SEANCE DU 21 FEVRIER 2002


M. le président. « Art. 6. - I. - Avant l'article 254 du code civil, il est inséré une division et un intitulé ainsi rédigés : "Paragraphe 2. - Des mesures provisoires".
« II. - L'article 254 du même code est ainsi rédigé :
« Art. 254. - Lors de l'audience prévue à l'article 252-2, le juge prescrit, en considération des accords éventuels des époux, les mesures nécessaires pour assurer leur existence ainsi que celle des enfants jusqu'à la date à laquelle le jugement prend force de chose jugée.
« S'il y a des enfants, les époux peuvent soumettre à l'homologation du juge les accords par lesquels ils déterminent les modalités d'exercice de l'autorité parentale à l'égard des enfants mineurs, notamment leur résidence en alternance chez chacun des parents ou au domicile de l'un d'eux, ainsi que la contribution à l'entretien et l'éducation des enfants. A défaut d'accord des parents ou si cet accord ne lui paraît pas conforme à l'intérêt des enfants, le juge statue selon les règles définies au titre IX du livre Ier. »
« III. - L'article 255 du même code est ainsi rédigé :
« Art. 255. - Le juge peut notamment :
« 1° Proposer aux époux une mesure de médiation à moins que des violences constatées au sein de la famille ne rendent cette mesure inappropriée et, après avoir recueilli leur accord, désigner un médiateur pour y procéder ;
« 2° Sous cette même réserve, enjoindre aux époux de rencontrer un médiateur qui les informera sur l'objet et le déroulement de la médiation, à laquelle celui-ci procédera le cas échéant ;
« 3° Organiser les modalités de la résidence séparée des époux ;
« 4° Attribuer à l'un des époux la jouissance du logement et du mobilier du ménage ou partager entre eux cette jouissance, en précisant son caractère gratuit ou non et, le cas échéant, en constatant l'accord des époux sur le montant d'une indemnité d'occupation ;
« 5° Ordonner la remise de vêtements ou objets personnels ;
« 6° Fixer la pension alimentaire et la provision pour frais d'instance que l'un des époux devra verser à son conjoint ;
« 7° Accorder à l'un des époux des provisions sur sa part de communauté si la situation le rend nécessaire ;
« 8° A la demande de l'un des époux, statuer sur la répartition provisoire de tout ou partie du passif et sur l'attribution de la jouissance des biens communs, ou de leur gestion, sous réserve des droits de chacun dans la liquidation du régime matrimonial ;
« 9° Désigner un notaire ou un professionnel qualifié en vue de dresser un inventaire, d'élaborer un projet de liquidation et de partage du régime matrimonial ainsi que de faire des propositions quant aux conséquences pécuniaires de la séparation. »
« IV. - Les deux derniers alinéas de l'article 257 du même code sont ainsi rédigés :
« A ce titre, il peut prendre toute mesure conservatoire pour garantir les droits d'un époux.
« Il peut aussi organiser la résidence séparée de cet époux hors de la résidence de la famille, s'il y a lieu avec les enfants mineurs du couple. »
L'amendement n° 23, présenté par M. Gélard au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Dans le I de l'article 6, remplacer les mots : "Paragraphe 2" par les mots : "Paragraphe 3".»
L'amendement n° 24, présenté par M. Gélard au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par le II de l'article 6 pour l'article 254 du code civil, remplacer la référence : "252-2" par la référence : "251". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. L'amendement n° 23 est un amendement de structure et l'amendement n° 24 est un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Par cohérence, le Gouvernement est défavorable aux deux amendements.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 23.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 24.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 25, présenté par M. Gélard au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Supprimer le second alinéa du texte proposé par le II de l'article 6 pour l'article 254 du code civil. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer le second alinéa du texte proposé par l'Assemblée nationale pour le II de l'article 6. Ces dispositions deviennent en effet inutiles dans la mesure où la proposition de loi relative à l'autorité parentale a inclus dans l'article 256 du code civil une disposition renvoyant à l'application des règles fixées au chapitre relatif à l'autorité parentale s'agissant des mesures provisoires concernant les enfants.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Cet amendement tend à supprimer les dispositions qui ont trait aux modalités d'organisation de la vie des enfants pendant la procédure de divorce.
Il est vrai que la proposition de loi relative à l'autorité parentale, par la généralité de ses dispositions, traite de cette question.
J'observe que l'article 254 du code civil, dans sa rédaction issue de l'Assemblée nationale, valorise d'une manière générale les accords entre époux. Or ceux qui concernent les enfants sont particulièrement importants. C'est pourquoi je m'en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 25.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 26, présenté par M. Gélard au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le 1° du texte proposé par le III de l'article 6 pour l'article 255 du code civil :
« 1° Proposer aux époux une mesure de médiation et, après avoir recueilli leur accord, désigner un médiateur familial pour y procéder ; ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. C'est un amendement qui a donné lieu à de nombreuses discussions lors des auditions de la commission : il s'agit de l'impossibilité de recourir à la médiation en cas de violences familiales. Après avoir réfléchi à cette question, nous avons estiné qu'une médiation bien conduite pouvait présenter un intérêt, même en cas de violences.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. La médiation suppose un équilibre des forces entre les parties, donc, par définition, qu'aucune d'entre elles ne se trouve en situation de domination physique, morale, affective ou psychologique par rapport à l'autre, sous peine de biaiser la médiation.
C'est pourquoi le texte adopté par l'Assemblée nationale prévoit que le juge peut ordonner une mesure de médiation, à moins que les violences constatées dans la famille ne rendent cette mesure inopportune.
Cette réserve ne constitue toutefois pas une interdiction de la médiation dans ce cas. Il appartiendra alors au juge d'apprécier en fonction de chaque situation si la médiation qui lui est demandée ou qu'il envisage de proposer aux époux est opportune ou non au regard des violences constatées dans la famille. Dans certains cas, les personnes ne peuvent se trouver l'une en face de l'autre sans que les violences reprennent.
