SEANCE DU 10 OCTOBRE 2002
CONVENTIONS RELATIVES À L'ENTRÉE,
À LA CIRCULATION ET AU SÉJOUR
EN PRINCIPAUTÉ D'ANDORRE
Adoption de deux projets de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion :
- du projet de loi (n° 280, 2001-2002) autorisant la ratification de la
convention entre la République française, le Royaume d'Espagne et la
Principauté d'Andorre relative à la circulation et au séjour en Principauté
d'Andorre des ressortissants des Etats tiers. [Rapport n° 383 (2001-2002).]
- et du projet de loi (n° 281, 2001-2002) autorisant la ratification de la
convention entre la République française, le Royaume d'Espagne et la
Principauté d'Andorre relative à l'entrée, à la circulation, au séjour et à
l'établissement de leurs ressortissants. [Rapport n° 383 (2001-2002)] ;
La conférence des présidents a décidé que ces deux projets de loi feraient
l'objet d'une discussion générale commune.
Dans la discussion générale commune, la parole est à M. le secrétaire
d'Etat.
M. Renaud Muselier,
secrétaire d'Etat aux affaires étrangères.
Monsieur le président,
monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la Principauté
d'Andorre a accédé à la souveraineté internationale en 1993. Son enclavement
géographique, les liens historiques rappelés dans le traité « de bon voisinage,
d'amitié et de coopération » entre la République française, le Royaume
d'Espagne et la Principauté d'Andorre du 1er juin 1993, et la suppression des
contrôles aux frontières ont incité les trois Etats à tirer les conséquences de
ce changement de statut international en définissant des règles en matière de
circulation, de séjour et d'établissement de leurs ressortissants et des
ressortissants d'Etats tiers.
Dans ce but, la France, l'Espagne et l'Andorre ont signé, le 4 décembre 2000,
à Bruxelles, deux conventions, l'une relative à l'entrée, à la circulation, au
séjour et à l'établissement de leurs ressortissants, l'autre relative à la
circulation et au séjour en principauté d'Andorre des ressortissants des Etats
tiers, mettant un terme à cinq ans de négociations.
La convention relative à l'entrée, à la circulation, au séjour et à
l'établissement des nationaux des trois Etats vise à établir en la matière une
plus grande sécurité juridique et à faciliter la circulation et l'installation
des ressortissants français et espagnols en Andorre, et des ressortissants
andorrans en France et en Espagne. Elle apporte des améliorations
substantielles aux conditions d'exercice d'activités professionnelles
salariées, non salariées et libérales.
Ainsi, les ressortissants français pourront désormais investir dans les
entreprises andorranes s'ils peuvent justifier d'une résidence effective et
ininterrompue en principauté d'une durée de dix ans, au lieu de vingt ans
actuellement, ce qui constitue une nette amélioration. En outre, cette
convention permet à nos compatriotes d'accéder aux emplois du secteur public
andorran dans des conditions plus favorables que les autres étrangers.
La convention relative à la circulation et au séjour en Principauté d'Andorre
des ressortissants des Etats tiers, quant à elle, établit une étroite
coopération entre les trois Etats contractants en matière de délivrance de
visas et de titres de séjour, prenant en considération leurs préoccupations
mutuelles selon la nationalité des ressortissants des Etats tiers.
Ainsi, eu égard à la situation géographique de la Principauté, les demandes
d'établissement en Andorre des ressortissants hors Union européenne font
l'objet d'un échange d'informations des autorités espagnoles et françaises
préalablement à la décision d'acceptation de la demande. Cette coopération
permettra aux titulaires d'un titre de séjour andorran de circuler librement en
France et en Espagne.
Même si ces conventions ne prévoient pas une stricte réciprocité, elles
constituent néanmoins une avancée réelle par rapport à la situation antérieure.
Elles marquent une étape dans les relations entre les trois Etats, de nouveaux
pas devant être franchis dans le cadre des négociations à venir entre la
Principauté d'Andorre et l'Union européenne.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames,
messieurs les sénateurs, les principales dispositions de la convention entre la
République française, le Royaume d'Espagne et la Principauté d'Andorre relative
à l'entrée, à la circulation, au séjour et à l'établissement de leurs
ressortissants, et de la convention entre la République française, le Royaume
d'Espagne et la Principauté d'Andorre relative à la circulation et au séjour en
Principauté d'Andorre des ressortissants des Etats tiers, qui font l'objet des
projets de loi aujourd'hui proposés à votre approbation.
