentionne les
périodes de travail ainsi que la répartition des heures au cours des mois et
des semaines travaillés.
« Dans les cas exceptionnels où la nature de l'activité ne permet pas de
préciser, dans le contrat de travail, les périodes travaillées au cours de
l'année et la répartition des horaires de travail, ce contrat de travail fixera
les périodes à l'intérieur desquelles le salarié sera susceptible de
travailler. Le salarié sera informé de sa date effective de travail au moins
sept jours calendaires avant celle-ci. Le salarié peut refuser deux fois les
dates proposées par l'employeur si le volume de travail demandé entre dans le
cadre de l'horaire contractuel annuel. Il peut les refuser quatre fois si le
volume de travail demandé entre dans le cadre des heures complémentaires.
« Le contrat de travail peut aussi prévoir, dans le cas où il comporte un
horaire annuel, que la durée hebdomadaire ou mensuelle peut varier dans
certaines limites sur tout ou partie de l'année à condition que, sur un an, la
durée hebdomadaire ou mensuelle n'excède pas la durée moyenne hebdomadaire ou
mensuelle stipulée au contrat.
« Le contrat de travail détermine les modalités selon lesquelles les horaires
de travail de chaque journée travaillée sont communiqués au salarié.
« Le contrat de travail définit, en outre, les conditions de la modification
éventuelle de la durée du travail en précisant les cas dans lesquels le contrat
peut être modifié et la nature de la modification.
« Toute modification doit être notifiée au salarié sept jours au moins avant
la date à laquelle elle doit avoir lieu.
« Un accord d'entreprise ou d'établissement n'ayant pas fait l'objet de
l'opposition prévue à l'article L. 132-26 ou une convention ou un accord
collectif de branche étendu peut faire varier ce délai en deçà de sept jours,
jusqu'à un minimum de trois jours.
« Les horaires de travail des salariés à temps partiel ne peuvent comporter,
au cours d'une même journée, plus d'une interruption ou une interruption
supérieure à deux heures que si un accord d'entreprise ou d'établissement
n'ayant pas fait l'objet de l'opposition prévue à l'article L. 132-26 ou une
convention ou un accord collectif de branche étendu, ou agréé en application de
l'article L. 313-12 du code de l'action sociale et des familles, le prévoit
expressément, soit en définissant les amplitudes horaires pendant lesquelles
les salariés doivent exercer leur activité et leur répartition dans la journée
de travail. A défaut de convention ou d'accord collectif, un décret en Conseil
d'Etat peut prévoir, pour les activités de transport de voyageurs présentant le
caractère de service public, les conditions dans lesquelles des dérogations aux
dispositions du présent alinéa peuvent être autorisées par l'inspection du
travail.
« Le contrat de travail précise par ailleurs les limites dans lesquelles
peuvent être effectuées des heures complémentaires au-delà du volume de la
durée du travail de référence fixée par le contrat. Le nombre d'heures
complémentaires effectuées par un salarié à temps partiel au cours d'une même
semaine, d'un même mois ou d'une même année ne peut être supérieur au dixième
de la durée hebdomadaire, mensuelle ou annuelle du travail prévue dans son
contrat. Un accord d'entreprise ou d'établissement n'ayant pas fait l'objet de
l'opposition prévue à l'article L. 132-26 ou une convention ou un accord
collectif de branche étendu peut porter jusqu'au tiers de la durée stipulée au
contrat la limite dans laquelle peuvent être effectuées des heures
complémentaires. Les heures complémentaires effectuées au-delà du dixième de la
durée du travail hebdomadaire, mensuelle ou annuelle, mentionnée au contrat de
travail, donnent lieu à une majoration de salaire de 25 %.
« Les heures complémentaires ne peuvent avoir pour effet de porter la durée du
travail effectuée par un salarié au niveau de la durée légale du travail ou de
la durée fixée conventionnellement. »
« II. - Les articles L. 212-4-4, L. 212-4-6, L. 212-4-7, L. 212-4-12, L.
212-4-13, L. 212-4-14 et L. 212-4-15 du code du travail sont abrogés. »
L'amendement n° 26, présenté par M. Joly, est ainsi libellé :
« Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - A l'article L. 212-4-3 du code du travail,
« 1° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Le contrat de travail précise par ailleurs les limites dans lesquelles
peuvent être effectuées des heures complémentaires, et notamment le nombre
maximum d'heures complémentaires pouvant être effectuées au-delà de la durée
hebdomadaire ou mensuelle de travail fixée par le contrat, dans la limite du
tiers de cette durée. Le nombre d'heures complémentaires effectuées par un
salarié à temps partiel au cours d'une même semaine ou d'un même mois ne peut
être supérieur au nombre maximum prévu par le contrat conformément aux
présentes dispositions qu'avec l'accord exprès du salarié.
« 2° Le septième alinéa est supprimé. »
« II. - A l'article L. 212-4-4 du code du travail,
« 1° Dans la première phrase du premier alinéa, après les mots : "une
convention ou un accord collectif de branche étendu" sont insérés les mots :
"ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement".
« 2° Dans la deuxième phrase du premier alinéa, après les mots : "La
convention ou l'accord collectif de branche étendu" sont insérés les mots : "ou
la convention ou l'accord d'entreprise ou d'établissement".
« 3° Dans la troisième phrase du premier alinéa, le mot : "tiers" est remplacé
par le mot : "moitié". »
L'amendement n° 108, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Le troisième alinéa de l'article L. 212-4-3 du code du travail est complété
par une phrase ainsi rédigée : "Dans le cas contraire, le contrat est
requalifié." »
L'amendement n° 107, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« La seconde phrase du quatrième alinéa de l'article L. 212-4-3 du code du
travail est complété
in fine
par les mots suivants : "ou si ces heures
ne peuvent être accomplies pour des raisons familiales, de santé, scolaires ou
universitaires". » L'amendement n° 109, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine,
M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est
ainsi libellé :
« Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Après le quatrième alinéa de l'article L. 212-4-3 du code du travail est
inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les heures complémentaires donnent lieu à une majoration de salaire de 25 %
pour les quatre premières et de 50 % pour chacune des heures suivantes. »
L'amendement n° 106, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les
membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Le premier alinéa de l'article L. 212-4-4 du code du travail est supprimé.
»
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain pour présenter l'amendement n° 140
rectifié.
M. Jean-Louis Lorrain.
Le régime du travail à temps partiel a été totalement bouleversé par la loi du
19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail.
Alors qu'il n'existait qu'un seul régime de travail à temps partiel, dont
l'horaire pouvait être décompté à la semaine, au mois ou à l'année, il existe
désormais quatre régimes de travail à temps partiel : le temps partiel dont
l'horaire est décompté à la semaine ou au mois ; le temps partiel dont
l'horaire est apprécié sur l'année ; le temps partiel familial ; un régime de
travail intermittent.
Ces régimes n'obéissent pas aux mêmes règles, mais chacun d'entre eux est
soumis à des règles d'application très complexes qui dissuadent les entreprises
d'y recourir.
Ainsi, le régime du travail à temps partiel dont l'horaire est décompté à la
semaine ou au mois peut être institué directement par le contrat de travail.
Cependant, les mentions devant figurer dans le contrat de travail, notamment
celles qui portent sur la répartition des horaires, sont si contraignantes
qu'il est impossible d'adapter, sans l'accord du salarié, la répartition des
horaires à l'évolution des besoins de l'entreprise.
Quant au régime du travail à temps partiel dont l'horaire est décompté à
l'année, il ne peut être institué que par un accord collectif de branche ou
d'entreprise et les règles de sa gestion sont si contraignantes qu'il présente
rarement un intérêt.
En ce qui concerne le travail à temps partiel pour raisons familiales, il est
possible d'alterner les périodes travaillées et les périodes non travaillées
sur l'année. Néanmoins, pendant les périodes travaillées, le salarié devra
avoir des horaires d'un volume et d'une répartition identiques à ceux de
salariés à temps plein.
S'agissant du régime du travail intermittent, il permet d'alterner les
périodes travaillées et les périodes non travaillées sur l'année, mais
uniquement pour les salariés qui occupent un emploi comportant par nature une
telle alternance.
Compte tenu de la complexité de cette réglementation, un retour à un régime
unique de travail à temps partiel s'impose si l'on ne veut pas voir disparaître
cette forme d'aménagement du temps de travail.
M. le président.
La parole est à M. Bernard Joly pour présenter l'amendement n° 26.
M. Bernard Joly.
La loi reconnaît la possibilité, pour le salarié à temps partiel, d'effectuer
des heures complémentaires au-delà de la durée fixée par son contrat.
Cette faculté répond tant à la nécessité de permettre aux entreprises de faire
face à des surcroîts d'activité qu'au souci de permettre à certains salariés de
travailler plus pour gagner plus.
C'est pourquoi il est impératif de lever les restrictions apportées au recours
à ce mécanisme par la loi du 19 janvier 2000, en augmentant le volume d'heures
complémentaires susceptibles d'être effectuées par les salariés et en ouvrant
la possibilité de fixer ce volume par le biais des accords d'entreprise.
M. le président.
La parole est à Mme Michelle Demessine pour présenter l'amendement n° 108.
Mme Michelle Demessine.
Je défendrai simultanément les amendements n°s 108, 107, 109 et 106, qui ont
tous trait au temps partiel.
Même si le projet de loi ne modifie pas directement les dispositions du code
du travail relatives au temps partiel, le moins que l'on puisse dire, c'est
qu'il n'est pas pour autant neutre vis-à-vis de ce mode de travail
particulièrement précaire.
Vous entendez, monsieur le ministre, inciter au développement du travail à
temps partiel, qui enferme pourtant nombre de salariés dans la pauvreté, dans
la mesure où il concerne bien souvent des personnes peu qualifiées et très
faiblement rémunérées.
En effet, votre texte prévoit de donner un avantage supplémentaire aux
entreprises en rétablissant la possibilité de cumuler l'abattement spécifique
au travail à temps partiel et l'allégement des cotisations sociales patronales
institué à l'article 6. Les amendements, présentés par nos collègues Bernard
Joly et Jean-Louis Lorrain nous montrent d'ailleurs que, au sein de la
majorité, les tentations sont fortes de généraliser le recours au temps
partiel, de préférence annualisé, bien sûr.
Au rebours de ce qui nous est proposé, à savoir, notamment, l'augmentation du
volume des heures complémentaires et la fixation de ce volume par le biais
d'accords, les amendements du groupe communiste républicain et citoyen visent
non pas à lever ce que l'on a appelé des restrictions posées par la loi « Aubry
II », mais à renforcer la protection des salariés travaillant à temps partiel,
et surtout à empêcher la banalisation de ce qui est, aux yeux de la majorité et
du Gouvernement, une fatalité de l'ère moderne.
Je n'aime pas cette expression, mais c'est bien de la « France d'en bas »
qu'il s'agit ici. Le travail à temps partiel concerne, dans la grande majorité
des cas, des femmes, bien souvent à la tête de familles monoparentales et qui
n'ont d'ailleurs pas du tout choisi ce type de contrats. Je vous renvoie à cet
égard à l'enquête de l'INSEE intitulée « Economie et statistiques » de
septembre 2001, qui dresse un portrait éloquent des femmes actives travaillant
à temps partiel, confirmant, s'il en était encore besoin, que le temps partiel
est subi dans plus de 80 % des cas.
Ces femmes actives occupées à temps partiel cumulent tous les facteurs de
précarité : elles ont, davantage que d'autres salariés, connu le chômage depuis
la fin de leurs études ; elles sont nettement plus nombreuses à travailler sous
CDD ; leur salaire moyen est inférieur de 25 % à celui des femmes actives
travaillant à temps plein.
Que proposez-vous à ces salariées qui, pour la majorité d'entre elles,
subissent le travail à temps partiel et souhaitent par conséquent travailler
plus et gagner plus ? Rien, si ce n'est d'aller plus loin encore dans la
déréglementation !
Pour notre part, nous envisageons de permettre aux salariés qui ont des
emplois à temps partiel « long », en raison d'un très grand nombre d'heures
complémentaires, de voir requalifier, s'ils le souhaitent, leur contrat en
contrat à temps plein.
Nous souhaitons également protéger le salarié ou la salariée à temps partiel
en lui permettant de refuser les heures complémentaires proposées lorsque
celles-ci sont incompatibles avec ses obligations familiales. Nous prévoyons
notamment de supprimer la possibilité de déroger par convention à l'obligation
de notifier dans un délai de sept jours une modification de la durée du
travail.
Enfin, nous proposons de rémunérer à leur juste valeur les heures
complémentaires.
Tels sont les objets des amendements que nous soumettons au Sénat.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Je voudrais tout d'abord soulever un point d'ordre : ces six
amendements ont trait au travail à temps partiel, or la commission, qui a
étudié le projet de loi qui nous est soumis, et uniquement ce texte, n'a
souhaité ni assouplir ni durcir le régime du travail à temps partiel.
Elle ne peut donc que demander à nos collègues de bien vouloir retirer leurs
amendements ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
La majorité s'est engagée, notamment à l'occasion des élections
présidentielle et législatives, à ne pas mettre en oeuvre de réformes dont les
répercussions sociales seraient importantes sans une concertation préalable
avec les partenaires sociaux.
Nous avons engagé une telle concertation à propos de l'assouplissement du
dispositif des 35 heures, mais nous ne l'avons pas fait, évidemment, s'agissant
de la réforme du travail à temps partiel. Or il s'agit d'une question très
importante, qui suscite des interrogations dont on s'est fait l'écho sur les
différentes travées de cet hémicycle. En effet, le travail à temps partiel est
un facteur de souplesse, une forme d'activité qui correspond à un certain
nombre de besoins modernes.
Il est toutefois vrai que beaucoup de salariés ne sont pas du tout satisfaits
de la situation qui leur est faite par le biais du travail à temps partiel. Je
crois donc qu'il convient d'ouvrir un autre débat, d'abord avec les partenaires
sociaux, puis avec le Parlement, sur la modernisation et l'amélioration du
régime du travail à temps partiel, mais non pas de le faire à l'occasion de
l'examen de ce texte, sans que la moindre concertation avec les partenaires
sociaux ait été organisée sur un sujet extrêmement sensible à la fois pour les
entreprises et pour les organisations syndicales.
C'est la raison pour laquelle je ne crois pas étonner le Sénat en indiquant
que le Gouvernement ne souhaite pas que l'on s'engage dans un tel débat et que
ces amendements soient adoptés.
M. le président.
L'amendement n° 140 rectifié est-il maintenu, monsieur Lorrain ?
M. Jean-Louis Lorrain.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 140 rectifié est retiré.
Monsieur Joly, l'amendement n° 26 est-il maintenu ?
M. Bernard Joly.
Non, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 26 est retiré.
Madame Demessine, les amendements n°s 108, 107, 109 et 106 sont-ils maintenus
?
Mme Michelle Demessine.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 108.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 107.
(L'amendement n'est pas adopté).
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 109.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 106.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 4
M. le président.
« Art. 4. - Le code rural est ainsi modifié :
« I. - A l'article L. 713-6 :
« 1° Les I et II sont remplacés par un I ainsi rédigé :
«
I.
- Les heures supplémentaires donnent lieu à une majoration de
salaire dont le taux est fixé par un accord de branche étendu. Ce taux ne peut
être inférieur à 10 %. A défaut d'accord, chacune des huit premières heures
supplémentaires donne lieu à une majoration de 25 % et les heures suivantes à
une majoration de 50 %. » ;
« 2° Le III devient le II.
« II. - Au premier alinéa de l'article L. 713-7, les mots : "au II" sont
remplacés par les mots : "au I". »
« III. - A l'article L. 713-9 :
« 1° Au deuxième alinéa, les mots : "de plus de dix salariés" sont remplacés
par les mots : "de plus de vingt salariés" ;
« 2° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :
« Dans les établissements entrant dans le champ d'application du 6° de
l'article L. 722-20 qui n'ont pas une activité de production agricole, les
heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent conventionnel fixé
selon les modalités prévues au deuxième alinéa de l'article L. 713-11 lorsqu'il
existe, ou, à défaut, du contingent fixé par le décret prévu au premier alinéa
de l'article L. 713-11, ouvrent droit à un repos compensateur obligatoire dont
la durée est égale à 50 % de ces heures supplémentaires, pour les entreprises
de vingt salariés au plus, et à 100 % pour les entreprises de plus de vingt
salariés. »
« IV. - A l'article L. 713-14 :
« 1° Après les mots : "n'excède pas", la fin de la première phrase est ainsi
rédigée : "un plafond de 1 600 heures" ;
« 2° La deuxième phrase est ainsi rédigée :
« La convention ou l'accord peut fixer un plafond inférieur. »
« V. - Au troisième alinéa de l'article L. 713-15 :
« 1° Les mots : "la durée moyenne annuelle calculée sur la base de la durée
légale, selon la règle définie au premier alinéa et, en tout état de cause, de"
sont supprimés ;
« 2° L'alinéa est complété par les mots : "ou d'un plafond inférieur fixé par
la convention ou l'accord". »
Je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 64 est présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée.
L'amendement n° 104 est présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° 143, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Avant le I de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Le premier alinéa du III de l'article L. 713-5 est complété
in
fine
par une phrase ainsi rédigée : "Exception faite de la durée
d'intervention, la période d'astreinte est décomptée dans les durées minimales
visées au I de l'article L. 714-1 et aux articles L. 714-2 et L. 714-5". »
L'amendement n° 8, présenté par M. Souvet, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« I. - Dans la première phrase du texte proposé par le 1° de cet article pour
le I de l'article L. 713-6 du code rural, après les mots : "dont le taux est
fixé par", insérer les mots : "une convention ou". »
« II. - En conséquence, dans la dernière phrase du même texte, après les mots
: "A défaut", insérer les mots : "de convention ou". »
L'amendement n° 142, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Compléter
in fine
cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Au premier alinéa de l'article L. 713-18, les mots : "au premier
alinéa du I de l'article L. 713-6" sont supprimés. »
La parole est à M. Gilbert Chabroux pour présenter l'amendement n° 64.
M. Gilbert Chabroux.
Il s'agit d'un amendement de cohérence, par lequel nous demandons la
suppression de l'article 4.
M. le président.
La parole est à M. Muzeau pour présenter l'amendement n° 104.
M. Roland Muzeau.
Lors de l'examen des dispositions de l'article 2 relatives aux règles de
majoration des heures supplémentaires, nous nous sommes largement exprimés
contre les modifications introduites par ce projet de loi.
Par cohérence, nous proposons de supprimer l'article visant à transposer ces
dispositions dans le code rural.
M. le président.
La parole est à M. le ministre pour présenter l'amendement n° 143.
M. François Fillon,
ministre.
Il s'agit ici d'harmoniser les dispositions applicables aux
entreprises et aux exploitations agricoles avec les dispositions du code du
travail. Au cours de ce débat, nous avons modifié un certain nombre de ces
dernières : le Gouvernement souhaite qu'elles puissent s'appliquer au code
rural.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour présenter l'amendement n° 8.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président.
La parole est à M. le ministre pour présenter l'amendement n° 142.
M. François Fillon,
ministre.
C'est la même chose que l'amendement précédent.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
La commission, par coordination, est défavorable aux
amendements identiques n°s 64 et 104.
En revanche, toujours par coordination, elle émet un avis favorable sur les
amendements n°s 143 et 142.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Le Gouvernement est défavorable aux amendements n°s 64 et 104,
qui visent à faire le contraire de ce qu'il souhaite et à exclure le secteur
agricole.
En revanche, il émet un avis favorable sur l'amendement n° 8.
M. le président.
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 64 et 104.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 143.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 8.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 142.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 4, modifié.
(L'article 4 est adopté.)
