SEANCE DU 24 JANVIER 2002
M. le président.
L'amendement n° 458 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé
:
« Après l'article 61, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article 1er de la loi n° 95-66 du 20 janvier 1995 relative à l'accès
à l'activité de conducteur et à la profession d'exploitant de taxi, il est
inséré un article ainsi rédigé :
«
Art... -
Les taxis doivent assurer la desserte de leur commune de
rattachement. Ils peuvent toutefois stationner dans les communes où ils ont
fait l'objet d'une réservation préalable dont les conducteurs devront apporter
la preuve en cas de contrôle, ainsi que dans celles faisant partie d'un service
commun de taxis comprenant leur commune. »
Le sous-amendement n° 730 rectifié, présenté par MM. Esneu et Schosteck, est
ainsi libellé :
« Dans la première phrase du texte proposé par l'amendement n° 458 rectifié
pour insérer un article après l'article 1er de la loi n° 95-66 relative à
l'accès à l'activité de conducteur et à la profession d'exploitant de taxi,
remplacer les mots : "assurer la desserte de" par les mots : "stationner en
attente de clientèle dans". »
La parole est à M. le ministre, pour présenter l'amendement n° 458
rectifié.
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Cet amendement, relatif à l'activité de
conducteur et à la profession d'exploitant de taxi, a fait l'objet d'une large
concertation : je le dis à l'intention des sénateurs qui m'ont interrogé en
privé sur ce point !
En effet, j'ai mis en place, voilà un peu plus d'un an, lors de mon arrivée au
ministère de l'intérieur, une commission interministérielle qui permet aux
conducteurs et aux exploitants de taxi de trouver des interlocuteurs et de
faire progresser des dossiers les concernant et intéressant, par là même, les
usagers que sont les clients des taxis.
La profession de taxi est réglementée. Elle participe au service des
transports publics et est exercée, le plus souvent, sous le statut d'artisan
indépendant. Les 44 000 taxis sont titulaires d'une autorisation de
stationnement délivrée par les maires, après avis d'une commission
départementale en ce qui concerne les communes de plus de 20 000 habitants. Les
maires sont attachés à cette prérogative et entendent la conserver, afin de
pouvoir continuer, en fonction des situations et des possibilités d'emploi
locales, à attribuer ces autorisations.
L'intérêt d'une commune, qui rejoint celui des taxis, est en effet que le
nombre des autorisations n'augmente qu'à raison de la demande de transport et
que l'appréciation portée sur les possibilités d'emploi reste de la seule
responsabilité des maires.
Or un récent arrêt du Conseil d'Etat, en date du 6 juin 2001, est revenu sur
ce principe. Cet arrêt « Commune de Vannes contre Fédération nationale des
taxis indépendants » a établi un nouveau principe fondé sur le fait que la
desserte d'une gare dépasserait largement le cadre communal et permet désormais
aux taxis extérieurs à la commune d'assurer aussi cette desserte, ce qui fausse
l'appréciation économique portée par le maire lors de la délivrance des
autorisations de stationnement.
Selon ce principe, la desserte d'équipements de grandes villes tels que les
hôpitaux, les stades, les centres commerciaux, les universités ou les palais
des congrès pourrait être considérée comme excédant le cadre communal. Les
prévisions sur lesquelles repose l'évaluation du nombre de taxis pouvant
s'établir sur le territoire de la commune s'en trouveraient alors remises en
question.
Le dépassement du cadre communal remet en cause la logique de la loi du 20
janvier 1995, qui veut qu'un taxi doit exploiter l'autorisation dont il dispose
dans sa commune. Les représentants des taxis s'en sont émus, et c'est pourquoi
je propose au Sénat de modifier la loi du 20 janvier 1995 en insérant un
article 1er
bis
. Ce texte maintient l'obligation, pour les taxis, de
stationner dans leur commune, mais il leur permet aussi de stationner dans des
communes où ils auront fait l'objet d'une réservation préalable, dont les
conducteurs devront apporter la preuve en cas de contrôle, ainsi que dans
celles qui relèvent d'un service commun de taxis.
Je pense en effet qu'il faut encourager la passation, entre les maires de
plusieurs communes, d'accords permettant de créer un service commun de taxis.
Toutefois, cela passe par la négociation, la conclusion de ces accords
intercommunaux reposant sur l'initiative et la responsabilité des maires, et
non pas sur un bouleversement juridique des principes mis en oeuvre jusqu'à
présent.
M. le président.
La parole est à M. Schosteck, pour défendre le sous-amendement n° 730
rectifié.
M. Jean-Pierre Schosteck.
Ce sous-amendement vise à rendre plus précise la rédaction de l'amendement du
Gouvernement, qui ne nous semble pas de nature à mettre fin à certaines
pratiques litigieuses.
La formulation présentée par notre sous-amendement nous paraît devoir
permettre de réguler de façon harmonieuse l'activité de taxi, notamment en
mettant un terme au recours abusif au décret de sûreté de 1942 pour le
stationnement dans les cours de gare, qui est souvent source de conflits.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 458 rectifié et sur le
sous-amendement n° 730 rectifié ?