(Applaudissements.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Robert Del Picchia,
rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes
chers collègues, ces deux conventions trilatérales ont été signées entre la
France, l'Espagne et Andorre le 4 décembre 2000, à Bruxelles. Elles portent
respectivement sur les modalités de circulation et d'établissement entre ces
trois pays, et sur la circulation et le séjour en Andorre des ressortissants
des Etats tiers.
En préalable, je souhaite rappeler le contexte récent qui permet de comprendre
pourquoi nos relations avec ce micro-Etat nécessitent autant des textes.
Andorre n'est devenu un Etat souverain que le 14 mars 1993, avec l'approbation
d'une constitution qui mettait fin à la situation féodale prévalant depuis le
xiiie siècle. Andorre était alors une principauté régie par des coprinces, le
Président de la République française et l'évêque d'Urgel, ville de Catalogne
située près de Lerida.
Cette accession à la souveraineté internationale, consacrée par un siège à
l'ONU, a été suivie par la conclusion, le 1er juin 1993, d'un traité de « bon
voisinage, d'amitié et de coopération » entre la France, l'Espagne et
Andorre.
Des négociations trilatérales ont ensuite été engagées sur les modalités
réciproques de circulation, de séjour et d'établissement, avec la prise en
compte de deux contraintes : d'une part, la non-appartenance d'Andorre à
l'Union européenne, alors que la France et l'Espagne en sont membres ; d'autre
part, la spécificité d'Andorre au regard de ses deux grands partenaires. En
effet, on recense quelques centaines d'Andorrans installés en France pour 4 000
Français installés en Andorre.
C'est pourquoi le ministère français des affaires étrangères indique avoir
négocié suivant un objectif de « réciprocité pondérée ».
Ces négociations ont été longues et délicates, comme c'est souvent le cas des
discussions entre pays membres et pays non membres de l'Union européenne.
S'agissant de la position respective des Français et des Espagnols sur le
territoire d'Andorre, cette convention trilatérale leur accorde des droits
identiques, notamment le libre accès aux activités non salariées pour ceux qui
justifient d'une résidence ininterrompue de dix ans, contre vingt ans exigés
aujourd'hui.
Par ailleurs, les nationaux français et espagnols exerçant une activité
professionnelle, salariée ou non, en Andorre bénéficieront, aux termes de ces
conventions, d'une garantie d'égalité de traitement en matière de conditions de
travail, ce qui est une avancée au regard de la situation actuelle.
Il faut relever qu'un titre de séjour de longue durée sera attribué à nos
compatriotes au terme de cinq ans de résidence effective et ininterrompue,
alors que, actuellement, Andorre ne délivre plus que des permis provisoires de
travail et de séjour d'une validité de six mois.
Permettez au sénateur représentant les Français établis hors de France que je
suis de relever que ce sera une avancée pour les Français qui résident en
Andorre.
M. Renaud Muselier,
secrétaire d'Etat.
Très bien !
M. Robert Del Picchia,
rapporteur.
Enfin, le titulaire français ou espagnol d'un droit de séjour
en Andorre pourra faire venir auprès de lui les membres de sa famille, qui
recevront un titre de séjour de même nature et de même durée.
Cette convention trilatérale contient donc un certain nombre d'avancées en
faveur des citoyens français établis en Andorre.
Je vous précise que, depuis 1995, première année statistique significative
après l'accession d'Andorre à la pleine souveraineté, le nombre de Français
actifs séjournant dans la principauté est passé de 1 500 environ à 1 800 en
2001. On voit donc qu'une bonne partie des cadres travaillant dans la
principauté sont français. Nos compatriotes se trouvant dans cette situation
sont évidemment favorables à l'adoption de cette convention.
L'Espagne et Andorre ayant déjà ratifié cette convention en juin 2001, je vous
recommande donc son adoption.