Article 5
M. le président.
« Art. 5. - Dans les établissements mentionnés à l'article L. 314-6 du code de
l'action sociale et des familles dont les accords collectifs de réduction du
temps de travail ou les décisions unilatérales prises en application de
conventions collectives nationales ou d'accords collectifs nationaux sont
soumis à la procédure d'agrément ministériel, le complément différentiel de
salaire prévu par un accord collectif en vue d'assurer aux salariés la garantie
du maintien de leur rémunération mensuelle en vigueur à la date de la réduction
collective du temps de travail à trente-cinq heures ou en deçà n'est dû qu'à
compter de la date d'entrée en vigueur des accords d'entreprise ou
d'établissement ou des décisions unilatérales relatifs à la réduction
collective du temps de travail. Cette entrée en vigueur est subordonnée à
l'agrément ministériel prévu au même article.
« Ces dispositions s'appliquent sous réserve des décisions de justice passées
en force de chose jugée. Elles ne s'appliquent pas aux instances en cours à la
date du 18 septembre 2002. »
L'amendement n° 105, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau.
Par l'article 5, il s'agit, une fois encore, de contrecarrer les arrêts de la
Cour de cassation du 4 juin 2002, qui ont posé le principe du droit au cumul de
l'indemnité conventionnelle de réduction du temps de travail et du paiement des
heures supplémentaires pour les salariés du secteur médico-social qui auraient
continué à travailler trente-neuf heures par semaine.
Cette décision est certes lourde de répercussions économiques pour les
employeurs de ce secteur, d'autant plus que celui-ci est asphyxié
financièrement du fait de l'opposabilité des enveloppes prédéterminées de
crédits.
Doit-on, pour des raisons d'« intérêt général », comme l'avance M. le
rapporteur, pour des motifs purement financiers, passer outre l'interprétation
de la Cour de cassation ? Nous ne le pensons pas, d'autant que les salariés, à
la suite de cet arrêt et conformément aux instructions d'une circulaire du 5
août 2002, ont engagé une négociation amiable avec les autorités de tutelle. Le
règlement de ce litige se trouve largement compromis.
De plus, la disposition incriminée aggravera les disparités de traitement
entre les salariés, dans la mesure où ceux qui ont choisi la voie juridique
pourront bénéficier du versement. Je dis bien : « pourront », car l'article 5
subordonne ce versement à l'entrée en vigueur de l'accord sur la réduction du
temps de travail, lui-même subordonné à l'agrément ministériel.
Plus discutable encore est le fait que cette interprétation légale
s'appliquera rétroactivement aux instances en cours introduites après le 18
septembre 2002.
Pour toutes ces raisons, nous proposons de supprimer l'article 5.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
La commission a émis un avis défavorable.
L'article 5, que vous voulez supprimer et vous savez que la commission ne se
reconnaît évidemment pas dans les suppressions, vise à rappeler l'obligation de
l'agrément ministériel afin de pouvoir mettre en oeuvre la réduction du temps
de travail dans les établissements médio-sociaux. Il permettra ainsi de
rétablir l'équilibre financier de ces établissements, mis à mal, vous le savez,
par une récente juridiction de la Cour de cassation, qui a adopté une position
inverse.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Le Gouvernement émet un avis défavorable car cet amendement
vise à supprimer une disposition très importante qui a pour objet de préserver
l'économie générale des établissements médico-sociaux - plus de 25 000
structures, plus d'un million de places, plus de 450 000 salariés - et d'éviter
les inégalités de traitement importantes entre les salariés.
L'article 5 prévoit, à cette fin, que le complément différentiel de salaire,
prévu dans les accords collectifs pour maintenir le salaire antérieur, ne
s'appliquera qu'à compter de la date d'agrément de l'accord collectif qui
permet le passage effectif aux 35 heures. L'entrée en vigueur de ces accords
est en effet subordonnée à une procédure spécifique d'agrément ministériel que
justifie l'origine du financement de ces établissements, à savoir un
financement public émanant de la sécurité sociale ou des budgets d'aide sociale
départementale. L'article proposé en rappelle le caractère obligatoire.
Toutefois, il garantit le respect des décisions de justice passées en force de
chose jugée et des instances en cours à la date à laquelle la présente
disposition a été rendue publique, soit le 18 septembre 2002, date de la
présentation du projet de loi en conseil des ministres. Cela ne constitue en
aucune façon une substitution du législateur au juge - comme voudrait le
laisser entendre l'amendement - mais répond à un motif impérieux d'intérêt
général, au sens que donne à cette notion la jurisprudence relative à l'article
6 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés
fondamentales.
M. le président.
La parole est à M. Jean Chérioux contre l'amendement.
M. Jean Chérioux.
Tout à l'heure, M. Roland Muzeau a dit que les établissements seraient touchés
par cette disposition, mais il a invoqué le fait qu'ils ploient déjà sous le
poids des contraintes.
Pour ma part, j'insiste sur ce qu'a dit à l'instant M. le ministre. Des
dizaines de milliers de salariés sont concernés.
En définitive, ce sont le contribuable départemental et le contribuable
national qui paieront. En effet, les établissements fonctionnent grâce aux
moyens financiers qui leur sont donnés à travers des prix de journée ou des
budgets globaux. Souhaitez-vous que, une fois de plus, on crée des impôts pour
faire face cette charge. On a déjà fait assez de mal avec les heures
d'équivalence pour les personnels des foyers. Je connais des établissements qui
ont dû rembourser 300 000 francs aux personnes qui avaient intenté une action
en justice. De surcroît, que se passe-t-il ensuite ? Les départements sont
obligés, au bout de un an ou de deux ans, de renflouer la caisse. Croyez-vous
que ce soit une bonne gestion ? Est-ce sérieux ? Vous faites de la démagogie
!
M. le président.
La parole est à M. Roland Muzeau pour explication de vote.
M. Roland Muzeau.
Monsieur Chérioux, je ne peux vous laisser tenir de tels propos.
M. Jean Chérioux.
C'est pourtant la vérité !
M. Roland Muzeau.
J'ai dit explicitement que nous mesurions bien l'impact financier de cette
mesure pour les établissements, dont vous avez parlé. Je sais, comme vous, que
les conséquences financières de cette disposition sont aujourd'hui
difficilement supportables. Je partage donc votre sentiment. Ces établissements
sont aujourd'hui pris à la gorge parce qu'ils sont obligés de tenir compte de
tout ce que vous avez dit à l'instant, notamment des prix de journée. Vous avez
repris une partie de mon propos,...
M. Jean Chérioux.
Absolument pas !
M. Roland Muzeau.
... mais en le détournant, et je le regrette profondément.
Il est dommage que vous-même, monsieur Chérioux, M. le ministre et M. le
rapporteur n'aient pas répondu à cette question importante : le Parlement
va-t-il prendre l'habitude de légiférer pour contrecarrer les arrêts de la Cour
de cassation ?
La justice s'applique à tout le monde. Nous sommes d'accord, monsieur Chérioux
?
M. Jean Chérioux.
Jusqu'à preuve du contraire, la justice applique la loi !
M. Roland Muzeau.
Monsieur Chérioux, vous prétendez légiférer à tour de bras chaque fois qu'un
arrêt de la Cour de cassation ne vous convient pas parce qu'il est favorable
aux salariés.
M. Jean Chérioux.
Parceque nous sommes de bons gestionnaires.
M. Roland Muzeau.
Non, ce n'est pas une question de bonne gestion ! Sinon, interdisez aux
travailleurs de saisir les tribunaux et la boucle sera bouclée. Il n'est pas
bien d'avoir interprété mon intervention. En effet, cela ne correspond pas à ce
que j'ai dit.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 105.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 5.
(L'article 5 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 5
M. le président.
L'amendement n° 110, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les
membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Le 2° de l'article L. 122-1-1 du code du travail est complété par un alinéa
ainsi rédigé :
« Dans ce cas, le nombre de salariés occupés en contrat de travail à durée
déterminée ou mis à disposition par une entreprise de travail temporaire pour
ce motif ne peut excéder 10 % de l'effectif total de l'entreprise. Le nombre
obtenu est arrondi à l'unité supérieure. En cas de dépassement de ce taux, les
contrats de travail excédentaires et par ordre d'ancienneté dans l'entreprise
sont réputés être conclus pour une durée indéterminée ; pour les salariés mis à
disposition par une entreprise de travail temporaire les contrats sont réputés
être conclus avec l'entreprise utilisatrice. »
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau.
Comment débattre de questions relatives à l'emploi sans aborder la situation
des travailleurs précaires, qui ont besoin - comme l'ensemble des salariés,
d'ailleurs - de plus de garanties et d'un véritable statut ? Je ne pense pas
sortir du sujet, notre ambition étant, monsieur le ministre, de permettre à
l'ensemble des salariés de poursuivre leur travail.
L'amendement que je propose, en limitant à un volant de 10 % de l'effectif
total de l'entreprise le nombre de salariés en CDD ou en intérim, est un moyen
de lutter contre le développement de l'emploi précaire, qui est fortement
utilisé, notamment dans les secteurs de l'automobile, du commerce et des
services.
C'est une question d'équité !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Comme l'a dit M. Muzeau, cet amendement concerne le recours
aux CDD. Il apparaît, à l'évidence, bien trop contraignant, le CDD ayant
vocation à permettre le remplacement des salariés absents ou à faire face à des
hausses imprévues de l'activité. Par définition, le volume du recours aux CDD
ne peut donc être prédéterminé.
Dans ces conditions, la commission a émis un avis défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Le Gouvernement émet, lui aussi, un avis défavorable, d'autant
que fixer un seuil identique pour toutes les entreprises ne va pas forcément
dans le sens souhaité par M. Muzeau. Il est des secteurs où le taux de 10 % de
CDD est tout à fait excessif par rapport à la législation, au taux d'usage de
ces contrats. Cet amendement n'améliorerait pas réellement la situation des
salariés.
M. Eric Doligé.
Ce serait ingérable !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 110.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 136, présenté par M. Adnot, est ainsi libellé :
« Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 7-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions
statutaires relatives à la fonction publique territoriale est complété par un
alinéa ainsi rédigé :
« Les collectivités territoriales peuvent envisager des amendements, tel le
rachat de jours d'aménagement et de réduction du temps de travail ou
l'assouplissement du quota des heures supplémentaires actuellement autorisé.
»
La parole et à M. Philippe Adnot.
M. Philippe Adnot.
Il s'agit de compléter l'article 7 de la loi du 26 janvier 1984.
Quelle est la situation ? Au départ, le gouvernement précédent souhaitait
n'appliquer les 35 heures qu'au secteur privé et avait dit qu'il n'y aurait pas
de création d'emplois ni d'application du dispositif des 35 heures dans la
fonctoin publique. Or, l'an dernier, naturellement, tous les budgets ont
comporté des créations d'emploi.
Aujourd'hui, on va assouplir les règles dans le secteur privé et elles
resteront rigides dans le seul secteur public. Or, nous avons besoin de
souplesse, de réactivité et nous devons pouvoir récompenser les fonctionnaires
qui travaillent beaucoup, et ils sont nombreux. Je suis de ceux qui ne
critiquent pas la fonction publique car, pour en diriger une entité
relativement importante, je mesure son dévouement et sa capacité de travail.
Mais, aujourd'hui, nous ne pouvons pas récompenser ces fonctionnaires.
Cet amendement introduit la souplesse et permet de récompenser ceux qui le
méritent. Je souhaiterais entendre l'avis de la commission et du Gouvernement
sur ce point.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Comme vient de l'expliquer M. Philippe Adnot, cet amendement
concerne l'aménagement du temps de travail dans la fonction publique
territoriale. J'observe qu'il vise à étendre à la fonction publique
territoriale des modalités d'aménagement du temps de travail qui existent dans
la fonction publique de l'Etat et dans la fonction publique hospitalière.
Vous le comprendrez, cette question relève de la conpétence de la commission
des lois. C'est pourquoi, conformément à la mission qui m'a été impartie ce
matin par la commission des affaires sociales, je souhaite entendre l'avis du
Gouvernement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
L'ancien président du conseil régional des Pays de la Loire,
ancien maire de Sablé-sur-Sarthe et ancien président du conseil général de la
Sarthe que je suis
(Sourires.)
- je le précise pour que vous ne
m'accusiez pas toute de suite de recourir à des arguments technocratiques pour
vous répondre - n'ignore rien des difficultés que rencontre la fonction
publique territoriale du fait de la mise en oeuvre de la loi sur la réduction
du temps de travail. Mais, vous en conviendrez, monsieur Adnot, cette question,
qui dépasse de beaucoup le débat que nous avons aujourd'hui, doit être traitée
en premier lieu au regard de l'ensemble des fonctions publiques, car il existe,
dans notre pays, des principes de parité entre la fonction publique de l'Etat
et la fonction publique territoriale.
Il me semble en outre qu'on ne peut pas traiter de la seule question des
heures supplémentaires, qu'il faut aussi aborder le problème des régimes
indemnitaires qui seraient d'ailleurs visés par le dispositif que vous
proposez.
En fait, s'il était adopté par la voie d'un simple amendement, on aboutirait à
un bouleversement de l'architecture générale de la fonction publique
territoriale.
Je pense que ce sujet doit également faire l'objet d'une concertation avec
les organisations syndicales et avec les associations d'élus, qui sont
évidemment concernées au premier chef.
M. Adnot a donc souhaité lancer un débat, il a voulu attirer l'attention du
Gouvernement sur une difficulté, que nous n'ignorons pas d'ailleurs. Je propose
que nous engagions une réflexion sur le sujet, notamment avec le Sénat, qui est
particulièrement concerné.
Aussi, monsieur Adnot, je souhaiterais que, pour l'instant, vous retiriez
votre amendement, qui n'a pas sa place dans ce texte strictement consacré à
l'assouplissement des 35 heures dans le secteur privé, puisque c'est là que
l'urgence économique est la plus prégnante. Bien sûr, ultérieurement, il faudra
prévoir aussi des assouplissements pour le secteur public.
M. Alain Gournac.
Il a bien fait de soulever le problème.
M. le président.
Monsieur Adnot, l'amendement est-il maintenu ?
M. Philippe Adnot.
Monsieur le président, je ne sais rien refuser à M. Fillon, tout le monde le
sait dans cet hémicycle.
(Exclamations amusées sur diverses travées.)
Pour autant, le problème est posé et je souhaiterais qu'il soit résolu
rapidement. M. Sarkozy a bien « racheté » les heures de la police et tout a été
mis en oeuvre extrêmement vite ! Nous demandons, nous aussi, de pouvoir nous
adapter rapidement et récompenser correctement les gens qui le méritent. Cela
dit, je retire mon amendement.
M. le président.
L'amendement n° 136 est retiré.
TITRE III
DISPOSITIONS RELATIVES
AU DÉVELOPPEMENT DE L'EMPLOI
Article 6
M. le président.
« Art. 6. - L'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale est ainsi
rédigé :
«
Art. L. 241-13
. - I. - Les cotisations à la charge de l'employeur au
titre des assurances sociales, des accidents du travail et des maladies
professionnelles et des allocations familiales, qui sont assises sur les gains
et rémunérations tels que définis à l'article L. 242-1, versés au cours d'un
mois civil aux salariés, font l'objet d'une réduction. »
« II. - Cette réduction est appliquée aux gains et rémunérations versés aux
salariés au titre desquels l'employeur est soumis à l'obligation édictée par
l'article L. 351-4 du code du travail et aux salariés mentionnés au 3° de
l'article L. 351-12 du même code, à l'exception des gains et rémunérations
versés par l'organisme mentionné à l'article 2 de la loi n° 90-568 du 2 juillet
1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des
télécommunications et par les particuliers employeurs.
« Cette réduction n'est pas applicable aux gains et rémunérations versés par
les employeurs relevant des dispositions du titre 1er du livre VII du présent
code, à l'exception des employeurs relevant des régimes spéciaux de sécurité
sociale des marins, des mines et des clercs et employés de notaires. »
« III. - Le montant de la réduction est calculé chaque mois civil, pour chaque
salarié. Il est égal au produit de la rémunération mensuelle, telle que définie
à l'article L. 242-1 par un coefficient. Ce coefficient est déterminé par
application d'une formule fixée par décret. Il est fonction de la rémunération
horaire du salarié concerné calculée en divisant la rémunération mensuelle par
le nombre d'heures rémunérées au cours du mois considéré.
« Le décret prévu à l'alinéa précédent précise les modalités de calcul de la
réduction dans le cas des salariés dont la rémunération ne peut être déterminée
selon un nombre d'heures de travail effectuées et dans celui des salariés dont
le contrat de travail est suspendu avec maintien de tout ou partie de la
rémunération.
« Pour les gains et rémunérations versés à compter du 1er juillet 2005, le
coefficient maximal est de 0,26. Il est atteint pour une rémunération horaire
égale au salaire minimum de croissance. Ce coefficient devient nul pour une
rémunération horaire égale au salaire minimum de croissance majoré de 70 %.
Pour les gains et rémunérations versés avant cette date, les dispositions du
présent article s'appliquent sous réserve de celles de l'article 7 de la loi n°
du relative aux salaires, au temps de travail et au
développement de l'emploi. »
« IV. - Dans les professions dans lesquelles le paiement des congés des
salariés et des charges sur les indemnités de congés est mutualisé entre les
employeurs affiliés aux caisses de compensation prévues à l'article L. 223-16
du code du travail, le montant de la réduction déterminée selon les modalités
prévues au III est majoré d'un taux fixé par décret. La réduction prévue au
présent article n'est pas applicable aux cotisations dues au titre de ces
indemnités par lesdites caisses de compensation. »
« V. - Le bénéfice des dispositions du présent article est cumulable :
« 1° Avec l'aide prévue à l'article 3 de la loi n° 98-461 du 13 juin 1998
d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail ou
avec l'exonération prévue à l'article 39 ou à l'article 39-1 de la loi n°
93-1313 du 20 décembre 1993 quinquennale relative au travail, à l'emploi et à
la formation professionnelle. En ce cas, le montant de la réduction visée au II
est minoré d'un montant forfaitaire fixé par décret ;
« 2° Avec la réduction forfaitaire prévue à l'article L. 241-14.
« Le bénéfice des dispositions du présent article ne peut être cumulé, à
l'exception des cas prévus aux 1° et 2° ci-dessus, avec celui d'une autre
exonération totale ou partielle de cotisations patronales ou l'application de
taux spécifiques, d'assiettes ou de montants forfaitaires de cotisations. »
« VI. - L'employeur doit tenir à disposition des organismes de recouvrement
des cotisations un document en vue du contrôle du respect des dispositions du
présent article. Le contenu et la forme de ce document sont précisés par
décret. »
La parole est à M. Guy Fischer sur l'article.
M. Guy Fischer.
Monsieur le ministre, on doit vous reconnaître une qualité
(Aïe, aïe, aïe ! sur les travées du RPR.)
: la volonté tenace que vous
mettez à accentuer la politique d'allégement des charges sociales patronales
!
M. Alain Gournac.
C'est un besoin pour l'économie !
M. Eric Doligé.
C'est bon pour les salariés !
M. Guy Fischer.
Vous affirmez que ces politiques sont utiles en terme d'emplois, ce qui évite
d'avoir à le démontrer !
Ce que je constate, c'est qu'en 2002, alors que nous ne sommes pas encore en
année pleine, la seule compensation de taxe professionnelle sur la part
salariale représente plus de 10 milliards d'euros sur la France entière, soit
près de 4 % de fiscalité en moins pour les entreprises !
Mais où est la contrepartie, c'est-à-dire les emplois correspondants ?
Récemment, le journal
La Tribune
- que personne ne peut soupçonner
d'allégeance aux idées du parti communiste -
(Rires sur les travées du RPR et de l'UREI.)...
M. Eric Doligé.
Il a de bonnes lectures !
M. Guy Fischer.
On travaille et on sait encore lire !
M. le président.
Monsieur Fischer, ne vous laissez pas démonter.
M. Guy Fischer.
Jamais, monsieur le président.
M. Nicolas About,
président de la commission.
Il ne se démonte pas facilement !