C'est pourquoi je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, monsieur le rapporteur, dans la mesure où l'objectif que vous fixez est atteint par la rédaction actuelle.
M. le président. Monsieur le rapporteur, l'amendement n° 26 est-il maintenu ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Je ne crois pas pouvoir accéder à la demande de Mme le ministre, car il s'agit là d'une coordination avec des mesures que nous avons adoptées dans la proposition de loi relative à l'autorité parentale.
Nous pourrons éventuellement revoir, au cours de la navette, la compatibilité de cette mesure avec le texte qui est en cours d'examen à l'Assemblée nationale.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Les mesures qui ont été adoptées dans le cadre de la proposition de loi relative à l'autorité parentale ne sont pas de même nature. Certes, à la suite de son divorce, le couple est confronté à des problèmes d'autorité parentale qu'il doit résoudre. Mais la médiation concerne uniquement le couple et non pas la façon dont les enfants seront pris en charge au titre de l'autorité parentale.
Par conséquent, j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 26.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 27, présenté par M. Gélard au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le 2° du texte proposé par le III de l'article 6 pour l'article 255 du code civil :
« 2° Enjoindre aux époux de rencontrer un médiateur familial qui les informera sur l'objet et le déroulement de la médiation ; ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Il s'agit, là encore, d'un amendement de coordination concernant la médiation en cas de violences familiales. Il tend à préciser que la séance d'information sera assurée par un médiateur familial.
Par ailleurs, est supprimée la disposition précisant que le médiateur chargé d'assurer la séance d'information sera obligatoirement celui qui procédera à la médiation. Plusieurs couples pourraient en effet être regroupés dans une séance d'information commune.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Défavorable, par cohérence.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 27.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 66, rectifié, présenté par M. Lecerf, Mme Desmarescaux, MM. Türk, Durand-Chastel et Seillier, est ainsi libellé :
« Compléter le sixième alinéa (5°) du texte proposé par le III de l'article 6 pour l'article 255 du code civil par les mots : "et le cas échéant des biens propres des époux". »
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 67 rectifié, présenté par Mme Desmarescaux, MM. Lecerf, Türk, Durand-Chastel et Seillier, est ainsi libellé :
« Après le sixième alinéa (5°) du texte proposé par le III de l'article 6 pour l'article 255 du code civil, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Imposer aux époux la production d'une attestation sur l'honneur de l'état de leur patrimoine ; ».
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 68 rectifié, présenté par M. Lecerf, Mme Desmarescaux, MM. Türk, Durand-Chastel et Seillier, est ainsi libellé :
« Dans l'avant-dernier alinéa (8°) du texte proposé par le III de l'article 6 pour l'article 255 du code civil, après les mots : "attribution de la jouissance", insérer les mots : "gratuite ou non". »
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 28, présenté par M. Gélard au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Dans le 9° du texte proposé par le III de l'article 6 pour l'article 255 du code civil, remplacer les mots : "faire des propositions" par les mots : "donner son avis". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Cet amendement concerne le rôle des notaires et autres professionnels : au lieu de « faire des propositions », ils « donnent leur avis ».
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Cet amendement tend à limiter le rôle du notaire ou du professionnel qualifié désigné par le juge dans le cadre des mesures provisoires, en vue de préparer les conséquences patrimoniales du divorce.
L'expression retenue par l'Assemblée nationale me paraît s'inscrire dans une dynamique plus favorable à l'émergence d'accords sur les conséquences pécuniaires de la séparation.
C'est la raison pour laquelle a priori je ne peux pas vous suivre. J'ai un doute, mais je m'en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 28.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 29, présenté par M. Gélard au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Compléter le texte proposé par le III de l'article 6 pour l'article 255 du code civil par un 10° ainsi rédigé :
« 10° Désigner un notaire en vue d'établir un rapport énumérant les points d'accord et de désaccord relatifs au règlement du régime matrimonial. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Cet amendement tend, je le rappelle, à permettre au juge de désigner un notaire pour établir les points d'accord et de désaccord entre les parties relatifs au règlement amiable du régime matrimonial.
Le juge disposera ainsi d'éléments supplémentaires au moment du prononcé du divorce et pourra éventuellement trancher les difficultés s'il s'estime suffisament informé.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. Cet amendement a pour objet de compléter la liste des mesures que peut prendre le juge à l'occasion de l'audience préalable à l'assignation en divorce, en prévoyant la désignation d'un notaire chargé d'établir un rapport sur les points d'accord et de désaccord entre les époux relatifs au règlement du régime matrimonial.
Je ne suis pas certaine que cette précision s'impose.
En effet, le nouvel article 259-4, issu des travaux de l'Assemblée nationale, prévoit que, lorsque les époux sont d'accord sur certains points de la liquidation de leur régime matrimonial, ils peuvent à tout moment de l'instance soumettre au juge leur convention aux fins d'homologation.
De même, le nouvel article 255 précise que, en ce qui concerne les points de désaccord, le juge peut, dans le cadre de l'ordonnance de non-conciliation, désigner un notaire chargé d'élaborer un projet de liquidation et de partage du régime matrimonial. A cette occasion, ce professionnel ne manquera pas de constater les points de discordance entre les époux.
C'est pourquoi je ne peux qu'être défavorable à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 29.
Mme Nicole Borvo. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 6, modifié.

(L'article 6 est adopté.)

Article additionnel après l'article 6