S'agissant maintenant du texte portant sur la circulation et le séjour en
Andorre des ressortissants des Etats tiers, il vise à remédier à la disparité
créée par la soumission de la France et de l'Espagne au dispositif instauré par
l'accord de Schengen en matière de conditions d'entrée, de circulation et de
séjour des étrangers, alors que la Principauté d'Andorre n'est pas liée par ce
texte.
Désormais, les demandes d'établissement de ressortissants d'Etats tiers en
Andorre feront l'objet d'un échange complet d'informations nominatives entre
les trois Etats ; en contrepartie, les titulaires d'un titre de séjour andorran
pourront circuler librement en France et en Espagne.
Cette fluidité nouvelle facilitera le recrutement de la main-d'oeuvre
étrangère nécessaire à Andorre pour soutenir sa croissance économique,
notamment auprès des Français qui seraient intéressés par cette perspective.
Il faut enfin souligner que la population étrangère résidant dans la
principauté se compose aujourd'hui d'environ 40 % d'Espagnols, de 10 % de
Portugais et de seulement 6 % de Français.
Cette convention contient donc des avancées réelles en matière d'accès du
marché du travail andorran, ainsi qu'en matière de rapprochement d'Andorre avec
le système établi par l'accord de Schengen. Ces deux éléments clés ont conduit
la commission des affaires étrangères à vous recommander, mes chers collègues,
d'adopter cette convention.
(Applaudissements.)
M. le président.
La parole est à M. Paul Blanc.
M. Paul Blanc.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je
me réjouis, bien entendu, de ces dispositions nouvelles dont vont profiter
notamment les ressortissants français en Andorre.
En effet, vous ne l'ignorez pas, le département des Pyrénées-Orientales est
mitoyen de la principauté. Sachant que le tunnel d'Envalira est maintenant
ouvert et que donc le passage des frontières est facilité, on peut s'attendre à
ce que les échanges entre les deux pays s'accroissent encore.
Toutefois, monsieur le secrétaire d'Etat, je souhaiterais que, dans le cadre
de ces conventions, et peut-être plus encore dans le cadre de la convention
suivante, qui concerne la coopération administrative, les problèmes frontaliers
soient réglés d'une façon définitive. Je pense en particulier au tracé de la
frontière. En effet, certaines communes limitrophes, notamment la commune de
Porta, ont été un peu oubliées lors de la délimitation de la frontière et cela
engendre un certain nombre de problèmes.
Je sais que je peux compter sur vous, monsieur le secrétaire d'Etat, pour
veiller à ce que ces communes ne soient pas sacrifiées - et Porta, spoliée -
au nom de certains traités ou conventions qui, par ailleurs, sont utiles et
nécessaires.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Renaud Muselier,
secrétaire d'Etat.
J'entends bien votre inquiétude, tout à fait
légitime, monsieur le sénateur, mais tout le monde s'accorde aujourd'hui pour
reconnaître que ces conventions constituent des évolutions considérables pour
nos relations avec la Principauté d'Andorre.
Cependant, la territorialité est sacrée et les communes limitrophes méritent
une attention toute particulière. Je prends donc acte de votre souci, monsieur
le sénateur, et vous assure que nous allons examiner la manière de traiter ce
problème.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale commune ?
...
La discussion générale commune est close.
PROJET DE LOI N° 280
M. le président.
Nous passons à la discussion de l'article unique du projet de loi n° 280.
«
Article unique. -
Est autorisée la ratification de la convention
entre la République française, le Royaume d'Espagne et la Principauté d'Andorre
relative à la circulation et au séjour en Principauté d'Andorre des
ressortissants des Etats tiers, signée à Bruxelles le 4 décembre 2000, et dont
le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
M. le président.
Je constate que ce texte a été adopté à l'unanimité.
PROJET DE LOI N° 281
M. le président.
Nous passons à la discussion de l'article unique du projet de loi n° 281.
«
Article unique.
- Est autorisée la ratification de la convention
entre la République française, le Royaume d'Espagne et la Principauté d'Andorre
relative à l'entrée, à la circulation, au séjour et à l'établissement de leurs
ressortissants, signée à Bruxelles le 4 décembre 2000, et dont le texte est
annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
M. le président.
Je constate que ce texte a été adopté à l'unanimité.
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