M. Guy Fischer.
La Tribune
a donc publié un tableau très parlant assorti d'un
commentaire on ne peut plus explicite : « De plus en plus de milliards sont
consacrés à la baisse des charges patronales ». Cette politique était chiffrée
à 15,6 milliards d'euros pour les seuls allégements liés aux 35 heures et aux
bas salaires, auxquels il faut ajouter 10 milliards d'euros d'exonération de
taxe professionnelle, soit un montant de 25,6 milliards d'euros en 2002, à
comparer au 0,6 milliard d'euros qui existait en 1993.
Et vous voulez rajouter 6 milliards d'euros d'exonération de charges
patronales !
Décidément, il n'y en a que pour les patrons dans ce pays !
Votre décision de déconnecter la baisse des cotisations sociales de
l'application des 35 heures va encore aggraver le caractère régressif de votre
politique.
La loi va généraliser, en les amplifiant, les réductions Juppé sur les bas
salaires accordées aux entreprises n'appliquant pas d'accord de RTT.
M. Alain Gournac.
Qu'est-ce qu'il était bien Juppé !
M. Guy Fischer.
Le groupe communiste s'est toujours prononcé contre les dispositifs
d'allégements systématiques de cotisations sociales, surtout lorsqu'ils ne sont
suivis d'aucune contrainte, ni d'aucune incitation en termes d'emplois, de
formation, de RTT. Au cours des dernières années, nous sommes souvent
intervenus sur ce point.
Les aides instaurées par les lois Aubry avaient au moins pour objectif
d'inciter à la réduction du temps de travail et de permettre, notamment, le
maintien du niveau des rémunérations, la création d'emplois, tout en favorisant
la qualité de la négociation avec la conclusion d'accords majoritaires.
Le nouveau dispositif supprime tout cela.
En fait, avec le dispositif d'harmonisation des SMIC, il constitue un vrai
encouragement à la non-réduction de la durée du travail.
En effet, seules les entreprises restant à 39 heures y trouveront un avantage.
Pour celles qui sont passées aux 35 heures, le nouveau régime est
financièrement moins favorable.
Il est en outre très dangereux pour les salariés passés aux 35 heures car, en
supprimant l'incitation à la RTT, il fragilise les accords déjà conclus.
Les employeurs seront incités, en fait, à remettre en cause les acquis des
accords existants, obtenus grâce aux accords majoritaires. Ils pourront réviser
les accords favorables aux salariés avec simplement la signature d'un syndicat
minoritaire. J'ai fait allusion, tout à l'heure, aux problèmes que posait le
syndicat national des industries pharmaceutiques, le SNIP.
C'est un grave recul sur le plan de la démocratie sociale et de l'ordre public
social, dont l'Etat doit pourtant être le garant !
La possibilité de remettre en cause ou de suspendre les aides en cas de
non-respect des engagements disparaît.
Les nouveaux mécanismes d'aides vont accroître les effets négatifs pour les
salariés : la fixation à 1,7 fois le SMIC du plafond va accentuer l'effet «
trappe à bas salaires » et le calcul horaire de l'aide va encourager la
pratique des heures supplémentaires.
Enfin, si « le temps est à l'humilité et au pragmatisme », comme vous dites,
les hypothèses libérales du type « le coût du travail a un effet négatif sur
l'emploi » relèvent davantage de présupposés idéologiques que de l'humilité et
du pragmatisme dont vous vous prévalez.
Force, en effet, est de constater que les pays les plus compétitifs et dont
les échanges extérieurs sont structurellement excédentaires sont souvent les
pays où le coût du travail est élevé, comme l'Allemagne et le Japon.
Pour justifier les aides supplémentaires que l'Etat accorde aux entreprises,
vous comptez beaucoup sur l'effet « profitabilité », qui aurait une influence
favorable sur l'emploi, selon le schéma : « moins de charges, moins de coût
salarial engendrent plus de profits et plus d'emplois. » Force est de constater
également qu'en Europe, au cours de ces dix dernières années, l'emploi a été
souvent plus dynamique et le chômage plus faible dans les pays à coût du
travail élevé et hausse annuelle des salaires.
M. le président.
Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Guy Fischer.
Je termine, monsieur le président, excusez-moi d'avoir parlé un peu
longuement, mais après, je me tairai, je vous le promets !
(Ah ! sur les
travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
A contrario
, les taux de sous-emploi les plus élevés sont constatés
habituellement dans les pays en développement et à très bas salaires.
Et si l'innovation et le courage consistaient à trouver d'autres systèmes que
ceux qui se fondent sur la baisse des charges sociales patronales ?
Persuadés que d'autres solutions existent pour dynamiser l'emploi, nous
proposerons un mécanisme alternatif aux allégements de cotisations sociales.
M. le président.
Je suis saisi de sept amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 65, présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes Michèle San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté
et rattachée, est ainsi libellé :
« Supprimer l'article 6. »
L'amendement n° 111, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le texte proposé par cet article pour l'article L. 241-13 du
code de la sécurité sociale :
«
Art. L. 241-13.
- Les entreprises dont la durée collective du travail
est fixée au plus, soit à 35 heures hebdomadaires, soit à 1 600 heures sur
l'année et qui augmentent l'emploi en conséquence, bénéficient d'un allègement
de charges selon deux modalités alternatives, au gré de l'accord d'entreprise
pour une période de sept ans :
« - soit d'un allégement de cotisations sociales défini au présent article
;
« - soit un allégement de charges d'intérêt et de remboursement de crédits à
moyen et long terme pour leur investissement, sous forme d'une bonification
modulée en fonction du nombre d'emplois créés et du nombre de salariés mis en
formation à la charge de l'entreprise. Le barème correspondant de bonifications
sera défini par décret.
« Les entreprises remplissant les conditions fixées au présent article
bénéficient de l'allégement de cotisations à la charge de l'employeur au titre
du présent article.
« Les entreprises ou établissements dont la durée du travail excède 35 heures
hebdomadaires ou 1 600 heures sur l'année bénéficient de l'allégement des
cotisations sociales ainsi défini. »
L'amendement n° 66, présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée, est ainsi libellé :
« Au début du premier alinéa du I du texte proposé par cet article pour
l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, ajouter les mots :
« Pour les entreprises qui appliquent un accord collectif fixant la durée du
travail à 35 heures hebdomadaire ou en moyenne sur l'année, s'engageant à créer
ou préserver des emplois à réduire la pénibilité du travail et à augmenter les
bas salaires, et conclu dans les conditions prévues par la loi n° 2000-37 du 19
janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail ; ».
L'amendement n° 124 rectifié, présenté par MM. Larcher, Hérisson, Trucy, Girod
et Laffitte, est ainsi libellé :
« Après les mots : "à l'exception des gains et rémunérations versés", rédiger
comme suit la fin du premier alinéa du II du texte proposé par cet article pour
l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale : "les particuliers
employeurs et par l'organisme mentionné à l'article 2 de la loi n° 90-568 du 2
juillet 1990 relative à l'organisation du secteur public de la poste et des
télécommunications. Pour ce dernier, les modalités spécifiques de la réduction
seront précisées dans le cadre des procédures régissant ses relations avec
l'Etat". »
L'amendement n° 67, présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée, est ainsi libellé :
« Compléter le premier alinéa du III du texte proposé par cet article pour
l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale par une phrase ainsi rédigée
:
« Les salariés dont la durée stipulée au contrat est inférieure à la moitié de
la durée collective du travail applicable n'ouvrent pas droit à l'allègement.
»
L'amendement n° 27, présenté par M. Joly, est ainsi libellé :
« Compléter le III du texte proposé par cet article pour l'article L. 241-13
du code de la sécurité sociale par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le montant de la réduction calculé selon les modalités ainsi
définies est inférieur au produit du salaire minimum de croissance par le
coefficient 0,025, le montant forfaitaire de la réduction est fixé au résultat
de ce produit. Ce montant forfaitaire s'applique également aux gains et
rémunérations supérieurs à 1,7 SMIC. »
L'amendement n° 9, présenté par M. Souvet, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« Rédiger ainsi le 1° du V du texte proposé par cet article pour l'article L.
241-13 du code de la sécurité sociale :
« 1° Avec l'aide prévue à l'article 3 de la loi n° 98-461 du 13 juin 1998
d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail. En
ce cas, le montant de la réduction visée au II est minoré d'un montant
forfaitaire fixé par décret. »
La parole est à M. Gilbert Chabroux pour défendre l'amendement n° 65.
M. Gilbert Chabroux.
L'article 6 prévoit de « déconnecter » les allégements des cotisations
sociales patronales de la réduction du temps de travail. Le projet de loi
supprime tout lien entre le temps de travail et les aides à l'employeur.
Ainsi, on ne peut plus perdre ces aides quelle que soit la durée du temps de
travail en vigueur dans l'entreprise. C'est une véritable incitation à rester
aux 39 heures.
Ces allégements de cotisations patronales sans aucune contrepartie constituent
un véritable cadeau aux patrons, qui vont gagner jusqu'à vingt-six points de
cotisations pour le versement de salaires allant jusqu'à 1 800 euros environ,
soit l'équivalent de 1,7 SMIC.
Je ne vois pas comment cette mesure pourrait encourager le dialogue social,
conformément à la volonté affichée par le Gouvernement. Le lien entre les
allégements de charges et la RTT qui existait dans le cadre des lois Aubry a
conduit de nombreuses entreprises à conclure des accords et a déclenché un
mouvement de négociation sans précédent. Ainsi, 90 % des salariés des
entreprises de plus de vingt salariés sont couverts par un accord de réduction
du temps de travail. Le mouvement s'est même amplifié au premier semestre
2002.
Et vous voulez lui porter un coup d'arrêt, monsieur le ministre !
Vous voulez fusionner la ristourne Juppé sur les bas salaires et l'allégement
Aubry lié à la RTT sans aucune contrepartie, en l'absence totale de toute
condition. Un coefficient de réduction progressif va désormais être appliqué à
la rémunération brute, allant de 26 % de réduction au niveau du SMIC pour
disparaître lorsque le salaire est de 1,7 SMIC.
Le fait que la rémunération de référence soit désormais la rémunération
horaire et non plus la rémunération mensuelle appelle trois observations.
Tout d'abord, il pouvait advenir, avec le dispositif précédent, que le
paiement des heures supplémentaires à un salarié fasse sortir celui-ci de
l'épure et le fasse dépasser le 1,8 SMIC prévu par la loi Aubry. Désormais, le
coût sera lissé et permettra à l'employeur de continuer à bénéficier de
l'allégement.
L'absence de référence à la durée du travail permettra aussi à l'employeur de
bénéficier de l'allégement pour des salariés passés au forfait jours ou non
rémunérés au temps passé comme les VRP, les pigistes, les chargés de mission,
et d'autres encore.
Enfin, le nouveau dispositif est dit « neutre » pour les salariés à temps
partiel. Ce point est particulièrement important. Il s'agit en fait d'une
véritable incitation au développement du temps partiel, dont on sait qu'il est
subi dans la majorité des cas, qu'il concerne très souvent des femmes sans
qualification, exerçant des emplois à horaires atypiques, souvent en intérim,
sous contrat à durée déterminée et dont la rémunération est très insuffisante
pour permettre une vie décente. Le travail à temps partiel est statistiquement
responsable de l'augmentation du nombre de travailleurs pauvres.
Pour toutes ces raisons, nous avons déposé un amendement de suppression de
l'article 6.
M. le président.
La parole est à M. Roland Muzeau pour présenter l'amendement n° 111.
M. Roland Muzeau.
Vous en conviendrez, mes chers collègues, c'est avec une grande constance que
les parlementaires communistes se sont opposés au dispositif d'allégement des
cotisations patronales mis en place depuis 1993, qui a, notamment, permis le
développement d'emplois précaires faiblement qualifiés et bassement rémunérés.
Ma collègue Mme Michelle Demessine en a largement parlé.
Nous sommes, par conséquent, opposés à l'amplification des allégements
proposés pour abaisser le coût du travail. Nous préférons à ceux-ci un autre
dispositif, que je vous présente dans cet amendement.
Nous proposons, tout d'abord, l'extinction progressive des dispositifs
d'allégement des cotisations sociales d'employeurs sur les bas salaires,
communément appelés « ristourne Juppé » - article L. 241-13 du code de la
sécurité sociale - et sur les 35 heures relevant de la loi Aubry II. Le
bénéfice de l'allégement prendrait effet pour une durée de sept ans, durée
moyenne d'amortissement des équipements, dans le cas des entreprises passées à
35 heures ou moins, et de trois ans pour celles qui n'y seraient pas
passées.
Nous envisageons, ensuite, la promotion, à l'occasion du passage aux 35
heures, d'un nouveau dispositif d'incitation par l'allégement des charges
financières en contrepartie de créations d'emplois plus qualifiés.
Ces deux mesures doivent avoir des effets tout à fait opposés à ceux que nous
connaissons depuis maintenant bien trop longtemps avec les allégements sociaux
et fiscaux.
Nous espérons donc, mes chers collègues, que vous adopterez nos deux
amendements.
M. Jean Chérioux.
Ce n'est pas sûr !
M. le président.
La parole est à M. Gilbert Chabroux pour présenter l'amendement n° 66.
M. Gilbert Chabroux.
Cet amendement vise tout d'abord à rétablir le lien entre réduction du temps
de travail et allégement des cotisations sociales patronales.
Si l'allégement des cotisations patronales est apparu comme le seul moyen de
faire accepter par une partie au moins du patronat la mise à niveau progressive
du SMIC, il n'en demeure pas mois, s'il est sans condition, un cadeau sans
contrepartie aux employeurs. Il n'a, à lui seul, pas beaucoup d'effet sur
l'emploi. Il consiste seulement - c'est un choix politique - en la poursuite du
transfert du financement de la protection sociale en totalité sur le budget de
l'Etat, c'est-à-dire, en fait, sur les ménages.
Cela dit, nous souhaitons indiquer, par cet amendement, que nous sommes aussi
sensibles aux difficultés éprouvées par cette minorité de salariés - 13 % - qui
ne sont pas satisfaits des conditions dans lesquelles s'est réalisé, dans leur
entreprise, le passage aux 35 heures, soit que le nombre d'embauches
corrélatives ait été insuffisant, soit que la réorganisation de l'entreprise
ait été inefficace, soit encore que l'employeur ait imposé une flexibilité
excessive.
Même si aucun de ceux qui sont passés aux 35 heures ne souhaite revenir en
arrière, il reste encore beaucoup à faire pour améliorer la condition
salariale.
Nous proposons donc de ne consentir des allégements de charges qu'aux
entreprises qui s'engagent à créer ou à préserver des emplois pour réduire la
pénibilité du travail ou augmenter les bas salaires, dans les conditions
prévues par loi loi du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du
temps de travail.
M. le président.
La parole est à M. Gérard Larcher pour défendre l'amendement n° 124
rectifié.
M. Gérard Larcher.
Nul mieux que vous, monsieur le ministre, ne connaît la situation de La Poste,
entreprise qui, pour ses salariés de droit privé, est exclue des dispositifs
d'allégement.
Alors que le temps du monopole s'achève progressivement à l'horizon 2003-2006
- et certainement, en tout cas, à l'horizon 2009 - l'entreprise, qui se trouve
déjà à 50 % dans un secteur ouvert à la concurrence, qui n'a dégagé que 182
millions d'euros de dividendes positifs l'an dernier alors même qu'elle
provisionnait sa vente d'immobilier, qu'elle achevait sa vente de parc
automobile et qu'elle réalisait un chiffre d'affaires de 15 millions d'euros,
va se trouver dans une situation particulièrement difficile. Je rappelle tout
cela, puisque nous avons été privés de débat sur La Poste depuis maintenant
cinq années.
M. Alain Gournac.
Tiens, tiens !
M. Gérard Larcher.
Mais tout a un coût : le réseau, le rôle social des guichets, les services
financiers de La Poste accueillant les plus démunis, ou encore la mise en
oeuvre des accords Galmot. L'ensemble représente 1,5 milliard d'euros !
Soyons clairs. Alors qu'elle doit faire face, aujourd'hui, à un secteur
concurrentiel, alors qu'elle a dû subir sous la pression politique, si j'ose
dire, le dispositif des 35 heures sans compensation dès le mois de janvier
2000, alors qu'elle a beaucoup embauché, La Poste va se trouver dans une
situtation particulièrement délicate et, dans les trois ans qui viennent, elle
risque de se retrouver « dans le rouge ».
Dans ces conditions, monsieur le ministre, parce qu'ils veulent aider le
nouveau président à adapter son entreprise, ceux qui sont au chevet de La Poste
- vous les connaissez depuis longtemps : je pense à M. François Trucy, à M.
Paul Girod, à M. Pierre Hérisson mais aussi à d'autres qui, comme M. Georges
Gruillot, travaillent à la commission supérieure du service public des postes
et télécommunications - vous demandent de ne pas exclure l'entreprise du
dispositif d'allégement de charges sociales pour les salariés recrutés sous
contrat de droit privé. Toutefois, nous y mettons une condition : cette
non-exclusion doit être intégrée dans le dispositif du contrat de plan qui sera
négocié entre l'Etat et l'entreprise publique.
Monsieur le ministre, l'enjeu est tout à fait important, car nous croyons au
service public et au rôle de l'entreprise publique. Nous devons lui donner les
moyens de s'adapter ; sinon, nous provoquerions une érosion progressive de La
Poste et nous ne pourrions pas lui donner des perspectives.
Avec ce dispositif d'allégement, nous donnons à une entreprise publique les
moyens de pouvoir effectuer ses missions, tant dans le secteur concurrentiel
que dans le secteur public. Je le dis pour nos collègues communistes ! Car,
n'en doutons pas, si La Poste ne se trouve pas en situation de dégager un
certain nombre de dividendes, la charge de service public devra alors être
transférée à d'autres opérateurs.
Le service public a un coût, mais il est nécessaire. C'est pourquoi, monsieur
le ministre, nous souhaiterions que vous prêtiez une oreille attentive à cette
proposition qui entend donner à notre opérateur public les moyens de bâtir son
avenir.
M. le président.
La parole est à M. Gilbert Chabroux pour présenter l'amendement n° 67.
M. Alain Gournac.
M. Chabroux va défendre La Poste ?
M. Gilbert Chabroux.
S'il était adopté, cet amendement devrait freiner le développement du travail
à temps partiel subi.
Nous proposons que le recrutement des salariés dont la durée de travail est
inférieure à la moitié de la durée effective du travail applicable n'ouvre pas
droit à l'allégement de charges sociales patronales.
M. le président.
La parole est à M. Bernard Joly pour présenter l'amendement n° 27.
M. Bernard Joly.
Cet amendement a pour objet de rétablir, au moins en partie, des allégements
de charges précédemment définis comme pérennes par la loi « Aubry II ».
A défaut, l'Etat manquerait à sa parole en revenant sur une disposition qui
compensait en partie les hausses de coût subies par les entreprises passées aux
35 heures pour les personnels dont la rémunération dépasse 1,7 SMIC,
c'est-à-dire 1 962 euros, ou 12 850 francs par mois.
Surtout, le projet de loi conduirait, en l'état, à augmenter de 1,5 milliard
d'euros à compter du 1er juillet 2003 en année pleine, selon l'Agence centrale
des organismes de sécurité sociale, l'ACOSS, les charges sociales des
entreprises qui emploient beaucoup de personnel qualifié.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour présenter l'amendement n° 9 et pour
donner l'avis de la commission sur les différents amendements qui viennent
d'être défendus.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Il ne vous a pas échappé, mes chers collègues, que l'article
6, qui définit le régime définitif de la nouvelle réduction de cotisations
sociales patronales, dispose que ce dispositif pourra être cumulé avec, d'une
part, l'aide incitative « Aubry I » et, d'autre part, l'aide incitative « de
Robien ».
Or les dernières conventions « de Robien », d'une durée de sept ans, ont été
conclues en juin 1998. Les entreprises concernées ne pourront donc plus
bénéficier de l'exonération de cotisations sociales correspondante en juin 2005
au plus tard, soit quelques semaines avant l'entrée en vigueur, au 1er juillet
2005, des modalités définitives de calcul de la nouvelle réduction.