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
M. le ministre a exposé les raisons pour lesquelles le dépôt
de l'amendement n° 458 rectifié s'est révélé nécessaire. Celui-ci tend à
restaurer un aspect essentiel de la liberté communale que la jurisprudence
remet en cause.
Avant l'arrêt du Conseil d'Etat « Commune de Vannes contre Fédération
nationale des taxis indépendants », le maire était compétent pour fixer le
nombre des taxis admis à être exploités dans sa commune et pour attribuer les
autorisations de stationnement, ainsi que pour délimiter les zones de prise en
charge. Or l'arrêt en question enjoint à la ville de Vannes d'abroger un arrêté
municipal réservant aux seuls taxis de la commune le stationnement sur les
emplacements situés devant la gare de Vannes, au motif que la fonction de
desserte de cette gare dépasserait largement le cadre communal.
C'est donc là une remise en cause de la liberté de décision du maire dans un
domaine dont l'importance n'est pas négligeable. L'amendement du Gouvernement
tend à revenir à l'esprit de la loi de 1995, et c'est pourquoi nous y sommes
favorables, ainsi qu'au sous-amendement n° 730 rectifié, qui apporte une
précision utile et complète la disposition qui nous est soumise.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 730 rectifié ?
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Favorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 730 rectifié.
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
Je voterai bien sûr le sous-amendement présenté par M. Schosteck, mais je
voudrais, en tant qu'élu de Paris, obtenir au préalable une explication
complémentaire de la part de M. le ministre : le cas des gares a été évoqué,
mais qu'en est-il des aéroports ?
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Je crois que la même jurisprudence vaut pour les
aéroports et pour les gares. J'ai d'ailleurs également évoqué les stades et
d'autres grands équipements.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
La disposition présentée me semble intéressante.
Je m'interroge cependant sur la notion de réservation : s'agira-t-il d'une
réservation permanente ou les chauffeurs de taxi seront-ils tenus de solliciter
le maire au coup par coup, chaque fois qu'ils envisageront de stationner devant
la gare ? Dans la seconde hypothèse, cela ne risque-t-il pas d'entraîner des
démarches administratives quelque peu complexes, qui pourront présenter un
caractère dissuasif ?
Par ailleurs, dans certaines villes, des chauffeurs de taxi refusent des
clients se trouvant ou désirant se rendre dans des quartiers sensibles ou
dangereux. De même, en milieu rural, certaines zones écartées sont
difficilement desservies.
J'ai été sensibilisé à ce problème en tant que président de l'association
départementale des maires, car les représentants de la fédération
départementale des chauffeurs de taxi m'ont entretenu de ce sujet, ainsi que de
nombreux maires de communes rurales qui dénoncent de tels comportements. J'ose
espérer que l'évolution législative proposée sera de nature à faciliter la
satisfaction des besoins de la clientèle, mais je voulais attirer l'attention
du Sénat sur le fait que nous risquons de voir se développer des zones de
non-desserte, compte tenu de l'attitude de certains chauffeurs.
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Je confirme à M. Vasselle que la réservation
aura un caractère permanent. Sinon, le dispositif serait en effet une source de
tracasseries administratives, ce que nous voulons tous éviter.
Par ailleurs, toutes les discussions menées dans le cadre de la commission
interministérielle que j'ai souhaité mettre en place voilà un peu plus d'un an
me laissent espérer que les problèmes de desserte évoqués par M. Vasselle, qui
sont bien réels, pourront être surmontés. En effet, les professionnels, en
particulier la Fédération nationale des taxis indépendants, jouent parfaitement
le jeu, en fonction notamment des propositions que j'ai faites.
Je crois donc pouvoir vous rassurer, monsieur Vasselle. Des difficultés
pourront certes apparaître ici ou là, mais si le Sénat légifère dans le sens
préconisé par le Gouvernement, la situation s'améliorera considérablement.
M. Alain Vasselle.
Je vous remercie, monsieur le ministre.
M. le président.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 730 rectifié, accepté par la commission
et par le Gouvernement.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président.
Je constate que ce sous-amendement a été adopté à l'unanimité.
Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 458 rectifié, accepté par la
commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je constate que cet amendement a été adopté à l'unanimité.
Un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après
l'article 61.
L'amendement n° 459 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé
:
« Après l'article 61, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
« Au début du premier alinéa de l'article L. 5341-2 du code général des
collectivités territoriales, les mots : "Dans les six mois suivants sont
remplacés par les mots : "dans le délai d'un an suivant". »
La parole est à M. le ministre.
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Il s'agit de porter de six mois à un an le délai
pendant lequel un syndicat d'agglomération nouvelle peut être transformé en
communauté d'agglomération.
A l'usage, il est en effet apparu que le délai de six mois était trop court.
Cet amendement a donc pour objet de le prolonger, ce qui permettra de faciliter
les choses sur le terrain.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
La commission émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 459 rectifié, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je constate que cet amendement a été adopté à l'unanimité.
Un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après
l'article 61.
Division et article additionnels après l'article 61