Par cohérence, la commission vous propose de supprimer la mention de cette
possibilité de cumul qui ne correspondra, en droit et en fait, à aucune
réalité.
Bien entendu, cette suppression n'interdira pas aux employeurs de bénéficier
de ce cumul pendant la période transitoire, dès lors que l'article 7 prévoit
déjà explicitement cette possibilité.
Tel est l'objet de l'amendement n° 9.
L'amendement n° 65 vise à supprimer l'article 6. Vous savez que la commission
ne le souhaite pas, d'autant que c'est à cet endroit que l'on définit les
conditions et les modalités du nouvel allégement de cotisations sociales. Une
telle suppression serait extrêmement grave. La commission s'y oppose donc.
L'amendement n° 111 vise à modifier le régime du nouvel allégement dans un
sens qui est contraire aux principes et aux objectifs approuvés par la
commission. Elle y est donc défavorable.
L'amendement n° 66 vise, ni plus ni moins, à rétablir l'allégement « Aubry II
», dont la commission approuve, quant à elle, l'abrogation. En conséquence,
elle ne peut être que défavorable à cet amendement.
L'amendement n° 124 rectifié résenté par M. Gérard Larcher, vise à faire
bénéficier l'opérateur public « La Poste » du nouvel allégement de charges au
titre de ses salariés de droit privé. En effet, et comme cela était déjà le cas
pour la ristourne « Juppé », La Poste est exclue du champ du nouvel allégement
car elle dispose, pour certaines de ses activités, d'un monopole public qui ne
permet pas de l'assimiler totalement à une entreprise du secteur
concurrentiel.
Toutefois, la pertinence des arguments avancés par les auteurs de l'amendement
ne saurait être ignorée.
Puisque M. Larcher propose que les conditions particulières d'application à La
Poste de cet allégement soient définies dans le cadre de ses relations
contractuelles avec l'Etat, la commission souhaite entendre l'avis du
Gouvernement sur ce point, puisque c'est ce dernier qui aura à traiter de cette
affaire.
L'amendement n° 67, présenté par M. Chabroux, vise à interdire le droit au
nouvel allégement de charges pour les emplois à temps partiel dont la durée,
stipulée par le contrat de travail, est inférieure à la moitié de la durée
collective du travail.
La commission n'est pas insensible à la préoccupation exprimée par les auteurs
de l'amendement. Elle constate, toutefois, que le dispositif proposé est
contraire à la logique même du nouvel allégement de charges, dont la raison
d'être est de compenser la revalorisation du coût horaire du travail résultant
de la convergence des minima salariaux.
Il serait peu cohérent de créer des « exceptions négatives » restreignant,
pour certains cas particuliers, le champ d'application d'un allégement à
vocation générale et dont le mode de calcul est neutre par rapport à la durée
du travail. La commission est donc défavorable à cet amendement.
L'amendement n° 27 vise à maintenir pour la moitié de son montant « l'aide
structurelle aux 35 heures », d'un montant fixe et forfaitaire, qui était
accordée dans le cadre de la loi « Aubry II ».
Certes, la suppression de cette aide structurelle représente une perte non
négligeable, notamment pour certaines grandes entreprises. Toutefois, le
bénéfice de cette aide n'était ouvert que dans le cadre, contraignant, des
dispositions de la loi « Aubry II ». Or le présent projet de loi assouplit ces
contraintes.
En outre, il ne vous a pas échappé que cette disposition a un coût pour les
finances publiques, qui peut être évalué à 1,5 milliard d'euros par an, soit
près de 10 milliards de francs.
En conséquence, la commission souhaite entendre le Gouvernement sur cet
amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Les amendements émanant de l'opposition visent à supprimer ou à
modifier considérablement le dispositif d'allégement de charges que nous vous
proposons. La gauche, je le constate, est contre les allégements de charges !
Elle nous en a cependant légué pour 17 milliards d'euros,...
M. Gilbert Chabroux.
Ce sont les mesures Juppé !
M. François Fillon,
ministre.
Vous avez créé certains de ces allégements, vous en avez
maintenu d'autres..., alors même que vous disposiez de cinq ans pour les
supprimer s'ils étaient si insupportables ! De plus, si toutes les entreprises
étaient passées aux 35 heures, nous n'en serions pas à 15 ou 17 milliards, mais
à un niveau beaucoup plus élevé !
En réalité, la réduction du temps de travail a doublement pénalisé notre
économie, à la fois à traversla compétitivité et la capacité de production de
nos entreprises, mais aussi à travers le coût financier qu'elle a
représenté.
On peut se poser la question de savoir si, dans un pays où des enfants dorment
dans la rue, où l'hôpital est en train d'exploser, où les retraites ne sont pas
financées, la priorité des priorités est bien de dépenser 15 milliards pour
réduire le temps de travail alors qu'aucun autre pays européen ne l'a fait.
M. Guy Fischer.
Et les milliards qu'a représentés le dernier porte-avion ?
M. François Fillon,
ministre.
Je veux bien que l'on nous explique que les allégements de
charges sont une marotte idéologique de la droite, mais la vérité, c'est que,
après cinq ans de gouvernement de gauche, nous avons sur les bras 15 milliards
d'allégements de charges, dont, effectivement, la ristourne sur les bas
salaires,...
M. Gilbert Chabroux.
Vous en rajoutez !
M. François Fillon,
ministre.
... mais aussi les dispositions des deux lois Aubry et
l'allégement lié à la suppression de la part « salaires » de la taxe
professionnelle.
Par ailleurs, sauf à effacer les conséquences des 35 heures sur l'économie
française, ce qui permettrait effectivement de réduire d'autant les allégements
de charges, il faut bien que nous honorions au moins une partie des engagements
qui ont été pris, parce que les entreprises qui ont subi l'effet des 35 heures
l'ont compensé pour une part par lesdits allégements.
Ma deuxième remarque - j'en ai parlé dans mon discours introductif -, c'est
que nous avons à faire face, dans un certain nombre de domaines, à une
concurrence très sévère qui, liée à l'ouverture de l'économie mondiale, n'est
pas près de se réduire. C'est même tout le contraire qui va se passer, puisque
nous allons maintenant assister, dans très peu de temps, à l'élargissement de
l'Union européenne, qui va modifier assez sensiblement les conditions de la
concurrence, notamment pour les entreprises de main-d'oeuvre.
Nous avons aussi assisté, en 2001, à l'événement historique sans doute le plus
important de ces dernières années : l'entrée de la Chine, cet immense pays qui
se prétend encore communiste, dans l'Organisation mondiale du commerce. C'est
un changement d'échelle considérable pour le commerce mondial.
Nous allons subir, qu'on le veuille ou non, une pression de plus en plus forte
sur nos industries de main-d'oeuvre. Dans cet esprit, il n'est pas inutile,
même si ce n'est pas la seule réponse qu'il faille apporter à ce défi de la
mondialisation, d'aider notre économie à s'adapter, à passer des caps
difficiles, en particulier les entreprises de main-d'oeuvre qui emploient des
personnels peu qualifiés et qui vont être les plus menacées par cette ouverture
à la concurrence.
Je l'ai dit hier, toutes les études montrent que les dispositifs d'allégement
des charges sont efficaces pour maintenir et créer de l'emploi, notamment pour
les industries de main-d'oeuvre et les bas salaires. Je soulignais même
qu'elles ont démontré que le point à partir duquel l'économie française crée
des emplois est passé, grâce aux allégements de charges, d'une croissance de
2,5 % à 1,5 %.
Au demeurant, beaucoup de pays européens que j'ai également cités hier ont mis
en place une politique identique d'allégement des charges, même si, c'est vrai,
c'est sans doute la France qui a commencé en 1993, puis en 1995 et en 2000.
Enfin, il y a l'impact de l'harmonisation des SMIC, l'impact de l'augmentation
de 11,4 % du SMIC horaire, qui sera très lourd, notamment sur les entreprises
de main-d'oeuvre, et qu'il nous faut bien compenser par des allégements de
charges.
Voilà ce qui explique le choix fait par le Gouvernement, d'une part, de
maintenir un haut niveau d'allégement des charges et, d'autre part, de
concentrer les allégements de charges sur les bas salaires et sur les salaires
moyens, parce que c'est là que les tensions sont les plus fortes, parce que
c'est là aussi que l'harmonisation du SMIC aura son effet le plus important.
Il va de soi que la suppression du dispositif d'allégement des charges prévu
par l'amendement n° 65, lié aux autres dispositions du projet de loi, aurait un
effet tout à fait désastreux sur l'économie française. Je vous propose donc de
repousser cet amendement.
Sur l'amendement n° 111 que M. Muzeau a défendu, j'émettrai le même jugement,
ainsi que sur l'amendement n° 66, défendu par M. Chabroux.
J'en viens à l'amendement n° 124 rectifié de MM. Larcher, Hérisson, Trucy,
Girod et Laffitte, qui concerne La Poste.
Je suis évidemment extrêmement sensible aux arguments développés par mon ami
Gérard Larcher, et je comprends tout à fait l'esprit de cet amendement,
d'autant que je me suis moi-même posé la question.
J'exposerai donc très simplement les raisons qui m'ont amené, avec le
Gouvernement, à y répondre dans le sens proposé par le projet de loi.
La première raison est d'ordre historique. Le traitement à part de La Poste a
été décidé dans le cadre des régimes d'allégement des charges de 1993 et de
2000, et La Poste a été exclue du champ de la ristourne sur les bas salaires et
des allégements liés aux 35 heures.
La seconde raison - et, d'une certaine manière, M. Larcher y a lui-même fait
allusion, m'offrant la solution au débat que nous allons avoir ce soir sur ce
sujet - réside dans l'existence de relations étroites entre La Poste et
l'Etat.
Ces relations restent encore très marquées en dépit des ouvertures partielles
à la concurrence, en raison des particularités liées au monopole pour le
transport des envois de moins de 350 grammes et des concours directs de l'Etat
à La Poste, dont on peut bien entendu discuter l'équilibre.
Les relations financières qui existent entre l'Etat et La Poste ne valent pas
pour les entreprises citées en exemple par M. Larcher. Par conséquent, cette
question devrait être réglée dans le cadre de la renégociation de ces relations
financières entre l'Etat et La Poste, c'est-à-dire au moment de la préparation
du nouveau contrat de plan entre l'Etat et La Poste.
Il ne faut pas, me semble-t-il, préjuger les décisions que prendront La Poste
et l'Etat en votant un amendement qui coûterait quand même un peu plus de 100
millions d'euros au budget de l'Etat !
Dans ce contexte, je ne peux que demander à M. Gérard Larcher de retirer cet
amendement, sur lequel le Gouvernement émet un avis défavorable, dans l'attente
de la négociation du contrat de plan entre l'Etat et La Poste.
L'amendement n° 67 de M. Bernard Joly vise à maintenir l'allégement structurel
prévu par les lois Aubry pour les salaires supérieurs ou égaux à 1,7 SMIC.
J'ai indiqué tout à l'heure quelles étaient les priorités du Gouvernement et
je souligne que, lorsqu'il sera à plein régime, le dispositif qui vous est
proposé représente une charge financière pour le budget de l'Etat de 21
milliards d'euros, ce qui n'est évidemment pas rien.
Nous avons estimé, d'une part, que les entreprises, notamment les grandes
entreprises dont le personnel a des salaires plus élevés, étaient peut-être
naturellement moins sensibles aux conséquences de l'harmonisation du SMIC, et,
d'autre part, que la souplesse que le texte dont vous discutez va introduire en
matière de temps de travail pouvait conduire à réduire quelque peu les
allégements de charges, notamment à supprimer l'allégement structurel.
C'est la raison pour laquelle, malgré toute l'estime que j'ai pour M. Bernard
Joly, je ne puis qu'être défavorable à cet amendement.
Sur l'amendement n° 9 défendu par M. Souvet, le Gouvernement émet un avis
favorable : l'allégement Robien étant appelé à s'éteindre avant l'entrée dans
le régime définitif de la nouvelle exonération, il est tout à fait inutile de
prévoir le cumul des deux mesures au-delà de la période transitoire.
Enfin, à propos de l'amendement n° 67, monsieur le président, j'ai déjà
indiqué que le Gouvernement ne souhaitait pas ouvrir le débat sur le temps
partiel. Je suis donc défavorable à cet amendement.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 65.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 111.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 66.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
La parole est à M. Gérard Larcher pour explication de vote sur l'amendement n°
124 rectifié.
M. Gérard Larcher.
Je remercierai tout d'abord M. le rapporteur de son écoute attentive.
Monsieur le ministre, il est vrai que le contrat de plan va être un moment
essentiel pour La Poste, mais je voudrais rappeler quelques dates.
Le contrat de plan couvre les années 2003-2008. Or, en 2006, conséquence des
décisions du gouvernement précédent, ce sera la fin du monopole total.
L'entreprise sera totalement dans le secteur concurrentiel, elle n'aura pas de
part réservée, notamment du courrier. Je fais aussi observer que la mise en
place sans compensation des 35 heures ainsi que les dispositifs d'accélération
de l'emploi coûtent 182 millions d'euros à La Poste. Il est donc essentiel,
monsieur le ministre, que le Gouvernement, par votre intermédiaire, puisse
s'engager, dans le contrat de plan, à prendre en compte cette réalité - vous
avez évoqué une compensation de 100 millions d'euros -, sinon nous allons vers
une catastrophe financière pour La Poste.
Je note également, monsieur le ministre, que les missions de service public
que La Poste assume sans compensation - guichet social pour les plus
défavorisés, réseaux de transport de la presse... - sont prises en compte dans
le contrat de plan.
Enfin, il ne faut pas oublier le poids des retraites. L'ancien contrat de plan
prévoyait 100 millions d'euros par an. Il faut tenir compte des réalités.
Je vais retirer cet amendement, mais je souhaite réellement qu'il soit
l'occasion de réfléchir sur les données et les conditions dans lesquelles nous
engageons l'avenir de La Poste.
M. le président.
L'amendement n° 124 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 67.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Monsieur Bernard Joly, l'amendement n° 27 est-il maintenu ?
M. Bernard Joly.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 27 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 9.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 6, modifié.
(L'article 6 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 6
M. le président.
L'amendement n° 119 rectifié, présenté par MM. Vasselle, P. Blanc et Gournac,
est ainsi libellé :
« Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le quatrième alinéa de l'article L. 322-4-2 du code du travail,
il est inséré un alinéa additionnel ainsi rédigé :
« En outre, ces contrats donnent droit à l'exonération des cotisations
patronales de sécurité sociale lorsqu'ils concernent les bénéficiaires de
l'obligation d'emploi prévue à l'article L. 323-1 et selon des modalités fixées
à l'article L. 322-4-5-1. »
« II. - Après l'article L. 322-4-5 du code du travail, il est inséré un
article additionnel ainsi rédigé :
«
Art L ... . -
L'employeur est exonéré du paiement des cotisations à
sa charge pour l'emploi de tout salarié bénéficiant à la fois de l'obligation
d'emploi prévue à l'article L. 323-1 et d'un contrat initiative-emploi, au
titre des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations
familiales dans la limite des cotisations afférentes à la rémunération ou à la
partie de rémunération horaire égale au salaire minimum de croissance.
« L'exonération est subordonnée à la production d'une attestation de la part
des services du ministère de l'emploi. »
« III. - La perte de recettes résultant des I et II ci-dessus est compensée à
due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus à
l'article 575 du code général des impôts. »
La parole est à M. Alain Gournac.
M. Alain Gournac.
Dans ce texte important et attendu par les Français et visant à desserrer
l'étau des 35 heures, à donner de l'oxygène aux entreprises, il serait très
difficile de ne pas parler des personnes handicapées, d'autant plus que M. le
Président de la République a décidé que l'aide aux personnes handicapées serait
une priorité.
Il y a deux possibilités : ou les entreprises embauchent des personnes
handicapées - elles sont peu nombreuses - ou elles se dédouanent en payant leur
contribution à l'AGEFIPH, l'association pour la gestion du fonds pour
l'insertion professionnelle des handicapés.
Nous nous devons d'aider les handicapés à entrer dans les entreprises, à s'y
adapter et à donner le meilleur d'eux-mêmes. Monsieur le ministre, nous devons
faire quelque chose pour eux.
Il serait étonnant, je le répète, de ne pas évoquer le cas des personnes
handicapées dans ce projet de loi. C'est pourquoi, avec mes collègues Alain
Vasselle et Paul Blanc, je vous propose d'adopter ces dispositions qui
devraient en lançant un signal donner un coup de pouce.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Cet amendement vise à rétablir, au profit des personnes
handicapées, l'exonération totale des cotisations sociales patronales qui
étaient accordées, à hauteur du SMIC, dans le cadre du contrat
initiative-emploi. En effet, la loi de finances pour 2002 a supprimé cette
exonération pour l'ensemble des bénéficiaires du contrat initiative-emploi et
les a fait « basculer » dans le droit commun des allégements de charges.
Le rétablissement de cette exonération pour les personnes handicapées
embauchées dans le cadre d'un contrat initiative-emploi aurait pour effet de
favoriser leur intégration professionnelle.
La commission partage les objectifs visés par les auteurs de cet amendement,
notamment par notre collègue Paul Blanc, dont le récent rapport, sur la
politique de compensation du handicap fait déjà autorité.
Toutefois, la commission s'interroge sur le dispositif proposé par
l'amendement.
Tout d'abord, la revendication, par les personnes handicapées elles-mêmes, de
leur égalité de traitement avec l'ensemble de nos concitoyens est-elle
compatible avec la définition d'une « discrimination positive » résultant de
l'addition de mesures ponctuelles ?
Cette « discrimination positive » correspond-elle, véritablement, à la
politique globale de compensation du handicap que nous appelons tous de nos
voeux ?
Par ailleurs, le rétablissement, dans le cadre du contrat initiative-emploi,
de l'exonération totale des cotisations sociales patronales pour les seules
personnes handicapées, ne serait-il pas susceptible d'affecter, même
indirectement, les autres bénéficiaires de cette catégorie d'emploi aidé ? En
effet, ces derniers, notamment les chômeurs de longue durée, ne bénéficieraient
pas du droit à l'exonération totale des cotisations. Ce qui me gêne, c'est la
gradation de la misère dans une échelle quelconque.
La commission souhaite connaître l'avis du Gouvernement sur cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Sur ce sujet qui est très important, le Gouvernement partage
complètement l'analyse que vous venez de faire et votre souhait de voir les
handicapés au coeur des politiques conduites en faveur de l'emploi.
Je formulerai deux remarques prolongeant l'argumentation de M. le
rapporteur.
D'abord, il existe aujourd'hui des dispositifs qui permettent d'encourager
l'emploi des handicapés. L'aide de l'Etat pour les contrats initiative-emploi
peut ainsi être renforcée dans le cadre des programmes de l'AGEFIPH. Dans bien
des cas, l'aide de l'Etat est supérieure au montant des cotisations patronales
que l'employeur devrait acquitter.
Ensuite, et surtout, l'amélioration que vous appelez de vos voeux sera au
coeur de la grande loi sur le handicap que le Gouvernement prépare à la demande
du Président de la République. Il s'agit de réformer, d'actualiser, pour la
rendre plus efficace et plus ambitieuse, la loi de 1975. Le texte que Mme
Boisseau est en train de préparer viendra rapidement en discussion devant le
Parlement.
J'ai moi-même suggéré à M. le Premier ministre de confier au Conseil
économique et social, dans les prochaines semaines, une mission de réflexion
sur l'insertion professionnelle des handicapés, mission qui nous permettra de
participer à l'élaboration de cette nouvelle loi qui prendra la suite de la loi
de 1975.
Compte tenu du fait que les marges de manoeuvre sont faibles dans le budget de
l'Etat, il faut, je crois, réserver tous les moyens possibles pour cette future
grande loi. L'amendement présenté par M. Gournac sera une contribution à
l'élaboration de ce texte.
M. le président.
La parole est à M. Alain Gournac.
M. Alain Gournac.
J'ai écouté avec attention notre excellent rapporteur.
Je ne suis pas du tout d'accord avec lui - je tiens à le préciser d'emblée -
lorsqu'il parle de « misère ». Pour côtoyer les handicapés depuis vingt-sept
ans, je peux vous dire qu'ils sont parfois beaucoup plus normaux que nous !
Monsieur le ministre, nous attendons le grand texte dont vous avez parlé et
qui va réformer la loi de 1975, laquelle, soit dit en passant, représentait
déjà une évolution formidable ! C'est un certain Jacques Chirac qui l'avait
souhaitée, si ma mémoire est bonne.
Mais quand ce texte viendra-t-il en discussion ? Le monde du handicap attend
cette évolution. Je voudrais, monsieur le ministre, que vous n'oubliiez pas ce
qui a été dit aujourd'hui au moment où l'on discutera de ce texte.
Bien entendu, je retire mon amendement.
M. le président.
L'amendement n° 119 rectifié est retiré.
L'amendement n° 120 rectifié, présenté par MM. Vasselle, P. Blanc et Gournac,
est ainsi libellé :
« Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - A compter du 1er juillet 2005, la rémunération ou la partie de
rémunération horaire exonérée de cotisations patronales de sécurité sociale au
titre de l'article L. 322-4-5-1 du code du travail est portée au salaire
minimum de croissance majoré de 70 %. »
« II. - La perte de recettes résultant du I ci-dessus est compensée à due
concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus à
l'article 575 du code général des impôts. »
La parole est à M. Alain Gournac.
M. Alain Gournac.
Cet amendement a pour objet d'aligner le dispositif d'exonération des charges
qui profitent aux employeurs des CIE sur celui de l'article 6 du présent projet
de loi.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
La commission souhaiterait entendre le Gouvernement.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Le Gouvernement a le même avis que sur l'amendement précédent,
monsieur le président.
M. le président.
La parole est à M. Gournac.
M. Alain Gournac.
Je retire également cet amendement.
M. le président.
L'amendement n° 120 rectifié est retiré.
Article 7
M. le président.
« Art. 7. - I. - Pour les gains et rémunérations versés jusqu'au 30 juin 2005
par les employeurs qui, au 30 juin 2003, emploient des salariés ouvrant droit à
l'allégement prévu à l'article L. 241-13-1 du code de la sécurité sociale, le
coefficient maximal prévu au III de l'article L. 241-13 du même code est égal à
0,26. Ce coefficient est obtenu pour une rémunération horaire égale au rapport,
d'une part, entre la garantie de rémunération prévue par l'article 32 de la loi
n° 2000-37 du 19 janvier 2000 précitée, telle qu'applicable au profit d'un
salarié dont la durée du travail a été réduite à trente-cinq heures par semaine
ou plus au 1er janvier 2000, et, d'autre part, la durée légale du travail. Ce
coefficient devient nul pour une rémunération horaire égale au montant de ce
rapport majoré de 70 %. »
« II. - Pour les autres employeurs, le coefficient maximal prévu au III de
l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale est égal à 0,208 pour les
gains et rémunérations versés à compter du 1er juillet 2003 et à 0,234 pour
ceux versés à compter du 1er juillet 2004. A compter de ces mêmes dates, le
taux de la majoration prévue à la troisième phrase du troisième alinéa dudit
III est fixé à 50 % et 60 % respectivement. »
« III. - Au cours de la période transitoire prévue au présent article, la
formule permettant de déterminer le coefficient prévu au III de l'article L.
241-13 du code de la sécurité sociale peut être adaptée pour certaines
catégories de salariés relevant de professions soumises à des dispositions
particulières en matière de durée maximale de travail, sous réserve du respect
de ces dispositions, pour tenir compte de la rémunération mensuelle minimale,
dans des conditions et selon des modalités fixées par décret. »
« III
bis.
- Au cours de la période transitoire prévue au présent
article, le bénéfice des dispositions du II est cumulable avec l'exonération
prévue aux deux premiers alinéas de l'article L. 322-12 du code du travail. Ce
cumul est limité au montant qui résulterait de l'application du coefficient
maximal de réduction de cotisations dans les conditions prévues au III de
l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale. »
« IV. - Un décret précise les modalités de calcul de la réduction au cours de
la période transitoire prévue au présent article. »
« V. - 1. Le bénéfice des dispositions de l'article L. 241-14 du code de la
sécurité sociale, de l'article 3 de la loi n° 98-461 du 13 juin 1998
d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail et
des articles 39 et 39-1 de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993 quinquennale
relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle est cumulable
avec celui de la réduction de cotisations prévue au présent article.
« 2. Le soutien visé à l'article L. 322-4-6 du code du travail est cumulable
avec la réduction de cotisations prévue au présent article.
« 3. Les dispositions du présent article sont applicables aux cotisations
visées aux articles L. 741-4, L. 741-15 et L. 751-17 du code rural.
« 4. La réduction de cotisations prévue au présent article est applicable à
Saint-Pierre-et-Miquelon aux cotisations à la charge de l'employeur mentionnées
à l'article 7-1 de l'ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1977 portant
extension et adaptation au département de Saint-Pierre-et-Miquelon de diverses
dispositions relatives aux affaires sociales.
« 5. Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent
article aux employeurs relevant des régimes spéciaux de sécurité sociale des
marins, des mines et des clercs et employés de notaires. »
Je suis saisi de six amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 68 est présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres groupe socialiste, apparenté et
rattachée.
L'amendement n° 112 est présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° 28, présenté par M. Joly, est ainsi libellé :
« Compléter le I de cet article par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque le montant de la réduction calculé selon les modalités ainsi
définies est inférieur au produit du salaire minimum de croissance par le
coefficient 0,025, le montant forfaitaire de la réduction est fixé au résultat
de ce produit. Ce montant forfaitaire s'applique également aux gains et
rémunérations supérieurs à 1,7 SMIC. »
L'amendement n° 10, présenté par M. Souvet, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« Compléter le I de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions du premier alinéa sont également applicables aux salariés
mis à disposition de ces employeurs dans les conditions prévues à l'article L.
124-3 du code du travail. »
L'amendement n° 11, présenté par M. Souvet, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« Dans le IV de cet article, après les mots : "modalités de calcul" », insérer
les mots : "et d'application". »
L'amendement n° 12, présenté par M. Souvet, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« I - Rédiger comme suit le 1 du V de cet article :
« 1. Le bénéfice des dispositions de l'article 3 de la loi n° 98-461 du 13
juin 1998 d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de
travail et des articles 39 et 39-1 de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993
quinquennale relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle
est cumulable, jusqu'au terme des accords ou conventions conclus au titre de
l'une ou l'autre des lois précitées, avec celui de la réduction de cotisations
prévue au présent article. »
« II - Supprimer les 3 à 5 du V de cet article. »
La parole est à M. Gilbert Chabroux pour présenter l'amendement n° 68.
M. Gilbert Chabroux.
C'est un amendement de conséquence.
M. le président.
La parole est à M. Roland Muzeau pour défendre l'amendement n° 112.
M. Roland Muzeau.
Nous avons largement eu l'occasion de nous exprimer sur les questions
d'allégement de charges ; je n'y reviendrai donc pas.
M. le président.
La parole est à M. Bernard Joly pour présenter l'amendement n° 28.
M. Bernard Joly.
Je le retire, monsieur le président, puisqu'il s'agissait d'un amendement de
coordination avec l'amendement n° 27 déposé à l'article 6.
M. le président.
L'amendement n° 28 est retiré.
La parole est à M. le rapporteur pour présenter les amendements n°s 10, 11 et
12, et pour donner l'avis de la commission sur les amendements n°s 68 et
112.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
La durée du travail applicable aux salariés intérimaires est
celle qui est en vigueur dans l'entreprise auprès de laquelle ils sont mis à
disposition. Dès lors, les cotisations sociales acquittées par les salariés
intérimaires travaillant dans une entreprise passée aux 35 heures, et dont les
propres salariés ouvrent droit à l'allégement « Aubry II », bénéficient
également de cet allégement.
L'objet de l'amendement n° 10 est donc de maintenir, pendant la période
transitoire visée par le présent article, cette règle pour les salariés
intérimaires travaillant dans une entreprise aux 35 heures et bénéficiant de la
nouvelle réduction de cotisations sociales.
L'amendement n° 11 apporte une précision rédactionnelle.
L'amendement n° 12 est un peu plus important.
En sa rédaction actuelle, le paragraphe V de l'article 7 énumère diverses
mesures particulières de réduction ou d'exonération de cotisations sociales qui
pourront être cumulées, pendant la période transitoire, c'est-à-dire de 2003 à
2005, avec le nouveau dispositif défini par le présent projet de loi.
Or, à l'examen, il apparaît que cette énumération est parfois redondante au
regard des règles générales et permanentes déjà posées par d'autres articles du
projet de loi.
La commission vous propose donc de simplifier la rédaction du paragraphe V de
l'article 7, simplification qui n'entraîne, il convient de le souligner, aucun
effet défavorable en droit.
La commission vous propose également de préciser que le cumul de la nouvelle
réduction avec les allégements « de Robien » et « Aubry I » est autorisé «
jusqu'au terme des accords ou conventions conclus au titre de l'une ou l'autre
des lois précitées », afin de prendre en compte la diversité des situations
envisageables.
Sont visés, notamment, certains accords « Aubry I » qui, conclus avant le 1er
janvier 2002 par des entreprises de moins de vingt salariés, viendront à
expiration en 2006-2007, soit après l'expiration des dispositions transitoires
visées à l'article 7, et après l'entrée en vigueur, au 1er juillet 2005, du
régime définitif applicable à la nouvelle réduction de cotisations.
Enfin, la commission est défavorable aux amendements n°s 68 et 112, qui sont
contraires à la position prise par la commission.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon
ministre.
Le Gouvernement est défavorable aux amendements n°s 68 et 112,
qui tendent à supprimer l'article 7.
Il est favorable aux amendements n°s 10, 11 et 12 présentés par la
commission.
M. le président.
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 68 et 112.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 10.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 11.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 12.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article n° 7, modifié.
(L'article 7 est adopté.)
Article 8
M. le président.
« Art. 8. - I. - Les articles L. 241-13-1 et L. 711-13-1 du code de la
sécurité sociale sont abrogés.
« II. - Le 1° de l'article L. 131-9 du même code est ainsi modifié :
« 1° Le
a
est abrogé ;
« 2° Au
c,
après les mots : "visée aux articles L. 241-13 et L. 711-13
du présent code", sont insérés les mots : ", à l'article 7 de la loi n° du
relative aux salaires, au temps de travail et au développement de
l'emploi".
« III. - Le code rural est ainsi modifié :
« 1° A l'article L. 741-4, les mots : ", L. 241-13 et L. 241-13-1" sont
remplacés par les mots : "et L. 241-13" ;
« 2° A l'article L. 741-15, les mots : "des articles L. 241-13 et L. 241-13-1"
sont remplacés par les mots : "de l'article L. 241-13" ;
« 3° A l'article L. 751-17, les mots : ", L. 241-13 et L. 241-13-1" sont
remplacés par les mots : "et L. 241-13".
« IV. - Dans le deuxième alinéa de l'article L. 322-4-6 du code du travail,
les mots : "L. 241-6-4, L. 241-13, L. 241-13-1 et L. 241-14 du code de la
sécurité sociale ainsi qu'aux articles L. 241-13 et L. 241-13-1 tels que visés"
sont remplacés par les mots : "L. 241-6-4, L. 241-13 et L. 241-14 du code de la
sécurité sociale ainsi qu'à l'article L. 241-13 tel que visé".
« V. - Le III de l'article 21 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 précitée
est abrogé.
« VI. - Dans l'article 8-2 de l'ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1977
précitée, la référence : "L. 241-13-1" est remplacée par la référence : "L.
241-13".
« VII. - 1. L'article 4
bis
de la loi n° 96-1143 du 26 décembre 1996
relative à la zone franche de Corse est abrogé.
« 2. L'article 50 de la loi n° 2002-92 du 22 janvier 2002 relative à la Corse
est ainsi rédigé :
«
Art. 50
. - Les entreprises situées en Corse qui remplissent les
conditions fixées à l'article 1466 C du code général des impôts peuvent, pour
les salariés auxquels sont appliquées les réductions de cotisations prévues à
l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale et à l'article 7 de la loi
n° du relative aux salaires, au temps de travail et au
développement de l'emploi, bénéficier d'une majoration de ces réductions. Le
montant de cette majoration est fixé par décret. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 69 est présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée.
L'amendement n° 113 est présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° 144, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé.
« Compléter
in fine
le VII de cet article par deux alinéas ainsi
rédigés :
« ... Les dispositions de l'article 4 de la loi n° 96-1143 du 26 décembre 1996
précitée demeurent applicables, pour les entreprises qui en remplissent les
conditions et pour la durée prévue par cet article, aux cotisations dues au
titre des gains et rémunérations versés à compter du 1er juillet 2003.
« Ces entreprises peuvent cependant renoncer à appliquer ces dispositions et
opter, en lieu et place, pour celles prévues par l'article 7 de la loi n° ...
du... relative aux salaires, au temps de travail et au développement de
l'emploi ou par l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale dans leur
rédaction issue de la loi n°... du... susvisée. Cette option concerne tous les
salariés ouvrant droit à la réduction de cotisations prévue par l'article 4
précité et est définitive. »
La parole est à M. Gilbert Chabroux pour défendre l'amendement n° 69.
M. Gilbert Chabroux.
C'est un amendement de conséquence.
M. le président.
La parole est à M. Guy Fischer pour défendre l'amendement n° 113.
M. Guy Fischer.
C'est un amendement de cohérence.
M. le président.
La parole est à M. le ministre, pour défendre l'amendement n° 114.
M. François Fillon,
ministre.
Cet amendement tend à sécuriser l'application du dispositif
spécifique d'allégement de charges mis en place par la loi du 26 décembre 1996
relative à la zone franche de Corse et qui s'éteindra au plus tard le 31
décembre 2006.
Dans les cas où le nouvel allégement prévu dans le projet de loi sera plus
favorable, les entreprises pourront renoncer au dispositif zone franche de
Corse et appliquer le nouvel allégement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
La commission est défavorable aux amendements identiques n°s
69 et 113 qui visent à supprimer l'article 8, et qui sont donc contraires à la
position qu'elle a prise.
Elle est, en revanche, favorable à l'amendement n° 144, qui apporte des
précisions utiles et nécessaires.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Il est défavorable aux amendements n°s 69 et 113.
M. le président.
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 69 et 113.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 144.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux vois l'article 8, modifié.
(L'article 8 est adopté.)
Article 9
M. le président.
« Art. 9. - L'article L. 711-13 du code de la sécurité sociale est ainsi
rédigé :
«
Art. L. 711-13
. - Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions
d'application de l'article L. 241-13 aux employeurs relevant des régimes
spéciaux de sécurité sociale des marins, des mines et des clercs et employés de
notaires. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 70 est présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée.
L'amendement n° 114 est présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer cet article. »
La parole est à M. Gilbert Chabroux pour défendre l'amendement n° 70.
M. Gilbert Chabroux.
C'est un amendement de conséquence.
M. le président.
La parole est à M. Guy Fischer pour présenter l'amendement n° 114.
M. Guy Fischer.
C'est un amendement de cohérence.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon
ministre.
Défavorable.
M. le président.
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 70 et 114.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 9.
(L'article 9 est adopté.)
Article 10
M. le président.
« Art. 10. - La deuxième phrase du premier alinéa du VI de l'article 3 de la
loi n° 98-461 du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation à la réduction du
temps de travail est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Elle vient en déduction du montant des cotisations à la charge de
l'employeur au titre des assurances sociales, des accidents du travail et
maladies professionnelles et des allocations familiales dues pour l'emploi de
chacun de ces salariés au titre des gains et rémunérations versés au cours du
mois considéré. Elle est limitée au montant des cotisations dues pour chaque
salarié concerné. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 71 est présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe Socialiste, apparenté et
rattachée.
L'amendement n° 115 est présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et
les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer cet article. »
La parole est à M. Gilbert Chabroux pour présenter l'amendement n° 71.
M. Gilbert Chabroux.
Amendement de conséquence.
M. le président.
La parole est à M. Guy Fischer pour présenter l'amendement n° 115.
M. Guy Fischer.
Amendement de cohérence.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Défavorable.
M. le président.
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 71 et 115.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 10.
(L'article 10 est adopté.)
Article 11
M. le président.
« Art. 11. - I. - Les dispositions des articles L. 241-13 et L. 711-13, dans
leur rédaction applicable avant l'entrée en vigueur de la présente loi, et L.
241-13-1 et L. 711-13-1 du code de la sécurité sociale restent applicables aux
cotisations dues au titre des gains et rémunérations versés jusqu'au 30 juin
2003.
« II. - Les dispositions des articles 6 à 10 de la présente loi sont
applicables aux cotisations dues au titre des gains et rémunérations versés à
compter du 1er juillet 2003. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 72 est présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée.
L'amendement n° 116 est présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° 13, présenté par M. Souvet, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« Dans le I de cet article, après les mots : "l'entrée en vigueur", insérer
les mots : "des articles 6 à 10". »
La parole est à M. Gilbert Chabroux pour présenter l'amendement n° 72.
M. Gilbert Chabroux.
Amendement de conséquence.
M. le président.
La parole est à M. Guy Fischer pour présenter l'amendement n° 116.
M. Guy Fischer.
Amendement de cohérence.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour présenter l'amendement n° 13.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
C'est un amendement de précision.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
La commission est défavorable aux amendements identiques n°s
72 et 116.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon
ministre.
Le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques n°s
72 et 116.
Il est en revanche favorable à l'amendement n° 13.
M. le président.
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 72 et 116.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 13.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 11, modifié.
(L'article 11 est adopté.)
Article 12
M. le président.
« Art. 12. - I. - L'article 19 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000
précitée est abrogé, à l'exception du XIV.
« II. - Au XIV de l'article 19 de la même loi, les mots : "préalablement ou
postérieurement à la réduction du temps de travail" sont supprimés.
« III. - Continuent à produire leurs effets, sous réserve de l'application des
dispositions de l'article L. 132-8 du code du travail :
« 1° Les accords signés avant l'entrée en vigueur du présent article par un
salarié mandaté par une organisation syndicale en application du VI de
l'article 19 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 précitée ;
« 2° Les accords négociés avec un ou plusieurs délégués du personnel et
approuvés par les salariés à la majorité des salariés exprimés en application
du VII de l'article 19 de la même loi, validés avant l'entrée en vigueur du
présent article.
« Ces accords peuvent être également renouvelés ou révisés dans les mêmes
conditions. Ils cessent de produire leurs effets en cas de conclusion d'un
accord collectif négocié en application des articles L. 132-18 et suivants du
code du travail et s'y substituant.
« IV. - Les salariés mandatés en application du VI de l'article 19 de la loi
n° 2000-37 du 19 janvier 2000 précitée bénéficient de la protection qui leur a
été octroyée au titre du dernier alinéa du VI de cet article dans les
conditions prévues par ces dispositions.
« Les dispositions de l'alinéa précédent sont applicables en cas de
renouvellement ou de révision d'un accord dans les conditions définies au VI de
l'article 19 de la même loi.
« V. - L'article 20 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 précitée est
abrogé.
« VI. - Les dispositions du présent article entrent en vigueur le 1er juillet
2003. »
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 73 est présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée.
L'amendement n° 117 est présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° 14, présenté par M. Souvet, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« Dans le troisième alinéa (2°) du III de cet article, remplacer les mots :
"majorité des salariés exprimés" par les mots : "majorité des suffrages
exprimés". »
L'amendement n° 74, présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe socialiste, apparenté et
rattachée, est ainsi libellé :
« Compléter le dernier alinéa du III de cet article par une phrase ainsi
rédigée :
« L'accord de substitution doit avoir été signé par une ou des organisations
syndicales représentatives dans l'entreprise ayant recueilli la majorité des
suffrages exprimés lors des dernières élections au comité d'entreprise ou, à
défaut, aux délégués du personnel ; si cette condition n'est pas satisfaite,
l'accord doit avoir été approuvé par les salariés à la majorité des suffrages
exprimés dans les conditions prévues au VI de l'article 19 de la loi n° 2000-37
du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail. »
La parole est à M. Chabroux pour présenter l'amendement n° 73.
M. Gilbert Chabroux.
Avec cet article 12, le Gouvernement entend abroger l'article 19 de la loi du
19 janvier 2000, relatif aux deux méthodes de négociation et de signature
d'accords collectifs qui ont été expérimentées : le mandatement d'un salarié
par une organisation syndicale représentative pour les entreprises ne disposant
pas d'un délégué syndical et la nécessité d'obtenir un accord majoritaire -
ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés - pour ouvrir droit à un
allégement de cotisations.
Les deux lois relatives à la réduction du temps de travail se sont traduites
par un enrichissement sans précédent de la vie démocratique au sein de
l'entreprise. Chacun mesure l'investissement que représentent, pour des
milliers de nos concitoyens, les 35 000 accords d'entreprise qui ont été
signés, depuis 1999, suite à ces deux textes fondamentaux. Malgré ce bilan, le
Gouvernement veut romptre avec ce que les organisations syndicales ont qualifié
de « grand progrès ».
Le projet de loi abroge également les dispositions relatives au contrôle du
contenu de l'accord et à son suivi, ainsi qu'à la formation des salariés
mandatés. En cas de renégociation de l'accord, ceux-ci ne bénéficieront
d'ailleurs plus d'un crédit d'heures rémunérées. Ils demeureront seulement
protégés contre un licenciement abusif. En effet, de nombreux employeurs ont
très mal perçu cette « intrusion » d'un syndicat dans leur entreprise.
Sous couvert de simplification technique, le projet de loi marque une volonté
de retour en arrière qui correspond aux revendications exprimées depuis
toujours par les représentants du patronat, qui voient dans toute modalité de
contrôle, voire de négociation, un alourdissement, une rigidité.
Il convient de remettre cet article en relation avec la volonté du Medef de «
refondation sociale » et ses intentions, soutenues par le Gouvernement, de
relancer la négociation sur « les voies et moyens de la négociation collective
». Dans cette perspective, il semble hasardeux au Gouvernement de laisser
perdurer dans la loi des dispositions qui permettent le mandatement ou
formulent une exigence de majorité pour la validation d'un accord. La
possibilité de signer des accords avec un seul syndicat minoritaire est
beaucoup plus confortable.
Pour toutes ces raisons, nous présentons cet amendement de suppression de
l'article 12.
M. le président.
La parole est à M. Guy Fischer pour défendre l'amendement n° 117.
M. Guy Fischer.
Il s'agit d'un amendement de cohérence.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour présenter l'amendement n° 14.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
C'est la rectification d'une erreur matérielle.
M. le président.
La parole est à M. Gilbert Chabroux pour défendre l'amendement n° 74.
M. Gilbert Chabroux.
Il s'agit, là encore, de la règle de l'accord majoritaire.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Par cohérence, le Gouvernement est défavorable aux amendements
identiques n°s 73 et 117, ainsi qu'à l'amendement n° 74, et il est favorable à
l'amendement n° 14.
M. le président.
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 73 et 117.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 14.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 74.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 12, modifié.
(L'article est adopté.)
Article additionnel après l'article 12
M. le président.
L'amendement n° 29, présenté par M. Joly, est ainsi libellé :
« Après l'article 12, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Le deuxième alinéa de l'article L. 122-3-4 du code du travail est complété
par la phrase suivante : "En vue d'améliorer la formation professionnelle des
salariés sous contrat de travail à durée déterminée, une convention ou un
accord collectif de branche étendu peut également prévoir de limiter ce
versement à hauteur de 6 %, dès lors que des contreparties sont offertes, dans
cette perspective, à ces salariés, notamment sous la forme d'un accès
privilégié à la formation professionnelle. Dans ce cas, la convention ou
l'accord collectif de branche étendu peut prévoir les conditions dans
lesquelles ces salariés peuvent suivre, en dehors du temps de travail effectif,
une action de développement des compétences telle que définie à l'article L.
932-2, ainsi qu'un bilan de compétences. Ces actions sont assimilées à des
actions de formation ou de bilan de compétences réalisées dans le cadre du plan
de formation au titre du 1° de l'alinéa 3 de l'article L. 951-1 du présent
code." »
La parole est à M. Bernard Joly.
M. Bernard Joly.
En 1990, un dispositif conventionnel et légal de congé individuel de formation
spécifique aux anciens titulaires de contrat de travail à durée déterminée a
été institué, afin de compenser la précarité de leur situation souvent
engendrée par un déficit de formation professionnelle.
Il est aujourd'hui indispensable de renforcer ce dispositif en permettant aux
partenaires sociaux, dans les branches professionnelles où existe un manque de
main-d'oeuvre qualifiée, d'affecter à l'amélioration de la formation
professionnelle des salariés sous contrat à durée déterminée une partie des
sommes destinées à compenser la précarité de la situation de ces salariés.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Cet amendement concerne les indemnités de fin de contrat pour
les salariés recrutés sous contrat à durée déterminée. Il vise à revenir sur
une disposition qui a été adoptée dans la loi de modernisation sociale. Or le
Gouvernement a annoncé le prochain dépôt d'un projet de loi modifiant certaines
mesures de ce texte d'ici à la fin de l'année.
Il paraît donc plus approprié de reporter l'examen de cet amendement à ce
moment-là. C'est d'ailleurs ce que je souhaite entendre de la part de M. le
ministre.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon
ministre.
Monsieur Joly, vous venez d'évoquer un réel problème, auquel je
suis très sensible. L'amendement que vous proposez permettrait effectivement
d'y apporter une réponse satisfaisante. Simplement, comme vient de le dire M.
le rapporteur, il faudrait plutôt intégrer les mesures proposées par cet
amendement dans le texte que prépare le Gouvernement et qui sera présenté au
Parlement au cours de cette session. En effet, ce texte concernera la
modification ou la suspension d'un certain nombre de dispositions de la loi de
modernisation sociale.
En adoptant aujourd'hui cet amendement, compte tenu de la nature même du texte
en discussion, il y aurait un risque évident de voir cette mesure qualifiée de
« cavalier ». Je m'engage donc devant vous, monsieur le sénateur, à introduire
la disposition que vous proposez ici dans le projet de loi qui sera soumis au
Parlement au cours de cette session.
M. le président.
Monsieur Joly, l'amendement est-il maintenu ?
M. Bernard Joly.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 29 est retiré.
Article 13
M. le président.
« Art. 13. - Sont réputées signées sur le fondement de la présente loi les
stipulations des conventions ou accords collectifs de branche étendus ou des
accords d'entreprise ou d'établissement conclus en application des lois n°
98-461 du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation relative à la réduction du
temps de travail et n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction
négociée du temps de travail. »
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 75 est présenté par MM. Chabroux, Godefroy, Weber et Domeizel,
Mmes San Vicente, Printz et les membres du groupe Socialiste, apparenté et
rattachée.
L'amendement n° 118 est présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et
les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer cet article. »
Les deux amendements suivants sont présentés par M. Joly.
L'amendement n° 30 est ainsi libellé :
« Dans cet article, remplacer les mots : "signées sur le fondement de la
présente loi" par les mots : "légales à la date de leur signature". »
L'amendement n° 31 est ainsi libellé :
« Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, les contingents d'heures supplémentaires fixés par des
conventions ou accords collectifs de branche conclus sur le fondement de
dispositions législatives antérieures cessent d'être applicables à la date
d'entrée en vigueur de la présente loi lorsque leur volume est inférieur à
celui du contingent visé au 1er alinéa de l'article L. 212-6. »
La parole et à M. Gilbert Chabroux pour présenter l'amendement n° 75.
M. Gilbert Chabroux.
Cet amendement tend, je le rappelle, à supprimer l'article 13. Si l'on
considère le contenu de ce projet de loi, cet article s'avère indispensable à
la poursuite de votre politique, monsieur le ministre.
Je rappelle en effet que, en droit du travail, il est constant que, lorsqu'une
disposition améliore la situation des salariés, c'est cette disposition qui
s'applique. C'est sur cette base que les accords collectifs en vigueur
pourront, le cas échéant, être améliorés.
L'innovation apportée par ce texte est de modifier de façon importante le
droit du travail, mais de manière régressive, et notoirement contre l'avis des
partenaires sociaux.
Monsieur le ministre, vous essayez donc de prendre les devants en prévoyant
dès à présent que les accords collectifs, par exemple ceux qui fixaient un
contingent d'heures supplémentaires supérieur à 130 heures, sont réputés signés
sur le fondement de votre loi. Dans les faits, c'est à l'évidence une
contre-vérité.
Juridiquement, votre validation législative n'intervient pas, comme c'est
habituellement le cas, à la suite d'une décision judiciaire. Elle n'existe que
pour imposer, contre l'avis des partenaires sociaux, le caractère obligatoire
d'accords qui, à l'époque, n'avaient pas été étendus, parce que non conformes à
la loi. C'est un acte très grave et nous voterons évidemment contre l'article
13.
M. le président.
La parole est à M. Guy Fischer pour défendre l'amendement n° 118.
M. Guy Fischer.
Cet article introduit à l'Assemblée nationale avec un avis favorable du
Gouvernement vise à sécuriser les accords conclus en application des lois «
Aubry I » et « Aubry II ».
Les partenaires sociaux que nous avons auditionnés ont confirmé ce que nous
pensions de ces dispositions, à savoir qu'elles posent beaucoup plus de
questions qu'elles ne permettent d'apporter de réponses, alors qu'elles
devraient être l'objet d'un article de « sécurisation ».
La CGT a précisé que « l'amendement (...) ne dissipait pas l'inquiétude des
syndicats et créait, en outre, les conditions pour la légalisation d'accords
jusqu'ici illégaux ».
L'Union professionnelle artisanale, l'UPA, quant à elle, a constaté qu'un
certain nombre d'accords signés et dont l'extension avait été refusée par Mme
Elisabeth Guigou, pourraient trouver leur mise en oeuvre par le biais du
présent projet de loi.
Est-ce à dire, par exemple, que les dispositions de ces accords dérogatoires
au droit commun, notamment pour les cadres, seraient validées ?
Vous observez, monsieur le rapporteur, que le présent article n'aborde pas la
question de l'effet de la future loi sur l'équilibre général des accords. Nous
considérons que cette impasse est regrettable au regard des modifications
engendrées par la nouvelle loi sur le déclenchement des repos compensateurs
obligatoires. Ne sachant pas ce qu'elle nous propose de sécuriser, nous
préférons supprimer les présentes dispositions.
M. le président.
La parole est à M. Bernard Joly pour défendre les amendements n°s 30 et 31.
M. Bernard Joly.
L'amendement n° 30 a pour objet de valider, par la voie législative, les
accords collectifs conclus dans le cadre de la réduction légale de la durée du
travail de 39 heures à 35 heures avant le vote de la loi en discussion.
L'amendement n° 31 concerne les contingents conventionnels d'heures
supplémentaires prévus par les accords collectifs de branche. Ces accords ont
été négociés dans un contexte législatif entièrement différent de celui qui
résulte de la présente loi. Ils ne répondent donc ni aux prescriptions ni aux
intentions de cette dernière.
Dans l'attente de la conclusion de nouveaux accords collectifs fixant le
volume des contingents d'heures supplémentaires, c'est donc le contingent légal
fixé par le décret prévu au premier alinéa de l'article L. 212-6 du code du
travail qui doit s'appliquer lorsque son volume est supérieur à celui des
contingents conventionnels.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
La commission émet un avis défavorable sur les amendements
identiques n°s 75 et 118.
On voit mal pourquoi nos collègues refusent le principe de la « sécurisation »
des accords, principe qu'ils avaient eux-mêmes introduit dans la loi du 19
janvier 2000.
S'agissant de l'amendement n° 30, la rédaction actuelle de l'article 13 paraît
suffisante en matière de « sécurisation » des accords déjà conclus.
Il importe, en outre, que ces accords trouvent leur plein effet au vu des
dispositions de la présente loi. On ne saurait raisonnablement envisager qu'ils
puissent y déroger.
J'ajoute que l'amendement introduit par la commission à l'article 2 a permis
de résoudre l'importante question de l'effet de la loi sur l'équilibre des
accords actuellement applicables.
La commission souhaite donc que notre collègue Bernard Joly retire cet
amendement.
En ce qui concerne l'amendement n° 31, il est incompatible avec l'amendement
présenté par la commission à l'article 2, qui a apporté une autre réponse en
matière de contingents conventionnels.
En outre, il n'apparaît pas souhaitable d'appeler les partenaires sociaux à
renégocier les accords déjà conclus, au moment même où l'auteur de l'amendement
cherche parallèlement à les sécuriser.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement n° 31.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques n°
75 et 118, qui visent à supprimer l'article 13.
Comme je l'ai déjà indiqué à propos des accords précédemment conclus, le
Gouvernement entend respecter pleinement la volonté des partenaires sociaux.
Cet article 13 vise donc à donner aux accords conclus en application des lois
précédentes leur plein effet au regard des dispositions de la nouvelle loi.
Au nom de l'intérêt général, l'Etat a entendu poser ce principe clair qui
consiste à examiner les précédents accords en fonction des règles simples qui
sont maintenant édictées par la loi. Le Gouvernement est donc évidemment opposé
à la suppression de l'article 13.
Il est également défavorable à l'amendement n° 30, car il aurait pour effet de
« complexifier » davantage la situation en matière de temps de travail.
Il préfère, dans cette logique, la formulation suivante : « Sont réputées
signées, sur le fondement de la présente loi, les stipulations des accords
conclus antérieurement. »
En ce qui concerne l'amendement n° 31, le Gouvernement souhaite, comme la
commission, que M. Joly puisse le retirer.
Cet amendement met en lumière un certain nombre de difficultés d'application
des textes, mais la solution qu'il prévoit nous semble très brutale : elle
remet en cause tous les accords conclus avant l'entrée en vigueur de la
présente loi. Or les situations peuvent être très différentes selon la date de
signature des accords.
Les accords conclus selon les lois de 1998 et 2000 s'inscrivent dans le cadre
imposé des 35 heures. Les solutions envisagées sont souvent passées par un
relèvement du contingent.
Mais, s'agissant des accords qui ont été signés avant 1998, les branches
concernées seront vraisemblablement amenées à les renégocier. C'est la raison
pour laquelle cet amendement est, me semble-t-il, sans effet.
M. le président.
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 75 et 118.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président.
L'amendement n° 30 est-il maintenu, monsieur Joly ?
M. Bernard Joly.
Je le retire, puisque M. le rapporteur a dit qu'il était satisfait.
M. le président.
L'amendement n° 30 est retiré.
Qu'en est-il de l'amendement n° 31, monsieur Joly ?
M. Bernard Joly.
Je ne veux surtout pas être brutal, et encore moins complexifier la situation,
monsieur le président.
(Sourires.)
Aussi je retire l'amendement.
M. le président.
L'amendement n° 31 est retiré.
Je mets aux voix l'article 13.
(L'article 13 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 13
M. le président.
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 15 rectifié, présenté par MM. César, Bailly, Besse, Bizet,
Cazalet, Doublet, Dubrule, Flandre, François, Gérard, Goulet, Leclerc, Le
Grand, Chérioux et Marini, est ainsi libellé :
« Après l'article 13, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 122-1-1 du code du travail est complété
in fine
par un
alinéa ainsi rédigé :
« 5° Remplacement d'un chef d'exploitation agricole ou d'entreprise tels que
définis au 1° à 4° de l'article L. 722-1 du code rural, d'un aide familial,
d'un associé d'exploitation, ou de leur conjoint visé à l'article L. 722-10 du
code rural dès lors qu'il participe effectivement à l'activité de l'entreprise
ou de l'exploitation agricole. »
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 16 rectifié est présenté par M. Arnaud et les membres du
groupe de l'Union centriste.
L'amendement n° 138 est présenté par M. Lardeux.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Après l'article 13, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 122-1-1 du code du travail est complété
in fine
par un
alinéa ainsi rédigé :
« 5° Remplacement d'un chef d'entreprise ou d'un exploitant agricole tel que
défini par l'article L. 722-1 du code rural, ou de son conjoint ou d'un
collaborateur non salarié dès lors qu'il participe effectivement à l'activité
de l'entreprise ou de l'exploitation agricole. »
La parole est à M. Hilaire Flandre pour présenter l'amendement n° 15
rectifié.
M. Hilaire Flandre.
Cet amendement vise à rendre possible l'utilisation de contrats à durée
déterminée en cas de remplacement provisoire d'un chef d'exploitation ou d'une
personne non salariée travaillant sur une exploitation agricole.
M. le président.
La parole est à M. Louis Moinard pour défendre l'amendement n° 16 rectifié.
M. Louis Moinard.
En prévoyant un nouveau cas de recours au contrat à durée déterminée, le
présent amendement tend à donner une base légale à une pratique indispensable à
la poursuite des activités des plus petites entreprises et des exploitations
agricoles. En effet, la variation saisonnière de la charge de travail ou
l'imprévisibilité des motifs d'indisponibilité - maladies et accidents -
exigent de pouvoir recourir au CDD.
Notre proposition est très proche d'inspiration de celle que vient de
présenter M. Flandre.
M. Alain Gournac.
Très bien !
M. le président.
L'amendement n° 138 n'est pas soutenu.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 15 rectifié et 16
rectifié ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
La commission est favorable à ces deux amendements.
Cependant, elle pense que l'amendement n° 16 rectifié pourrait être retiré au
bénéfice de l'amendement n° 15 rectifié.
Ces deux amendements, très proches d'inspiration, visent à introduire un
nouveau cas de recours au CDD : le remplacement temporaire du chef
d'exploitation agricole, de son conjoint et du collaborateur ou des
collaborateurs non salariés.
Nous sommes très favorables, sur le fond, à cedispositif.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
Le Gouvernement comprend le souci qui anime les auteurs de ces
amendements. Cependant, comme je le disais précédemment à M. Joly, un tel
dispositif est un véritable cavalier par rapport au texte qui vous est soumis,
ce qui constitue un risque d'inconstitutionnalité majeur.
M. Hilaire Flandre.
C'est vrai !
M. François Fillon,
ministre.
C'est la raison pour laquelle je souhaite, messieurs les
sénateurs, que vous retiriez ces amendements, que je m'engage à reprendre à
l'occasion d'un examen des cas de recours au contrat à durée déterminée.
M. le président.
Monsieur Flandre, l'amendement n° 15 rectifié est-il maintenu ?
M. Hilaire Flandre.
Monsieur le président, j'ai bien entendu l'engagement que vient de prendre M.
le ministre et, pour ne pas compliquer les choses, je retire mon amendement.
M. le président.
L'amendement n° 15 rectifié est retiré.
Monsieur Moinard, l'amendement n° 16 rectifié est-il maintenu ?
M. Louis Moinard.
Constatant tout à la fois que le problème est pris en considération par la
commission et que M. le ministre s'engage à reprendre ultérieurement notre
proposition, je retire l'amendement.
M. le président.
L'amendement n° 16 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 32, présenté par M. Joly, est ainsi libellé :
« Après l'article 13, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 141-2 du code du travail est complété par trois alinéas ainsi
rédigés :
« Pour l'application de l'alinéa précédent, doivent être pris en
considération, en tant qu'éléments constitutifs du pouvoir d'achat du salarié,
l'ensemble des sommes, quelle qu'en soit la périodicité, supportant les
cotisations de sécurité sociale et versées en contrepartie ou à l'occasion du
travail, y compris les avantages en nature, à l'exception des remboursements de
frais et des majorations pour heures supplémentaires prévues par la loi.
« Toutefois, les avantages en nature portant sur la nourriture et sur le
logement sont évalués, respectivement, dans la limite de valeurs fixées par
décret.
« Lorsqu'un élément de rémunération ou un avantage en nature est attribué
selon une périodicité supérieure au mois, la vérification de l'application du
salaire minimum de croissance peut être opérée sur l'année civile, au plus tard
le 31 décembre, ou, en cas de cessation du contrat de travail avant cette date,
à la date de la rupture. La garantie est alors égale à la somme des garanties
mensuelles correspondant aux périodes de travail effectif accomplies au cours
de l'année civile. »
L'amendement n° 33, également présenté par M. Joly, est ainsi libellé :
« Après l'article 13, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 141-2 du code du travail est complété par un alinéa ainsi
rédigé :
« Lorsqu'un élément de rémunération ou un avantage en nature est attribué
selon une périodicité supérieure au mois, la vérification de l'application du
salaire minimum de croissance peut être opérée sur l'année civile, au plus tard
le 31 décembre, ou, en cas de cessation du contrat de travail avant cette date,
à la date de la rupture. La garantie est alors égale à la somme des garanties
mensuelles correspondant aux périodes de travail effectif accomplies au cours
de l'année civile. »
La parole est à M. Bernard Joly.
M. Bernard Joly.
Il s'agit d'inclure dans le salaire réellement perçu, pour vérifier la
conformité de ce salaire réel au SMIC, certains éléments de rémunération soumis
à cotisations sociales que la loi n'a jamais exclus, mais que la jurisprudence
a écartés : la prime d'ancienneté, la prime d'assiduité, la prime de sujétion,
la prime collective de résultat et le treizième mois.
M. le président.
Voulez-vous présenter également l'amendement n° 33, mon cher collègue ?
M. Bernard Joly.
Monsieur le président, je souhaiterais entendre d'abord l'avis de la
commission et du Gouvernement sur l'amendement n° 32.
M. le président.
Quel est donc l'avis de la commission sur l'amendement n° 32 ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
La commission a fait le choix de ne pas modifier au-delà de
la période transitoire les modalités de fixation de la revalorisation du SMIC.
Sur ce plan-là, elle n'a pas changé et ne changera pas de position. Elle a donc
émis un avis défavorable sur l'amendement n° 32 ainsi que sur l'amendement n°
33, qui concernent l'un et l'autre le SMIC.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 32 ?
M. François Fillon,
ministre.
Mesdames, messieurs les sénateurs, lorsque le Gouvernement
s'est engagé, après l'avis du Conseil économique et social, sur la voie de
l'harmonisation rapide des SMIC par le haut, ce même débat a eu lieu, notamment
au sein de ce conseil. La question a été posée de savoir s'il fallait, à
l'occasion de cette harmonisation, réformer en profondeur notre salaire
minimum. Le Gouvernement ne l'a pas souhaité, et c'est un acte qu'il
revendique. En effet, nous considérons que le SMIC, dans notre pays, a une
valeur qui va bien au-delà de celle d'une simple variable technique ; c'est un
symbole, qui sert d'ailleurs de référence pour l'élaboration de l'ensemble des
grilles de salaires.
Il convient donc que le SMIC conserve son caractère général qu'il perdrait
s'il intégrait des éléments périphériques tenant au contexte dans lequel le
travail est exécuté. Aujourd'hui, nous avons besoin de donner aux salariés, en
particuler aux plus modestes d'entre eux, un horizon stable.
Cet horizon, c'est l'harmonisation par le haut ; c'est aussi l'augmentation
des salaires, qui étaient stagnants depuis plusieurs années, en raison, en
particulier, de l'effet des lois sur la réduction du temps de travail. Il
convient que ce cadre reste stable, que ce salaire de référence reste général,
raison pour laquelle le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n° 32
que présente M. Joly.
M. le président.
Monsieur Joly, maintenez-vous l'amendement n° 32 ?
M. Bernard Joly.
Eternel optimiste, j'avais espéré que l'amendement n° 32 serait accepté ; dans
cette hypothèse, je n'aurais pas présenté l'amendement n° 33.
M. le président.
L'amendement n° 32 est retiré.
Veuillez maintenant présenter l'amendement n° 33, monsieur Joly.
M. Bernard Joly.
Cet amendement, qui reprend le troisième alinéa de l'amendement n° 32, avait
pour objet d'inclure dans le salaire réellement perçu, pour vérifier la
conformité de ce salaire réel au SMIC, un seul élément de rémunération soumis à
cotisations sociales, le treizième mois.
Cela étant, compte tenu des propos tant de M. le rapporteur que de M. le
ministre je retire l'amendement n° 33.
M. le président.
L'amendement n° 33 est retiré.
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M.
Gruillot pour explication de vote.
M. Georges Gruillot.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de
loi que nous examinons depuis hier, maintenant, paraît à même de répondre avec
efficacité aux principales difficultés nées de la législation mise en place en
2000 concernant la réduction du temps de travail.
Il fait appel largement à la négociation collective, principe directeur de
l'action du Gouvernement. Ainsi, sans remettre en cause la durée légale des 35
heures, ce texte permet aux partenaires sociaux de se réapproprier le thème de
la réduction du temps de travil.
Par ailleurs, il résout l'épineux problème des SMIC multiples et améliore les
dispositifs d'allégement des charges sociales tout en les simplifiant.
Avec ce texte, le Gouvernement respecte les engagements pris par la majorité
nationale pendant la campagne électorale du printemps dernier, et répond ainsi
aux aspirations des Français.
Je tenais à remercier, au nom de mon groupe, notre collègue Louis Souvet pour
son excellent rapport...
M. François Trucy.
Très bien !
M. Georges Gruillot.
... et pour les propositions d'amélioration qu'il a présentées et qui ont été
adoptées par le Sénat, notamment en ce qui concerne le renvoi à la négociation
collective du soin de déterminer les catégories de cadres pouvant bénéficier du
forfait annuel en jours.
C'est pourquoi, monsieur le ministre, le groupe du RPR votera votre projet de
loi.
(Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président.
La parole est à M. Gilbert Chabroux.
M. Gilbert Chabroux.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous
arrivons donc au terme de ce débat qui marquera aussi, pour de nombreux
salariés, surtout dans les petites entreprises, le terme des 35 heures !
Nous avons pu confronter nos points de vue, nos politiques par rapport au
salaire, au temps de travail, au développement de l'emploi. La confrontation a
été directe. Nous sommes allés au bout de nos convictions, ce qui est la règle
démocratique que nous nous devons d'appliquer et de respecter.
Où en sommes-nous ?
Alors que le Gouvernement et sa majorité prétendaient assouplir les « lois
Aubry » et corriger leurs imperfections, c'est à une entreprise de destruction
que vous vous êtes méthodiquement livrés, contre l'avis des syndicats de
salariés, faut-il encore le rappeler.
Que résulte-t-il de nos débats, après une lecture dans chaque assemblée ?
Voyons point par point.
Dorénavant, les entreprises à 39 heures resteront à 39 heures. Plus rien,
surtout pas les allégements de cotisations patronales sans condition, ne
viendra les inciter à réduire la durée du travail. Les entreprises n'auront
plus aucun intérêt financier à le faire. Celles qui sont à 35 heures pourront,
comme l'a dit M. le Premier ministre, revenir à 39 heures, avec un coût de 10 %
pour les quatre premières heures supplémentaires, ce qui représente, à
l'échelle d'un salaire mensuel, 1 % d'augmentation, c'est-à-dire rien, en tout
cas rien qui puisse encourager les salariés à effectuer ces heures
supplémentaires.
En clair, les heures supplémentaires non ou peu majorées seront obligatoires
pour les salariés. Il me semble que cela ne correspond pas vraiment à votre
slogan électoral : « Travailler plus pour gagner plus. »
La modification du seuil de déclenchement du repos compensateur va se traduire
pour beaucoup par une semaine de congé en moins. Là non plus, on ne voit pas
quel bénéfice les salariés peuvent en escompter.
M. Hilaire Flandre.
Il faut leur demander !
M. Gilbert Chabroux.
Ils l'ont déjà dit !
M. Claude Domeizel.
Et il le rediront !
M. Gilbert Chabroux.
Et ils le rediront et ils le constateront de plus en plus !
M. Alain Gournac.
Ils se sont déjà exprimés !
M. Hilaire Flandre.
Oui, dans les urnes !
Mme Sylvie Desmarescaux.
Et Mme Aubry a perçu le sens de leur réponse !
M. Gilbert Chabroux.
L'annualisation systématique du calcul de la durée du travail sans référence
hebdomadaire va conduire aussi à la perte de jours de congé. Surtout, elle est
une incitation à la flexibilité. De même, plusieurs dispositions portant des
allégements seront une autre incitation au recours au temps partiel.
Le compte épargne-temps monétarisé perd toute son originalité et aussi tout
intérêt pour les salariés. Sans jeu de mots, pourquoi épargner des jours qui
sont convertis en sommes d'argent placées sur un compte bloqué sans intérêts
?
La modération salariale devient aussi la règle pour les smicards. La fin des
SMIC multiples vous offre, monsieur le ministre, l'opportunité de modifier la
règle d'indexation du SMIC, et ce dans un sens totalement défavorable aux
salariés.
Les cadres et aussi les itinérants non cadres voient les règles qui
régissaient encore leur durée du travail exploser sous le coup du forfait tous
azimuts. Les règles européennes de base demeureront seules applicables.
Les petites entreprises elles-mêmes sont inquiètes des difficultés qu'elles
vont désormais connaître pour recruter des personnels qui seront
immanquablement plus attirés par un temps de travail réduit et des conditions
de travail plus favorables.
Vous nous avez maintes fois reproché d'avoir fait avec les lois Aubry, comme
d'ailleurs avec tous les textes qui n'allaient pas dans le sens du MEDEF, des
usines à gaz. Votre projet de loi est une usine à inégalités, entre les
salariés comme entre les entreprises, aspect inattendu de votre politique. Vous
créez une fracture de plus !
Surtout, ce texte jouera contre l'emploi. Les dispositions que je viens
d'énumérer ne peuvent manquer d'inciter les entreprises à recourir aux heures
supplémentaires et à la flexibilité, donc à ne pas embaucher. Le Président de
la République en campagne, le Premier ministre, vous-même, monsieur le
ministre, nous avez dit que votre première préoccupation était l'emploi.
Pourquoi alors prenez-vous des mesures dont vous ne pouvez ignorer qu'elles
aggraveront la situation ?
M. Hilaire Flandre.
Cela, c'est votre opinion.
M. Gilbert Chabroux.
Tout simplement pour des raisons qui ne sont que budgétaires s'agissant des
emplois-jeunes et pour complaire au MEDEF s'agissant des 35 heures ! Aucune
mesure n'est positive et ne constitue une politique active en faveur de
l'emploi.
Le contrat jeune en entreprise est l'expression d'un choix plus idéologique
que logique. Il ne déclenchera pas de décision d'embauche.
Les 35 heures ont eu un effet significatif sur l'emploi...
MM. Alain Gournac et Roger Karoutchi.
Oh !
M. Gilbert Chabroux.
... avec plus de 300 000 emplois créés depuis 1998.
Les 35 heures ont été une occasion de renouveler le dialogue social dans
nombre d'entreprises et de branches auxquelles elles ont donné du grain à
moudre.
M. Alain Gournac.
Ça oui !
M. Gilbert Chabroux.
Les 35 heures ont permis l'amélioration des conditions de vie de 10 millions
de salariés, salariés qui ne veulent plus revenir en arrière.
M. Alain Gournac.
Faux !
M. Gilbert Chabroux.
Les salaires ont été maintenus et le pouvoir d'achat a augmenté de 1 % par an
entre 1997 et 2002.
M. le président.
Veuillez conclure, je vous prie, monsieur Chabroux.
M. Gilbert Chabroux.
J'en ai presque terminé, monsieur le président.
C'est un coup d'arrêt brutal qui est porté à cette dynamique, dans un contexte
de morosité et de rigueur annoncée.
M. Alain Gournac.
C'est un coup d'arrêt pour la gauche !
M. Gilbert Chabroux.
Comme d'habitude, la droite va avec cette politique à contre-courant, non
seulement des aspirations des salariés, mais aussi du mouvement historique de
réduction du temps de travail, un mouvement qui ne fait que refléter
l'aspiration des hommes et des peuples à plus de liberté personnelle et
d'accomplissement de soi. Martine Aubry avait compris qu'il fallait s'en saisir
et le gouvernement de gauche en avait fait une politique !
Mme Valérie Létard.
Les Lillois ont compris !
M. Roger Karoutchi.
Tous les Français ont compris !
M. Guy Fischer.
Seulement 14 % des inscrits !
M. Gilbert Chabroux.
Nous voici maintenant dans une ère différente où le profit immédiat de
quelques-uns remplace l'homme au centre des préoccupations politiques. Ce
projet de loi en est l'illustration détaillée de par les mesures qu'il
contient. C'est donc dans une perspective d'opposition sans concession à cette
politique totalement opposée à nos valeurs que nous voterons contre ce texte.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Hilaire Flandre.
Il n'est même pas convaincu !
M. le président.
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau.
En abandonnant les 35 heures, en augmentant le nombre d'heures
supplémentaires, la majorité de droite prend
de facto
la décision de
réduire le volume des embauches dans les entreprises.
A cela, je l'ai dit, s'ajoutera la suppression de 73 000 emplois-jeunes qui
vont se retrouver sur le marché du travail.
Pour satisfaire les exigences du MEDEF, avec votre majorité, vous réduisez le
taux de rémunération des heures supplémentaires, vous organisez la suppression
des jours de repos compensateur et, avec une annualisation, vous supprimez les
congés payés.
Pour les salariés payés au SMIC, vous jouez du mécontentement légitime de ceux
qui ont subi, à la suite du passage aux 35 heures, un gel de leur salaire. Par
l'annonce d'une augmentation de 11,4 % du taux horaire du SMIC, vous laissez
espérer un gain équivalent de pouvoir d'achat, alors que vous savez
pertinemment qu'il n'atteindra pas ce taux.
S'agissant du SMIC, vous donnez satisfaction à une vieille revendication du
MEDEF en supprimant l'indexation sur les gains de pouvoir d'achat des
salaires.
Pour faire échec aux droits des salariés, vous légiférez exclusivement pour
annuler les effets de décisions de justice très symboliques.
Vous avez adopté des dispositions graves concernant les personnels cadres.
Vous donnez au patronat la liberté de modifier le positionnement de milliers
de salariés en faisant voler en éclats les droits et protections de ceux-ci.
L'accroissement exponentiel de la flexibilité du travail comme celui de la
productivité au cours de ces dix dernières années ne suffisant pas au MEDEF et
à la droite, vous avez entériné la modification scandaleuse concernant le
régime des astreintes. Nous en avons apporté la plus claire des
démonstrations.
Vous êtes resté sourd, monsieur le ministre, à l'opposition unanime des
organisations syndicales, montrant ainsi votre mépris à l'égard de tous ceux
que vous qualifiez par ailleurs de « partenaires sociaux ».
Votre majorité a adopté, voire amplifié nombre de dispositions qui auront pour
effet d'accroître la précarité du travail et le recours au temps partiel en
même temps qu'elles feront grandir le sentiment d'abandon déjà ressenti par des
millions de travailleurs pauvres.
Sous couvert de simplification du droit du travail, vous bouleversez toute la
hiérarchie des normes. Vous avez clairement décidé que la loi deviendrait
subsidiaire en privilégiant le contrat.
Au nom de leurs conséquences financières, vous balayez les droits, pourtant
confirmés devant les tribunaux, accordés aux salariés du secteur social et
médico-social.
Les allégements de charges se cumulent et enflent à nouveau sans aucune
contrepartie pour les salariés.
Ce trop bref rappel de vos décisions et orientations, mesdames, messieurs de
la majorité, montre à quel point le patronat a réussi à mettre la main sur les
pouvoirs de décision au plus haut niveau de l'Etat. Nos débats ont mis en
évidence la gouvernance actuelle des entreprises que dénoncent les
syndicats.
Malgré les consignes strictes que le Premier ministre a imposées à sa
majorité, plusieurs de nos collègues de droite nous ont donné des exemples
savoureux qui éclairent les ambitions et les attentes ultralibérales qui
agitent - encore lui - le MEDEF. La présentation au mot et à la virgule près de
tous les amendements transmis par le baron Seillière a eu le mérite d'alerter
tous les observateurs attentifs.
En conclusion, je formule une dernière proposition visant à modifier
l'intitulé du projet de loi. Monsieur le ministre, vous pourriez l'intituler «
projet de loi pour la baisse des salaires, l'augmentation du temps de travail
et le développement du chômage ». Telle devrait être la conclusion de nos
débats.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain
et citoyen et sur les travées socialistes.)
M. Alain Gournac.
La chute était mauvaise !
M. Jean-Pierre Godefroy.
Ce qui veut dire que le reste était bon !
M. le président.
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain.
Pourquoi ces lamentations, cette violence ? Ce n'est pas le ton qui a prévalu
tout au long de nos débats ! Vous-même, monsieur le ministre, vous avez
pourtant su, à l'occasion de ce premier rendez-vous avec la majorité
présidentielle du Sénat, prendre un ton mesuré.
Vous avez su aussi donner un élan, sans pour autant nous obliger à une course
effrénée.
Vous avez su quoi qu'on en dise, prendre vos distances par rapport au patronat
lorsque c'était nécessaire, et vous avez montré à quel point le dialogue social
était important à vos yeux. Il l'est même tant que vous avez repoussé certaines
de nos propositions au seul motif qu'elles n'avaient pas fait l'objet d'une
concertation préalable ; vous en avez reporté l'examen parce que vous avez
voulu vous donner du temps.
Nous sommes convaincus que vous êtes au début d'un long chemin sur lequel nous
essaierons de vous accompagner. Nous reviendrons sur la question du temps
partiel, nous préciserons ultérieurement les contours du compte épargne-temps,
mais, dès aujourd'hui, sachez, monsieur le ministre, qu'au sein de la majorité
présidentielle le groupe de l'Union centriste apporte son soutien au projet de
loi que vous nous avez présenté.
(Applaudissements sur les travées de
l'Union centriste, du RPR, des Républicains et Indépendants, ainsi que sur
certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About,
président de la commission.
Je veux, monsieur le président, monsieur le
ministre, mes chers collègues, tenter de tirer quelques conclusions de nos
travaux, mais, auparavant, je remercie le rapporteur, M. Louis Souvet, de
l'important travail qu'il a accompli et de la qualité de son rapport.
M. Alain Gournac.
Très bien !
M. Nicolas About,
président de la commission.
Je remercie aussi tous les sénateurs qui ont
accompagné la discussion de ce texte et, bien sûr, je vous remercie vous,
monsieur le ministre.
Vous nous avez présenté un texte qui, contrairement à ce qui a pu être dit,
est loin de marquer un recul. Il apporte au contraire de la clarté, de la
cohérence et de la souplesse : de la clarté grâce à la convergence, tant
attendue pour mettre fin à la véritable « pagaille » créée par les 35 heures,
des différents SMIC par le haut ; de la cohérence grâce à l'exonération de
charges sur les bas salaires qui accompagne cette décision ; de la souplesse
enfin tant pour les salariés qui veulent un meilleur salaire que pour les
entreprises qui veulent mieux s'adapter aux contraintes liées à notre époque si
complexe.
Vous avez su le faire dans le respect du dialogue social dont vous avez
témoigné dès votre prise de fonctions. Je veux publiquement vous en remercier
et je souhaite que le présent projet de loi fasse l'objet de la plus large
majorité.
Sur ce texte, nous avons adopté dix-huit amendements. Quatorze d'entre eux
émanaient de la commission, trois - vous n'étiez pas gourmand, monsieur le
ministre ! - du Gouvernement, le seul autre amendement adopté ayant été déposé
par M. Joly, qui reçoit ainsi la prime à la persévérance !
(Sourires.)
Même si plusieurs de ces amendements ont une portée significative, je dois
dire en toute honnêteté, monsieur le ministre, que nous avons quelque regrets.
Je suis certain cependant que vous parviendrez à effacer ceux-ci en tenant les
promesses que vous nous avez faites.
J'espère que l'Assemblée nationale adoptera conforme le texte issu de nos
travaux. Nous avons nous-mêmes adopté huit articles conformes, et nous en avons
modifié sept. J'estime que le travail qui a été effectué est d'une grande
qualité et, je le redis, je souhaite que le présent projet de loi recueille une
très large majorité.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et
Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées
du RDSE.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon,
ministre.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je
veux, après l'adoption de ce texte, remercier le Sénat.
Je remercie d'abord M. le rapporteur, qui, tout au long des débats, a éclairé
la discussion avec précision, avec finesse, avec jugement et, parfois, lorsque
c'était nécessaire, avec fermeté, ainsi que M. le président de la
commission.
Je remercie ensuite tous les membres de la Haute Assemblée qui ont suivi la
discussion, mais je veux remercier plus particulièrement la majorité
sénatoriale, qui a soutenu le Gouvernement en votant ce texte important pour
les salariés puisqu'il prévoit l'augmentation du SMIC et important pour les
entreprises, qui affrontent une concurrence difficile et ne pouvaient toutes
vivre avec l'impératif catégorique et pour tout dire dogmatique des 35
heures.
Permettez-moi aussi de souligner la qualité de nos échanges. C'est une
tradition au Sénat, je le constate une fois encore.
Mesdames et messieurs les sénateurs de la majorité, avec ce projet de loi,
nous avons d'abord tenu nos engagements, et nous l'avons fait complètement.
Nous avons respecté les partenaires sociaux. Nous avons replacé notre pays sur
la voie que suivent la plupart des grands pays de l'Union européenne, et cela
dans le contexte difficile que j'ai décrit à plusieurs reprises.
Les défis que doit relever notre pays ne peuvent en effet que s'accumuler en
raison tant de l'élargissement de l'Union européenne que de la concurrence
mondiale grandissante.
Je suis convaincu que les Français voient clair : ils sont informés, ils
savent que le monde change, ils voient le sens des évolutions. D'une certaine
manière, ils sanctionnent ceux qui ne leur disent pas la vérité.
Nous avons le devoir aujourd'hui de dire la vérité aux Français : la vérité
sur les conditions de la bataille économique qui se déroule, sur les conditions
dont dépend la pérennité de leurs emplois, sur les conditions du maintien du
niveau de vie, sur les conditions de notre existence, conditions que nous avons
mises en place mais qui sont menacées en permanence par l'émergence de nouveaux
pays et les changements qui interviennent dans le monde.
Le contrat jeunes en entreprises constitue la première pierre d'une stratégie
globale qui se poursuivra avec une révision ciblée de la loi dite de
modernisation sociale que j'ai évoquée plusieurs fois au cours de ces débats,
avec la rénovation des modalités du dialogue social, qui a déjà fait l'objet,
elle aussi, de débats pendant nos travaux, avec la mise en place de l'assurance
emploi, avec la création du contrat d'insertion dans la vie sociale, qui
permettra de tenir compte de l'expérience des emplois-jeunes et des
inconvénients que ce dispositif n'a pas manqué de révéler, avec la mise en
oeuvre du revenu minimum d'activité et avec la réforme des retraites.
Tel est, mesdames, messieurs les sénateurs, l'élan que le Gouvernement, avec
votre appui, entend poursuivre pour rénover notre pacte économique et social.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants
et de l'Union centriste.)
5
DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi pour la sécurité
intérieure.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 30, distribué et renvoyé à la
commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel,
du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution
éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le
règlement.
6
DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI
M. le président.
J'ai reçu de M. Bernard Murat une proposition de loi portant modification de
l'article 43 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation
et à la promotion des activités physiques et sportives.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 28, distribuée et renvoyée à la
commission des affaires culturelles, sous réserve de la constitution éventuelle
d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
7
DÉPÔT D'UN RAPPORT
M. le président.
J'ai reçu de M. René Garrec un rapport fait au nom de la commission des lois
constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale sur :
- le projet de loi constitutionnelle relatif à l'organisation décentralisée de
la République (n° 24 rectifié, 2002-2003) ;
- la proposition de loi constitutionnelle de MM. Christian Poncelet, Henri de
Raincourt, Josselin de Rohan, Daniel Hoeffel, Gérard Longuet, Jean Puech,
Jean-Pierre Fourcade, Philippe Adnot, Louis de Broissia, Paul Girod, Michel
Mercier, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Philippe Richert, Alex Türk et
Jean-Paul Virapoullé relative à la libre administration des collectivités
territoriales (n° 402, 2001-2002) ;
- la proposition de loi constitutionnelle de M. Paul Girod tendant à la
reconnaissance de lois à vocation territoriale (n° 269, 2001-2002) ;
- la proposition de loi constitutionnelle de M. Robert Del Picchia relative au
vote des Français résidant sur les territoires situés dans la zone géographique
comprise entre le méridien 26° ouest et la ligne internationale de changement
de date, à l'exception de l'archipel des Açores (n° 302, 2001-2002) ;
- la proposition de loi constitutionnelle de MM. Georges Othily et Rodolphe
Désiré tendant à modifier le premier alinéa de l'article 7 de la Constitution
(n° 379, 2001-2002) ;
- et sur la proposition de loi constitutionnelle, adoptée par l'Assemblée
nationale, tendant à introduire dans la Constitution un droit à
l'expérimentation pour les collectivités territoriales (n° 188, 2000-2001).
Le rapport sera imprimé sous le n° 27 et distribué.
8
DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION
M. le président.
J'ai reçu de M. Gérard Miquel un rapport d'information fait au nom de la
commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de
la nation sur la recherche en sécurité routière.
Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 29 et distribué.
9
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée au jeudi 24 octobre 2002 :
A neuf heure trente :
1. Discussion de la question orale avec débat (n° 1) de M. Josselin de Rohan à
M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de
la mer sur la politique ferroviaire.
M. Josselin de Rohan demande à M. le ministre de l'équipement, des transports,
du logement, du tourisme et de la mer de bien vouloir lui exposer la politique
qu'il entend mener en matière ferroviaire et, plus particulièrement, en ce qui
concerne la réalisation des lignes de TGV.
Le délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat est expiré.
A quinze heures :
2. Discussion des conclusions du rapport (n° 360, 2001-2002) de M.
Jean-François Le Grand, fait au nom de la commission des affaires économiques
et du Plan, sur sa proposition de loi relative à l'implantation des éoliennes
et la protection de l'environnement (n° 287, 2000-2001).
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
3. Discussion des conclusions du rapport (n° 23, 2002-2003) de M. Bruno Sido,
fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan, sur la
proposition de loi (n° 409, 2001-2002) de MM. Bruno Sido, Gérard Larcher,
Pierre Hérisson, François Trucy, Paul Girod, Aymeri de Montesquiou, Philippe
Adnot, Pierre André, Michel Bécot, Paul Blanc, Jean Boyer, Jean-Claude Carle,
Robert Del Picchia, Michel Doublet, Alain Fouché, Christian Gaudin, François
Gerbaud, Georges Gruillot, Joseph Kerguéris, Pierre Laffitte, Lucien Lanier,
Patrick Lassourd, Max Marest, Charles Revet, Yves Rispat, Daniel Soulage et
Jean-Pierre Vial relative à la couverture territoriale en téléphonie mobile de
deuxième génération par la mise en oeuvre prioritaire de prestations
d'itinérance locale entre opérateurs.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements
Projet de loi constitutionnelle relatif à l'organisation décentralisée de la
République (n° 24 rectifié, 2002-2003) :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
lundi 28 octobre 2002, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 28 octobre 2002, à dix-sept
heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt-trois heures quarante-cinq.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD
QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Insécurité dans l'agglomération nantaise
69.
- 23 octobre 2002. -
M. François Autain
appelle l'attention de
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés
locales
sur l'augmentation de l'insécurité dans l'agglomération nantaise. Pour
illustrer cette évolution inquiétante, il suffit de citer quelques chiffres. En
2001, la police a constaté 45 144 crimes et délits, soit une augmentation de
23,50 % sur un an, ce qui place Nantes loin devant des villes comme Paris,
Marseille, Lyon, Nice ou Toulouse. Avec 121 faits pour 1 000 habitants, Nantes
se hisse désormais à la 6e place des villes les plus touchées par l'insécurité.
Les délégués syndicaux de la police avec lesquels il s'est entretenu de cette
question préoccupante considèrent que devant une telle évolution, la police
nationale n'a plus les moyens d'assurer sa mission de service public dans
l'agglomération nantaise. Il s'étonne donc que la circonscription de police de
Nantes ne soit toujours pas classée en zone difficile alors que des villes où
les chiffres de la délinquance sont bien moindres en bénéficient. Ce classement
lui semblerait aujourd'hui pleinement justifié devant la grave détérioration du
ratio faits constatés/nombre de fonctionnaires affectés. Il voudrait savoir si
le ministre a l'intention de corriger cette anomalie qui pénalise l'ensemble
des habitants de l'agglomération nantaise et singulièrement ceux des quartiers
populaires.
Conséquences sanitaires des essais nucléaires
70.
- 23 octobre 2002. -
Mme Marie-Christine Blandin
souhaite attirer l'attention de
Mme la ministre de la défense
sur le suivi des conséquences sanitaires et environnementales des essais
nucléaires. Le rapport du 6 février 2002 de l'Office parlementaire d'évaluation
des choix scientifiques et technologiques a permis de répondre à de nombreuses
questions posées par les associations de vétérans et de riverains des sites des
essais nucléaires français au Sahara et en Polynésie. Cependant, l'absence
d'études épidémiologiques n'a pas permis aux auteurs d'aborder deux questions
importantes : _ les conséquences sanitaires à moyen et long terme des
radiations ionisantes sur les personnels militaires ou civils ayant soit
travaillé sur les sites des essais, soit résidé à proximité ; - le principe «
de présomption d'origine de la maladie ». Seules des études systématiques de la
santé des vétérans des essais nucléaires et des populations directement
impliquées pourront pallier l'absence de données et compléter efficacement les
travaux de l'Office parlementaire. Pour mener à bien de telles études, le
respect de la recommandation des rapporteurs : « un quelconque secret-défense
ne saurait être invoqué pour s'opposer à l'obligation de communication du
dossier médical » devra être garanti. Depuis l'adoption de la loi n° 2002-203
du 4 mars 2002 « droit des malades », il ne saurait y avoir de citoyens moins
protégés que d'autres. Le ministère de la défense a annoncé la création d'un
Observatoire de la santé des vétérans et d'un groupe de travail visant à
étudier les conditions d'élargissement de la reconnaissance d'imputabilité
d'une affection à un service militaire. Ces organismes pourraient recevoir une
délégation pour mener à bien de telles études. En ce qui concerne ces deux
instances, elle souhaiterait connaître les délais prévus pour leur mise en
place, leur composition, ainsi que leur champ d'intervention. A l'instar de la
Commission nationale pour l'élimination des mines antipersonnel ou de la
Commission nationale consultative des droits de l'homme, elle attire son
attention sur l'importance d'une représentation, au sein de ces organismes, du
ministère de la défense mais aussi des parlementaires, des personnalités
qualifiées et des associations de vétérans et de riverains.
Avenir de La Poste
71.
- 23 octobre 2002. -
M. Christian Bergelin
s'adressant à
Mme la ministre déléguée à l'industrie
désire connaître la position du Gouvernement sur l'avenir de la présence de La
Poste sur l'ensemble du territoire national et en particulier dans le
département de la Haute-Saône.
Participation des communes
aux dépenses de fonctionnement des écoles
sous contrat d'association et développement de l'intercommunalité
72.
- 23 octobre 2002. -
M. Ambroise Dupont
attire l'attention de
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés
locales
sur le fait que des dispositions légales et réglementaires régissant la
participation des communes aux dépenses de fonctionnement des écoles sous
contrat d'association et celles régissant le transfert des compétences des
communes membres aux communautés de communes semblent rendre problématique, en
l'état actuel des textes, le transfert à la communauté de communes des charges
induites par la participation des communes membres au fonctionnement des écoles
privées sous contrat. D'une part, l'article 7 du décret n° 60-389 du 29 avril
1960 impose cette participation à la commune siège de l'établissement, tandis
qu'elle reste facultative pour les enfants résidant dans d'autres communes.
D'autre part, alors que l'article L. 5214-16 du code général des collectivités
territoriales ne requiert pour le transfert d'une compétence que l'accord de la
majorité qualifiée des communes membres, la prise en charge par la communauté
de communes de la participation au fonctionnement de l'école privée à
fréquentation intercommunale semble impliquer un accord unanime des communes
membres pour respecter le caractère facultatif de la participation inscrit dans
l'article 7 du décret précité. Il lui demande en conséquence quelles mesures il
entend prendre pour surmonter cette difficulté qui peut constituer un frein au
développement de l'intercommunalité.
Situation du bassin d'emploi de Romorantin
73.
- 23 octobre 2002. -
Mme Jacqueline Gourault
attire l'attention de
Mme la ministre déléguée à l'industrie
sur la situation du bassin d'emploi de Romorantin. Les difficultés de ce bassin
sont liées aux incertitudes relatives au maintien de l'activité de
Matra-Automobile au sein de ce territoire pourtant déjà durement touché par la
disparition des activités d'armement à Salbris. En effet, depuis 1984,
Matra-Automobile fabriquait, à Romorantin, pour l'entreprise Renault, le modèle
Espace. Or Renault a décidé de délocaliser la production de la quatrième
génération de l'Espace dans l'une de ses usines nouvelles de Sandouville en
Seine-Maritime. Au plus fort de la production, l'usine de Romorantin comptait 3
000 salariés. Elle ne compte plus à ce jour que 1 600 salariés dont 800 voient
leur emploi menacé à court terme. L'activité future de Matra-Automobile à
Romorantin est désormais entièrement dépendante de l'Avantime, commercialisée
par Renault, du modèle buggy biplace M 72 qui devrait être produit en 2003 et
de la volonté ou non de Renault de participer au développement d'un troisième
modèle, le P 83. Le risque d'une disparition complète de la production
automobile est réel et aurait, le cas échéant, de très lourdes conséquences
économiques et sociales tant pour Romorantin que, plus globalement, pour le sud
de la région Centre. L'avenir de Matra-Automobile dépend donc de la réussite de
ces produits et de la future stratégie industrielle de Renault qui porte une
responsabilité lourde dans la situation actuelle et dont l'Etat reste
l'actionnaire principal à hauteur de 43 %. Enfin, elle attire son attention sur
la volonté de cession par Lagardère, actionnaire unique de Matra, de son
activité automobile et sur les conséquences éventuelles de cette décision sur
l'activité automobile à Romorantin et sur l'usine Venture de Theillay. Elle lui
demande quelles solutions elle entend proposer pour favoriser, compte tenu de
la position de l'Etat au sein de Renault, le maintien d'une activité automobile
à Romorantin et pour permettre à ce territoire de faire face à ses difficultés
économiques et sociales actuelles.
ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du mercredi 23 octobre 2002
SCRUTIN (n° 12)
sur les amendements n°61, présenté par M. Gilbert Chabroux et les membres du
groupe socialiste, apparenté et.rattachée, et n°100, présenté par M. Roland
Muzeau et les membres du groupe communiste, républicain et citoyen,.tendant à
supprimer l'article 2 bis du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale,
relatif aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi
Nombre de votants : | 312 |
Nombre de suffrages exprimés : | 312 |
Pour : | 113 |
Contre : | 199 |
Le Sénat n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE REPUBLICAIN ET CITOYEN (23) :
Pour :
23.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DEMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPEEN (21) :
Pour :
8. _ MM. Nicolas Alfonsi, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon
Collin, Gérard Delfau et.Rodolphe Désiré, François Fortassin, Dominique
Larifla
Contre :
13.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA REPUBLIQUE (94) :
Contre :
92.
N'ont pas pris part au vote :
2. _ M. Christian Poncelet, président du
Sénat et Emmanuel Hamel.
GROUPE SOCIALISTE (82) :
Pour :
82.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (54) :
Contre :
53.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Daniel Hoeffel, qui présidait la
séance.
GROUPE DES REPUBLICAINS ET INDEPENDANTS (41) :
Contre :
41.
SENATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (6) :
N'ont pas pris part au vote :
6.
Ont voté pour
Nicolas Alfonsi
Michèle André
Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Marie-France Beaufils
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marie-Christine Blandin
Nicole Borvo
Didier Boulaud
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Claire-Lise Campion
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Yvon Collin
Gérard Collomb
Yves Coquelle
Raymond Courrière
Roland Courteau
Yves Dauge
Annie David
Marcel Debarge
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Evelyne Didier
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Guy Fischer
François Fortassin
Thierry Foucaud
Jean-Claude Frécon
Bernard Frimat
Charles Gautier
Jean-Pierre Godefroy
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Odette Herviaux
Alain Journet
André Labarrère
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
André Lejeune
Louis Le Pensec
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Josiane Mathon
Pierre Mauroy
Louis Mermaz
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Roland Muzeau
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Daniel Raoul
Paul Raoult
Daniel Reiner
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Michèle San Vicente
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Jean-Pierre Sueur
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Jean-Marc Todeschini
Pierre-Yvon Tremel
André Vantomme
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Ont voté contre
Nicolas About
Jean-Paul Alduy
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
Gérard Bailly
José Balarello
Gilbert Barbier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Christian Bergelin
Daniel Bernardet
Roger Besse
Laurent Béteille
Joël Billard
Claude Biwer
Jean Bizet
Jacques Blanc
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
Didier Borotra
Joël Bourdin
Brigitte Bout
Jean Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Christian Cointat
Gérard Cornu
Jean-Patrick Courtois
Robert Del Picchia
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Dériot
Yves Detraigne
Eric Doligé
Jacques Dominati
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Louis Duvernois
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Jean-Claude Etienne
Pierre Fauchon
Jean Faure
Françoise Férat
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Alain Fouché
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Christian Gaudin
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Gisèle Gautier
Patrice Gélard
André Geoffroy
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Jacqueline Gourault
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Charles Guené
Michel Guerry
Hubert Haenel
Françoise Henneron
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Jean-François Humbert
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Bernard Joly
Jean-Marc Juilhard
Roger Karoutchi
Joseph Kergueris
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
André Lardeux
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
René-Georges Laurin
Jean-René Lecerf
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Jean-François Le Grand
Serge Lepeltier
Philippe Leroy
Marcel Lesbros
Valérie Létard
Gérard Longuet
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Brigitte Luypaert
Max Marest
Philippe Marini
Pierre Martin
Jean Louis Masson
Serge Mathieu
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Dominique Mortemousque
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Monique Papon
Anne-Marie Payet
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Josselin de Rohan
Roger Romani
Janine Rozier
Bernard Saugey
Jean-Pierre Schosteck
Bruno Sido
Daniel Soulage
Louis Souvet
Michel Thiollière
Henri Torre
René Trégouët
André Trillard
François Trucy
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Jean-Marie Vanlerenberghe
Alain Vasselle
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Jean-Paul Virapoullé
François Zocchetto
N'ont pas pris part au vote
Philippe Adnot, Philippe Darniche, Sylvie Desmarescaux, Hubert Durand-Chastel,
Emmanuel Hamel, Bernard Seillier, Alex Türk.
N'ont pas pris part au vote
Christian Poncelet, président du Sénat.Daniel Hoeffel, qui présidait la séance.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : | 313 |
Nombre des suffrages exprimés : | 313 |
Majorité absolue des suffrages exprimés : | 157. |
Pour : | 113. |
Contre : | 200 |
Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.